Bulletin SAF 2001
Table des matières
Chronique de préhistoire et de protohistoire finistériennes et des archéosciences pour 2001
P.-R. Giot
Pages 11 à 26
À la recherche d’un site perdu: les occupations mésolithiques et néolithiques de Raguénez (Névez, Finistère)
Grégor Marchand
Pages 27 à 42
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Résumé
Identifié en 1971 par Y. Le Moal et perdu à la mort de son inventeur, le site de Raguénez (Névez, Finistère) était réputé dater du Mésolithique moyen de type Bertheaume, sans qu’aucun élément ne fût encore publié. La récente découverte d’un carnet de prospection permet aujourd’hui de localiser avec précision la zone de prospection. Une industrie lithique montre à l’évidence une composante du Mésolithique moyen parmi de nombreux éléments du Néolithique final. Tout en insistant sur les limites de la documentation, l’article s’attache à présenter les pièces les plus caractéristiques, pour les intégrer dans nos connaissances de la préhistoire locale puis régionale. Un bilan sur l’évolution de ce promontoire est également proposé, du Paléolithique ancien à l’âge du fer.
Étude d’une série de galets biseautés à enlèvements bifaciaux du Néolithique découverts à Kermorvan (Le Conquet, Finistère)
Yvan Pailler, Bernard Hallégouët, Michel Mauguin
Pages 43 à 54
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Résumé
Les prospections régulières de M. Mauguin sur la presqu’île de Kermorvan (Le Conquet) lui ont permis de mettre au jour dans une même parcelle une série de galets biseautés à enlèvements bifaciaux. Ces pièces n’ayant jamais fait l’objet d’une étude détaillée dans la littérature régionale, il nous paraissait essentiel de les décrire dans cette note. Leur analyse pétrographique montre qu’il s’agit de matériel étranger à leur lieu de découverte et leurs origines seraient à rechercher à proximité des affleurements de grès micacés de la rade de Brest. Une étude technologique des objets a permis de mettre en évidence une chaîne opératoire assez standardisée. S’il est difficile de situer chronologiquement cette série de surface, on peut par comparaison avec des trouvailles de mobilier proche typologiquement, effectuées en d’autres secteurs de l’ouest de la France, l’attribuer au Néolithique. En revanche, en l’absence d’étude tracéologique, il nous est particulièrement ardu de proposer une hypothèse fonctionnelle pour ces outils.
Kerlec’h 3 en Ploudalmézeau, un site du Néolithique final / Chalcolithique
Yvan Pailler, Yohann Sparfel
Pages 55 à 68
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Résumé
Située à l’extrémité occidentale de la péninsule armoricaine, la station de Kerlec’h 3 (Ploudalmézeau) a été découverte lors de prospections de surface. La collection recueillie est modeste mais présente une homogénéité manifeste. La diversité des matériaux lithiques inscrit le site dans un contexte d’approvisionnement structuré qui s’étend depuis les estrans tout proches jusqu’aux affleurements de silex turonien supérieur d’Indre-et-Loire. La présence de plusieurs marqueurs culturels place chronologiquement l’occupation à la fin du Néolithique ou au Chalcolithique. À l’échelle du bas Léon, la comparaison de cette collection avec d’autres installations globalement contemporaines permet d’esquisser un modèle d’implantation humaine à la fin du Néolithique.
Notices d’archéologie finistérienne (année 2001)
Pages 69 à 100
Les thermes gallo-romains en Armorique, 1ère partie: le programme architectural et technique
Anne Le Bot
Pages 101 à 134
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Résumé
L’usage des thermes se répand progressivement en Armorique romaine à partir du Ier siècle. Cette région d’exploitation agricole se montre particulièrement riche en petits thermes privés d’excellente facture, associés à la pars urbana des villae. A contrario, le thermalisme urbain, public ou privé n’est connu dans notre région que par quelques rares exemples. Equipements indispensables, tant des agglomérations que des domaines privés, ils sont témoins de l’intégration des valeurs romaines autant que lieux de sociabilité. Un soin tout particulier leur est apporté, qui n’a d’égal que celui des pièces de réception, comme en témoigne le programme technique: construction, disposition des pièces, chauffage, aménagements hydrauliques et décors. Les préceptes de construction thermale en usage dans l’ensemble du monde romain sont ici respectés, mais l’Armorique se démarque par quelques particularités.
Monuments et objets d’art du Finistère. Études, découvertes, restaurations (année 2001)
Pages 135 à 184
Musée départemental breton. Un an d’enrichissement des collections (2001)
Philippe Le Stum
Pages 185 à 194
Les daviers léonards, anciens aménagements littoraux en péril
Thierry Simon
Pages 195 à 212
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Résumé
Les falaises léonardes (Plougonvelin, Le Conquet, Ploumoguer) portent les traces d’aménagements anciens, les daviers, liés à l’exploitation des ressources en algues. Des photographies aériennes verticales de 1919 montrent ces installations en activité. Ces documents restituent aussi un état de l’utilisation de la frange littorale au début du XXe siècle. Depuis, les paysages ont été transformés, l’usage de cet espace également. Les aménagements anciens se dégradent, faute d’intérêt suffisant, malgré leur valeur patrimoniale certaine.
Histoire numismatique et monétaire de Quimper
Yves Coativy
Pages 213 à 252
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Résumé
La numismatique permet d’aborder l’histoire quimpéroise de façon transversale et de rappeler l’existence de témoignages métalliques souvent négligés. De l’âge du bronze à nos jours, on peut rattacher petite et grande histoire à des monnaies ou à des jetons, mais aussi à des hommes. L’intérêt de Quimper est de fournir une longue série de documents que peu de villes bretonnes peuvent aligner car, au XIXe siècle, deux numismates de valeur, Clément de La Hubaudière et Paul Maufras du Chatellier, ont consciencieusement localisé les monnaies qui entraient dans leurs collections, augmentant de fait le corpus des découvertes. Il devenait dès lors possible d’étudier la circulation monétaire sur la longue durée, de l’époque gauloise à la fin du Moyen Âge, mais il importait aussi d’évoquer l’histoire de leurs collections tout en faisant ressortir leur personnalité. Enfin, il restait un mot à dire des quelques témoins métalliques de l’époque contemporaine, comme jetons et médailles. Un corpus des trouvailles antiques et médiévales vient compléter l’ensemble.
Moulins et meuniers de Plonévez-Porzay au XVIIIe siècle
Roger Garrec
Pages 253 à 268
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Résumé
Les moulins ont occupé dans la vie quotidienne de nos ancêtres une place originale, à une époque où la nourriture était faite surtout de pain de seigle, de bouillie d’avoine et de crêpes de blé noir. Avant 1789, ces moulins étaient propriété des seigneurs; domaniers et fermiers y étaient assujettis. Des neuf moulins de Plonévez-Porzay, seuls ceux de Moëlien, de Névet et de Tréfeuntec étaient de bon rapport. Le montant de la dot que les meuniers de ces trois moulins assuraient à leurs enfants révèlent leur réelle aisance. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’évolution est sensible. Certains domaniers rachètent le droit de suite, contre une petite rente annuelle, pour suivre le moulin de leur choix. D’autres rachètent le moulin lui-même. Sur les neuf moulins qui tournent encore en 1789, seuls trois, dont celui de Moëlien, seront vendus comme biens nationaux. Tous reprendront leur activité au XIXe siècle, mais aucun moulin neuf ne fut créé.
La famille l’Espine de Grainville à travers une ferme en Trégor et son livre de comptes
Agnès Himeur
Pages 269 à 290
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Résumé
À la faveur des recherches effectuées pendant l’étude faite pour le musée des inventions techniques en agriculture, à Plouigneau, un livre de comptes de la métairie de Grainville, située précisément à Plouigneau, a été découvert dans des archives privées et mis à notre disposition par son propriétaire. La famille l’Espine de Grainville a une double appartenance: petite noblesse normande s’illustrant dans la marine, et moyenne noblesse parisienne parlementaire (alliée aux Joly de Fleury, hommes du roi). La formation donnée par cette dernière explique le soin, l’intelligence et la modernité avec laquelle est tenu ce livre de comptes, entre 1787 et 1820. En effet, celui-ci est tenu en partie double, méthode qui semble rare dans les comptes d’une petite exploitation agricole tenue par une famille noble. Ce livre mérite une étude plus approfondie pour mettre en évidence le rôle modernisateur d’une certaine noblesse très ouverte d’esprit.
La Bretagne sous la Restauration. Souvenirs romantiques et parfois romancés d’après les lettres de Boucher de Perthes (1816-1825)
Pierre-Roland Giot
Pages 291 à 324
Problèmes d’empierrement des routes dans le Finistère au XIXe siècle
Louis Chauris
Pages 325 à 338
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Résumé
Dans le cadre des recherches en cours sur les matériaux d’empierrement utilisés pour les routes du Finistère au XIXe siècle et au début du XXe siècle, sont présentés trois cas exemplaires, choisis en différents points du département Le premier, en Cornouaille, relatif aux travaux sur la route de Quimper à Pont-l’Abbé, traite, entre autres, des difficultés soulevées par un changement de carrière. Le second, dans le petit Trégor, fait état d’un litige survenu entre cultivateur et entrepreneur, au sujet des dégâts occasionnés par les extractions de grès à Garlan. Le troisième, enfin, dans le haut Léon, révèle tout l’intérêt de la carrière dite de la Roche; en Plouénan, qui fournissait un quartz de grande qualité. Retenus parmi bien d’autres, les trois cas examinés soulignent, chacun sous un éclairage particulier, la diversité et la complexité des problèmes posés naguère pour l’entretien du réseau routier.
Aux origines de Redon, un "délaissé de cité" remontant au Bas-Empire?
Jean-Christophe Cassard
Page 339
Ermentaire, les Poitevins et les Bretons
Jean-Christophe Cassard
Pages 340 à 342
Et si saint Malo avait joué aux "barres"?
Bernard Merdrignac
Pages 343 à 346
Saint Magloire et la "Maline"
Bernard Merdrignac
Pages 347 à 349
Le Credo des Apôtres
Pierre-Yves Lambert
Pages 350 à 353
Le Memento du Bretonnant, Paris, Beauchesne, 1907
Fanch Morvannou
Pages 354 à 355
Quelques éléments à porter au dossier de la langue bretonne en pays guérandais
Alain Gallicé
Pages 356 à 362
Il est interdit de cracher par terre et de parler breton
Fanch Broudic
Pages 363 à 370
Les pagi bretons médiévaux
Bernard Tanguy
Pages 371 à 396
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Résumé
Depuis l’article consacré, en 1944, aux pagi de la Domnonée par René Couffon, l’étude des pagi bretons médiévaux n’a guère progressé et la question s’est même embrouillée. Ce réexamen, qui porte sur l’ensemble des pagi bretons, connus par les sources médiévales, se propose d’en préciser les origines et l’extension territoriale ancienne, à la lumière de la phonétique historique, trop négligée par ceux qui s’y sont intéressés, et des données textuelles, parfois mal interprétées.
De Guasgury à Guiscriff, la problématique du guas
Pierre Hollocou
Pages 397 à 418
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Résumé
Le toponyme de Guiscriff reste encore aujourd’hui une énigme malgré plusieurs tentatives d’explication. Certaines d’entre elles ont évoqué un possible guic, marque de l’existence d’une paroisse primitive. Cette thèse a déjà été contestée depuis plus d’un siècle par J. Loth qui insistait sur la présence du s au milieu du toponyme. Une analyse des différentes explications, une observation minutieuse de toutes les graphies disponibles de ce toponyme et de leur évolution montrent qu’aucune de ces explications ne donne satisfaction. Cette étude ouvre une nouvelle piste de recherches en privilégiant la forme ancienne de Guasgury et en ouvrant la problématique des toponymes en guas-.
Les terminaisons -ou et -o dans la toponymie bretonne
Erwan Vallerie
Pages 419 à 436
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Résumé
Une analyse superficielle a conduit jusqu’ici à opposer dans l’onomastique bretonne des formes en -ou, qui seraient caractéristiques du Léon et de la Cornouaille, et des formes en -o dans les autres régions bretonnantes (Vannetais, Trégor) comme dans la zone mixte aujourd’hui francisée. Il apparaît en fait que des toponymes paroissiaux en -ou sont présents à l’extrémité orientale de la zone mixte. Un examen exhaustif des noms de lieu-dit confirme la présence d’une aire -ou orientale et permet de déceler en outre une aire très vaste où l’évolution de [ou] primitif aboutit à -eu. L’étude des datations montre que l’évolution trégorroise est une réduction tardive de la diphtongue posttonique et n’a pas de lien avec les formes en -o rencontrées à l’est d’une ligne joignant l’estuaire du Trieux à celui de la Laïta. Ces dernières sont le résultat d’un emprunt intervenu alors que l’évolution de [ou] vers [oeq] (graphié -eù) constatée aujourd’hui en vannetais n’était pas achevée; il convient de postuler un stade intermédiaire [oq] substitué par [o] en français.
On trouve ainsi, d’est en ouest:
- des aires -ou, dans lesquelles l’emprunt s’est produit avant le début de cette évolution
- des aires intermédiaires où des formes en -eu (emprunt au stade [oeql) attestent une évolution rapide;
- des aires où les formes en -o sont de plus en plus prédominantes et où l’évolution, plus lente, n’était pas encore achevée lors de l’extinction du breton;
- enfin le Vannetais bretonnant, où les formes françaises en -o attestent également un emprunt antérieur à l’achèvement de l’évolution qui aboutit aujourd’hui à [oeq].
La nature de cette évolution, résultat d’une tendance articulatoire antérieure propre aux parlers d’oïl, et la chronologie de sa progression territoriale permettent de l’attribuer à l’influence d’un adstrat roman qui oppose le domaine bretonnant oriental (à l’est de la ligne Trieux-Laïta: Goëlo, Vannetais, Cornouaille orientale, Haute-Bretagne) au domaine bretonnant occidental (Cornouaille, Léon, Trégor).
Le domaine bretonnant apparaît ainsi comme scindé dès l’origine en deux zones : une zone occidentale à substrat gaulois, une zone orientale à adstrat roman. Cette division est la cause, à partir du Xe siècle, de la première fracture dans l’unité du breton par l’apparition d’un dialecte occidental (KLT) et d’un dialecte oriental aujourd’hui réduit au seul vannetais (avec quelques vestiges en Goëlo).
Propositions pour un enseignement bilingue en 1836. Un mémoire inédit de Y.-M.-G. Laouénan
Fanch Postic
Pages 437 à 0
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Résumé
Interpellée par le faible taux de scolarisation des enfants finistériens, la Société d’émulation de Brest organise, en 1835, un concours sur les moyens de développer l’instruction dans le département. Deux mémoires lui sont adressés, dont l’un, dû à Yves Marie Gabriel Laouénan, un juge de paix brestois, propose de promouvoir un enseignement bilingue qui, d’abord effectué uniquement en breton, intégrerait progressivement le français. Le projet n’aura pas de suite, mais fera l’objet d’un sérieux débat au sein de la société savante brestoise et des instances officielles chargées de l’instruction publique. Les documents de ce dossier, inédits pour la plupart, constituent un témoignage très intéressant sur l’histoire des relations entre école et langue bretonne.