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LETTRES DE REMfSSION
DANS LA SENECHAUSSEE DE CARHAIX.
Les procédures d'une affaire d'homicide que nous trouvons
aux Archives du Finistère (Série B. Cour Royale de
Carhaix), nous conduit à recueillir quelques documen ts tou
chant les lettPes de l'ém'ission.
On en parle bien légèrement, avec mauvaise foi, surtout
avec ignorance; et cependant, si des abus ont pu se glisser
dans l'exercice de ce droit de rémission, il n'en est pas moins
une prérogative incontestable, légitime, nécessaire de l'exer-
cice de la Justice. Aujourd'hui encore, en Espagne, le Chef de
l'ordre judiciaire porte le beau nom de M'inistTc de Justice ct .
de gTâce.
Le 26 janvier 1698, François Thépaut, sieur de Kerven,
ancien greffier à la Cour de Carhaix, se rend à Plourac'h.
Il n'est plus jeune, il a soixante-dix ans; il se fait tard,
on est en plein hiver et il fait un temps de saison Arrivé à
Carnot (1), il hésite à poursuivre plus loin, se décide à
attendre au lendemain pour continuer son voyage, et entre
chez Marie Marzin, hôtesse au bourg. C'est soir de dimanche:
l'air est alourdi par les fumigations âcres des pipes de tabac
brùlées pendant la journée, et on sent encore l'odeur fade et
(1) Nous savons que Cw'noët est la vraie orthographe, mais qu'on nou~
excuse d'écrire Carnot, avec les gens de 1698, pour plus de facilité.
'aill buveurs du pays.
anLs
nrdés causent bruyamment: ce sont des meuniers, de ces
meuniers qui forment une classe à part et que l'on voit partout
OÙ il y a trouble à entretenir, coups à donner ou à recevoir.
L'un deux,plus atteintque les autres par les fumées bachiques,
Jacques Boudihen, illvite aus')itôt le nouvel arrive~ trinquer et
ù boire chopine. Après avoir consommé quelques botées avec
les meuniers et leurs valets, Thépaut qui se sent fatigué et a
l'impatience bien légitime d'être délivré de cette troupe
tapageuse, sort faire visite, au bourg, chez Me René Thépaut
sieur de Kérigonan, Sénéchal de la Juridiction de Carnot.
Avant de quitter l'auberge, il y commande un lit pour la
nuit, et de la viande et du pain pOUf' souper. Chez le sieur de
Kérigonan, Thépaut, trouve le monde couché. car il est plus
de neuf heures, et le beau-fils de la maison, Julien Rospabu
sieur de la Villandré, notaire ' et procureul' à Carhaix, s'est
déjà reLiré dans sa chambre. Après quelques minutes de
causette, près du foyel" l'anc~en GreffiE'r prend congé de la
servante et s'en retourne chez son hôtesse, où il trouve servis
sur la table le lard fumant et. le savoureux pain de ménage.
Mais hélas! Boudihen est tuujours là avec ses compagnons:
il s'approche de la .table et en
vantard, hardi, provocateur,
gloutit en un clin d'œil sans crier gare, la provende déposée
devànt le sieur de Kerven avant que ce dernier n'eùt le
temps d'y toucher. A la lin, celui-ci perd patience et s'a
au meunier de lui dire; Ça, est-ce que vous
dressant
connaissez Jean Bmtdihen me1.l1Ûcr de Spezet? Eh bien!
r,' est à son moulin que .f envoie moudTe mon blé; et r;e qtte
ie sais c'est qu'il me vole beaucoup. Et Jacques de riposter
que ce Jean Bondihen était son cousin, et gu'il ne po1f,1wit
souffriT qtt' on eut traité son cousin. de voleur en sa présence
et. que les meuniers avaient une âme à rendre n Dien œussi
bien qltC personne cl'aut'}'es professions, et ce disant il Va
sur Thepaut, qui aussitôt tire son épée, tandis que le
de Charles frère de Jacques, Henri Le Nay, se met en
. valet
de l'écart~r, Dans le tumulte, ils s'entraînent hors de
devoir
la maison; dans l'obscurité, l'ancien Greffier blesse Le Nav
. à la main, tandis qu'il reçoit les coüps de -bâtons du valet ~t
qu'à tout hasard, il crie à lŒ lorce sur le Sénéchal de Carno t.
Ce cri étranglé par l'angoisse, strident, est entendu pal'
Rospabu, Sans perdre un instant, il se lève en chemise eL
bonnet de coton, il prend son fusil, et voyant une ombl'e
celle de Jacques Boudehen, il croit voir l'agresseur
indécise,
de Thépaut et il tire, Boudehen tombe en gémissant, on le
porte sur ttn clwrniel', d'après le rapport de Julien Montfort
chirurgien Royal cc ayant l'intestin dit collon percé en trois
c( endroits et ros de la hanche froissé et fracturé ,), « Le coup, .
de si près qu'on trouva une partye de la
avoit esté tiré
bourre contre les esquilles des os ») . Jean Parchanton gendre
de l'hôtesse alla chercher le Recteur qui, sur l'heure, admi-
nistra l'extrême-onction au malheureux: le lendemain, il lui
apporta le viatique, et ce jour 2.7 janvier, à 6 heures du soir,
il expirait n'accusant de sa mort nul autre que Julien Rospabu
. La nouvelle, quoiqu'il fut passé onze heures de nuit, se
répandit rapidement, comme put le constater Thépaut, qui
sans s'attarder à connaître les détails de ce drame, prit la
route de Plourac'h . On ne vit plus Rospabu après le meurtre,
et quand le Sénéchal vint faire sa descente de Justice, le
28 janvier, à Carnot, qu'il fit rechercher le meurtrier « pour
faire attouchement du cadavre )), qu'il interrogea sur la
- direction prise par lui, « le s·ieur de Kerigonan dict et déclara
« n'avoir vu ledit Rospabu, son gendre, depuis la veille au
« matin qu'il partit de la maison pour se rend re à Carhaix
cc à l'assemblée des notaires royaux qui se devoit faire aud.
« Carhaix au sujet de l'affranchissement du Scell des Actes
« que Sa Majesté vouloit qu'ils eussent affranchis et auquel
Rospabu il avait donné ordre de faire pOlIr luy à ladite
vouer que Rospabu était parti pour Versailles; mais alors
carhaix pour expliquer son rôle dans le drame et certaines
au temps ou il était Greffier de la Sénéchaussée.
Rospabu allait à Versailles, solliciter et obteriir des le Ures
de rém'ission de l'homicide qu'il venait de commettre.
Les Jettres de rémission ne s'accordaient que pour deux
sortes d'homicide : pour les homicides involontai l'es, ou
les homicides commis dans la nécessité de défendre sa
Vie.
Aux termes de J'ordonnance du mois d'aoùt 'l670, l'impé-
trant ne pouvait présenter ses lettres de rémission que s'il
n'étai t effectivement prisonnier et écroué, et le demeurait
pendant toute l'instruction pour l'entérinement des lettres.
S'il ne les présentait dans le délai de trois mois, elles
devenaient nulles et on ne pouvait en prendre de nouvelles.
Le demandeur se présentait à l'audience à genoux, tête
nue, les entendait lire en cette posture, et devait les déclarer
véritables et avoir la yolonté de s'en servir. ('1).
Rien, du reste, ne fem mieux comprendre l'économie et le
mécanisme de cette procédure de grâce que l'exemple que
nous donnons ici.
Un jeune clerc tonsuré de la paroisse de Duault, dans la
Haute-Cornouaille, se voit assailli par un malheureux qui
(1) Consu lter les Formulaires d'exploit et proeédures assez nombreux, et
entre autres, celui que nous avons sous les yeux en ce moment:
Formules d'actes et pl"océdures pOUl' l'exécution des ordonnances de
Louis XIV. de ~667 et 1670 pow' les Evocations: Les Règlements de Juges ...
Les Lettl'cs el'Etat etc ... A Paris, chez Hénault, à l'Ange-Gardien, 1677 •
avait perdu la raison dans l'ivres~e. Il se sent perdu, lorsqU'il
avise un fusil: il ne calcule pas et ne voit que sa mort aSSurée
si son agresseur n'est pas mis hors d'état de l'approcher. 1\
tire, il tue, et désespéré il n'a de ressource que cla[]s l'obten_
tion des lettres de rémission pour arrêter les suites criminelles
de son meurtre. La famille du défunt ne consent à se POrLel'
partie civile pOUl des raisons très honorables. Jouan sollicite
les lettres de grâce et les obtient, et voici dans quelles fOl'mes
elle furent intérimés à Carhaix, en novembre n 17 .
Veu en la Sénf\chaussée et Sii~ge Royal de Carbaix les tittres de
rémission obtenus par Pierre Le Jouan clerc tonsllré an moi)
d'Aoust d2rnier signé sur le reply : par le Roy il la relatioll du
Conseil Gigon, au sceau de Cire Verte à Las de soye Rouge et Ver t,
pour ra~son de l'homicide pH luy commis, information ot autre!'
procédllres criminelles faites pour raison de ce en la juridiction de
Qllélen à requeste du procureur fIscnl suivaut l'inventaire déposé
au greffe criminel de ce Siège le 18 Octobre 1717, escroue d'empri
sonnement volontaire dud. Jouan (lUX prisons Royaüx de ccd.
Siège du 29 du présent mois, ordonnance .indicielle du ::JO du mois
sur la présentation et lecture desd. lettres l'audienc.e tenante cu .
Jouan lequel estant nile teste et à genoux, et
présence dud.
aprés serment par lui fait de dire vérité, auroit affirmé qu'il
avoit dOllné charge pour les obtenir, quelles contenoient vérité,
qu'il sen vouloit servir, PH laquelle ordonn :ll1ee lé Siège auroit
ordonné que lesd. Lettres et Informations seroifmt communiquées
au Procureur du Roy et copyc dicelles Baillées aux parties civilles
pour fournir lenrs moyens d'oposition, ct ~eroit led. Jouan ouy
et Interrogés snI' le~ faits,
Voici la teneur des -lettres de grâce en question telle qu'elle
est reproduite dans la sentence d'entérinement:
Louis par la grâce de Dieu Roy de FnlDce et de Navarre. A tous
ceux qui ces présentes vorront. Salut
nOll S avons reçu J'humble supplication de
Scavoir faisons que
Pierre Jouan Clerc tonsuré âgé de vingt rleux ans, fIls de deITllnt
Jacques Jouan dit Lamarche marchand de bois en gros dans noS
nul Llue le MaI'dy 29 décembre 1716 ...
tl~1l11
(Ici le récit in-c;r;tenso et authentique du meurtre d'après
les Informations de la Justice et les aveux de l'accusé
qui établissent clairement que Jouan n'a tiré sur un
forcené, dans un état d'ivresse frénétique, que pour sauver sa
vie) .
« A ces 'Causes et autres à ce nous mouvans, désirans préfërer
Miséricorde à Rigueur de Justice s'il est aparu ou npert de ee
que desflus exposé, avons nudit suppléant Quitté, Remis ei par
donné, Quillons, Remettons ei pardonnons par ces lettres de
âce Spéciale, pleine puissance et auiorité Royale, lefait ei cas
ci-dessus avec touies peines, amendes, offense corporelle
criminelle en quoy il pouroit avoir encouru envers Nons et Justic<",
lIlettî1ut nu néant toute procédures criminelles, Décrets, sentences,
dé[î111t et tous ce qui se seroit Ensuivy. Et Sy L'avons jnis et
Restituée en ses Bonnes Vie et Renommée au païs et en ses biens
Hon d'ailleurs confisqués, ~atisfnction fnite ft partie civille si félit
. n'a esté et sy elle y echoit, Imposnnt sur ce ~ilence perpétuel à
Nostl'C proGL1reur générn l, ses su bstitll ts, préscn ts et à vcni r et ~
lous nutres nos justiciers officier" et sujets qu'il appnrtiendrn .....
Cnr tel est nostre plaisir, etc.
La Sentence d'entérinement est ensuite rendu exécutoire
avec les clauses qui suivent:
« Nous, faisant diffinitivement droit sur les interrogatoires
« pélr luy obtenues en la Chancellerie de ce païs élU mois d'Ao1lst
« dernier. ))
« Pour jouir de l'effet et contenu en icelles suivant leur forme
« ct tebeurc, Ordonnons qne les portes des prisons Illy seront
« ouvertes sy j10Ur nutres causes Il n'y est détenu, payant sa
« dépense à la Geolle et la somme de dix livres à la Chapelle de
« Saint- Yves pour faire prier Dieu pour le Repos de l'âme dzzd.
« deffunl (la victime,) et Avons condamné e( condamnons Icd.
c( Jouan aux dépens de l'instance. Fait et arresté à CarhaIX en la
- ( Chambre du Conseil par Nous Sénéchal, Bailly
et Lieutenant
::Je Novembre 1717. »
( jour
o La marge de cette pièce porte « espices
Llvres », dont voiCi
cent
la répartition:
o °Raguideau, sénéchal: 50 livres.
Olymant Kernégués : le quart.
Joseph
De Coussy, Lieutenant: « receu le quart du greffe ».
G. André, Prêtre: reçu dix livres, pour la Chapelle St- Yvel:
ou Chapelle de l'auditoire de Carhaix, suivant la clause marqnée
la sentence.
dans
En Mai 1698, Rospabu avait obtenu les lettres de rémission pOUl'
le memtre de Jacques Boudihen, et ::;a présence à Carnot est
à ses ennemis implaccables les Boudihen, veuve et frèl'es
signalée
dès le jour de son arrivée, 26 ou ~27 Juin. Aussitôt, s'il faut en
croire une plainte de Rospabu du 28 Août, que nous donnons plus
bas, on va s'emparer de lui, chez son beau-père, avec une sauva
gerie dont les détails sernient révoltants, s'il fant en croire la rela
plaintif. Les Boudihen, sans retard internent Rospabu, et
lion du
pou
le 28 Juin, mettent le Substitut du Procureur du Roi, Vincent
uev
en demeure d:exécuter à l'instant les sentence de han et
Balleroy,
aCC
forban portées contre le sienr de La Villandré.
« LDn mil six cenz nonante et huit le vingt et septiesme jour de
Ille
juin avant midy soubsigné Francois Le Lay sergent de la juridiction
pra
de Callac ... Certitle que suivant pouvoir mis entre mains par
Charles et Yves Boudehen frères demeurants séparément sçavo ir
led. Charles au Moulin du Kerdraon Kerfaouot, et led. Yves au
o village de Kerdacquet paroisse de Duaut, datté du jour d'hier portant
de contraindre et appréhander au corps la personne du
pouvoir
sieur de Rosbabu procureur au Sit>ge Royal de Carhaix dem eurant
le plu::; continuellem~nt au bourg parochial de Carnet faute ~I lny de
ces
sc mettre en estat et avoir esté à droit pour le décret vers luy
énoncé en la Cour Rovalle de Carhaix touchant l'homicide comis
en la personne de déITunl Jacques Boudehen et lod. décret ponr-
suivy à la deligeance . et poursuitte du S' Balroy substitut de
, le procureur du Roy dud. Si(~ge de Carhai~ ; Mestre exprès
,t,té de mad. demeure jusques aud. Carnot, ou estant Rendu
uSIU
ant h sa personue je Illy :1ye fait lecture dml. pouvoir avec
ion de me suivre jusqucs dedans les prison~ de la ville de
ne Comme plus proche de sa capture; En l'endroit il a obéi à
• d. sommation l''t m'a suivy jusques dans lesd. prisons J'ay
aé led. sieur Je Rogbabu sur les papiers des Croups (1) d'Icelles
O:lD .
riso avecq Sommation à M' Tanguy Le Moal geollier desd.
Rosbabu tant et sy longtemps qu'il ne soit autrement ordonné
déclarant lesd. Boudehen dénotter le tout au sieur Balroy ..... de
'our et d'heures à autre pour la suite de lad. instance cri mineIle,
sur les lienx' ausd. C:arnot et Callac ...
SIGN}<~ : F. LE LA Y. l'
( Pour eopie.
d'Yves . et de Charles Boudehen ... frères de defTunl
De la part
J:lcques Boudehen mort par assasinat comis à sa personne pal' le
:-;' Lonis-Julien de Rosbabu, soit dénomé à MC Vincent Balroy
:mlJstitllt institué par Mons' le procureur du Roy dud. Siège Royal
pOUf la suilte and. assignat que les sentences de ban et (orban
devant ~stréà présant poul'suivy et exécuté contre led. Rosbabn
accuzé. Ils ont eùx aduis qu'il estait rendu chez luy du bourg
de Carllot depuis les deux jours derniers. Ne pouvant estre
;/lcallsible (:2) aux ju~tes mouvenll-;ns de la nature, ils ont esté
pl'andre led. Bosbabu chez luy par le ministaire de Me Franc. Le
tay sergent de la juridiction de 'Callac, etc.
Oelivré à Me Vincent Balleroy à son domicile à Carhaix, le
28 jUill 1698. »
Le 6 Juill(~ !, Rospabu, demanùeur en lettres de rémission
données à Versailles au mois de Mai 1698, requiert les juges du
présWial de Quimper de prendre la commission qui était portée pH
ces lettres à eux adressées, de faire commanùement au greffier de
( 1) Sic.
(~) Sic.
Carhaix de communiquer sur l'heure, les charges et informatiolJ
va narrer lui-même les péripéties de son retoll!' il farnot, de SOI'
nons montrera que même après que le Roi avait parlé, l,es Boud ihen
leS
n'avaient pas pardonné, bien loiu de là, pnisqu'il dut se mettre
sous la protection du Roi èt de la Justice. comme le monll'e l'inté_
ressant document qu'on va lire.
A Messieurs les Juges royaux de Carhaix.
Supplie humblemlul Loui:-; Jullien de Rospabu sieur de Villnn_
dré notaire et procureur en voSll'e siège et demoiselle Marie du
Drézit dame des Jars.
le vingt et septiesme Juin dernier lod. Rospadu estant
Disant que
arrivé au bourg de Carnot chez le s' de Kerigonan seneschal dut!. Car
not, son beau père et geandre de lad. du Drézit, de retour du voynge
quil avait fait à Paris pour l'obtention de sa Rémission au sujet du
déceds de feu Jacques Boudihen; sortant de servir lad messe en
l'églisse paroissiale dud. Carnot et entrant dans la Cour dudit sieur
de Kerigonan en compagnie du sieur de Kerascoat Larcher quy
lui es-toit venu faire visite, Il fnt surpris de voir antrer dans ladillc
com le nombre de douze :Oll traize hommes ::lrmé3 de fusils
et mousqnets, suivis de qllelq. fammcs qni :nioint des fourches
ferrées au nombre desq. estoint Charles Bondihen et famme, Yves,
Charlotte et Corantine BOl1dihen frères et sœurs dud. fen Jacques
Bondihen et -.,(lutres, Tous meulniers, François Le Baron hoste de
Callac, François Le Lay assistant dud. Callac. Thomas Encor (?)
de Landl1gen, Henry Le Nay valet dud. Chnrles Boudihen et autres
Tous Lesquels entrans dans la cour
satellites leurs complices.
avecq leurs fusils bandés, couchèrent en joue led. Rospabu, Se
mirent en debvoir de tirer, jurans et Blasphesmans Exécrablement
le St Nom de Dieu qu'II8 Illy eussent c~lssés la teste. Le su pliant
qlly ne désiroit que la paix et de vivre en bonne union avecq tont
le monde nestoit armé d'aucune deffance et ne fit nulle résistance
de se randre.
Seullemcnt Leurs remontra quils ne pouvoint Ignorer quil
't plen au Ro.y luy accorder des lettres de rémission, daboltition
de ptlfdo puisqnil les avoit fait deument signiffier les jours pré-
t les suivre ou il leur eust pieu; Nonobstant quoy lesdits Charles
et Dprès l'avoir terassé et longtemps maItretté en cest estat quon
le croyoit mort: arriva laditte ,demoiselle des Jars quils prirent
LTfllement aux coiffures et aux cheveux et la terassèrent également
à coups de mains, de lJatons, de fourches ferrées et des picds quo y
qu'elle soit dcmoiselle de qualité et que sa majesté deffand à peine
de la Vie à telle's gens de fraper avec telles armes les personnes
(IUaliffiées. Après tous ces mauvais traitemans, Ils lièrent et garo
tèrent led. Rospabu par les bras et par la gorge avec un seinturon
de gros cuir et le tenant toujours à terre sous leurs pieds, Ils luy
firent se lever et le trénèrent par les cheveux hors dud. bourg
de Kerviganton distant d'une demie lieue ou envi
jusqu'an village
ron ou Ils le Mirent en croupe derière led. Baron à cheval et c.onti
nuèrent toujours leurs Violences et Mauvais traitements en soo
androit Jusquen la Ville de Callac ou ils le mirent en prison ct
deffandirent au Geollier de luy donner morceau à manger ni de le
laisser parler à personne. Mais seulemant après l'avoir chargé en
leur nom, ordonnèrent de Illy mettre de gros fers, Et comme Ils ne
conduisirent vostre Suplt aux prisons de Callac que pour finir de
le martiriser puisquil n'estan aucunem justiciable de eette Juridic
tion inférieure ayant esté décretté par· ce siège duquel décret
lesd. Boudihen n'estoint et ne sont encore nl1I1em saisis, que
dailleurs les lettres de rémission et d'abolition dud. Spt estoint
adressées aux Juges présidiaux de Quimper, n'nyant fait leursd.
Violances et Mauvais Trtltem que par uu atentat formel à Icelles,
pen de Jours . après quelles leurs avoint esté signiffiées, devant
lesq. présidiaux Il présenta sa Request6 pour y estre incessa !lml PD t
il fut ordonué h Me Louis Hervieux Sergent
transféré: sur laquelle
Ro yal de l'y conduire et pour cet effet [ed. Hervieux en vertu dud.
Commandem ayant déchargé le Supt des prisons dud. Callac et
s'estant chargé de sa persoune pour la conduire en celles de ot1
Quimper, lesd. Cha l'le::;, Yves, René et Louis noudihen, FrançOÏl~
Le Lay Record et autres complices, pilr un secood atentat fonnel
anx ordonnances royaux et rébellion à la Justice, après "voir sOu_
vnnt men"cé 'en pleine foire de Callac de l'assasiner à coups de
conteau, Ils se mirent au milieu de ln Ville et ailleurs ou led
Rospabu et Herviellx devoint passer sur lenrs chemins a dessein
de ravir la vie au Supt Lesquelles menaces 'Ils continuent Journe l_
lement et publiquement Tant à la dernière foire de St Laurnns
on lcd. Loui~ Boudihen homme Il1s01vilhle se fit Tenir (1) p:\r
plusieurs personnes 'en cette yille pour Empêcher de Tuer le Supt
qnen tous autres androits on ils ont ntitrés de leurs valets et autres
gens qu'ils ont loués pour exécuter lellr pernicieux dessein, ee quy
est estroitem! prohibé pnr les ordonnances royaux et coutumes du
pais comme allssy anx parties d'assister en personne aux exécutions
et de satrouper de telle sorte 'pour aller assasiner les personnes
dans leurs demeures sans estre assistés que d'un misérable
nul caractère.
Record sans
Lesquels Boudihen accusés continnans leurs menasces, Maléfices
et desseins prémédités de " conspirer à ln vie de voste SupIiant se
seroint encore rendus en ceste Vil le de Carhaix, samedy dernier
vingt et trois du mois, après sestre de rechef atroupés et concertés
nosans plus directement ataquer Ir. Supliant en plein rllarché Ils
attirèrent et envoyèrent Claudine Quintin veufve dud. feu
Jacques Boudihen, à la sortie de vostre audiance dans le
temps que vostre Supliant ayant la robe SHI' le corps, liasse
de papiers et bOIlnet carré dans les mains sortant de
l'auditoire, lad. Qu intin le vint a llaq uer, 1 e chargeant de tou tes
sortes d'injures, le prit par les che,'eux et rabas quelle déchirH
aussy, bien , que lesd. papiers ct sa robe, criante comme uue
mégère à 1" force sur luy, le calomniallt et vomissant contre
son houneur el bonne renommée toutes sortes diinjures atroces
comme meurtrier, vollcur, bougre et antres vilénies, injures
calomnie:;, assistée des quatre BOlldihen frères, ses complices, quy
(1) Lisez: on fut forcé de le retenir pour l'empêcher, etc.
011 'etLer SUl' Illy. Mais voIre Supt qui estoit en habit dessan souffrit
ll'd, Rospabu quy sen suivit en courant, non eontanle de tout quoy
l'spiao toujours 3USSy bien que ses complices l'oceasinn de le
rencontrer. Sachante quil auroit dellb avoir affaire aux Greffes pour
ses clians, ou il se rendit à cet effet, ladite Quintin suivie de son
l'ICo redoubla dans le temps ou il sortit dud. Greffe ses Injures
rte
el Calomnies youlant encore de rechef se Jetter sur In y dans une
colère écumant de rage ne pouvant exécuter autrem sa passion
elle le suivit plus six vingt pas ... Vostre Supt tacha encore de .
sa furie, lequel non plus que sa famille
s'esquiver delle pour éviier
ne sont en aucune assurance de leurs vies ny de leur liberté ....
Ce considéré requiert
Quil vous plaise, Messieurs ayant esgard à ce que dessus et
piesses y Mantionnés et santance de l'élargissement et enterénemnnt
desd. Lettres de rémission ... , npointer d'office et {Jermettre aux
Suplians de faire administrer témoings, obtenir et faire fulminer
Moniwirs ou requis sera p(lur passé de ce et des conclusions de
Monsieur le' proc' do Roy estre ordonné ce qu'il apartiendra, ce pen
dant mettre les Suplians et leurs familles en la sauvegarde du Roy
et protection de la Justice avecq deffanse aux Boudihen, lad. Quin-
lin veufve, leurs familles, domestiques . et affidés de meffaire ny
médire directem ny indirectement sous peine de cinq cens livres
d'amandes et autres quy eschéent, sauf autres droits et de prandre
autres conclusions et ferez justice.
Louis Jullien DE RosPABU .
Permis ainsy ql est requis et ce pendant avons mis le Supt en la
protection et sauvegarde du Roy et de la Justice avec detfense de
luy meffaire ny médire sur les peines qui eschéent.
A Carhaix le 28 août 1698 .
Jean RAGUID~AU,
sénéchal.
Après tant de tracas, T;,ouis-Julien de Rospabu, sieur de La
Villandré, jouit paisiblemen t des suites efficaces de la protec_
lion du Roi et de la Jnstice.
Nous lisons dans une plainte adressée aux Juges de
Carhaix, 28 Mai '17'19, par Ecuyer Relié Jean de Launay el
contre Julien Rospabu, que ce dernier, hélas! était « violant
« et emporté, habitué à maltraiter les personnes quy refusent
(( de lui faire plaisirs quy sont dangereux; quy a esté mf'.Smc
« deux j'ois Repris en Justice... ))
Nous le voyons tenant le haut du pavé, à Carhaix; actif et
processif, semblant passionné pOUl' l'intrigue de petite ville
et de moyenne juridiction ..
En ce cas, il était servi à souhait, à Carhaix; il vit, autoUl'
de lui haines et rancunes, chicanes et intrigues: des greffiers
destitués; Jean Raguideau, le sénéchal enquêté; Balleroy
poursuivi, comme concussionnaire et sous des charges aussi
nombreuses qu'écrasantes ... Ainsi va le monde!
Abbé A~TOli'\E FA VE