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Bulletin SAF 1899


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Correspondance de la Famille Thépault de Treffaléguen (suite)

Bourde de la Rogerie

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IV (suittl.

CORRESPONDANCE
De la Famille Thépault de Treffaléguen .

XVII
Le chet'alier de la Villozel''n à son père.

Du camp d'Henin-Liétard le 22 août t 712.

En arrivant de la tranchée où je fus détaché hier avec les
travailleurs j'ai reçu l'honneur de la votre avec une extrême
joie d'apprendre que vous vous portez tous bien.
Notre brigade fournit tous les soirs 2150 hommes pour les­
quels il y _ a dix officiers, sept français et trois suisses. Nous
n'avons perdu personne parce qu'on nous ' a fait travailler
dans un b9yau où nous étions aussi en sûreté que dans
la chambre, On 'fait. creuser ce boyau pour écouler ou saigner
une inondation que les ennemis ont faite contre notre batterie
et le chemin couvert. On travaille à la sape du côté de la porte
Notre-Darne où il ya eu 40 soldats de tués et quelques offi-
ciers mais non pas des notres. L'inondation est du côté de la
porte Saint-Eloy, Nous n'avons encore que 16 pièces de canon
en batterie et 26 mortiers qui n'ont pas cessé de tirer toute la

nuit; on a mis le feu dans les écuries des casernes qui selon
les apparences étaient rem plies de fourrage, car il a duré

toute. la nuit. Il ya des travailleurs de nuit et de jour; nous
sommes de nuit et on nous relève au point du jour. Le bruit
court que l'on doit attaquer aujourd'hui ou demain le chemin
couvert du fort de Scarpe; on y a mis le feu dès le premier
jour et démonté toutes leurs batteries, de sorte qu'il ya deux
jours qu'ils n'ont tiré auoon coup .
.JI y a une brêcbe a u cordon de la place à passer 20 hommes
de front; nous y avons une batterie de 10 pièces de canon, je
ne saïs pas bien combien de mortiers. Je vous écrivis le 16,
que notre régiment avait monté la première tranchée. Je suis
seul à présent, M. de Sade étant allé à Arras, on lui a fait une
incision cruciale et l'on attend le neuvième jour pour savoir
. s'il lui faudra appliquer le trépan'.
la lettre ' de change avec ' bien de l'impatience.
J'attends
Quand une fois l'armée est en campagne et qu'il y a' un quar­
tier du roi établi on n'a nulle peine à toucher son argent. .,
Nous avons même l'agrément de n'en être pas ordinairement

éloigné, parce que ce sont des soldats de notre régiment qui
y montent la garde. Je croirais que le meilleur parti pour '
avoir bientôt mon argent serait de tirer directement de la
poste de Morlaix à celle de l'armée où l'on touche tout l'argent
en campagne, d'autant plus que nous sommes éloignés de
tau tes les villes à quatre lieues d'Arras, à six de Cambrai et
trois de Valenciennes. M'écrivant à l'armée en quelqu'endroit
que je sois en marche ou autrement, je recevrai toujours vos
lettres. Le quartier du Roi est à Henin-Liétard, mais il peut
ohanger du jour au lendemain et nous sommes campés auprès
du bourg de Noyelles. '
Je suis assez bien avec tous les officiers du régiment que je
connais, car il y en a encore quelques uns à qui je n'ai pas
parlé . .Je n'ai mangé ni chez M. de Montaran, ni chez ·M. de
Terlay, quoique· ce dernier me prie toutes les fois que je le
vois d'aller diner avec lui, je lui réponds que j'aurai cet

honneur là, m'étant fourré en tête mal à propos, si vous
voulez, que s'il avait bien envie de m'avoir, il me pourrait
fixer le jour ou m.'envoyer chercher quelque matin, de sorte
que nous nous en tenons toujours là. M. de Sade m'a attiré
beaucoup d'honnêtetés de ces messieurs qui le sont venu voir
et comme il ne lui était pas permis de parler j'étais obligé de
faire les honneurs pour lui. M. le duc et M. le marquis de
Monpezat sont venus aussi et un aide de camp de la part
de M. le maréchal. , ' .
Mon mulet est le meilleur animal du monde. Il nourrit tout
seul tous, les autres et ils n'ont jamais été si gras, il'n'y a

que la grande jument qui ne revient pas: elle est d'une fai-
blesse si grande qu'elle ne peut faire cent pas sans s'écorcher
toutes les jambes. Pierrot se porte aussi fort bien, et il m'a
toujours apporté à manger dans la tranchée .
A l'égard des pages je ne crois pas qu'on leur ote l'habit de
cette année. Je suis charmé qu'il se porte bien; je ne reçois
du tout pas de ces lettres. Je ne manquerai' pas de vous écrire la
situation du siège. Vous me ferez aussi un sensible plaisir de
me faire souvent savoir de vos nouvelles car j'ai été un peu
inquiet depuis un mois que j'ai été sans en recevoir.

XVIII

Le ehevalier de la Villozern au même .

Au camp de'vant Douai le 3 septembre 1712

J'espérais recevoir ces jours d.e vos lettres ayant eu l'hon:.
neur de vous . écrire le 27 du mois passé pour vous apprendre
l'ouverture de la tranchée devant Douai. Je vous ai écrit deux
foïs depuis: la première pour répondre à la votre du 15 aout,

la deuxième pour vous apprendre la prise du fort de Fourne .

Je'vous apprendrai aujourd'hui que nous descendimes hier la
tranchée que nous avions montée la veille. Nous y avons

perdu quelquss grenadiers, il n'y a eu aucun officier de blessé.
Nous occupons aujourd'hui le fort Piedmont à la droite et l'on
fait un pont à la gauche sur l'avant-fossé pour se rendre .
maître d'une demie lune qui y est. Les ennemis font toujours
grand feu de mousqueterie la nuit; mais il ne jettent ni
bombes, ni grenades; ils ont encore quelques pièces de canon
qui tirent le jour qu'on ne peut démonter parce qu'elles sont
sur' des affuts marins qu'ils transportent d'un endroit à
l'autre aussitôt qu'ils ont tiré; on croit que la ville pourra
tenir jusqu'au 10 ou 12 de ce mois. Nous avons fait grande
chère à la tranchée: M. le marquis de la Vallière, qui était
lieutenant général de jour nous a régalés magnifiquement. On
écrit que nous ferons le siège du Quesnoy après celui-ci et
l'on dit que les ennemis marchent pour tacher de s'y opposer
flOUS y avons dix mille hommes occupés; il me reviendra un
détachement de travailleurs avant la fin du siège après quoi
je crois que j'en serai quitte. Nous aurons l'honneur d'entrer
les premiers dans la ville.
Il y a toujours beaUcoup de malades dans le régiment.
M. de Nangis colonel du Roi est bien mal et M.de Maillebois.
Nous avons perdu un capitaine du régiment à Paris qui est
M. de St-Simon, de sorte que voila trois charges à pourvoir
même quatre en comptant l'enseigne; beaucoup de personnes
sollicitent pour moi; je n'y gagne qu'un rang , les charges
s'y donneut par ancienneté, mais M. le duc n'y a pas d'égard
quelquefois.
XIX

Le che'IJalier de la Villozern a'u même .
Au camp devant le Quénoy, ce tOc septembre 1712 .
J'ai reçu l'honneur de la votre du 31 du passé avec bien,
bie.n du plaisir. Je vous dirai que je me porterais bien si je

n'étais pas un peu enrhumé, mais je crois que ce ne sera rien
et je suis bien heureux d'en être quitte pour un. si petit mal ·. '
après l'occasion où je me suis trouvé le 7 de ce mois. Je fus

commandé le 6 à 10 heures du soir pour les travailleurs de
la tranchée de Douay et justement on attaqua le lendemain la
demie lune de la gauche et même à cet effet nos soldats fQrent
commandés à un pont où il y en a eu ~n de tué et un autre
le bras enlevé; le pont fait, les dispositions de l'attaque fUIent
faites et tout fut prêt sur les 4 heures après midi que l'on
monta à l'assaut dans trois demie lunes dont on se rendit
maître et d'une partie du chemin couvert; on ne s'en fut pas
plus tôt emparé, ce qui ne dura qu'e trois quarts d'heure, que
nous fumes commandés pour faire les logements dans la
demie lune du centre où pour y aller il fallait passer sur un
pont volant composé de radeaux: ce sont des pièces de bois
larges de trois pieds ·et longues de six, épaisses de cinq à six
pouces que l'on attache bout à bout. Je passai et repassai
heureusement à la faveur d'une grêle· de coups de fusils.

Plusieurs y sont restés; j'eus un sergent et six ou sept soldats
de lués dans cette demie lune où nous nous log·éames. J'étais
seul ·officier parce que le lieutenant commandé se trouva avoir
mal à la jambe d'une chute de cheval et ne put suivre. Je vins
joindre le 8 au matin le régiment qui avait décampé de
Noyelles le . 7 par le chemin de Valenciennes ou nous pas-

sames le point du jour et campàmes à un quart de lieue en

deça et le g nous avons arrivé ici sur le bord du Rhonelle où
1 nous nous retranchons. On dit les ennemis dans la plaine dè
Malplaquet. Douay se rendit le 8 à 10 heures du soir, la gar-

nison prisonnière de guerre aux mêmes conditions que celle
de March.iennes; le prince de Hesse qui y était entré il y a
huit jours a aussi été fait prisonnier: on dit qu'il n'y était
entré que dans le dessein d'obtenir des conditions favorables
pour la garnison; on lui refusa la première capitulation qu'il
demanda à 10 heures du matin.

Je n'ai pa~ encore été à la poste à cause de notre marche .
Je reçus l'honneur de la 'votre le 8; je vous suis bien obligé
de m'avoir envoyé de l'argent, il me fera bien plaisir et à
ceux à qui je dois.
Je félicite mon frère le chevalier sur son emploi; je vous
écrivis avant mon départ pour campagne avoir touché 170
livres et quelques sols que l'on me dit être des ppointemehts
de mon année depuis le mois de mars de 1710 jusqu'au mois
de mai 1711 et on retint sur le reste mes entrées et qapitation
et dixième; il me sera du huit mois de cette année sur quoi
ils auront à retenir le pain de munition, capitation et dixième;
je compte de toucher le reste à la fin de l'année; on paie dans
ce régiment ci comme dans les a utres quelquefois bien,
quelquefois mal: nous sommes cependant les premiers payés
quand il y a de l'argent. Je vis hier M. le comte de Coetanfao
et M .... qui allaient marquer leur camp et passèrent à la
queue du notre', dans le temps que nous décampions; je leur
souhaitai le bonjour et leur dit qu'on était inquiet de savoir
de leurs nouvelles; ils sont en bonne .santé, Je vis M. de
Rosland la dernière fois que je montai la tranchée, qui y était
venu avec M. de Coetenfrout pour le promener. M. de Ker­
losquet le mousquetaire a été malade pendant que lque temps
de la fièvre;' je le crois en bonne santé maintenant.

Je salue ma chère mère et toute la famille. J'ai fait réponse
à mon frère le page et 'me suis plaint de ce qu'il ne m'écrit
pas les nouvelles de la cour.

Le chtvalier de la Villozern au même,
Au camp devant Quénoy, le ~1 septembre 1712 .

Mon très cher père,
J'eus l'honneur de vous écrire le 20 de ce mois pour vous
apprendre l'ouverture de la tranchée devant le Quénoy; je

Gomptais que notre canon eut tiré aujourd'hui, mais les
. ennemis ont fait . un si grand feu de canon et de bombes qu'on
a été obligé d'élargir la tranchée: elle est de f2 pieds. de large.
Les batteries sont toutes dressées et l'on a voituré une partie
du canon ]a nuit dernière et l'on compte qu'il sera tout placé
demain, ce qui fera bien plaisir aux bataillons qui montent
la' tranchée qui ont été très maltraites. Il n'y a eu que le pre-'
mier jour de bon. Nous avons eu un capitaine de blessé,
nommé M. de . Saint-Hilaire, qui a eu le bras droit fracassé
d'un boulet de canon; on le lui a coupé à deux doigts de
l'épaUle: il a souffert l'opération d'une si grande tranquillité
qu'on ne doute pas qu'il en revienne. Nous perdons quantité
de soldats au travail des éclats de bombes; l'on ne doute pas
que leurs batteries ne soient bientôt démontées par notre canon
qui commencera à tirer demain. Nous' aurons 56 pièces et
20 mortiers et 10 pierriers. Ils voulurent faire un'e sortie la
nuit du 20 au 21, mais ils furent bientôt rèpoussés. 11 ne parut
que trente hommes qui vinrent reconnàltre notre .sape. Ils en
ont voulu faire une autre cette nuit, mais ils n'ont pu ren- .
verser que deux ou trois gabions et ' aussitôt se sont retirés.

Je dois être détaché aux travailleurs mardi ou mercredi et
pourrai vous mander la disposition des batteries .
M. de Ricoarn qui commande ici les canonnièrs de marine

fut blessé mortellement avant hier. Nous avons aussi perdu
, un officier de marine à Douai, mais on n'a pas pu m'en dire
le nom; ce n'est toujours pas le camarade de mon frère,
M. d'Estourmel, ,car je vis hier sob frère le chevalier de
Malte qui est cornette dans Toulouse qui m'a dit qu'il était
en bonne santé et qu'il servait ici dans les canonniers.Ce n'est
pas non plus M. de Belleisle; je vis hier deux gardes du roi
de la brigade de M. de Mérozo qui me dirent qu'if était malade
d'une fluxion à la jambe et qu'il avait perdu un cheval au
fourrage pris des eIinemis.
Mon rhume diminue 'et ne me quittera cependant pas si tot

si l'on ne nous renvoie pas bientôt en quartier dont nouS
avons tous grand besoin, car on nous fatigue extraordinaire- .
ment; pour nous achever de perdre il ne manquerait plus
que de faire le siège de Bouchain sur lequel on pense diffé-
remment: les uns di~ent que l'on fera des redoutes VIS a VIS
les portes et que l'on fortifiera les postes des environs pour
1 empêcher d'y rien entrer, d'autres qu'on fera un détachement .
de l'armée pour en faire le siège et les mauvais prophètes que
nous ouvrirons encore la tranchée. La volonté de Dieu soit
faite! .
la famille et suis avec tout le respect ~t
Je salue toute
l'obéissance possibles, .
Votre très humble et très obéissant fils,
VILLOZERN .
il me reste très peu
payées '
Je vous dirai que mes dettes
dois plus rien; je ne crains
d'argent; la vérité est que je ne
que les blessures.

XXI

Le chevalier de la Yillozen/; au même.

A Paris ceUo mars 1713 .

Mon très cher père, 1
...... J'ai fait faire un habit qui me coute 240 livres; il est
café avec un galon d'argent devant et derrière comme on les
fait à présent, un bordé et des boutonnières avec un surtout
qui me coute 60 livres. J'ai descendu encore au­•
d'écarlate
la garde de Versailles où le Roi dit hier à M.: le duc
jourd'hui

de Guiche qu'il ferait notre revue le 18 qui sera aujourd'hui
en huit. On ne parle pas encore de campagne. mais on doit
s'y attendre lorsqu'on pensera le moins la revue faite Je vous
serais bien obligé si vous voulez m'envoyer des chevaux et

un palefrenier; je tacherai d'en avoir un ici pour stiler
l'autre; si mes frères viennent ici ils pourraient profiter de
l'occasion pour me les mener. Si vous voulez bien me mander

votre intention la dessus je pourraIs recevoir votre lettre
demain en huit le lendemain de notre revue et je saurai
quelque chose de plus positif au sujet du départ. Tout le
monde est dans le même cas que moi, c'est à dire n'a rien

de prêt, car' on ne s'attendait pas à passer si tôt.
J'ai vu M. le comte de Coetenfao qui m'a tenu les mêmes .
discours que son frère disant qu'un .homme comme moi ne
devait pas rester si longtemps enseigne; en même temps il
me demanda qui m'avait conseillé de me mettre dans le régi­
ment des gardes: je lui répondis que c'était M. de Canillac;

nous raisonnames fort longtemps et tout n'aboutit qu'à dire
que j'avais grand tort de n'avoir pas acheté un guidop de
gendarmerie; je lui dis qu'effectivement ce corps convenait
mieux que le mien à ceux qui avaient quarante-trois mille
livres à donner pour cet emploi. Il ne me parla du tout pas
de la lettre que vous avez écrite à son frère; j'ai vu ce derniBf
trois ou quatre fois chez Madame de Berry et ne me dit rien

du tout. •

On n'a pas encore nommé au baton d'exempt. J'ai cherché
partout le major de Charost, 'personne ne m'a pu indiquer sa
demeure en ayant changé depuis l'année passée. M.le chevalier
de Bréfeillac m'a fait espérer de me présenter parce qu'il
connaît le lieutenant colonel qui est souvent à Versailles. Les
nouvelles qu'6n y dit sont toujours si incertaines qu'on ne
saurait les mander comme sures: on parle tantôt de paix .
tantôt de guerre. .

XXII

Le chevalier de la Villozern au mêm.e .

A Paris, le 1g avril 1713 .
M. le commandeur de Beringhen apporta samedi en Cour
la nouvelle de la paix signée avec tous les ennemis;.il n'y a

que l'Empereur qui ne l'a pas encore faite, mais on ne lui
donne que quinze jours pour penser à Sa conscience, de sorte
qVe je crois que nous ne ferons pas de campagne. Nos capi­

de ne point faire de soldats à moins qu'ils ne
taines ont ordre
soient exceptionnellement beaux et les officiers de ne se point
une recommandation qui m'a été
charger d'équipage (c'est
inutile). Si nous marchons, ce sera à ce que l'on dit pour
aller dans quelque ville sur la frontière. Tout le monde est
de cette nouvelle et moi en particulier.
charmé
Je n'ai pas pu monter ma dernière garde faute d'argent.
J'espère pn' trouver pour la prochaine, qui est le 29.
J'appris ces jours que mon frère était député du Chapitre
pour les Etats. C'est M. l'abbé de Champeaux qui l'a dit à un
de mes amis, de sorte qu'il ne viendra apparemment pas cette
année à Paris.
M. de Tréamber est ici de retour d'Angleterre . M. le comte
de Blossac est ici depuis quatre jours avec madame son
épouse et madame sa mère; il est sûr qu'ils paraissent fort
contents l'un de l'autre; j'ai eu l'honneur. de me promener
avec eux dans leur carosse au Cours . . .... ' ....... .
M. le chevalier de Bréfeillac a trouvé un parti considérable
à Metz, en Lorraine; il est parti ces jours pour y aller; on m'a
dit le mariage conclu. Il ne renonce cependant pas au baton
je crois l'un plus faisable et plus solide . que
d'exempt, mais
l'a u tre. '

XXIII

Le chevalier de la l'illozêrn att même .

A Paris, le 29 mai 1i13 .

On reçut hier le fils de M. de Brillac, premier président,
il ne l'a acheté que 8,000 livres et le vendeur
enseigne;
9,500 livres qui n'a pas plu à M. le duc
trouvait d'un autre

et l'a pour ainsi dire obligé de vendre au premier par rapport
à son oncle qui est capitaine de grenadiers. Deux de mes
nouveaux qui ont été fait enseignes l'année passée ont acheté
des sous-lieute.nances 20,000 livres.
A l'égard des habitudes que j'ai, je n'en ai qu'une ici, où
je vais deux fois la semaine, qui est un maître des requêtes
nommé M. Maboul qui a une fort laide femme, deux filles
un peu âgées; on y joue un petit jeu à l'hombre aux deux et
trois sols et quand on ne joue pas, on danse. C'est M. l'abbé
du Groesquer qui m'y a mené. C'est la ~eule maison où · je .
puisse dire ~tre habitué. Vous me ferez plaisir de m'apprendre
celles que vous savez afin d'en voir davantage. Je ne vous en
avais point parlé parce qu'ils n'ont pas, à ce que je crois, de
relations dans ce pays-là. .

. XXIV

Le chevalier de lu Villozern au m,ême

Du camp devant Fribourg, le 3" octobre 1712 .

Il Y a bien du temps que je n'ai reç.u de vos nouvelles; j'en
. suis très inquiet, ne doutant pas que vous ne soyez de retour
de Kerozern, je ne puis vous souhaiter une meilleure· santé
que la mie'nne qui est très bonne malgré toutes les fatigues
que nous avons souffert. Il n'en est pas de même des autres
car nous avons quinze · officiers malades des mauvais airs
qu'on respire dans les montagnes. Nous ouvrimes la tranchée

devant Fribourg la nuit du 30 septembre au 1 octobre avec
tout le succès et le bonheur du monde, grâce au Seigneur,
elle a été ouverte à 200 toises des palissades. Nous étions à
portée de recevoir bien des coups de mousquets, mais les
ennemis ont fait fort peu de feu pendant la nuit; le jour, ils
tirent beaucoup de canon qui nous a tué quelques soldats. Ils
ont tenté deux fois de sorti)' -pendant la nuit, mais ils ont été

aussitôt repoussés de nos grenadiers et fusiliers; nous n'avons
eu aucun officier de tué ni blessé. Nous fûmes relevés à deux
heures et les ennemis firent une sortie à trois de mille hommes,
tous leurs dragons, cavalerie et houzards; ils surprirent le
régiment de la Reine qui était sur la gauche de la parallèle
que l'on a tirée, mais il se rallia bientôt et la cavalerie qui
portait la farine à la queue de la tranchée les obligea de
rentrer dans leur chemin couvert. Le régiment de ]a Reine a
perdu quelques officiers et VO soldats. Hs n'ont fait aucun
dégât dans la tranchée; je les trouvai fort sages d'attendre
que nous fussions relevés pour sortir: c'est un bonheur pour
eux et pour nous. On a ouvert la tranchée au fort Saint-Pierre
en même temps qu'à la ville. Je ne vous saurais dire le temps

que ce siège durera, je ne crois pas que la ville tienne plus de
20 jours; on dit le château plus fort. Enfin quand j'aurai
encore monté trois journées de travailleurs et une avec le
régiment je crois que nous en serons quittes et que nous
nous en retournerons à Paris. .
Il serait bon que vous me mandassiez ce que vous voulez
que je fasse cet hiver. Ce qui est sur c'est qu'il ne faut compter .
que sur deux mois et demi car nous passerons le 'mois de
novembre en route d'ici à Paris et M. le duc de Guiche veut
absolument que tout le monde soit à la revue de commissaire
du mois de février et ne donnr.pas de congé qui passe. C'est
une chose certaine cependant qUçmd je ne serais que quinze
jours en Bretagne, j'irai si vous le souhaitez; je vous dirai
même que j'en ai beaucoup d'envie. Si vous voulez· bien ,

m'écrire je suis persuadé que je recevrai votre lettre ici
parce que les lettres viennent en dix jours et par cette raison '
je pourrais recevoir l'honneur de la votre le 23.
Je vis Messieurs de Keravel et de Kersaint-Gilly à la
tranchée le jour que nous la montâmes, ils y étaient venus par
curiosité. Je saluai aussi à la tranchée M. le marquis de
Coetenfao qui montait, non pas comme lieutenant-général,

mais avec un détachement de cavalerie qui monte ordinaire-
ment pour soutenir l'infanterie; il me fit beaucoup d'hon-
nêtetés à son ordinaire et je lui demandai quand il monterait
en qualité de lieutenant-général; il me dit que ce serait le 16
ou 17 ; je le priai de me permettre de le suivre et il tne dit
que je lui ferais honneur .

xxv
Le che'lialier du Breignou à sa 11'zère.
A versailles le 23" février 1714 .

Ma très chère et honorée mère,

Je reçus mercredi la lettre que vous m'avez fait l'honneur
de m'écrire le H:i de ce mois qui m'a fait un sensible plaisir
n'ayant pas eu de vos nouvelles depuis longtemps .
J'ai fait accomoder mes chemises et je crois qu'elles dure­
ront encore un an pourvu que les garnitures ne manquent
pas. J'ai grand besoin de cravates; les tours de col que vous
m'envoyez ne pouvant me servir que pour monter à cheval ou
faire des armes .... Je n'ai pas été aux bals de M. le duc de
. Berry n'ayant pas d'argent pour me masquer et on y entrait
. que masque.
J'ai été fort faché d'apprendre par la lettre de mon frère

La Villozern. que mon cher père avait mal au genou Je lui
écrivis jeudi au Breignou. On apprit hier la facheuse nouvelle
que la reine d'Espagne était morte; on ne dit aucune nouvelle .
Assurez s'il vous plaît ma tante de mes très humbles

respects. J'embrasse ma sœur et mon frère le chevalier.
Je vous prie de me croire avec tout le respect et l'obéis-
sance possible,
Ma très chère mère,
Votre très humble et très obéissant fils,

. . du BREIGNOU.

XXVI
L'abbé de Treffaléguen au chevalier dB la Villozerf/l.
Le carême est pour nous, mon cher frère, la chose d-u
monde la plus incommode quand il s'agit de voyager ou de
demeurer à la campagne ... Je voudrais bien partager avec vous
vos ennuis et vos soins, et peut-être trouverions nous de l'a­
grément dans nos pensées et nos belles réflexions, et ne pou­
vant être assez heureux pour cela, je vous envoie le bonjour
que j'avais dessein d'adresser à votre château.
Salve haerediolum majorum regna meorU'1n

Quod proavlls, quod avus, quod pater excoluit
Quod mihi jam senior properata morte reliquit 1 •
Eheu! nolueram tam cito posse (rui

Nunc labor et cura mea sunt-; sola ante voluptas .
in nos tris cetera patris erant .
Partibus

Ne croyez pas qu'ils soient de moi, mais je les trouve assez
bien appliqués. Les livres. nouS divertissent souvent autant
que notre esprit. ..

XXVII
L'abbé de n"etfaléguen à son.père.
Au Conquet ce 8 juin (1717).
Mon très cher père,
Monseigneur de Léon arriva hier au Brignou passant pour
aller au Conquet dans le dessein de s'embarquer aujourd'hui
pour Ouessan t et me fit entendre que je lui ferais plaisir de
l'accompagner dans ce voyage: il descendit chez M. de Frout­
ven qùi lui donna à souper très bien. M. le Sénéchal de Léon
. s'y était rendu pour le recevoir; nous nous embarquono; à

quatre heures du matin dans l'espérance de revenir mardi.
Si le vent tenait comme il est, nous l'aurions meilleur pour
le retour. Mgr a grande confiance dans l'habileté de nos pilo­
te,s. Il n'y a que M. l'abbé de Tromelin et M. Héliès, du
voyage. Monseigneur y va fermer la mission.

XXVIII
L'abbé de Tretfaléguen au même.

Au Brignou, ce 21 30tH 1717.
Mon cher père,
M. Robeau m'a donné une ordonnance de prendre matin et
soir un bouillon de dedans d'un veau avec de la pulmonaire
et des jujubes et des navets, un peu de raisin et des cancres
et de prendre pour boisson ordinaire de l'hydromel avec du
capillaire du Canada. J'ai suivi son ordonnance . jusqu'à pré­
sent Il me l'a donné croyant que j'ai de la disposition à la
phtisie et a dit à Monseigneur que c'était la poulmonie, c'est
ce que Mgr de Léon. m'a mandé; il m'avait ordonné de prendre
ensuite du lait de vache bouilli avec douze limas après les
avoir fait- dégorger par trois fois dans de l'eau chaude. Le père
. prieur a approuvé ces ordonnances et a eu la bonté de me
donner tout ce dont j'avais besoin; il vint hier id et s'en est
allé aujourd'hui. Il m'a conseillé de prendre le moins de
remèdes que je pourrais et un grand régime: il dit que je n'ai
du tout pas la poitrine offensée et que mon mal vient d'une
chaleur du ventre et d'une faiblesse d'estomac et que je ferais
bien de prendre un demi-bain. Ils ont tous bien de la peine à
définir une maladie; je me trouve cependant un peu mieux;
j'ai été assez bon pour me laisser aller à une mélancolie dont
j'ai peine à revenir.
J'al reçu mercredi une lettre de Monseigneur; il me propose
d'aller à Vannes changer d'air; je suis bien mortifié de n'être

pas en état d'accepter la partie; je lui écris pour le remercier;
j'ai dit à Minor de donner ma lettre au postillon dimanche :
avec une boîte où il y a des porcelaines que j'ai achetées pour

Permettez-moi d'assurer ma chère mère de mes respects
et de saluer toule la famille. J'ai l'honneur d'être avec tout le
respect possible,

mon cher père,
votre très humble et très obéissan t fils,
L. F. DE TREFFALÉGUEN, chanoine de Léon.

XXIX

L'abbé de Tretraléguen au même:
A Léon ce 28' août 1716
M. l'abbé du Tressan (1) a été au .Mansproposer à M. du
Crevi, qui en est évêque, une abbaye de 22.000 livres parce
qu'il se démettrait de son évêché qui retomberait à M. l'abbé
de Tressan. Ainsi. l'évêché de Nantes seraït encore vacant, M.
l'abbé de Queremprat (2) n'aurait pas perdu ses pas s'il l'ob­
tenait. On le dit parfaitement bien dans la cour .de M. le car­
dinal et chez Messieurs de l'Oratoire, il mande qu'il sera ici
le 8 d'octobre. Il partira un muletier d'ici environ le Hl de
septembre pour l'aller quérir. M. l'abbé de la Bourdonnaye
entre aux Bons-Enfants de · l'avis de M. le cardinal et de M .
l'évêque de Tréguier. La défaite des Turcs animera encore la
(1) Louis de la Vergne de Tressan, comte de Lyon. abbé de l'Epau, Bonne­
val et Longpont, premier aumônier du duc d'Orléans, nommé à l'évêché de
Vannes, ne reçut point de bulles. Il fut nommé à Nantes en septembre
1717 et sacré à Dinan le 10 juillet 17t8 par Jégou de Kervilio, évêque de
Tréguier, en présence des EtaiS. A en croire Saint-Simon, il était un des
plus méprisables entre les favoris du Régent. -
(2) François-Marie Le Jacobin de Keramprat. docteur en Sorbonne, .
de Quiminidilly et grand vicaire de Léon .
archidiacre
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXVI. (Mémoires). 10

Cour de Rome, on dit qu'ils ont perdu cinquante mille
. hommes. .
une belle tragédie
. Les écoliers doivent représenter lundi
dans la cour de l'évêché et mardi on soutiendra une thèse
dédiée â M. l'Intendant. .
M. l'Intendant en faveur de M. de
Monseigneur a écrit à
Querozern pour la lieutenance garde-côte de Morla)x. M. l'In­
tendant lui a fait réponse et assuré qu'il l'avait demandée au
conseil pour 1.. · je ne sais si cela réussira ...
xxx
M. M. J. Thépault de Treffalégnen à son père.

A Nantes le 21 avril 1718

Je ne pus 'pas avoir l'honneur de vous écrire la dernière
poste parce que la poste ne partit pas ce jour là. J'ai entré en
classe, il y eut lundi huit jours; j'y allai avec M. Becdelièvre.
Le Père Préfet ne voulut me mettre qu'en quatrième parce que .
je ne savais pas faire des vers et qu'après Paques l'on com­
mencera à en faire. Ils sont très forts en troisième pour les
vers. ils donnent tous les jours du grec et quatrième; la
troisième est la plus . forte de toutes les classes pour les vers.
Les ' pères' de l'Oratoire paraissent les. aimer beauceup.
Le . Père de quatrième m'a dit que j'eusse à apprendre à
écrire, je ne sais si vous le voulez.
XXXI

M. . J. Thépault au m.ême .

A Nantes, le Z juin 1718.

C était le Père de la pension qui avait marqué les 4liv. 12 s.
dans son mémoire pour les livres de classe quoique je les

eusse payés;' il m'a prié de vous dire qu'il ne les avait
marqués que pour vous dire quels sont les livres que l'on
donne en quatrième: nous expliquons les Eglogues de Virgile,
Ctcéron; nous avons aussi eu Emilius Probus que nous
. devons expliquer des premiers jours. Nous disons en leçons
fa. Méthode latine, le Rudiment grec; nous avons aussi eu les
Fables d'Esope en grec; nous disons aussi en leçons les. Délices
de la "langue latine; ce sont tous ces livres qui coutent •
4liv. 12 sols. "
L'on a eu trois fois les places en quatrième depuis que je
sui~ ici, j'ai été la première fois le trois et la seconde compo­
sition qu'on a faite en vers j'ai été le vingt et trois, je suis à
présent le trois des petites dignités" ......... ' ..... .
XXXII

. M. J. Thepault au même. "

A Nantes, le z,t.e octobre 1718 .

Mon très cher et honoré père,
..... J'ai grand besoin d'argent, y ayant trèslongtemps que
je n'en ai pas. II ya longtemps que je ne vous avais pas mandé
les places que j'ai eues parce que nous ne les avons " eues que
quatre fois depuis Pâques. J'ai cependant été une fois le
second empereur. M. du Faouet ne reviendra apparemment
pas à la pension en ayant été très mécontent; tous les pen-

" sionnaires de cette année se sont tous fort plaints, je ne crois
pas qu'il y en ait beaucoup l'année prochaine .... "Il n'y a ici
aucune nouvelle si ce n'est que l'on fait courir le bruit qu'il
y a ici quatre Pères de l'Oratoire exilés qui sont le P. Lefèvre,
le P. Lamarque, le P. Réveillot et le P. Uber.
Je suis, mon très cher père,
votre très humble et très obéissant fils,
Maurice-Marie-Joseph THEPAULT DE TREFFALÉGUEN.

XXXIII

Le P. Bonnefous à . de Treffalégue~.
A Nantes, le 23' avril 1719 .

Monsieur.

Je me donne l'honneur de vous envoyer ci-joint le mémoire
de la dépense de M. votre fils pour sa pension et son entretien
pendant l'année échue le 11 de ce mois. Vous y verrez,
Monsieur, un article bien fort qui sont .les souliers: on en
use beaucoup' ici et, comme il a les pieds fort tendres, il ne
peut porter que des dessus de cuir très mou. .

Si d~s infirmités continuelles ne retenaient le Père Supèrieu
il aurait l'honneur de vous assurer de ses respects.
A l'égard, Monsieur, des études de M. de Treffaléguen, elles
sont j.usqu'à présent les mêmes, il se soutient dans sa classe
dans une honn-ête médiocrité; il se tire mieux de la prose
que des vers et c'est pour cela que je lui ai donné un répé­
titeur avec qui il travaille pour se rompre à ce genre de
latinité . . Son régent est malade depuis plus d'un mois et
longtemps auparavant n'avait pas été en état de donner les
places: je suis persuadé que depuis ce temps il a beaucoup
avancé et que sur les premières places en prose il aura de '
bonnes nouvelles à vous donner. Je vous supplie, Monsieur,
de toujours compter sur toute mon attention pour M. votre
fils que je considère particulièrement et de me faire l'honneur

de me croire avec un profond respect,
Monsieur,

Votre très humble et très obéissant serviteur,
BONNEFOUS, de l'Oratoire .

XXXIV
Mémoire de la pension et dépenses de M. de TrefIaf eguen,
une année depuis
pensionnaire à l'Oratoire à Nantes, pendant
le He avril 1718 jusqu'à l'onzième avril 1719.
Pension
Pour les six premiers mois sur lepied de 260 liv paran 130 liv.
Pour les six derniers mois sur le pied de 240 liv. la '
pension ayant diminué de 20 liv. à la Saint-Luc ... 120 liv.

2VO liv.
Entretien et fournitures
33 liv.
Onze paires de chaussures à 3 liv ....... ' ..... .

Trois paires de bas à 4 liv ................... .
Un chapeau neuf .............. ' ............ .

Pour faire repasser deux vieux chapeaux ...... .

Une armoire dans sa chambre à ramasser ses
hardes ................................. ' . .. ; ..

3 mois au maître d'écriture à 2 liv. par mois ... . »
Pour l'entrée à l'Association, livre et cierge .... . »
Une année de blanchissage à 2 liv. par mois. . .. 24 »
Papier, plumes, encre, écritoire, portefeuilles et
menus frais pendant l'année ................... , 4 10
Un dictionnaire Danet. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 12

Un dictionnaire latin .......... ; . . . . . . . . . . . .. 4 •
Un Parnasse. . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 2 10

lcero n ...................... '. . . . . . . . . .. .

Quinte Curee. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. )) lv
Un gr ec. . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . » 5
Canisius ............................. ~ . . . . . . 3
Manuel .. 0 . . • • • • • • • • • • . • . . • • • . • • • • • • • • • • • • •• 1 10
Virgile ......................... .

o ICerOn ............. .. . ; .................. .

Virgile ................................... .

Terence commenté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 1 10
Pour une armoire à la salle de l'étude pour ra-
masser les livres. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 2 »

Port de lettres, quête des pauvres et pour faire

raccomoder son coUre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 1 i 5
Au perruquif''' qui le poudre pour 3 mois com-
mencé le 6 janvl\. 1719 à 15 s. par mois.. ....... 2
Dépense faite pour les déclamations devant le père
visiteur l'année dernière :

Pour le bouquet ..................... , ..... .

Pour faire friser les cheveux .. , ......... , . . .. » 15
• Une paire de gants ................... ~ . . . . . .. » 10
Argent

Donné pendant les vacances. . . . . . . . . . . . . . . . .. 1 10
Pour 23 semaines depuis la Toussaint jusqu'au

g avril 1719 à 12 s. par semaine .......... ; . . .. 13 14

. XXXV
, L'abbé du Breignou au même . .

A Nantes, ce 9" janvier 1720 .
Mon très cher et ~onoré père,

Depuis que je n'ai eu l'honneur de vous écrire, M. de Pon-
calec a été 'amené ici par une 0 escorte de cen t hommes de la
maréchaussée et les gardes du château furent au devant de lui.
C'est M. Meslier et M. de Mianes qui l'ont arrêté. M. ]e comte

du Boissy est aussi au château, il est arrivé d'aujourd'hui il y
il fut pris en sa maison de Teillac, du côté de
a huit jours,
Vannes, par un ordre de M. Paiot qui fait des informatio'ns de
ces côtés là, l'on dit que Mme de Lanbilli sortira sans tarder.
La nouvelle de l'arrivée de M. et Mme la duchesse du Maine à
Paris fait -espérer que toutes ces affaires ci n'auront point
une si longue suite que l'on l'avait dit tout d'abord. M. de la
Bourdonnaye et M. de Boisjolan qui avaient eu l'un et l'autre
des leUres de cachet pour demeurer à Rennes ont obtenu leur
Le courrier qui leur en a appor.té la lettre
élargissement.
en même temps d'un ordre d'arrêter le premier
était chargé
secrétaire de M le maréchal. Il doit arriver aujourd'hui.

XXXVI

L~ chevalier de Treffaléguen à son père

Du Cap Français, ce 19" janvier 1 no, à bord du Content.

Mon très cher et honoré père,
Nous sommes arrivés ici le 1~ de ce mois. Notre traversée
a été un peu longue par le mauvais temps et les vents con-
que 'nous trouvâmes peu de jours après notre sortie de
traires
. Brest. Le coup de vent commença le jour de la Sainte-Cathe­
rine qui · dura quelques jours. Nous sommes à présent bien

tranquilles. Nous ne savons pas positivement le jour que nous

en partirons. Notre mission en sortant d'ici est de nous rendre
à Pansacole (1) pour y mettre à terre ces misérables que nous
nos vaisseaux; nous serons bien charmés quand
avons sur
nous nous en serons défaits, car ils nous sont d'un grand
Après nous en être débarassé je crois que nous
embarras.
ces parages quelques jours. Nous sou­
pourrons croiser dans
quatre vaisseaux espagnols que
haiterions fort nous joindre
( 1) Pensa cola (Floride) .

J'on dit à la Vera-Cruz et qui doivent se rendre à la Havane:
cette rencontre augmenterait les agréments de notre campagne.
M. de Champmeslin en a fait une bien avantageuse et hono­
rable, nous l'avons su par M. de Vienne que nous avons trouvé
ici qui était de son escadre, il part sous un mois avec ses
prises pour s'en retourner en France. Nous avons très peu de
malades dans nos . seaux. Le pauvre Coetlogon est mort
mais la mer n'a pas contribué à sa fin, il s'était embarqué très
incommodé ...
. Tout est ici d'une grande cherté il n'y a que du tabac dont
le bon n'est pas commun.

XXXVII

Le chevalier de Tréffaleguen au même
. Au Cap Français clans l'île de Saint-Domingue ce 9" février 1720.
J'ai eu l'honneur de vous écrire le 22 de :ianvier par M. Roc
commandant le Dauphin de Bordeaux: je comptais recevoir
des lettres de France par des bâtiments partis vingt jours ·
après nous qui sont ici; il Y en a deux de Nantes, l'abbé du
Breignou m'eut fait bien plaisir de me mandel' des nouvelles

de ce pays là celui-ci nien produit point. Nous partons demain
pour nous rendre à la Mobile (1) Y mettre à terre nos passa­
gers, nous y escortons deux bâtiments de la Compagnie qui
sont aussi chargés de monde pour le Missisipi ; cela fait nous
devonS-c roiser sur les Tortues Tout est ici d'une cherté in-

croyable, ce qui fait que je n'en rapporte que du tabac qui me
parait assez bon. Je vous envoie cette lettre par le Triton
commandé par M. de Vienne qui doit partir le US de ce mois ' .
pour se rendre en France, nous partons tous en parfaite santé '
et j'ai l'agrément d'être avec un capitaine qui a pour moi

(1) Alabama.

mille bo.ntés que je ne mérite pas. Brescanvel, enseigne de
vaisseau, s'est laissé mo.urir, il était sur le vaisseau de M. de
Maro.lle ; MM. de Chateaumo.rant et de So.rel so.nt à l'ago.nie,
les capitaines de no.tre escadre leur o.nt écrit sans répo.nse.
C'est M. d'Arqui.n qui est ici go.uverneur .
.. . Je ne sais si Villo.zern co.nnaît M. de Galliffet, enseigne
aux gardes. Depuis peu il est ici ayant la plus belle habitation
du Cap; je ne l'ay pu vo.ir ne m'ayant pas été po.ssible de
quitter le bo.rd. .

XXXVIII
L' abbé du Breignou au même .
A Nantes le 12 mars 1 no

.... Les co.mmissaires travaillent depuis hier au rappo.rt de
toutle pro.cès de ceux qui so.nt au château; ils jugero.nt un cha­
cun, à mesure que le rappo.rt s'avancera; to.ut le mo.nde
espère vo.ir la fin de to.ut so.us quinze jo.urs o.U tro.is semaines.
Le bruit Co.mmun est qu'il y a une amnistie générale po.ur les
co.upables excepté ceux qui so.nt ho.rs du ro.yaume. M. le
'mar~uis de la Ro.che et M. le marquis de Trans so.nt so.rtis du
château. M. de To.urnemine qui était venu ici par un ajo.ur­
nement perso.nnel est reparti pour Remies après avo.ir été .
interro.gé, M. du Laté a eu une permissio.n d'aller à sa cam­
pagne, gardé cependant jusqu'à ce que l'o.n ait fait la recher­
che de certains papiers que l'o.n l'accusait d'avo.ir parmi les
siens C'est lui qui a demandé que l'o.il eut à visiter so.n cabi­
net; sa femme n'a pu o.btenir de faire le vo.yage quo.iqu'elle

ne so.it po.int priso.nnière '.

L'augmentatio.n des mo.nnaies a été publiée hier ici; les
écus neufs à 8 livres, les vieux à -10 livres et 1'0.1' à pro.po.rtio.n;
l'o.n parle beauco.up du rembo.ursement de to.utes les charges
du ro.yaume, ila ~ême été ditici que l'édit paraissait mais o.n .

ne l'a point vu. Plusieurs croient qus c'est pour engager à
mettre l'argent à l~ banque .
Mon frère se ~e bien .
L'abbé DU BREIGNOU .
XXXIX .

L'abbé du Bretgnou au même.

A Nantes, ce 19" mars 17'20 .

J'ay receu la lettre que ma chère mère m'a fait l'hanneur de
m'écrire avec celle de Mgr de Léon où il me marque qu'ïl

serait porté à ce que je fisse mes études à Paris. J'espère que
vous voudrez bien m'accorder votre consentement la dessus
et les moyèns nécessaires pour y aller.
L'on attend le jugement pour les messieurs qui sont au
château: Les commissaires s'assemblent deux fois le jour
L'arrêt des diminutions est 'publié à Paris. Les vieux louis
sont à 52 livres et le resfe à proportion; il .y en aura tout" le
mois mais on" ne sai t combi en. . . . . . . . .. . . . . . . . .

Le cheDalier de la Villozern au mêl1w.

Paris ce 25" mars 17'20 .
On croit que les affaires de Nantes finiront incessamment;
on assure même que M. de Mianne a renvoyé son détachement
et que l'on arrêtera plus personne. La nouvelle de M. de Kera-
vel n'est que trop vraie: je la tiens de lui-même; il se con-
sole parce que tout ce qu'il a perdu était à lui et qu'heureuse-
ment il a encore trois actions d'Occident qui valent le fond que
lui avait donné M. son père; son malheur est d'autant plus
gran~ qu'il n'a pas " grande espérance de les regagner dans la

situation présente de l'agiotage. Une aventure arrivée depuis
deux jours à Quinquempois a fait chasser tous les bureaux qui ,
y étaient.: un baron d'Horn, flamand d'origine, dont le frère
est prince de l'empire et grand d'Espagnê, accompagné de
deux autres qui 'ne valaient pas mieux que lui raccrochèrent
un commissionnaire poroleur de 50.000 écus d'effets et sous
le prétexte de faire des affaires avec lui le menèrent dans un
cabaret où pendant qu'il comptait les billets ils lui bandèrent
les yeux et le percèrent de coups de poignards. Le cabaretier ,
voulut entrer dans le moment dans la chambre" mais voyant
ce spectacle, retira la porte et la ferma à double tour et cria
au secours, ce qu'ayant entendu, ces messieurs jugèrent à
propos de le jeter par la fenêtre.' Il y en a eu deux d'arrêtés
dont est M. le baron; toute la cour à qui il est allié a demandé
sa gl'âce sans la pouvoir obtenir de M. le Régent; ils doivent
être jugés aujourd'hui ou demain, la compétence l'ayant été
samedi. .
M. l'abbé de Coetenfao est arrivé ici en bonne santé; il m'a
fait l'honneur de me venir' voir av~c M. l'abbé ... ; ce dernier
à ce que l'on m'a dit ne gagne pas depuis son arrivée ici et je
crois qu'il n'est pas le seul. Pour moi j'ai vendu ma prime ce
qu'elle m'avait coûté; j'aurais plus gagné de garder mon argent. .
M le chantre m'a dit que mon frère l'abbé du Breignou

était recteur de Ploudaniel; c'était une nouvelle pour moi.
XLI
A Nantes, le 26 mars 1720 .

L'abbé du Breignou au 'même.
Mardi 'se fit le jugement de quatre de ceux qui étaient au .
château de Nantes: la fin de cette affaire que tout le monde
souhaitait n'est venue que trop tôt parcequ'elle ne s'est point
terminée comme l'on l'avait pensé. Messieurs de Montlouis, du

Couëdic, de Talhouet Le Moine et de Pontcalec eurent la tête
tranchée à neuf heures du soir dans la place du Bouffay, le,s .
compagnies du régiment de Saint-Simon qui est ici et les ,
gardes du château étant sous les armes, les portes de la ville
fermées. MM. de Salareun de Keranguen et de Kergomar qui '
devaient être compris dans le premier jugement ontété remis
à une plus ample inforniation et toujours gardés en prison;
, seize autres furent décoltés en effigie: je ne sais les noms que
, de messieurs du Pouldu, deux frères de Lambilly, BeITaye,
Bonamour, du Glosquer, les deux de Rosconan de Guérande.
L'éxécution a mis toute la ville en tristesse. La Chambre 'ne
s'asssmblera qu'après l~ Quasimodo s'il ne vient de nouveaux
ordres de la cour .... ,.
XLII
L'abbé du Breignou à sa mère. ,

A Nantes le 2" avril 1 no

Ma très chère et honorée mère,

J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'é-
crire et le billet de banque que vous m'envoyez; l'on ne
donne point ici à la monnaie des billets de 100 livres; ils n'en
ont point encore reçu de Paris et depuis la diminution l'on ne
. touche 'point non plus d'argent: 'j'espère que M. et Mme de
BecdeIièvre m'en donneront; mon frère est en parfaite santé,
il aura l'honneur de vous écrire désormais plus souvent. M.
et Mme de Becdelièvre qui ont mille amitiés pour lui croient
cependant qu'il serait infiniment mieux à la Flèche qu'ici;

l'on n'est point trop content de la manière dont ils gouvernent
leurs pensionnaires. Pendant que j'ai été ici je n'ai point
mandé si précïsément qu'il serait mieux ailleurs par le plaisir
que j'ai eu de le voir; mon cher père mandera s'il le souhaite
son sentiment là-dessus à Mme de Becdelièvre ; mon frère a bien
besoin d'être habillé, il y a un an qu'il ne l'a été .......... .

XLIII

Le chevalier de la Villozel'n à son père .
A Paris ce 3° avril 1720 .
.. . On a été ici bien étonné d'apprendre la nouvelle de Nantes;
il se trouve que le comte de Horn et son complice ont été roués
ici le même jour de cette triste exécution. M. le Régent est à
Saint-Cloud depuis lundi il ya huit jours.
Il n'y a plus du tout de rue Quinquempoix; on a publié un
arrêt qui défend de s'assembler dans quelque endroit que ce
soit pour négocier tou tes espèces de billets, si ce n'est chez
les agents de change. La diminution a eu lieu, c'est.,à-dire )1
n'ya pas eu de prolongation comme on l'avait dit.

. . .... M. l'abbé de Kermorvan est parti hier pour se rendre
ce pays-Ià . .!1 a permuté un bénéfice simple contre un
dans
canonicat de Quimper On n'a jamais vu les marchandises
le sont; il n'y a que-le pain et le vin à
aussi chères qu'elles
un juste prix.... .

XLIV

Le chevalier de la Villozern à son père .

A Paris, le 15 avril 17~O .
..... M. de Keramon qui était à Paris avec ordre de ne voir
de Bretons comme exilé a eu son rappel. Il a couru un
point
bruit que douze conseillers et deux présidents, dont M. de Ro­
chefort est, avaient ordre de se défaire de leur charge aussi
bien que M. le procureur général à qui on a demandé la dé­
mission de la sienne. On a donné la confiscation des biens des
gentilshommes condamnés aux plus proches parents et héri-
tiers. ,

On ne parle ici que d'assassinats et de cherté de toutes les
denrées; on nous promet cependant un meilleur temps ... ' .

XLV

L'ahbé du Breignou au mêrne . .

A Paris, le 20 avril 17"20 .

J'arrivai ici jeüdi par le messager où j'ai appris les nouvelles
de l'amnistie qu'on attendait; elle fut publiée à Nantes lundi
à 10 heures; tous ceux qui étaient au château avaient par
l'amnistie une permission de sortir, et l'on a donné à quelques­
uns des lettres de cachet qui les y retiennent en prison; de ce
• nombre sont M. du Lattay et Mme de M0ntlouis. Il y en a
quatre autres exceptés MM. de Salareu·n, Kerogan et Keran­
guen et M. du Bouexic qui est à Pierre Encise. Ils sont tous

partis du château de Nantes le lundi à mimJit. Les seize effigies
n'ont aucune grâcé' ; les absents, qui n'en ont point non plus,
sont MM. de Fontaine le père, du Lescoat, Roscoat, Kervasi
l'aîné, Kersoson. Je n'en ai point su davantage .....

XLVI

L'abbé du, Breignou à sa mère .

A Paris, le So mai 1 HO.

Ma très chère mère,
J'ai encore été aujourd'hui à la banque pour trafiquer le
billet que vous m'aviez envoyé: ils ont refusé de l'échanger
jusqu'à ce qu'ils aierit eu quelque marque 'que j'étais le por­
teur à qui il a été envoyé; la lettre par laquelle vous me mar­
quiez que je le recevrais eut suffi; comme je ne l'ai point
gardée il en faudra avoir une de M. Bazlanec qui me marque

m'avoir envoyé ce billet de '1.000 livres no 88.788 ..... Il sera
aujourd'hui décidé au conseil en quel temps et en quel lieu se
tiendront les Etats de Bretagne; on dit que M. de la Vrillière dit
l'autre jour à M. d'Ernothon (1) qu'il avait écrit une lettre à
M. son fils de se défaire de sa charge sous trois mois faute de
quoi il pouvait se préparer aussitôt le terme expiré d'entrer en
prison jusqu'à ce qu'il eut donné sa démission.
XLVII
me de n'etfaléguen
M. de la Varenne a
A Toulon le 20 mai 1720 .

Il ne paraît pas que le conseil se soucie de presser l'arme­
ment des trois vaisseaux qu'on veut faire dans ce port,
l'ordre n'étant pas en,core venu de les caréner ni de faire la
levée des matelots, et on fait mystère de leur destination ce'qui
n'accomode pas les armateurs. La cherté de toutes choses en
ce pays est augmenté des deux tiers, on ne peut pas y sub-
venir. Je m'incommodai fort l'année dernière de l'armement

des vaisseaux que je commandai devant Rot (?) où il me couta
deux mille écus du mien et je vois qu'il m'en coûtera bien
davantage cette fois-ci quoique je n'aie que le commandant de
mon vaisseau dans l'escadre du marquis de Rouvroy. J'ai été
très faché de la malheureuse affaire de plusieurs gentilshom-
mes bretons, je craignais fort qu'il n'y eut de vos parents ou de ·
ceux qui vous appartiennnent ; je suis bien soulagé de ce que
vous m'apprenez qu'il n'y ,en a pas; Continuez-moi, ma
chère sœur, l'honneur de votre souvenir. J'assure Mme Le
Noblet de' respects; mille compliments à M. de Tre-fIaleguen,
j'embrasse la chère famille et suis au delà des expressions et
votre très humble et très obéissant serviteur.

LA VARENNE.
(1) Baron du Pont-l'Abbé. Son fila, conseiller au parlement de Rennes,
avait été exilé à Aix.

..... Nous devons avoir ici demain la princesse de Modène
qui y demeurera quelques jours. M. le Grand-Prieur de
France, l'attend à Antibes avec six galères du Roi depuis un
moi. Elle ne se presse pas d'aller ,à Modène où elle ne s'attend
pas à avoir de gra nds plaisirs ,

XLXVIII
Le checalie1" de la Villozern à son père.

A Paris, le 23" mai 1720.
VOus aurez su par mon frère qui m'a dit vous avoir écrit
samedi que les billets avaient été diminués. On publia hier la
révocation de cet édit et l'on donne le même cours au papier
auparavant. Tout Paris était ému et l'on parlait très librement.
Tous les actionnaires qui sont ici avaient pris la résolution de
partir successivement si la diminution avait eu lieu .....
Mon frère à la fièvre double tierce depuis sept jours; il devait
l'avoir cette nuit, mais 'elle ne lui est pas venue; il s'est fait
saigner trois fois et a fort bien fait; car il l'avait blanc, fort
échauffé avec une grande plénitude Il s'est fait purger aujour­
d'hui il faut espérer qu'il en est quitte .
M. le duc de Guiche n'a pas ' enGore travaillé avec M. le
Régent pour les grâces du régiment; je lui ai demandé la croix,
il m'a répondu de donner mon état et qu'il le présenterait en
même temps etme dit qu'illui était revenu que je voulais quitter;

je lui dis que ce n'était que pour vous obéir et que vous m'aviez
marqué pendant mon voyage dans ce pays là le souhaiter. Je
puis dire qu'il me fit mille compliments gracieux que je serais

heureux d'avoir mérité mais ce n'est qu'eau bénite de 'cour. Je
m'attendais à avoir une réponse de vous à ma dernière afin
de pouvoir prendre mes mesures pour le temps que l'on dis-
tribuera les congés si vous persistez toujours dans les mêmes
sentiments.

XLIX
Le chevalier de la Villozern au même .
A Paris, ce 24,· aoû t 1720.
..... MOl) frère est allé aujourd'hui à la place pour tacher
de convertir son billet qui perdait ces jours passés 120, pour
le changer en billets de '100 et ceux de '100, Hi livres pour .
être chano'é en billets de '10. Comme l'on dit que l'on va oter le
cours aux billets de 1.000 et de 10.000 dans le commerce, tout
le monde s'empresse de s'en défaire; on donne un certain
temps pour les placer sur l'Hotel-de-Ville, faute de ,quoi on les
mettra au compte en banque qui n'est autre chose qu'une
de la compagnie de la somme que l'on y aura
reconnaissance
qui aura cours dans le commerce. On parle aussi de
portée
payer en ces billets les actions qui auront cours dans le com­
merce et porteront intérêts. On les donnera sur le pied de
'12.000 liv, Il ya euun arrêt donné la semaine passée par lequel
la monnaie augmentait encore mais on l'a retiré et il n'a pas
paru dans le public.
On parle de guerre depuis deux jours. Tout le monde
déserte ~aris par l'impossibilité de subsister car tout est trois
fois plus 'cher qu'il n'était. M. le Chantre part le 20 avec M.
de Saint-Laurent; ils s'en vont sept ou huit par la Loire. M .
l'abbé Calloet part pour Bourbonne avec M. de Kergorlay. M.
de Montafilan n'attend qu'une litière pour aussi s'en aller.
, Les nouvelles actions commencept cependant à gagner; elles
ont gagné jw:;qu'à 15, on en a donné volontiers aux officiers,
mais comme peu ont des fonds, il n'y a eu que ceux qui ont
eu assez de crédit pour en avoir sans se charger de les faire '
qui en aient pris. On en a donné cent dans le régiment de
Champagne, on leur a donné des croix de Saint-Louis.' M.
des Barières en a eu une ................... .
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXVI (Mémoires). 11.

L'abbé du Breignou au même.
A Paris, le 10 juin 1720.
Hier M. le cardinal de Rohan assisté de MM. les évêques
de Nantes et d'Avranches ('1) fit la cérémonie au sacre de M,
l'abbé du Bois, archevêque de Cambray. lVi. le marquis de
Poulpry m'y fit entrer, il s'y trouva grand nombre d'évêques
et les cardinaux de Bissy et d~ Reims et une infinité de gens
de cour. L'on dit M. l'abbé de Maupeou, agent du clergé,
nommé à l'évêché de Lombez; c'est le seul évêché vacant qui
ait été rempli.

Le chevalier du Breignou att 1nême.
A Paris, le 15 juin 1 (no.
Mon frère n'ayant point vu l'ari'êt de la diminution quand
. il vous écrivit n'a pu vous la mander au juste. Elle commence
au premier du mois, prochain, continue le '15 et le 1 l'
d'août. Je vous marque la diminution de chaque espèce par
ordre de leur valeur et les plus fortes sont les premières;

('1) Ce ne fu t pas l'évêque d'A "ranches, Roland de Coetanfao, qui assista
le cardinal de Rohan au sacre de Dubois mais l'évêque de Clermont
Massillon. Le~ mémoires et les correspondances du temps témoignent du
scandale causé par l'élévation de Dubois à l'épiscopat. Le chevaliar de la
Cour', écrivait à sa mère la marquise de Balleroy: « vous I!e savez peut-être
pas la façon dont il a été nommé,' M. le Régent soupant avec une demi:- -
de ses roués dit: « J'ai nomllié à l'archevêché de Cambrav, je ne
douzaine

crois pas que Dieu m'en sâche beaucoup de gré car j'ai nommé le plus
grand coquin, le plus gran,d scélérat, le plus grand athée et le plus
mauvais prêtre qu'il y ait au monde)J. L'abbé Dubois sans attendre qu'on
le nom mat se leva et alla baiser la main du Hégent et le remercia. » .
(Les corl'esponclants de la marquise de Balleroy. II. p. 169.) ,

au :1 el' juillet les louis sont à ~6 liv. ~ s., 4~ liv., 37 liv.
10 s., 30 liv. 15 s.; les écus à 9liv. 7 s. 6 d., 8 liv . 6 S., 7liv.
10 s., et 2 liv. 10 s.; le marc d'or de 22 carats à la monnaie
. 1125 liv. et celui d'argent 75 liv. Au -16 juillet le louis a:50 liv.
12 s., 4i liv. 10 S., 33 liv. liS s., 27 liv. 12 s. ; les écus'à 9liv.
8 s 9 d., 7 liv. 10 s., 6 liv. 15 s., 2 liv. :5 s. ; le marc d'or
la monnaie 10t2liv, '10 s. ; celui d'argent 67 liv. 10 s.

et au 1 août les petits écus seront à 2liv. et toutes les -vieilles
espèces absolument décriées. Les quarts et les demis des
louis et des écus diminuent à proportion. Je n'ai pu trouver
aucun moyen et il n'yen a pas . pour les 200 liv. que j'ai
perdues sur mon billet. On ne peut s'en prendre à la banque
qui change et paye tous les jours une infinité de personnes à
que l'on leur porte des billets. . .
mesure
M. d'Argenson le fils ne perdra point comme l'on l'avait dit
de lieutenant de police; le père se retire
d'abord sa charge
avec la conservation du titre de garde des sceaux et 40,000
lh l'es de pension sa vie durant. L'archevêque vient d'être
nommé à une abbaye de 8,000 . livres de rente. La disgrâce
n'est point si forte qu'elle l'avait paru d'abord. Il a couru

le public que M. Le Blanc avait le même sort; il n'est
dans
même pas encore décidé s'il pourra tenir. Les mêmes bruits
avaient couru de l'abbé Dubois sur ce qu'il doit aller à son
mal à propos. M. le Régen t fu t à son sacre ·
archevêché mais
et donna ensuite au Palais royal un dîner dé plus de cent
personnes; il lui a encore fait présent depuis d'un diamant
qui vaut cinquante mille écus .
"'J.\I( le président de Nantes est toujours ici; il n'a pu encore
trouver aucuh jour à rien obtenir pour son parent qui est à
Lyon ou à Pierre Encise. Les billets vont être changés; l'on
en fait de neufs; l'on dit qu'ils seront de parchemin.

L'abbé du lJ1"eignott au même
A Paris, le 19 juin 1720 .
Mon très cher père,

Il ne s'est rien passé de considérable depuis ma dernière
lettre, c'est le Relec qu'a eu l'a~chevêque de Bordeaux, ' il
prêta le serment de fidélité dimanche (1), et l'abbé du Bois le
prêta aussi pour Cambrai. .
Les études commencè.nt à Nantes pour ·mon frère au '1
de septembre; quand il aura été en vacances, je ne sais pas
s'il reprendra ensuite très facilement, au lieu qu'il était en
bon train et commençait à être fort quand je l'ai quitté; cela
ne pourra toujours pas manquer de le retarder pour peu qu'il
y reste longtemps. Ils sont assez mal à l'Oratoire en ce que
le nombre de pensionnaires est petit et que l'on n'y voit
point une certaine règle dans les récréations pour la propreté
dans les études que l'on trouve dans les autres collèges.Je con-

nais des personnes de Nantes qui ont envoyé leurs enfants
à la Flèche. Si vous preniez le parti d'y mettre mon frère
je leur écrirai pour l'adresser à ceux qui ont soin de leurs
enfants, et ils le feraient avec bien du plaisir.
LIlI

L'abbé du J3reigrwu au même.

A Paris, le 10 juillet 17'20 .
Depuis les dernières nouvelles que nous vous avons mandées
il a paru 'deux arrêts dont l'un regarde les pierreries et
(1) François-Elie de Paulmy de Voyer d'Argenson, archevêque de Bol'­
deaux. Il mourut le 25 mai 'I7:2!:I.

l'autre la vaisselle d'or et d'argent et en général toutes ces
matières. Ce dernier confirme tout ce qui est contenu dans
ceux du '14 décembre '1689 et du mois de mars 1700 sans les
expliquer aucunement; il fait seulement un cas particulier
les orfèvres à l'égard de l'or et leur défend de fabriquer
pour

aucun ouvrage que ce soit qui excède la pesanteur d'une once
excepté les croix d'évêques, archevêques et chevaliers de
tous les ordres. L'arrêt des pierreries en défend l'usage

absolument.
Il a été décidé que les Etats se tiendl'aient à Ancenis et ce
sera M. le marquis d'Ancenis qui présidera pour la noblesse:
M le maréchal d'Estrées se dispose à ce que l'on dit à Y faire
ne sais si je vous ai mandé l'exil de
une grande dépense. Je
quatre messieurs Paris qui avaient été dans les affaires de la
Banque. L'on y paye a présent et .coupe les billets mais bien
à chaque personne. L'on n'y distribue que 10
mincement
livres d'argent, les .commissaires n'en donnent plus ..... .
LIV

M. M. J. Thepault à sa mère
A Nantes (Aout 1720).
. Ma très chère et 11O.norée mère,

Si j'ai tardé si longtemps sans avoir eu l'honneur de vous
écrire, ce n'a pas tant été la négligence qui .en a été la cause
que l'occasion favorable que je cherchais de pouvoir vous
marquer l'état misérable où je suis il y a si longtemps sans
le faire connaître. Mais comme Mme de Chasseloir
pouvoir vous
eu la bonté de me venir voir fort souvent et qu'ayant elle­ •

lbême vu le triste état où je suis, elle m'a fait le ~laisir de
me dire qu'elle comptait partir bientôt pour Morlaix et de me
demander si j'avais quelque chose à mander, je n'ai pu

m'empêcher de lui dire qu'elle me ferait un sensible plaisir
de vouloir bien se charger de cette lettre et de vouloir bien

vous dire elle-même la triste situation où je me trouve Elle
m'a même offert de l'argent et a même voulu en donner au
Père Dornet pour me faire habiller, mais je l'ai priée de lui
en pas donner ne sachant si vous ne l'eussiez trouvez bon et
comptant de jour en jour que vous en eussiez envoyé au Père
Dornet qui me dit après avoir reçu votre lettre qu'il ne ferait .
point d'avances et que le mémoire de la pension était déjà
assez gros sans faire cette dépense. Il a aboli cette anilée la
, coutume de donner à chaque pensionnaire ses semaines ce
qui n'aurait pas laissé que de me faire de la peine si mon frère .
. l'abbé du Breignou ne m'avait donné quelque argent avant son
départ pour Paris. J'ai aussi eu trois accès de fièvre qui n'ont
pas laissé de m'abattre avec le chagrin que j'ai de me voir dans
une SI triste situation et l'envie que j'ai de vous voir a.ussi
bien que mon cher père et mes frères et sœurs. Rien enfin,
. ma très chère mère, ne saurait me faire un plus sensible plaisir

ni être un plus grand soulagement au chagrin que j'ai de me

voir si abandonné et aux , fatigues que j'ai eues pendant cette

, année, que celui de vous' voir. Voilà, ma chère mère, la triste
situation que l'envie de finir ma seconde m'a fait vous cacher

, jusqu'ici. Nous sommes en vacances depuis le'26 août; j'espère
que vous voudrez bien y avoir égard. La pension est si chan-

gée, que si Calloet y revenait il n'y reconnaîtrait plus rien;

on est très mal nourri et même plus mal qu'auparavant quoi-
qu'ils aient mis l-a pension à '1'00 écus .. , .. l'on y est enfin si
mal, que iD ou 18 pensionnaires ont voulu sortir il y a deux
mois et que les Pères de la pension n'ont pas voulu leur don­
ner permission leur disant que s'ils quittaient avant l'examen ,
, et la nomination qu'ils ne rentreraient pas et que même on
ne les reoovrait point au collège; il en est déjà sorti un grand
nombre. Il n'y a plus que les basses classes qui auront leurs
vacances le ;) septembre; ce règlement fait beaucoup de bruit

en ville et paraît fort extraordinaire à tout le monde. Si votre
ma chère mère, et celle de mon cher père, est de
intention,
me faire continuer ~a rhétorique vous aurez la bonté de dire
Mme de Becdelièvre de me faire habiller et de me faire
retirer de cette pension ne pouvant plus y rester ...... .

M. AI. J. Thépault à la même.
A Nantes, ce 12. septembre tno.
..... Le P. Dornet a malheureusement su que vous m aVIeZ
écrit et m'a obligé de lui montrer la lettre où il a lu l'article où
vous me mandez de prendre congé gracieusement de messieurs
de l'Oratoire et de cacher mes petits sujets de plaintes. Ce
dernier .article l'a fort choqué et l'a mis dans une grande colère
contre moi ayant bien connu ' par là que je vous avais écrit
su ; il a voulu me forcer de lui dire devant le
sans qu'il l'eut
Père supérieur le sujet que j'avais de vouloir m'en aller; je

lui ai dit que c'était l'envie que j'avais de vous voir et mon
cher père et l'ennui que j'avais d'être si retiré qui m'avaient
vous écrire en cachette et que puisqu'il n'avait point voulu
. fait
me faire habiller j'avais été obligé de vous écrire pour vous
marquer la triste situation où je me trouvais réduit. Je crois
vous écrira aussi par la poste. Voilà, ma très chère mère,
qu'il
ce que je puis vous dire jusqu'à ce que j'aie le plaisir
tout
de vous voir. .

LVI
Le che/)alier de la Villozel'n à son père.

A Paris, ce 25" septembre 1720 .

1 nuenti snnt sermones tui et comedi eos

et factum est rnihi verbum tuum in

gattdiUln et in lœtitiam cordis mei .
Mon très cher père, •

Vos paraboles pour me servir des termes du. prophète Jé-

rémie se sont converties en une sainte joie et ont comblé de
plaisir mon âme: il ne me reste plus qu'à faire pénitence afin
de mériter la miséricorde de Dieu et votre bienveillance et
comme je crois que je ne puis obtenir l'une sans l'autre ne

souffrez pas que je fasse comme Caïn en me défiant de · la
bonté divine par le refus de votre charité.
~ M. de la Bunelaye écrit ici des Etats que l'on a accordé trois
millions de don gratuit et que les Etats ne seraient asssemblés
que dans trois ans suivant les intentions de la Cour. Il est
décidé qu'il y aura deux procureurs 'syndics mais ils ne doivent
être nommés que samedi et lundi on 'parlera de la trésorerie .
Les billets de 1.000 ne vallent à la place que 2;)0 livres, ceux
de 100,32 liv. HS s . . et les 10 livres 3liv. 15 s. On parle d'une
nouvelle monnaie qui vaudra beaucoup et est beaucoup au­
dessous de celle d'aujourd'hui. C'est la nouvelle d'hier qui
mérite confirmation. -
LVII

. L~ chevalier
de Treffaléguen. au même

A Brest, ce 3" novembre 1 no .
..... M. de Ricbic ('?) était hier ici, il y vint de Cpef-du-Bois
où il est depuis quelques jours; il ne parle que d'actions et de
millions, il dit que M. de Las aura 80 vaisseaux sur pied en
172'1, il les fait construire en Hollande et à Hambourg .

LVIII
, L'abbé du Breignou à son frère.

A Quimper, le 20 février 1722 .

Je reçus la vôtre mon cher frère. Celle que je VOlIS ai écris
a été bien retardée. Je ne m'en étonne point. Toutes celles qui

arrivent ici le sont presque toujours et la poste de toutes les
villes de Basse-Bretagne n'est point bien réglée. Mais que cela
ne vous empêche point de m'apprendre de vos nouvelles, elles
me font toujours le plus grand plaisir du monde lorsque je les

reçois; ainsi je vous prie, mon cher frère, ne m'épargnez
point les ports de lettre. Comme je suis persuadé que les
miennes vous feront aussi quelque plaisir je vous en donnerai
le plus souvent que je pourrais par l'espérance dll retour.
Vous avez vu appar'emment à Morlaix les logements de
carnaval ('1) ; l'imitation de ceux-là en a produit icy sur les
chanoines qui ont été adressés au sindic. Ils sont peu spiri­
tuels . d'ailleurs comme vous ne connaissez pas les chanoines
vous n'y entendriez rien. Mon ouvrage est l'A l't r/,'entretenû'
les chanoines dans l'embonllOint [es élJithèles des dames sont
la presse et doivent paraître incessamment. L'au­
encore sous
te~r est anonyme.
Nous avons ici un prédicateur cordelier tout jeune dont l'on
est assez content; ses sermons n'empêchent point les assem­
blées qui continuent jusqu'à la fin du Carême Ol'dinairement.
Je souhaite qu'il en soit de même à Morlaix pour vous amuser

jusqu'à votre départ. . . . . ................ .

H. BOURDE DE LA ROGERIE

(A suicTe) .

(1) Le feuillet est c1échirô.