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Société Archéologique du Finistère - SAF 1929 tome 56 - Pages 3 à 24
LA DESCENTE 
DES 
EN MESSIDOR AN III 
Le débarquement des Chouans sur la côte de Névez, en 
l'an III, fut un épisode de la descente de~ Anglo-émigrés à 
Quiberon (r ). Dès le 7 juillet 1795, le général Hoche tenait 
bloqués, dans la presqu'île, « ainsi que des rats», le corps 
expéditionnaire et les milliers de Chouans venus le rejoindre. 
Cette multitude peu disciplinée, concentrée sur un espace 
restrein t, devenait une gêne pour les opérations des Anglo
émigrés. On résolut donc de transporter les Chouans sur 
d'autres points de la côte pour opérer une diversion et, si 
possible, prendre à revers l'armée de Hoche. Cette diversion 
paraissait d'autant plus opportune que des renforts d'émigrés 
venaient d'Angleterre et que, d'autre part, Hoche avait appelé 
au camp de Sainte-Barbe les troupes de ligne jusque là dis
persées en Cornouaille et dans le Vannetais. Dans la nuit du 
22 au 23 messidor (II juillet), une division de Chouans fut 
débarquée à Pénerf, à l'est de la presqu'île de Rhuis. Le 
15 juillet, arrivait en rade de Quiberon le deuxième convoi 
d'émigrés, la division de Sombreuil, et, le même jour, s'elfec-
tuait, sous la protection de l'escadre anglaise, la descente de 
deux mille Chouans, sur la côte de Névez, près de l'estuaire 
de l'Aven. 
Quelle était à ce momen t la situation politique et militaire 
dans le district de Quimperlé ~ Depuis le début du printemps, 
les communes limitrophes du Morbihan, Arzano, Guilligo-
marc'h, Querrien et Scaër causaient des inquiétudes aux 
patriotes; des bandes armées rôdaient sans cesse sur la péri
phérie du district. Le 30 mai 1795, Bienvenu, procureur 
syndic, ne pouvait dissimuler ses alarmes à l'administration 
du Finistère. 
« La contagion gagne et tous nos cantons, à Cexception de 
Clohars et Moëlan, sont dangereusement menacés. L'esprit 
public y est désormais nul; la frayeur et la séduction ont 
opéré urie désorganisation entière des municipalités rurales. 
Les maires et officiers municipaux ne s'assemblent plus et 
d~clàrent hautement qu'ils ne rempliront désormais aucune 
fonction; que la défense leur en est expressément faite par 
lès 'brigands dont ils sont investis et qui leur font les menaces 
lés-plus efIrayantes. Encore une fois, Citoyens, notre mal 
devîent rapidement extrême si on n'en arrête promptement 
les progrès. Infailliblement, les mesures ordinaires seront 
inefficaces, Dans le moment, notre force armée est insuffi
sante pour fournir aux détachements et aux patrouilles. L'on 
vient de m'assurer que le chevalier de Tinténiac a été reconnu 
comme chef de ces hordes de brigands qui ont été à Penqué
leu en Querrien (1) )). 
(i) Archives du Finistère, L, Dist. de Quimperlé, correspondances 
relatives aux émigrés Bt chouans (liasse). Le manoir de Penquélen, en 
Querrien, appartenant à François-Hyacinthe Briant de Penquélen, émigré, 
fut vendu comme bien national, le 27 janvier 1794, et acquis par Cupil
lard, armurier à f,iuimperlé, qui y résidait en l'an III. 
A la nouvelle de la descente de Quiberon, la municipalité 
de Quimperlé, présidée par Vincent Bosc (1 ), maire, prit, dès 
le 28 juin, de concert avec le district, quelques mesures de 
police, peu rigoureuses, à l'égard des parents d'émigrés et des 
suspects: 
« Considérant que ceux qui ne se sont point montrés dans 
la Révolution ni fait aucun acte de civisme pourraient, dans 
ces moments de crise, se porter à des actions contraires au 
bien général; mais désirant n'être point dans le cas de 
mettre sous la surveillance de la municipalité ni en maison 
d'arrêt les individus, pères, mères ou parents d'émigrés tou
jours présumés soupirer après le rétablissement de l'ancien 
reglme ; 
« Arrête d'enjoindre à cette sorte d'individus de se tenir 
tranquilles; de ne poin t se rassembler ni se voir sans motifs 
fondés ni sortir de la ville sans permission, sous peine d'être 
suspects de comploter contre les intérêts de la République et 
d'être, par mesure de sûreté, détenus en maison d'arrêt; 
« Arrête, en outre, que tous citoyens de Quimperlé seront 
tenus de se munir d'une carte civique pour sortir des limites 
de la ville. Les dites cartes seront délivrées à la municipalité, 
à chacun des citoyens qui en requerront et qui seront jugés 
dignes de les, obtenir, par l'officier municipal qui sera de 
surveillance. Cette carte sera remise au poste d'entrée, au 
retour (2) ». 
Le 29 juin, le district ordonna la mise en arrestation de 
quelques prêtres réfractaires: Rannou, recteur de Tréméven, 
(l) Bosc (Louis-Vincent), chimrgien, c3pitaine de la milice bour
geoise et membre de la Communauté de Quimperlé en t 789 ; député de 
Quimperlé aux Etats de Bretagne, en janvier-février t 789, et à la fédé
ration de Pontivy, en lévrier i790 ; membre du directoire du district, 
de i 790 il i 79~; président de l'Administration cantonale de i 797 
à i800. 
Guillou, recteur de Mellac, Boezédan, recteu r de Baye, 
Le Moan, vicaire de Cadol et Forget, vicaire de Quimperlé. 
Dès le 27 juin, le chevalier de La Marche (1: 1 (nous n'avons 
pu identifier complètement ce personnage, il · s'agissait 
. peut-être d'un n eveu de l'évêque de Léon) était en arresta
tion à Quimperlé. Il avait été saisi par la colonne mobile de 
Quimperlé, dans les environs du Faouët. Le' chevalier de 
Jacquelot de Boisrouvray, gendre de l'administrateur Froge rais, était également détenu pour avoir entretenu une corres
pondance avec les Damphernet, père et fils, réputés émigrés 
mais qui chouannaient (2) . 
. Malheureusement, le district de Quimperlé se trouvait à ce 
moment totalement dégarni de troupes régulières. Depuis le 
début de 1795, Quimperlé avait eu une garnison permanente 
d'environ 200 fantassins casernés en majeure partie aux 
Ursulines. De plus, un petit détachement de cavaliers four
nissait quotidiennement une escorte au courrier de la malle. 
Dès janvier, le district eut une compagnie de garde territoriale 
appelée aussi colonne mobile de Quimperlé, dont la mission 
spéciale était « de poursuivre les brigands dans leurs repaires 
les plus secrets ))~ Cette colonne mobile, formée d'une élite 
( réunissant aux vertus républicaines une connaissance par
faite des localités )), était commandée par un noble, M. de 
Chefdubois de Kerguyomar, ancien officier de marine, rallié 
à la République. 
(-1) Il s'agit vraisemblablement de Pierre-jacques- Salomon de La 
Marche qui émigra. Son fils, Louis-Joseph-Salomon, né il Quimperlé, 
âgé de 21 ans, épousa, le -13 août 1811, Marie-Louise Le Clnnche. A 
ce moment, .le père P.-J.-S. de La Marche, est dit « .abs~nt outremer, 
depuis plus de 15 ans, sans avoir donné de ses nouvelles ». Arch municip . 
de Quimperlé. 
(2) Arch. municip, de Qnimperlé, Reg. des délib. 9 et 17 thermidor 
an III. 
La garde nationale sédentaire concourait pour moitié au 
service de la place, soit: un corps de garde, près de rHôtel
de- Ville, sur la Place de la Fédération et qua tre petits postes 
de chacun six hommes, aux entrées de la ville: au Gorréquer; 
rue Ellé, près le pont, à la maison Provençal; rue Mellac, à 
l'embranchement des chemins de Quimper et de Pont-Aven; 
à l'entrée de la rue de Clohars. La garnison de Quimperlé 
fournissait un détachement au Faouët et parfois à Pont-Scorff, 
sans compter des p atrouilles fréquentes dans les communes 
du district. Enfin, des postes de canonniers gardes-côtes 
avaient été établis au Pouldu, à Brigneau, Riec et Raguenez . 
Ce~ canonniers se trouvaient sous les ordres d'un comman
dant temporaire, le quimperlois Granval, fils, qui avait ra
mené des Antilles les débris du 3' Bataillon du Finistère, 
presque anéanti à Saint- Domingue, lors de la révolte des 
nègres, en juin 1793 (1 ). 
Toute la force armée du district relevait du général 
Meunier, un des meilleurs auxiliaires du général Hoche. Dès 
la descente de Quiberon, les troupes régulières furent appelées 
au camp de Hoche et la colonne mobile même de Quimperlé 
fut lancée à la poursuite des Chouans du Morbihan. C'est 
de Landévant que le capitaine Chefdubois informe ses 
concitoyens de la mort du fameux chef de Chouans, 
le ci-devant chevalier de Tinténiac, fort connu à Quim
perlé. 
En prévision d'une descente des Anglo - émigrés, 
un camp de grenadiers avait été établi à Gui
del (2), près du Pouldu et des plages mêmes où s'était effec-
(i) Arch. municip. de Quimperlé, Reg. des délib. i7 messidor an III. 
Arch. du Finistère, F. 1. Arrêlé de Guezno, 7 floréal an III. 
(2) Malheureusement il n'y avait pas de bac au Pouldu. Il en existait 
tué le débarquement des Anglais, en 1746. Mais, le 30 juin, 
ces grenadiers étaient en marche vers Auray. Cependant, les 
band es de Chouans avaient redoublé d'activité et s'étaient 
enhardies sur les confins du district. La sûreté des patriotes 
était si peu ga rantie, même dans les petites villes, que, le 
4 juillet, Hoche passant à Hennebont engagea l'administra
tion de ce district à transférer momentanément son siège à 
Lorien t. Le l a juillet, il y eut un grand rassemblement de 
brigands à Coray; le 14 juillet, des Chouans festoyaient à 
Ketsalaün et à Tréva ré où ils avaient des dépôts de munitions. 
A la même date, une bande de rebelles armés se montrait à 
Kernével et à Kermadéoua. Le jour même de la descente de 
Névez, un détachement de la garde nationale de Quimperlé 
effectuait des patrouilles à Scaër et à Trévaré. 
La défense du district de Quimperlé se trouvait donc mo
mentanément désorganisée, au milieu de juillet 1795, et les 
Chouans n·ignoraient pas cette circonstance favorable à leur 
entreprise. 
Dans la matinée du 10 juillet, Martret, lieutenant des 
douanes, écrivait du poste de Kermorousoc'h, en Moëlan, aux 
administrateurs du district de Quimperlé: 
(t Citoyens, la troupe n'est pas encore arrivée sur nos pa
rages de Moëlan. Je me suis informé près d'un canonnier ins
tructeur de la batterie de Brigneau et il m'a dit qu'il devait 
arriver hier ou aujourd'hui une compagnie au Pouldu. L'es
cad re ne parut pas hier sur nos côtes; cependant, ce matin, 
de Saint-Maurice, appartenant au sieur Mathurin Merrien. A la demande 
du gélléralHoche, Secondat, ordonnateur de la Marine, et Dalbarade, 
commandant d'armes à Lorient, établirent, le i6 juin i796, un bac au 
Pouldu pour le passage des troupes et des munitions. Arch. municip. de 
Quimperlé, Reg. des délib. 28 prairial an IV. 
en quittant notre veillée, nous avons aperçu un corsaire vé-
ritablemen t anglais qui croisait au ras de terre, vis-à-vis du 
pavillon de Kerabat, paraissant prendre des marques et il 
nous a été rapporté qu'il sondait. 
« Sa croisière est depuis les Glénans jusqu'aux environs de 
Groix et il y a tout à croire que c'est un espion. Je suis em
ployé, citoyens, depuis q81 (V. S.) sur ces parages et, con
naissant la côte depuis Concarneau jusqu'au Pouldu, je sais 
qu'il y a beaucoup d'anses à pouvoir atterrir sans craindre 
les batteries. Mon avis serait que vous envoyiez un commis
saire pour prendre connaissance de toutes les anses dépen
dantes de votre district, lesquelles commencent depuis 
Raguenez en Névez. On pourrait ainsi former des patrouilles 
très fréquemment sur ces parages, de crainte d'une 
descen te (1) )1. 
Martret ajoutait en post-scriptum: « Depuis huit heures 
l'escadre anglaise a paru sur nos côtes. Elle est actuellement 
à quatre lieues de terre, alignée entre les Glénans et Groix, 
devant Trégunc et Névez. Le citoyen Mauduit YOUS dira le 
reste li, 
Dès le lendemain, les administrateurs du district recom
mandèrent la plus grande vigilance aux municipalités de 
Clohars, Moélan, Riec et Névez et aux détachements de ca
nonniers gardes-côtes. L'espril public était excellent dans ces 
communes maritimes, particulièremen t à Clohars età Moélan. 
Ici, l'exemple de M. de Mauduil avait produit les plus heu
reux effets. De Mauduit, noble, ancien officier du régiment 
de Royal-Marine, fut, au dire de Cambry, un des sages de la 
Révolution (2) . Vingt fois sollicité par ses amis et ses parents 
il refusa d'émigrer et vécut paisible sur ses terres de Kerjégu 
(i ) Arch. du Finistère, L. Dislrict de Quimperlé, correspondances 
relatives aux émigrés et Chouans (liasse) . 
et de Plaçamen, toujours très loyalement sou mis aux lois du 
nouveau régime. Maintes fois, de Mauduit prêta son appui 
aux administrateurs républicains, engageant les paysans à 
payer scrupuleusement leurs impôts . 
. Quand les Anglo-émigrés menacèren t nos côtes, de. Mau
duit, qui n'était point suspect, assura les administrateurs du 
district de tout son dévouement. Le 1 [juillet, il leur écrivait: 
« Nous ne doulons nullement de la bonne volonté de nos 
Moélanais et nous osons nous flatt er que vous serez contents 
de notre commune. Quant à nous, vous connaissez notre 
façon de . penset:, depuis longtemps : elle ne se démentira 
jamais (1) )). 
Dans l'après-midi du 15 juillet, Le Franc, curé constitu
tionnel de Moélan, adressait, au nom de sa municipalité, ce 
court billet aux administrateurs de Quimperlé : « Citoyens, 
nos ennemis sont descendus à terre à BéJon, en notre com
mune. Le tocsin sonne. Nous vous demandons bien vile du 
secou rs ». 
Quelques heures plus tard, le citoyen Decourbes (2), maire, 
et Aumont (3), officier municipal de Pont-Aven, écrivaient 
aux mêmes administrateurs: 
« Aujou rd'hui à trois heures et demie du soir, nous avons 
reçu d'un officier municipal de Névez l'avis que les Anglais 
tentaient une descente sur la côle de Névez. A l'instant, nous 
. (i ) Arch. du Finistère: Ibid. 
(2) Oecourbes (Hilaire-Pierre), dit de Kervignac, (:1.750-:1.800) avocat 
puis notaire à Ponl-Aven. Son frère aîné, Vincent-Julien, maire de 
Ponl-Aven en i 790, fut président du Tribunal du district de Quin.
perlé de 090 à 1795. Leur père, Jean-Julien, était également avocat à 
Pont-Aven. en i 789. 
(3) Aumont (Jean-Marie) . ci-devant employé aux devoirs de Bretagne, 
élecleur de la sénéchaussée de Concarneau à l'assemblée d'arrondisse
nous y sommes rendus avec ce que nous avons pu armer de 
nos concitoyens. Les citoyens de Névez, réunis au son du 
tocsin, s'étaient déjà rendus au fort de Raguenez où l'ennemi 
avait d'abord paru vouloir effectuer sa descente. Mais re
poussé par l'artillerie de ce petit fort, il a abandonné son 
premier projet et est descendu à sept heures et demie dans 
la petite anse de Kervuen, située entre les villages d~ Keran
glas et de Kerhascoët, à distance égale des batteries de Riec 
et de Raguenez et hors de la portée des deux. Vingt-six 
chasse-marée oot été employés à ce débarquement qui s'est 
fait sous la protection d'une corvette et d'une goélette. 
Sans armes ni munitions de guerre quelconques, il n'a pas 
été en notre pouvoir d'èmpêcher cette descente, encore moins 
d'empêcher l'ennemi de se répandre dans nos campaghes 
dont il sera, dans vingt-quatre heures, le maître, si vous ne 
nous envoyez au plus tôt des forces suffisantes et capables de 
faire tête à deux mille hom mes, nombre auquel nous croyons 
devoir faire monter le débarquement. 
« Nous rentrons chez nous, à dix heures du soir, et notre 
premier soin est de vous dépêcher un de nous pour 
vous instruire de l'état des choses, solliciter de 
prompts secours et prendre des ordres)J. 
Des estafettes transmirent, dans la nuit même, ' la 
nou velle de la descente à Lorient, où se trouvaient 
les r~présentants du peuple Guezno et Guel'meu.r, à 
Rosporden (1), Concarneau et Quimper (2) . Des secours 
(1.) Le maire de Rosporden, Le Goarant, était absent. - Le Goarant, 
[ut, à l'occasion du débarquement des Ch:lUans à Névez, dénoncé aux 
administrateurs du dépa rtement comme n'étant pas à son poste le ~8 mes sidor. Le ~9, il était rempl  lc.\ par un commissaire provisoire. Le L cr ther
midor, ses explications orales il Quimper n'aboutirent à rien. Enfin, le 
5 thermidor, il [ut rétabli par le département dans sa charge, cs: vu 
qu'il n'y avait rien de dé["vorable à lui reprochtlr Il. (Arch. du Finis- . 
tère, L. 26, [0 184, d'après UOl' notecommuniquée par M.l'abbé Toulemont). 
allaient venir, dan s l'après-midi du lendemain, de Lorient et 
d'Hennebont, mais trop tard pour cerner les Chouans. 
Dans la matinée du 16 juillet, la municipalité de Lorient 
écrivait au district de Quimperlé: « Vous êtes en danger et 
nous volons à votre secours. Nos grenadiers, chasseurs et ca
nonniers vont partir pour se rendre ch ez vous. Vous pourrez, 
nou s le pensons du moins, renforcer la garnison du Faouët 
où nous avons des commissaires pour nous avoir des grains 
dont nous avons si grand besoin. Nous espérons que tous nos 
efforts réunis nous procureront incessa mm ent la tranquillité ». 
Au même instan t Le Mir, président du district d'Hennebont, 
écrivait: « Nous vous annonçons que nos compagnies de 
grenadiers, chasseurs et canonniers partent pour vous aller 
prêter secours avec 150 hommes de troupes de ligne ». De 
leur côté, les Conventionnels Guezno et Guermeur annon
çaient de prompts renforts : « Le général Hoche mande (de 
Vannes où il se trouvait le matin du 16 juillet) qu'il sera à 
Lorien t ou à Quimperlé demain avec des forces '). Mais préci
sément, le 16 juillet, les Anglo-émigrés livraient combat à 
Klingler, commandant la lorce armée, « de faire battre la générale à 
Quimperà l'etM de relever, par la garde nat,ionale. la troupe soliée d : 
service qu'il fera pa rtir en plus grande quantité possible ; de laire venir, 
aux mêmes fins, les troupes soldées en garnison à Pont-Croix et à 
Vllle-sur-Aon El (Châteaulin). Pour les remplacer, la garde nationale des 
di~es communes restera en armes jusqu'à nouvel ordre, ainsi ljue celle 
de Pont-l'Abbé ». (Arcb. du Finistère, L. 26, 1 ° 183, note de M. l'abbé 
Toulemont). 
Douarnenez lut également alertée. Le 28 messidor, au soir, la muni
cipalité prit des mesures pour parer aux circonstances et demanda des 
armes et des muniti ons à Quimper. « La garde nationaleile la commune 
n'est composée, en majeure partie, que de lonctionnaires publics qui se 
doivent à leur poste et la commune se trouve fronti ère maritime suscep
tible d'être envahie par l'ennemi. La gard e nationale n'a que 6 fu sils, en 
mauvais état; il Y a bien, dans la com mune, quelques lusils de chasse 
mais point de munitions ». (Arch. municip. de Douarnenez, Reg. des 
l'armée de Hoche. Le général en chef détacha néanmoins de 
sa réserve le général Meunier qui se rendit à Quimperlé avec 
des forces imposantes. Le 16, au soir, les administrateurs du 
district d'Hennebont écrivaient de Lorient: « Nous apprenons 
qu'une colonne de 1 200 hommes doit vous être arrivée d'Hen
nebont. Depuis deux heures, ce matin, le canon ronfle à 
Quiberon. Puissiez-vous rassembler vos paysans et tomber 
sur les débarqués qui, suivant les rapports, doivent com
prendre un certain nombre de femmes et d'enfants. Il est 
intéressant de les empêcher de pénétrer dans l'intérieur (1) ». 
Cependant, le 16 juillet, dès l'aube, les Chouans, qui occu
paient les deux rives de l'Aven, se dirigèrent sur Pont-Aven. 
« A six heures du matin, écrit le maire Decourbes, une garde 
d'observation que nous avions placée en dehors de la com
mune vint nous dire que 4000 à 5000 hommes marchaient 
sur Pont-Aven et q~l'ils n'en étaient qu'à un tiers de lieue. 
Nous délibérions sur le parti à prendre, lorsque nous 
apprîmes que cette horde n'était qu'à quatre portées de fusil 
de nous et qu'elle y venait avec l'intention de nous forcer à 
prendre des cocardes blanches, de souscrire un serment de 
fidélité à la royauté et à la catholicité, de lui livrer tous nos 
papiers pour être brûlés, de nous présenter des haches pour 
abattre l'arbre de la liberté, enfin, de faire une proclamation 
à nos concitoyens tendante à leur faire prendre la cocarde 
blanche et à prêter le même serment qu'ils se proposaient de 
nous demander; qu'à ces conditions seules, nous aurions la 
Vie sauve. 
« Sans armes, sans munitions, sans moyens de résistance 
quelconques, pour leur épargner un nouveau crime et ména-
ger l'existence de plusieurs citoyens dont la vie pouvait être 
utile à la République, nous avons pris le parti de nous retirer. 
Ils nous ont fait chercher à plusieurs reprises, mais désespé
rant enfin de nous trouver, après avoir placé des postes sur 
toutes les routes et défilés aboutissant à Pont-Aven, ils se sont 
répandus dans les maisons de nos concitoyens auxquels ils 
ont demandé à boire et à manger ». 
A Quimperlé, dès l'aube aussi, la générale fut battue et la 
garde nationale assemblée. Garde peu nombreuse. car la 
veille on en avait prélevé une compagnie lancée à la poursuite 
des Chouans qui infestaient la commune de Scaër et cette 
troupe n'était pas encore rentrée. D'autre part, depuis quatre 
ans, Quimperlé n'avait cessé de fournir des hommes aux 
armées de la Révolution; la proportion des volontaires y 
avait été plus forte qu'en aucune autre ville du Finistère: 
« Soumise aux lois, dit Cambry, témoin oculaire, Quimperlé 
fit en toutes circonstances les plus généreux sacrifices à la 
patrie: habillements, vivres, souliers, elle fit tout partir 
e~ poste pour notre armée près de Granville. Ses pères de 
familles ont trois fois combattu dans le Morbihan. A l'époque 
Où. l'Anglais déposa sur la côte quelques émigrés et deux ou 
trois mille paysans, on doit rendre justice au calme, au 
dévouement, au sang-froid des autorités constituées. La ville 
était déserte (de troupes de garnison) ; pas un homme ne la 
défendait. On vint annoncer que l'ennemi marchait sur Quim
perlé: pas un mouvement de faiblesse ne se manifesta. Le 
service se fit avec exactitude; pas un individu ne proposa de 
se retirer (1) ». 
La gardenationale asssemblée le 16 juillet pouvait compter 
200 hommes, pour la plupart chefs de familles . Cent hommes 
(i) Cambry, op. cit., p. 365. 
pris parmi les plus vàlides constituèrent le détachement des
tiné à Pont-Aven; le reste, demeurant en armes, devait parer 
à l'éventualité d'une attaque inopinée des Chouans. Vers 
sept heures du matin, le détachement commandé par Joseph 
Ganteaume (1 ), lieutenant de gendarmerie, prit la route de 
Pont-Aven, Ganteaume marchait en tête, encadré de cinq 
chasseurs à cheval et, peu avant midi, on se heurta à une 
avant-garde de Chouans (2). 
« Pendant que les rebelles se rafraîchissaient a commencé 
l'attaque du détachement venu de Quimperlé. A la première 
décharge, ils ont crié aux armes et à la trahison. Ils allaient 
s'en venger sur notre commune, lorsque leur chef (Jean Jan), 
à qui l'on a annoncé que le premier détachement de Quim-
perlé ' était suivi d'un train d'artillerie, a donné l'ordre de 
partir et d'attaquer en route les détachements de Quimperlé, 
s'ils tentaient de s'opposer à leur passage ». 
Après avoir pris des guides à Pont-Aven, ils se dirigèrent 
vers la Laïta. Pendant trois quarts d'heure, Ganteaume tint 
tête à des forces vipgt fois supérieures en nombre. Mais après 
avoir fait exécuter un feu de file des mieux soutenus, il vit 
tomber à ses côtés un de ses chasseurs mortellement atteint. 
Alors, il s'aperçut de l'impossibilité de soutenir l'attaque avec · 
si peu de monde. Affectant de changer seulement ses disposi
tions de combat, il continua de faire battre la charge tout en 
(1) Ganteaume (Joseph-Platon), depuis longtemp~ brigadier de gendar- : 
merie à Quimperlé, prenait en i 783, au baptême de s 'a fille, la qualité 
d'écuyer. Il mérita par son zèle, sous l'ancien régime, les éloges de la 
municipalité de Quimperlé et plus encore ceux de l'administration 
révolutionnaire qui lui fit donner le grade de lieutenant de gendarmerie. 
Les prêtres réfractaires, les émigrés et Chouans lui avaient voué une 
haine mortelle. . 
préparant sa retraite. Tandis que les Chouans, appréhendant 
l'arrivée annoncée des renforts patriotes, se hâtaient de péné
trer dans le Morbihan, les gardes nationaux rentraient à peu 
près sains et saufs à Quimperlé (1). 
« Les troupes descendues à Névez étaient en très grande 
partie composées de Chouans parlant le breton de Vannes et 
disant être des paroisses de Guern, Pluméliau, Bubry et autres 
circonvoisines. Tous étaient vêtus d'un gilet rouge et avaient 
des armes en bon état. Ils ont dit, ici, qu'ils étaient du nom
bre des royalistes chouans renfermés dans Quiberon et que, 
ne pouvant retourner chez eux par terre, ils avaient obtenu 
de l'armée anglaise 24 chasse-marée, u ne corvette et deux 
canonnières pour pratiquer leur débarquement au premier 
endroit où ils trou veraien t jour à le faire; que leurs ordres por
taient de ne faire mal à personne, fors aux municipalités 
patrIotes, aux pretres assermentes, aux lDstltuteurs, aux 
juges de paix et aux acquéreurs de biens nationaux. 
~( Pendant le peu d'heures qu'ils ont passé ici, leurs chefs 
leur ont fait observer une discipline assez exacte, à l'excep-
tion de quelques petits larcins partiels pouvant porter ensem-
ble , à 700 ou 8001. Nous n'avons pas appris qu'ils se soient 
(i) Le 5 thermidor an III (23 juillet i795), l'Administration centrale 
du Finistère félicitait de leur courage les citoyens de Quimperlé, dans 
les termes suivants qui sont comme ceux d'une citation à l'ordre du 
Jour: _ 
« Votre condllite toujours soutenue depuis la Révolution, votre zèle, 
votre surveillance depuis que vous êtes entourés de brigands, votre 
courage qui vous a fait voler dernièrement au-devant de vos ennemis, 
votre intrépidité à les attaquer en nombre très inférieur et la gloi re que 
vous avez acquise par cet acte de bravoure méritent de notre part -les 
plus justes éloges. La clef, le bras droit du Finistère, vous avez digne
ment rempli les devoirs de citoyens, de républicains et de vrais soldats 
de la Patrie. Nous ferons mention honorable de vous au Comité - de 
Salul public 1). (Arch. du Finistère L. 48, f
40. Note deM. l'abbé 
livrés au pillage ( 1). Ils ont tué un citoyen que l'on dit être 
un tanneur de Quimperlé et que nous engageons sa famille 
à venir prendre ou du moins à le faire reconnaître. Ils nous 
ont tué de plu s un hu ssard pour leq'uel nous vous prions de 
nous envoyer un com missaire qui nous a ide à constater qui il 
est. De leur part, il y a eu également un Chouan de tué. S'il 
s'en trouve d 'autres, nous vous en instruirons. 
( Par une méprise impardonn able, le détachement de Con
carneau , d'autres disent celui qui avait passé de Riec à Névez, 
a grièvement blessé ·d'un coup de fu sil et de plusieurs coups 
de sabre le fils du citoyen Le Pennec (2) qui s'écartait dans la 
campagne. Il y au rait peut-être encore moyen de sauver la 
vie de cet enfant, si nous avions quelque officier de santé sur 
les lieux. Nous j oignons nos prières à celles du citoyen Le 
Pennec pour vous engager à nous envoyer sur-le-champ un 
de vos offi ciers de santé. Nous nous persuadons que le citoyen 
Bosc ou Lemoine (3) ne refu seront pas de prêter leurs soins 
(1.j Lo 1.3 brumaire an IV (f!, novembre 1.795), l'Administration cen
Irale dn département accorde une indemnité de 6.000 1. au citoyen 
B ondehen, instituteur au Trévoux, qui a fait constater par le juge de 
paix de Bannalec les dégâts rails chez lui, le 28 messidor an III (i 6 juil
let 1.795), par les Chouans qui débarquèrent à cette ép9que sur la com mune de Névez. « Le 28 messidor, ils passèrent au bourg du Trévoux ; 
ils y pillèrent le citoyen Boudeben, lui burent une barrique de cidre 
logée la veille, lui enlevèrent 2 fusils, 2 pistolets d'arçon, 2 de poche, 
un habit neuf de gar de national et autres effets, enfin 2500 1. en assi gnats n. (Arch. du Finistère, registre L. 27, [0 :\'of!" note de M. l'abbé 
Toulemont), 
(2) Le Pennee (Françoi s), notaire royal et apostolique à Pont-Aven, 
greffier ordinaire du corps politique de la paroisse de Nizon en 1.789 ; 
électeur du canton de Pont-Aven aux assemblées du département et du 
district en 1.790 ; ad ministrateur du district de Quimperlé en l,791. -
Son frère, Michel Le Pennee était ma rchand de drap au bourg de M oëlan 
et, en 1. 789, lieutenant du guet de cette paroisse. Arch. du Finistère, 
Sie B. cahiers des paroisses de Nizon et M oëlan. 
(3) Lemoine (François-Marie-Anne), médecin de l'Hôpital de Quim
pour réparer la méprise que nos troupes ont commise et sau
ver un citoyen à l'Etat. 
« Ils nous reste à vous observer que nos forts étant détruits 
ou désarmés, nous nous voyons journellement exposés à de 
nOu velles incursions. 
« Ils ont forcé quatre citoyens de notre commune à les 
sUI vre et leur servir de guides. A leur ret01: r, ce matin (17 j uil-
let ), ils nou s ont rapporté qu'ils ont réellement pris la rou:e 
qui mène dans les paroisses où ils sont. domiciliés et que, 
dans peu, 5,000 h. passeraient encore ici. Nous pensons que 
le rapport de notre garde d'observation est un peu exagéré, 
mais tout nous porte à croire qu'ils étaient au nombre de 
trois mille, et n'en doutez pas. Tels sont les détails que nous 
pouvons vous donner, quant à présent. S'il en passait d'autres 
à notre connaissance, nous vous les transmettrons succes
sivement (1). 
« P. S. En partant d'ici, ils ont laissé à la femme du 
citoyen Aumont un exemplaire en placard d'une proclama
tion du comte de Puisaye que nous vous ferons passer si vous 
n'en avez aucun. Le citoyen Le Gorgeu nous a conduit un 
pilote français, pris à bord d'un de nos corsaires, prisonnier 
en Angleterre d'où on l'a forcé de partir pour entrer dans 
(i ) Trois leUres du district de Quimperlé nous donnent divers 
détails sur l'affaire de Névez. Elles sont tou tes du 28 rn p.ssidor 
an 11[ (i6 juillet i795). Dans la première, écrite au district du Faouet, 
nous lisons: « Ce matin, la colonne mobile et la garde territoriale ont 
attaqué les brigands dans Pont-Aven. Ces derniers ont perdu 30 hom
mes, les républicains, un seul. Nous n'étions que 80 contre i500 . Nous 
n'étions pas sans inquiétudes : Lorient ne pouvait nous donner du 
secours, les bataillons du camp de Guidel ne paraissaient pas, lorsque, il. 
3 heures, le général Meunier nous a conduit f500 hommes. Nous som
mes tranquilles » Au général Hoche, le district signale d'autres faits: 
(c Les ennemis ont descendu près de Raguenez, forl dont ils se sont 
emparés. On les suppose au nombre de 6.000. On nous assure que le 
l'armée royale. Il a déserté à son débarquement sur nos 
côtes. Nou s vou s l'envoyons pour entendre son rapport sur la 
force de L~rmée débarqu ée qu'il dit n'être que de 1800 hom
mes . ») 
Nous avons vu plus haut qu'un garde national, tanneur 
à Quimperlé, était tombé à Pont-Aven, victime des Chouans. 
Ce citoyen, père de famille, s'appelait Mathurin Quillien. On 
ne connut les circonstances de sa mort qu e quinze jours plus 
tard. Voici, in-extenso, la relation qui en fut faite par la 
municipalité de Pont·Aven. 
Poul-Aven, 1 2 thermidor, an III \30 juillelI795). 
La municipalité de Pont-Aven 
à la municipalité de Quimperlé : Salut! 
Ci toyens collègues, 
Vous nous demandez des renseignements précis sur les 
causes et les circonstances de la mort d'un de vos con_ 
citoyens, Mathurin Quillien, fusillé dans notre commune, 
lors de son invasion par les Chouans, dans la matinée du 
28 messidor dernier. Si notre rapport du 29 à l'Administra
tion n'en a pas fait mention, c'est que nous ignorions alors 
que la fermeté de cet intrépide r épublicain avait causé sa 
mort; et si nous ne vous l'avons pas fait connaître plus tôt, 
c'est qu'il nous manquait des renseignements certains que 
nous avons r eçus depuis. 
Au district d'Hennebont (à Lorient), la lroisième lellre, écrite à :l.0! 
heures du soir, ne parle plus de 30 brigands tués, mais se coulente de· 
dire: « Nos canonniers onl tué un chouan et onl fait deux prisonniers. Lès' 
Chouans se sont approchés jusqu' il une demi-Ueue de Quimperlé. Il est 
malheureux qu'on n'ait pu leur couper les routes du Morbihan, mais on 
les poursuivra ). Arch. du Finistère, registre L. 27, fo :1.04. Notes de 
Aujourd'hui que nous sommes assurés du fait, aujourd'hui 
que nous savons très positivement que Quillien vivrait 
encore s'il avait montré moins d'attachement à la Républi
que et à son gouvernement actuel, nous nou') hâtons de vous 
apprendre q,ue, dans la traversée de Rosbras à Pont-Aven, 
ce brave homme, ayant perdu son détachement de vue et le 
supposant à Pont-Aven où il savait qu'il devait se rendre, 
s'y rendit lui-même directement mais par une route diffé
rente de celle qu'avait prise le détachement et qu'à son 
arrivée dans notre commune, déjà envahie par les Chouans, 
ceux-ci le saisirent, le désarmèrent et lui énjoignirent de 
crier : « Vivent le roi et la religion catholique 'i>; A quoi 
Quillien répondit qu'il ne reconnaissait aujourd'hui pour un 
Français d'autre cri que celui d~ « Vive la République >l. 
En vain lui observa-t-on que son refus allait lui coûter 
cher. Il persista toujours dans sa première réponse, en sup
pliant cependant de ne pas lui ôter la vie, attendu qu'il avait 
une femme et quatre enfants en bas-âge qui ne vivaient que 
du produit de son travail. Cette dernière observation parut 
ébranler ses bourreaux qui le conduisiren t à leur chef pour 
décider de son sort. Ce dernier, connu parmi eux sous le 
nom de dom Jean (Jean Jan) (1), n'ayant pu obtenir de 
Quillien d'autre réponse que celle-ci: « Vous ferez de moi ce 
que vous voudrez, mais je suis républicain et veux mourir 
républicain 'i>, ordonna de le mener à un écart et de l'y fusil
ler, sur-le-champ, ordre qui ne fut que trop promptement 
exécuté. Ainsi finit ce brave républicain. 
Vous direz, s'il vous plat t, à sa famille dont nous parta-
(1) Le che! des Chouans de Névez nous est connu par la déclaration 
de Louis-René-Claude Ducouédic, ex-procureur syndic de la Commis
sion administrative du Finistère, en date du 13 septembre 1795, dénon
çant des Chouans et disant: « Jean Jan, chef du canton de Melrand, 
réside en ce bourg avec Duclos prêtre réfractaire; il a pour capitaine le 
nommé André, cultivateur de Bubry, et le fils de Lanven, maire de 
Guern, demeurant au village de Keringar. Il commandait la descente des 
geons bien sincèrement la perte, que nous l'avons fait inhu
mer avec sa chemise et son pantalon, les seuls vêtements que 
lui aient laissés les Ohouans. 
Salut et fraternité . 
Decourbes, maire; F. P. Maurice, agent national, 
P. Kersulec, Yves André, T. Limbourg, off. municipaux (i). 
Les troupes commandées par le général Meunier n'arri
vèrent à Quimperlé que dans l'après-midi du 16 juillet, à 
l'heure même où y rentrait le détachement commandé par 
Ganteaume. Il ne semble pas .que le général Meunier se soit 
mis immédiatement à la poursuite des Chouans. La majeure 
partie de ses soldats étaient exténués par les marches forcées 
du jour et de la veille. Trop prudent d'ailleurs pour entre
prendre, à la nuit tombante, une opération de grande enver
gure sans avoir préalablement exploré la région envahie, il se 
borna à envoyer quelques patrouilles du côté de Baye. Cepen
dant, à celte heure, le gros de la division des Chouans pas
sait l'ElIé; l'arrière-garde demeura sur la rive droite jus
qu'au lendemain matin. Le 17 juillet, en effet, les administra
teurs du district écrivaient au département: « L'ennemi s'est 
avancé jusqu'à Quimperlé. Il a passé la nuit dans les cam-
La chouannerie, Quimper, 1912, p. 80 et sqq. Au directoire du dis
trict de Quimperlé qui lui avait adressé le texte de cette déclaration, 
l'Administration centrale du département écrivait, le 6 vendémiaire 
an IV : « Quelles sont les suites que vous avez données aux déclarations 
de OucouéJic sur les différentes caches des Chouans? Oucouédic peut 
être un homme à ménager, mais néanmoins il mérite la plus grande , 
surveillance. L'Administration ne peut, quant à présent, rien prononcer 
sur son affaire». Arch. du Finistère, registre L 148, fO 41.. Note de 
M. l'abbé Toulemon!. 
pagnes voisines de notre commune, sans qu'aucun cultiva teur nous ait fait le moindre rapport, tant la terreur s'est 
répandue partout. » A la pointe du jour, les patriotes, en 
nombre cette fois, se lancèrent vers Riec, Moëlan et Clohars à 
la recherche des rebelles, tandis que ceux-ci pressaient leur 
marche dans la direction d'Arzano et Plouay. Les mêmes 
administrateurs disaient, le 19 juillet: a La colonne du 
général Meunier poursuit toujours les Chouans. Il est à crain
dre qu'ils se soient disséminés et, par là, soustraits aux pour
suites de ce général)) (1). 
Le 17 juillet, au matin, il n'y avait pas un soldat sur la 
côte entre Raguenez et le Pouldu. « La batterie de Riec, gar
nie de 5 canons est entièrement abandonnée. 'Le gardien de 
ce poste, resté seul, a fermé la porte et s'est retiré chez lui )l. 
Enfin, le 17, au soir, quelques troupes, dont une compagnie 
d'artillerie, furent réparties ~ur la côte du district. Mais ces 
précautions, bien justifiées par le danger couru, furent vite 
négligées; à la fin de juillet, au temps de la moisson, les 
batteries furent de nouveau abandonnées. 
Le 2 septembre 1795, Decourbes, maire de Pont-Aven, 
signalait de nouveau le danger à l'administration du Finistère. 
« J'arrivais de la côte de Névez, à huit heures du soir, 
lorsque j'ai reçu votre lettre de ce jour. J'y vois avec douleur 
que nous sommes menacés d'u ne nouvelle descente et avec 
plus de douleur encore que, notre commune ayant été désar
mée depuis l'affaire de La Roche-Sauveur, nous n'avons 
absolument aucun moyen de résistance à opposer à l'ennemi; 
car vous ne regardez sûrement pas comme un moyen de 
défense contre des armes à feu, quelques méchantes piques 
que vous nous avez données et qui font l'objet de la dérision 
de lout le monde. Aussi, regardez nos moyens comme de 
toute nullité. 
« A près cette déplorable mais trop véridique confession, je 
vous dirai que l'escadre anglaise paraît journellement sur 
nos côtes; qu'aujourd'hui encore IO vaisseaux et 4 frégates 
ont croisé depuis neuf heures du matin jusqu'à 4 heures de 
l'après-midi, entre Groix et les côtes de Névez et Moëlan, à la 
hauteur de trois ou quatre lieues, et que deux corvettes, à 
6 h . ce soir, n'étaient pas à une lieue de terre, vis-à-vis l'en
droit où s'est effectuée la dernière descente». 
L'administration du Finistère s'empressa d'informer le 
Comité de Salut public de celte situation lamentable. Elle lui 
écrivait le 4 septembre 1795 : 
Nous n'avons cessé de réclamer auprès du Comité de 
Salut public, auprès des représentants en mission, pour able .. 
nir des forc es qui puissent mettre notre territoire à l'abri 
des Chouans. 
« Il est temps d'en voyer des troupes dans le Finistère, si 
on veut le prémunir contre les malheurs qui désolent le 
Morbihan et les Côtes-du-Nord. Depuis la reprise de Quibe
Ton, une sécurité bien dangereuse a semblé détourner vos 
regards du point important où nous sommes. Enfin, le mal 
est à son comble et nous n'avon5 aucun moyen d'y apporter 
obstacle. L'esprit public est mort depuis longtemps dans nos 
cités. Les habitants des campagnes, absolument insouciants 
sur la ohose publique, semblent nous annoncer par leur con· 
duite que nous sommes trop heureux de les voir rester 
tranqu illes. 
« Enfin, l'ennemi nous presse de toutes parts. Sur nos 
côtes où nous n'avons que de très mauvaises batteries et de 
plus mauvais canonniers, on voit les flottes anglaises journel
« Quimperlé, qui est la clef de notre département, est dans 
une situation si périlleuse que l'on ne peut plus, sans courir 
le risque d'être assassiné, s'y rendre de Lorient. Les Chouans 
intercepteront bientôt totalement celte route et ils s'avancent 
dans le Finistère, par le côté opposé à la mer. comme de 
concert avec la flotte anglaise qui, le 15 de ce mois, s'est 
montrée aux atterrages de Moëlan et de Ploemeur, avec une 
grande quantité de bâtiments de transport. 
(( Dans une pareille position, ce n'est pas affecter une vaine 
terreur que de se plaindre et de demander de prompts 
secours » (1 ). 
Jean SA VINA . 
(il Arch. du Finistère, registre indiqué. 
106 
DEUXIEME PARTI'E 
Table des Mémoires publiés en 1929 
PAGES 
1. La descente des émigrés et chouans à Névez, en. 
me&sidor an III, par J. SA YINA. , . . 
II. Le Finistère dans l'histoire et dans l'art, par H. 
WAQUET ......    
IlL La Milice garde-côte, par l'abbé J. TOULEMONT .. J8 
IV. Matériaux pour la bibliographie de l'histoire de la 
du Finistère Révolu tion dans le département 
(suite), par D. BERNARD . , . . . . 
V. Le scribe quimpérois du Xy' siècle, J ohannf)S 
Spinae et son distique en moyen-breton par 
J. L OTH .  . . . . . . . . . . . .  . 
Notice sur deux statues représentant saint 
et saint Roch, par V. COR~llER . . . . . 
Mélar 
VII. Extraits des comptes des miseurs de Quimper, 
publiés par R. COUE'FON et H. W.. . . . . .. 83'