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III.
LA VIE DE SAINT GWENNOLE, abbé
MYSTÈRE BRETON EN UNE JOURNÉE ET SIX ACTES.
Saint Gwennolé fut un des premiers colonisateurs et civi
lisateurs de notre pays, vers la fin du Ve siècle. Sa vie, écrite
vers 880, par un moine de l'abbaye de Landévénec, nommé
vV rdistén ou Gurdestin, est le monument écrit le plus ancien
qni existe sur l'histoire de notre Cornouaille.
Gwennolé naquit de 463 à 467, au liÈm appelé aujourd'hui
encore Ploufragan, sur la baie de Saint-Brieuc, et où son
père Fragan ou Fracan, fuyant l'anarchie et la peste qui
rég'naient dans l'île de Grande-Bretagne, avait débarqué,
de 460 à 465 (1), avec un petit nombre de compagnons. Il y
fonda ce qui s'appelle un plou} ou paroisse, qu'on nomma
Ploufragan (PlebsFracani), Sa mère avait nom Guen, en .
latin Alba. Il avait deux frères et une sœur plus âgés que
lui, et nés dans l'île, avant l'émigration. Leurs noms étaient
Jacut, Weithnoc ou V énoc, V énec et Chreirbia ou Clervie (2).
A l'âge de sept ans, Gwennolé fut envoyé à l'école de
saint Budoc, qui avait une grande réputation de science et de
sagesse: Il habitait une toute petite ile, nommée Laurea ou
des Lauriers, Lavrec en breton, qui ri'est séparée de l'île de
Bréhat que par une grève étroite, laquelle découvre à marée
(1) Je prends toutes me.., dates dans l'introduction, par M. de la Borderie, cIu
Cartulaire de Landévénec, qui vient d'ètre publié sous les auspices et aux
frais de la Société archéologique du Finistère.
(2) Suivant les traditions galloises, Guen tl'imamm,is, ou teÎrù"on, en breton,
aurait eu un quatrième fils, nonllTIé Cadvan, ou le guerrier, parce r,u'il se serait
distingué dans les guerres contre les Saxons, dans l'lIe de Bretagne. M Le
Men a essayé d'identifier ce ead van ayec Gweitbenoc ou V énoc, V énec, par
la raison que Cadyan ne serait qu'un surnom, qui aurait prél'alu sur le nom
véritable.
(Voir Bulletin cie la Société archéologique du Finistère, t. II 1875 - p. 107).
basse, de sorte qu'on y peut aller à pied sec, de Bréhat.
Vers l'âge de 23 ans, il quitta Budoc, accompagné de douze
s'établit d'abord dans nne petite île
moines, avec lesquels il
à l'embouchure de la rivière du Faou, et qui portait
située
le nom bizarre de Topepigia insula. On l'appelle aujourd'hui
l'île de Tibidi, ou maison de prière, oratoire, en breton.
et l'aridité de cet îlot les obligèrent, après
Mais, l'étroitesse
un assez court séjour, à quitter ce roc inhospitalier. Ils allè
rent alors s'établir 'à peu de distance de là, sur la côte
sud-ouest, dans un endroit boisé et abrité, à
opposée, au
qui. cette situation privilégiée valut le nom de Lann-Tévénec
ou Landévénec, c'est-à-dire monastère bien abrité, apricus,
en latin. Ils y bâtirent, en effet, un monastère et une église,
vers 489 à 491. '
jusqu'alors inculte et inhanité, fut bientôt défriché,
Ce lieu,
rendu fertile et devint pour le pays un vrai foyer de civili
sation. Les bienfaits de toute sorte, tant temporels que spi
rituels, dont G,;vennolé combla ceux qui se réunirent autour
de lui, et plus encore, peut-être, ses relations avec Grallon
et la conversion de ce puissant roi ou comte de Cornouaille,
qu'on lui attribue, rendirent son nom populaire et répandirent
au loin le bruit de ses vertus et de sa' sagesse.
Il eût été étonnant, qu'à tous ces ,titres, le peuple se fût con
la submersion
tenté de l'associer à Grallon, dans la légende de
de la ville d'ls, et ne lui eût pas consacré un de ces jeux scéni
ques,danslalangue nationale,qu'il appelle tragédies ,mais que
nous croyons devoir noinmer, moins prétentieusement, mys
tères, à cause de leur ressemblance avec les mystères français
du moyen-âge. Aussi, n'y a-t-il pas manqué, et nous avons,
arrangée et dialoguée pour la représentation en plein air,
devant le peuple 'assemblé, la Vie de saint Gwennolé, abbé,
en six actes et une journée.
Le père Grégoire de Rostrénen, dans la préface de
son Dictionnaire Français-Breton de 1732, et dom Loui~
Le Pelletier, dans son Dictionnaire de la langue bre-
tonne, de 1752, en font mention. Le premier pade d'un
livre, ce qui semble impliquer un imprimé, et le
au mot loman, colonne 548: « Le mot loman,
second dit,
« dans la vie de saint Gwennolé, dont j'ai une copie de 1580,
« est une qualité donnée à Frag,an, père du saint. » De sorte
est permis sur l'existence d'un livre véritable,
que le doute
c'est-à-dire d'un imprimé, attendu qu'on 'n'en connaît, jus
qu'aujourd'hui, aucun exemplaire. Dom Le Pelletier a lar
gement mis à contribution sa copie. M. de la Villemarqué,
dans un travail très intéressant, sur un fragment manuscrit
du même mystère, provenant de la collection de M. de Pen- ,
guern (1), a pris la peine de relever toutes les citations qu'en
savant bénédictin, dans son Dictionnaire, et il en
a faites le
a compté trente-cinq. La langue de ces citations est bien
d'accord avec la date de 1580.
Notre Président, toujours en quête et comme à l'aITutdes mo
numents perdus ou rares de notre ancienne littérature natio
nale, a entrevu, un moment, l'espoir de pouvoir mettre la
main sur un exemplaire de cet introuvable bouquin, car
l'existence d'un imprimé me semble probable, d'après tous
les renseignements qu'il a recueillis. Mais hélas! il a été
et tout espoir semble aujourd'hui évanoui (2). Pourtant,
déçu,
on nous assure que, dans une bibliothèque du Léon, riche en
imprimés et en manuscrits bretons de toute sorte, il existe
aussi un exemplaire, imprimé . sans doute, de la Vie de
Saint Gwennolé; mais, le pl'opriétaire serait resté inflexible,
jusqu'aujourd'hui, aux prières les plus instantes faites
pour en obtenir comml,lnication. Nous pensons toutefois
que la personne à laquelle nous faisons allusion ne pous-
(1) Voir Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t, XV - 1888 -
(2) Le correspondant de M. de la Villemarqué, à la recherche de l'exemplaire
qui lui ayait été signalé s'ex} rime de manière à faire croire à l'existence d'u,]
imprimé. Il parle, en effet, de pr~cieux, volume, livre curieux, précieux bouquin,
sera pas plus loin la résistance, et quelle autorisera, sans
tarder, à prendre communication et copie d'un document si
. rare et si précieux pour nous tous Bretons .
. Dans cette situation, que nous reste-t-il à faire? Nous
rabattre, en attendant mieux, sur les copies modernes, et
sans doute plus ou moins remaniées, quant à la langue,
qu'il est possible de retrouver, dans le peuple. Mais, ces •
copies sont aussi très rares, et, malgré tout~s mes recher-
ches, depuis plus de trente ans, je n'ai jamais pu m'en pro
curer qu'une seule. Je l'ai trouvée, en 1848, au village de
Roc'h-Iaz, dans la commune de Saint-Michel-en-Grève, chez
un paysan amateur de théâtre breton et nommé Thomas. Il
ne voulut pas me céder son manuscrit, copié par lui-même,
péniblement, longuement, pendant ses heures de loisir,
mais, il consentit à me le prêter. J'en pris moi-même une
copie exacte, et c'est celle que je donne ici. Si, plus tard,
comme je l'espère, il s'en découvre un manuscrit plus an
cien, ou, mieux encore, un imprimé de 1580, il sera très
intéressant de pouvoir constater, par la comparaison des
deux textes, quels sont les changements et les altérations
que subissent nos vieux mystères en pass?-nt successivement
par les mains de plusieurs copistes. Je crois que ces chan
genients et ces altérations portent sur la langue seulement,
et se bornent à quelques mots substitués à d'autres mots
plus anciens, tombés en désuétude, et que le copiste ne com-
prenait plus. La charpente, la marche et les épisodes du
drame doivent être restés intacts, à très peu de chose près (1).
Comme toujours, pour les œuvres de ce genre, le nom de
l'auteur est resté inconnu. J'ai pensé un moment que ce
pouvait être un moine de l'abbaye de Landévénec, au XVIe
(1) En 1864 et 65, j'ai déposé à la Bibliothèque Impériale, aujourd'hui Na
tionale, à Paris, em'iron cinquante manuscrits de mystères bretons, parmi
lesque ls se troU\'e aussi une Vie de Saint Gwennolé, mais qui ne diffère que
très peu de celle-ci.
Un savant celtisant, qui, sur ma demande, a bien voulu faire des recherches
dans le fonds celtique de la Bibliothèque Nationale, m'assure qu'une Buhe;;
siècle, ou du moins quelque clerc lettré, qui aurait eu con
naissance du manuscrit de Wrdisten, soit directement, soit
par la tradition orale. Dans le commencement de son drame,
en effet, on trouve comme des souvenirs du cartulaire de..
Landévénec, ou pep.t-être même du livre de Gildas De
excidio BritannÏte; par exemple, quand il parle de l'anarchie, .
de la peste et des désordres de tout genre qui désolaient l'île
de Bretagne, rU temps de l'émigration. Ce qui paraît indu
bitable, c'est qu'il devait avoir une certaine instruction et
qu'il savait même un peu de latin, comme le prouve sa
parodie du Credo (p. 88) et le nom 4'Alba, qu'il donne à la
femme de Fragan, au lieu de Gwenn, qui est le nom breton,
le nom populaire. Mais aussi, il tombe bientôt dans de telles
hérésies historiques et autres, qu'on est obligé de s'en tenir
au doute.
La pièce est certainement antérieure à la première édition \
des Vies des Saints de Bretagne, par Albert Le Grand, qui est
de 1636 ou .37, c'est-à-dire environ 56 ans avant l'auteur de
notre mystère. Et pourtant, le père Albert et lui se trouvent
d'accord, sur certains points, où ils sont en complet désaccord
Sant Gw :!nnolé, sou.> forine de mystère, existe aussi Qans les manuscrits de la
collec~ion de Penguern, et plus rapprochée, IJaralt-il, quant à la langue, de la
copie ou de l'imprimé du X V l' siècle, connu du père Grégoire de Rostrénen et
de dom Le Pelletier. Voici, du reste, ce qu'il m'écrit à ce sujet:
« J'ai trouvé, dans un des manuscrits qui font partie de la collection de M.
« de Penguern, et portant le titre de : MY;;lère de Saint Gwennolé, le passage
« reproduit par M. de la Villemarqué, dans le Bull~tin de la Société archeolo
II. g~l.Jue du Finistère, t. XV, p. 198. Ge mystère a été copié en 1767; mais, le
( ~exte que M. de la Villelllarqué a donné dans le Bulletm a été prot'ondement
« modifié par le soin que l'on a pris de remplacer' les mots l'rauçais par des
« expressions vraiment bretonnes. (Ne serait-ce pas là l'œuvre des copistes
successifs, modernisant la langue, en se rapprochant de nous) «Ces mots
« français se rencontraient-ils déjà dans la copte mentionnée !Jar D. Le Pelle
~ tier t M. de Penguern les a-t-il supprimés, et ce tragment que nous avons
« sous les yeux e'5t-i1 un essai conigé sur l'exemplaire de 1767 t (Je ne le
pense pas). « En le marquant des lettres B. N. ne voulait-il pas indiquer les
II. moditications qu'il avait apportées à ce passage du texte df' 1'767, dont il
« etait propriétaire'! Les douz'e derniers veL'S Ile sont pas dits par Gwenn,
« mais bien par Fragan, qui les cbante sur le ton: Vexilla. La femme de
II. Fragan est appelée Alva et non Gwmn. Le premiel' prùlogue contient une
« vingtaine de vers qui se retrouvent mot pour mot dans le mystère de la
« Création du monde. »
Dans notre version, les 12 \'ers auxquels il est fait allusion plus haut se
réduisent à huit, chantés moitié pal' Fragan et moitié !Jar Alba, et aussi SUl'
le ton de ; Vexilta.
avec l'histoire, comme, par exemple, le désastre de la ville
d'Is et le gouvernement du pays de Léon confié par Grallon
Fragan, deux fables dont il n'existe aucune trace; dans le
Cartulaire de Landévénec. Du reste, cette vie de saint
Gwennolé me paraît être la plus mal informée de ' toutes
celles contenues dans le livre du charmant mais trop crédule
hagiographe, bien qu'il dise avoir consulté les légendaires
manuscrits de l'abbaye de Landévénec ; il est vrai que, par
ces mots, il ne désigne pas clairement l'œuvre de Wrdisten,
dont il n'a, sans doute, jamais eu connaissance. Pour donner
une idée de ses erreurs et de ses fantaisies historiques, il
suffira de dire qu'il fait de Fragan le neveu du valeureux et
magnanime prince Conan Mériadec, qui lui donna le gou
vernement des comtés de Léon et de Cornouaille; qu'il ne
parle pas de l'école de saint Budoc, dans l'îlot Lavrec, mais .
au contraire, saint Gwennolé à l'école de saint
qu'il envoie,
. Corentin. Ille fait séjourner ensuite dans l'île de Sein, d'où
il revint en terre ferme avec ses disciples, sans le secours
en marèhant sur feau aussi ferme
d'aucune embarcation,
si c'eût été un roch.er. Il nous parle du roi Grallon
ment que
donnant des tournois dans la 1Jille d' Is, et de nombre d'au
tres fables pareilles (1). Or, il n'est pas fait, dans le Car
tulaire, la moindre mention de la ville d'Iso C'est une pure
légende que tout ce qu'on raconte là-dessus, et qui n'est
pas particulière à la Bretagne, car on la retrouve bien ailleurs,
et sous des latitudes fort éloignées de nous.
Le mystère donne poUl' successeur à Gwennolé, comme
abbé de Landévénec, non Gwennaël, comme le Cartulaire,
mais Riou, qui est le même que le Rioc, dont nous parl~
Wrdisten. Rioc. était ami et disciple de Saint-Gwennolé,
qui, comme preuve d'affection, accepta de lui, pour l'abbaye,
le don d'une petite terre, donum preparvum, quoiqu'il eût
(1) Dom Lobineau, qui a lu le Cartulaire de Landévéllec, est mieux informé,
i::Ians ses Vies des Saints de Bretagne. Il appelle Je saint Guignolet, qui est
la forme populaire, surtout en français .
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (Mémoires). 4
refusé de rien accepter du roi Grallon, qui ne fut jamais ni
fondateur ni donateur de Landévénec, comme on le croit
généralement (1). .
Puisée dans le fonds de l'histoire et des vieilles traditions
bretonnes, la pièce, sans rappeler Shakespeare, n'est pas
dénuée d'intérêt dramatique, et quelques scènes ont du mou
vemènt, de l'originalité et du pathétique, par exemple, celles
de la catastrophe de la ville d'Is et de la peinture de
l'anarchie qui règnait dans l'île de la Grande-Bretagne.
La liberté de la pensée se manifeste aussi, av~c une
grande hardiesse, dans certaines scènes et certains
accents de révolte, qui rappellent la philosophie sceptique
du XVIIIe siècle. Il serait intéressant de pouvoir constater,
sur une version plus ancienne, s'ils sont bien de la fin du
XVIe siècle, ou d'une date plus rapprochée de nous.
On doit remarquer encore la bizarrerie des noms de la plupart
des personnages, sauf ceux qui sont historiques. Où l'auteur
a-t-il été chercher, par exemple, des noms tels que ceux
ci: Piquès, Dourva, Xelson, Fardas, Mantar, Isméneo,
Belgar, Dodin, FIor, Boucan, Morzo,
Aristolo, Adrispan, '
Astoria, Serru" Mistral, Vulrilig, Tulpodo, Judara, Stérido?
Dans son imagination, sans doute, car je ne me rappelle pas
les avoir rencontrés nulle part ailleurs, sauf deux ou trois,
peut-être, que je crois avoir vus dans des mystères français
du moyen-âge. .
Notre mystère est souvent entremêlé de morceaux chantés,
comme un opéra-comique de nos jours. Les paroles de ces
chants sont dans un mètre différent du dialogue ordinaire,
et presque toujours en vers de huit pieds. Ce sont les prières
et invocations à Dieu, et les messages des anges qui sont
ainsi psalmodiés. Ce mélange de chant et de récitatif, sur le
,ton de la mélopée consacrée, me semble encore une marque
d'une certaine ancienneté, car on le rencontre rarement
(1) Of. de la Borderie, dans l'introduction du cartulaire de Landévénec.
dans les pièces du XVIIIe siècle
et du commencement dll
XIXe sièéle.
La Vie de saint Gwennolé se joue en une seule journée et
est divisée en six actes. Il n'y a ni prologues ni épilogue,
. du moins dans notre copie, ce qui est contraire aux rites et
aux habitudes du théâtre populaire breton. Il semble que la
pièce devait se terminer après le désastre de la submersion
de la ville d'Is; mais l'auteur tenait à nous exposer quel
ques-uns des miracles et la mort du' saint, qu'il n'avait pu
placer dans le cours de l'action scènique, et c'est, 'sans
valu ce sixième acte.
doute, ce qui nous a
La langue est moderne, sans être pourtant trop fran-
cisée, . et même quelques mots .ont été conservés que le
n'a pas compris. J'ai toujours respecté le texte de la
copiste
copie de Thomas, et ne me suis permis que quelques con
la suppression de quelque par
tractions, ou l'addition ou
ticule insignifiante, lorsque le vers était trop long ou trop
court; il en est même resté encore un assez bon nombre qui
excèdent ou n'atteignent pas la mesure ordinaire, qui est de
douze pieds. Le dialecte 'est celui de Tréguier.
J'ai partout substitué le c au k, où ce dernier ne m'a pas
paru indispensable, comme par exemple dans ket, ken, ker,
kentel, etc., pour éviter l'emploi de quo L'introduction du k
dans l'orthographe bretonne est récente, et on le trouve
rarement dans nos textes imprimés les plus anciens,
assez
Buhez santès Nonn, par exemple. Dans les noms
dans
propres, dont l'orthographe n'a pas dû beaucoup varier, on
ne trouve jamais Pennec, Talec, Lagadec, Troadec, Bêlec,
k; mais toujours des C.
Cloarec, Carnac, etc. avec des
Pourquoi changer, alors, puisque le c rend le son voulu~ et
qu'il est consacré par l'usage, ,
Quem penes arbitrium est et jus et norma loquendi. .
Quimper, le 12 mars 1889.,
BUHEZ SANT GWENNOLE
• Tragediénn brézonee
. EN UN DE"'IiN"EZ HA C'HOUEC'H ACT
ACT RENTA
Scènenn Kenta •
Ar roue GRALON, FRÉGAN he genderv, JOBle, DOURVA,
prinsed
al' roue, FLOR, STËRIDO, HAMERI, chèvalerienn.
GRALON a gOInz.
Dré c'hraz an Eternel, a zo crouer d'ar bed .
Me zo roue puissant ;' Gralon ez on hanvet. •
ar Vretoned,
Ar pouar 'zo ganin da c'houarn
Pere deûs rentet d'in peb henor ha respect;
Holl' emant dindan-on hag em c'homandamant,
ar gêr a Vrest, bet 'ar gêr a Wenngamp;
Dâlec
Houma ma c'hapital, Is, ar gêr maia c'harmant,
A gèment 'zo savet indan ar firmamant.
Ann héritach 'deu d'in dimeus ma zudo coz;
Emon en plijadur, hag ebars ma repos;
Na eus med Breiz-Meuris a raë chagrin d'in,
Na reont, a glevan, nemed 'n em saccajin.
Hounès kaera enès 'zo en toues ma mado,
Hag na arru en-hi med peb-seurt horeurio ;
Med c'hoant ,am eus da harz' kement eûz a valheur ;
Dre-ze m'ho gra, kenrlerv, gouarner tn Breiz-Meur ;
Eno 'man ho kestel hag oc'h hollieuveo ;
Setu ma bolante; a c'hui ha accepto 1
FRÉGAN .
Gralon, ma c'henderv kèr, roue ar gèr aIs,
Me accept kement-ze', certenn gant honestis,
Med necesser eo d'ech ober embann dre gêr
Penaos ez on hanwet ua voût ho gouarnèr.
LA VIE DE SAINT GUENNOLÉ, ABBÉ
Tragédie bretonne
EN UNE JOURNÉE ET SIX ACTES C')
PREMIER ACTE
Scène première.
Le roi GRALON, FRAGAN, son cousin, JOBle, DOURVA, princes du
roi; FLOR, STÉRIDO, RAMEURI, chevaliers.
GRALON, parle.
Par lâ grâce de 1'Éternel, le créateur du monde,
Je suis un roi puissant; je suis nommé Gralon.
Le pouvoir est avec moi de gouverner les Bretons,
Qui m'ont rendù tout honneur et respect;
Tous, ils sont sous moi et à mon commandement,
Depuis la ville de Brest, jusqu'à.Ia ville de Guingamp.
Celle-ci (est) ma capitale, Is, la plus charmante ville
De toutes 'ceHes qui ont été bâties sous le firmament.
(Cet) héritage me vient de mes ancêtres (1) .
Je suis (ici) dans mon plaisir et mon repos. [du chagrin.
II n'y a que les habitants de la Gl'ande-Bretagne qui me donnent
Ils ne font, d'après ce que j'entends, que se massacrer (2).
C'est-là la plus belle île qui soit parmi mes biens,
Et il n'y arrive que toutes sortes d'borreurs;
Mais, je veux empêcber tant de malbeur ;
C'est pourquoi je vous fais, mon cousin (3), gouverneur de la
Là sont vos châteaux et toutes vo~ rentes: [Grande-Bretagne.
C'est là ma volonté : acceptez-vous?
FRAGAN.
Gralon, mon cber cousin, roi de la ville d'Is (4),
J'&ccepte cela, certes, avec honnêteté (reconnaissance).
Mais, il est nécessaire que vous fassiez publier par la ville
Que je suis nommé pour être leur gouverneur.
(4) Les notes sont renvoyées à la fin de la pièce.
GRALON .
Kement-ze vezo grêt, heb dâle pell-amzer,
M'hen graï emban warc'hoas, dre vouez ma zrompiller ;
Ouspenn e roïn d'ec'h un neubeut soudarded
ho ti, gant aoun 'vec'h ataquet;
D'ho tifenn en
Petra 'lâret, prinsed, war '1' pez a broposan ~
Na oc'h ket droue-contant dimeus ar pez a rân ~
JOBIC.
Monarc puissant, beteg an devès a hirie
Oc'h oberou 'zo bet mad, ha breman int ive;
Na eus hinin anhê a lavarfe certen
'Pe grêt injustis d'hê, nac ive da nep-den.
DOURVA.
'on eus ann titr a roët d'ho kenderv,
Chalmet
D'hen beza lacaët en Breiz-Meur gouarner,
'r puissanta deuz ann habitanted,
Rag hen ê
Dre-ze 'dIe boud roue, med drezoc'h commandet.
GRALON .
Ac'hanta 1 me raïo d'anaout anezhan.
Dre ma rouantelez vô em ban net breman :
Dre-ze, kenderv, bevet en peuc'h, en ho castel,
na zennto ouzoc'h, lakêt-han da verwel. .
Neb
FREGAN.
Me 'raïo, ma c'henderv, al' pez oc'h eûs lâret;
Dre-ze 'z an en Breiz-Meur da welet ma friet,
Ha ma bugaligou, d'anonz d'hê war un drô
'On hanvet gouarner, da greski ma zitro ;
Me assur e vont hoU chalmet ·a gement-ze :
ma roue, ha c'hui, prinsed, ive.
Adieu 'ta,
GRALON.
Euz ma mignoned vad 'roan d'ho servija
ha Mistral ma fach kenta:
Ar chevalier FIor,
GRALON.
Cela sera fait, sans tarder longt.emps ;
par mon trompette,
Je le ferai publier, demain,
Et de plus, je vo~s donnerai quelques soldats
Pour vous défendre, dans votre maison, dans la crainte que vous
Que dites-vous, princes, surce que je propose1[ne soyez attaqué.
Vous n'êtes pas mécontents de ce que je fais ~
JOBIC.
. Monarque puissant, jusqu'aujourd'hui,
Vos actes ont été bons, et aujourd'h ui ils le sont encore:
Il n'est personne [parmi vos princes] qui puisse affirmer
ni même à qui que ce soit.
Que vous lui ayez fait injustice,
DOURVA.
Je suis charmé du titre que vous donnez à votre cousin.
En le faisant gouverneur de la Grande-Bretagne,
Car il est le plus puissant des habitants,
Et c'est pourquoi il doit être roi, mais sous vos ordres.
GRALON.
Eh ! bien, je le ferai connaître;
Il sera maintenant publié, dans mon royaume;
Ainsi, cousin, vivez en paix, dans votre château,
Et faites mourir quiconqlle ne vous obéira pas .
FRAGAN.
Je ferai, mon cousin, ce que vous avez dit :
Je vais donc en Grande-Bretagne, pour voir ma femme (5)
Et mes chers enfants, et leur annoncer en même temps
titres: .
Que j'en suis nommé gouverneur, pour augmenter nos
J'assure qu'ils seront tous charmés de cela:
Adieu donc, mon roi. et vous aussi, princes .
GRALON .
De mes bons amis, je vous donne, pour vous servir,
et Mistral, mon premier page:
Le chevalier FIor,
Dre-ze 'ta partiet, gant oc'h holl zoudarded,
A c'heuillo ann urzo am eùs d'ezÎle roët.
FLOR .
Sire, me 'zo chalmet demeus ann enor-ze,
P'oc'h eùs ma deputet da vônt gant-han ive;
Dre-ze 'ta partiomb, ha heb dâle nemeut',
Da zBludin ho tud, ho gortoz en Breiz-Meur. ·
Frégan ha FIor cuit.
GRALON a gân.-
Me c'houlenn '1' c'hras digant Doue,
Roue ann nef hag ann dOl!ar,
M' vô tranquillizet ann dud-ze,
Pere ra kement a c'blac'har.
Cornz a ra . .
Med brema, ma zud kèr, me ho recempanso
Dimeus ar servij-vad arenntet d'în, pell-zo.
C'hui, Jobic, vô breman euz ma frinsed '1' c'henta,
Bars al' gêr euz a .Is, en pe-Iec'h 'omb brema;
Me 'm eUl;l bepred fizianz en ho fidelite, .
d'am serviji, coulz en noz vel en dé:
Teufet
Ha neuze Sterido, a zà ~lllla presant,
A vezo ma eill prim; ive pareillamant "~
Dre-ze prometet d'in donet da reÏ siconr,
D'am ataqui bikenn mal' deû ma adversour.
JOBle, 0 cana .
Ma frinz ha ma Roue, me ho tr\1gareca,
Dre ma reit d'în hirie un benor al' c'haera,
me bromet ive ma c'horf ha ma mado
Med
A vô en ho servij, en durant ma dezio .
. STERIDO.
Ha me pareillamant 'a bromet d'ac'h ive
A teuin d'ho sicour, pa vô necessite,
Ainsi, partez avec tous vos soldats,
Qui suivront les ordres que je leur ai donnes.
FLQR.
Sire, je suis charmé de cet honneur.
Puisque vous me députez pour alle!" aussi avec lui.
Partons donc, sans tarder davantage, [Grande-Bretagne.
Pour saluet' votre famille (de Fragan) qui vous attend, dans la
Fragan et FIor s'en vont.
GRALON, chantant.
Je demande la grâce à Dieu,
Le roi des cieux et de la terre,
Que soient tranquillisés ees gens-là,
Qui me causent tant de douleurs! .
Parlant.
Mais maintenant, mes chers serviteurs, je vous récompenserai
Des bons services· que vous me rendez, depuis longtemps.
le premier de mes princes,
Vous, Jobie, vous serez
d'Is, Oll nous sommes maintenant;
Dans la ville
J'ai toujours confiance en la fidélité '
me servirez, nuit et jour;
[Avec laquelle] vous
Puis Stér'ido, ici présent,
Sera pareillement mon second prince: "
Ainsi, promettez-moi de me donner aide,
Si jamais l'ennemi vient à m'attaquer.
JOBle .
Mon prince et mon roi, je vous remercie
De me donner aujourd'hui un si grand honneur,
Mais je promets, en retour, que mon corps et mes biens,
Seront à votre service, dut'ant mes jours (ma vie).
STl<:RIDO.
Et moi pareillement, je vous promets aussi
De venir à votre secours, quand il y aura nécessite,
Rag eur Roue pîni a zo ken debonner '
A dIe cavet sikour, pa ve troublet 'n he gêr.
sur, ma Roue, euz ma fidelite,
Bezet
Me gollo evidoc'h ma goad ha ma bûhe.
GRALON.
Mad ez eo kement-ze, ma frinsed plliss~nt,
Rejouisset ez on ganec'h presantamant ;
Rag breman e credan 'vin bepred sicouret,
Ma ven c'hoas ataquet gant ar Sarrasin~d ;
Ha c'hui, ma mignoned, oc'h eus grêt vaillantis,
Dre-ze en oc'h andret a rin ive justis.
C'hui, Dourva, dre ma 'z oc'h un den a gourach vraz,
Eo ann hini choasan evit ma c'henta pach,
Hag ar sir Hamellri, a zo gwir chevalier,
Ha dre-ze hen choasan evit ma ecuier.
Setll ar recompans am boa d'ac'h preparet,
Graz d'ac'h d'am servija evel ma, oc'h eùs grêt !
DOURV A a gân.
Ma monarc, roue Gralon, me 'zo d'ac'h oblijet,
Enor braz a ret d'in,' ha na veritan ket,
" Med gant graz ma Doue ha ma c'hot;lrach ardant,
Me deui d'ho servijan er bed fidelamant.
HAMEURI.
Sir, me eo Hameuri, chevalier redoutet,
A bromet dirazoc'h, roue ar Vretoned,
Keit ha ma vô alan etre m" a daou-goste,
Ha goad em gwazio, dîr en bec ma c'hleze,
Me a em exposo en creiz ann holl surplis
Vitdifenn ho curun, hag ar gêr euz ,a Is.
GRALON .
o ma Doue, brema me a zo sur contant,
Euzar fidelite ho deuz ma zud vaillant: '
Car un roi qui est si débonnaire
Doit trouver aide, quand il est inquiété chez lui.
Soyez assuré, mon roi, de ma fidélité;
Je perdrai pour vous mon sang et ma vie.
GRALON.
Tout cela est bien, mes princes puiss~nts, .
Et je suis réjoui par vous, présentement;
Car maintenant je crois que je serai toujours secouru,
Si je suis attaqué par les Sarrasins, (7) ,
Et vous, vous a vez fait vaillantise,
Aussi serais-je juste envers vous.
Vous, 'Dourva, comme vous êtes homme de grand courage,
Vous êtes celui que je choisis pour être mon premier page;
Et le seigneur Hameuri est un vrai chevalier, .
Et c'est pour cela que je le choisis pour être mon écuyer.
Voilà la récompense que je vous avais préparée:
Puissiez-vous me servir comme vous l'avez fait (jusqu'à présent).
DOURV A, chantant (8) .
Mon monarque, roi Gralon, je vous suis obligé,
Vous me faites un grand honneur, que je ne mérite. pas,
Mais, avec la grâce de Dien et mon courage ardent,
Je vous servirai fidèlement, dans ce monde. '
EU RI, chantant.
HAM
Sire, je suis Hameuri, chevalier redouté,
Qui promets devant vous, roi des Bretons,
Qu'aussi longtemps qu'il y aura souffle entre mes deux côtés,
Et du sang dans mes veines, et de l'acier à la pointe de moil épée,
Je m'exposerai au milieu de tous les dangers,
Pour défendre votre couronne et la ville d'Iso
GRALON.
Maintenant, ô mon Dieu, je suis certes content,
CA voir) la fidélité qu'ils ont, mes l'aillants serviteurs:
Nemed c'hui, pl'inz Jobic, a bartio breman . .
al' chevalier FIor hag ann dud zo gant-han;
Gant
Un neubeud tud armet a 'ielo ganec'h c'hoas,
ma c'henderv, rag chagrin 'n eûs en braz,
Da zicour
Gant aoun na ve lazet, en touez he holl vâdo,
Dre-ze am eus c'hoant c'hoas da greski he warJo :
d'în ha c'hui 've disposet
Dre-ze lavaret
"onet en Breiz-Meur brema gant soudarded ~
JOBle.
Ma aotro ha rQue, prometet am eûs d'ec'h
el' bed-man, en pop lec'h,
Ez on en ho servij,
Rag-ze commandet d'in un neubeud tud vaillant
Ha me 'iel en Breiz-Meur ganthê, incontillant.
GRALON.
Antreet hol! ganin, 'vit ma considerin
Pere dimeus ma zud a iel' d'ho secondin .
Holl cuit.
Eitvet Scenenn.
\.nn theate ° a repeesant eue blasenn public. BOUCAN, MORZO,
SÉRU, ASTORIA, aotronez a Vreiz-Meur .
. BOUCAN.
Eh ! bien 'ta, aotl'onez, petra 'ou fetrecita,
da obel' el' vrô-ma ~
A gement 've manet
Diminui ra 'r bobl, eùz ho laza bemde,
N'anvezan nemed-omb m~gnoned 'n eil d'egile .
ASTORIA.
Plijadur am eûs sûr, welet pe-seurt ardo
'Ra 'n hini ve plantet eur gontel 'n he vouello !
o ia, 'ann exercis a reomb, un tam 'zo,
ra d'imb plijadur, ive calz a vâdo .
Vous seul, prince Jobic, partirez à présent,
A vec le chevalier Flor, et les gens qui l'accompagnent;
Quelques hommes armés vous accompagneront encore,
Pour protéger mon cousin, car j'ai grand chagrin, ' . ,
Avec la crainte qu'il ne soit tué, au milieu de tous ses biens;
je veux encore augmenter le nombre de ses gardes:
Aussi,
C'est pourquoi dites-moi si vous seriez disposé
vec des soldats?
A aller dès maintenan tdans la G rande-Bretagne,a
JOBIC.
Mon seigneur et mon roi, je vous ai promis
à votre service, en tout lieu, dans ce monde,
D'être
C'est pourquoi donnez-moi quelques hommes vaillants,
Et je vous accompagnerai tout de suite en Grande-Bretagne .
GRALON.
Entrez tous avec moi, afin que j'examine
Quels sont ceux des miens qui iront vous seconder.
Tous sor'tent.
Le théâtre représente une place publique. BOUCAN, MORZO, .
SÉRU, ASTORIA, seignèurs de la Grande-Bretagne.
BOUCAN.
Eh 1 bien, seigneurs, que pouvez-vous m'indiquer
Qui soit resté à faire dans ce pays ~
La guerre diminue, à force de tuer, tous les jours (des habitants)
Et je ne counais d'amis entr'eux que nous autres. . '
ASTORIA.
J'ai certes bien du plaisir à voir les grimaces
Que fait celui' à qui l'on plante un couteau dans les entrailles 1
Oh !oui, l'exercice que nous faisons, depuis quelque temps,
Nous procure bien du plaisir et aussi des biens.
SÉRU.
Soutenomb stard bepred ann eil C::10Z egile,
Heb-dâle a ,veomb 'r ,gêr-ma pevar roue,
N' vô bêlec na soudard, nag ive a j ustis
Â. gretfe bon oppos da ober en hor gîz.
" MORZO.
Me gommans caout scrnpul, ma c'hàlon 'so mantret,
Pa sonjlin 'r massacrô ~rer bemde, bep-sujet ';
Doqe deQ~ da scuisan, 0 welet hor c'honduit,
Rag en em roët 'omb d'ar speret diabolic.
BOUCAN.
En dez aU, me oa bet en ti 'n aotro person,
Hag am eûs ban diodet, 0 cânan eur chanson:
Commans eure d' zansal, da lampad dre ann ti,
Ma corneras he blac'h da zont d'hen secondi',
Hag a-raoc donet.:..cuit 'tâpis he soudanenn,
Hag hec'h îs d'ann His d' gânan 'nn oferenn,
Ha kent fin ann ofern, a rêz c'hoaz eur sarmon,
'Var sujet ar sacrist hag ann aotro person ; ,
Reï a ris de gredi da gement oa presant
Na oa kèn neb Doue, ebars ar firmamant.
MORZO.
Setu eur gredenn sot, kement-ze a zo sclezr, '
Rag un Doue zà bet, ebarz en peb-amzer,
Ha kement 'gonduo eur vûhez execrabl
A renko, er bed-aIl, souffr poanio miserabl :
Dre-ze 'ta, aotronez, m'ho suppli a galon
Da guitaad ann drouc, beva 'n tud-a-feson.
ASTORIA .
o clewet ho comzo, me a zo estonet,
Ra~ me a son je d'în a oamb hoU mîgnoned,
SÉRU.
Soutenons ferme toujours la cause l'un de rautre,
Bientôt nous serons dans cette ville comme q natre rois;
Il n'y aura ni prêtre, ni soldat, ni justice
Qui ose nous empêcher de faire selon notre bon plaisir.
MORZO.
Je commence à a voir des remords, et mon cœur est navré,
Quand je pense aux massacres que l'on commet, tous les jours,
à se lasser, en voyant notre cond uite, [sans raison;
Dieu viendra
Car nous nous sommes donnés à l'esprit diabolique .
BOUCAN.
Bast ! l'autre jour, j'allai chez le curé,
Et je l'ai amusé, en lui chantant une chanson:
Il se mit à danser et à sauter par la maison,
Si bien qu'il prit sa servante pour faire comme lui, .'
Et, avant de m'en retourner, je lui pris sa soutane,
Et allai à l'église chanter la messe;
Et avant de finir, je fis encore '.ln sermon,
Sur le sa~ristain et monsieur le curé;
Je donnai à croire à tous ceux qui étaient présents
Qu'il n'y avait plus de Dieu sous le firmament,.
MORZO.
Voilà une sotte croyance, et cela est évident,
Car il y a eu un Dieu, de tout temps,
Et tous ceux qui mèneront une vie exécrable,
Devront souffrir, dans l'autre monde, et seront misérables.: .
Aussi, seigneurs, je vous supplie de cœur
De renoncer au mal, pour vivre en honnêtes gens.
ASTORIA.
. En entendant vos paroles, je suis surpris,
Car je croyais que nous étions tous amis?
Med me 'weil n'holl eûs ket 'r mernes sentimancho,
Ha dre-ze me as ped d' vinella da c'heno.
SÉRU . .
Petra ê 'r Morzo-ze, na gant he gomzo dous ?
Zaillomb holl warnezhan, toromb be benn picous,
Ha n'hen permetomb ket da vewa en bol' mesk,
ua ve ket he stur ouit conduin he lestr.
Mar
BOUCAN.
Aotro Sél'u, c'hui 'c'h eûs eur c'haracter re-bront,
Na dleomp ket beza 'n tre-z-omb ker divergont,
Rag mal' toromb .he benn, p' eo euz hor mignoned,
Hor be keùz, goude-ze, hag 've d'imb tamalet.
SÉRU.
Ann aotro Boucan 'ta 'feU d'ezhan hen c1ifenn ?
Me gred 'n deùs c'hoant ive d' danva al' zaladenn,
Rag nîn a renk beza euz al' mernes humeur,
Mar fell d'imb-ni beza ar mestro en Breïz-Meur;
Med me 'c'h a da genta d' zispaca ma c'bontel,
D'hi flan ta d'ezhan doon ebars en he cervel,
Rag aoun na zislrôfe ann holl habitanted
Da gousanti 'n noblans d'bon lacad esclaved.
Setu ma c'bontel doon bars en creiz he gorf braz !
Lazan a ra Morzo .
ASTORIA . .
Maro a-wal(;'h ez eo, gourveet war arplass ;
ruina ann holl enezenn-ma,
Continuomb
ann teuf:loriou, ar peb preciusa.
Pillomb
BOUCAN .
Med ar pez 'm eùs clewet a rô d'în nec'bamant.
SERU.
Petra oc'h ells clewet 1 lavaret franchamant·.
Mais, je vois que nous n'avons pas les mêmes opinions,
Et c'est pourquoI je te prie de baillonner ta bouche 1 . .
SERU:
Qu'est-ce que (que veut) ce Morzo-là, avec ses douces paroles f
Jetons-nous tous sur lui et cassons-lui sa tête de teigneux,
Et ne souffrons pas qu'il vive parmi nous, .
Si son gouvernail ne sait conduire sa barque. ..
BOUCAN.
Seigneur Séru, vous êtes d'humeur trop vive, .
Nous ne devons pas être, ent.re-nous, si insolents,
nous lui cassons la tête, comme il est de nos amis',
Car, si
Nous en aurions repentir, après, et il nous serait reproché.
SÉRU.
Le seigneur Boucan prétend donc le défendre~'
Je crois qu'il veut aussi goûter la sàlade,
. Car il faut que nous soyons tous d'accord,
Si nous voulons être les maîtres, dans la Grande-Bretagne;
Mais, je vais d'abord tirer mon couteau, .
Pour le lui (à Morzo) planter profondément dans le cerveau,
Dans la crainte qu'il ne convertisse les habitants, .
manière à souffrir que les noble~;fassent de nous leu rs esclaves .
Voilà mon couteau bien planté au milieu de son grand ventre!
Il tue Morzo.
ASTORIA.
Il est bien mort, et couché sur la place;
Continuons de ruiner toute cette île,
Pillons les trésors et tout ce qu'il y. a de plus précieux.
BOUCAN.
Cependant, ce que j'ai entendu me donne de l'inquiétude .
SÉRU.
Qu'avez-vous donc entendu? dites franchement .
. BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (Mémoires). 5
BOUCAN.
Clewet am eûs eur vrud, en mesk ann dud, en kêr :
Dimellz a beurz Gralon, 'zo deût eur gouarner,
Da lacaët.ar peuc'h ebars etrezomb tout; .
gwir kement-ze, hor bô are hirvoud.
Mar d'eo
ASTORIA.
Penaoz eur gouarner 1 Me zo sur estonet,
Na gredan ket a ve ama '1' seurt canfarded,
Tud ana enezenn-ma n'ez int ket ker sot-ze,
'r liberte.
Da bermeti lemel diganthè
ar gouarner-ze 1 Lavar d'in-me bûhann,
Piou
M'hcn defo ar chassé evit monet a-c'hann.
BOUCAN.
Ar prins Fregan ez eo ann hini 'zo choaset
Da c'houarni 'r vro-ma : dre-ze, ma mignoned,
Pa glevo ami torfed, hen raïo ho ramas,
Hag 'lacaï ac'hanomb da soufri poanio bl'az ;
Tud armet 'zo gant-han, dimeus a-beurz Gl'alon,
Soudarded ha pl'insed, tud heb compassion.
SÉRU.
o clewet kement-ze, me a zo sur contant,
Rag-ze clewet m'avis, war-ze presantamant :
consol'ted, evit reï d'imb sicoul', .
Eomb d'a glask
vont da welt Fregan, pa 'z eo hon enebol1r ;
vô combat,i 'r soudardeel hel! diwall,
Rèd a
un armé euz 'r prison infernal,
Med ni 'vô
A vô digonsians, ha muioc'h 'vit-hè tout,
Hag ho masacl'o holl, hep gallout achapou.t,
Ha laerfomb da Fregan he aour hag he arc'hant;
Lâzan he duel hag hen, holl, mal' vent rebellant:
He vel'c'h hag he briet a lezfomb en bûhe
D'chom ~animb da vewa, 'n despet d'ho bolonte.
BOUCAN . .
J'ai entendu un bruit, parmi les gens, en ville,
Qu'il est venu un gouverneur, de la part de Gralon,
Pour mettre la paix entre nous tous; .
Et si cela est vrai, nous aurons encore du déboire ~
ASTORIA.
Comment un gouverneur ~ Vous m'étonnez fort,
Car je ne pense pas qu'il y ait ici de pareils drôles;
Les habitants de cette île ne sont pas si sots
Que de se laisser enlever leur liberté.
Qui est-ce, ce gouverneur ~ dis-moi, vitQ" -
Que nous lui donnions la chasse, pour le faire partir.
BOUCAN.
Le prince Frégan est celui qui a été choisi
Pour gouverneur de ce pays, ainsi, camarade~,
Quand il connaîtra le crime, il nous fera ramasser,
Et nous fera souffrir de grandes peines;
Il est accompagné de gen~ armés, de la part de Gralon,
gei1s sans miséricorde.
Des soldats, des princes,
SÉRU.
Je suis certes bien content de tout ce que vous m'apprenez;
Ecoutez donc mon avis sur tout cela:
Allons chercher des consorts pour nous donner aide,
Afin 4'aller rendre visite ,à Frégan, puisqu'il est notre ennemi;
Il faudra combattre contre les soldats ' qui le protègent; .
Mais nous serons une armée (sortie) de la prison infernale.
Nous serons sans conscience et plus nombreux qu'eux tous,
' Et nous les massacrerons tous, sans (qu'auoun) puisse
Nous volerons à Fregan son or et son argent, [échapper;
Tuerons ses gens et l~i-même, tous, s'ils font résistance:
Sa fille et sa femme, nous les laisserons en vie, .
Pour vivre a'vec nous, en dépit de leur volonté.
ASTORTA.
C'hui 'c'h eus formet aze, aotro, eur projet mad,
Rèd eo d'imb discouez d'hê penaoz ez omb tud vad;
Mar fell d'hê cOQtesti, 'vont laket en eur bern,
Rag-ze diavis int, 0 sonjal hon gouvern.
Allons! hastomb-buhan, rag me zo en humor,
Med a-raoc monet-cuit, taolomb Morzo er môr.
Cass a reont anezhan cuit
BOUCAN.
Pa garfet, aotronez, 'iefomb breman en hent,
Rag me a zo pred cloz d'ho c'heuil' ive kerkent,
Gwell eo ganin beza em liberte 'velhenn,
Eget beza esclav indan gouarnerienn .
Holl cuit .
_. FIN D'ANN ACT KENl'A. -
EIL ACT.
An the.atr a represant palès ar rOl,le Fregan.
. Scenmn kenta.
FREGAN, he briet, he verc'h hag he daou vugel bihan .
FREGAN, trist.
Alba, ma gwir briet, houman eo ar glac'har!
. Setl,l lazet 'r gward 0 a oa war hon douar,
am boa.evit reï zicour d'în
Kement soudard
'Zo distrujet gant ann habitanted impi ;
Na eûs nemed Mistral savetet, a gredan,
Ha c'hoas int resolvet €l'obel' d'imb perisa :
ASTORIA.
Vous avez conçu là, seigneur, un bon projet;
Il nous faut montrer que nous sommes de bons gars:
S'ils veulent résister, nous les tuerons.( et les mettrons) en un tas: .
Aussi, sont-ils malavisés de songer à nous gouverner.
Allons, dépêchons-nous, car je suis en humeur:
Mais, avant de partir, jetons Morzo dans la mer.
Ils enlèvent le cadavre .
BOUCAN.
Quand vous voudrez, seigneurs, nous irons maintenant en
Car je suis tout prêt à vous suivre; [route,
J'aime mieux être ainsi en liberté . .
Qu'être esclave, sous des gouverneurs!
Tous s'en vont .
- FIN DU PREMIER ACTE.
SECOND AOTE.
Le théâtre représente le palais du roi FRAGAN.
Scène première.
FRAGAN, sa femme, sa fille et deux enfants.
FRAG-AN, triste .
ma véritable épouse, quelle douleur est celle-ci!
Alba,
Voilà que sont tués les gardes qui étaient sur notre territoire;
ce que j'avais de soldats, pour me protéger,
Toul
été détruit par les habitants impies;
Il n'y a que Mistral de sauvé, je crois;
Et ils ont même résolu de nous faire périr; .
Gant tud ken disaeret impossibi d'im bewa;
Dre-ze, mar d'oc'h corrtant, e teufomp d'ho c'huitad,
Ha Iezei holl vado ebars en abandon, .
Ha mont d'ar gèr a Is, gant ma c'henderv Graion.
ALBA .
Oc'h avis, ma friet, a gafan a-propos,
Rag gwelet, 'ran ama na vô a-neb repos;
Pa 'z int ken revoltet, eo gwelloc'h ho lezeI,
Rag mal' chomomb aman, a v6 rèd d'imb meL'\~el ;
Dre-ze ta, -priet ha bugaIe, m'ilO suppli,
Pedomb 'n Aotro Doue hag al' 'iVerc'hès Vari.
CLERVI, merc'h Fregan, a gân.
Ma zad ha ma mamm geaz, me a zo glac'haret
Rencoud cuitàd ar gèr en pînin on gânet, .
Ha ma daon vren!' bihan, 'zo c'hoas iaouanc a oad,
A renk hor c'heuill ive; pe a scuilfont ho goad ;
'n bolonte Doue eo couiz em resoi vi
Med
Da dec'hell eûz arach ann habitanted cri.
Dre-ze 'ta, ac1ressomb hon peden!l da Doue,
Ha neuze partifomb bars ann hent, goude-ze.
FREGAN.
Stouomb holl assambles d'ann daolllin, me ho ped,
Adressomb hon pedenn d'hon Zai ver binniget.
Holl d'ann daoulin e canont.
Aotro Doue, gwir sclerijenn,
M'ho ped, exaucet hon pedenn,
c1re c'hraz euz al' 'vro-ma,
M'iefomb
Na chomfomb mui er c'hartier-ma .
ALBA a gân.
Ha c'hui, Gwerc'hès, a suppliomb,
Bezet bepred sonch ac'hanomb,
Il est impossible de vivre au milieu de gens si ... CI,);
Aussi, si vous y consentez, nous les quitterons,
En leur abandonnant tous nos biens, . .
Pour aller à la ville d'Is, rejoindre mon cousin Gralon.
ALBA (10).
Votre avis, mon époux, me paraît à propos (sage),
Car je vois que nons n'aurons ici aucun repos;
Puisqu'il8 sont si révoltés, le mieux est de s'en aller,
Car si nous restons, il nOLlsfaudra mourir.
Ainsi, mon époux et mes enfants, je vous en supplie,
Prions le seigneur Dieu et la Vierge Marie.
CLERVIE. fille de Fragan, chantant.
Mon père et ma pauvre mère, je suis désolée •
D'être obligée de ql1itter la ville où je suis née,
Et mes deux pet.its frères, bien jeunes encore,
Doivent nous suivre aussi, ou ils -répandront leur sang (seront
Mais, à la grâce de Dieu, autant vaut se résoudre [tués) ;
A fuir la rage des habitants cruels. .
Adressons donc notre prière à Dieu,
Puis, nous nous mettrons en route.
FRAGAN.
Mettons-nous tous ensemble à genoux, je vous prie,
Et adressons notre prière à notre Sauveur béni.
. Il s'agenouillent et chantent.
Seigneur Dieu, véritable lumière,
Je vous prie d'exaucer notre demande, .
Afra que nous sortions, par la grâce de Dieu, de ce pays,
Et ne restions plus dans ce quartier. .
ALBA, chantant.
Et vous, Vierge, nous vous en prions,
Ayez toujours souvenir de nous,
(.) Je ne connais pas la signification du mot disaeret, que donne le texte
breton.
·Bezet d'imb gwir avocades,
En hor hirvoud ha dienès.
Ann AEL GABRIEL a zeû, hag â' gan .
Selaou, Fregan, den a galon,
Comzo Doue, roue ann trôn,
Depecbet pront cuitacl ar vro,
Rag burzud braz a c'hoarvezo.
FREGAN a gân.
Speret eurus, a bel1rz Doue,
C'hui 'zo diskennet euz ann nef;
Eur burzud braz a lâret d'in,
Discleriet-han, me ho supli.
Ann AEL.
Eur mab a defo da briet,
Gwennole han vet ;
A vezo
Ar bllgel-ze 'vô binniget
Ha mignon da grouer al' bed.
Hen cass a ri d'ann Occidant,
D'ar studi, gant eun den savant:
. Gant Doue eo predestinet
Ewit beza sanctifiet.
Soufr a raï calz euz a ankenn ,
Er bed, oc'h obel' pinijenn ;
Andllri raï catz a dOllrmant
Evit trec'hi ann aërouant.
Kers war ar mor d'ann Armorie,
Gwennole'vezo da vabic ;
c.ontantin a raï da speret,
Euz ann holl grasou vô carget.
An Ael cuit .
Soyez pour nous une vraie avocate,
Dans nofl'e malheur et notre gêne (11).
L'Ange GABRIEL arrive et chante:
Ecoute, Fragan, homme de cœur,
Les paroles de Dieu, le 1'0: du trône (ciel) :
ce pays,
. Dépêche-toi de qùitter
Car il arrivera un grand miracle.
FRA GAN, chantant.
Esprit bienheureux, de la part de Dieu,
Vous êtes descendu du ciel;
Vous me parlez d'un grand miracle,
moi connaître, je vous prie.
Faites·le
L'Ange, chantant.
Ta femme aura un fils,
(~ui sera appelé Gwennolé (12) :
Cet enfant sera béni,
Et l'ami du Créateur du monde.
. Tu le conduiras en Occident,
un homme sa~ant :
A l'école, chez
Il est prédestiné par Dieu
Pour être sanctifié.
Il souffrira beaucoup de peine,
Dans ce monde, et fera pénitence;
Il endurJra beaucoup de tOUl'ment,
Pour triompher de l'Esprit malin .
Va par mer en Armorique,
Gwennolé sera (le nom de) ton fils chéri;
Il contentera ton esprit,
Il sera rempli eTe toutes les grâces. .
L'Ange s'en. va
FREGAN, joaiis, war he Jaoulinn .
Cannad ann Eternel, me deu d'bo trugarecad,
Me rennt d'ac'h ma homach, dimeus a galon vad.
o Doue etel'nel, caera graz a reit d'in,
Pa digaset un ael evit ma c'honsolin.
En he zao.
Alba, ma gwir bried, .pa gommand un Doue,
Ez eo rèd ambarki, plijout d'he vajeste;
Dre-ze greomb dilijans, ha c'hui, m'inosanted,
Cuitaomb euz Breiz-Meur, pe vefomb distrlljet.
Ne ôn ket ma c'halon hag hen a resisto,
Gant glac'har ha keuz braz me a gred a ranno,
Pa son jan a rencomb gant hon inosanted
Cuitad hon holl vado, pe beza holl kollet ;
Med ebars en Doue 'lakan ma fizianz,
Heu a raÏo d'imb nerz ha gwir berseveranz .
ALBA.
o ia, ma gwir bried, neb a :fi en Doue
Hen defo asistans, en he necessite :
~mbarcàmb pront, gant ann aoun hen facha,
Dre-ze
Dre obstination 0 chom re el' vro-ma.
ma fajic iaouanc a deui ganimb ive,
Med
A iel' araoc da Is, d'a vertissa '1' l'Olle .
Dens ama prest, Mistral, deus, ha na retard ket.
Donta ra .
MISTRAL.
Setu me, ma atra, petra a SOlletet ~
FREGAN.
Dre ma c'hano Fregan, Breton a nation,
Me am eus c'hoant da gomz eLlz al' roue Gralon;
Kerz da lâret d'ezhan am euz c'hoant comz out-han,
Rag rnarteze a bell na weI in ket 'n ez-han,
FRAGAN, joyeux et à genoux .
Messager de l'Eternel, je vous remercie, •
Je vous rends hommage, de bon cœur;
o Dieu éternel, quelle grâce vous m'accordez,
Puisque vous envoye;r, un ange pour me consolel' !
Se levant.
Alba, ma véritable épouse, puisque Dieu commande,
Il faut nous embar'quer, pour plaire à sa Majesté; .
Faisons donc diligence, et vous aussi, innocents (enfants) ;
Quittons la Grande-Bretagne, sinon nous périrons •
Je ne sais si mon cœur pourra résister;
Il éclatera, je crois, de douleur et de regret,
Quand je songe qu'il faut, avec nos innocents (enfants)
Aba.ndonner tous nos biens, ou être tous perdus (périr).
Mais en Dieu je mets ma confiance,
Il nous donnera la force pour persévérer.
ALBA.
Oh! oui, mon vrai époux, celui qui met sa confiance en
Aura assistance, dans le besoin: - [Dieu
embarquons-nous, vite, dans la crainte de lui déplaire,
Aussi
En nous obstinant à vouloir rester dans ce pays.
Mais mon jeune page viendra aussi avec nous,
Et il nous précédera, dans la ville d'Is, pour prévenir le roi.
Viens ici, vite, Mistral, viens et ne tarde pas.
Mistral vient.
MISTRAL.
Me voici, mon seigneur, que souhaitez-vous î
FRAGAN .
Par mon nom de Fragan, Breton de nation (13)
Je veux parler au roi Gralon ;
Va lui dire que je désire lui parler,
Car peut~être ne le reverrai-je pas de "longtemps i
Rag-ze lavar d',ezhan em rentan ell , Briat,
Me 'Dem gâfo ive, gant ma zud, a vagad.
MISTRAL.
Aotro, pa gommandet, ez eo just d'in ober
Oc'h holl goürc'hemeno, se ez eo ma dever ;
Me lavaro d'ezhan, ebars en bezr gomzo,
'N em rentan en Briat, buhana ma c'hallo.
Mistral cuit. .
FREGAN.
Ha nin, ambarcomb holl, en hâno 'r gwir Doue,
Ha lavaromp adieu d'hon mâdo, d'hon c'hontre,
. Ar peb-pl'eciusa a deui ganimb ive,
Rag necesser int d'imb, da soutenn hon bûhe,
en han' Doue hag ar Werc'hès Vari,
Dre-ze,
Cuitaomb ar vro-ma, 'zo leùn a dud impi.
Eit Scenenn.
Ar roue GRALON, STERIDO, HAMEURI, DOURVA •
GRALON.
o Doue Eternel, e'hui regl peb-tI'a er bed,
Ha possibl ve ve gwir ar pez am eus elewet,
ma frinsed, ive ma soudarded, -
Eo lazet
. A oa êt en Breiz-Meur, gant ma e'henderv parfet ~
N'hallin tranquillisa ann dLJd revoltet-ze,
Euz a bere 'r .-;'hrimo a bign betee ann nef :
Ann dud vâro 'lakaï ar vossenn bars ar vro,
Dre ma vent assassinet, ho lezer el' ruïo.
STERIDO.
Sir, n'hallomb ket mîret beza :n glae'har gant-ze,
Med n'hallo den faeil ampich ho e'hruaute,
p'eo gwir, bihan ba braz, leanezed, bêleïenn,
Holl int diskientet ha na selaouQnt den,
C'est pourquoi, dis-lui de se rendre à Bréhat (14),
Je m'y trouverai aussi 'avec mes gens, en bande.
MISTRAL .
Seigneur, puisque vons commandez, il estjuste que fexé-
c'est mon devoir; ' [cute
Tous vos ordres,
Je lui dirai, en peu de mots, . .
De se rendre à Bréhat, le plus vite qu'il pourra. .
.. Mistral s'en va.
FRAGAN.
Et nous, embarquons-nous' tous, au nom du vrai Dieu,
Et disons adieu à nos biens et à notre pays;
Nous emporterons ce que nous avons de plus pl~ècieux, .
Car nous en avons besoin, pour soutenir notee vie (pour vivre);
Ainsi, au nom de Dieq et de la Vierge Marie,
rempli de gens impies .
Quittons ce pays, qui est
Scène seconde .
Le roi GRALO~, STÉRIDO, RAMEURI, DOURVA.
GRALON.
o Dieu Eternel, qui dirigez toutes choses, en ce monde,
Serait-il possible que ce que j'ai appris fût vrai,
massacrés, et mes soldats aussi,
Que mes princes ont été
(Eux) qui étaient allés en Grande-Bretagne, avec mon cousin f
Je ne pourrai donc pas dompter ces gens révoltés,
jusqu'au ciel f
Dont les crimes montent
Les cadavres mettront la peste dans le pays,
(Car) à mesure qu'on assassine, on les laisse dans la rue! (15)
STERIDO .
Sire, nous ne pouvons ne pas être désolés de cela,
nul ne pourra aisément empêcher leur cruauté,
Mais,
Puisqu'il est vrai que, grands et petits, religieuses, prêtres,
on(perdu l'esprit, et n'écoutent personne,
Tous,
'R gwella 've ho lezell holl da em egorgi ;
Med pacn ar gouarner 'zo oc'h antren en ti.
Dont a ra MiSttl'al.
MISTRAL.
Me ho salut, Gralon, roue ar Vretoned,
A-beurz ar prins Fregan me a zo deputet
Da donet d'ho pedi da vont da gomz gant-han,
En enezenn Briat e kâvfet anezhan.
He briet he vugale a zo gant-han ive:
Setu ar pez am eus evit ho majeste.
GRALON .
al' boan oc'h eus bet,
Me ho trugareca euz
Med me a ia ganec'h, p'he~l eus ma goulennet ;
Ha ma mignoned-all a oa êt en Breiz-Meur,
Gwir eo eta ho deus resevet hoU malheur ?
MISTRAL.
Allas! ia sir, na eus nemed-on savetet,
Ha mar -vijenn cavet, na oann ket espernet,
Rag n'eus bet biscoas tud revoltet evel-se,
Na deus truez euz den, na 'n eil euz egile ;
Rag-ze ma gouarner hag he famil antier
Ho deus cûitad ho bro, ho mado hag ho c'hèr ;
Med na 6nn da be-lec'h ho deus son jet monet,
t ho secret.
Marteze dira-z-oc'h a lârfon
GRALON.
Allons, ma zud fidel, deut holl, a galon vad,
Ambarcomb, em rentomb prest en enes Briat,
Ma consolin Fregan, en he affliction,
Ha memes a roïn d'ezhan un donèson,
Holl cuit .
Le mieux serait de les laisser s'égorger entr'eux :
du gouverneur entre dans la maison .
Mais le page
Arrive Mistral.
M[STRAL .
Je vous salue, Gralon, roi des Bretons;
De la part du pr~nce Fragran, je suis dépu té
Pour venir vous prier d'al:er lui parler:
Sa femme et ses enfants sont aussi avec lui:
Voilà ce que j'ai pour votre Majesté.
GRALON.
Je vous remercie, pour h peine que vous avez eue;
Mais je vais vous suivre, puisqu'il m'a demandé.
Et mes autres amis, qui étaient allés en Grande-Bretagne,
Est-il donc vrai qu'ils ont été tous malheureux ~
MISTRAL.
Hélas! oui, sire, moi seul.j'ai pu me sauver,
Et si l'on m'avait trouvé, l'on ne m'aurait pas épargné,
Car il n'y a jamais eu de gens révoltés de cette façon;
Ils n'ont pitié de pprsonne, pas même les uns des autres;
Aussi, mon gouverneur et sa famillp entière
Ont-ils quitté le pays (abandonnant) leurs biens et leur ville:
Mais jt ne sais où ils ont l'intention de se rendre, .
leur secret.
Peut-être devant vous dévoileront-ils
GRALON .
Allons, mes serviteurs fidèles, venez tous, de
bon . cœur,
Bréhat,
Embarquons, et rendons-nous à l'île de
Pour que je consolé Fragan, dans son affliction,
Et même je lui ferai un présent (16).
Tous s'en vont .
. Tervet Scenenn .
Ano theatr a represant enezenn Bl'iat. -- FREGAN, gant he dud,
dre eur c'host'e ann theatr, al' Roue hag he dud, dre al'
c'hostez-all.
GRALON.
Salut, ma c'henderv, kenenterv, ho pùgale,
Me rennt d'ac'h ma respet, dre eur gwir garante:
Contet d'in, m'ho suppli, ann tenor ho peach,
Hag en a zo Breiz-Meur bepred leClil a outrach '?
FREGAN .
Allas 1 ma c'henderv kèr, roue ar Vretoned,
Kement-all a garnach n'oc'h eùs biscoas gwelet,
gant an dud heb true,
Evel 'zo en Breiz-Meur,
ann eil hag egile,
Holl a em vassacront
Ha m'am eus bet c'hoantêt gant ma zud cuitaad ;
. Dre-ze me a c'houlenn diouzoc'h eur mennad ;
Mar be ho madèles soulajin hon mizer,
Ni bedo evidoc'h Doue, en peb amzer.
CLERVIE .
Sire Gralon, ma eontr, roue ar Vretoned,
M'o Clervi, ho nîzès, pini 'zo hirvoudet,
Rag renket hon eûs bet cuitaët euz hon bro,
Ha na ouzomp ket piou breman hon repuo.
GRALON.
Glac'har ha melconi a zo ebars ma c'halon,
. Pa deuan da sonjal en oc'h afllicti.on :
Ma c'hindf'rv, mé ro d'ac'h, d'ho priet, d'ho pugaIe, .
Ann enès-man antier, beb tam difficulté;
En Armoric am eùs c'boas eur maner charmant,
ha ma renntfet contant.
Dre-ze em gonzolet
Scène troisième.
Le théâtre représente l'île de Bréhat. _.
FRÉGAN, avec ses gens,
arrive par un côté du théâtre, le roi
et sa suite entr·ent, par
l'autre côté.
GRALON .
Salut, mon cousin, ma cousine et vos enfants,
Je vous rends mes respects, avec un amour sincère:
Cont~z-moi, je vous prie, la teneur de votre voyage:
La Grande-Bretagne est-elle toujours remplie d'outl'age ~
FRAGAN.
Hélas! mon cher cousin, roi des Bretons,
Jamais vous n'avez vu autant de cal'nage
Comme il yen a en Grande-Bretagne, avec c~s gens sans pitié:
Ils se massacrent tous les uns les autl'es,
Si bien que j'ai voulu m'Moigner, avec les miens;
C'est pourquoi je vous adresse une demande:
Si vous êtes assez bon pour soulager notre misère,
Nous prierons Dieu pour vous, en tout temps.
CLERVIE.
Sire Gralon, mon oncle, roi des Bretons,
Je suis Clervie, v tre nièce, qui est désolée,
Car il nous a fallu quitter notre pays,
Et nous ne savons maintenant qui nous donnera asile.
GRALON.
Mon cœur est plein de douleur et de mélancolie,
Quand je songe à votre affliction:
Mon cousin, je vous donne, à vous, à votre femme et à vos
entier, sans héSIter (17); renfants,
Cette île, eri
En Armorique, j'ai encore un manoir charmant:
Consolez-vous donc, et vous me rendrez content.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (~lémoires). 6
FREGAN, joaüs.
Consolet 'on ganac'h, hag êt en abandon
Kement glac'har a oa antreet em c'halon :
Me c'houlenn digant Doue ewit-oc'h peb seurt joa,
Rag i'rêt oc'h eus d'imb un donèson ar gaera.
GRALON.
Ma c'henderv caranteus, c'hui a gaoze parfet,
en hennt euz ar basianted ;
Bevet bepred
Setu aze coajo ha plaso agreabl, .
Da zevel eur c'hastel vô kaer hag admirabl ;
d'ho pt'ied Alba er plas-man un dourrell,
Grêt
War vordic ann dour-ma, en kichenn ho casteil.
FREGAN.
Me ho trugareca, ma monarc, ma Roue,
'Vit 'r vadèles 'oc'h eus evit-on me, hirie;
Me raï sevel ive, ma aotro, un il is .
Da rennta evidoc'h da Zoue sacrHi~ ;
la, me renonz brema da holl gloario ar bec/,
Hag en peb seLlrt feson ive d'ann drollc-speret.
GRALON.
Ouspenn, ma c'henderv ker, gouarner ho lacan
Er gêr dimeus aIs, hag en enezenn-man ;
C'hui vo a gommando peb tra, d'ho polonte,
Ar bopl .'zento ouzoc'h, evel pa vec'h Roue;
Ann tit~o-ze oc'h eus dre ma'z oc'h den capabl ;
Dre-ze, aç1ieu, me 'ia d'am pales deread ;
N' jouissin a netra nemed dimeus ma zrôn.
Me a losk ar rest holl 'n ho tisposition.
FREGAN.
Me ho trugareca dimeus ho madèles
'Vidon ha ma famill; med me iel' d'ho palès,
FRAGAN, joyeux.
Vous m'avez consolé, et elles sont dissipées,
avai~nt pénétré dans mon âme!
Toutes les douleurs qui
Je demande à Dieu, pour vous, toutes sortes de joies,
Car TOUS nons avez fait un présent des plus beaux.
GRALON.
Mon cOllsin bien aimé, vous parlez parfaitement;
Vi vez touJours dans le chemin de la patience: .
Voilà des bois et des lieux ageéables,
Parfaitement appropriés pour y bâtir un château;
Faites à votre épouse Alba, en cet endroit,une tourelle,
Au bord de cette eau, et près de votre château.
FRAGAN.
Je vous remercie, mon monarque, mon roi,
Pour la bonté que vous me témoignez aujourd'hui;
le ferai bâtir aussi, mon seignent', une église,
?our offrir, à votre intention, le saceifice à Dieu;
)ui, je renonce, dès à present, aux gloires de ce monde,
~t de toute façon aussi, au Mauvais Esprit.
GRALON.
De plus, mon cousin chéri, je vous fais gouverneur
)e la ville d'Is, aussi bien que de cette île;
j'est vous qui dirigerez tout, à votre volonté,
~t le peuple vous obéira, comme si vous étiez son roi :.
titres, parce que vous êtes capable :.
rous avez ces
ldieu donc, je vais à mon palais charmant:
e ne jouis de rien autre chose que de mon trône,
~t je laisse le reste à votee disposition. .
FRAGAN.
Je vous remercie de votee bonté .
·our moi etpour ma famille: mais je me rendrai à votre palais~
Pa vô accomplisset promesse 'n Eternel,
Evit temoigni d'ac'h ma c'harante, ma zèl.
ALBA.
~e a ielo ive, Roue ar Vretoned ;
ann enork, d'ho cuelet.
Dre-ze, ken' hon bezo
FREGAN.
Me rennt d'ac'h revflranz, ma Roue, hum blamant,
Hag er memes amzer, d'ac'h-chui, prinsed ,puissant.
. Ar Roue hag he dud cuit.
Aman, war vord ar mol', me raï sevel '1' c'hastell,
Ma vefomb diwallet el1Z a bep-seurt brezel;
Dre-ze, ,ma fach, c'hui 'ia da va le em requet,
'Vit clask oberourien d'ober-ze, heb arêt
MISTRAL .
. Aotro ar gouarner, 'vel ma commandet d'in,
Me ia en ho souhet, certenn, heb retardin.
Mistral cuit.
FREGAN.
Ama m' fried, vefomp en hon tranquillité,
Dre-ze, ma friet ker, e tesiran ive
A ve accoinplisset 'r bromese 'oe grêt d'imb,
Gant cannader Doue, 'zo Roue d'ann holl zennt,
ma fried, )r mab miraculusa,
Da reï d'ac'h,
Adversour ann Diaoul, sclerijenn ar bed-ma ;
'rân, hep dâle, a vô accompliset,
Med credi
Pa 'z eo a-beurz: Doue ez ê d'imb promètet.
ALBA.
Doue, 'zo infinit ha mad,
Esperomb en
Ha depechet sevel eur c'hastel deread,
Ha pedomp assambles un D{)ue eternel,
Hag prest hor bô ar c'hras d'ambrasin hor buguel.
Quand se Sel'a accomplie la promesse de l'Éternel,
Pour vous témoigner mon amour et mon zèle.
ALBA.
J'irai aussi, roi des Bretons;
Ainsi, à l'honneur de nous revoir!
FRAGAN.
Je vous rends révérence, mon roi, humblement,
Et à vous aussi, princes puissants .
Le roi et sa suite se retirent.
Ici, au bord de la mer, je ferai bâtir un château,
Pour que nous soyons à l'abri de tOllte guerre :
C'est pourquoi, mon page, vous allez voyager à ma requête,
Pour chercher des ouvriers pour y travailler, sans délai.
MISTRAL.
Seigneur gouverneur, puisque vous commandez.,
Je vais partir, certes, sans autre retard.
Mistral s'en va.
FRAGAN.
Ici~ ma femme, nous serons en paix :
C'est pourquoi, mon épouse chérie, je souhaite encore
Voir s'accomplir la promesse qui nous a été faite
Par le messager de pieu, le Roi de tous les saints,
De vous donner un fils miraculeux,
Ennemi du démon, lumière du monde:
Mais j'en crois l'accomplissement prochain,
Puisque c'est de la part de Dieu qu'on nous l'a promis.
ALBA .
Espérons' en Dieu, qui est infiniment bon,
Et pressez-vous de bâtir un château agréable,
Et prions ensemble le Dieu Éternel,
Car nous aurons bientôt la grâce d'embrasser notre enfant.
FREGAN.
Gwelet a ràn ma fach, artisaned gant-han;
Me 'ia da vont l'actaI da reï urz en peb-tra ;
Na eûs forz a gousto, hor zensor a zo crenv,
obel' bClhan, m'ho faëo mad ive.
Rêd 'vô
Holl cuit.
MISTRAL, he unann.
. Avanset ê '1' c'bastel, prest eo da achui,
Un nombr artisaned a labour, heb cessi ;
rân da lâret d'am mestr ez eo' achu
Mont a
Hag ez eûs plas en-han da em loja d'och-tu.
Mont 'ra cuit.
FREGAN a deu, joaüs.
Allons ta ! setu me rentet contant brema,
eo ma c'hastel, eur bâtis al' c'haëra,
Acbu
Ha d'am c'barga a joa bars. ma c'hastel newez,
'Eo deût al' mab a oa prometet gant Doue;
'Vit combati Satan, hag obel' Christenienn
da zifenn he lezenn :
A-beurz Doue 'eo deut,
Brema 'vezo savet un ilis a newez,
Ha neuze vÔ ma mab consacret da Doue!
Mont 'ra cuit.
Pevarvet Scenenn .
Daou diaoul a zeu, en em grial.
LUSUFER.
Diaolllo infernal, '1' wez-man 'omb glac'haret ;
Set' gânet eur bugel, 'zo Gwennole hanvet,
Un ennemi; rèd vÔ clask eur voÏen bennag,
Evit ben tourmanti, coulz he vam hag he dad.
SATAN.
Penaos ta, Lusufer, hec'h allemb ober-ze ?
Pa 'z eo ar bugel-ze gânet dre c'braz Doue,
FRAGAN.
d'artisans:
Je vois (venir) mon page, accompagné
e vais à l'instant donner mes ordres pour chaque chose:
leu importe la dépense, notl'e trésor est riche:
1 faut faire vite; je les paierai bien.
Tous s'en vont.
MISTRAL, seul.
Le château avance, il sera bientôt terminé,
'l'ombre d'ou vriers y travaillent, sans discontinuer:
'e vais dire à mon maître qu'il est terminé,
~t qu'on peut y loger dès à présent (18).
Il s'en va.
FRAGAN, joyeux.
Eh ! bien, me voici content maintenant, '
Le château est terminé: c'est un fort bel édifice,
Et, pour me combler de joie, dans mon château neuf,
Est venu le fils promis par Dieu : "
combattre Satan et faire des chrétiens,
Pour
Il est venu, de la part de Dieu, pour défendre sa loi.
Maintenant sera bâtie une église neuve,
Puis mon fils sera consacré à Dieu.
Il s'en va.
Scène quatrième.
Deux diables arrivent, en poussant des cris.
LUCIFER (20).
Diable.:; de l'Enfer, cette fois nous sommes désolés!
Il vjent de naître un enfant, nommé Gwennolé,
Un ennemi: il faudra chercher quelque moyen
Pour le tourmenter, et aussi sa mère et son père.
SATAN.
Et comment donc, Lucifer, pourrons-nous faire cela ~
Puisque cet enfant est envoyé de Dieu,
N' vô ket êzed 'n lacad d' goeza 'n peedition ;
Dre-ze, kennt 'vit commans, greomp reflexion.
LUSUFER.
Me 'z ia da diski d'ac'h ho zrompla gant eno1',
. Dre valediction, 'vel eur c'honfiteor:
1 Satan, tach da zeskin, evel-d-on, me as peel,
Ma c'hoarifomb hon rôl, evel ma'z eo dleet ;
Plures deo3 vere sine fine esse credo,
Dicamjuramento, dicam nee denegabo,
Distruam sabata, presbyteros verberabo,
Et interficiam; luxuriam amo, .
Et op&ra veniœ et pùe non dilexi,
Sed Deum maledieite în multi cum mussi C')
Mea maxima eulpa, mea mala negavi ; (negabo)
Mihi, nullo modo, tu pareere noli,
Veniam non dare ideo preeor te,
(misere1'i).
Mei, Deus pater, noli miserere.
Setu aze eur bater hag a rencfet goùd reez,
N'hellan continni, rag arru ez ôn faèz,
Med mÇlr greomb d'al' bopl pratica 'n orèzon-ze,
'Teufônt holl d'ar gaote1', en defin ho bùhe.
SATAN.
'Vit me 'iel' da redec partout dre ar vroio,
Ha nep ma selaouo, . certenn a bratico,
Rag me a vô su btil d' c'houeza 'n ho diou-scouarn,
Hag hi disco d'ezhe, pa defe penno c'houarn ;
ar scalier vraz a bunz ann ifernio.
Me eo
A raï d'hè soufr tourmant, eur wez ma vônt enD ;
, p'eo gwir omb condaonet da vout beprecl en poan,
Ar muia gonsortecl hOl' bô, vô al' gwellan.
Il ne sera pas aisé de le faÎl'e tomber en perdition:
Aussi, réfléchissons bien, avant de commencer.
LUCIFER .
Je vais vous apprendr'e à les tromper avec honneur,
Par des malédic1ions, sous forme de Confiteor:
Satan, tâche de l'apprendre comme moi, je te prie,
jouer notre rôle comme il faut.
Afin de
« Je crois qu'il existe vraiment plusieurs Dieux immortels,
« Je le dirai avec serment, je le dirai et ne me dédirai pas:
« Je détruirai (supprimerai) les dimanches, jelrapperai les
« Et je tuerai; j'aime la luxure, [prêtres,
« Et je n'aimfJ pas. les œuvres de pardon et de piété,
« Sed Deum maledicite in multi cum mussi (*) ;
« Mes plus grandes fautes, mes crimes, je les nierai:
« Ne me pardonnez en aucune façon, .
« Et je vous prie de ne pas m'accorder de pardon, '
« Dieu le Père, et de n'avoir de moi aucune pitié! ») (20)
Voilà un Pater qu'il vous faudra savoir couramment;
Je ne puis continuer, car je suis fatigué,
Mais si nous pouvons faire pratiquer cette oraison au peupla,
Ils viendront tous à la chaudière, à la fin de leur vie.
SATAN.
Pour moi, j'irai courir par tout le pays,
Et quiconque m'éconLera, pratiquera certainement,
Car je serai adroit à souffler dans leurs oreilles
Et leur apprendre ce Credo, quand ils auraient des têtes de fer~ -
Je suis le plus grand escaliel' du puits des Enfers,
Et je leur ferai souffrir tourment, une fois qu'ils seront là :
Puisqu'il est vrai que nous sommes condamnés à toujours,
Plus nous aurons de compagnons, mieux cela vaudra! [soliffrir,
, ri" i L
(.) Je n'ai pu comprendre ni, par cQnséqu~nt, trÇlduir~ c~tte IiS'ne~ qui est
certainement très att~rée.
LUSUFER.
Breman a ·feIl d'in-me explica 'n brezonec
Un dam ann orèson am eûs d'ac'h-c'hui disket ;
Ar seiz pee'.het marvell 'zo eno comprenet,
'Zo hor gourc'hemeno ; greomb m' vônt observet ;
Peb-seurt a sonjo-fall lacafomb 'n ho c'hâlon,
yeso 'n ho geno,
Fableno, comzo lubric a
'R blasfemo, bep momed, en ho actiono,
Pa rafônt eur pec'het, ho dô c'hoant ober daou ;
Red 'vô lacad fallentez en kalon peb-hini :
'ar gwir voïenn evit hon c'honsoli.
Hounès
SATAN.
Pa vô 'r fall 'n ho c'haion, a vezoc'h contantet.
LUSUFER .
la, rag d'ar fallentez me oa bet eureujet,
'm boe eur verc'h, 'zo hannvet Simoni, .
A-bini
'R re-ail 'oa : Sacrilej, Gourmandis, Hipu0risi,
Avaris ha Luxur, Lachete, Truchiri,
Gaouiadès hag Ourgouil, ann diveza Diegi.
SATAN .
Unec merc'h 'ta 'c'h eûs bet euz ho pried Fallente 1
Lâret ha hi 'zo bet d'ac'h a utilite 1
LUSUFER.
la; ma merc'h Simoni 'roïs d'ar brelated,
d'ar religil1sed,
Ma merc'h Hipocrisi
Ha Truchiri ifronte1'rîs d'ar varc'hadourienn,
Ha ma merc'h Avaris a ris d'ar Vourc'hizien;
Med Ourgouil, ma merc'h vrao, 'ris d'ann itronezed,
Ha ma merc'h Gaouiadès 'ris d'ann domestiked :
ann dud iaouanc,
Ma merc'h Luxllr a ris en toues
Ha neuze Lachete 'ris d'ann dud feneant';
'rîs d'allabourerien,
Gourmandis, Diegi,
LUCIFER.
Je veux maintenant expliquer en breton•
Une partie de l'Oraison que je vous·ai apprise;
Les sept péchés mortels (capitaux) y sont contenus:
Ce sont nos commandements; faisons-les observel' :
Nous mettrons toutes sortes de mauvaises pensées dans lescœurs~
Des fables et des paroles lubriques, dans les bouches,
toujOUl'S en action,
Les blasphèmes seront
Et quand on commettra un péché, on voudra en commettre deux:
11 faudra mettre la méchanceté dans le cœur de chacun,
C'est le vrai moyen de nous consoler .
SATAN.
Quand le mal sera dans les cœurs, vous serez satisfait 1
LUCIFER.
Oui, car je fus marié à Méchanceté,
Et j'en eus une fille nommée Simonie;
Me:s autres (filles) étaient: Sacrilège, Gourmandise, Hypo
Avarice et Luxure, Lâ0heté, Tricherie, [crisie,
. Mensonge et Orgueil, et la dernière, Paresse.
SATAN .
Vous a vez donc eu onze filles de Mécha.nceté ~
Dites-moi, en avez-vous retiré quelque utilité ~
LUCIFER.
Oui; je donnai ma fille Simonie aux prélats, .
Ma fille Hypocrisie aux religieux,
Tricherie, l'effrontée, aux mar(~hands,
Et A varice aux bourgeois: .
ma charma.nte fille, je la donnai aux dames,
Mais, l'Orgueil,
Ma fille Mensonge, aux domestiques;
Ma fille Luxure (je l'envoyai), parmi les -jeunes gens, .
Et Lâcheté fut réservée aux fainéants;
Gourmandise et Paresse, je les donnai aux laboureurs,.
Ha ma merc'h Sacrilej a rîs d'al' vezverienn.
ma bugale,
Setu penaos am eus fortunet
int enoret gant ho friejou, 'baoue.
Noz-de
SATAN.
Se 'zo mad ; demb dre 'r bed, bùhan, me ho supli,
Da lacad carantez [ho merc'hedJ en kalon peb-hini ;
Darn anomb a redû cl' gostez ann Occidant,
Ha darn-all a redû en tuz ann Oriant ;
Evit eus ma c'hoste, me 'raïo ma fossubl
Da c'honit, mal' ghellan, corf hag ille an ducl.
LUSUFER.
, M'exerso ma holl ardo dre bevar c'born al' bed,
'Vit obel' ma fosu bl ma vô ann holl daonet,
ho zourmanto, dre al' flammo ardant,
Neuze ni
Ha ruillet war al' scorn, flemmet gant 'r serpanted ;
0 vônt dre ann hent mad,
Rag-ze kement 'welfomb
'n ho diou-scouarn, d'ober d'ez-he cuitad;
C'houezomb
gant al' sou flet sennti,
Mar n'allomb ober d 'hê
ar c'hùrun, evit ho spouroni .: ,
'Refomb soon
'Vit mÔnt war ho claoulin d'ober orèsono,
Na cesfomb, ken chanchfont ho resolutiono.
Dre-ze, em separomb, rag me am eûs sur mali
d'al' prison infernal.
Da zigass consorted
Holl cuit .
PempvetScenenn.
FREGAN, ALBA, GWENNOLÉ, - ha daou vab-biban aIl.
, FREGAN. ,
Ma Iried, selaouet al' pez a zeziran :
Gweanole vâle mad he unan,
Set' hon mab
Dre-ze 'meus c'hoant breman, bag ive bolonte,
p'ilen lacaad ~r scol ; ordrenet 'oa gaI1t QQqe
Et Sacrilège, aux buveurs:
Et voilà comme j'ai fait la fortune de (marié) mes enfants,
Et depuis, nuit et jour, elles sont avec leurs maris.
SATAN.
Cela est bien: mais,je vous prie, dispersons-nous vite par le monde
Pour mettre l'amour (de vos filles) dans le cœur de chacun:
Une partie de nous courra vers l'Occident,
Et l'autre, v~rs l'Orient.
Pour moi, de mon côté, je ferai mon possible
Pour gagner,' si je puis, ~e corps et l'âme ·des gens.
LUCIFER.
Je rpettrai en œuvre tous mes artifices, aux quatre coins du monde"
. Et je ferai mon possible pour que tout le monde soit damné,
Puis, nous les tourmenterons par les flammes ardentes,
Les roulant (ensuite) sur la glace, les faisant mordre par des serpents;
Ainsi, tous ceux que nous verrons marcheL' dans la bonne voie,
les oreilles, pour la leur faire abandonner:
Soufflons-leur dans
Si nous ne pou vons leur faire obéir par le sou/flet,
Nous ferons bL~uire le tonnerre, pour les effrayer,
beau se jeter à genou"{, pour prier,
Ils auront
Nous ne cesserons que quand ils auront changé.
Ainsi, séparons-nous, car j'ai grande hâte
à la prison infernale.
D'amener des compagnons
. Tous s'en vont .
Scène cinquième, -
FRAGAN, ALBA, GWENNOLÉ, deux petits enfants.
FRAGAN.
ce que je désire:
Ma femme, écoutez
Voici que notre fils Gwennolé màrche tout seul,
volonté,
C'est pourquoi 'je désire maintenant et c'est même ma
De lé ' met tre à l 'école : c'est l'ordre de Dieu .
ALBA, 0 câna war eun ton caon .
C'hui a oar al' gwella petra 'zo da obel' ;
Hen casset, pa garfet, 'vit eu r pennad amzer :
mar vije gL'êt euz ma bolonte,
Coulzgoude,
N'aje ket el' bloas-ma, rag re-iaouanc ez-è .
FREGAN, 0 câna war memeuz tôn.
Alba, c'hui 'c'h eus rèson, ebars e kement-ze,
M'hen'mîro c'hoas el' gèr, en avantur Doue;
Goude-ze m'hen casso, abars daou vloaz pe dri,.
Rag 'iaoûanc ez eo c'hoaz da vônet d'al' studio
GvVENNOLE, 0 câna.
, Oblijet ez on d'ac'h, tad ha mamm enoret,
D~am bout laket el' bed, ha goude ma mâget;
Dre-ze na garfenn ket dônt d'ho tisoblija,
Me obeïsso d'ac'h, assuret, en peb tra.
lavaI' d'ac'h am eus c'hoant da ziskinn
Med me a
'N dra bennag a fumez, evit m,a profitinn,
Rag bez' am eus bolonte d'instrui ma speret,
d'tn, mal' plij, ho pennoz da vônet .
Dre-ze reït
. FREGAN .
Ma mab Gwennole, me 'm eus desir a veet,
En armo, campion war ann holl Vretôned ;
Vreiz-Meur: heb-dâle, m'ho casso, assuret,
Rag al' bobl el' vrô-ze a zo e111 revoltet, '
Ha 'vel m'am eus eno norilbr a edifiso,
d'in a chomfac'h d'jouissa ma mâclo.
A fell
GWENNOLE.
Petra dn-me, en touez tucl 'zo ken .revoltet,
Pa 'z eo gwil', ma zad keiz, na on ket instruet ~
Ha c'hoas 'on re-iaoùanc, goûd a ret-ze er-fad,
M'·ho ped d'am c'hass d'al' scol, da c'hortoz 'vîn en oad .
ALBA, chantant sur un air de deuil.
Vous sa vez le mieux ce q ,J'il Y a à faire :
quand vous voudrez, pour quelque temps:
Envoyez-le,
Cependant, si l'on faisait selon ma volonté,
Il n'irait pas encore, cette année, car il est trop jeune.
FRAGAN, chantant sur le même air.
Hélas, vous avez raison en cela;
Je le garderai encore à la maison, à la grâce de Dieu;
Je l'enverrai, plus tard, dans deux ou trois ans,
Car il est encore bien jeune pour aller à l'étude (l'école).
G\VENNOLE, chantant.
Je vous suis obligé, mon père, el ma mère honorée,
au monde, puis de m'avoir élevé;
De m'avoir mis
Aussi, je ne voudrais pas vous désobliger,
Et je vous obéirai, ayez-en l'assurance, en toute chose.
Pourtant, je vous dis que je voudrais apprendre
en profiter;
Quelque peu de sagesse, pour
Car j'ai bon "OU loir d'instruire mon esprit;
Aussi, je vous prie de me donner votre bénédiction et de me,
[laisser partir .
. FRAGAN.
Mon fils, Gwennolé, je désire que vous soyez,
Dans les armes, champion (chef) sur tous les Bretons;
Je vous conduirai, sans tarder, en Grande-Bretagne,
Car le peuple de ce pays s'est révolté, '
Et, comme j'ai là nombre d'édifices,
y restiez, pour jouir de nos biens .
Je souhaite que vous
. GWENNOLE.
Que ferai-je, au milieu de gens en révolte,
Puisque, mon père chéri, je n'ai pas d'instruction 'f
Et puis, je suis encore trop jeune, vous le savez bien:
Je vous prie de m'envoyer à l'école, jusqu'à ce que j'aie l'âge.
FREGAN.
Allas 1 ma buga!e, na Ônn petra a rân,
Aoûn 'm eûs 'teufac'h abred da guitad ar bed-ma,
H~ n'ho pa ket gallet succedi d'am mâdo,
Kewent-ze ro d'in nec'h, ouspenn daou vloaz a:-zo.
ALBA.
Pa 'z eo gwir, ma fried, hon ells kement 'voïenn,
COl1ls ebars en leve, evel en aour melenn,
'Dlefac'h obel' sevel, bars en gweled Léon,
Eor gêric evit reï d'ezhan en donèson. .
Roamb d'ezhan conje da vônet d'ar golach,
'N keit-ze ho pÔ amzer d'brepari hè héritach .
FREGAN .
Kement-ze, ma firied, 'zo apropos d'obel'.
Ma vÔ he heritach prest pa rt'torno d'al' gèr ;
Dre-ze me gousant sevel, hep c1aleïn nemeur
Eur gèric, en Léon, a vÔ banvet Breiz-Meur,
Rag 'n hano-ze ma friet, a fell d'in a clefe
Dre m'am boa en Breiz-Meur calz euz a dignite :
Dre·ze en em denuomb, ha warc'hoas, Gwennole,
M'ho casso d'ann tad Budoc, da deski lezenn ar fé.
Holl cuit.
U' huee' hvet Scenenn .
FRÉGAN, GWENNOLÉ .
. FREG-AN.
'Gwennole, ma mab ker, pa'z omb em breparet,
Me 'ia d'ho cass d'ar scool, ma vefet instruët : .
En tuz ann Occidant 'z iefet, en gwirione,
D'aml tad Budoc, d'en ilis, 'zo câret gant Doue,
GWENN OLE, 0 câna war eunn ton huël.
o Doue! ma zad keiz, me 'zo meurbet contant
o vônt d~ann tad Budoc, en tuz ann Occidant ;
FRAGAN.
Hélas! mes enfants, je ne sais ce que je fais;
Je crains que vous ne veniez de bonne heure à quitter ce monde,
Sans a voir pu me succéder dans mes biens,
Cela me tourmente, depuis plus de deux ans.
ALBA.
Puisqu'il est vrai, mon époux, que nons avons tant de biens,
jatÙ1e,
Aussi bien en rentes qu'en or
Vous devriez faire bâtir, dans le fond du Léon, '
Une petite ville, pour la lui donner en présent.
Donnons-lui congé pour aller au collège,
VOllS aurez alors le temps de préparer son héritage .
FRAGAN .
Il est à propos, ma femme, d'agir ainsi,
Pour que son héritage soit prèt, quand il retournera à la maison;
je consens à faire bâtir, sans beaucoup tarder,
Allssi,
Une petite ville en Léon, qui sera appelée Grande-Bretagne;
Car ce nom-là, ma femme, je veux qu'elle le porte (21), .
Parcequ'en Grande-Bretagne, j'étais comblé de dignités.
Retirons-nous donc, et demain, Gwennolé,
Je vous conduirai au père Budoc, pour apprendre la loi de la foi.
Tous s'en vont.
Scène sixième.
FRAGAN, GWENNOLÉ.
FRAGAN .
Gwennolé, . mon cber fils, puisque nous sommes prêts,
à .l'école, pour que vous soyez instruit;
Je vais vous conduire ,
C'est du côté de l'occident que vous irez, en vérité, .
Vers le père Budoc, homme d'église, qui est aimé de Dieu .
GWENNOLE, chantant, à haute ,·oix.
o Dieu, mon pau vre père, je suis bien content
le père Budoc, du côté de l'occident;
D'aller vers
BÙLLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XVI. (Mémoires).
Rac-ze 'ta, ma zad keiz, clemb bûhan' ma c'hallemb
Mail am eùs cl'anaout allèzenno cristenn.
Tân ha cùrun. Fregan a gouez d'an douaI':
sevel a ra, en em la va/'et :
FREGAN .
g~nt'r luc'hed,
Allas! me 'zo poaz-glaou, a bep-tu,
'n tempest-ma, siouas ! me a zo spouronet :
Dre
Me lavaI' cl'ac'h, ma mab, it oc'h unan, mar câret,
'd'in monet.
Rag pa dlefenn merwell, impossnbl
GWENNOLE.
C'hui 'zo meurbet spontic, ma zad, war ar bed-man !
N'ho bezet nep morc'hed, me iel0 ma u nan :
eo beza hardis, ha fiziout en Doue,
Rèd
Mar fell d'imb, ma zud keiz, bewa'n he garante.
FREGAN.
Me gourrajo, ma mab, monet a rinn ganec'h,
Rag ho clewet 0 comz, e timinu ma nec'h :
ni rentet, dre c'hras Doue, brema,
Med setu
'rân ann Abbat arru iwe ama .
Gwelet
Budoc a deu .
BUDOC.
Salut d'ac'h, Prins Fregan, goarner ar Vretoned,
P'ho welan deût ama, lâret d'in al' sujet.
FREGAN.
Dent ez on, tad Budoc, da zigass d'ac'h ma mab,
Ewit hen instruin en lèzenn Doue 'n tad ;
d'hen avans,
Dre-ze ho supplian da gaout soign
'n assurans .
Me ho recompanso euz ho poan
Marc ha Simon a deû .
. Ainsi, mon bon père, allon:;:, le plus vite que nous pourrons,
Car je suis impatient de connaître la loi chrétienne. .
Ils se mettent en route.
Eclairs et tonnerre; Fragan est jeté à terre; il se relève et dit:
FRAGAN.
Hélas! je suis tout cuit, de partout, par les éclairs,
Par l'effet de cette tempête; et je suis tout eflrayé ;
di~, mon fils, allez selll, si vous voulez,
Je vous le
Car, quand je devrais mourir, je ne puis aller (plus loin) •
GWENNOLE.
Vous êtes bien peureux, mon père, dans ce monde!
Mais, n'ayez point d'inquiétude, j'irai seul:
li faut être sans peur, et avoit' confiance en Dieu,
Si nous vo~lons, mes amis, vivre en son amour.
FRAGAN.
. J'aurai du courage, mon fils, et je vous accompagnerai,
Car en vous entendant parler, ma crainte s'affaiblit.
Ils font un tour sur la scène.
Mai~, nous voici arri vès, grâce à Dieu,
Je vois l'abbé qui arrive aussi. .
. Budoc arrive.
BUDOC.
Salut à vous, Prince Fragan, gouverneur des Bretons,
En vous voyant venu ici, dites-moi quelle en est la raison. (22)
FRAGAN.
Je suis venu, père Budoc, vous conduire mon fils,
Pour l'instruire dans la loi de Dieu, notre père:
Je vous prie donc de prendre soin qu'il apprenne,
Et je vous récompenserai certainement de votre peine.
Arrivent Marc et Simon, élèves de Budoc.
BUDOC.
Euz eur pareil enor me zo rejonisset ;
Setu bugalez-all 'z~ en-hôn confiet,
Ha c'hoas cals a re-aU a zo ganin pell-zô,
Pere a zo breman avanset 'n ho c'hlasso :
Ho mab, mar car zennti, war-benn neubeud ar:pzer,
A brofito iwe, me reï d'ezhan ober.
FREGAN .
. Ma mab,senntet d'ho mestr, bepl'ed, en peb-termeun,
Bezet obeïssant da c'heuill he c'houl'c'hemenn,
Hen sûr oc'h instruo en furnès ha respet,
Hag er-fin gant Doue c'hui vô recompanset :
me lavaI' d'ac'h kenavo, ma mab ker,
Dre-ze
Ha d'ac'h aotro. 'n Abbad, rag me ez ia d'al' gêt' !
GWENNOLE.
Kenavo 'ta, ma zad, m'ho trugare parfet,
Grêt ma gourc'hemeno d'am mamm, pa arrl,lfet.
Fl'égan cuit.
BUDOC . .
Brema, bugaligou, com~anset stlldia,
Me'z ia d'laret m' breuriez, soudenn me deuï ama,
Goude m'am bô pedet ha su ppliet Doue,
Da reï d'ac'h sclezrijenn, d'ann eil ha d'egile :
Setu ale ann daol ; n'em laket d' studia,
'Ma ouifet réez ho kentel, en bezr, da recita,
mad na deufac'h da c'hoari
Med taolet-ewez
Ann eil gant egile, gant aoun da 'n em vlessi,
GWENNOLE .
Bezet asur, pla mestr, ni na c'boarifornb ket,
Ni 'vouïo 'n c'hentelio a-ben ma'arufet,
Budoc cuit.
BUDOC.
Je me réjouis d'un pareil honneur;
Voici d'autres enfants, qui m'ont été confiés, .
Et beaucoup d'autres encore sont à mon école, depuis long-
Qui sont maintenant avancés dans leurs clas'3es; [temps,
Votre fils, s'il veut obéir, en peu de temps,
Profitera aussi, grâce à mes soins .
FRAGAN . .
à votre maître, toujours, en toute chose;
Mon fils, obéissez
Suivez ses ordres. avec soumission,
Et, certes, il vous instruira en sagesse et en respect,
Et enfin, Dieu vous récompensera:
Je vous dis au revoir, mon cher fils,
Et à vous aussi, Monsieur l'abbé, car je retourne chez moi .
GWENNOLÉ.
Au revoir donc, mon père, je vous remerGÎe :
Faites mes compliments à ma mère, quand vous arriverez.
Fragan s'en va.
BUDOC .
Maintenant, mes chers enfants, mettez-vous à étudie~',
Moi, je vais réciter mon bréviaire, mais je reviendrai bientôt,
A près avoir prié et supplié Dieu
De vous donner sa lumière, aux uns et aux autres }
Voilà la table; mettez-vous à l'étude,
POUl' que vous sachiez couramment votre leçon ~
Mais prenez garde de vous mettre à jouer
Les uns avec les autres, de crainte de vous blesser.
GWENNOLÉ.
Soyez certain, mon maître, que nous ne jouerons point,
Et nous saurons nos leçons, quand vous arriverez. .
Budoc s'en va.
MARC.
Bast ! me oar ma c'hentel mad a-walc'h, ' a gredan,
Ha caer am eus sellet, me WE'l ar memeuz tra.
SIMON.
Ha me gaf ec'h oûzon mad ma hinin ive,
ann eil hag egile :
Rag-ze 'z omb avanset
Ha te, Gwennolé, n'ouzoud ket c'hoas da hini f
'Wit te zo pell a-walc'h oc'h esa hi deski !
GWENNOLE
En-bezr, pô kestion da dont do recita,
ar gwella ;
A vezo gwelet piou a onïo
'Wit me studio keit ha ma c'hellin ober,
Pa baë ma zad wit-hon, n' laerin ket ann amzel~ .
SIMON .
Marr, lezomb anezhan pa zebri he levriou,
Ha deomb en kreiz ann ti ewit gourenn hon daon ;
ma ra heman,
Mar zenntfemb eûz hor mestr, evel
N'hor be ket eur momet 'wit em divertissa .
MARC.
la, deomb 'ta, Simon, hor daou a groc-collier,
ma cliou vrec'h m'as tiscaro em c'héver .
Dre nerz
Gourenn a l'eont : Simon a gouez,
Gwelet 'res, ma mignon 1 Setu te discal'et !
SIMON euz he c'hourvez .
Fors! fms! an den mechant, ma gâr hen eus tôret!
Allas! urzo hon mestr hon eus bet transgresset,
me 'zo estropiet.
En-faot senti ou t-han
GWENNOLÉ a ia d'ann daonlin, en orèson.
Doue, crouer ann nef, ha kement zo '1' bed-ma,
C'hui oc'h eus and uret poanio ar re-vrassa,
MARC .
Bast ! Je sais assez bien ma leçon, je pense;
J'ai beau regarder, je vois toujours la même chose.
SIMON.
Et moi 'aussi, je trouve que je sais suffisamment la n,-ienne,
Et c'est pourquoi nous sommes aussi avancès l'un que l'autre.
Et toi, Gwennolé, ne sais-tu pas encore la tienne 1
Il Y a pourtant assez longtemps que tu essaies de l'apprendre.
GWENNOLE .
Tantôt, quand il s'agira de réciter,
On verra qui saura le mieux;
Pour moi, 'j'étudierai, aussi longtemps que je pourrai,
Et puisque mon père paie pour moi, je ne volerai pas le temps.
SIMON.
Marc, laissons-le manger ses livres,
Et allons lutter tous les deux, au milieu de la maison;
Si nous écoutions notre maître, comme le fait celui-ei, .
n'aurions pas un moment pour nous amuser.
Nous
MARC . .
Oui, Simon, prenons-nous au collier,
Et par la force de mes bras, je te renverserai à mes pieds.
Ils luttent; Simon est renversé.
SIMON, étendu par terre.
Au secours! au secours! Le méchant! il m'a cassé la cuisse!
Hélas! nous avons transgressé les ordres de notre maître,
Et pour lui avoir désobéi, me voilà estropié!
GWENNOLÉ, se jette à genoux, et prie . .
o Dieu, créateur du ciel, et de tout ce qui est au monde;
Vous avez souffert les plus grandes peines,
Iac'hêt ar bugel-man, allas! zo impotant,
holL buissant :
Dre verit ho maJ'o, Doue
Simon, grâ sinn-ar-groaz war da c'houli, n'han' Doue:
Brema, rô d'in da zorn, ha sao prim a lec'h-ze.
Sevel a ra iac'h.
SIMON.
Gwennolé, da bedenn a zo bet exauset,
al' c'hraz a Zoue, setu iac'h ma morzec1 ;
Dre
Na zantan ken a boan, a drugare Doue,
Dre intercession ho pedenn, Gwennolé .
GWENNOLÉ . .
Da Zoue eo al' gloar, t1'ugarecêt 'n ezhan,
Rag nez he vadèles, oac'h chonlet cam, 'gredan,
Hag hon mestl' a vije fachet 0 welet-ze ;
Med setu-han arri aman, en gwirione. . '
Dont a ra Budoc.
SIMON, gant malI.
Allas! ma mestric kèr, ma fardonet, m'ho ped
Rag un darn oc'h urzo am euz bet transgl'eset ;
Marc ha me a zo bet ho c'hourenn, assuret, '
Hag 'on couezet indan, ha toret nia morzed :
Na oann ket ouit sevel, ma chomis gourveet, 1
eûs ma iac'haët.
Gwennolé, drè orèson, hen
BUDOC .
Setu eur miracl caer 'zo gret en oc'h andret~
Dre 'r bugel Gwennolé; zo gant Doue caret;
Rèd a ve en grâz Doue, se a zo veritabl,
Rag ar pez' hen eûs grêt a zo su'1' eur mirarl :
bugaljgou, stouomb war hon daoulin.
, Allons,
fenIan enor da Gwennolé, d'adorin,
Ewit al' blll'zlld-ze, al' Vajeste divin.
(Daoulina a reont),:
Guérissez cet enfant, qui est impotent hélas!
Par le mérite de votre mort, 0 Dieu tout-puissant!
Simon fais le signe de la croix sur la blessure, au nom de Dien;
Maintenant, donne-moi la main, et relève-toi, vite. (23).
Il se relève guéri .
SIMON.
Gwennolé, ta prière est exaucée,
Et, grâce à Dieu, voilà ma cuisse guérie; ,
.le ne ressens plus de douleur, grâce à Dieu,
Par l'intercession de votre prière, Gwennolé.
GWENNOLE.
A Dieu en revient la gloire; remerciez·le,
Car, sans sa bonté, vous seriez resté boîteux, je pense,
. Et notre maître aurait été fort contrari~ en voyant cela:
Mais le voilà qui vient ici, en vérité!
Budoc arrive.
SIMON, avec empressement.
H8las! mon pauvre maître, pardonnez-moi, je vous prie,
Ca~' j'ai désobéi à une partie de vos ordres:
Marc et moi nous avons lutté ensemble, assurément,
Et je suis tombé dessous, et me sui~ cassé la cuisse: .
J,e ne pouvai3 me relever, si bien que je restais couché à terre,
Mais Gwennolé, par une oraison, m'a guéri.
BUDOC.
Voilà lin gnnd miracle, fait en votre faveur,
Par l'enfant Gwennolé, qui est aimé de Dieu;
Il faut qu'il soit en la grâce de Dieu, et cela est certain,
Car ce qu'il a fait, est certainement un gr'and miracle.
Allons, chers petits enfants, mettons nous à genoux,
Pour renàre honneur à Gwennolé, et pour adorer
Pçmf c~ IJ:liI'~cl~, I~ Majesté di vjne.
!ls se rp~ttept à genOu~ ~
. G'iVENNOLÉ.
Aotro Budoc, ma mestr, ha c'hui, ma mignoned,
Savet pl'iln, m'ho suppli, rag na veritan ket
En em brosternfac'h dirag ma fersonach,
d'ann aotro Doue n'eo dleet ann homacb.
Med
BUDOC.
Allas! d'in, Gwennolé, me na ôn roui capabl
eur speret a zo ken admirabl ;
D'instruin
Na eûs nemed tri bloaz baoue ma 'z oc'h gânet,
Ha surpaset anhon m'hen lâr gant gwirione.
GWENNOLÉ.
Eh ! bien ta, tad Budoc, me ho trugareca
Euz ar soign oc'h euz bet anon, baoue tri bloaz ;
Pa lavaret penaoz n'aIl et mui m'instruin,
Me ia brema d'ar gêr, mar roët conge d'in
BUDOC.
Et eta, Gwennole, rag c'hui a zo capabl
m'ho pije bet an oad ;
Da veza d'en ilis,
Med eul' c'hraz am eus c'hoant da c'houlenn diouzoc'h :
Permet et ac'hanon, m'ho ped, da c'heuill anoc'h .
GWENNOLE.
o Doue, ma mestr ker, pez enol' 've d'in-me
Ho caout da gompagnon, p'arruin em c'hontre !
Me zo chalmet 'teu fac'h, assu r, ganin brema,
ha ma rôfet d'in eur scouel'-vad, en peb-tra.
Keït
BUDOC.
Neuze 'ta, bugaligou, antreet en Abati,
'Wit m'ho recommandin d'ann tâdo 'zo en-hi,
'R re-ze oc'h instruo er-vad 'ker-couls ha me,
Rag brema n'guitaïn birvikenn Gwennolé.
Holl cuit .
GWENNOLÊ.
Seigneur BudDC, mDn maitre, et vous, mes amis;
je VDUS prie, car je ne lilérite pas
Relevez-vO'us, vite,
Que VDUS VDUS prDsterniez devant mDi ;
A Dieu seul est dù cet hDmmage.
BUDOC.
Hélas! de mDi, GwennDlé, je ne !Suis plus capable
D'instruire un esprit si admirable: '
' 11 n'y a que trDis ans que VDUS êtes né (24),
Et VDUS me surpassez déjà, je le dis en vérité .
GWENNOLE .
Eh ! bien, père BudDC, je VDUS remercie
'Des sDins que VDUS m'avez dDnnés, depuis trDis ans;
Et puisque VDUS dites que VDUS ne pDuvez plus m'instruire,
retDurnel' à la maisDn, si VDUS me dDnnez cDngé.
Je vais
BUDOC.
Allez dDnc, GwennDlé, car VDUS êtes à même ,
D'être hDmme d'église, si VDUS en a viez l'âge:
Mais je veux VDUS demander une grâce,
Permettez-mDi, je VDUS prie, de VDUS accDmpagner .
, GWENNOLE .
o Dieu, mDn cher maître, quel honneur pour moi
Que de vous aVDir pqurcDmpagnDn, quand j'ani verai dans mon
suis charmé, certainement, que VDUS m'accDIJlpagniez, [pays!
me donnet'ez le bDn exemple en toute
Aussi longtemps que vous
[chos~.
BU DOC.
C'est pDurquDi, chers petits enfants, entrez dans l'abbaye,.
Pour que je vous recommande aux pères qui y sont,
tDut aussi bien que mDi,
Ceux-là vous instruiront,
Car, désormais, je ne quiterai plus jamais Gwennolé (25).
Tous s'en vont .
Scennenn Seizvet .
FRÉGA~, ABBA, CLERVI, GWENNOLÉ, BUDOC .
GWENNOLÉ, en eur antren.
ma mamm, ha c'hui, ma c'hoarclervi;
Démad, ma zad,
Setu me digwezet adare 'bars ho ti,
Ha ma mestL' ann Abbat 'zo deût ganin ive; .
etl'e 'vin em buhe.
D'ezhan 'dleïn respet,
FREGAN .
Arruët.mad ez oc'h, ma mab keiz Gwennolé,
Cals a joa a ra d'in ho cwelet er c'hontré.
d'in breman, hep n'ac'h netra el' bèd, '
Disclezriet
Ha kommanz 'ret dija cultiva ho speret ~
BUDOC.
Pardon, aotro al' Gouarner euz al' vrô-man,
Bars al' gestion-ze, me respont ewit-han :
Ann aotro-ma, ho mab, zo un den a speret,
Na gavfet ket he bar, en pewar c'horn al' bed ;
Ken avanset ez eo en education,
Ken ez eo savantoc'h eget hon 'n peb feson ;
Ouspenn e lârin d'ac'h, aotro, gant gwirione,
Ho mab 'zo den santel,. ha mignon da Zoue :
m'hen assur, ec'h el/omb da gredi,
Kement-ze,
Rag eur miracl caer en eûs grêt en Abbati :
Eur scolae.r iaouanc d'in oa toret he vorzed,
. Hag ho mab, dre bedenn, hen eÎlz-han iac'haët.
gân.
ALBA a
o Majeste divin, me 0 trugareca ;
Ni zo favol'iset dre-zoc'h, bars al' bed-ma :
, Pl'ometet ho poa d'imb, en enezenn Breiz-Meur,
à rôjac'h dïmb ~ur mab a râje hon bonheur!
Scène septièm,e .
FRAGAN, ALBA, CLERVIE, GWÉNOLÉ, BUDOC,
et les deux autres enfants .
GWÉNOLÉ, entrant.
Bonjour, mon père, ma mère, et vous
aUS~l ,
ma sœur '
dans votre maison,
Me voici de retour
[Clervie;
Et mon maître l'abbé est aussi venu avec moi:
Je lui devrai respect, aussi longtemps que je '3erai en vie.
FRAGAN.
VOU~ êtes les bien venus, mon cher fils Gwennolé,
J'éprouve beaucoup de joie à vous revoir au pays.
Declarez-moi mainteuant, sans rien nier,
Si vos commencez déjà à culti ver l'esprit?
BUDOC . .
Pardon, seigneur gouverneur de ce pays,
qup.stion je réponds pour lui. .
A cette
Ce seigneur, votre fils, est un homme d'espl'Ït,
Et vous. ne trouveriez pas son pareil, aux quatre
coins du
Son éducation est tellement avancée;
[monde:
Qu'il est plus savant que moi, de tou1'e façon:
Je vous dirai de plus, ,seigneur, en vérité,
fils est un saint homme et un ami de Dieu;
Votre
Nous pouvons bien le croire, je vous. l'assure,
Car il a fait un beau miràcle, dans l'abbaye:
Un de mes jeunes écoliers s'était cassé la cuisse,
Et votre fils, par sa prière, l'a guéri. .
ALBA, chantant
o Majesté di vine', je vous remercie;
Vous nous favori~ez, dans ce monde: .
Vous nous aviez promis, en l'île de la Grande-Bretagne,
De nous donner' un fils, qui ferait 'notre bonheur.
CLERVI a gân.
Gwennolé, ma breur ker, dre garantez ardant
Me rennt d'ac'h ma respet, dre ma 'z oc'h puis~ant,
Med eur c'hrâz c'houlennan euz Doue ha Mari,
Wit ma chomfet ganimb er gêr, d'hon consoli.
FRÉGAN .
Assur er gêr ganimb-, ma merc'h, a chômo sur,
Da be-lec'h a feH d'ac'h 'z afe en avantur ~
En Breiz-Mellt' a-darre refomb hon tesidans,
Hag a chômo ganimb, da reÏ d'imb assistans.
Lakêt am eus pell-w sevel d'ezhan eur gêr,
Hag hen a vô al' mestr, en Bl'eiz-Meur en anticr.
Dre-ze, aotro Budoc, ha ma mab Gwennolé,
D'eomb d'em rejouissa, en hano ma Doue.
cuit .
Holl
Scennenn Eizvet .
Ar MARKIZ BELFLOR, ha RIOU., he vab.
BELFLOR.
Deût-c'hui ganin, ma mab, da ober eut' hâle,
Da welet ho kenderv, ann aotro Gwennolé,
A zo arru er ger, achuët he studi,
Dre-ze eomb hon daou ewit hen saludi.
RIOU.
Ma zad, me zo contant da. vonet d'hen gwelet,
Rag ewit ma c'henderv me'm euz cals a respet,
H&g er memeuz am~er, ewit ma c'heront-all;
Gant-ze eta, ma zad, depechomb partial.
BELFLOR.-
Greomb 'ta pl'epari d'imb-ni peb a varc'h mad,
Ewit ma 'z efomb prest da enezenn Briat,
Pa veomp 'n bord ann aod, e cavfomb passajer,
Pini hon Zl'ansporto da di al' Gouarner.
CLERVIE, chantant.
Gwennolé, mon frère chéri, avec un amour ardent,
Je vous rends respect, parce qu~ vous êtes puissant;
Mais, je demande une grâce à Dieu et à Marie,
C'estque vous restiez avec nous, à la maison, pour nous consoler .
FRAGAN.
Certainement, notre fi 1s restera avec nous à la maison;
Où vOIliez-vous qu'il s'en aille, à l'aventure?
C'est en Grande-Bretagne que nous résiderons encore,
Et il restera avec nous, pour nous donnet' assistance.
Depuis longtemps, je lui ai fait bâtir une ville,
Et il serq. le maîtrp, dans toute la Grande-Bretagne (*).
Ainsi, seigneur Budoc, et mon fils Gvvennolé,
nou::; Qi vertir, a u nom de Dieu!
Allons
Tous s'en vont.
Scène huitième.
Le Marquis BELFLOR, et son fils RIOU.
BELFLOR.
Venez avec .moi, mon fils, faire une promenade,
Pour voir votre cousin, le seigneur Gwennolé, •
Qui est arrivé à la maison, ses études tèrminées ;
-les deux le saluer.
Allons tous •
RIOU.
Mon père, je suis content d'aller le voir,
Car pour mon cousin j'ai beaucoup de respect,
Et en même temps aussi' pour mes ':lutres parents;
Ainsi donc, mon père, pressons-nous de partir .
BELFLOR.
Fai~ons-nous donc préparer à chacun un bon cheval,
Pour nous rendre promptement à l'île de Bréhat; (26)
pons tronverons
Quand nous serons sur le rivage de l'a mer,
Qui nous tl'ansportera chez le Gou \'erneu1'. [ un passager],
Ils s'en vont.
n li s'agit de la prétendue ville, Breiz-Meur, bâtie pour Gwennolé, en Léoq •
Scenenn Naovet.
FRÉGAN, ALBA, CLERVI, BUDOC, GWENNOLÉ, MISTRAL.
FREGAN.
Bl'ema mab GWel1nolé; na pa 'z 00'11 discuizet,
Eomb da welet hon eontr, l'one al'· Vretoned,
. Ewit discouez d'ezhan penaoz ez oc'h capabl
Da c'houarni eur gèr, kercoulz evel ho tad,
Hag 0 retorn 'c'hane, ez iefomb ni vval> eon
D'ho condui 'n Breiz-Meur, pîni 'zo en Leon:
Ipdan he gornandamant a vefet eno c'hoaz
Ewit derc'hel al' regl en touez al' bopulas :
Dre-ze 'ta, ma zud ker, partiomb asambles :
Med me 'weI 'tônt Belflor, za ma c'henderv gompez,
Hag he vab '1' chevalier a zo gant-han iwe :
Me zo sur e teuont d'ho cuelet, Gwennolé.
Dont a reont.
BELFLOR.
Salut, mÇl. hoU geront, ha ma nîz Gwennolé,
Me rennt d'ac'h ma respet, gant eur gwir garante;
Evel m'am eùz clewet làret oac'h arrllet,
Ez ôn deut gant ma mab esprès "wit ho cuelet.
GWENNOLE.
Oblijet 'on en braz d'ac'h, ma eontr ker Belflor,
ha d'am c'henderv ; c'hui 'zo tud a enor ~
Kercouls
Mar caret dont ganimb da ober eur bâle, '
D'ar gêr dimeuz, a ISj da welet al' Roue?
BELFLOR.
la' sur, ma niz caret, gant joa vraz em c'halon ;
Cals joa 'm bô 0 welet al' roue braz Gralon,
Iwe ma mab Riou, n'eLls-han ket c'hoas gwelet; .
Brema 'raï, gant enor, pavomb enô rentet.
Scèn~ neuv~ème.
FRAGi\N, ALBA, CLERVIE, BUDOC, GWENNOLÉ, MISTRAL.
FRAGAN.
Maintenant, mon fils Gwennolé, que vous VOllS êtes reposé,
Allons voir notre oncle, le roi des Bretons,
Pour lui faire voir comme vous êles capable
. De bouverner une ville, aussi bien que votre père,
Et en revenant de là, nous irons tout droit _
Vous conduire à Breiz-Meur, qui est en Léon.
Là, vous serez encore sous ses ordres,
Pour main tenir la loi parmi le peu ple ;
Ainsi donc, mes chers amis, partons ensemble:
Mais je vois venir Belflor, qui est mon cousin-germain,
Et son fils le chevalier est aussi avec lui.
Je suis SÛt' qu'ils viennent vous voir, Gwennolé.
Ils arrivent.
BELFLOR.
Salut à vous tous, mes parents, et mon neveu Gwennolé,
Je vous rends mes respects avec un amour sincère;
AussitÔt que j'ai entendu dire que vous étiez arrivé,
Je suis venu avec mon fils, tout exprès pour vous voir .
GWENNOLE.
Je vous suis grandement obligé, mon oncle Belflor,
qu'à mon cousin; vous êtes des gens ·d'honneur;
Aussi bien
Si vous voulez venir avec nous faire une promenade
A la ville d'Is, pour voir le Roi ~ (27).
BELFLOR.
Oui, certainement, mon cher neveu, avec grande joie dans
J'aurai beaucoup de plaisir à voir le Roi Grallon, [mon cœur;
Et mon fils Riou aussi, car il ne l'a jamais vu; {verons-là.
Mais à présent, il le verra, avec honneur, quand nous arri-
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XVI. (Mémoires). 8
FREGAN .
Goude-ze, ma c'henderv, 0 retorn a-c'hane,
'Teùfet iwe ganimb, d'gondui Gwennolé
D'eur gêric am eûs grêt batissan ewit-han
En Leon, pehini 'vô he barlach breman .
BELFLOR.
la sur, ma c'henderv kèr, gant joa me ho c'heuillo,
Hag ho mab Gwennole iwe dre-holl el' vl'ô ;
'ta partiomb, rag sur me am eùs mail
Dre-ze
Da "velet al' Roue en he balez roïal!.
FREGAN.
Demp-holl eta 'ractal da welet anezhan,
Med et a-ra oc, ma fach, wit en avertissan,
Ha lavaret d'ezhan 'omb arrll asambles,
en he bâlès.
Da reï d'ezhan homach, ebars
MISTRAL.
Ma mestr, aot1'o Fregan, ho holl gommandamant
A vô execlltet ganin antieramant;
Me a roï, heb mancollt, al' pez 'c'h eûz commandet
me a lâ1' d'ac'h kenvo 'r c'hennta gwelet.
Dre-ze
. Mistral cuit. .
FREGAN.
Ha nin, ambarcomb holl na war he lerc'h, ractal,
Souden.n vefomb renntet ebars al' gapita!.
(Holl cuit).
Scenenn decvet.
GRALON, STERIDO, DOURVA, MISTRAL.
MISTRAL, oc'h antren .
Salut, Roue Gr::llon, Roue a.r Vretonecl,
~l1a mestr Fregan me 'zo cleût, assuret,
A-beurz
Da renta d'ac'h visit, hag he hoU duel gant-han .
FRAGAN.
Ensuite, mon cousin, en revenant de là,
Vous nous accompagnerez aussi pour conduira Gwennolé
-A une petite ville que je lui ai fait bâtir,
En Léon, et qui sera son héritage, à présent.
BELFLOR.
Oui, (~ertes, mon cher cousin, je vous suivrai avec plaisir,
Et votre fils Gwennolé aussi, par tout le pays;
Partons donc, car j'ai grande hâte
voir le Roi, en son Palais-Royal.
. FRAGAN.
Partons donc tous, à l'instant, pour aller le voit' ;
Mais dévancez-nous, mon page, pour l'avertir,
Et lui dive que nous uni vons tous ensemble,
Pour lui rendre hommage, dans 'son palais .
MISTRAL .
Mon maître, seigneur Fragan, tous vos ordres
Seront exécutés par moi, en entier:
Je ferai,. sans faute, ce que vous m'avez commandé;
C'est pourquoi je vous dis: au revoir!
Mistral s'en va .
FREGAN.
Et nous, embarquons·-nous, à l'instant, pOl1r le sui vre,
Nous sel'Ons bientôt rendus dans la capitale. . .
Tous s'en vont.
Scène dixième.
GRALLON, STÉRIDO, DOURVA, MISTRAL.
MISTRAL, en entrant.
Salut, Roi Gralon, Roi des Bretons;
. De la part de mon maître Fragan, je suis venu
Vous dire qu'il doit arriver ici, prochainement,
Pour vous faire visite, avec toute sa suite.
GRALON.
Pach iaouanc; antreet bepred da discouisan,
Me raï serviji d'ac'h peadra da leïna ;
Me:] a-raoc, ma mignon, lavaret d'in-me c'hoas
Ha ma nÎz Gwennolé 'zo bepred er golach 1
MISTRAL.
'Sire, ma fardonet, achu eo he studi,
vestl' na oa .kèn ewit ben instl'ui,
Rag he
Ha deût a oa memeus savantoc'h eget-han ;
0 tônL aman.
Hen gwelet a reet soudenn
GRALON.
Contant braz ez ôn sur, antreet bars ann ti,
Ha me hec'h a ractal da lacâd prepari
Eur banket manific, ab
Ha da gemeat hinin a
l'acta], ma rÎn ma llrz roïaI,
Antre 'omb 'ta
vô executet ma bolonte l'actaI.
Hol cuit.
- FIN D'ANN EIL ACT. _ .
ACT TRIVET.
Ann theatr a discouez diabal'z eur pales .
Sènrmn Kenta .
BARBARI, TULPoDo, VULMIG, daou figurant.
Ar roue
Ar roue BARBARI
Me 'zo Roue terrubl, corpulant, redoutet,
En kement provins 'zo en pevar c'born ar bed,
Ewit ma vaillantis, ma generosite,
ann holl diousin, ha me pell diout-hè ;
'Spont
GRALLON.
Jeune page, entrez toujours, pour vous reposer;
Je vous ferai servir de quoi dîneL' ;
Mais, avant, mon ami, dites-moi enCOl'è
Si mon neveu Gwennolé est toujours au collège (~) ~
MISTRAL.
Sire, pardonnez-moi, se5 études sont terminées,
Car son maitre ne pouvait plus l'instruire;
Il était même devenu plus savant que celui-ci;
Vous le verrez bientôt arri ver ici.
GRALLON.
Je suis certainement très content; entrez dans la maison,
Et je vais à l'instant faire préparer un banquet
Magnifique, à cause de lui,
Et' aussi de tous ceux qui sont avec lui.
Entrons donç, tout de suite, pour que je donne mon ordre royal,
Et que ma volonté soit exécutée, sur-le-champ .
Tous s'etl vont.
- FIN DU SECOND ACTE. .
TROISIEME ACTE .
Le théâttre représente l'intérieur d'un Palais.
Scène première.
Le Roi de Barbal'ie, TULPoDo, VULMIG, deux figurants.
Le Roi de Barbarie.
Je suis un Roi terrible, corpulent, rodouté,
En toute province qui existe aux quatre coins du monde;
Par ma vaillance et ma générosité (U)
J'effl'aie tout le monde, même de loin.
(.) Ce mot collège doit ètre du dernier copiste.
(H) L'auteur ignore généralement la valeur des mots français qu'il emploie;
a.insi oorpulent et générosité ont, ici, la sig nification cie puissant et de bra\·e.
Cette observation ~'applique à maint passage de la pièce.
Me eo certènamant Roue ar Barbari,
Na eûs rouantelès ken caer ha ma hini, .
Me 'm eus prinsed vaillant, indan ma goul'c'hemenn,
. Soudarded courajus, ha meur a gabitenn,
En pere ec'h hallan caout confians parfet,
Ha prest int cI'am zicour, bepred, en peb andret.
Ann Duc TULPODO .
Sir, al' pez a lâret 'zo gwirione patant,
Rag c'hui 'c'h eùs tud fidel, cOllrajus ha vaillant,
Mar 'pe ezom zicour', evel oc'h eùs bet c'hoas,
C'hui a welo parfet ann effet hon c'hourach
Ar Baron VULMIG.
Me gâre caout labour 'wit en em exersi,
Instruet 'm eus ma zud, eba1's ma baroni,
Mar 'pe ezom zicour, a veè'h sur estonet
o welet ho adres war apn inimied.
Ar Roue BARBARI.
Sire, duc Tulpodo, ha c'hui, baron Vu1i:nig,
Soudenn am eûs-me sonj da c'houlenn ho servich
Rag c'hui, g::nt peb enor, me gred, ma zicouro,
Rag-ze clewet, m'ho peel, ma intansionou :
Brema me am eùs c'hoant da cl iscleZl'ia brezel
D'ar Gristenienn. a zo d'hon lezenn infidel,
Hon Doueou meulabl 'zo gant-è dispriset,
1'eonl, bep-heur ha bep-momet ;
Ho blasfèmî
Dre-ze, lavaret d'in war ze' oc'h avisio,
'Wit gouzolld kennt ar fin pet.ra a resulto.
'PULPODO.
Sir, me eo Tulpodo, souverenn em duché,
A bromet asistanz c}'ac'h beprcd, ma Roue;
Me exposo ma c'horf hag iwe ma mâdo,
Ewit ho servija, dre nerz ha dre armo ;
J€\ suis certainement le Roi de Barbarie,
Et il n'est pas d'autre royaume qui vaille le mien.
J'ai des prin(:es vaillants sous mes ordres, .
Des soldats courageux et maint capitaine
Dans lesquels je puis a voir confiance entière,
Et ils sont prêts ~ me secourir, toujours et partout.
Le duc TULPODO.
Sire, ce que vous dites est la vérité patente,
. Car vous avez des gens fidèles, courageux et vaillants,
Et si vous avez besoin de secours, cùmme cela est déjà arrivé,
Vous verrez clairement l'effet de notre courage.
Le baron VULMIG
.Te voudrais avoir de l'occupation pour m'exercer;
J'ai instruit mes gens, dans ma baronnie,
Et si vous aviez besoin de leur secours,
Vous seriez étonné à voir leur adresse contre l'ennemi. .
Le Roi de B·arbarie.
Sire duc Tulpodo, et vous, baron Wulmig,
Je songe à réclamer bientôt votre service,
Car, j'en suis persuadé, vous m'aiperez en tout honneur,
Ecoutez donc, je vous prie, mes intentions: .
Je veux à présent déclarer la guerre
Aux chrétiens, qui sont infidèles a notre loi,
Car les dieux que nous adorons, ils les méprisent,
Ils les blasphèment, à toute heure, à tout moment.
Ainsi, dites-moi sur cela vos avis,
Afin de savoir en définitive ce qui résultera.
TULPODO .
Sire, je suis Tulpodo,' souverain dan~ mon duché,
Qui vous promets toujours assistance, comme mon Roi;
J'exposerai mon corps et aussi mes biens,
POllr vous servir par la force des armes;
la, me a bromet d'ac'h, dre ma brec'h gallouduz,
Rentann al' Gristenienn el' bed-ma maleùruz.
VULMIG.
Me eo '1' baron Vulmig, hag a hell assuri,
N' spontan !cet el' gombat, ewit na daou na tri;
Me lacaï da neant '1' Gristenien ifl'ontet ;
am eûs c'hoas d'ezhe ma anaout, assuret,
Grêt
Hag a pl'ometan c'boas, ma frins ha ma Roue,
'On prest d'ho servijan, ebars en peb contre.
Ar Roue.
Hejouisset ez eo, p'ho c)ewan, ma c'halon ;
Me 'ia da disclezria d'ac'h ma intantion :
En Breiz-Meur a vô rêd d'imb diskenn da gentan,
Hag revoit 'zo en ô, dl'e-boll, war êir glewan.
Balamour ma oant bet infldel da Zoue,
A rencont dre glen ved nnissan ho bùbe,
Ha pa mant el' gîz-ze leûn dimeus a arach .
Hor bezo sur ractaL varnhè ann avantacb,
Dre-ze 'ta ma fi'insed, partiomb d'i 'war-eeun,
Ha neuze a sai:fomb war al' Roue Gralon,
Ha mal' tenornb a-benn da drec'hi anezhan,
Ni raïo d'ezhan soufr poanio al' c'bruellan !
TULPODO.
N'ouzon penaos galloud derc'heL c'hoas
ma c'bourach,
Me em bresipito gant furi hag arach, •
Rag ann douar n'eo ket capabl da and uri
0 c'hortoz combati ;
Ar valis 'zo em c'horf)
Med mal' gallan beza dirag al' Gristenienn,
M' z-iscargo ma malis warnhê, en eun instant,
Me ho martirizo, hag a reï d'e soufr poan,
Med me n'ho lazin ket, mal' gallan, re-vùhan !
Oui, je vous promets, par mon bras puîssant,
De rendre les chrétiens malbeu l'eux, dans ce monde.
. VULMIG.
Je suis le baron Vulmig, et je puis assurer
Que je ne redoute, au combat, ni deux ni trois;
Je mettrai à n~ant les chrétiens effrontés;
Jè me suis déjà fait connaître d'eux, soyez-en assuré,
Et je (vous) promets encorE', mon prince et mon roi,
Que je suis prêt à vous servir en toute contrée (pays) .
Le Roi.
en vous f'ntendant, mon cœur;
Il est réjoui,
Je vais vous déclarer mon intention:
Il nous faudra descendre d'abord en Breiz-Meur,
Car la révolte est partout par là, d'après ce que j'entends.
Parceque les habitants ont été Infidèles à Dieu,
Il leur faut par la maladie terminer leur vie,
Et puisqu'ils sont ainsi pleins de rage (contre Dieu),
Nous aurons tout de suite l'avantage sur eux.
Ainsi donc, mes princes, rendons-nous y, tout droit,
Et alors· nous nous jetterons sur le }!toi Grallon,
Et si nous venons à bout de le vaincre,
Nous lui ferons souffrir les supplices les plus cruels .
TULPODO .
Je ne sais comment pouvoir contAnir encore mon courage,
Je me jetterai dans quelque précipice, de fureur et de rage,
Car la terre n'est pas capable d'endurer [combattre.
La 'malice qui est en mon corps, en attendant le moment de
Mais, une fois que je serai en présence des Chrétiens,
Je déchargerai ma rage S'lI' e.ux, en un instant,
Je les martyriserai et leur ferai souffrir le supplice,
ne les tuerai pas, si je le puis, Jrop vite .
Mais je
VULMIG .
Ha me ar memells tra, a em, sant en tômder,
Birwi ra al' go ad em gwaziou,dre goler"
A baoue 'meûs clewet ma Roue 0 lâret
E dleomp attaki 'r Gristènien ifrontet ;
Me 'reï d'ezhe criai, ober grimasou braz,
M'ho dalc'ho peU en poan, ma vô brac:::oc'h ho gloaz.
Ar Roue .
Na bardonet da den, 'wit ho gwelet 'n hirvoud,
En lec'h ma 'z arrufet, discouezet ho calloud :
Antreet er zâl-vraz ganin-me, eur pennad,
Wit concluin obel' arman hon zud er-vad,
reCI'eet eur pennad asambles,
Ha pa veomb em
E partifomb hol!, ha couitafomb ar palès.
Holl cuit.
Eil &enenn.
FREGAN, GWENNOLÉ, ALBA, CLERVI, BUDOK, BELFLOR, RIOU .
FREGAN .
Gwennolé, ma mab keiz, setu-c'hl1i, al' wez-ma,
'N Breiz-Mel1r, 'n ho plijaduI', ha ze a rô d'in joa.
Clewet oc'h eus oo'h eontr, ar roue braz Gralon,.
o reï d'in-me ar garc da c'houarni Leon;
Enes Breiz-Meur, Léon, hag enezenn Briat
'M eûs bet èn donèzon, hen goûd a rèt er-vad :
Dre-ze renntomb grasou da Grouër ar bed-man,
han .
Rag obligation braz-caer am eûs d'ez-
GWENNOLE, 0 câna.
Me n'ouzon ket, ma zad, petra respont war-ze,
Dre ma comzet-c'hui d'in a gement dignite,
n'ôn oocupet gant al' mâdo ar bed,
Rag me
da serviji Doue ez ôo. consacret.
Med
VULMIG.
Et moi de même, je me sens en chaleur;
Mon sang bout dans mes veines, de colère,
Depuis que j'ai entendu mon Roi dire
Que nous devons attaquer les Chrétiens effrontés:
Je les forcerai à crier, à, faire de grandes grimaces, . [grand.
les tiendrai longtemps en peine,pour Cf ue leur su pplice soit plus
Le Roi.
N'épargnez personne; (soyez) san::; égard aux plaintes;
Partout Oll vous arri verez, mont.rez votre autorité.
Entrez dans la grande salle avec moi, un instant,
Pour conclure (aviser allX moyens), de bien armer vos gens,
Et q1Jand nous nous serons récrMs un moment ensemble,
Nons partirons tous et quitterons le palais.
To-us s'en vont.
Seconde scène.
FRAGAN, GWE~NOLÉ, ALBA, CLERVIE, BUDOC, BELFLOR, RIOU.
FRAGAN.
Gwennolé, mon fils chéri, vous voici CBtte fois,
En Breiz-Meur, dans votre plaisir, et cela me donne de la joie.
entendu votre oncle, le grand Roi Grallon,'
Vous avez
Me donner la charge de gOllvemer le Léon:
L'île de Breiz-Meur,.le Léon et l'île de Bréhat
J'ai eues (de lui) en donation, vous le sàvez bien;
C'est pourquoi rendons grâce au Créateur du monde,
Car je lui ai une très grande obligation.
GWENNOLÉ, chantant.
Je ne sais, mon père, que répondre à cela, .
Parcequl3 vous me parlez de tant de dignité,
Car je ne rn'occll pe pas des biens du monde,
Mais je me suis consacré au service de Dieu .
RIOU.
; Allas! ma zûd keiz, me ia da berisa
Aman en ho presanz ; clan v braz en em gafan,
Eur boan vraz 'm eûs em penn, iwe em c'hostezio ;
Me breferfe d'al' boan-man, assuret ar maro.
Coueza ra zem plet.
BELFLOR} a grog en he zaou-dorn .
Ma Doue, setu-han, maro-mic war al' plass !
He 6gUl', he zaou-dorn a welan 'zo ieensclass.
D'ann daoulin ; cana 'reont val' dôn : Vexilla Regis.
M'ho ped, Gwennolé, dèn santel,
C'hui a zo pur. evel un ael,
Da exausi ma fedenno,
'N hânô Doue, hon gwir aotro :
Iac'hêt ma mab, mar eûs moïenn,
En hâno Doue souverenn,
En hâno al' Werc'hes Vari,
avocades peb-hini.
GWENNOLE.
Eontr, cesset ho cla'O'har iwe oc'h hüanad,
Rag m'eo lâret. gant Doue a renco cuitaad,
Doue, p'h'en deus prononset ar setanz diwesa,
N' servich da dèn sonjal en em remedia.
BELFLOR a gân.
Me 'vo 'n ho servich, Gwennole,
ma bûhe .
Fidel betè fin
claoulin, a gan .
GvVENNOLE, d'ann
Jesus, Roue ar rouanez,
C'hui eo ar gwir hennt a vuhez;
Grêt OuzÎn eur se11, ma DOlle,
Ha kornerret ouzirnb true.
RIOU.
Hélas, mes pauvres gens, je vais mourir,
Ici, devant vous; je suis bien malade,
J'épropve Ulle grande douleUl' à la. tête, et aussi aux flancs;
Je préférerais, assurément, la mort à ce mal.
Il tombe évanoui.
BELFLOR, lui prenant la main ..
Mon Dieu, le voilà mort sur la place!
Son visage, ses mains, à ce que je vois sont froids comme glace.
Ils se mettent à genoux et chantent, sur l'air Vexill1 regis .
Je vous priE', Gwennolé, homme saint,
Vous qui êtes pur comme un ange,
D'exaucer mes pr'ières,
Au nom de Dieu, notre vrai maître,
Rendez la santé à mon fils, s'il est possible,
du Dieu souverain,
Au nom
Au nom de la Vierge Marie,
Qui est la protectrice de chacun .
GWENNOLE.
Mon oncle, mettez un terme à votre douleur et à vos
Car s'il est dit par Dieu qu'il doit nous quitter, [gémissements,
Si Dieu a prononcé sa sentence dernière,
ne sert à personne de songer à s'y opposer.
BELFLOR, chantant.
Je serai à votre service, Gwennolé,
jusqu'à la fin de ma vie.
Fidèle,
G\VENNOLÉ, à genoux et chantant:
Jésus, Roi des rois,
Vous êtes le vrai chelT!in de vie,
sur moi un regard, mon Digll,
Jetez
Et prenez pitié de nous. "
Setu ama, Salwer ar bed,
Ma c'henderv cazi tremenet ;
Plijet ganeoc'b, gwir vab Doue,
Da astenn d'ezhan he vuhe.
Eun aeI a deù hag al' gan war ar memeus ton.
Ann AEL.
Gwennol6, da bedenno mad
'Zo clewet gant Doue ann tad ; .
Da genderv kèr na V'U'wo ket,
Ken 'va bet pell c'hoas ar bed ;
Krog en he zorn, sao anezhan,
~.1e bromet d'id na eo ken clan v . •
Ann neb a fizio en Doue
Hag en he vignon Gwennole,
Biken na vezo afflijet,
En keit ha ma vô )Var al' bed :
Adieu, me 'Îa brema 'darre
D'ar baradoz, dirag Doue!
. Ann ael hec'h a cuit .
GWENNQLE a gân.
Ho el'în da zorn, ma c'hendeev mad,
A-beurz ar gwir Doue, han tad,
Hen deveus d'în-me revelet
Ewit hirie na varvvi ket ;
Hen eo a rennt d'id a iecJhed,
Dre da ael-mad eo anonset.
Sevel a ra Riou.
RIOU, a câna.
o Doue immortel, berna 'zo eur bUI'zuel
A zo grêt em anclret, en presans ma 011 duel !
Setl1 me breman iac'h, elre aI' c'hras a Zoue,
Ha elre ho pedenno, ma c'henelerv Gwennolp.. .
D'ann daoulin di['ag he dad, 0 câna .
Voici, 0 Sauveur du monde,
Mon cousin près de mOllril' ;
Qu'il vous plaise, véritable fils de Dieu,
vie!
De lui prolonger la
Un ange arrive, qui chante sur le même air:
L'ange.
Gwennolé, tes bonnes prières
Ont été entendues par Dieu le Père;
Ton cousin chéri ne mourra pas,
Avant d'avoir vécu longtemps encore dans ce monde;
Prends sa main, relève-le,
Je te pro1ll8ts qu'il n'est plus malade.
Celui qui mettra sa confiance en Dieu,
Et dans son ami Gwennolé,
Ne sera jamais clans l'affliction,
Pendant qu'il sera dans ce monde:
. Adieu, je retourne, à présent, . .
Au Paradis, en la présence de Dieu.
L'ange disparaît.
GWENNOLE, chantant.
Donne-moi la main, mon bon cousin,
Au nom du vrai. Dieu, le père,
Qui m'a révélé
. Que tu ne mourras pas aujourd'hui;
C'est lui qui te rend la santé,
Uri bon ange me l'a annoncé.
Il relève Riou .
RIOU, chantant:
o Dieu immortel, voici un miracle
Fait à mon endroit, devant tous les miens!
Me voilà guéri, grâce à Dieu,
Et grâce aussi à vos prières, mon cousin Gwennolé .
. Il se met à genoux devant son père et chante:
Reit d'in brema, mal' plich, ho penediction,
Ma zad, marquis Belflor, eûz a gL'eiz ho calan,
Ma tilezinn ar bed, da servija Doue,
Gant ma c'henderv santel, en durant ma bu he .
BELFLOR.a gân.
Ma mab, me zo contant, mal' car ho commerred
Da serviji Doue, da obel' ho souhet ;
Me 1'0 'd'ac'h ma bennoz, en hâno ma Doue,
rennta d'ezhan gras ha seevich' Gwennole.
RIOU, a sao.
Me ho t.L'ugareca, ma zad, dre garante;
Ar l'est eûz ma amzer a vô gant Gwennole,
Da serviji Doue, gant gwir afection.
BELFLOR.
C'hui a ra d'in, ma mab, al' gonsolation ;
Brema me 'ia d'ar gêr, hag a ia d'ho lèzel
'N hâno ar gwir Doue, gant ho kenderv santel ;
Adieu 'ta ma c'heront, me guita ac'hanoc'h,
Me bedo ma Doue a galon ewidoc'h.
RIOU.
Kenavezo eta, a lâran d'ac'h, ma zad,
Doue d'ho kendalc'ho bepred en he c'h1'az-vad.
FREGAN.
Doue da raïa d'ac'h iec'hed, ma c'henderv mad !
CLERVI.
Adieu 'ta, ma eont1', pa eleuet d'hon cuitâd !
Belflol' cuit .
FREGAN.
Ha ni, ma frieel ker, ha c'hui, ma merc'h Clel'vi,
Em retiromb breman, hag ho lèzomb ho zd.
Adieu 't , mamab ker, ho mignoned Bele),
Nin a ia d'ho cuitad, ewit mont d'han c'hasteI.
Donnez-moi, à présent, je vous prie, votre bénédiction,
Mon père, marquis de Belflor, du fond du cœur,
(Car je veux) délaisser le monde pour servir' Dieu,
A vec mon cousin, le saint homme, durant ma vie.
BELFLOR, chantant:
Mon fils, je consens, s~il veut vous prendre avec lui,
Pour servir Dieu, à accomplir votre souhait;
Je VOllS donne ma bénédiction, au nom de Dieu,
Pour lui rendre grâce et servir Gwennolé
RIOU.
Je vous remercie, mon père, avec amour;
Le reste de mon temps sera avec Gwennoié
(Consacré) à servir Dieu, avec une véritable affection.
. BELFLOR.
Vous me donnez, mon fils, consolation;
A présent, je retourne à la maison, et je veux vo~s laisser,
Au nom du vrai Dieu, avec votre saint cousin:
Adieu .donc, mes parents, je vous quitte,
Je prierai Dieu, de cœur, pour vous.
RIOU.
Je vous dis donc Adieu, mon père,
Que Dieu vous maintienne dans ses bonnes grâces.
FRAGAN.
Que Dieu vous donne santé, mon bon cOl1sin.
CLERVIE.
Adieu mon oncle, puisque vous nous quittez .
Belflor s'en va.
FRAGAN.
Et nous, ma chère épouse, et ma fille Clervie,
RetiL'Ons-nous, à présent, et lais~ons:"les tous trois.
Adieu donc, mon cher fils et vos amis fidèles,
Nous allons vous quilter, pour retourner à notre château
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. . TOME XVI. (!'lémoires). 9 .
GWENNOLE.
'Adieu eta, ma zad, ma mamm, ha c'hui, Clervi,
Doue d'ho preservo a bep poan hag anvoui !
ALBA.
Kement-all reketsn d'ac'hc'hui iwé, ma' mab,
nin a deû d'ho cuitâd. ,
Adieu, en general,
Holl cuit
GWENNOLÉ.
Ha ni n, ma mignoned, antreomb er palès,
Ewit pedi Doue hag he vamm ar Werc'hès
Da reï d'imb sclezrijenn d'allout convertisa '
l{ement den infidel a zo war ar bed-ma !
Hon cuit.
Terved Scènenn.
Ar roue BARBARI, TULPODO, VULMIG; daou figurant.
AR ROUE, gant coler.
o ma Idolo, deût brema da anflami (A)
Ann tân 'n hor c'halon, da vont da gombati, '
Ma mezomb ar victoar war ann holl Gristenienn,
fe ha d'ho lèzenn :
Contrel d'ho madèles, d'ho
am ells esper d'ho rennta maleürus,
Med me
Gant ho sicour impar, Doueo galloudus !
. , TULPODO.
, Sir, nin a reï d'hê, war-benn neubeud amzer,
iwe hon c'hlezeïer :
Anaout nerz hon diou-vrec'h,
faU-ze, ar chas pernisius ,
Ar ganailles
, Rèd 'vézo er vatail ho renta maleüms :
Mar gallan-me lacâd ma zroad er gèr aIs,
Ni renk d'hor bolonte ober en-hi polis 1
(A) Ms. L. B : 0 ma idolo, m'ho peel, deut d'am anflamin..
GWENNOLÉ .
Adieu donc, mon père e~ ma mère, et vous aussi Clervie,
Dieu vous pl'eserve de toute peine et contrariete!
ALBA.
Je fais pour vous le mêr.ne souhait, mon fils ';
Adieu tous, nous allons vous quitter.
Ils sortent.
GWENNOLE
Et nous, mes amis, entrons dans le palais,
Pour prier Dieu et sa mère la Vierge~
De nous donner les lumières (nécessaires) pOIU convertir
. Tous les infidèles qui sont au monde.
. Ils sortent.
Sci'ne Troistème.
Le Roi de Barbarie, TULPODO, VUUIIG; deux figurants.
Le Roi de Barbarie, en colère ..
o mes idoles, venez, à present, allumer (A)
Le feu dans nos cœurs, pour aller au combat.,
sur les Chrétiens,
Afin que nous remportions la victoire
à votre bonté, à votre foi, à votre loi:
Contraires
Mais fespère les rendre malheureux,
Grâce à votre secours sans pareil, 0 dieux puissants.
TULPODO.
Sire, nous leur ferons, sans tarder,
épées:
Connaître la force de nos bras et de nos
Cette méchante canaille, ces chinns dangereux,
Il nous faudra, dans la bataille, les exterminer:
Si je puis mettre les pieds dans la ville d'ls,
Nous y ferons la police, à notre gré.
Un ,ç;econd man'ltscrit, qrni vient de m'être comm'uniqué par j/.
de la Borderie, et qn1, diffère très peu du mien, si ce n'est S01lS le
,,'apport de l'01'thographe, me pennet, à partir d'ici, de donner
quelques variant es et additions.
(A) Ms. L. B : - 0 mes idoles, je vous en prie, venez m'enflammer .
VULMIG.
Ar polis gwella 've ho lacad hol en glaou,
ar vugale, ann tâdo, ar mammou, .
Lac'han
Rag me 'z~ disposet, m'hen tou!3 d'ac'h er-vad,
Kent ewit ma cessin, reï d'ezhe calonad ;
Na gredan ket a ve un den dindan ann trÔn
A discouezfe kement ha me eûz a galon :
am eûs eur gourach hag a zo arajet,
Evel
Gwasoc'h eget ar foëltr violant, diboellet,
Me droc'hfe ann Diaoul dre ann anter, certenn,
ann nerz euz ma brec'h, ha ma c'houtelasenn.
Dre
Er gêr demeus aIs, c'hui ma gwelo 'c'hoari,
Me a draillo kement a em bresanto d'în 1 (A)
JUDARA, figurant. .
Me zo iwe vaillant da remui 'n armo"
Me discar a bep-tu, coulz a gleir. 'vel a déo,
Ha p'am bô bet trempet ma dorn ha ma c'hleze
En goad ar gristenienn mechant ha didalvez,
Me bresanto neuze sacrifis d'am Doueo,
na.espernîn ket. ma nerz ha ma mempro.
Rag
BARBARI
Ar Roue
J udara, ma mignon, rèd a vô d'ac'h monet,
Brema bété Gralon, Roue ar Vretoned,
Na ewit disclezria d'ezhan brezell sanglant,
Ha mar càr 'pourveo iwe he dud vaillant. (B)
Dre na on ket poultron, 'rân hen avertissan,
n' 'm euz poultronet, na birwikenn na rân,
Biscoas
Rag-ze hastet buhan, mali am eûs da welet
Ar rass didal vez-ze marw hag exterminet.
(A) Ms. L. B. : Me a foeltro quement eneum bresanto d'in.
(8) Ms. L. B. : Da lâret e tisclerian d'ehan brezel sanglant,
Ha, ma car, neum bourveo demeus a dud vaillant.
VULMIG.
La meilleure police serait de les réduire en charbon,
De tuer les enfants, les pères et les mères,
Car, je vous le jure, je suis bien disposé,
Avant de m'arrêter, à leur navrer le cœur 1 .
Je ne crois pas qu'il existe un homme sous le ciel
Qui y aille avec plus de cœur que moi:
Comme je possède un courage enragé,
Pire que le tonnerre violent, furieux,
Je couperais certainement le Diable en deux,
Par la force de mon bras et de mon coutelas.
Dans la ville d'Is, vous me verrez à l'œuvre;
Je mettrai en pièces tout ce qui se présentera devant. moi. (A)
JUDARA, figurant.
au maniement des armes,
Je suis aussi vaillant
J'abats de tout côté, à gauche comme à droite,
Et une fois que j'aurai trempé ma main et mon épée
Dans le sang des Chrétiens, ces méchants vauriens,
Je les immolerai en sacrifice aux dieux,
Car je n'épargnerai pas la force de mes membres.
Le Roi de Barbarie.
il vous fa udra aller,
J udara, mon ami,
A présent, jusqu'à Grallon, le Roi des Bretons,
Pour lui déclarer une guerre sanglante, (B)
Et, s'il le veut, il se pourvoira aussi d'hommes vaillants.
Comme je ne suis pas un poltron, je le fais avertir;
Jamais je n'ai fait le poltron et jamais je ne le ferai.
Ainsi, depêchez-vous, (car) j'ai hâte de voit
Cette race de vauriens morte et exterminée.
(A) Ms. L. B. : - Je foudroierai tout ce qui se présentera devant moi.
(H) Ms. L. B : - Pour dire que je lui déclare une guerre sanglante,
Et, s'il le veut, il se pourvoira d'hommes vaillants .
JCDARA.
Ma frins ha ma roue, eliouzoc~h me zento,
Hag a c'heuillo bepred oc'h hol gourc'bemeno ;
da zaludi Roue al' Vretoned ;
Me 'ia
Pa glewo ma beach, a vô sur estonet. (A)
Hoi cuit.
Ar ROUE.
Ha ni, partiomb hol, ma zucl, a galon vad,
Ha deomb elre Vreiz-Meur, da gommanz ar gombad,
Ma,r bor be ar vrà-ze en hon posession,
sl\r a-walc'h OllZ al' Roue Gralon.
A vefomb
Hoi cuit;
Scenenn Pede1'vet.
GRALON, STERIDO, DOURVA, JÙDARA .
JUDARA en eur antren .
Salut, Roue Gralon, d'ac'h ha d'ho hol brinsecl,
Euz a beurz ma monarq, Roue al' Barbared,
Ez on-me deùt ama da lâret d'ac'h, Gralon,
Ha discleria brezell d'ac'h ha d'ho nation: (B)
Pemzec duc, ha mil! comt, ha nombr a souelarded
A deuio da Vreiz-Meur ewit dont d'ho cwelet, (c)
Cant-mill dèn 'zo 'nezbe, holl a bep-tra armet;
Diwallet, mal' câret, telTubl int coleret.
GRALON .
o pebeus kezèlè> kement-ma d~in, certenn !
Pa. sonjenn bout tranquil, 'tisclezrier d'in ankenn ; •
da lâret d'ho mestr, den elival
Penaos n'hen doujan ket, deùt en hennt pa garo. -
Rag me 'zo christenn mad, a drugare Doue,
N'am elÎs biscoas spontet 0 welet un arme.
(A) Ms. L. B.: - Pa glevo ma hevridi, marteze vô estoneL.
(B) Ms. L. B.: Penoz e tiscleir brezel deeh ha d'ho nation .
Vreiz-MeUl' ...
(c). Ms. L. B.: A dremeno dre
JUDARA.
Mon prince et mon Roi, je vous obéirai,
Et j'accomplirai toujours tous vos ordres.
Je vais saluer le Roi des Bretons;
Quand il apprendra (le sujet de mon) yoyage,
Il sera certainement étonné. CA)
Le Roi. .
Et nous, partons tous, mes gens, de bon cœur,
Et allon~ à Breiz-Meur, pour commencer le combat;
Si nous avons ce pays en notre pouvoir, . .
Nous viendrons à bout, certainement, du Roi Grallon.
Tous sortent.
Scène quatrième .
GRALLON, STÉRIDO, DOURVA, JUDARA,
JUDARA, en entrant:
Salut à VOlIS, Roi Grallon, à vous et à vos princes;
De la part de mon monarque, le Roi des Barbares,
venu ici pour VOI1S dire, Grallon,
Je suis
Et vous déclarer la gllerre, à vous et à votre nation. (B)
Quinze ducs et mille comtes, et nombre de soldats,
Viendront à Breiz-Meur, vous rendre visite; (c)
armés:
Ils sont cent mille hommes, tous complètement
Prenez garde, si vous voulez, car ils sont terriblement en colère.
GRALLON.
o quelle (mauvaise) nouvelle pour moi!
Quand je songeais pouvoir être tranquille, on m'annonce malheur!
Retournez (sur vos pas) et dites à votre maître, mauvais drôle,
et qu'il vienne, quand il voudra,
Que je ne le crains pas,
Car je suis bon Chrétien, gràce à Dieu,
Et je n'ai jamais eu peur devant une armée.
(A) Ms. L. B: - Quand il entendra mon message, peut-être sera-t-il étonné.
(B) Ms. L. B : Qu'il vous déclare la guerre, à vous et à votre nation.
Ms. L. B : Passera par Breiz-Meur ...
JUDAHA.
Me ho trugareca, Roue puissant G1'alon,
Dre-ze me 'z ia brema fI' gass 'ma c'homission.
Judara cuÏt.
GRALON .
Dourva, ma mignon Ieee, hastet bu han monet
En eur gomission a zo meurhet presset,
Et bete ~a c'henderv, ha la varet d'ehan
D6nt buhan d'am c'havet, 'wit ma comzin gant-han.
DOURVA .
Sir, evel messajer, me 'ia d'hen avel,tissa;
Me raï ho courc'hemen d'ehan l d'he briet Al ba,
Me a raï al' gomission oc'h eùs gourc'hemenet ;
Med me 'weI 'r gouarner Fregan 't6nt d'ho C\velet.
Fregan a deù.
FREGAN.
Demad d'ac'h, ma Roue, deût 'on exprès d'ho lewelet,
Rag c'hoant am boa d'anaout al' stad eûz ho iec'hed ;
Pell-braz a zo dija na oann bet el' gêr-man,
Med petra 'zo 'newez ~ trou blet braz ho cafan !
GRALON.
Allas leur gwall gèzlo a zo bet recevet ;
Gant 'r Roue Barbat'i nin a zo menacet ;
Cant-mill den combatant, siouas l 'zo anezhe,
Aoun am eûs al' wez-ma na gollfemb hon buhe,
Rag ann dud 'n Breiz-Izell a zo diminuet,(A)
Dre ar brezell:-civil int cazi em lac'het,
Dre n'allan ket cavet euz a Vreiz-Mellr soutenn,
Am eÎls aoun al' wez-ma 'collin ma c'liurunenn ;
Med ma nîz Gwennole, gant be dud 'm eus clewet,
A 'zo mignon Doue ha dèn san tel meu l'bet,
(A) Ms. L. B.: - Bac om zud en Breiz-Mem a zo cazi semplet,
Dre al' brezel civil int meurbet digoezet.
JUDARA.
Je vous remercIe, Grallon, Roi puissant,
Ainsi, je vais portel' ma cO ~TImission (votre réponse).
J udal'a sort.
GRALLON.
Doul'ra, mon ami, hâtez-volis d'aller
Faire une commission très pressée;
cousin, et elites-lui
Allez jusqu'à mon
De venir vite me trouver, pour que je lui parle.
DOURVA .
'. Sire, comme messagel', je vais l'avertir;
Je lui ferai vos compliments, à l~i et à f:on épouse Alba;
J'accomplirai le IHessage et vos ordres:
je vois le gouvemeur Fragan qui vient vers vous.
Mais,
Fl'agan entl'e.
FRAGAN.
Bonjour, mon Roi; je suis venu expl'ès vous "oir,
Car je désirais connaître l'état de votre santé;
li Y a déjà bien longtemps que je n'ét:li~ venu dans cette ville:
Qu'y a-t-il de nOll\"eaU G t Je vous trouve tout bouleversé.
GRALLON ..
été reçue;
Hélas! une mauvaise n'ouvelle a
Nous sommes men~cé.s par le Roi de Barbarie; .
el1nemis) sont"au nombre de cent mille combattan'ts ;
(Nos
de perdre la vie,
Je crains, cette fois,
Basse-Bretagne, estdiminué; (A )
Carlenombredes hommes, en
La guerre ci vile les a presque tous détruits,
je ne puis avoir de soutien de BL'eiz-Meur,
Et, comme
crains fort, cette fois, de perdre ma couronne:
Mais, mon neveu Gwennolé aveC' les siens, m'a-t-on dit,
un fort saint homme,
Est un ami de Dieu et
(A) Ms. L. B: - Car nos hommes en Breiz-Meur sont presque défaillants,
Par la guerre civile, ils sont fort...
Je ne sais comment traduire digoezet. qui doit être une
errelll' ct u copiste .
Ha mar car su pplia Doue d'bon preservi,
c'boas war hon inimi.
Me gred vômb victorius
FREGAN.
Mal' gallomb bout \'iTar 'r poent da goll boll hor bûhe,
Me lacaïo ractal a vert is' Gwennole,
Ha mal' "e he vadèles dônet d'bon assista,
Beset sur, ma ROlle, na vefomb ket gwasa.
GRALON .
Fregan, d'bo mab ha d'ac'h me 1'0 commandamant
Da difenn '1' Vl'etoned dimeuz ann dud mechant ; (A)
Difennet lllad al' fe, ha bezet courajus,
Ha dre '1' c'hras a Doue 'vefet victorius, (B)
Rag c'hui ez eo ar chef ha gouarner Leon,
Gl'êt obeïssa d'ac'h, ebars en peb feson. (c)
FREGAN .
Doue d'ho consolo, ma c)hendel'v. sir Gralon,
Me 'ia da asambli ann noblans a Leon;
Hel'vez oc'h ordrena'ns, ma frins ba ma Roue,
Me gommando d'ezhe gant ar c'bras a Zoue ;
na daleïn ket al' wez-man en ho ti,
Med
N'hon eûs ket a arnler da erlI antreteni,
Diwesatoc'h, mar ve madèles eun Doue,.
em rf'jouisso, ann eil hag egile :
. Adieu, me 'ia d' lacad asambli ma holl dud,
. Dimeus a wir galon ~e rennt d'ac'h al' salut.
Cuit.
GRALON .
Ha nin, euz hor c'hoste, em breparomb iwe
Da difenn hon mam-bro eneb ar barbared-se, (n)
(A) Ms. L. B.: - Da difen ar Vretoned deus furor an dud mechant.
(B) Ms. L. B.: Ha me a meus esper e veet victorius.
(c) Ms. L. B.: Grêl heuil 0 hol ursou, ebars en pep fesson.
(oJ Ms. L. B.: Evit enem difen, ma teu al' Barbared-se .
Et, s'il veut prier Dieu de nous préserver,
Je crois que nous serons encore victorieux sur notl'e ennemi.
FRAGAN.
Si nous sommes SUl' le point de perdl'e tous la vie,
Je ferai, sur-le-champ, prévenir Gwennolé,
Et, s'il a la bonté de nous venir en aidé,
Soyez certain, mon Roi, que nous ne serons pas à plaindre
GRALLON.
Fl'agan, à votre fils et à vous je fais commandement
De défendre les Bretons contre ces méchants; (A)
Défendez bien -1a foi, soyez courageux,
Et, grâce à Dieu, vous serez victot'ieux, (8)
Car VOllS êtes le chef et le gou verneur dll Léon;
Faites qu'on vous obéisse de tOllte faç.on. Cc)
FRAGAN'.
Dieu vous console, Roi Gmllon, mon cousin;
Je v(lis assembler la noblesse du Léon;
Conformément à vos ordl'es, mon prince et mon Roi,
Je les commandel'ai, avec la grâce de Dieu;
Je ne m'attarderai pas, cette fois-ci, chez vous,
Nous n'avons pas de temps Cà perdre) en conversa(lon ;
Plus tard, si Dieu le pel'met, dans sa bonté,
Nous nous réjouirons ensemble:
Adieu, je vais faire assembler tous mes gens;
Je vous rends le salut, de bon cœur . .
Il sort,
GRALLON.
Et nous, de notre côté, préparons-nous aussi
A défendre notre paIrie contre les Barbares; (Dl
(A) Ms. L. B : De défendre les Beetons de la fu reur de ces méchants.
(B) Ms. L. B: ,Et)'ai l'espoir que vous serez victorieux
(c) MS.L B: Fait.es suivre (exécuter) tous vos ordres, de toule façon.
(0) Ms. L. B : ' . Pou [' se défendre, si ces barbares viennent.
Ni 'raïo d 'hè rènons da ho faIs Doueo,
Adorin hon Doue, 'zo crouër d'ann nevo.
STERIDO.
Sire, arabad eo en em disconraji,
Esperomb en Doue hac al' \Verc'hes Vari
A raÏa d'imb al' c'hras da gavet al' victoar, .
Ewit sOlltenn ar' fe, bag augmentin ar gIoar :
Enfin, em retil'omb, bag eomb-ni ractal
Ev,rit lacad armi hor zud, 'bars ar vatail.
Hoi cuit
Scenenn Pernpvet.
GWENNOLE, BUDOC, RIOU.
G\VENNOLE .
Ma zud, ma mignoned, brema 'm eûs boIonte
vonet da Gemper, en hâno ma Doue,
ann escob 'zo Caourantin hanvet ;
Da gavet
Deuet ganïn iwe, m'ho peed, ma mignoned,
Hag breman am eûs c'hoant da l'ecev ann Ul'zo,
Da em lacad en servich Doue, hon gwir Aotro. (A)
BUDOC.
~1a mestl', me zo contant da vonet ganec'h di .
HIOU.
Ha me a zo iwe, tad santei, couls ha c'hui.
GWENNOLE.
Ma : neuze partiomb, a galon vad, ma zud,
Da welet Caourantin, da raï d'ezhan salut. (B)
Obel' a l'eont eun drô war ann theatr.
nin arrùet 'n kichenn ti ann escob,
Setu
Aretomb 'ta ama, Hiou, c'hui i'ive, tad Budoc, (cl
A) Ms. L. B.: - Evit administra corI Jesus, hon autro.
B) Ms. L. B.: D'at' prelat da Gemper da rentan al' salut. .
c) Ms. L. B.: Arretomp, ma henderv Riou, ha ma zad Budoq .
Nous leur ferons renoncer à leurs faux dieux
Et adorer notre Dieu, le Créateur des cieux.
STÉRIDO.
Sire, il ne faut pas se décourager,
en la Vierge Marie,
Espérons en Dieu et
Qui nous donneront la grâce de remporter la victoirt;l,
. Pour soutenir leur foi et augmenter leur gloire:
Enfin, retirons-nous et allons, tout de suite,
Faire armer nos hommes pour le combat.
Ils sortent tous .
Scène cinquième.
GWENNOLi~, BUDOC, RIOU.
GWENNOLÉ.
Mes gens, mes amis, je veux, à présent.,
à Kemper, au nom de mon Dieu,
Allel'
Trouver l'évêque nommé Corentin; (28)
Venez avec moi, je vous prie, mes amis,
Car je veux, à présent, recevoir les Ordres,
Et me consacrer au service de Dieu, notre vraI seigneur. (A)
BUDOC.
Mon maître, je suis content de vous y accompagner.
RIOU.
Et moi aussi, saint père, comme vous .
GWENNOLE.
C'est bien: partons de bon cœur" NIes amis',
Pour aller voir Corentin et le saluer. (B)
Ils font un tour SUl' le théâtre.
Nous voici arrivés près de la demeure de l'évêque, .
Arrêtons-nous donc ici, Riou, et vous aussi, Blldoc; (c)
(A) Ms. L. B : . Pour administrer le corps de Jésus, notre Seigneur,
(B) Ms. L. B : - Au prélat de Quimper pOUl' rendre le· salut,
(c) Ms. L. B : Arrêtons-nous, mon cousin Riou" et mon père Bucloc.
Gwelet 'rân ar prelat, evel dre c'hras Doue,
d'hon rancontri, saludomb-han iwe.
Arru
. Dont a ra Caourantin .
Salut d'ac'h, Caourantinn; c1re ma 'z oc'h hon prelat,
Ez omb deût d'ho cwelet, dre eur volonte vad,
ann Urzo, eveL ma 'z eo rekis,
Da c'houlenn
'm eùs da vout sacret' da Zoue en ilis.
C'hoant
CAOURANTIN da Gwennole d'ann daoulin.
Arruët-mad da véet, Gwennole, en ti-ma,
Pa 'z oc'h disposet 'wit ann urz, me am eûs joa :
deù d'ho consacri brema d'ar gwir Doue,
ann Urzo, p'oc'h ells ar volonte,
Recevet
C'bpi 'zo eûz ar goad roïal, ~èn santel ha bêlec,
m'ho gra abbat eûz a Lande\'enec ;
Dre-ze
C'hui raïo enD cals dimeus a œuvro mad,
Eur mezelour d'ann dud, ha d'ar bed soutenabl ;
D1'e-ze ta recevet, m'ho ped, aot1'o 'n Abbad,
war oc'h estomac,
Ar groaz santel 'lacan d'ac'h
"ad, 'vel ma 'z oc'h commanset,
Discoueset exempl
D'ann holl en jeneral, en keit ha ma veofet.
GYVENNOLE.
Me ho trugareca, Caourantinn,tad santel;
en hâno 'n Eternel,
Me a giiniad 6uzoc'h,
d' raï d'ac'h bepred peb graso favorabl,
Doue
Ha benedictiono a vô d'ac'h profitabl,
Med brema, 'n hano Doue, ma zad me ho ped,
ma zud da vout ma c'holleged. (A)
Da gonsacrin
CAOURANTIN.
Daoulinet 'ta ho taou aze 'bars ma f1'esan~,
Ha me ec'h a d'ho sac1'i, d1'e c'hras al' B1'ovidans.
Daoulina '.'eont.
(A.) Ms. L. B.: - Da gonsacrin an duel-man da ,"out ma c'honfl·cred .
Je vois le prélat, comme par la grâce de ,Dieu,
Qui vient à notre rencontre; saluons-le aussi.
Corentin arrive.
Salut à vous, Corentin; comme vous êtes notre prélat,
Nous sommes venus vous voir, de bonne volonté,
Pour vous demander les Ordres (sacrésJ, comme il est requis,
Je désire être consacré à Dieu dans son église .
CORENTIN, à G\vennolé, agenouillé devant lui:
Soyez le bienvenu, Gwennolé,dêi.ns cette maison,
Puisque vous êtes disposé à recevoir les Ordres, je m"en réjouis:
Je vous consacre, 'à présent, au vrai Dieu,
Odres (sacrés), puisque vous le désirez;
Recevez les
Vous êtes de sang royal, homme saint et prêtl'e,
C'est pourquoi je vous fais abbé de Landèvénec;
Vous y accomplirez nombre de bonnes œuvres,
Vous serez un miroir pour les gens, secourable au monde;
C'est pourquoi, je vous prie, recevez, seigneur Abbé,
La croix sainte que je vous mets sur la poitrine;
(Continuez) de montrer le bon exemple .
A tout le monde; aussi longtemps que vous vivrez.
GWENNOLÉ.
Je vous remercie, Corentin, homme saint;
Je prends congé de vous, au nom de l'Eternel, .
Que Dieu continue de vous combler de ses grâces,
Et de répandre sur vous ses bénédictions;
Mais, à présent, au nom de Dieu, je vom~ prie, mon père,
De consacrer mes gens comme mes collègues. .
CORENTIN.
Méttez-vous tous les deux à genoux devant moi,
par la grâce de la Providence.
Et je vais vous consacrer,
Ils s'agenouilllent.
(A) Ms. L. B : De consacrer ces gens pOUl' être mes confrères .
Deus septem arivores gratial'um ...
Düue dre seiz articl ho. süutenü 'n ho' ezüm .
Me reket d'ac'h ar c'hras d' c'heuil er-vad ho. pûhe,
Gant 'n Abbat Gwennüle, en caranteDüue.
RIOU.
Me am eûs espel'ans, en keit ha ma vevin,
gâret Düue, ha fidel d'hen servij in .
BUDOC .
iwe er-vad ma deverio,
Me übservo
na üen cüntant evel ma 'z ün hiriü.
Biscüas
CAQURANTIN.
Bezet bepred Bdel d'ann abbad Gwennüle,
Partiet gant ma bennüz ha gant hini Düue. (A)
Caoul'antin cuit.
GWENNOLE, d'he dud.
Partiümb 'n bân' Düue, brema, ma mignüned,
D'al' plas 'n eùs al' prelat ewidün destinet.
Hoi cuit.
Scenenn C' /wuec' hvet.
Rouear Bal'bared, TULPODO, VULMIG, JUDARA,
Figuranted, troupo.
ROUE AR BARBARED.
ArretO.mb ; setu ni debarket, ar wez-ma,
En düuar a Vreiz-Meur, dre-ze, clewet brema :
Pedümb ann idülü, kennt cümmans al' brezel,
Da raï d'imb assistans, pa 'z ümb d'ezhe fidel.
Hoi d'ann daoulin.
Nîn ho peel asambles, 0. ma idül Plutus,
Ha c'hui, Beelzebud, Jupiter, Mercurius,
Ama war hün daüulin, a pèdümb anüc'h hül
Da zônt d'hün preservi, 'wit n' iefümb ket da gül!.
Tân ha cUI'un a glewer.
(.<\) Ms. L. B.: Et, sctu ma benos ha hini Doue iyc .
Deus septem (~) arivores gratiaram ...... (29)
Dieu, par sept ~rt.icles vous soutiendra, ,dans le besoin.
Je demande pour vous la grâce de bien conduire votre vie,
Près de l'Abbé Gwennolé, dans l'amour de Dieu.
. RIOU .
j'ai l'espoir, aussi longtemps que je VivraI,
D'aimer Dieu et de le servir fidèlement. .
BU DOC.
J'observerai aussi avec soin mes devoirs;
Jamais je n'éprouvai autant de contentement qu'aujQurd'hui.
cOHENTIN.
Soyez toujours fidèle à l'Abbé Gwennolé,
Et partez avec ma bénédiction .et celle de Dieu. (A)
Corentin SOT·t, •
, GvVE~NOLE, à ses gens.
Partons maintenant, au nom de Dieu, mes amis, .
Pour le lieu que le prélat nous a destiné.
Ils sortent tous .
Scène sixième.
Le Roi des Barbares, TULPoDo, VUUlIG, JUDAR.A,
des figur'ants, des troupes.
LE ROI DES BARBARES.
Arrêtons-nous; nous voici pré'Sentement débarqués
Sur la terre de Breiz-Meuf, c'est pourquoi, écoutez-moi:
Prions nos idoles, 'avant d~ commencer la guerre, [fidèles.
De nous accorder leur assistance, puisque nous leur sommes
, Tous à genoux. '
Nous vous prions ensemble, ô notre dieu Plutus, .
Et vous, Beelzebud, J II piter et Mercll re, _
A genoux devant vous, nous vous prions tous
De nous préserver, pour que nous ne soyons pas perdus.,
Feu et tonnerr·e .
(0) Arivores est un mot de l'inyention du copiste, et qui n'appartient" je
crois, à aucune langue, Il se trouve aussi clans le manuscrit de M, de la Borderie.
(A) Ms. L. B : Allez, voici ma bénédiction et celle de Dieu aussi
13ULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (Mémoires). 10
Brema pa meumb pedet er-vad hon idolo,
Savomb promt, prometin a reont ho graso.
VULMIG. .
Me a gâre commans saccaji 'n enès-ma ; (A)
Sir, roët oc'h urzo, en humor 'm on brema,
N'allo dèn resista, me a gred, diouzin ; (B)
Me a bromet a meomb ar· victoar \varnezhe,
Roët 'ta oc'h urzo, me ho ped, ma Rç>ue.
JUDARA.
. Ar Roue Gralon 'n eLls ma respontet fier,
Na douj ket, emezhan, oc'h arme en antier ;
Depechomb 'ta corner ractal 'n enezenn-ma,
Goude iefomb da Is, ewit hi bisita.
Ar Roue .
Ma zud, me ho suppli, araoc commaos netra,
Eomb-nin a goste '1' pennad, da Jl:iscouisa,
Rèd eo corner amzer da dresa bon armo,
H~ da gonsideri ar bositiono,
Goude a cornmansfomb al' vassacr, a bep-tu,
'Rèd 'vô lacad al' vrô en goad bag en lùdu.
Hol cuit.
Scenenn Seizvet.
FREGAN, ALBA, CLERV!, MISTRAL, daou figurant .
MISTRAL.
Salut d'ac'h, gouarner, gant eur galon sincer,
Kezlo trist 'digassan, gant-ze grêt ho tever:
Arme ar Barbari a zo sur debarket,
Ebars oc'h enezenn, Br!3iz-Meur ez eo hanvet,
Hac a lâront lâcad holl en tân hac en goafl,
Dre-ze, roët d'imb urz, bu han; 'wit al' gombad.
(A) Ms. L. B.: - Saccagi al' vro-man.
(B) Ms. L. B.: • N'allo netra resistan deus ma c'houraj, a gred d'in,
glevo an alarm, evel commansin.
Breman c'hui
A présent, que nous avons invoqué nos idoles,
Relevons-nous; ils nous promettent leur assistance.
VULMIG.
Je voudrais commencer de saccager cette île; (A)
Sire, donnez vos ordres, je suis bien disposé, .
Et je crois que personne ne pourra me résister; (B)
Je pl'omets que nOlIS remporterons la victoire sur eux,
Donnez donc vos ordres, je vous en pr'ie, ô mon Roi.
JUDARA
Le Roi Grallon m'a répondu avec fierté,
Il ne craint pas, m'a-t-il dit, votre armée tout entière.
Hâtons-nous donc de nous emparer de cette île,
_ Puis nous irons à Is lui rendre visite.
[e Roi.
Mes amis, je vous en prie, avant que de rien entreprendre,
Retirons-nous un peu, pour nous reposer;
Il nous fant le temps de préparer nos armes
Et d'étudier les positions,
nous commencerons le massacre partout;
Après quoi.
Il faudra mettre tout le pays en sang et en cendres.
, Ils sortent.
Scène septième.
FRAGA~, ALBA, CLERVIE, MISTRAL, deux figurants .
MISTRAL.
Salut fi vous, ' gouverneur, d'un cœur sincère,
Je VOllS apporte une triste nou velle, ainsi faites votre devoir:
L'armée des Barbares est débarquée
Dans votre île de Breiz-Meur,
Et ils prétendent mettre tout à feu et à sang,
C'est pOLlrquoi donnez-nous vite vos ordres pour le combat.
(.0\) Ms. L. B : - ...... Saccager ce pays.
(B) Ms. L. B : Rien ne pourra résister, à mon courage, je Cl'ois,
Tout-à-l'heure vous entendrez l'alarme, quand je
[commencerai.
DODIN, païsant.
Ma Seignor prins Fregan, gouarner en Leon,
'Var ann holl Vrètoned, 'wit ar Roue Gralon, (A)
Ma c'halon 'zo mantret, 'pa ~onjan er vizer
'la da goueza war-n-omb, abars nebeud amzer.
'Widon'me, da gommans, kement a oa em zi,
A zo bet bruzunet dre 'al' Barbared cri, (B)
Ha c'hoas on eiirus mar 'm eûs gallet achap,
M'ho dijé ma gwelet, a oa seuillet ma goad.
Nombrusoc'h eo ho arme, 'get oc'h hoU sujedet,
o ia, ouspenn dec gwez, rac-se 'omb holl collet.
Dre-ze, Aotro 'r,gouarner, me gred a rafac'h mad,
o rassemblin ho tud, ewit em sauvetaad.
FREGAN.
Ma zad paour, gwir ez eo, me 'zo instituët,
Gouarner, gant Gralon, war ann holl Vretoned,
Med ma mab Gwennol~ hen defoa prometet,
M'al' bijenn en neb-gîz bars ma bro ataket, (c)
'Vijenn victorius gant al' c'hras a Zoue,
Hac e convertisjemb ann holl baïaned-ze. (0)
ALBA.
P'hen eûs lâret ma mab, fiziet en he gomzo.
Ha na spontet nemeur dimeuz ho gourdrouso,
Difennomb hon lezenn, ha curun hon Roue,
Gralon, el' gêr aIs, servijer da Doue.
FREGAN.
Me gommand d'ac'h, ma fach, èt beteg ann ,dud-ze,
Da lâret assinan ar gombat bars tri-de, .
Ha deûz a lavarfont, digasset respont d'in,
Ma 'z efomb gant dilijans ewit ho ataki.
(A) Ms. L. B.: - ..... c'houi represant ar roue Gralon.
(B) Ms. 1,. B.: A zo hol ravajet gant al' Barbared cri.
Ms. L. B.: Ma vijen gant al' bayaned ebars em bro attaquet.
(D) Ms. L. B.: Hac e mijemp convertisset an darn-vuian anê.
DODTN.
Fragan, gouverneur dans le Léon,
Monseigneur prince
Sur tous les Bretons, pour le Roi Grallon, (A) .
Mon cœur est navré, quand je songe à la misère
Q"ui va tomber sur nous, sans · retard;
Et pour commencer par moi, tout ce qui était dans ma maison
été brisé par ces barbares cruels, (B)
Encore suis-je heureux d'avoir pu chapper moi-même,
Car s'ils m'ayaient vu, ils auraient répandu mon sang.
armée est plus nombreuse que tous vos sujets,
Leur
Oui, dix fois plus (nombreuse), ainsi nous sommes perdus.
C'est pourquoi, seigneurgou verneur, jecrois que vous feriez bien .
De rassembler vos gens et de vous sauver avec eux.
FRAGAN.
Mes pauvres gens, il est vrai que j'ai été institué
1 Par Grallon gouverneur de tous les Bretons;
Mais mon fils Gwennolé m'avait promis
Que, si j'étais attaqué dans mon .pays, (c) •
Je serais victorieux, par la grâce de Dieu,
Et que nous convertirions tous les Barbares. (D)
ALBA.
Puisque mon fils l'a dit, ayez confiance dans ses paroles,
Et ne vous effrayez guère de leurs menaces, .
Roi,
Défendons notre loi avec la couronne de notre
Grallon, dans sa ville d'Is, serviteur de Dieu .
. FRAGAN
Je vous commande, mon page, d'aller trouver ces gens,
Pour leur demander de fixer l'e combat dans trois jours,
Et rapportez-moi leur réponse, .
Pour que nous allions, en diligence, les attaquer.
(.\.) Ms. L. B : - ...... vous représentez le Roi Grallon.
(B) Ms. L. B : Tout a été ravagé par les barbares cruels.
(c) Ms. 1.. B : Si j'étais par les pa yens dans mon pays attaqué.
(0) Ms. L. B : Et que nous convertirions la plupart d'entr'eux.
MISTRAL.
Ma frins, me assino d'hê dewez al' gombat,
Nin hor bô al' victoar, dre c'h l'as Doue ann Tad ;
Me 'ia d' sinifian al Iaëron divergont,
un nebeud, soudenn ho pô respont.
Deportet
Mont a J'a cuit.
FREGAN. •
Ma zud, bihan ha braz, stouomb holl d'ann daoulin,
Da bedin asambles al' Vajeste divin.
Daoulina a reont, ha canan wal' un ton trist.
cI'ou'ër d'ann nef, da gement zo er bed,
Doue,
D'ann astro, da bep-tra, d'al' môr ha d'al' pesked,
Brema dre garante clewet hon pedenno ;
Ewit hon preena holl 'c'h eùs souft'et ar mâro,
Med al' 8arbared 'zo contrel d'ho gourc'hemenn, (A)
Dre-ze ho supplian d' reï d'imb nerz ba courach
D'ho flastra gant hon zreid, hac ho idolo sovach.
Sevel a reont.
MISTRAL a deu.
M'ho salut, ma seignor, gouarner al' vro-ma,
Me annonz d'ac'h, marteze, al' c'hezlo diwe:za :
Al' Barbared mechant 'zo holl en apareil,
Ranjet int a bep-tu, prest ewit al' vatail ;
!-lac a prometont holl massacrin ac'hanomb,
'R re-ze 'zo païaned 'zo meurbed di vel'gont,
Ha heb termen, emê, bil'ie 'vô ar c'hoari ;
Ùre-ze, grêt avertis', ma vô prest peb-hini.
FREGAN.
Kelllent a zo en oad da dougenn ann arma
Commandan d'hê zicour, ewit difenn ho brô :
Ure-ze commansomb 'ta, '11 hâno Zahvel' al' bed, (n) ·
(A) Ms. L. B.: - Hae a guemer plijadur gant iclolatret vên.
(li) Ms. L. B.: Dre-ze 'ta coinmansomp, en hano an Drindet.
MISTRAL.
Mon pdnce, je leur assignerai le jour du combat,
Et nous obtiendrons la victoire, grâce à Dieu le Père;
Je vais signifier ~\;otre volonté) à ces brigands insolents;
Attendez un peu et vous connaîtrez bientôt leur réponse.
Il sort.
FRAGAN.
Mes gens, grands et petits, mettons-nous tous à genoux,
POUl' adresser ensemble nos prières à sa Majesté di vine.
Ils se mettent â genoux, et chantent sur un air tl'iste .
Dieu, Créateur du ciel et de tout. ce qui est au monde,
Des astres, de toute chose, de la mer et de ses poissons,
amonr pour nous;
Ecoutez nos prières, par
Pour nous racheter tous, vous a vez souffert la mort .
Les Barbares sont les ennemis de votre loi, (A) [courage
C'est pourquoi, je vous supplie de nous donner la force et le
Pour les fouler aux pieds, eux et leurs idoles sauvages.
Ils se lèvent.
MISTRAL vient.
·salue, Monseigneur, gouverneur de ce pays,
Je vous
nouvelle:
Je viens vous annoncer, peut-être, la dernièr'e
Les Barbares méchants sont tous en ordre,
Rangés et disposés pour la bataille,
Et ils promettent de nous massacrer tous:
Ces païens sont pleins d'insolence, [bataille;
Et c'est aujourd'hui, disent-ils, sans antre terme, qu'aura lieu la
C'est pourquoi, donnez vo., ordres, pour que chacun soit prêt.
FRAGAN .
Tous ceux qui sont en âge de porter les armes,
Je leur ordonne d'aider à la défense du pays:
C'est pourquoi, commençons, aU,nomdu Sauveurdu monde: (B)
(.0\) Ms. L. il : - Et pœnnent du plaisir avec des idoles vaines,
(B) Ms. L. B : Ainsi donc commençons, au nom de la Trinité.
'N dewez pitoyabl-rnan ann holl 'zo asinèt.
o ma Doue, reït c1'imb ho cras, me bo suppli,
Ma c'helfomb triomphi war hon gwal-inimi !
DODI.N.
Aorro al' Gouarner, cÏllli ielo da gennta,
Nin ho c'heuillo, dre m'oc'Il hon aplli al' gwella,
Mar gallomb, assu tet, n'espernfomb ho bùhe,
A gomero 'n arc'han!, ann aour a zo gant-hè. (A)
MISTRAL.
Na gomzet a netra, nemed a c'hras Doue,
Rac ann avaristed a offans sur ann nef,
'Wit me na desiran nemed besa capabl,
Dre ma nerz, ma c'houracll, d'ho renta misel'abl. (E)
CLERVI a gân.
Tôn : CI'ouël' ann nef hac ann douar.
Pach iaouanc, c'hui gaoze pa l'fe t,
Mepl'isorn b an n a varisted,
Ha combiitet 'wit gloar Doue, .
Da soutenn he lezenn, he fe,
Goude, ô cuitâd ann douar,
A veet plaset en he c'h loar,
FREGAN.
Rèd eo brema gant ,collr3ch pal,tia 'bal's en henl,
En hâno '1' gwir Doue, a zo Roue al' zent,
Ha bezomb holl mernoar eùz a bresans Doue,
Ha~ hOl' bô ar vicloar war ad vel'SOUL' ar fe.
eomb da armi hOH zud, bihan ha bl'az,
Dre-ze
Ma 'z efomb d'atalti al' 8arbared sovach.
Adien, ma friet Atba, ha c'hui, ma merc'h C!ervi, .
Gret da c'hoûd d'hon daou vab-all, pe-re 'zo er studio
(A) Ms. L. B.: - Hac e quemel'fomb au arc'haut hac an aour zo gautè.
(B) Ms. L. B.: Dre ma hleve.... .
Dans ce jour pitoyable, tout le monde est assigné:
o mon Dieu, je VOllS en supp1ie; répandez sur nou~ vos grâces,
POUl: que nous puissions tL'iompher de notre ennemi 1
DODIN.
Monsieur le gOllvemeur, vous marcherez le premier,
Etnous vous suivrons, pal'cc; que vous êtes notreméilleUl' appui:
le pou vons, soyez assuré, nous n'épargnerons pas lenr
Si nous •
Et nous leur prendrons lell.l' Ol' et leur argent. (A) [vie,
MISTRAL.
Ne padeZ de rien autl'e chose que de la grâce de Dieu,
Car l'avar'ice offense certainement le ciel;
Pour moi, je ne désire que de pouvoir,
. Par ma force et mon courage, les rendre misérables. (B}
'CLERVIE, chantant:
SUl' l'air: Créateur du ciel et de la terr'e.
Jeune page, vous parlez à merveille,
Méprisons l'avarice,
Et combattez pour la gloire de Dieu,
Pour soutenir sa loi et sa foi,
plus tard, en quittant la: tene,
Vous serel placés dans sa gloire.
FRAGAN.
Maintenant, il faut nous mettre en rOllte avec couragè,
Ail nom du vl'ai Dieu, le Roi des Saints,
la présence de Dieu,
Et souvenons-nous tous de
nOllS aurons la victoire SUl' l'ennemi de la foi.
ç'est pourq uoi allons al'met' nos gens, gl'ands et petits,
P~)ul' aller attaquer ees Bal'bares sau vages. .
Adieu, mon éqousê Alba, et vous, ma fille Clervie,
Donnez de mes nouvelle.;; à nos deux qult'es fils, qui sont à l'école.
(A) Ms. L. B : - Et nous prendrons l'argent et ,'or qui sont avec eux.
(8) Ms. L. B: Par mon épée .. ,
ALBA .
Kenavo. ma fried, ha c'hui holl 'zo gant-han, (A)
N in a bedo Doue da dônt d'oc'h assistan .
Holl cuit.
Scenenn Eizvet.
Al' Roue BARBARI, TULPODO, VULMIG, JUDARA.
, Ar Roue BARBARI .
Kourach, ma m'ignoned, avansomb a dro-vad,
Soudenn a comerfomb ar vrô-ma, heb combad, (B)
Rèd eo continui war al' 'pillaeh bepred,
Ni renk obercrena 'kement a zo el' bed,
Nin a zo fournisset ken terrupl en armo,
Capabl d'ober brezell el' vro-ma, kree'h ha traon, Cc)
Dre-ze continuomb bepred da em zieour,
D' lacad indan hon zreicl couraeh hon adversour .
TULPODO.
Gwir ez eo, ma seignor, kement oe'h eùs laret,
Rae kernent ho servich 'zo dre·-holl redoutet,
Heb ober violans na cliscouez hor vaillantis,
Nin alltreo faeil el' gèr demens aIs,
Hac obel' da C'hralon paëa tribut iwe,
. Ha mar na gousant ket, e collo he vuhe,
Ha mar be rebellant da voud d'imb-ni sujet,
Nin hen extermino, gant he holl sujedet ;
Hi 'bossed hon mâclo clirag bon daonlagad, (D)
C'boas int ker suffisant da ober ouzimb goab !
VULMIG.
Meam eÛs .betgwelet eun amzer, ma Roue,
Ewit neb iSCllSOU n' bardonnac'h ket d'ezbe,
(A) Ms: L. B:: - Adieu eta, ma fried, ha e'hui hol a ia ganthan.
(8) Ms. L. B.: Sou den a quemerfomp an enezen-man, heb eombat.
(e) Ms. L. B.: Capabl d'obel' al' brezel, er bed-man, crec'h ha tl'aon.
(D) Ms. L. B.: Hint a bossed ar mado... .
ALBA.
Au revoÙ' mon époux, et vous tous qui
l'accompagnez,
Nous prierons Dieu de vous assister.
Scène huitième.
Le Roi de Barbal'ie, TULPODO, VULMIG, JUDARA.
Le Roi de Barbarie .
Du courage, mes amis, avançons tout de bon,
prendl'Ons ce pays, sans combat; (8)
Bientôt nous
II faut continuer de piller, '
le monde,
Nous devons faire trembler tout
Nous sommes si terriblement pourvus d':umes, _
Que nous pouvons faire la· guel'l'e dans le pays, d'un bout à
C'est pourquoi cont.inuons de nous entr'aider l'autre, (c)
Pour mettr'e sous nos pieds le courage de l'ennemi.
TULPODO.
C'est vl'ai, Monseigneur, ce que vous venez de dit'e"
Car tous ceux qui sont à votl'e service sont partout redoutés;
sans faire preuve de va.il1ance,
Sans violence et
Nous entrel'ons facilement dans la ,'ille d'ls,
Et nous forcerons Grallon à nous payer tribut,
n'y consent de bon gré, il perdea la vie,
Et, s'il
Et s'il ne consent à se soumettre à nOliS, .
Nous l'exterminerons, avec tous ses sujets:
Ils détiennent co qui nous appartient, sous nos yeux, (D ).
Et ils ont encore l'audace de se moquer de nous!
VULMIG .
. J'ai vu un temps, mon Roi,
Où, pour aucunes excuses, VOLlS ne leur pardonniez,
(.~) Ms. L. B: - Adieu donc, mon époux, et vous tous qui allez avec lui.
. (8) Ms. L. B : Bientôt nous prendrons cette île, sans combat.
(c) Ms. L. B : Capables de faire la guerre, dans ce monde, d'un
[bout à l'autre .
. (D) Ms. L. B : - Eux possèdent les biens.; ....
'Baoue keit ail a zo 'deùs ann ifrontiri
iwe cl 'bo fossecli,
Da derc'hel bon mâdo,
Heb paea cl'hon Roue ann tribut, a bep-bloas,
Eo kontrel a reont, 0 t6nt d'hon defi.a ;
Mp,d me 'm boa prometet d'ac'h, sire, 'raoe partial,
N'am bije esperniet ar Gristenienn fall ;
Dl'e-ze '1' Roue Gl'alon, hac he hol sujedet
A.renk, \vit al' wez-ma, beza exterminet.
Ar Roue .
Soudarded courajus, discouezet ho furi
D'ar Gristenienn milliget, 'zo arm 'trezec ni,
Saillet warnhè, l'actai, ha n'ho espernet ket,
Med ho chef a lezfet da zonet d'am c'haët.
TOLPODO.
Sie,- grêt ho plijadur 0 sellet al' gombat, (A)
Nin a 'ia da rancontr ann dud abominabl.
Ar baïaned a ia cuit, nemed al' Roue .
FREGAN a deu he-unan da gavet ar Roue.-
Lavar, Roue bar'bar, ewit pe-seurt rèson
Ez out war ma douar, heb ma fermission,
un désir estranch, b sonjal hor gonit,
Gant
Hac hon rennta esclav da vesa sujet d'id!
Med inipornéant ~oud deût gant da antrepris,
Rae me a bromet d'id, n'antreï ket en Is.
Ar Roue.
Beza 'm eûs rèsoniou, a 'deùz gl'êt d'in donet, .
Hae ar vro-man 'oa bet d'am zud-coz usurpet, \B)
Hac aboë oc'h eûs-hi ravajet en antier,
Med me hi c,'homero, 'wit ober ma dever. (c)
(0') Ms. L. B.: - Sir, quemerret plijadur da sellat al' g.ombat.
(A) Ms. L. R: Rac homan eo ma bro, a oa bel d'am zut coz usul'pel.
(B) Ms. L. B.: Mes me, evi t obel' ma. dsvel', a so deu t de hadquemer .
A cause du temps qu'ils ont l'effronterie
De détenir notre bien et de le posséder;
Au lieu (le payer à notl'e Roi un tribut annuel,
Ils ne font, au contraire, que nous porter des dMis ;
avant de partir,
Mais, je vous avais promis, sire,
Que je n'épargnerais pas ces méchants Chrétiens;
C'est po~rquoi, le Roi Gl'allon et tous les siens
Seront, pour le coup, exterminés.
Le Roi.
Vaillants soldats, montrez votre fm'ie
A ces Chrétiens maudits, qui s'avancent sur nous,
Jetez-vous à l'instant sur eux, et ne les épargn.ez, pas,
Si ce n'est leur chef, que vous laisserez venir jusqu'à moi.
TULPODO.
Sire, prenez votre plaisir à regarder le combat; (Al
Nous allons (marcher) à la rencontre de ces gens abominable!.
Les païens sortent tous, à l'exception de leur Roi.
FRAGAN.
Dis, Roi barbare, pourquoi .
Tu te trouve~ sur mes terres, sans ma permission,
un désir étrange et l'espoir de me battre,
Avec
Et de faire de nous tes sùjets et tes esclaves ~
Mais .tu as été imprudent, dans ton entreprise, .
Car je te promets bien que tu n'entreras pas dans Is.
Le Roi.
J'âi mes raisol)s pour être venu '.
Et ce pays avait été usurpé sur mes pères, (8)
Et depuis, vous l'avez entièrement ravagé,
le reprendrai, pour faire mon devoir. (c)
Mais je
(A) Ms. L. B : - Sire, pt'enez plaisir à regarder le combat.
(.El) Ms. L. B: Car c'est ici mon pays, qui sur mes ancêtres avait été usurpé.
(c) Ms. L. B : Mais, moi, pOUl' faire mon devoil', je suis venu le
. [reprendl'e .
FREGAN.
Reclam a rez droejo ha ma bossedi ket,
Da lèzenn 'al' VI'o-ma zo pell-zo expulset.
, Ar Roue.
la, al' Vl'o-ma gwez-all a oa bet decoret,
Dre vertuïo ac1mirabl hon DOlleo parfet,
Ha brem.an ez int colle't, ha chan jet euz a fe,
, Med c'hui 'cbanjo 'lèzenn, pe collfet ho pulle,
Rèd 'vô d'ac'h adorin hon ic1010 parfet,
Pe-re 'zo anvezet dre bewar c'horn al' bed.
Ar gombad adl'eon, 'tl'e ann daou arme.
FREGAN.
, Penaos adori traoll 'zo crouët gant Doue (A)
Da dônt da adori bepred he vajeste 1
la, Aristot maleurus, dac'h-c'hui a zisclezrias
N'oa nemed enn Doue, pehini ho crOllas. .
Intentet kement-ze, Roue barbar, idolatr, '
p'autramant 'ru ells esper da scuilla hoc'h hol goad,
'Vel 'rà ma soudarded, du-hont, na d'as armé,
Me bromet 'vônt lac'het, ha te vezo iwe. (B)
Ar Roue.
o ma idolo! pelec'h ema 'ta ma c'hourach f (c)
Pa soufran em presalls kement eûza langach 6 t
Avans eta, cbristenn, ewit ma vo gwelet
p'ini hon Doueo a dIe bout adOl'et.
FREGAN.
Just eo, den milliget, donet d'as contanti,
Me zo prest d'em difenn, ava,ns 'ta, pa gari.
Combati a l'cont.
CA) Ms. L. B.: - Penoz adorin astrou, planedennou crouët gant Doue.
Evit he servicha a plijout de Vajesté?
(s) Ms. L. B.: Me bromet ne chomo hini ané en hue.
(c) Ms. L. B.: 0 ma idolo galloudus.... <
FRAGAN . .
Tu réclames des droits que tu n'auras pas,
Et ta loi (religion) a été, depuis longtemps, chassée de ce. pays.
Le Roi.
Oui, alJtrefois, ce pays était décoré
parfaits, [de foi;
Des vertus admirables de nos dieux
Et maintenant, ils (le.s habitants) sont perdu!!, ayant changé
Mais, vous changerez de loi, ou vous perdrez la vie;
Il vous fà'Jdra adorer nos idolès parfaites,
Qui sont connues aux quatre coins du monde.
FRAGAN.
Comment adorer des choses créées par Dieu, (A)
Pour adorer de tout temps ~a Majesté ~
Oui, malheureux Aristote, il vous déclara
Qu'il n'y avait qu'un Dieu, lequel vous créa.
Comprenez cela, roi barbal'e, idolâtre,
Autrement, j'espère répandre tout votre sang,
Comme mes soldats le font (des vôtres), là-bas, à l'armée,
Car je promets qu'ils seront tous tués, et toi, tu .le ~eras aussi. (B)
Le Roi.
o mes idoles! oil donc est mon courage, (c)
~ue je supporte en ma présence un pareil langage 1·
\. vance donc, Chrétien, et l'on verra
~equel de nom; deux doit être adoré.
FRAGAN.
Il est juste, maudit, que je te donne satisfaction;
e suis prêt à me défendre, avance donc, quand tu voudras .
Ils combattent ..
(.0\.) Ms. L. B: - Comment adorer des astres, des planètes créés pal' Dieu.
Pour le servir et plaire à Sa Majesté? .
Ms. L. B : - Je promets qu'aucun d'eux ne restera en vie.
(c) Ms. L. B : 0 mes idoles puissantes ...
Ar Roue.
ASl1lqdé, iwe Mercurius,
Jupiter,
d'in oc'h assistans, ma vin victorius !
Reït
FREGAN.
Ha c'hui, l'ad Eternel, discoueset ho puissans,
Ha na chômo ket pell al' victoar en balans,
gombat 'n ho hâno, ewit soutenn al' fe.
Ar Roue .
Arajin a rân cl'enn, n'harsan ket ouzid-te ;
Fors! fors! ma Doueo, pe-Iec'h ez oc'h chomet,
Pa na deCltd'am zicour, setu me glac'haret !
Co u esa a ra m urw .
FREGAN.
A drugare Doue, a zo crouer al' bed,
Setu me victorius war Roue '1' Barbared !
M istJ> al ha Dodina zeCl.
MISTRAL .
Aotro Fregan, setu trec'het 'n inimied,
allas! hon hol dud a zo cazi lac'het !
Med
DODIN .
Me 'm eùs scoët a gleiz hac a deo, warnhê (out,
Na eùs gallet hini resista d'am gallond ;
Eùz cant mill dèn a oa deùt 'wit hon ataki,
Ez int hol discaret, heb boud chômet hini.
FREGAN.
Pa 'z omb victorius, èbars al' vatail-ma,
ma fach, da vont betec Gralon brema,
M'ho ped,
Da lavaret d'ehan hon deveus distrujet
al' Barbari hag he hol soudarcled,
Roue
al' c'hras a Zoue, ha pedenn Gwennole,
Dre
Hon eûs bet ar bonheur da. lac'han hol anhê.
(A) Ms. L. B.: Emeump het al' faveur da trehin voaeneze.
Le Roi.
Jupiter, Asmodée, et vous aussi, Mercure,
à mon aide, pour que je sois victorieux!
Venez
FRAGAN.
Et vous, Père Eternel, manifestez votre puissance,
Et la victoiL'e ne sera pas longtemps douteuse;
Je combats en votre nom, pour le soutien de votre foi.
Le Roi.
J'enrage complètement de ne pouvoir te résister.
Au secours! au secours! mes dieux; où êtes-vous restés 61
Faute à vous de me venir en aide,. me voici perdu!
Il tombe mort.
FRAGAN .
Grâce à Dieu, le Créateur du monde,
Me voici victorieux SUL' le roi des Barbares,
MISTRAL.
Monseigneur Fragan, voilà vos enn~mis battus ~
Mais hélas! presque tous vos gens sont morts!
DODIN.
J'ai frappé sur eux, à gauche et à droite,
Et nul n~a pu me résister;
De cent mille hommes .. venus nous attaquer,
Tous ont été abattus, pas un n'en est resté ( en vie).
FRAGAN.
Puisque nous sommes victorieux, dans cette bataille,
Je vous prie, mon page, d'aller jusqu'au Roi 0raHon,
Pour lui annoncer que nous avons détruit
Le Roi de Barbarie, avec tous ses soldats;
Grf\.ce à Dieu et aux prières de Gwennolé,
Nous avons eu le bonheùr de les exterminer tous. (A)
CA) Ms. L. B : - Nous avons eu la fave ur de les vaincre.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TO" ME XVI. (Mémoires). 11
MISTRAL, war un ton huël.
Pa 'z omb victorius, me 'ia joaüsamant
Da annonz d'ar Roue penaos 'omb triorpfant ; .
Aoûn braz hen doa certenn na vijemb distrujet,
Er vro-ma, braz, bihan, gant ar Sarl;asined. (A)
FREGAN.
Lâret d'ezhan bewa bepred en he repos,
Hon eùs bet ar victoar, 'n despet 'n idolo faoz ;
Me 'ia da gonsoli d'al' gêr ma bugale, (B)
Ha goude, em renntin dirac he Vajeste ..
MISTRAL .
Me 'ia directamant, ma frins, er veach-ze, (c)
Rac-se ken-a-vezo a em velfomb 'dare.
Mistral cuit.
DODIN.
'r c'horfo marw euz a douez al' goad,
Ma frins, traïnomb
Ha taolomb anezhe el' mol', gant taolio-troad ; (0)
Ar re-man a lâre 0 dije hon zrec'het,
Med brema combatfont er mol', gant ar pesked 1
Hoi cuit. .
-, FIN O'ANN DRIVET ACT. .
(A) Ms. L. B.: - El' vl'o-man, bl'az ha hihan, cll'e al' Barbarct.
(H) Ms. L. B.: Me ha da gonsoli ma fried ha ma bugale.
(c) Ms. L. B.: Ma frins, me ia l'actaI dober al' veag-se.
(D) Ms. L. B.: A tolomp allê el' mol' gant cant mil toHroad.
MIS TRAL, chantant sur un ton élevé: •
Puisque nous sommes vainqueurs, je vais gaîment
Annoncer au Roi notre triomphe;
Il Rvait grand peur que nous ne fussions défaits,
ce pays, grands et petits, par les Sarrasins. (A)
Dans
FRAGAN.
Dites-lui d'être tranquille,
Que nous avons remporté la victoire sur les fausses idoles:
Je retourne à la maison, pour consoler mes enfants, (B)
Après quoi, je me rendrai devant sa Majesté (Grallon).
MISTRAL.
Je vais directement, mon prince (accomplir) ce voyage; (c)
Au revoir donc, quand noùs nous retrouverons.
Mistral sort.
DODJN.
Mon prince, traînons les corps des morts hors du sang,
Et poussons-les dans la mer, à coups de pied; (0)
Ces gens-ci se vantaient de nous battrr.,
A présent, ils combattront dans la mer, contre les poissons.
Tous sortent .
- FIN DU TROISlEME ACTE .
(A) Ms. L. B : - Dans ce pays, grands et petits, pat' les Barbat'es.
(B) Ms. L. B : Je vais consoler ma femme et mes enfants .
(c) Ms. L. B : Mon prince, je vais tout de suite faire ce voyage.
Cn) Ms. L. B: Et jetons-les dans la mer avec cent mille coups de pied .
PEV ARVET ACT .
Atm theatr a represant eu!' blasenn public.
Scenenn Kenta.
GRALON, STERIDO, DOURVA, XELSON, ministre.
GRALON .
Ma frinsed, drE;) am eùs roët 'f gomandamant
Euz ar vro da Fregan, ez omb hol patiant,
eo da diwail" er feson ma câro,
D'ehan
ganin bout tranquil, eget sonfr al' mâro.
Gwel
C'hanter-cant vloaz a zo 'ôn Roue 'r gêr aIs,
Med me a bromet d'ac'h, pell-a-zo ez oan scuis ;
En pâd ann amzer-ze, n' m' eùs ket bet eur momet
Eüz a drankilite ganac'h, ma zud vaillant;
Balamour da soutenn lèzenn ar Gristènienn,
'Oamb bepred en brezel eùz hon enebourienn ;
ma zlld, mè gred a mellmb grêt mad,
Dre-ze eta,
Lec'h soutenn al' Gristenez, 0 tonet d'hi c'houitad,
Hac aùori 'n Doueo, Mars, Mercllr, Jupiter;
Brema 'veomb câret dre al' bed en antier .
STERIDO.
Sir, ann habitanted a zo cals contantoc'h
n'int bet evuru.soc'h,
Lâret reont biscoaz
Rac, paour ha pinvidic, ho deus holliberté,
Drè ma baIl peb-hini obel' he volonté.
GRALON.
la, permetet eo tana, violin ha laerès,
'bed; ach u eo al' procès;
Heb punition
Ze a zo decretet hol c1ee oc'h aviso CA),
Anneb hen eus moïenn, mar èar ho diwallo, ,
(A) Ms. L. B.: ' Honès eo al lezenn a zo sinet gant ho haviso.
QUATRIEME ACTE.
Le théâtre représente une place publique.
Sécène première" . '
GRALLON, STk:RIDO, DOURVA, XELSON, ministre.
GRALLON.
Mes princes, comme j'ai donné le comniandement
Du pays à Fragan, nous sommes sans inquiétude; ,
C'est à lui à pourvoir à n'ot1'e défense, comme il l'entendra ;
J'aime mieux vivre tranquille que souffrir la mort. ......
Voici cinquante ans que je suis Roi dans la ville d'Is,
Et je vous promets que je suis, depuis longtemps, fatigué:
Pendant ce temps, je n'ai pas eu un moment
De tranqui Ilité avec vous, mes gens vaillants;
Pour soutenir la loi (foi) chrètienne,
Nous étions toujours en guerre avec ses ennemis:
Je crois donc, mes gens, que nous avons bien fait,
Au lieu de( continuer) de soutenir la Chrétienté, de l'abandonner,
Pour adorer les dieux Mars, Mercure, Jupiter:
A présent, nous ser6ns aimés, dans le monde entier.
STÉRIDO.
Sire, 'les habitants sont beaucoup plus contents
Ils disent que jamais ils n'ont été plus heureux,
Car, pauvres et riches, tous ils jouissent de la liberté,
Par cela que chacun agit à sa volonté.
GRALLON.
Oui, il est permis d'incendier, de violer, de voler,
Sans (crail1'Jre d~) punition; plus de procès;
Tout cela a été décrété sur votre avis; (A)
Gelui qui a du bien, le surveillera, s'il. veut,
(,\) Ms. L. B. : C'est là la loi signée par vos avis.
Rae me na soueian ken euz ma c'h urunenn,
Renoncet 'm eus d'ezhi lia d'al lezenn gristenn.
XELSON, ministr pe brefet.
Gralon, c'hui zo eun den hac hen eus sur talent,
Lakêt oc'h eus urz-vad en ho gouarnament,
Hac a-baoue ann de m'eo lancet al lezenn
Ewit reï liberté, peb-hini ra he benn ;
Mès beza 'zo e'hoas calz demeus a Vretoned
d'hê derc'hel-mad da fez ar Romaned ;
A fell
Na gredan ket a ve ken nemet al' gêr-ma
Da vont bete Breiz-Meur, a gement discouez joa ;
Ar peur-rest a Vretagn Ci zo hol resolvet
kent renonz, evel hon eus-ni grêt.
Da verwel,.
GRALON.
Libr ez eo pep-bini d'obel' 'vel ma caro,
An hinin hen eus c'hoant, pa garo renunso ;
Ann hini 'feU d'ehan heuill al lezenn romenn,
Marteze, kent ar fin, 'n em gavo en ankenn,
Rac an hol brovinço a zo sur co)eret
Eneb ar Romaned hac ann hol Vretoned,
En defaut na deuont da renonz d'eun Doue
Pebini na welomb jamès, na noz na dé ;
Ze zo cauz d'irnb iwe da voud deut da scuizan,
o vea bepred jenet abalamollt' d'ehan ;
brema me zo sur en hor )ezenn neve
Mès
Hor bô revelation 'lies digant hon Doue.
DOURVA.
Ouspenn a lârer d'imb goude cuitâd al' bed,
Hec'h efomb da eut' vro carguet a joaüsted,
ha tân-a-joa a vô eno, noz-dé,
Danso
Repajo excellent 'refomb iwe, bemdé,
coant vô eno, kezec 21' re gaera,
Mere'hed
Ewit mont da bourme,n, da em divertisa.
Car pour moi je ne me soucie plus de ma couronne,
J'y ai renoncé et aussi à la loi chrétienne .
XELSON, ministre ou préfet.
Grallon, vous êtes certainement un bommede talent (d'esprit),
orcll'e dans votre gouvernement,
Vous avez mis le bon
Et, depuis le jour oll la loi est lancée
Pour donner la liberté, chacun fait à sa tête;
. Mais il ya encore beaucou p de Bretons
Qui veulent tenir bon à la foi des Romains (30) ;
Je ne crois pas (qu'il existe), ailleurs que dans cette ville,
à Breiz-Meur, (des gens) qui montrent de la joie;
(D'ici)
Le reste de la Bretagne est résolu .
A mourir, plutôt que de renier, comme nous avons fait.
GRALLON.
Chacun est libre de faire comme il voudra,
Et quiéonque en a le désir reniera, quand il lui plaira;
Celui qui veut suivre la loi romaine,
Peut-être, avant la 6n, se trO\1vera dans la douleur,
Car toutes les provinces sont certes il'ritées
Contre les Romains et contre tous les Bretons,
Faute à eux de renoncer à-un Dieu
Que nous ne voyons jamais, ni la nuit ni le jour;
C'est aussi ce qlli est cause qIJe nous nous sommes lassés
dans la gêne, par sa faute:
D'être toujours
Mais, à présent, je suis sûr que, dans notre nouvelle loi (foi),
Nous aurons souvent révélation de notre Dieu.
DOURVA.
De plus, on nous dit qu'en quittant ce monde
Nons irons dans un monde plein de joyeuseté;
Danses et feux de joie y seront, nuit et jour,
Des repas excellents nous ferons aussi, tous les jours;
] 1 Y aura de belles filles et des chevaux des plus beaux,
Pour aller se promener et se divertir .
STÉRIDO .
Facil braz eo gouzoud eo gwell' allezenn-man
Eget ann hi ni Romann, pini 'm boa da gentan ;
. Ar vèleienn memeu~ a zo iwe chalmet,
A-boem'eo al lezenn-man ganim b adoptet, .
Bêt' al leanezed, pere oa er gouent,
YVeler gant canfardecl 0 rullia elre ann hent CA),
Hac hi 0 tempesti, peb-hini 'n he fύon ;
Brema na emaint mui renfermet el' prison,
E-lec'h n'ho defoa ket hanter boed da elebri ;
Brema 'n em regalont dre ann hosteleri.
GRALON.
Enfin, rèd eo corner plijadur, el' bed-man,
Hac tanvad a bep-mad, a-raoc mont diwarnhan.
Mès, gant aOlln na cleufe eun darn da em scuisan,
Ha da distreï arré d'al' reli&,ion gentaI),;
A vô rèd fl'imb lacad dis1.ruja 'n ilizo
Ha torin ann traou-sacr, d isplantan al' c'hroajo ; .
Dre-ze, l?-ret, ma zud, a c'hui a ve content
Da obel' kement-ze breman incontinent ~
STERIDO.
Me a iel' da genta, Gralon, heb aoun a-bed,
Da lacad executin al' p-ez oc'h eus lâret :
Dre-ze, aotronez, lâret, ha c'hui delîo ganon ,
Mès, na vô forcet den, CIre ma zo liberté.
DOURVA.
Evel eur marc'h vaillant, brema sur me a ia (B)
Ewit distrujan hol ilizo al' gèr-ma, .
Ha pa vont discaret, goude, en bezr-amzer,
Vo batisset eun templ d'hon doue Jllpiter.
(A) Ms,. L. B.: - A voeler gant 0 horfado 0 ruillal dre ann hent.
(B) d' Evel eur marc'h iaouanq, etc ...
STÉRIDO.
Il est bien facile de savoie qlle cette loi est meilleure
Que la romaine que noUs avions d'abord;
Les prêtres même sont char-més,
Depuis que cette loi est par nous adoptée;
Jusqu'aux religie'Jses qui étaient au couvent
Que l'on voit avec des-polissons l'oulee sur la route, (A)
Et elles tempêtent (s'émancipent), chacune à sa façon;
Elles ne sont. plus renfermées en prison,
Oll elles n'avaient pas à mangee la moitié du nécessaire:
A présent, elles se régalent à l'auberge.
GRALLON.
Enfin, il faut pi'endre du plaisir, dans ce monde,
A goûter à tout ce qui est bon, avant de le quitte,r.
Mais, de cl'3i11te que quelques-uns ne vienne à se lasser
Et à retournel' à leu r religion première,
Il nous faudra faire détruire les églises,
Briser les choses saintes, déplanter les croix;
C'est pourquoi, dites, mes gens, si 'VOllS êtes contents
De faire tout cela, à présent, sur le champ "?
STERIDO.
J'irai le premier, G 1'a11on, sans aucune crainte,.
Faire exécuter ce que vous avez dit :
C'est pourquoi, messieurs, dites si vous me suivrez 1
Mais nul ne sera contraint parcequ'on est libre.
DOURVA.
Comme un cheval vaillant, à. l'instant, je marche (B)
Poul' détruire tout~s les égli~es -de cette ville,
Et quand elles seront l'en versées, peu après,
Un temple sera bât.i à notre dieu Jupiter.
Que l'on voit avec leurs ventrées rouler pat', la rout~,
(A) Ms. L. B. : -
Corn me un jeune cheval etc ...
GRALON.
Et 'ta, ma mignoned, da obel' kement-ze ;
Ha c'hui, ministr Xelson, a chomo ganen-me,
Rac me gred a welan ar1'u aman Mistral,
Daouest pe-seurt kezlo a digas d'imb gant mali '?
DOUl'va ha Sterido cuit; Mistral a deu.
MISTRAL.
Me ho salut, Gralon, a-beurs ma mestr Fl'8gan,
Hen eus d'in commandet dont ho betec aman,
Da lâret d'ac'h penaos omb bet victorius
War al' barbared fall, a oa ken orgouillus ;
Trompillo hac armo hon eus bet, en peb giz,
Hac a vô rentet d'ac'h en ho palès, en Is.
GRALON.
Chalmet on, pach iaouanc, ebars en gwirione,
Mès lâret d'am c'henderT mired al' prizo-ze,
Hae er memeus amzer, lâret d'am niz Gwennolé
Dont, diziaou kenta, da obel' eur bâle (A),
Ewit ma par1ajin ma stad antierament
Etre he dud hac hen, che ma int tud vaillant.
ma mignon, ma gortos eur pennad.
Ouspen-ze,
Gralon a ia cuit, eur pennadic, ha a deu arl'è.
Dâl chede eul li7:er, a zo cachedet mad,
Ewit reï da Fregan, gouarner '1' Vreloned,
Ma bolonte antier a zo en-han seri vet : (E)
Goude m'hen dô lennet, te lava1'o d'eh an
'Nem renta gand he vab ebars en Poul-C'harvan ;
vVarc'hoaz, a-benn creiz-dé, renko bezan eno,
Me 'n em gavo iwe, kerkent hac hi ho daou.
Partiet eta prompt, rac bezr eo ann amzer,
Ha nin, aotro Xelson, demb d'ober lacad 'nn doubier.
Hoi cuit.
(A) Ms. L. B.: - Dont evit ann deyou ...
(s) Ma santimant. ..
GRALLON.
Allez donc, mes amis, faire cela;
Et vous, ministl'e Xelson, vous t!esterez près de moi,
je crois que je vois venir Mistral -;
Car
Savoir quelle nouvelle il m'apporte en hâte ~
Dourva et Slèrido sOI'tent; Mistr!ll entre.
MISTRAL.
VOIlS salue, Gl'allon, de la part de mon maître Fragan,
de venir jusqu'à vous,
Qlli m'a commandé
Ponr vous dire que que nous avons vaincu
Les Barbares méchants, qui étaient si orglleilleux ~
Trompettes et armes sont (tombées) en notre pouvoir,
Et vous seront rendilès dans '"otre palûs, en Is.
GRALLON.
Je suis charmé, jeune page, en vérité,
à mon cousin de garder ces dépouilles,
Mais' dites
Et en même temps, dites à mon neveu G\vennolé
De venir, jeudi prochain, faire une promenade (une visite) (A)
Afin que je partage mon Etat entièrement
Entre lui et ses gens, parcequ'ils sont vaillants.
De plus, mon ami, attends-moi un instant.
Grallon sort, un instant, puis revient.
Tiens, voilà u ne lettre bien cachetée,
Pour donner à Fragan, le gou VerneUl' des Bretons;
Ma volonté y est entièrement écrite. (B)
Quand il l'aura lue, tu lui diras
De se rendre avec son fils à Poul-C'harvan; . (31)
Il devra y être demain, à midi,
aussitôt qu'eux deux. .
Je m'y trouverai aussi
Partez donc, vite, car le terme est court, .
Et nous, Monsieur Xelson, allons faire mettre la nappe.
Tous sortent.
L. B.: - De venir un de ces jours ....
Mon sentiment. ...
Scenenn Diouvai.
GWENNOLl~, FRÉGAN, ALBA, CLERY!.
GvVENNOLE.
Demad, ma zad, ma mamm, ha c'hui, ma c'hoar Clervi;
Ha c'hui oc'h eus trec'het ar l'oue Barbari ~
FREGAN .
Dl'e al' c'hraz a Doue, 'z omb bet victorius,
Dre-ze canomb cl'ehan : Te Dewn laudamus !
G'\iVENNOLE ha CLERV! a gân.
C'hui eo, ma Doue, a veulomb,
C'hui eo ann aotro aI1aveomb
FREGAN hac ALBA a gân.
D'ac'h Tad Eternel, a rent gloar
Kement a zo war ann clouar.
FREGAN a gomz.
Mes ma fach a welnn arru gant empressament,
Me gred e tigas d'imb eur c'her,lo important.
MISTRAL.
Ma frinz, setu me deut buhan mad war m'a gîz,
gant Gralon, en kèr Is ;
Goude beza comzet
LAI'et am eu::; peb-tra evel ma commantjoc'b,
Setu ama lizer 'n eüs roët ewidoc'h.
FREGAN a leun allizer.
Doue, petra welan merket el Iizer-man !
Ha possubl a ve gwir al' pez a zo en-han '?
Ma mab ker, hoc'h eontr a verk dre he lizer
'N eus renoncet d'al' fe, 'wit adori Jupiter!
GWENNOLE.
Poan vraZ ,am eus, ma zad, 0 credi kement-ze.
Scène deuxième .
G\VENNOLÉ, FRAGAN, ALBA, CLERVIE.
GWENNOLE.
Bonjour, mon père, ma mère, et vous, ma sœur Ciervie ;
A vez-vous vaincu le roi de Barbarie
FRAGAN.
Grâce à Dieu, nous avons été victorieux,
chantons-lui: Te Deum laudamus !
C'est pourquoi,
G\tVENNOLE et CLERVIE, chantant:
C'est vous, mon Dieu, que nous louons,
Vous êtes le seigneur que nous reconnaissons!
FRAGAN et ALBA, chantant:
A vous, Père Eternel, rend gloire
Tout ce qui existe sur la terre .
FRAGAN,. parlant :
. Mais je vois 'mon page qui vient avec empressement,
Je crois qu'il nous apporte une nou velle importante.
MISTRAL.
Mon prince, me voici promptement ùe retour,
à Grallon, dans la ville d'Is ;
Après avoir parlé
J'ai dit chaque chose comme vous m'aviez commandé; .
Voici une lettre qu'il m'a donnée pour vous.
FRAGAN lit la lettre .
Dieu! que vois-je marqué dans cette lettre?
Si c'était possible que ce qu'elle contient fût mensonge?
Mon fils cher, votre oncle marque dans sa lettre
Qu'il a renoncé à la foi (chrétienne) pou"r adorer Jupiter!
GWENNOLÉ.
J'ai bien de la peine, mon père, à croire cela.
FREGAN.
Sellet bac a welfet el' 1 izei', cou Iz ha me .
GWENNOLE goude bea lennet.
ingrat, te 'zo eur, Roue cliscourach !
.Calon
Penaoz halles credi d'ann idolatriach ~
Ha 'wit ober creski brasoc'h c'hoaz he bec'het,
'N eus lancet al lezenn libr d'he hol sujeded.
MISTRAL.
D'ac'h, aotro ann abbad, ha d'ac'h ma frinz a lâr
Monet da gorriz gant-han war eur c'hornic douar
A zo war vord ar mol', e kichen Loc-Micael :
· Poul-C'harvan eo han vet, e kichenn eur roehell.
FREGAN.
Mad eo se; breman ho pedan da sortial,
Ma lezel eur pennad gant ma zud da gaozeal.
Mistral cuit.
o ma fried, ma merc'h, ha ma mab Gwennole,
Pebeus crim 'n hor famil, disanaout Doue! (A).
ALBA a gân wal' an ton: Pell euz ar plaz, Clen infideL
Tad Eternel, pebeus malheur!
Me'zo mantret gant ann douleur,
o clcwet eut' pec'het ken braz,
Disenor hor famil, siouas !
Pa renonz ma c'henderv d'ho lezenn,
Eo collet al' fe dre al' Gristenienn.
CLERVI, war al' memeus ton:
Ma zad ha ma mamm, me ho ped
Da galmi ho glac'har ha regret,
(A) Ms .. L. B.: - Pes disenor don famil, pa dizanzavcr cnni al' gouir
Doue!
FRAGAN.
Regardez, et vous le verrez dans la lettre, comme moi.
GWENNOLÉ, après avoir lu. '
Cœur ingrat! tu es un Roi sans couragf' !
Comment peut-on croire à l'idolatrie?
Et pour augmenter encore son péché,
Il a lancé une loi donnant la liberté à ses sujets!
MISTRAL.
A vous, monsieur l'abbé, et 'à vous, mon prince, il dit
D'aller lui parler sur un petit coin de terre
Situé au bord de la mer, près de Loc-Micaël :
Poul-C'harvan est son nom, près d'un locher.
FRAGAN.
C'est bien, à présent, je vous prie de sortir,
Me laisser un moment m'entl'etenir avec mes gens.
Mistral SOI't.
o ma femme, ma fille et mon fils Gwennolé,
Quel crime, dans notre famille, renier Dieu! (A)
ALBA chantant sur l'air: Eloigne·toi d'ici, infidèle.
Pèl'e-Eternel, quel malheur!
Je suis navré de douleur
En apprenant un si grand peché,
Le déshonneur de notre famille, hélas!
Puisque mon cousin renonce à votre loi,
La foi est perdu parmi les chrétiens.
CLERVIE, sur le même air:
Mon père et ma mère, je vous prie
De modérer votre douleur et votre regret,
(A) Ms. L. B. : Quel déshonneur dans notre famille, puisqu'on y renie
[le vrai Dieu!
Ha pedomb ma breur Gwenr.ole
D'ober orèzon da Doue, .
Hac a raio d'am eontr Gralou,
d'he religion.
Distrei c'hoas
GWENNOLE.
Me a raïo, ma c'hoar, al' pez a leveret,
Mar gallan, me reï d'ehan distreï, 'wit he brofit ;
. Me~ poennt eo d'imb, ma zad, mont da welt anehan :
ma mamm, ni rolorno souden aman.
Adieu,
Hol cuit.
Scenenn tC1'ved.
GRALON, FRÉGAN, GWENNOLE.
FREGAN.
Salut kenderv Gralon, Roue al' Vretoned ;
omb d'ho cavet, p'hoc'h eus hon gouiennet ·;
Deut ez
Lavaret a zo d'imb ho poa ar volonte
en secret gant ma mab ha gant me.
Da barlant
GRALON.
Arruet mad' ez oc'h, assuret 'ta ho taou :
expliquod'ac'h breman, en bezr gomzaou :
Me a
Hanter cant bloaz 'zo 'baoue tougan ar gurunenn,
Ar sceptr royal iwe, balamour d'am moyenn,
apparchant ouzin,
Rac Breiz-Izell antier a
Ha dre-ze, evel jnst, oa d'in d'hi c'hommandin ;
am eus bet recevet, CA).
. Mes kement a drubuill
o tifenn ma droejo ha fez '1' gatoliqued,
Ma 'z on deut' éJa scuisa, kerconlz ha ma frinsed ;
hon eus concluet :
Dre-ze, selaouet mad petra
Fregan, ma c'henderv ker, ho grêt 'm boa gouarner
En Breiz-Meur hac en Is, en Bt'etagn en antier,
(A) Ms. . Mes Quement a gasti ...
Et prions mon frère Gwennolé
D'adresser une prière à Dieu,
Et il fera que notre oncle Grallon
Retourne encore à sa religion (première) ..
GWENNOLE. .
ftrai ma sœur, ce que vous dites;
Si je le puis, je le ferai retourner, pour son avantage;
Mais le temps presse, mon père, d'aller le voir:
Àdieu, ma mère, nous retournerons sans tarder.
Ils sortent.
Scène troisième .
GRALLON, FRAGAN, GWENNOLÉ .
FRAGAN .
Salut cousin Grallon, Roi des Bretons;
Nous sommes venus vers vous, sur votre demande.
On-nous a dit que vousdésirel'iez
Parler en secret à mon fils et à moi.
GRALLON.
Vous êtes tous les deux les bien venus, soyez-en certains:
Je vous expliquerai, à présent, en peu de mots:
Voici cinquante ans que je porte la couronne,
Et le sceptre royal aussi, à cause de mes moyens,
Car la Bretagne entière m~arpartient,
Ainsi, comme de juste, c'est à moi d'y commander;
. Mais, j'ai éprouvé tant de troubles (de toürmerit) (A),
En défendant mes deoits et la foi des catholiques,
Q~le je m'en suis ~assé: avec mes princes;
Ainsi, écoutez bien ce que nous avons conclu:
Fragan, mon cher cousin, jP. vous avais fait gouverneùr
En Bl'eiz-Meur et en Is, dans la Bretagn~ entière;
(A) Ms. L. B.: Mais j'ai éprouvé tant de peine ...
. BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XVI. (Mémoires}. 12
C'hui gommande peb-tra, dre ordrenanz royal "; -
Mès brema 'zo question dimeus eun affer ail :
Me ro d'ae'h ha d'am niz kement a bossedan,
Ho taon e eommanlfet ebars ma flaz breman,
na gommandin ken nemet er gêl' aIs,
Ar rest a roan d'ae'h da regla 'n ho avis.
GWENNOLE.
Ma eontr, se a ve re d'imb-ni euz a henor,
Bl'eiz antier a zo d'ae'h, e'hui ez eo ar seignor,
Ni na veritomb ket caout neb a reeompanz,
zo dleet da tad ar Bl'ovidanz. (A).
Kement-ze
GRALON.
Ma niz, na gomzet ket ebars ann termenn-ze,
ni 'zo resol vet hol da eheneh a' Doue, _
Rae
Jupiter ê 'n Doue a ac1oromb breman,
ar fidellan.
Approuvet hon eus eo henès
GWENNOLE.
Petra son jet, ma eontr, eomz euz a Jupiter,
• Pini n'eo met eun astr da Doue servijer 1 .
Henès n'allo bikenn ho rentan evuruz.
Son jet el' poanio bl'az hen eus souffret Jesus,
Ewit hon pren~n hol a bl'ison ann ifern ;
Penamet-han ez oamb el lee'il-ze 'wit bikenn.
Ma eontr, me ho suppli, roët lod ho moyenn
Da ornin ilizo, da soutenn ar baourienn,
Renoneet d'ann Diaoul, demeus a galon vad,
Ma pô ar _ Baradoz, a-beurz Doue an tad.
GRALON.
Kement-ze 'zo caojo a zo bet invantet
D'abusin ann dud simpl hae Îzel a speret.
Quement-se zo gleet da Doue, tad al' Brovldanz.
(A) Ms. L. B.: "
Vous dirigiez toutes choses, pal ordres royaux: '
aujourd'hui, il est queslion d'une autre affaire:
Mais
à mon neveu tout ce que je possède,
Je donne à vous et
à ma place;
Tous les deux vous commanderez, à présent,
Je ne commanderai plus que dans la ville d'Is,
Je volIs abandonne le reste à régler' à votre discrétion.
GWENNOLÉ. '
Mon oncle, ce serait là trop d'honneur pour nous;
La Bretagne entière vous appartient, YOUS êtes le seigneur (32),
méritons d'obtenir aucune récompense?
Nous ne
est dû au père de la Providence (1) (A).
Cela
GRALLON .
Mon neveu, ne parlez pas en ces termes,
Car nous sommes tous résol us à changer de Dieu;
Jupiter est le Dieu que nous adorons à présent,
Nous avons la preuve qu'il est le plus fidèle.
GWENNOLÉ.
Que songez-vous, mon oncle, à nous parler de Jupiter,
Qui n'est qu'un astre au service de Dieu ~
Celui-là ne pourra jamais vous rendre heureux.
Songez aux grandes souffrances de jésus,
Mort pour nous racheter de la prison de l'enfer;
Sans llli, nous étions dans ce lieu pour jamais.
en sup'plie, donnez une part de ves biens
Mon oncle, je vous
Pour orner les églises, pour soutenir les pauvres, '
Renoncez au diable, de bon cœur,
Pour que vous ayez le Paradis, de la part du Dieu le Père.
GRALLON.
Tout cela c'est des contes, qui ont été inventés
Pour abuser les gens simples et bas d'esprit. ,
(A) Ms. L. B. : Cela est dCt à Dieu, le père de la ProVidence.
Ann Doue-ze, ma niz, a zo hanvet Sahrer,
Na eo ket ken exact ha ma eo Jupiter;
Dre-ze eo gweUoc'h d'ac'b, ambrassin hon lèzenn,
Hac ho pô plijadur, el' bed-aU, a pourmen
Ebars en carreojo ho devo 'dioueskel, '
Hac ho trànsporto sur ken prim hac ann awel.
Lest eta ho habit leun a dristidîgès,
Ha comerret UlJan leun a laouenidigès.
GWENNOLE.
Allas! ma eontr caret, breman a welan sclezr
E fell d'ac'h en em goll, el' fin eHZ oc'h amzer ;
C'hui zo bet, bete-hent, servijer da Doue,
Hac ben renoncet 'crenn, el' fin euz ho pulle.
FREGAN.
Dre garante ouzoc'h, ma c'henderv, m'ho suppli
'Da vean fidel d'al' fe, renonz d'ann idolatL'Ï,
Pe bezet assuret, ann dra-ze 'zo cel'tenn,
A vefet condaonet da boanio ann Ifern.
GRALON.
Penaoz, ehui a fell d'ac'h ober goap diouzin ? (A).
Rèd eo 'ven sur eur sot, mar teufenn d'ho credin; (8).
Reït d'in peuc'h ha chanchet a gonversation,
Pe lue raï 0 punissan ho taou er memeus fœçon .
GWENNOLE .
Ma eontr, :arabad eo d'ac'h en eru dransporti,
Ni ho lezo trailquil da heuiU' ho fantazi ;
Me 'c'h a d'em retiran, asambles gant ma zad,
Pa son jet ez omb deut da obel' ouzoe h goap.
(A) Ms. L. B.: Penaoz ponnio an ifern! goab a re,t diouzÎn.
(B) Rëcl ê 'even i nnossa nt. ..
Ce Dieu, mon neveu, qui est nommé S~uveur,
N'est pas aussi exact que l'est Jupiter;
C'est pourquoi il vaudrait mieux pour vous embrasser not.re loi,
Et vous aurez du plaisir, clans l'autre monde, à vous promener
Dans des carosses qui auront des ailes,
Et vous transporteront aussi vite que le vent.
, Quittez donc votre habit plein de tristesse, '
Et prenez-en un autre plein de gaîté.
GWENNOLE.
Hél3:s ! mon oncle bien aimé, je vois clairement
Que vous voulez vqus perdre, à la fin de votre iemps (vie);
Vous avez été, jusqu'à préserit, serviteur de Dieu,
Et vous le reniez net, à la fin de votre vie.
FRAGAN.
Par charité pour vous, mon cousin, je vOus supplie
D'être fidèle à la foi, de renoncer à l'idolâtrie, '
Ou, soyez assuré; cela est certain,
Vous serez condamné aux supplices de l'enfer.
GRALLON.
Comment, est-ce que voulez vous moquer de moi '1 (A) ,
Je serais certes un sot si je v6us croyais; (s)
Donnez-moi la paix et changez de conversation,
Ou je vous ferai châtier, tous les deux de la même façon.
G"\iVENNOLE.
Mon oncle', il ne faut pas vous tl'ansporter, ' ,'
Nous vous laisserons tranquille suivre votre fantaisie;
Je vais me retirer avec mon père, .
venus pour nous,
Puisque vous pensez que nous sommes
[moquer de' vous.
(A) Ms. L. B.: - Comment les peines de l'Enfer! Vous vous moquez de moi.
(n) , , Il fq.ud~ait ql)e je f,u,sse un innocent (un fou) ....
FREGAN . .
ma / hendel'v, mal' ret d'in e\vit heritach
Mès,
Breiz-Izell en antier da gommandi, 'n ho plaz,
Me heè'h a da dremen al' revu, kêr ha kêl',
c'hoûd hac hen a zo peb tra en he zever ;
'Wit ma vin anaveet ewit al' chef en-hê,
d'in em' merk benac demells a gement-ze .
Reït
GRALON.
Setu aze ma sceptr, pehini roan d'ac'h,
Et1z hen gwelet, a vôpleget d'ac'h, en peb leac'h ; (A).
Setu eun allianz a roan c'hoaz d'am niz :
Adieu, me a zistro arre c1'aT gêr aIs.
Gralon cuit.
FREGAN.
Demb brema da Vretagn, d'esea distreï ann dud, (B).
'Wit na vont ket collet, a-raoc bean el' but; (c) .
Mar gallomb-ni obel' d'hê distreï en hanter hent,
E vont c'hoaz parc10net gant Doue, Roue 'r zent.
Cuit .
Scenenn Pedervet .
FARDAS, paysan t, ALLANIC, he vevel.
FARDAS, 0 c'herve\.
Ventrebleu ! Allanic, ez on euz ho gervell ;
Me gred d'in n 'oc'h eus ket sonch hirie da ' zevel ;
Setu sonet ter heu1', kazi eue c'hart-hem' 'zo,
Ha c'hoaz ez out cousket; bl'ema m'es tihunvo !
ALLANIC.
Ho! ho! Kerkent al' gomz, setu me zo savet,
Ha laket ma dillad, "vidon da vond cousket ;
(A) Ms. L. B.: - Gant al' voeldeus anean ...
(B) Demp dre Breiz ...
(c) Evit na vont quel collet Quent m'eruo al' vl·ud .
FRAGAN.
Mais, mOIl cousin, si vous me donnez en héritage
La Bretagne entière à gouverner, en votre place,
J~ vais passer la revue, de ville en ville,
Pour sa voir si chaque chose est en ordre;
Et pour que j'y sois reconnu comme chef,
m'en une marque quelconque.
Donnez
GRALLON.
Voilà mon sceptre, que je vous donne;
En le voyant, on se soumettra à vous, en tout lieu: (A)
. Voici une alliance (anneau) que je donne encore à mon neveu:
Adieu, je retourne à la ville d'Iso
Grallon sbrt.
FRAGAN.
Allons maintenant en Bretagne, pouressayerdedétourner les
. [habitants, (B)
Afin qu'ils ne soient pas pt'rdus, avant d'être au but; (c)
Si nous pouvons les faire détourner, à moitié route,
Ils seront encore pardonnés par Dieu, le Roi des saints.
Ils sortent.
Seène quatrième.
FARDAS, paysan, ALLANIC, son valet .
FARDAS, appelant.
Ventrebleu! Allanic, je VOllS appelle;
Je crois que vous ne songez pas à vous lever, aujourd'hui; .
Voilà que trois heures sont sonnées, depuis près d'un quart
Et vous êtes encore couché; je vais vous éveiller moi. [d'heure,
ALLANIC .
Ho ! ho ! aussitôt la par'ole, me voici debout,
Et habillé, quoiqu'encore endormi!
(.-\) Ms. L. B. : - A sa vue ....
(B) Allons par Breiz.... .
k) . Afin qu'ils ne soient pas perdus, avant qu'arrive le bruit.
Na vet ket ken coler diouzin, ma mestr mad,
Rac en humor ez on hil'ie da labourad.
FARbAS .
Ar pez 'c'h eus da ober, kent 'wit commanz netra, ,
eo c'hoeza ann tân, en oaled, da dom ~na ;
Neuœ, p'am bô tommet., ar pez a reï vad d'in,
C'halli hasta buhan ficha ma diJuni.
ALLANIC.
Me g~rrie hQ cwelet 0 corner eut' vates,
Hac a wefe gwelloc'h egedon 'n tiège~,
Rac gwelloc'h eo ganen bezan oc'h obel' foenn
Ha dont d'am leinn, pa ve prest, iwe d'am merenn
FARDAS.
Me oar vad eur vatès \efe mad ewidon ;
Me~ petra lavaro an duel, dre al' c'hanton 1 (A)
Dre ma 'zon arri coz hac avancet en oad,
ann dud am bô c'hoant scrabad (~)
Marteze lâro
ALLANIC.
. Allons! eta, ma mestr, c'hui 'vad zo eun den drol!
Na ouzoc'h ket penaoz hreman eo libr ann ho11
Liberte 'n eus ar paour kercoulz hac ar pin vic :
Pa ve 'n aotro absent, 'n itron 'c'halv domestic.
FARDAS .
Rèzon oc'11 eus-hu sur, Allanic, ma mevel,
eo d'in cavet unan hac a vô d'in fidel :
Rèd
ran unan, hanvet Marc'haridic,
Anaout a
eo iaouankic.
Hounès a blich kalz d'in, mès 6'hoas
ALLANIC.
En qualité 'vatès comerfet anezhi,
Ha dre ma teui en oad, teui i we da greski,
(A) Ms. L. B .. : - lVres goùd petra lavaro ...
Ne soyez pas tant en colère contre moi, mon bon maître,
-Car je suis, aujourd'hui, disposé à travailler.
FARDAS.
. Ce que vous a vez à faire, avànt de rien cOlpmencer,
C'est d'allumer le Jeu, au foyer, pour me chauffer;
Puis, quand je me serai chauffé, ce qui me fera du bien,
Tu .pourras te dépêcher de me préparer à cléjeûner.. .
ALL\NIC.
Je voudrais vous voir prendre une servante,
Qui con yiendrait mieux que moi, dans un ménage, •
Car j'aimerais mieux être à faner,
Et venir dîner et goûter; quand les repas seraient prêts .
FARDAS . .
Je sais bien qu'une servante me con viendrait;
Mais que diront les gens, par le canton 1 (A)
Comme je vieillis et avance en âge,
Les gens diront peut-être que je veux gratter (1)
ALLANIC.
Allons clone, mon maîtl'e, comme vous êtes drôle!
Vous ne savez clone pas aujourd'hui que tout le monde est libre f
Liberté au pauvre comme au riche:
Quand Monsieur est absent, Madame app6lle le valet.
FARDAS.
Vous avez raison, Allanic, mon valet ,;
Il m'en faut trou ver une qui me sera fidèle:
J'en connais une, nommée Marguerite, .
Qui me plaît beaucoup; mais elle est encore bien je.nne.
ALLANIC.
Vous la prendœz en q ualit.é de servante,
Et, à mesure qu'elle avancera en âge, elle croîtra aussi,
(A) Ms, L, B,: - Mais savoir ce que Wl'ont .. "
Ha pa vô bet eur pennad amzer en ho servich,
~Tiscouezfet ho carantez, evel eman al' c'hiz.
FARDAZ.
A l' bougre damargaz ! te oar al' finessé ; (A)
Setll al' gwir voyenn d'antren en amitié.
Allons! rèd a vô d'in hi c'bomer em servich,
Da c'hoûd ha me allfe obel' c'hoas vaillantis .
ALLANIC.
Pa garfet dont da domma, c'hout'zet am eus ann tan.
FARDAS.
Penaoz a teus-te grêt, pa n'out ket êt ac'bann '{ (B)
ALLANIC.
Naun, mès goûd a l'et on carget a fine.ssé ;
Biscoaz n'oc'h eus-hu bet mevel ken prim ha me.
FARDAS.
la, te zo dilijent, lee'h na ver ket presset ;
Mad out da glasq ann Ancou en lec'h ma na ve ket :
heur zo sonet, demp da dijunian,
Mes peder
Goude 'c'h efomb da glasq Marc'haridic 'garan.
Cuit ho daou . .
Seenenn pempvet.
XELSON, STÉRIDO, DOURVA.
XELSON.
Demp d'obel' eur balè iwe d'al' faubourjo,
Rac plijad ut' hor bô 0 exerC:l hor viço,
Calz euz a dolio-caer hon eveus grêt dre gêr,
COlllz en (~reiz al' l'uio evel bars ann· tier ;
Na eus lezenn e-bed da gondaon ac'hanomb,
p'eo gwir al liberté 'zo 0 l'en etrezomb.
(A) Ms. L. B.: Ah! bougre davargag, te anaf finessé.
(B) . Penoz al' foeltr 1 ...
Et quand elle aura été quelque temp3 à votre service,
votre amour selon la coutume.
Vous lui témoignerez
FARDAS .
Le bon bougre! Tu connais la finesse; (A)
Voilà le vl'ai moyen d'entL'er en amitié.
110ns ! il faut que ' je la p['enne à mon service, '
Pour voir si je puis encore me comporter vaillamment.
ALLANIC.
Quand vous voudrez venir vous chauffer?j'aiallumé [e feu ..
FARDAS.
Comment as·tu fait., puisque tu n'es pas sorti d'ici 1 (B)
ALLANIC .
Non, mais vou.;; savez que je suis chargê(plein) de finesse ,;
Jamais vous n'avez eu de vJ.let aus'33i diligent que 1110i.
FARDAS.
Oui, foi lu es diligent là où l'on n'est pas pressé;
Tu es bon pour aller chercher la mort là où elle n'est pas:
Mais quatre heures sont sonnées, allons déjeûner,
Après quoi nous irons cbercher Marguerite, que j'aime.
so l'tell t •
Ils
Scéne cinquiéme.
XELSO~, STÉRIDO, DOURVA .
XELSON.
Allons faire une promenade aussi par les 'faubourgs,
nous aurons du plaisir à. y exercer nos vices.
Car
avons fait nombre de beaux exploits par la ville,
Nous
Tant dans les rues que dans les maisons;
Il n'y a pas de loi pour nous condamner,
liberté règne parmi nons.
Puisqu'il est vrai que la
(A) Ms. L. B.: - Ah! bon bougt'e, tu connais la finesse.
(B) Comment diable ... ? .
STÉRIDO .
• ' Calz muioc'h a blijadur hon deveus 'sur bl'ema,
Rac er fύon ma caromb 'teuomb da em divertissa,
N'eus na groegna plac'h iaouanc, nac iwe leanès,
enkêl' na war-a-rnaes ;
A gement a fachfe,
Ann eil lac'h egile, ha na eus da fachan ;
eul lezenn deme.us ar 1'e gwellan . .
Hornan 'zoo
PIQUES a deu hac a 1'0 eun toI pognard da Sterido.
Dâl ! just en chouc-he-gil 'meus tiet Sterido,
Ken a deu ma fognard er-ma es dre he c'heno .
Couezan a ra Sterido marv.
- DOURVA.
Se1u, ma c'hamarad, ac~u da exerciez
Ha da rejouissanz, el' gêr demeus a Is !
Subtil, aotro Piquès, oc'h eus-han bet scoêf,
Rac heb 0hom pell da souffr, ez eo l'actaI marwet.
PIQUÈS.
A-baouès prenan on.ar pognard newez-man, (A).
Hac am eus grêt an toI da approuv anehan :
d'in pelec'h hec'h et-hu da redec,
Mes lâret
Me iel' iwe ganec'h, brema pa on armet.
XELSON.
Mont a l'eomb da bourmen dre al' faubourjo,
Da c'hoûd ha ni 'ü'halfe em recreïn eno ;
Etrezomb bourc'hiziRn, en louez bourc'hizezed,
Agar gwelet a-wezio ive paysanted. (B)
DOURVA .
Ouspenn cavfomb arc'haut dastumet a bell'zo,
En ti al' baysanted, kazi leiz ho c'houffo :
(A) Ms. L. B.: - 0 tont deus ar stal ezon gant ar. poignard neve-man.
(8) Ms. L. B.: A ra ive joa 0 voelet er ha~pagn paysantezed.
STERIDO.
Nous avons certes pIns de plaisir, à présent,
Car nous nous divertissons comme il nous plaît :
nonne même,
Il n'est ni femme, ni jeune fille, ni
à la campagne ·;
Qui s'en fâche, en ville ou
L'un tue l'autre, et nul ne doit s'en fâcher,
Cette loi est des meilleures.
PIQUÈS arrive et dOtlne un coup de poignard à Stérido.
1 je l'ai frappé juste à la nuque,
Tiens
Si bien ql\e mon poignard lui sort par la bouche!
Stcl'ido tombe mort·.
DOURVA.
Voilà, camarade,ton rôle terminé,
Et aussi ton plaisir, dans la ville d'Is ! .
Vous l'a vez, seigneur Piquès, su btilement frappé,
Car sans souffrir longtemps, il est mort promptement .
PIQUES.
Je viens d'acheter ce poignard neuf (A),
Et j'ai fait le cou p pour l'éprou ver;
Mais dites-moi oü vous allez courir,
Je vous accompagnerai, puisque je suis armé.
XELSON.
Nous allons nous promener par les fi:wboùrgs,
Pour voir si nous pourrons nous amuser par là;
Nous antl'es bourgeois, parmi (après) les boürgeoises,
Nous aimons à voir aussi, parfois des paysarines (13).
DOURVA.
De plus, nous troùverons de l'argent amàssé depùis
. [longtemps,
Dans les maisons des paysans, presque plein leurs coffres:
(A) Ms. L. B. : - Je viens de la boutique avec ce poignard neuf.
(B) Ms. 1. B.: Ont aussi de la joie en voyant, à la campagne, les
[paysannes .
Ar re-ze oa gwez-all tud meul'bed dinatul',
Dl'e:-ze paëomb d'ezhe ho amzer goz, gant plijadur.
PIQUÈS.
Allons! me 'zo content da vont ganec'h iwe
'Witexerci c'hoas ma fognard, pa 'z eo ne\'e :
Heman, pa vin-me cl'og el' penn-man diont-han,
C'hallin skei evelhenn, hac on sur da lac'han.·
Lac'ha a ra Xelson .
DOURVA.
a zo eun al'm euz a ré terruplan ;
., Honès
'1' re-man a gostez, ha demb d'exel'cin 'nezhan.
, Tolomb
Cu·za a reont al~ re val'w .
PIQUES.
Arsa eta, Dourva, demb bLlhan en hor l'out;
El-lec'h ma em gavfomb, ni rei hon anaont.
Hol cuit.
C'huec'Iwet Scenenn.
FARDAS, MARC'HARIDIC, ALLANIC, PIQUÈS, DOURVA .
FARDAS.
Me a zo evul'us c'hoas, ebal's ma c'hozni,
p'eo deut Marc'haridic d'am zi, d'am sel'viji ;
Dec bloaz ha pevar uge~t 'zo ma 'z on war ar bed,
Ha biscoas ker content na oa bet ma spel'et.
Dre-ze 'ta, Mal'c'ilaridic, da der heur cuz al' mintinn
A renqfet sevel bemde, da ficha dijuni din,
H:ac Allanic a iel' d'al' parc da laboul'ad,
Ha c'hui ~i voallo 'n ti; me gred ez oe'h capabl.
MARC'HARIDIC .
Credet parfaitament kement oc'h eus lâret
A vÔ ganen-me grêt, evel 'c'h eus commandet;
Ceux-là étaient naguère gens fort dénaturés,
Aussidonnons-nous le plaisir de leur faire payeL' le temps passé .
PIQUES.
Allons 1 je- veux vous accompagner,
Pour employer encore mon poignard, puisqu'il est neuf;
Celui-ci (le poignard), quand je le tiendrai par ce bout,
de cette façon, et je suis slu de tuer
Je pourrai en frapper
Il tue Xelson .
DOURVA.
Voilà une arme des plus terribles!
Jetons ceux-ci (les morts) de c6té,et allons l'exercer (l'arme).
Ils cachen t les cadavres '
, PIQUES.
Or çà donc, Dourva, mettons-nous en 1",)1] te,
Partout où nous nous trouverons, nous l1.ous ferons connaître.
, Ils sortent.
Scène sixtèm,e.
FARDAS, MARGUERITE, ALLANIC, PIQUÈS, DOURVA,
FARDAS.
Je suis encore heureux, dans ma vieillesse,
Puisque la petite Marguerite est venue me serdr, dans ma
Voici quatre-vingt-dix ans que je suis au monde, [maison: '
Et jamais mon esprit n'avait été si content.
Ainsi, petite Marguerite, à trois heures du matin,
Il vous faudra vous lever, tous les jours, pour me préparer à
Et Allanic ira travailler aux champs, ' [déjeûner,
Pendant que vous garderez la maison; vous en êtes bien ca-
, [pable, je pense
MARGUERITE.
Croyez parfaitement que tO,ut ce que vous avez dit
Sera exécuté par moi, comme vous l'avez commandé:
Gwez-all, pa oann bihall, ma rnamm a· discas d'in (A)
Ar freçon da lacad bol en urz, bars eun ti,
ma mestr 'c'h allet hardiz fiziout en-hon,
Dre-ze,
Gond ouzon serviji tud peb condition.
ALLANIC.
He bien eta, ma mestr, n'am boa ket lâret mad,
Pije càt eur vatès ? C'hui 'zo paotr delicat;
Brema 'pô mui 'blijadur eget ho poa aroc,
Ha mal' grêt vaillantis, me 'Iipo ann darbod.
FARDAS, 0 c'hoarzinn :
Ha! Ha ! te, Allanic, a gar bepred farsal ;
Mes lezomb kement-ze, ac'bann da eurwech-alI. "
Arsa, Marc'haridic, ni 'c'h a da labourad,
Kement a zo em zi fizian enoc'h, faIl, mad;
Setu ann alc'houeo demeus ma zenzorio,
C'hui vÔ al' gouarnerès war ma bol vado.
Rei a ra d'ezhi ann alc'houeo.
ALLANle.
Ma mestr, pion ann dud-hont a zo arri aman T
Hailloned caer int snr, deus ho dillad welan. "
FARDAS.
. Daoust petra eo d'ezhe dont war ma doual'o ~ "
Allanic·, digass d'in ma falz, m'ho extermino.
Allanic a 1'0 d'ehan eur falz .
ALLANIC.
Dâlet, ma mestr ; em difennet, pe omb m" aro.
Piquès ha Dourva a deu .
PIQUES, he bognard en he zorn.
Bonjour dit, paysant; lavar d'in-me, bu han
Pelec'h 'man da arc'hant cuzet bars ann ti-man 1
(A) Ms. L. B. : - Goechal, pa. oa beo ma mamm, 0 devoa disket d'in _.
Jadis, quand j'étais petite~ ma mère m'apprit (A) '
La manière de mettre tout en ordre, dans une maison;
C'est pourquoi, mon maître, vous pouvez hardîment VOUR fier
Je sais servir gens de toute condition. [à moi,
ALLANIC.
Eh bien 1 mon mattre, ne vous avais-je pas dit
Que vous trouveriez une servante 1 Vous êtes. un malin, vous 1
présent, vous aurez pllJS de plaisir qu'auparavant,
Et si vous faites vaillantise, je lècherai le pot. (33)
FARDAS, riant.
Ha ! ha ! toi, AUanic, tu aimes toujours à plaisanter;
Mais laissons cela; jusqu'à une autre fois.
Or ça, petite Marguerite, nous allons au. travail,
Et je vous confie tout ce qui est dans la maison, bon et
Voici les clefs de mes trésors, [mauvais:
Vous serez la gouvernante de tout ce que je possède.
Il lui donne les clefs, et sort avec Allanic.
ALLANIC.
Maître, qui sont ces gens qui viennent vers ici 1
Ce sont, certes, des haillonneux, je le vois à leurs habits.
FARDAS .
Qu'ont-ils à venir sur mes terres 1
Allanic, apporte-moi ma faucille, que je les extermine.
Allanic lui donne une faucille.
ALLANIC.
Tenez, mon maître; défendez-vous, ou nous sommes morts.
Piquès et Dourva arrivent.
PICQUÈS, son poignard à ' la main.
Bonjour, paysan; dis-moi, vite,
Où est caché ton argent, clans cette maison?
(A) M. L. B.: . Jadis, quand ma mère vivait, elle m'apprit.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (Mémoires). 13
FARDAS .
Petra ra se dide, pelec'h 'man ma arc'hant 1 (A)
Sell 'ta 1 brava a labous ma zret a baysant 1 (B)
Pe d'em laeres pe d'em insulti out deut aman f
Diwal penaoz ma respont, pe me 'c'h d'as flastran .
PIQUÈS .
Hast buhan, paysan t, rei d'imb arc'hant bac aour,
Pe me lacaï da voad da drei ebars en dour.
FARDAS, en eur discouez he faIz.
Dastumet mad. hec'b eo an arc'bant, en ti-ma,
aman ann alc'bouez, iwe ar c'badena.
Sell
DOURVA .
Penaoz, aolro Piquès,oc'h eus patianted
Da selaou eur bern langach gant ar c'hoz Iambrezec '?
FARDAS .
Rèd eo d'ehan corner, ha te araï iwe,
Pe autrame.nt certenn me am bô ho puhe,
Rac heman ê 'n alc'huez deus ma hoi tensorio,
Ha mar tostât d'ehan, vô iwe hoc'h Anco.
Discouez a ra he falz.
DOURVA.
. Oh ! setu eur plac'h coant, pehini a blieh d'in;
Cassomb-bi ganeomb, pa eo d'bon fantazi.
FARDAS .
Hola 'vad ! comeJTet eun tam patianted, (c)
'c'h a d'ober moyen ma veet contentet :
Marc'haridic, roët ann alc'huez d'ann aotronez-ze,
ganen coll ma arc'bant ha c'bui da chom ganen ;
Gwell'
(A) Ms. L. B. : -'- ... emedi ma arhant?
(B) Ms. L. B. : Sell bravan lacou ...
(c) Ms. L, B.: Rola 1 fael, otronez, quemerret patianted !
FARDAS.
Qu'est-ce qùe cela te fait, où est mon argent î .
Voyez donc, le bel oiseau qni me troite de paysan 1
. Ou pour me voler ou pour m'insulter es-tu venu ici? _
gardeà ce que tu vas me répondre, ou je vais te foulel'aux
Prends
[pieds.
PIQUÈS.
Dépêche-toi, paysan, de nous donner de l'argent et de l'or,
Ou je ferai que ton sang se tourne en eau.
FARDAS, montrant sa faucille.
L'argent est bien serré, dans cette mais~m,
Et en voici la clef et aussi le cadenas.
DOURVA.
Comment, seigneur Piquès, avez-vous la patience
un tas debalivernesdela partdecevieuxradoteur .. (34)
D'écouter
FARDAS.
Il faut bien qu'il l'ait, et que tu raies aussi, toi.
Autrement, certes, j'aurais votre vie,
Car voici la clef de tous mes trésor$,
Et si vous en approchez, ce sera aussi votre mort.
Montrant sa faucille.
DOURVA, voyant Marguerite.
Oh ! voici une jolie fille qui me plait ;
Emmenons-la avec nous, puisqu'elle est à notre gré.
FARDAS.
Hala! par exemple; un peu de patience, (A:)
Je vais faire en sorle de vous contenter:
Marguerite, donnez la clef à ces messieurs,
J'aime mieux perdre mon argent et vous conserver:
(A) M. L. B.: Hola! par exemple, messieurs, prenez patience .
Setu ma zenzor, comerret~han, ma caret,
Gwell' eo ganen ho 'c'hoU 'get coll Marc'haridic.
PIQUÈS.
Pa teus discuezet d'imb pelec'b 'man da denzor,
Me assur d'id, pays a nt, a teus bet cals a dor,
Rac liberté zo breman ewit ober pillacb,
aner corner el-Iee'b 'zo avantach;
Dre-ze 'c'b
An-neb hen eüs moyenn a dIe sur ho diwall,
Ha te, kerz, paysan t, da ' dastum kement-all.
, Lac'ha a ra Fardas.
DOURVA.
Magnifie, aotro Piques, oe'h eus grêt diout-han, (A)
Dre-ze hee'h eo eoulz d'imb stagan'r mevel out-han.
Hast buhan astenn da gorf war hini da vestr,
mad sur d'ampoesoni 'r pesked. (B)
Ho taou vefet
ALLANIC.
Ha possubl ve rafeoc'h eun dra evel-se d'in.
. DOURVA.
Brema, pa vi staget; mar eares e credi. (c)
ALLANIC.
Ma lae'bet, m'ho suppli, kent eget ma stagan,
Pa 'z oe'h ken resolvet d'ober d'jn perissan.
DOURVA.
Nann, nann, n'as lae'hin ket, rae te a zo iaouanc,
Ha raï vad d'id inerwel en eur stad languissant.
Stagan a ra anehan war gorf he vestr.
PIQUES .
Heman a diseuezo eun exempl mad el' vro,
vô d'he vestr, e'hoaz goude he varo.
Rae fldel
(A) Ms. L. B. : - Magnifiq, otro Piquès, out deut a-benn dioutan.
(B) Ms. L. B. : Da zaou eyi mad sur da ampoesohni al' pest.
(c) Ms. L. B. : . Bremaïc pa yi stag... .
Voilà mon trésor, prenez-le, si vous le voulez,
J'aime mieux le perdre que de perdre la petit~ Marguerite.
PIQUES.
Puisq ue tu nous as montré où se teou 'le ton trésor,
t'assure, paysan, que tu ~s eu grand tort,
Car on a~ à présent, la liberté de piller,
Et l'on peut prendre où l'on trouve son avantage;
Celui qui a du bien doit le surveiller, .
Et toi, paysan, va-t-en en ramasser autant.
Il tue Fardas d'un c,Oup de poignard.
DOURVA.
Magnifique! seigneur Piquès, comme vous l'avez expédié! (A)
C'est pourquoi, autant vaut attacher le valet à son maître.
Hâte-toi d'étend~e ton corps sur celui de ton maître,
Vous serez bons t.ous les deux pour empoisonner les poissons. (B)
ALLANIC.
Est-il possible que vous me traitiez de la sorte ~
DOURVA.
A présent, quand tu seras attaché, tu le croiras, si tu ':eux.(c)
ALLANIC.
Tuez-moi, je vous en su pplie, avant de m'attllcher,
Puisque vous êtes décidés à me faire mourir.
DOURVA.
Non, non, je ne te tuerai pas, car tu es jeune,
Et cela te fera du bien de mourrir dans un état languissant (~) ,
Il l'attache au cadavre de son maître.
PIQUES ;
Celui-ci sera un bon exemple pour le pays,
Car il sera fidèle à son maÎtl'e, même après sa mort ~
(A) M. L. B.: - Mignifiquement, seigneur Piquès, tu es venu à boutde lui!
(B) Tous les deux vous serez assez bons pour empoisonner
pe~te (?)
(c) Tout-à-l'heure, quand tu seras attaché ...
DOURVA .
Crog er penn-ze, Piquès, ha me grogo aman,
Ha stagomb anezhe euz eur voenn, da vreignan.
Cass a reont cuit ar c'horfo marv.
MARC'HARIDIC.
Rèd ê vec'h tud barbar, pa n'oc'h eus neb trui.
DOURVA .
Penaoz, na ouzoc'h ket eman al ·liberté ~ (A)
Ann hoU hec'h aIl ober breman ho bolonté, (B)
Dre-ze, deus ganen en kêr~ bac ar bô plijadl1r,
Na scuiz ket oc'h ober cher-vad, me da assur.
Margaridic hec'h a ganthi .
Scenenn seizvet . .
. DOUE, el' baradoz, a gân.
war ann douar, promptamant, Gabriel,
Diskenn
Kerz bete Gwennole, ma servijer fidel,
Da lavaret d'ehan am eus-me bolonté
'C'h afe d'ar gèr a Is da gavet ar Roue,
Da lavaret d'ehan peuaoz ez on fach.et,
o welet lezenn ar gristelfien profanet'; (c)
Ze 'zo caus m~ cassan k~ment a glenvej-o,
Ha kement a garnès da g~'esquin ho foanio.
Eur ,mortalité vraz a gassin warnezhe,
Pa int em revoltet ann eil euz egile ; (D) .
Me 'raï eun tourbillon braz demeus ar mar glaz,
Ho confontin indan-han, soudenn, bihan ha braz.
Setu aze ·eur billet da rei da Gwennole,
Merquet eo ann heur en-han m'arruo ~ement-ze .
(A) Ms. L. B. : - Penoz, ma c'haranté ...
(B) Ms. L. B. : Paour ha pinvic, hal an hol ober 0 bolonté.
(c) Ms. L. B.: Abalamour ma neus al lezen gristen profaned.
(n) Ms. L. B. : Ma na sentont quet eus lezenn Guenole,
Me a meus eur remed preparet evitè .
DOURVA.
Prends par ce bout-là, (je prendrai) par celui-ci,
Ét attachons-les à un arbre, pour y pourrir.
Ils tI'ansportent les cadavres.
MARGUERITE.
Il faut que vous soyez des barbares, sans aucune pitié!
DOURVA.
Comment! vous ne savez donc pas que nous avons la
Chacun peut faire, à présent, à sa volonté ~ (B) [liberté ~ (A)
C'est pourquoi, viens avec moi en ville, et tu auras du plaisir;
Ne te lasse pas de faire bonne chère ...
Mal'guel'ite les suit.
Stene septierne.
Dieu, dans le Paradis, chante.
Descends sur la terre, vite, Gabriel,
Va jusqu'à Gwennolé, mon serviteur fidèle,
Pour lui dire que je désire .
Qu'il se rende 'dans la ville d'Is, auprès du Roi,
Pour lui dire que je suis irrité ·
De voir la loi chrétienne profanée; (c)
C'est ce qui est cause que j'envoie tant de maladies
Et tant de disettes pour augmenter leurs maux .
J'enverrai sur eux (les habitants d'Is) une grande mortalité,
Puisqu'ils se sont révoltés les uns contre les autres; (0)
Je soulèverai un grand tourbillon de la mer bleue,
(Sous leq uel ) Je les engloutirai bien tôt, petits et grands.
Voilà un billet pour donner à Gwennolé,
(Dans lequel) est marquée l'heure où cela arri vera.
(A) Comment, mon amour ...
(11) Pauvre et riche, tout le monde peut faire à sa volonté .
. (c) Ms L. B. : _ . Parce qu'il a profané la loi chrétienne. .
(n) Ms L. B.: S'ils n'obéissent pas aux paroles de Gwennolé,
J'ai un remède préparé pour eux .
GABRIEL a gân.
Me 'c'h a, heb retardi, da gât ho servijer
d'ehan ho polanté, ma c'hrouer :
D'annonz
Me·a lâro d'ehan monet bete Gralon
Hac he sujeded, da reï d'he instruction.
Annael cuit
Scenenn eizved.
GVIT ENNOLÉ a deu, ha GABRIEL kerkent.
GABRIEL, ô câna.
Salut d'ac'h, Gwennole; a-beurz crouër ar bed
Hec'h on deut d'ho cavet, dre m'hen eus commandet :
Gourc'hemenn a ra d'ac'h, eb ober difficulté,
'd'ar gêr a Is, da gavet ar Roue,
Monet
Ha lavaret d'ehan ha d'he holl sujeded
da Doue a voent convertisset,
Penaoz fell
He mar na garont ket sentinn euz ho comzo, •
assur ho funisso,
Doue, dre he goler,
ar gêr euz a Is hac he habitanted,
Rac
eur tourbiUon mor a vô holl confontet.
Dre
eur billet demeuz a-beurz Doue,
Dâlet c'hoas
Pehini a verk d'ac'h sclezroc'h al' wirione .
GWENNOLE, ô câna.
Me ho trugareca, Doue, Tad-Eternel,
Pa reit d'in ann henor, dre messajer fidel :
Me 'c'h a da bartia, pa 'c'h eo ho polanté,
Da lâret d'hè distreï da )ezenn ar gwir fée
Holl cuit .
_0 FIN D ·AR PEY ARE ACT.
GA BRIEL, chantanl.
Je vais, sans retard, tr.ouver votre serviteur,
POÎlr lui annoncer votre volonté, mon Créateur:
Je lui dirai de se rendre auprès de Grallon
Et ses sujets, pour les i.ll'Struire ...
L'ange sort.
Seene huitieme.
GWENNOLÉ arrive; et GABRIEL, aussitôt.
GABRIEL, chantant.
Salut à vous, Gwennolé; de la part du Créateur du monde,
Je suis venu vous trouver, parce qu'il me l'a commandé:
Il vous ordonne, sans faire dîfficu 1 té,
rendre dans la ville d'l!'i, auprès du Roi,
De vous
Et de lui dire et à tous ses sujets
Qu'Il désire qu'ils se convertissent, .
Et s'ils ne veulent pas obéir à ses paroles,
Dieu, dans sa colère, assurément les fera périr,
Car la ville d'Is et ses habitants
Seront tous engloutis par un tourbillon de mer.
Prenez encore ce billet de la part de Dieu,
Qui vous marque plus clairement la vérité.
GWENNOLÉ, chantant.
Je vous remercie, Dieu , Père-Eternel,
Puisquevous me faites l:honneur (de m'en voyer) un messager;
Je vais partir, puisque c'est votre volonté;
Pour leur dire de retourner à la loi de la vraie foi.
Ils sortent.
FIN DU QUATRIEME ACTE.
ACT PEMPVET
Ann tIJeatl' a represent eur blacenn pu blic, bac eur chanchament
a wei, pa fonto ar gêr aIs.
Scenenn kenta .
GRALON, LUSUFER, GWENNOLE.
GRALON, en disesper.
Pebeus tristidigès, melconi ha daero !
Na gouez bemde warnomb nemed peb maleurio !
Ar gêr"::ma bet ken superb, carget a abondanz,
Na ra met deperis~a, en defaot Providanz ;
Al' gernès 'zo 'n hon zonez, hac al' vocen iwe (A),
Revoit e-tl'e ann duel, 0 lac'han 'n eil egile;
Ar bl'ezel civil 'zo ; ann auteur a gement-ze
. A eo me, siouas d'in, dl'e ma faiblicité !
Ha brema n'em eus repos, nac en nOL: nac en dé.
Ma Doue, hastet buhan achui ma buhe, (B) .
Ma spered ha ma c'halon 'zo bepreù en combat;
Hon lezenn sur a ra hOl'l'elll' d'ho taoulagad,
Na glewan na welan met maleurio bernele,
Viço abominabl, 'tre ann eil egile :
Lâret mad a oa d'in gant ma niz Gwennole
A oann braz en erreur, 0 renonz da Doue.
LUSUFER, a-dreon.
Petra, mignon Gralon, signifi kp.ment-ze G?
Eur pennad 'zo na rez met deplori, noz de;
Red ve troët da speret, pa sonjès distreÏ c'hoas
Dallezenn catholic, a zo danjllrus braz.
(A) Ms. L. B.: . Eman enni ar guernès hae ar voeenn ive,
. Ar revoIt entre an dud, an eil a Iaz eguile.
(B) Ms. L. B. : Ma Doue, ma hasset deus ar bed, aehuët ma bue.
ACTE CINQUIÈME.
Le théâtre représente une place publique, avec un changement
à vue, quand sera engloutie la ville d'ls.
Scène premiè1'e. •
CRALLON, LUCIFER, GWENNOLÉ.
GRALLON, an désespoir.
Quelle tristesse! quelle mélancolie (douleur)! que de larmes!
Il ne tombe, chaque jour; sur nous, que des malheurs!
Cette ville, si superbe, pleine d'abondance,
Ne fait que dépérir, abandonnée de la Providence;
aussi; (A)
La famine est parmi nous, et la peste
La révolte est parmi les habitants, qui se tuent réciproquement;
ci vile règne; et la cause de tou t cela
La guerre
C'est moi, malheureusement, par ma faiblesse!
Et, à présent, je n'ai de repos, ni le jour ni la nuit.
de terminer ma vie. (B)
Mon Dieu, hâtez-vous
Mon esprit et mon cœur se livrent un combat continuel.
Notre loi, -assurément, fait horreur à vos yeux,
Je n'entends, je ne vois que des ma1heurs, tous les jours,
l'un et l'autre (parto'Jt).
Des vices abominables, entre
Il m'avait. été bien dit par mon neveu Gwennolé
à Dieu.
Que j'étais dans l'erreur, en renonçant
LUCIFER, par derrière.
Que signifie, l'ami Grallon, tout ceci ~
Depuis quelque temps, tu ne fais que te désoler, nuit et jour: .
Il faut que ton esprit soit tourné(perdu) pour songer à retourner
A la loi catholique, qui est bien dangereuse!
(A) Ms. L. B.: La disette y est, et aussi la peste,
La révolte parmi les habitants; l'un ' tue l'autre.
(B) Ms. L. B.: Mon Dieu, envoyez-moi hors de ce monde, terminez ma vie.
GRALON .
Me gare goûd ha me c'halle c'hoas caout pardon,
Ha me raë piniJenn, da drugarecad Roue ann trôn,
allas! na gredan ket avanturi mont en bent
Mes
Ewit cl~we(r avis a se gant ma c'herent.
LUSUFER.
Brema welan erfad e teus eur galon iar,
Pa breferes poan da blijadur war ann douar,
Ha c'hoas goude da souffranço oc'h ober pinijenn,
E renqui boud claouet, en creiz punz ann Hern.
Ha n'b~n deo ket gwelloc'h did besa fidel d'in-me,
Hac as bô piljapur er bed aIl, en em rassasia bemde ~
GRALON.
Nann! Nann! Speret malinn, te 'zo caus d'am zourmant,
o c'heul da avis, am eus grêt ma malheur, assurament,
Dre-ze, cuita eus ma c'halon, ha lez ma fobl ha me
c'houlenn pal'don euz ann ~ffanz bon eus grét da Doue.
LUSUFER.
Daonet 'vi coulzgollde, ha da bopl diskientet,
'm bô sonch bepred euz al' pez teus prometet ;
Rac me
da Doue, pa teus choazet ano,
Me ez eo
Cbom a rinn gant da bopl, cla ren 'n ho c'halono.
An Diaout cuit.
GRALON.
o Doue, ma c'hrouër, digorret ho tiouvreac'h,
Da soutenn ac'hanon, rac pounner eo ma beac'h ;
Keuz em eus da vezan ho tisanaveet, (A)
Mes setu ma niz arri ama sur d'am gwelet. (s)
(A) Ms. L. B. : - Queun emeus em halon da vout ho tizannaveet.
(B) Ms. L. B. : ' Guenole, ma nis devot, ma sicouret, m'ho ped,
Pe ma halon ~ ranno, gant glac'har d'am pec'het.
GRALLON.
Je vo.udrais savo.ir si je po.urrais enco.re être pardo.nné,
Et je ferais pénitence, po.ur remercier le Ro.i du ciel;
je n'o.se m'aventurer à me mettre en ro.ute,
Mais, hélas!
Po.ur entendre à ce sùjet l'avis de mes parents.
LUCIFER .
A présent, je vo.is bien que tu as un cœur de po.ule,
'Puisque tu préfères la peine au plaisir, sui' la terre,
Et enco.re après ta so.uffrance en faisant pél1"itence,
Il te faudra être damné, au milieu du puits de l'enfer 1.
Et ne vau t-il pas mieux po.ur to.i m'être fidèle;
Et tu ,auras du plaisir, dans l'autre mo.nde, à te rassasier to.us
[les jo.urs ~
GRALLON.
N o.n 1 no.n 1 Esprit malin, tu causes mo.n to.urment;
En suivant to.n avis, j'ai fait mo.n malheur, assurément, .
C'est po.urquo.i, so.rs de mo.n cœur, et laisse mo.n peuple et mo.i
Demander pardo.n de l'o.ffense qlle no.us avo.ns faite à Dieu.
LUCIFER.
Tu seras.po.urtant damné, avec to.n peu ple,qùi a perdu l'es
Car je me So.U viendrai to.Ujo.lHS de ce que tu m'as pro.mis: [prit,
C'est mo.i qui suis to.n Dieu, puisque tu m'as cho.si,
Et je resterai avec to.n peuple, po.ur régner dans leur cœur.
Le diable sort.
GRALLON .
o Dieu, mo.n créateur, o.uvrez vos bras,
Po.ur me so.utenir, car mo.n fardeau est lo.urd ;
Je regrette de Vo.us avoir o.ublié ; (A)
Mais, vo.ici mon neveu qui vient me vo.ir. (B)
(A) Ms. L. B.: ' , Jè me repents dans mon. cœur de vous avoir méconnu.
(8) Ms: L. B.: , Gwennolé, mon neveu dévot, secourez-moi, je vous prie,
Ou mon cœur, se brisera de douleur (à cause) de mon
[péché.
GWENNOLE a deu.
ma eontr, terrupi ho cavan contristet; (A)
Demad,
M'ho ped, mar plic'h ganec'h, contet d'in ar sujet.
GRALON.
Allas! dre ar glac'har ê mantret ma c'halon,
C'hoant em eus da distreï arre d'am relijion.
GWENNOLÉ.
Sire, mal' oc'h eus c'hoant da em gonvertissan,
vô rêd d'ac'h obel' al' pez a lavaran :
ann hanter ho mado d'al' baourienn,
Distribuin
sevei ilizo hac ober pinijenn, .
Lacâd
Covès ho pec'hejo, ar c'henta ma c'hallfet,
Gorill' pardon ouz Doue gant glac'har ha regret.
GRALON. -
'n eus ho inspiret, me a gred se certenn,
Doue
Da dont d'am c'honsoli, pa oann em brassa ankenn,
ractai da distribui ma moyenn, (B)
Dre-ze me 'c'h a
Eun darn d'ann ilizo, ann darn aIl d'al' baourienn,
Ha goude, p'am b6 grêt ann distribution,
ma fec'hejo, bars al' govesion.
'Tisclezrinn
o Gwennole, ma niz, c'hui garan dreist peb-tra,
me ho suppli da dont d'am assista,
Dre-ze
obel' eun dro d'al' gêr aIs,
Ma 'c'h efomb da
Ewit sarmon d'al' bopl, a zo gwall diavis. .
Discouez a refomb d'hê horreur ho hol! grimo, (c) .
Greomb d'hê distreÏ c'hoas ouz Roue ann nevo. (D)
fA) Ms. L. B. : - Debonjour, ma eontr, mes petra ho cra contristet?
(n) Ms. L. B.: Dre se me ha ractai da dispartia ma moyen. .
(e) Ms. L. B.: Disclei1' a reomp dê orreur 0 oU grimo.
(D) Ms. L. B. : GUÉNOLÉ.
Pa souetet, ma eontr, m'ho heuillo, assuret,
Hac a sarmi)l1o dê, en hano Salver ar bed,
Me a disclerio dê poent da boent al lezenn
A so commandet d'imp dre an tado ancien.
Hoi cuit.
GWENNOLÉ arrive.
Bonjour mon oncle; je vous trouve terriblement contristé. (~)
Je vous prie, s'Il vous plaît, de m'en dire le sujet. .
GRALLON.
Hélas 1 mon cœur est navré de donleur ;
Je veux retourner à ma religion (première).
GWENNOLE . .
Sire, si vous désirez vous convertir,
Il vous f.audra faire ce que je dis (vais dire):
Distribuer une moitié de vos biens aux pauvres,
Faire bâtir des églises et faire pénitence,
Confesser vos péchés, le plus tôt que vous pourrez,
Demander pardon à Dieu, avec douleur et repentir.
GRALLON .
Dieu vous a inspiré, je le crois certainement,
De venirmeconsoler,quand j'étais dans ma pIns grande angoisse ;
C'est pourquoi, je va!s immédiatement distribuer mes biens, (8)
Une part aux égiises et l'autre aux pauvres, _
Et, quand j'en aurai fait la distribution,
Je déclarerai mes péchés, par la confession.
o Gwennolé, mon neveo, je vous aime par-dessus tout,
C'est pourquoi je VOllS prie de m'accompagner,
Et nous irons faire un tour dans la ville d'Is,
Pour prêcher au peuple, qui est bien abusé;
Nous leur ferons voir l'horreur de leurs crimes (c), •
Et les amènerons à se détourner encore vers le Roi des cieux (Dl •
(A) Ms. L. B.: - Bonjour, mon oncle; mais qu'est-ce qui vous contriste?
(8) Ms. L. B.: C'est pourquoi je vais tout de suite distribuer mes biens.
(c) Ms. L. B.: Nous leur ferons voir clairement l'horreur de tous le~rs
. [crimes.
(0) Ms. L. B.: GWENNOLÉ.
Puisque vous le souhaitez, mon oncle, je vous suivrai, assurément,
Et je leur prêcherai, au nom du Sauveur du monde, .
Je leur expliquerai, de point en point, la loi
par les pères anciens.
Qui nous est commandée
Tous sortent •
Scenenn Dioltvet .
DOURVA, PIQUÈS, MARC'HARIDIC, eur bêlec.
DOURVA.
Arsa, camaraded, clewet em eus lâret
'N eus violet Gralon ar: $er'ment hen doa grét, (A) .
Rac he nÏz Gwennolé 'zo em gavet gant-han,
Ha dre gomzo clouar, 'n eus sodet an~han, (B)
Ha grêt d'ehan renonz d~hon doue J u piler;
Goulzgoude 'llezenn-man 'zo gwelloe'h eun ·hanter. (c)
PIQUES.
Liberté 'zo d'ann holl, ha dre-ze dale'homb mad,
Ha lezomb ar Roue hae he niz d'em lipad,
Arabad eo ober seblan t demeus a ze,
Mar deuomb d'ho imita, hor bezo keuz goude.
MANT AR, bêlee.
Breudeur ha c'hoarezed, Gwennolé 'zo abbad,
Hac hen eus goneet Gralon, m 'hen goal' er-vad ; (D)
Mès me zo iwe bêlee, hae am eus sclezrijenn
D'alloud assuri d'ac'h na eus kel a ifern,
Na kerneubeud diaoulo, evel ma lavarer ;
Eur wech ann den maro, eo achu he amzer ; (E)
N'eus met eUr société, en palès Lusufer, •
En pebini na vallq 1ra bed, nemet mizer.
MARGUERITE.
Ewit bout renoncet Gralon d'hon doue neve,
Na harz ket ac'hanomb d'ober hor bolonté ;
Lec'h ma cavfomb arc'hant, a vô rèd d'imb corner : .
Lezomb he niz hac hen ho daou da em ober.
Gralon ha G'wennolé a deu .
(A) Ms. L. B. : .- Penoz ar Roue GroHon a so convertisset.
(B) Ms. L. B. : Ha dre gomzou clouar a neus diodet anean.
(c) Ms. L. B. : Cousgoude el lezenn-man omp eurrussoc'h an anter.
(n) Ms. L. B.: Ha dre e eloquans ....•.
(E) Ms. L. B. : Eur yeach ann den maro, eo achu ann afer •
Scène deuxième.
DOURVA, PIQUÈS, MARGUERITE, un prêtre.
DOURVA.
Or ça, camarades, j'ai entendu dire
Que Grallon a violé le serment qu'il avait fait (A),
Car il a rencontré son neveu Gwennolé,
Qui, par des paroles doucereuses, l'a affolé
Et l'a amené à renier notre dieu Jupiter;
Et pourtant, cette loi est la moitié meilleure (c) .
. PIQUÈS.
Liberté pour tous, ainsi tenons bon,
Et laissons l~ roi et son neveu se lècher (se débrouiller) ;
Il ne faut pas y faire attention,
Si nous les imitons, nous le regretterons, plus tard .
MANTAR, prêtre.
et mes sœurs, Gwennolé est abbé,
Mes frères
Et il a gagné (converti) Grallon, sans doute (D) ;
Mais, moi aussi je suis prêtre, et j'ai assez de lumière
Pour pouvoir vous assurer qu'il n'y a pas d'enfer,
Pas plus que de diab!es, comme on le dit;
Une fois l'homme mort, son temps est fini (E);
11 n'y a qu'une société, dans le palais de Lucifer,
Où il ne manque rien, si ce n'est la misère.
MARGUERITE.
Bien que Grallon ait renoncé à notre nouveau dieu,
Cela ne nous empêche pas de faire à notre volonté;
Où nous trouverons de l'argent, il nous faudra prendre;
Laissons-le et son neveu s'entendre tous les deux.
Grallon et G\vennolé arrivent.
(A) Ms. L. B.: - Que le Roi Grallon s'est converti.
(B) Ms. L. B.: Et par des paroles doucereuses il l'a affolé.
Ms. L. B.: Cependant dans (avec) cette loi nous sommes la moitié
. [plus heureux.
(n) Ms. L. B.: Et par son éloquence ....
. (E) Ms. L. B.: Une fois l'homme mort, l'affaire est ten;ninée.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (Mémoires). 14
GRALON .
M'ho ped, ma bugale, da derc'hel ar silanz,
'c'h a da barlant aman en ho presanz .
Ma niz
GWENNOLÉ
o pobl abanqonnet gant crouër ann nevo 1
'Wit ho convertissa, selaouet ma c'homzo :
clemeus ho pec'hejo,
Deut da c'houlenn pardon
Ha d'ober pinijenn, a greiz ho calono.
maclo,
Re a c'hloar a gomerret, dre abondanz
'zo cauz d'ac'h d'ober kement euz a grimo ;
Gant ho mado moùdenn hac ho holl vanité
Allas! sperejo volach, 'c'h eus renoncet da Doue;
Holl vado ar bed-ma, gant ann dud re garet
'Zo cauz da galz a ineo da veza daémet,
Ha da goll ho-lod a varadoz Doue,
ann eternité ;
A oa grêt evidoinb hed
ar viço lubric pere a exercet,
Dre
En creiz punz ann ifern eur plas a breparet.
mar veac'h eur wech d'ann ifern condaonet,
Allas! •
andurin poan, en tan milliget ;
A renqfet
Eno 'pô da efa soufr ha plomm bervet,
ann holl diaoulo a vô ho consorted .
Hac
Chanchet crenn a vuhe, c'hoas hec'h allet ober,
ma 'z eo bezr ann amzer ;
Nonobstant coulsgoude
Goulennet ho pardon a galon ouz Doue,
Ha lavaret d'eh an renoncet d'ho gwall vuhe.
PIQUÈS.
Selll pe-seurt tourbillon 'zo em gavet aman 1
Me la"ar d'id n,a chanchfomb ket ar vuhe-man,
Mès ar c'hontrel cla-ze, war bouez ma fenn 'touan,
massacro, ha laero ma nesan .
Me violo,
GRALLON.
Je vous prie, mes enfants, de garder le silence,
Mon neveu va parler, ici, en votre présence.
GWENNOLE .
o peuple abandonné par le Créateur des cieux!
Pour vous convertir, écoutez mes paroles:
Venez demander pardon de vos péchés,
Et faire pénitence, du fond du cœur. '
Vous 'prenez trop de gloire (vanité), par abondance de biens,
Ce qui est canse que vous commettez tant de crimes;
A vec vos biens mondains et toute votre vanité,
Hélas 1 esprits volages, vous a vez renoncé à Dieu:
Tous les biens de ce monde, trop aimés des hommes, .
Sont cause pour tant d'âmes d'être damnées,
Et de perdre leur part du paradis du Dieu,
Qui nous était destiné pour l'éternité;
Par les vices de lubricité que vous commettez;
Vous vous préparez une place au milieu du puits de l'enfer!
Hélas 1 si vous êtes un jour condamnés à l'enfer,
Il vous faudra souffrir châtjment, dans le feu maudit:
Là, VOljS aurez pour boisson du soufre et du plomb fondus,
Et tous les diables seront vos consorts.
Changez absolument de vie, vous le pouvez encore,
Bien que le terme soit cependant court;
Demandez, de cœur, votre pardon à Dieu . .
Et dites-lui que vous renoncez à votre vie cou.pable.
PIQUÈS.
Voyez le trouble-fête qui s'est trouvé ici 1
Je te déclare que nous ne ehangerons pas de vie,
. Mais qu'au contraire, je le jure à haute voix,
Je violerai, je massacrerai et volerai mon prochain .
. DOURVA .
Na petor,e client 'zo deut d'hon tourmenti ?
Er gêr gaer euz a Is eo deut d'hon insulti,
eo d'imb sentinn euz he gomzo,
Mes arabad
C'heuillomb hor lezenn newez hac bor plijadurezo.
MARGUERITE .
Petra a servipb d'imb sonjal en pinijenno ~
Hirie omb beo, warc'boas marteze vefomb maro,
Gwe!et a reomb berndez ann dud 0 perissan, .
Ev~l ma cOlJeopt clanv, n' cQ.Qmont ket da lflnguissan. (A)
MANTAR.
Hac ar re-ze ~ec'b a d'ar palès ar société,
Ha ni, goude hon maro, em gavo eno iwe;
En em gonsolomb ba corrierromb plijadur,
muzur.
Rac bor rejouissanz er bed-aIl 'vô dreis1
\ GWENNOLE.
Penaoz eur ministr 'zo con sacret da Doue
A 20 en em roët d'ann Diaoul, corf hac ine?
MANTAR.
Petra paour imbicil ! ha sonjal a ra did
Ez omb-ni bugale, da dont da zentinn ouzid ?
Me 'zo ken sur ha te ne eus ke"t a diaou!o,
ann dud, goude ma vent maro ;
Da dourmentin
hanvet diaoulo a zo hol cr bed-ma
Ar-re
o valtl'eti 'n esclaved a rink gonid ho bara . .
GWENNOLE.
Allas! sur en despet d'hoû'h incredu!ite, (B)
Doue a fell d'ehan retornfeac'h d'he lezenn arre,
(A) Ces quatre vers manquent dans le manuscrit de M. de la Bordel ie,
et les quatre suivants sont mis dans la bouche de Mqrguerite, au lieu de
Mantar.
(B) Ms. L. B. : - Allas 1 ma bugale, en despet d'hoc'h incredulite •
DOURVA.
Quel est ce cliente ce drôle), qui vient ici nons tourmenter ~
Il vient nous insulter dàns notre belle ville d'Is, 1
Mais nous ne devons pas écouter ses paroles,
Suivons notre nou velle 101, et ri vrons-nou~ au plaisir.
MARGUERITE .
A qUÇ>i bon songer il: fJ:ire pénitence ~ ,
Aujourd'hui ,nous sommeseù viè, demain, peut-être, no.us serons
qui meurent, tons les jours, [morts;
Nous voyons les habitants
Et quand ils tombent malades, ils ne restent pas à languir (A).
MANTAR.
Et ceux-là (ceux qui meurent). vont au palais de la Société,
Et nous, après notre' mort, nous nous trouverons là aussi;
Consolons-nous et prenons du plaisir,
Car notre réjoLlissance, dans l'alltre monde, sera sans bornes.
'GWENNOLE.
Comment un ministre consacré à Dieu
S'est-il donné a u diable, corps et âme ~
MANTAR.
Comment, pauvre imbécile, crois-tu donc
Que nous sommes des enfants prêts à t'obéir 1 '
sûr que toi qu'il n'y a point de diables,
Je suis aussi
Pour tourmenter les gens, après leur mort ;.
Ceux qu'on nomme des diables sont tous dans ce monde,
Maltraitant les esclaves obligés de gagner leur pain .
GWENNOLE .
Hélas! certes, en dépit de votre incrédulité (B),
Dieu désire que vous retourniez à lui,.
(A) Ces quatre vers manquent au Ms. La Boraerie, et les q'uatre sui
s'y" trouvent dans l'à fiOüë1iè' dé' Mafg'ùei~i(è, au fieu' de Manlât.
vants,
(B) Ms'. L. B'.: H'élas! mes enfants, en dépit de votreîncréduHté.
Rac gwelet a ra bemdez etrezoc'h cassoni,
'A nn eil hac egile euz en ena egorgi ;
Se ra d'ehan digass warnoc'h hol he glen ved, (A)
o sonjal e teufac'h hol da vea mignoned .
PIQUES, en coler.
Serr da c'heno, mar cares, pe me'm bô da vuhe,
Ha kerz euz ar gêr-man, hipocrit Gwennole ;
En dismeganz d'as comzo, ni raïo publia
Er gêr-man, epad ann noz, danso ha tân a joa ;
Cuita prompt ar gêr-man, achu da doctrino,
0 clewet da gomzo.
Rac ni 'zo pell-zo scuiz
GWENNOLE.
Allas! d'ar gwir Doue hoc'h eus crenn renoncet,
Ar pez 'raï hol malheur, rac hol vefet collet,
Sodom ha Gomorrh, dre dan ann nef devet,
Vel
Mes c'hui dre al' mor gourmand a vezo hol lonket ;
'ra indan ho kêr, dre bermission Doue,
Mina
pa vÔ he volon te :
Hac a vefet lonket,
Na eus nemet he c'hraz a soutenn ac'banoc'b,
d'ehan, eo fachet diouzoc'h.
Mes, pa renoncet
Allas 1 ma breudeur paour, provoket ê ann arret,
gwir justiz Doue souden a confontfet. "CB)
Dre
DOURVA.
En despet d'as comzo, poëson abominabl,
Ni'n em divertisso, a vevo dilicat,
efo hac a roulo dinço,
Me danso, me
A garesso merc'hed, hac a vesco carto.
PIQUÈS.
Ar gaouiad-man 'zo deut aman d'hon tourmanti,·
Ha o mar na gar raï peuc'h, me c'h a d'hen etrangli,
(A) Ms. L. B. : - Se ra dean gant douster digas warnoc'h clenved.
(8) Ms. L. B. : Dre justis ar gwir Doue, etc ...•
Car il voit, chaque jour, entre vous de la haine,
L'un égorgeant l'autre;
Cela lui fait envoyer sur vous sa maladie (A),
Songeant que vous deviendrez tous amis (entre vous) .
PIQUES, en colère.
Ferme ta bouche (tais-toi), si tu veux, ou j'aurai ta vie,
Et vê1:-t'en de cette ville, hypocrite Gwennolé;
En mépris de tes paroles, nous ferons publier,
Dans la vine, durant la nuit, danses et feu de joie.
Quitte, vite, cette ville, finis-en avec tes doctrines, .
Car nous sommes, depuis longtemps, las d'entendre tes paroles.
GWENNOLÉ.
Hélas! vous avez renoncé net au vrai Dieu,
Ce qui fera votre malheur, car vous serez tous perdus,
Comme Sodome et Gomorrhe, consumés par le feu du ciel.
par l~ mer gourmande vous serez tous engloutis;
Mais vous,
Elle mine sous votre ville, par la permission de Dieu, .
Et vous serez engloutis, quand ill~ voudra:
Il n'y a que sa grâce à vous soutenir,
il doit être courroucé contre vous .
Mais, puisque vous le reniez,
1 mes pauvres frères, l'arrêt est provoqué (prononcé 1),
Hélas
Et par la vraie justice de Dieu, soudain vous serez confondus! (B).
DOURVA.
En dépit de vos paroles, poison abominable,
Nous nous divertirons, vivrons délicatement,
Je danserai, je boirai, je roulerai les dés,
Je caresserai les fines et mêlerai les cartes .
PIQUES.
Ce menteur est venu ici pour nous tourmenter,
Et, s'il ne veut pas se taire, je vais l'étrangler,
(A) Ms. L. B.: - Cela lui fait avec douceur envoyer sur vous maladie.
(B) Ms. L. B.: - Par la justice du vrai Dieu, etc ..•
Hac evit mepris'a kerbeilt hen eus lâret,
'raï peb fallenté, keït ha ma viun er bêd.
MANTAR .
Ha me,. camaraded, a in vanto viço,
Ewit prouvi d'ehan ez eo faoz he gomzo,
Ha leiz ma c'horf a winn bernde me a efo,
Ha mar an d'ann ifern, ar gordenn d'am c'hrougo !
GRALON.
. Troët eo ho speret, herve ma comzet tout;
Gwelloc'h ve d'ac'h senti, rac braz vô ho hirvoud,
'n eus preparet pu nition 'widoc 'h .
Doue
MARGUERITE.
G1'a10n, lest ac'hanomb tranquil, ha roët peoc'h.
GWENNOLÉ.
Gwelet a l'et, ma eontr, na paotred, na merc'hed
Na reont van demeus al' pez am eus lâret,
Ha pa na allan ket dont d'ho c'hon vertissan,
d'ho lezel gant-hê aman.-
Me hec'h a d'ho cuitad,
la, ma eontr, chomet gant-he, c'hoaz eun tri devez,
'Wit ho c'honvertissa, bars" ann derv~t nozvez,
Rac kement 'vô en noz-ze er gêr demeus aIs
A vô hOl confonted ; Doue a raï justis . .
Mes kent ho cuitad, ma eontr, hoc'h avertissan
Da selao mad pa gommanço ar c'hôg da ganan :
Da dec heur e cano, hac a em breparfet,
Hac e cuitafet kèr, buhanna ma c'hallfet,
Rac pa reï ann ei1 canadenn, 'vô poent hastan
" Equipa mad ho marc'h 1 heb sellet war ho lerc'h :
Mar em gavet dies; ho bet recours d'in-me, (A)
Ha me raï d'ac'h assistanz, en ho necessité.
(A} Ms. t. H. : Ha pa gâno an derved gl1ech, neuze a vô red d'ec'h
Galompad ho mar'C'h, ~rec'h-traon, ep seHet voar ho lere'h.
Et, par mépris de tout ce qu'ii a dit,
Je fe!'ai tout ce qui est mal, pendant que je serai àu monde.
. MANTAR.
Et moi, camarades, j'inventerai des vices,
Pour lui prouver que ses paroles sont fausses,
Et plein mon corps de vin, tons les jours, je boirai,
Et si je vais en enfer, que la corde m'étrangle 1
GRALLON .
Votre esprit est tourné (faussé), d'après la manière dont
[vous parlez tous;
Mieux vous vaudl'ait obéir, car votre affliction sera grande,
Dieu vous a préparé une punition.
MARGUERITE.
Grallon, laissez-nous tranquilles, et donnez-nous la paix.
GWENNOLE.
Vous le voyez, mon oncle, ni hommes ni femmes
Ne font cas de mes paroles,
Et, puisque je ne puis les con vertic,
Je vais vous quitter et vous laisser ici avec eux.
Oui, mon oncle, restez avec eùx encore trois jours,
PO~lr les convertir, la troisième nuit,
Car tout ce qui se trouvera, cette nuit:là, dans la ville d'ls
Sera englouti; Dieu fera justice.
avant de vous quitter, mon onde, je valls avertis
Mais,
De bien écouter quantI le coq cominenéera à c'banter.
A dix heures, il chantera, et vous vous préparerez,
Et vous quitterez la ville, le pl.us vite que vous pourrez,
Car quand il fera son second chant, il sera temps de se hâter
D'équiper \'otre cheval, sans regarder derrière vous (A) :
Si vous vous trouvez dans l'embarras, ayez recours à moi,
Et je vous donnerai assistance, clans le besoin.
(A) Ms. L. B.: - Et quand il chantera pour la troisième fois, alors il
[vous faudra.
haut ct bas, sans regard.el'
Faire galoper votre cheval,
[derrière vous .
GRALON.
. Ma niz santel, me reï evel m'hoc'h eus lâret,
M'ho executo hol, heb manquoud tra er-bed.
GWENNOLÉ
Adieu eta, ma eontr ha c'hui iwe, tud paour,
Pa na sentet ouzin, na ouffenn ho sicour.
Mont a i'a cuit.
MANTAR.
Me oa peU 'zo scuiz 0 clewet ann imbicil-ze,
Ha chanz eo d'ehan pa eo êt gant-han he vnhe.
GRALON, d'ann daoulinn, a gân.
Aotro Doue, gwir scfezrijenn,
ma iedenn,
M'ho ped, exaucet
ar c'braz, Salwer ar bed,
Reït d'in
ac'hann, heb drouc e-bed,
Da vont
Doue,-ma zad, ma c'honsolet,
A dristidigès on carget,
Rac ma fobl paour a zo collet;
Mar eus moyenn, ho fardonet.
Ma zud, me ho ped a galon
Da c'houlenn ouz Doue pardon,
N'oc'h eus mui' nemet tri devès,
Da ober ho silwidigès.
PIQUÈS.
Gralon, me ho ped da reï d'imb patianted;
En hor gêr a Is, ni na em enaouomb ket;
Birvikenn hon plijadur hac hon c'hontantament
Na vont abandonnet 'wit clewet comzo neant.
GRALON .
Doue eternel, biscoas n 'oc'h eus crouët
Tud ken mechant nae ive ken obstinet ;
. GRALLON.
Mon sàint neveu, je ferai comme vous av" ez dit,
sans manquer une
J'exécuterai toutes (vos recommandations),
. , [seule.
GWENNOLE .
Adieu donc, mon oncle, et vous aussi, pau vres gens,
Puisque vous ne m'obéissez pas, je ne puis vous secourir.
MANTAR.
J'étais depuis longtemps las d'entendre cet imbécile,
Et il a eu de la chance de s'en aller en vie.
GRALLON, à genoux, chante . .
Seigneur Dieu, véritable lu mière,
en prie, exaucez ma prière;
Je vons
Donnez-moi la grâce, Sauveur du monde,
aucun mal.
De sortir d'ici sans
Dieu, mon père, consolez-moi,
De tristesse je suis chargé,
Car mon pau vre peuple est perdu .;
S'il ya moyen, pardonnez leur.
Mes gens, je vous prie de cœur
De demander pardon à, Dieu,
Vous n'avez plus que trois jours
Pour faire votre salut .
PIQUES .
Grallon, je vous prie de nous donner patience (la paix) ;
ennuyons pas;
Dans notre ville d'Is, nous ne nous
Jamais notre plaisir et notre contentement
Ne seront délaissés, pour écouter des paroles vaines.
GRALLON.
Dieu éternel, jamais vous n'a vez créé
obstinés;
De gens si mé,chants et aussi si
Na oa ket el' bed-man a gaeroc'h eget Is,
Rom hac al' e'hêrio ail a oa d'ezhi dispris,
Ha setu-hi war ar poent da vea eonfontet)
Balamour d'ar viço 'zo en-hi commetet.
, DOCRVA.
Peira a serviC'll d'id conta eaujo, na goela "?
Te éo anl1 hil1f a i'oas d'imb aU lezenn-man,
Ha brema, pa weles ac'hanomb 'n em amusi,
A teus c'hoant adarre a renoozfemb d'ezhi ~
MANTAR.
Oh ! emdromplan a ra, en creiz he dao'ulagad,
Pa blich d'imb hon lezenn, ni .d'alc'ho d'ezhi mad.
MÀRGUERITE.
~ Mar na gal' ket rei peuc'h, ha cnitad ac'hanomb,
l'actaI d'ober d'ehan affront.
Me hec'h a
GRALON.
Peuc'h Doue da vô ganec'h, rrial' dê he volonte,
Rae me 'c'h a d'ho cuitâd ha da chench a gontré ;
ran ma c'hêr, gant cals regret
Ja, cuitaad a
Abalamour d'ec'h, pe 'vinn iwe collet;
Setu ann noz diveza ma antreomb en-hi;
Birwikenn, ma zud paour, er bed-man n'ho cwelin,
ISMENEO,> bêlec, a deu.
Salu\ Roue Gralon, me 'zo deut d'ho éwelet,
Da c' hou lenn diganec' h pegoulz a parti fet,
Rac c'hui a voar ann heur, hervez am eus clewet,
Ma dIe ar gêr-man hac he zud beza hol collet.
GRALON .
al' bêlec braz euz al' fe eatholic,
Aotro
Poent ê em brepari nac ewit monet-cuit,
Ann theate a deu da yra tofal.
Homan 'n diveza nozv'ès, dre-ze hoc'h assuran
Birwikenn sklezrijenn fi' 'iTÔ gwelet ken aman;
Il n'y avait pas, dans ce monde, de plus belle (ville) qu'Is,
Rome et les autres ;villes étaient sans prix anpllès .d'~lle,
Et la voilà sur le point d'être engloutie,
y sont commis!
A cause des vices qui
DOURVA.
A quoi te sert de nous conter des contes, ni de pleurer?
Tu es celui qui nous donna cette loi,
Et, à prèsent, que tu nous vois nous amuser,
Tu voudrais encore nous y voir renoncer! C I')
MANT AR.
Oh ! il se trompe, au milieu de ses yeux, (je le lui dis en
Puisque notre loi nous plaît, nous la garderons. [face;)
MARGUERITE.
S'il ne ve.ut pas se taiee et nous quitter,
à l'instant, lui faire un affront.
Je vais,
GRALLON .
Que la paix je Dieu soit avec vous, si c'est sa volonté,
Car je vais vous quitter et changer de contrée:
Oui, je quitte ma ville, avec beaucoup de regret,
perdu;
A cause de vous, ou je serai
Voici que nous entrons dans la dernière nuit:
Jamais, mes pauvres gens, je ne vous reverrai, dans ce monde.
ISMENEO, prêtre, arrive.
Salut, Roi Grallon ; je suis venu vous voir,
Pour vous demander quand vous partirez,
Car vous connaissez l'heure, d'après ce que j'ai entendu,
Où cette ville et ses habitants doivent tous être perdus.
GRALLON.
Monsieur le grand prêtre de la foi catholique,
à partir.
Il est temps de se préparer
Le théâtre devient sombre.
Voici la dernière nuit, et je vous assure
ici;
Que jamais la lumière ne sera plus vue
(*) Ces quatre vers manquent au manuscrit L. B .
Mès a-raoe ma fonto, vefomb avertisset ·
Dre al' gân eus ar e'hog, Doue hen eus lâret ;
He dervet eanadenn a vô ann diwezan,
eur c'hard heur goude, 'v6 collet ar gêr-man.
A-raoe
ISMENEO .
M'ho ped d'am permetti da vont ganee'h iwe,
distrflÏ c'hoas euz Doue. . .
. Rac me 'zo resol vet da
GRALON.
Content on, Ismeneo, a teufac'h ganen-me,
Mès selaouet mad penaoz a vezo rèd bâle :
Pa vefomb 0 cuitâd ar gêr truezus-man,
E clewf01llb war hon 1ere'h elln alarm al' vrasan,
Ha mar meomb ar malheur da distreï da sellad,
v6 d'imb bikenn em sauvetad.
Impossub1 a
ISMENEO .
Oh 1 na zistroÏnn ket da sellad war ma lerc'h,
iwe perissa war al lee'h,
Gant aoun rinqfenn
na oun ket curius,
Me c'heuillo ac'banoe'h,
Ha n'am ellS ket a c'hoant da vea maleurus .
GRALON.
Demp eta, buhan, da em brepari hon daou,
Ha comerromb peb a varc'h, pere hon dOllgOIl :
ma zud paollr, me hec'h a d'ho cuitad ;
Adieu 'ta,
Poan a ra d'in, pa na allan ho sauvetad.
Ar Roue bac ar bêlec cuit .
DOURVA .
Bon 1 setu eun imbicil ail 0 vonet gant-ban!
Rèd 've troët ho spered, me a gred se breman .
PIQUES.
Heman ê 'r sota Roue am eus biscoas .gwelet,
Pa doug fe da eun .dra ha na arruo ket,
Hac ewit discouez d'ehan na deuomb ket d'ben credi,
ann noz-ma bars ann hostelÏl'i, .
E rencomb tremenn
Mais avant qu'elle (la ville) soit engloutie, nous serons avertis -
Par le chant du coq: Dieu l'a dit;
Son troisième chant sera le dernier;
Avant un quart d'heure après, cette ville sera perdue.
ISMENEO.
Je vous pr~e de me permettre de vous accompagner,
Car je suis résolu à retourner à Dieu. .
GRALLON.
Je suis content, Ismelleo, que vous m'accompagniez,
faudra marcher (se conduire :)
Mais, écoutez bien comment il
malheureuse ville,
Au moment. où nous quitterons cette
alarme,
Nous entendrons derrière nous une grande
Et si nous avons le malheur de nous retourner pour regarder,
Il nous sera impossible de jamais nous sauyer.
ISMENEO.
Oh! je ne me retournerai pas pour regarder derrière moi,
De peur qu'il me faille aussi périr sur le lieu;
Je vous sni vrai, je ne suis pas curieux,
Et je n'ai pas envie d'être malheureux.
, GRA.LLON.
Allons donc, vite, nous préparer tous les deux,
Et prenons chacun un cheval, pour nous porter:
Adieu donc, mes pau vres gens, je vais vous quitter:
J'éprouve de la peine de ne pouvoir vous sauver.
Le Roi et le prêtre s'en vont.
DOURVA.
Bon 1 voilà un autre imbécile qui part avec lui 1
Il faut qu'ils aient l'esprit tourné (soient fous), je le crois à
, . [présent.
PIQUES
Celui-ci est le roi le plus sot que j'aie jamais vu,
Puisqu'il porte foi à une chose qui n'arrivera pas,
Et pour lui montrer que nous ne le croyons pas,
nuit à l'auberge,
Il nous faut passer cette
(*) On dirait une réminiscence de la destruction de Sodome et de Go-
morrhe.
D~ cl~bri, da efa,n ha da em divertjssan ;
Ni a vesko carto hac a raï goab ouhban.
MANTAR .
eun hotel a vô brao ewidom b ;
Setu aman
Ama 'vô rentet d'imb kement a c'houlenfomb.
Clewet 'ta, hostisès, digasset cadorio,
taol; digasset iwe carto,
Da azean eus
Pastezio ha gwinn mad, liqueur, dour-a-vube,
Ma tremenfomb ann noz-man en hon tranquillité. .
Ann HOSTISÈS, 0 serviji .
am eus lojet
Arabad ober trouz, hennoas
Cals a veajourienn, hac a zo reposet :
Setu aze, aotronez, al' pez 'c'h ellS goulennet.
MANTAR.
C'hui a bhj d'in; en-bezr, causefomb eun neubeud ;
Mès laket d'imb goulo, ewit ma welfomb selezr,
al' c'harto ba da garg1n bon goer.
Da vesquan
Lacad a rel' goulo wal' ann dao!.
Ann HOSTISÈS.
En em recreet mad, ann eil hac egile, (A)
Me 'c'h d'azean aman, ewit mal' ho café. '
Azean a ra .
Warc'hoas, eoulz ha hi rio, a vezo ama pres,
al' varc'badourès.
Hac a rincan prepari a-raoe
DOURVA .
'ta commançomb da veskan al' c'barto,
Brema
ha demeus be gomzo.
Greomb goab euz Gralon
grét ann dorn da genta,
Allons, Marc'baridic,
Me 'c'h a da discarga peb a vanné da efa.
Üher a rer .
(A) Ms; L. B. : En em recreet evit ho arc'hant, ann eH hac eguile.
A manger, à boire et à nous divertir: ,
Nous mêlerons les cartes et nous moquerons de lui.
MANTAR.
Voici un hôtel où nous serons bien;
Ici, on nous donnera tout ce que nous demanderons.
Ecoutez, hôtesse, apportez-nous des cbaises
Pour nous asseoir à table; apportez aussi des cartes,
bon vin, liqueurs, eau-de-vie,
Des pâtés et de
Pour que nous passions cette nuit tranquilles.
L'Hôtesse, servant.
Il ne faut pas faire du bruit; j'ai logé, cette nuit,
Beaucoup de voyageurs, qui reposent:
Voilà, Messieurs, ce que vous avez demandé .
MANTAR.
Vous me plaisez, hôtesse; tantÔt nous ca userons ensemble;
Mais, mettez-nous de la chandellle, afin que nous voyions clair,
Pour mêler les cartes et remplIr nos verres.
On met de la chandelle sur la table.
L'Hôtesse:
Amusez-vous bien, les uns et les autres,
da café (36.)
Je vais m'asseoir ici, pour vous moudre
Elle s'assoit.
il y aura presse, ici,
Demain, comme aujourd'hui,
Et il me faut préparer à !'avance ma marchandise.
DOURVA.
A présent donc, commençons à mêler les cartes,
Et moquons-nous de Grallon et de ses paroles.
Allons! Marguerite, faites la main, la première,
Je vais verser à chacun une gou tte à boire.
On le fait.
(..\) Ms. L. B.: Récréez-vous pour votre argent, les UQS et les autres.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XVI. (Mémoires). 15
~ARC'HARIDIC.
Brema comerret ho jeuio, ha me ma hini,
Ha c'hoariomb bettenn; ar jeu-ze a blij d'in .
Obera ra tân, curun, awel, glao braz, tevalijenn.
Mès petra eo ann drouz-ze, ken a gren hol ann ti ~
Ma c'halon lamp em c'hreiz, ma goad santan 0 virvi.
PIQUÈS.
.Ah bast ! ann awel noz 'zo 0 c'hoari he benn,
Mès me na spontan ket, pa ven crog 'n eur voerenn .
Efan a reont .
MANTAR .
Continuomb hon jeu, ha na souciomb ket,
'Wit clewet ann awel, curuno ha luc'het,
Se n'eo ket eur marvail d'ober d'imb estoni.
DOURVA .
Nann : meur a-wech ann tempest a ve a uz d'imb-ni :
ha na estonet ket, .
Grêt attention d'ho jeu,
Pe mar grêt eun defaut brema, vefed bettet. .
C'hoari hac efa a reont.
Scenenn terved.
GRALON, ISMENEo, er fonz. -- Ar c'hog a gân eur weoh.
Siouas 1 me glew ar c'hog da dec heur 0 cana:
Depechomb, Ismeneo, poent ê d'imb partia.
ISMENEO.
Sir, en peb-tra. am eus grêt ma freparation,
heur 0 sôn .
Mès selaouet, me a glew eunnec
. Clewed a rer eunnec heur, hag ar c'hog a gân adarre .
GRALON.
Setu ann eU canadenn; tostad 'ra ann amzer ;
Comerromb hon c'hezec, cuitaomb buhan kêr,
MARGUERITE.
A présent, prenez chacun son jeu, et moi le mien,
Et jouons la Bête (37); ce jeu-là me plaît.
Feu, tonnerre, vent, grande pluie, ténèbres.
Mais, que signifie ce bruit, qui fait trembler toute la maison 1
Mon cœur saute, dans ma poitrine, je sens mon. sang bouillir .
PIQUES.
Ah bast ! c'est le vent de nuit qui fait des siennes ..
Mais, moi je ne m'effraye de rien, le verre à la main.
, Ils boivent.
MANTAR .
Continuons de jouer, et ne nous inquiétons pas,
Pour entendre le vent, le tonnerre, (voir) les éclairs,
Cela n'est pas une merveille pour nous étonner.
DOURVA.
Non; la tempête est souvent au-dessus de nos têtes;
à votre je.u, et ne vous effrayez pas;
Faites attention
Si vous faites, à présent, une faute, vous serez bête
, Ils jouent.
Scène troisième.
GRALLON, ISMENEo, au fond. Le coq chante pour
la première fois.
GRALLON.
Hélas! J'entends le coq de dix heures qui, chante:
Hâtons-nous, Ismeneo, il nous est temps de partir.
ISMENEO.
Sire, j'ai fait mes préparatifs en toute chose;
Mais écoutez, j'entends sonner onze heures.
On entend sonner onze heures, et le coq chante de'nouveau .
GRALLON.
C'est le second chant; le moment approche;
Prenons nos chevaux et quittons, vite, la ville,
Gant aoun boud surprenet gant a1," mor coleret,
Hac eo poent d'imb hastan, keït ha ma 'z omb abred.
Ar c'hog a gan \-vit al' wec'h ,di veza.
ISMENEO.
Demb en hano Doue deuz ar gêr gaer aIs,
Rac hanternoz eQ arru, eo ann heur a justiz.
(Tempest al' gwasan; ann hanternoz a zôn.)
GRALON.
Me glew ann hanternoz bac ar c'hog asamblès ;
Gwall di vezad omb chomet da em denna er maès 1
ToI theatr. Mont-cuit, ha dont dre eun tu, ha mont
à rer criaI.
dre eun tu aIl Clewet
ISMENEO .
Ob ! na pabeus alarm a glewan dreg ma c'heinn 1
Rèd ê d'in gwelet petra a ra kement a dreinn.
Sellet a ra, hac e chom en statu, hac ar re 'zo euz
taol a chom hol heb bouj iwe.
GRALON, war he c'heno er more
Allas! ma Doue, aman 'rinquan perissan,
Tapet on gant ar mor, ha ma marc'h 'zo scuis dija;
En eur ober eur c'hart heur ez eo Is conqueret,
Douar ha tier, tud ha loened confontet,
Hac ar mor braz astennet en-clro d'in!
Ann tempest a finis .
o Doue, ma c'hrouër, aman e perisinn,
Tolet on, ar wec'h-man, en creiz ar c'hanal braz !
Gwennole, ma niz, ma sicouret dre ho c'hraz,
Peùet Doue ewidon, ewit ma em denninn
Euz an tourbillon mor, rac prest on da veuÏn 1
Gwennole a deu.
GWENNOLE
Sir, me ho sicouro, gant ar c'hraz a Doue:
Lezet ho marc'h da vont, pe e chomfet aze :
De peur d'être surpris par la mer en courroux,
Et il nous est temps de nous hâter, pendaht que hous sommes
[assez tôt.
Le coq chante pour la dernière fois.
ISMENEO.
Quittons, au nom de Dieu, la belle ville d'Is,
Car minuit arrive; c'est l'heure de la justice.
Tempête épouvantable; minuit sonne.
GRALLON.
J'entends (sonner) minuit, et le coq qui chante en même
Nous sommes restés bien tard pour 'nous tirer d'affaire. [temps;
Changement à vue. Grallon et Ismeneo sortent, par
, un côté, rentrent par l'autre côté, et sortent encol'e.
On entend crier.
ISMENEO.
Oh ! les cris d'alarme que j'entends derrière moi!
Il faut que je voie ce qui fait tant de train.
Il regarde derrière lui, et est changé en statue, et ceux
qui sont attablés restent immobiles de frayeur.
. GRALLON, sur sa bouche dans la mer.
Hélas! mon Dieu, il faut que je périsse ici!
Je suis atteint par la mer, et mon cheval est déjà fatigué;
En un quart d'heure, Is a été conquise (par la mer),
Terre et maisons, hommes et bêtes, tout a été englouti,
Et la grande mer est étendue (partout) autour de moi:
La tempête prend fin.
o Dieu, mon Créateur, je périrai ici 1
Je suis rejeté, cette fois, au milieu du grand canal.
Gwennolé, mon neveu, senourez-moi, par votre grâce,
Priez Dieu pour moi, pOUI que jé me tire
Du tourbillon de mer, car je vRis me noyer 1
Gwennolé arrive.
GWENNOLE.
Sire, je vous aiderai, avec la grâce de Dieu:
Laissez' aller votre cheval, ou vous resterez là :
En hano ann Tad, ar· Mab hac al' Speret Santel,
aman tost d'ar roc'hell,
Tostaët gant courach
Roët-hu d'in ho torn, en hano Doue ann Tad.
Reï a ra ar Roue he zorn, hac ez ê sauvetet.
ez ê serret he daou lagad !
Allas! me weI
Ho pet fizianz, ma eontr,en Doue, Roue an trôn,
c'hui sortiet breman euz ann tourbillon; .
Setu
en bord ann aod î (A)
Azeet da discuizan aman,
Ha greomb vœu da Doue, 'wit hen trugarecad;
ar roc'hell-ma, me 'meus ho sauvetad, (B)
Diwar
Ha dre-ze am eus c'hoant a ve eur groaz placet,
ann andret dre bini oc'h sorti et
Da verquan
ar gêr â Is, pa 'z eo bet confontet.
Demeuz
GRALON .
Gwennole, ma niz ker, elre wir devotion,
~n ho relijion ;
Me chomo ganec'h da vewa
Ar bêlec Ismeneo oa arru ganen iwe,
eo er mor, da rtntan he ine, (c)
Mes chomet
. Rac he guriosite 'zo bet caus d'he valeur,
Sellet a rez war he lerc'h, pa glewas ann horreur
al' gri-fol'z pini 're ann habitanted ;
Deus
ar mor, a em gavent nec'het.
Dre ma cresque
GWENNOLE .
bea bet ken curiuz-ze,
Mar carje non-pas
Hen dije. coulz ha c'hui savetet he vuhe.
ma eontr, m'ho suppli·da dont ganen breman
Mès,
D'am zi, 'wit ma c'hallfet donet da discuizan.
GRALON.
Gant joa ha carantez, ma niz, me. iel' ganec'h;
ar pez a blijo d'ec'h.
Me a raïo bepred
(A) Ms. L. B. : - Azeet da . discuizan aman en bord ar c'hoad.
(B) Ms. L. B. : Divoar ar roc'h huël-ma me meu s ho sovetet.
(c) Ms. L. B. : Mès allas! chomet eo er mor da finissa he vue.
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit,
Approchez avec courage de ce rocher;
Donnez-moi la main, au nom de Dieu le Père.
Le Roi donne la main à Gwennolé et il est sauvé.
Hélas! je vois que ses yeux sont fermés! .
Ayez confiance, mon oncle, en Dieu, le Roi du ciel,
Vous voici sorti, à présent, du tourbillon;
'Asseyez-vous, pour vous délasser, ici au bord de la mer (A),
Et faisons vœu à Dieu, pour le remercier.
De dessus ce rocher, je vous ai sauvé (B),
C'est pourquoi je désire qu'on y place une croix,
Pour marquer J'endroit par lequel vous êtes sorti
De la ville d'Is, quand elle a été engloutie.
GRALLON .
Gwennolé, mon neveu chéri, par vraie dévotion,
Je resterai près de vous, pour vivre dans votre religion;
Le prêtre Ismeneo venait aussi avec moi,
Mais, il est resté dans la mer, pour rendre son âme (c),
Car sa curiosité a causé son malheur:
Il regarda derrière lui, quand il entendit l'horreur
Dea cris de détresse q ne poussaient les habitants;
A mesure q'Je la mer croissait, ils se trouvaient inquiets.
GWENNOLE .
S'il avait voulu n'être pas si curieux,
Il aurait, comme yous, sauvé sa vie.
Mais, mon oncle, je vous prie da venir avec moi, à présent,
A ma maison, pour que vous puissiez vous reposer. .
GRALLON.
Avec joie et amour, mon ne\'eu, j'irai avec vous;
Je ferai toujours ce qui vous plaira.
(A) Ms. L. B.: - Asseyez-vous pour vous reposer ici, au bord du bois.
(n) Ms. L. B.: De dessus ce rocher élevé, je vous ai sauvé.
(c) Ms. L. B.: Mais hélas! il est resté dans la mer, pour terminer sa vie .
Me raïo pinigenn demeus ma fec'hejo ;
Rac siouas ! me 'zo caus a gement a walleurio.
Mar carjenn bea dalc'het lezenn ar Gristenienn,
N'hon bije ket souffret kement euz a ankenn.
GWENNOLÉ.
Achuët ho glac'har, na son jet mui en se,
Ha demp da c'houlenn pardon demeus ar gwir Done .
Hol cuit.
- FIN D'AR BEMPVET ACT. -
ACT C'.HUEC'HVET
Ann theatr a represant eur c'hampagn .
Scenenn Kenta.
ARISTOLO, ADRISPAN, BELGAR, laëron.
ARISTOLO.
Me 'zo eun den puissant hanvet Aristolo,
Me a 'zo heb ma far leun a finesseo,
Ha bea am eus c'hoas tud fidel d'am soutenn,
Ha pa vank d'in arc'hant, e teuont d'am c'helenn,
Da lâret d'in pelec'h a ve ann tensorio,
Ha dont ganen d'ho c'herc'had, heb tan complimantj'O.
amzer a zo n'oun ket em exercet,
Mès pell
Ar wech"man, rinquan ober, en defaot caout boed ;
Manquet ê 'r brovision demeus ann ampled,
Kercoulz deus a arc'hant evel demeus a hed ;
Dre-ze em breparomb d'ober eun dra benac,
Rag gwelloc'h eo d'jmb quic eget eskern da lipad.
. BELGAR.
Ma mestr, ma c'habitenn hanvct Aristolo,
Me voar pelec'h ez eus hed, leiz a grignelo,
Je ferai pénitence de mes péchés,
Car, hélas! je suis la canse de tant de malheurs;
Si j'avais voulu rester fidèle à la loi des chrétiens,
Nous n'aurions pas éprouvé tant de désolation.
GWENNOLÉ.
Mettez un terme à votre douleur, ne songez plus à cela,
Et allons demander pardon au vrai Dieu.
Tous s'en vont.
FIN DU CINQUIEME ACTE.
ACTE SIXIÈME
Le théâtre représente une campagne.
Scène première.
ARISTOLO, ADRISPAN, BELGAR, voleurs.
ARISTOLO.
Je suis un homme puissant, nommé Aristolo,
sans pareil plein de finesses,
Je suis
Et, j'ai encore à mon service des gens fidèles,
Et quand il me manque de l'argent, ils me conseillen't
Et· me disent où il existe des trésors,
Et m'accompagnent pour les aller prendre, sans hésitation.
Mais, il y a longtemps que je n'ai pratiqué,
Cette fois, il me le faut faire, à défaut de vivres;
La provision a manqué de nos emplette.Ii (~) C·)
AussÎ bien d'argent que de blé;
C'est pourquoi, préparons-nous à faire quelque chose,
Car nous aimons mieux de la viande que des os à lécher .
BELGAR.
Mon maître, mon capitaine nommé Aristolo,
Je sais où il y a du blé, plein les greniers;
(*) Je ne connais pas, en breton, de mot a~pled; à moins que ce ne
(?). Dom Le Pelletier trouve dans la JJes
soit le mot français emplette
t'ruction de J~rusalem, le mot amplec, qu'il ne sait lQi-même comment
traduire,
Demp eta da ober provision da genta, (A)
Cren voc'ha vô hon c'haus, pa meomb danve bara.
ADRISPAN.
Ha me a voar pelec'h ez eus aour hac arc'hant,
Peadra da garga assur eur vatiment :
nin a ielo da vouit,
Cabitenn, pa gal'fet,
vô d'imb bea talIl 'bed spontic.
Mès arabad
ARISTOLO . .
zo mad, certenn, ma daon vignon,
Kement-se a
vOllit hed, 'wit ar brovision :
Dre-ze, demp da
d'imb en pe-iec'h a zo hecl,
Allons! Belgar, lâr
. 'Wit ma efomb da vouit, heb caout aoun e-bed. .
BELGAR .
Deut ganen, ma c'habitenn, certenn m'ho conduo.
rèd ez eo treuzi al' mor, 'wit. niont eno ;
Mès
En grignelo Gwennole a vô rèd d'imb antrenn,
Eno 'zo calz a hed, ha sur n'hor gwelo den. (B)
ARlSTOLO .
én bord ann aod, nin a gavo bago,
Ebars
Ha mar vent amarret, nin ho r.1isamarro ;
Ar re-ze hon conduo bete Landevenec,
Ha neuze, dre finesse, ni laero ar bêlec.
Allons! partiom b holl eta, a galon vad,
ac'hann da eur pennacL
Greomb provision
Hoi cuit.
. EU Scenenn. •
GWENNOLE, al' WERC'HÈS.
GWENNOLE a gân.
o Doue eternel, pebeus graz a accorde.t d'in 1
o sclezrijenn brillant'a deu d'am anvironi !
(A) Ms. L. B.: - Dre-ze, mar queret cheomp da ober provision da guenta.
(B) Ms. L. B.; Ellon ezeU5 cals a ed, a ua veomp guelet gant den •
Allons donc d'abord faire notre provision, CA) [pain.
Notre cauSe sera plus forte" quand nous aurons de quoi faire du
ADRISPAN.
Et moi, je sais où il y a de l'or et de l'argent,
De quoi charger, assurément, un bâtiment:
Capitaine, quand vous voudrez, 'nous les irons prendre.
Mais, il nous faudra n'être pas du tout peureux .
ARISTOLO.
Tout cela est bien, assurément, mes deux amis,
C'est pourquoi, allons prendre du blé pour notre provision.
cl is-nous Oll il Y a du blé,
Allons! Belgar,
Pour que nous allions en prendre, sans peur.
BELGAR.
Venez aVec moi, mon capitaine, et je vous conduirai;
Mais, il faut traverser la mer pour aller là :
nous faudra entrer dans les gl'eniers de Gwennolé,
Là, il ya beaucoupde blé, et sûrement personne ne nous verra lB).
ARISTOLO.
Sur le rivage, nous trouverons des barques,
Et, si elles sont amarrées, nous les démarrerons;
Elles nous conduiront jusqu'à Landévenec,
Et alors, par finesse, nous volerons le prêtre.
cœur,
Allons! partons donc tous, de bon
Faisons provision d'ici à quelque temps.
Ils sortent.
Scène seconde.
GWENNOLÉ, la VIERGE,
GWENNOLÉ, chantant:
o Dieu Eternel, quelle grâce vous m'accordez!
o la brillante lumière qui vient m'environner 1
(A) Ms. L. B.: - Ainsi, si vous le voulez, nous irons d'abord faire pro-
o [vision.
ne serons vus de
(n) Ms. L. B.: - Là, il Y a beaucoup de blé, et nous
[personne.
Ne allan ket comprén petra signifi se,
ar sclezrijenn euz ann nef. .
Nemet dont a raë
Ar WERC'HÈS, en eur gouabrenn brillant, a gân.
Gwennole, me 'zo aman, 'n creiz ar gouabrenno,
am eus express rouantelès ann nevo, . .
Cuitêt
Ewit dont d'as gwelet, dre eun amitié vraz,
zo d'in- me servijer, en peb plaz.
Rac te a
. Me a zo Rouanes ann nef hac ann douar,
da gement den am c'har,
Impalaerès on iwe
ann œuno mad pere hoc'h eus-hu grêt,
Rac dre
Eur plaz er Baradoz c'h ui oc'h eus goneet.
. GWENNOLE, war ar memès ton.
o Gwerc'hes Vari, mam ann hol tensorio,
Roët d'in hardiëgès da gomz en hoc'h hano,
Rac me a son je d'in sur n~ veriten ket
Bea en nep fύon ganec'h-hu bisitet .
Ar \VERC'HÈS.
Gwennolé, ma mab, soudenn a renqui merwel,
Ha renta da ine 'tre diou vreac'h ann Eternel,
da vignoned, a zo ganid pell-zo,
Mes kelenn
Ha choas d'hê eur gouarner a-benn ma vi maro .
Evel ma vô da ine deus da gorf sortiet,
a-beur? Doue gant eun Rel curunet.
A vezi
GWENNOLE a gan war ton: « 0 puissanz admirabl ! etc. »)
o Doue, ma c'hrouër, me a rent d'ac'h graço,
Pa 'c'h eus revelet d'iri ar fin euz ma dezio ;
Vari, mam euz a garante,
Gwerc'bès glorius
'ta ractal ganeoc'h-hu d'an'n nef.
Ma c'basset
Ar WERC'HES.
Fixet ê gant Doue Çl.nn dewez ma varwi :
Ar c'htmt& sqnp. &r c'boaraïs,. d'ar merc'her, e teui ·
Je ne puis comprendre ce que cela signifie,
ne vienne du ciel.
A moins que cette lumière
La VIERGE, dans un nuage brillant, chante:
Gwennolé, je suis ici, au milieu des nuages;
J'ai quitté exprès le royaume des cieux,
Pour venir te voir, par grande amitié,
mon serviteur, en tout lieu.
Car tu es
Je suis la Reine du ciel et de la terre,
Je suis aussi impératrice pour quiconque m'aime,
Car par les bonnes œuvres que vous avez pratiquées,
Une place au paradis vous avez gagnée .
GWENNOLÉ, sur le même ton.
o Vierge Marie, mère de tous les trésors,
Donnez-moi la hardiesse de parler en votre nom,
sîuement que je ne méritais pas,
Car je croyais
En aucune manière, de recevoir votre visite.
VIERGE .
Gwennolé, mon fils, bientôt il te faudra mourir
Et rendre ton âme entre les bras de l'Eternel,
Mais, conseille tes amis, qui sont avec toi depuis longtemps,
Et choisis-leur un directeur, avant de mourir.
Aussitôt que ton âme sera sortie de ton corps,
Tu seras, de la part de Dieu, couronné par un ange.
GWENNO LÉ,chantantsur leton: 0 puissanceadmirable,etc ...
o Dieu, mon Créateur, je vous rends grâces,
jours:
Puisque vous m'avez révélé la fin de mes
Glorieuse Vierge Marie, mère de charité,
Emmenez-moi donc tout de suite. avec vous au ciel.
La VIERGE.
Le jour a été fixé par Dieu où tu mourras:
La première semaine du carême, un mercredi, tu viendras (38.)
Da bossedi ar gloar dimeus ar barados,
Hac eno e chomi eternel da repos.
ma mab ker, kenavô er joaïo,
Adieu,
Abars neubeud amzer, eno ni em welo.
Cuit.
GvVENNOLE.
Adiell, mam binniget, hac ho trugarecad,
Brema me ec'h a da instruïn ma breudeur er-lad.
Cuit .
Scenenn Tervet . .
ARISTOLO, BELGAR, ADRISPAN.
An theair li zo teval.
ARISTOLO.
A-forz da navigan a-dreuz ar mor a-hed,
Setu nin em rentet en bord Landevenec ;
Dre.:.ze eta, Belgar, brema pa omp rentet,
Discouez d'imb war be tu eo ar gwella mon et.
BELGAR . .
Deut; ewit bea noz, me 'e'h a d'ho condui.
Hola ! arretomb, rae setu aman ann ti,
Dre-te, poussomb ann nor, doussic, ma tigoro.
aoun am eus, raé ann nor-man a wigouro.
Mes
ARISTOLO.
Soutenet gant ho scoaz, ha na rei trouz e-bed,
Rac mar clew Gwennole, hon trafic 'vô collet.
Anfoncin a rer ann nor, goustadic.
ADRISPAN.
Ma è'habitenn, setu ann nor brao digoret,
Gant Belgar ha me, hep caout poan e-bed.
Ann theatr a deu da vea sclezr.
deut ann noz ken sclezr evel ann de ;
Mès setu
Daouest petra ar foel tr a zo caus euz a-ze ~
Posséder la gloire du Paradis,
Et là, tu goûteras un éternel repos.
Adieu, mon fils cheri, au revoir dans les joies (du paradis),
Là, nous nous reverrons, dans peu de temps.
La Vierge s'en va.
GWENNOLÉ.
Adieu, mère bénie, je vous remercie,
A présent, je vais bien instruire mes frères. "
Il sort.
Scène troüième.
ARISTOLO, BELGAR, ARISPAN.
Le théâtre est dans l'obscurité.
ARISTOLO.
A force de naviguer à travers la mer, au long,
Nous voici rendus au bord de Landévénec ;
Ainsi donc, Belgar, à présent que nous sommes rendus,
Montre nous de quel côté il vaut mieux aller.
BÊLGAR.
Venez; bien qu'il soit nuit, je vais vous conduire.
Holà! arrêtons-nous, car voici la maison,
C'est pourquoi, poussons la porte, doucement, pour qu'eUe
Mais, j'ai peur, car cette porte criera, [s'ouvre .
ARISTOLO.
Soutenons-la de l'épaule, et elle ne fera pas de bruit,
Car si Gwennolé entend,notre trafic sera perdu.
On enfonce la porte, doucement.
ADRISPAN.
Mon capitaine, voilà la porte facilement ouverte
Par Belgar, sans aucune peine. ·
Le théâtre s'éclaire."
Mais, voici la nuit devenue claire comme le jour:
Que diable peut être la cause" de cela ~
ARISTOLO.
Faeiloe'h 'vô d'imb mont d'ar c'hrignal, a dro-vad ;
Cassomb ganimb sier da garga peb a sae'bad ...
Setu ni rentet, cargomb hor zier, kent ewit mont d'ar gêr ;
vô d'imb baIe, rae an noz a zo selezr.
Brao a
. Mont a reont cuit, ha dont adarré.
BELGAR .
Samet d'in ma sac'had, 'wit ma 'z inn-cuit d'ar red ...
Allas 1 setu me indan-ban d'ann douar couezet.
ma morzed ;
Mar credfenn crial-forz ... torrêt ê
Penoz ar foeltr rinn-me ~ sur Oil da vea t.apet.
ADRISPAN.
Causé goustad ; goude ni da sicouro,
Rac mar greomb trouz, Gwennole hor clewo;
Cabitenn, samet d'in, ma 'z inn araoc atao,
Da gass anehan d'ar vag; goude me retbrno.
. Hen zamma a rer, hac e couez iwe.
Forz! setu me coeet, n'on ket 'wit mont hirroc'h,
aman evel pa ven eur T'oc'h.
Ken plantet on
ARISTOLO a samm he sac'bad bac a goùez iwe.
Siouas 1 d'in eo ar gwasa, rac me a zo dallet ;
Birwîkenn er bed-ma na welin tra a-bed,
Ha ma beac'h war ma chouc a zo diouzin peg,
Na allan remui nac obel' eur gammed.
Gwennolé, Riou ha Budoc a deu.
GWENNOLE.
Allas 1 ma mignoned, eun dra 'zo c'boarveet ;
Tri laër 'welan ama war ann hent astennet ;
En prison eun Doue int tapet, ar wech-man,
eo d'imb ben pedin ewit ho delivran :
Rèd
o Doue, bon gwir dael, c'hui zo mad dreist natur,
Hac a rent ar justiz dre urz ha dre vuzur ;
ARISTOLO •
Il nous sera plus facile de nous rendre sûrement au gre-
Emportons des sacs, pour en charger chacun un... [nier.
Nous voici rendus, remplissons nos sq,cs, avant de nous en re
Il nous fera beau pour marcher,car la nuitest claire. [tourner.
. . Ils sortent, puis reviennent .
BELGAR. '
Chargez-moi mon sac (sur l'épaule), pour que je.m'en
Hélas! me voici tombé à terre, sous mon sac! [aille, vite ...
Si j'osais crier à la force!. .. Ma cuisse est cassée;
Comment diable ferai-je ~ Je suis sûr d'être pris. .
ADRISPAN .
Parle bas; plus tard, nous t'aiderons,
Car, si nous faisons du bruit, Gwennolé nous entendra;
Capitaine, chargez-le moi (Belgar), pour que je m'en aille, vite,
Le porter au, bateau; je retournerai ensuite.
On le lui charge sur l'épaUle, et il to~be aussi:
A la force! (au secours !) n;te voici tombé; je ne puis aller
Je suis planté (fixé) ici, comme si j'étais un rocher. [plus loin,
ARISTOLO, charge son sac et tombe aussi.
C'est moi, malheureusement, qui suis le plus frappé, car je
Jamaisjeneverrai plusrien,dans ce monde, [suis rendu aveugle 1
Et mOIf faix s'est collé à mon dos;
Je ne puis ni remuer ni faire un pas.
, Gwennolé, Riou et Budoe arrivent.
GWENNOLE.
Hélas! mes amis, une chose est arrivée;
Je vois ici trois voleurs, étendus sur le chemin;
Dans la prison de Dieu ils sont pri~, cette fois; .
Il QOU8 fau t le prier de les délivrer.
o Dieu, notre vrai père, vous êtes bon outre nature,
Et vous rendez la justice avec ordre et mesure; .
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (Mémoires). 16
Ha c'hui, Gwerchès Vari, beset avocadès
zo en dienès.
D'ann tri miserabl-man a
Sevel a reont ho zri, iac'h.
ARISTOLO, d'ann daoulinn.
. Gwennolé, den santel, me a c'houlenn pardon,
ann trôn ;
Hac a ansao ma fec'hed dirac Roue
Ewit ma fumissa, me a oa rentet daU,
Ha brema me weI sclezr~ dre ho c'hracz, den loyal.
- En he sao.
BELGAR .
Aotro 'n Abbad, dor ho ti hon boa bet anfoncet,
Da vont en ho crignal, ewit laël'es ho hed,
0 clasq redec buhan, me doras ma morzed,
Hac
dre ho pedenno, ez on iwe iac'hêt. .
Mès,
GWENNOLÉ.
Ma breudeur ker: Doue hen deveus difennet (A)
Laeres netra d'bon nesa, bars en fύon a-bed ;
Mar vijeac'h deutd'am cavet, ewit goulenn hed,
Credèt, en assuranz, me 'm boa ho soulajet ;
Mes me bed ma Doue da dont d'ho pa.cdoni,
Ha da reï d'ac'h he vennoz, rac me ro ma hini.
ARISTOLO.
Tad santel, p'am eus bet ar c'hracz da gavet ar gwelet,
Dre bermission Doue, gant pini on bet crouët,
Me a chomo ganec'h, mar d'ê ho polonté,
Ar rest euz ma bube, ewit pedi Doue.
BELGAR.
Ha me chomo iwe, mar chom ar c'habitenn,
na garfenn ket hen cuitâd birwikenn . .
Rac me
ADRISPAN.
Ewit mar chomet-hu gant ann abbat Gwennolé,
vô comt, me a ch omo iwe.
Daoust penos a
(A) Ms. L. B. : ' Goûd a ret, ma breudeur, Doue a neus difennet •
Et vous, Vierge Marie, soyez avocate (intercédez)
Pour ces trois malheureux, qui sont en détresse.
Ils se relèvent tous les trois, guéris.
ARISTOLO, à genoux.
Gwennolé, homme saint, je vous demande pardon,
Et je confesse mon péché, devant le Roi du ciel:
Pour me punir, j'étais rendu aveugle,
Et, à présent, je vois clair, grâce à vous, homme loyal.
Il se lève.
BELGAR .
Monsieur l'abbé, nous,avons forcé la porte de votre maison,
Pour nous introduire clans votl'e grenier et voler votre blé,
Et en voulant partir en courant, je me suis cassé la cuisse,
Mais, par vos prières, je suis aussi guéri.
GWENNOLÉ.
Mes chers frères, Dieu a défendu (A)
De rien dérober au prochain, en aucune façon;
Si vous étiez venus me trouver, pour me demander du blé,
Croyez-moi, sûrement, je vous aurais soulagés;
Mais, je prie mon Dieu de vous pardonner,
Et de vous donner sa bénédiction, car pour moi, je donne la
[mienne .
ARISTOLO.
Saint père, puisque j'ai obtenu la grâce de recouvrer la santé,
Par la permission de Dieu, par qui j'ai été créé,
Je resterai près de vous, si vous le permettez,
ma vie, pour prier Dieu.
Le reste de
BELGAR.
Et moi aussi, je resterai, si le capitaine
reste,
Car je ne voudrais jamais le quitter.
ADRISPAN.
Si vous restez avec l'abbé Gwennolé,
Arrive que pourra, moi, je resterai aussi .
(A) Ms. L. B.: Vous le savez, mes frères, Dieu à défendu.
GWENNOLÉ.
Antreet eta hol ganen en abbati,
Da azean euz taol ; me 'c'h a d'ho regali.
Hol cuit .
Scenenn Pedervet.
GWENNOLÉ, he-unan.
Ma Doue, en hoc'h hano me 'c'h a da vont en hent
ma c'herent,
En-tresec enès Briat, da welet
n'am eus int ket gwelet,
Rae pell-a-zo dija
~ac a desiran. goûd hac hi 'zo en iec'het.
d'am c'hamaraded christenn
Lavaret em eus
fidel da observin allezenn,
Bea bepred
Rac me n'am eus ket pell ken da vewan,
Dre-ze a l'in d'am c'herent ma adieu diwesan.
Cuit.
Pempvet SCt-nenn.
ARISTOLO, BELGAR, ADRISPAN, disarm ho zri.
ARISTOLO.
Ma mignoned, aman ez eus eur fred al' braoa,
zo bars ann ti-ma;
Sonjomb nae a binvidigès a
Mar caret, ni ee'h a d'attaqui Gwennolé,
ar pez hor bô bolonté ~
Neuze a eomerfomb
BELGAR.
Mes penaoz e c'halfemb attaqui den a-bed,
Pa eo gwir, eabitenn, ez omb hol disarmet 1
ARISTOLO.
Belgar, na em gen ket ewit kement-se .
Me gavo eur voyenn d'aehuin he vuhe : '
Uemb .hon tri war ann hent, ha pa vô 0 tremenn,
A dolio meinn, e e'balfomb terri d'ehan he benn.
GWENNOLÉ.
Entrez donc tous avec moi dans l'abbaye,
Pour vous asseoir à table: je vais vous régaler.
Tous sortent .
Scène quatrième.
GWENNOLE, seul.
Mon Dieu, en votre nom, je vais me mettre en route
Vers l'île de Bréhat, pour voir mes parents,
Car il ya déjà longtemps que je ne les ai vus,
Et je désire savoir s'ils sont en (bonne) santé.
J'ai recommandé à mes camarades chrétiens
D'être toujours fidèles à observer la loi,
Car je n'ai plu~ longtemps à vivre;
Ainsi, je ferai à mes parents mes derniers adieux.
Il sort.
Scène cinguièrnc .
ARISTOLO, BELGAR, AORISPAN, tous les trois sans armes.
. ARISTOLO.
Mes amis, il y a ici une très belle occasion C~) C*)
Songeons aux richesses qui sont dans cette maison;
Si vous voulez, nous allons attaquer Gwennolé, .
Ensuite nous prendrons tout ce que nous voudrons "1
BELG-AR .
Et comment pourrions-nous attaquer personne,
puisqu'il est vrai que nous sommes tous désarmés "1
Capitaine,
ARISTOLO.
Belgar, ne t'inquiète pas de cela,
Je trouverai un moyen de terminer sa vie:
Allons tous les trois sur la route, et, quand il passera,
nous pourrons lui casser la tête.
A coups de pierres,
(*) Je ne sais si je traduis bien le mot (red; il est aussi dans le manus
crit de M. de la Borderie; mais je ne le trouve pas dans les dictionnaires
bretons. On trouve pourtant, dans l~ dictionnaire étymologique du breton
moyen dont M. Emile ErnauIt a accompagné la publication du mystère de
Sainte-Barbe: Fret, grêle de coups, action de remuer, trécor ce der
nier sens peut être acceptable, ici.
ADRISPAN.
Hoc'h avis a .:l0 mad, aotro ar c'habitenn,
Ha. sur omb diout-han, mar caromb 'n em ~olltenn ;
Et ez eo da Vriat, da welet he gerent,
en eun tu war ann hent.
Dre-ze, demb d'hen rancontr,
Hoi cuit.
S eenenn ()' huee' h vet .
FRÉGAN, en eur gadol', ALBA, CLERV!.
FRÉGAN.
Allas! ma fried Alba, ha ma merc'h ker Clervi,
Ar wech-man e credan 'c'h an d'ho abandoni,
ar maro 'zo arri d'achui ma bube ;
Rac
Me garrie e vije present ma mab Gwennolé,
Ewit ober out-han ma c'himiad diwesan.
ALBA. .
Ma fried, me 'c'h ractal d'ben ober avertissan.
CLERVI.
Ma zad ha ma mamm, m'ho ped da em gonsoli,
ma breur hoc'h antren bars ann ti,
Rac me a weI
ann aotro Doue,
Evel pa ve inspiret gant
A em bresent ma breur, ann abbat Gwennolé.
GWENNOLÉ a deu.
Débonjour, ma zad ha ma mamm, ha ma c'hoar Clervi,
Gant gwir berseveranz hec'h antrean 'n ho ti ;
Ar sujet hen eus grét d'in donet d'ho cuelet
ann desir am boa da c'hoûd euz ho iec'het.
FREGAN.
Allas 1 ma mab, me 'n em sant meurbet diès,
an da gnitad ar bed ewit jamès,
Me gred hec'h
ma fried fidel,
Dre-se 'ta kenavô, Alba,
ma mah, ma merc'h, me hec'h a da verwel ;
Adieu,
an da welet Doue, Roue ann trôn,
Breman bec'h
ma benediction .
Me ro d'ac'h assambles .
Mervel a ra.
ADRISPAN.
Votre a vis est bon, Monsieur le capitaine,
Et nous sommes sûrs de lui, si nous voulons nous entr'alder ;
Il est allé à Bréhat, pour voir ses parents, . "
C'est pourquoi, allons à sa rencontre, quelque part sur la route.
Ils sortent tous.
Scène sixième.
FRAGAN, sur un siège, ALBA, CLERVIE.
FRAGAN.
Hélas 1 mon épouse Alba, et ma fille Clervie,
fois, je crois que je vais vous abandonner (quitter),
Cette
Car la mort vient terminer ma vie;
Je voudrais que mon fils Gwennolé fût présent,
Pour lui faire mes derniers adieux.
ALBA.
Mon époux, je vais tout de suite le faire avertir.
CLERVIE.
Mon père et ma mère, je vous prie de vous consqler,
Car je vois mon frère qui entre dans la maison;
Comme s'il était inspiré par le Seigneur Dieu,
- Se présente mon frère, l'abbé Gwennolé.
, ' GWENNOLÉ arrive.
père" ma mère et ma sœur Cle.rvie,
Bonjour, mon
A vec une vraie persévéranee (~) j'entre dans votre maison;
Le sujet qui m'a fait venir vous voir ,
Est le désir que fai d'avoir ,des nom"elles de votre santé.
FRAGAN.
Hélas! mon fils, je me sens aussi mal;
Je crois que je vais quitter ce monde, à jamais,
C'est pourquoI, adieu, Alba, mon épouse fidèle,
ma fille, je vais mourir:
Adieu, mon fils,
A présent, je vais voir Dieu, le Roi du ciel,
à tous ensemble ma bénédiction.
Je vous donne
Il meUrt .
ALBA .
m'a fried, setu c'hui maro' ;
Adieu eta,
Brerria, ma bugale, chom ganec'h ar mado,
Me n'~m eus eom milÏ netra war ar bed-man ;
Ma c'hasset d'am goele, rac me a zo clanv,
Ha galwet Mistral da dont da liennan ho tad,
Ha me hec'h a iwe d'hen heuill, a galon vad .
Mervel a ra.
GWENNOLÉ.
Adieu, ma zad, ma mamm, ; en baradoz Doue,
Me am eus esper a em welfomb, hep dale ;
ama buhon, Mistral, ha na retard ket,
Deus
Cass ma zad ba ma mamm d'ar sâl, da' vesa liennet.
MISTRAL a deu.
aman iwe, da sicour ac'hanom ;
Dodin, deus
int maro.
Ar-c'horfo-man 'zo pounner, brema pa 'z
DODIN a deu.
ma hol galloud, me sur ho sicouro.
Gant
. Cuit gant ar re varo.
GWENNOLÉ .
war eun dro,
Ma c'hoar, demb d'ho lacad interri
Ha goude a refomb partach euz ar mado.
'm eus intantion da distribui ma lodenn .
ann ilizo ha da sicour ar baotlrienn.
Da orni
CLERVI.
Ha me a bansiono intaonvezed miserabl ;
Ann hini hen eus moyenn a dIe ober ar vad (A)
GWENNOLÉ.
Ho dessingn a zo mad, ma c'hoar, me hoc'h assur ;
mamm en sepultur,
Demb da lacad hor zad hac hor
d'am abbati arre,
Goude, me retorno
Soudenn a clewfet iwe a vô finn d'am buhe .
Hol cuit.
(A) Ms. : L. B .. : - Car an nep a neus moyen a dIe ober œuvrou mad.
ALBA .
mon époux, vous voilà mort;
Adieu dpnc,
A présent, mes enfants, les biens restent avec vous, •
plu:) rien, dans ce monde: .
Moi, je n'ai
à mon lit, cal' je suis malade,
Portez-moi
Et appelez Mistral pour ensevelir votre père,
Moi, je vais aussi le suivre, de bon cœur.
Elle meurt.
GWENNOLE.
Adieu, mon père et ma mère; dans le paradis de Dieu,
J'ai espoir que nous nous reverrons, sal)s tarder;
Viens ici, vite, Mistral, et ne tarde pas, i
Porte mon père et ma mère dans la saHe, pour les ensevelir.
, MISTRAL vient .
Dodin, viens aussi m'aider ;
,Ces corps sont loürds, à présent qu'ils sont morts.
DODIN vient. .
De tout mon pouvoir je vous aiderai.
Ils emportent les morts.
GWENNOLÉ. -
Ma sœur, allons les faire enterrer ensemble,
Après quoi, nous ferons le partage des biens.
Moi, j'ai l'intention de distribuer ma part
Pour orner les église3 et secourir les pauvres.
CLERVIE.
Et moi, je pensionnerai les veuves pauvres:
Celui qui a des biens doit faire le bien (A).
GWENNOLE.
Votre dessein est bon, ma sœur, je vous assure;
Allons déposel' notre père et notre mère dans le sépulcre,
à mon abbaye; _
Après quoi, je retournerai
BientÔt vous apprenrlrez que ma vie f'era aussi terminée.
Ils sortent .
(A) Ms. L. B. : Car celui qui a moyen doit faire de bonnes œuvre!:),
Scenn seizvet.
GWENNOLE, he-unan.
Brema me 'c'h a d'ar gêl', p' am eus distribuet
ba d'ann dud ezommec.
Ma lodenn d'an ilizo,
Teuler a rer meinn gant-han.
o Doue, ma c'hrouer, petra eo kement-man ~
Eun toI mean am eus bet war ma fenn, en tu-man.
!. .. setu aman unan-all wal' ma choue! ...
Ab iaou
Ma Doue, kement-man a ra sur d'in hirvoud.
Me garrie a vije dirazon presantamant
An-neb hen eus plijadur hoc'h ober d'in tourmant.
ARISTOLO, a-dreon hen.
Caer hon eus, a nerz corf, teuler meinn gant-ban.
N'omb ket 'wit dont-a-benn d'obel' d'ehan coezan,
war·-n-han, heb caout tam morc'hed,
Dre-ze, saillomb
Rèd ê d'imb caët finn, eur veach commancet.
Diguza a reont .
GWENNOLE.
Penaoz, ma bugale, c'ht, Ji eo eta ar re
'1' giz-ze ~
A deu a dolio meinn d'am assommi
ARISTOLO.
la, pandart an Diaoul, ni a zo resolvet
Da gaët fin diouzid, ha na ampechi ket.
GWENNOLE.
C'hoant am eus da c'hoarzinn, assur, pa ho clewan ;
d'in ho polante, rac setu me aman.
Grêt
ARISTOLO, dre goler.
toi mean, bars en creiz da dâl !
Dâl c'hoas eun
Al laeron a goez hol marw.
GWENNOLE.
Setu-int coezet marw war ar plas ractal ! (A)
Pa oant 0 vont d'am skeï, ez int coezet kerkent ;
(A) Ms. L. B. : 0 Doue, setu-int marw war ar plas ractai.
Scène septième.
GWENNOLÉ, seul.
A présent, je retourne à la maison, après avoir distribué
Ma part aux églises et aux besoigneux. .
On lui jette des pierres.
o mon Dieu, mon Créateur, que signifie ceci? .
J'ai reçu un coup de pierre à la tête, de ce côté.
... en voici une autre, sur le dos ...
Aïe!
Mon Dieu, ceci me fait certainement de la peine.
Je voudrais qu'il fùt devant moi présentement,
Celui qui prend plaisir à me tourmenter.
ARISTOLO, derrière lui .
Nous avons beau lui lancercles pierres, de toutes nos forces, -
Nous ne pouvons venir à bout de le faire tomber,
C'est pourquoi, jetons-nous sur lui, sans le moindre souci;
Il nous faut en fimr, une fois commencés.
, Ils se montrent.
GWENNOLÉ.
Comment, mes enfants, c'est donc vous qui,
A COll ps de pierres, m'assommez de cette façon 1
. ARISTOLO.
Oui, pendard du diable, nous sommes résolus
et tu ne nous en empêcheras pas.
A en finir avec toi,
GWENNOLE.
J'ai envie de rire, en vous entendant;
Disposez de moi à votre volonté, me voici!
ARISTOLO, en colère.
Tiens 1 encore un coup, en plein front 1
Les voleurs tombent tous morts.
GWENNOLE.
Les voilà tombés morts, sur la place, à l'instant 1 (A)
Au moment où ils allaient me frapper, ils sont tombés.
(A) Ms. L. B.: - 0 Dieu, les voilà morts sur la place, à l'instant!
Me 'c'h a d'ho interrin aman en costez' ann hent. (Al
Cass a ra anhê cuit.
Brema,~ ma Redemptor, p'oc'h eus ma freservet,
an da welet ma zud, a zo en Ladevenec.
Hec'h
Scenenn Eizvet.
GWENNOLÉ, BUDOC, RIOU.
GvVENNOLÉ.
Tostaët, ma breudeur, da glewet ma c'homzo :
Revelet hec'h eo d'in a-beurs ar gwir Aotro (B)
A dlean warc'hoas paraissan dirazhan ;
Dre-ze ma selaouet, en ma heur diwezan : (c)
ran brema lacad ma c'henderv ' .
Desirout a
Da gomrnandin em plas, da vea ho gouarner, (D)
Rac me a dIe warc'hoas cuitaad ar bed-ma,
Goude am bô canet ma offern diweza. (E)
RIOU .
Ma c'henderv Gwennolé, me am eus eur joa vraz,
Pa roët d'in ar garq da gommandi 'n ho plas,
Mès me a c'hou1 ar c'hracz ouz hon Zalver binniget
Ewit ma 'c'h efomb soudenn d'ann nevo d'ho cuelet. (F)
Ma c'benderv me ho supp1i 'balamour da Doue,
Reït d'in ho penediction, kent 'wit finn ho puhe.
GWENNOLÉ.
Riou, ma c'henderv ha ma mignom parfet,
abbat, en hano ann Drindet.
Me ho consacr
C'h ui a dougo al' groas, gant gracz ann Eternel; (G)
En hano ann Tad, ar Mab hag ar Speret-SanteL
(A) Ms. L. ·B. : - Mont a ran d'ho interrin aman en coste an heut.
(B) Ms. L. B.: Revelet eo din abeurs Doue, hon gwir autro.
Ms. L. B. : Dre-ze ma selaouet c'hoaz en amzer divea.
(D) Ms. L. B. : Da gommandin em plas, henès vô ho gouarner.
(E) Ms. L. B.: Goude cana an ofern evit ar veg divea.
(F) Ms. L. B. : Da abregi hon bue da vont soudenn d'ho coelet.
(G) Ms. L. B. : C'houi a dougo ar groas-man, en hano an Eternel.
Je vais les enterrer, ici, au bord du chemin, (A) '(39)
. . Il les emporte.
A présent, mon rédemptèur, que vous m'avez préservé,
Je vais revoir mes gens, qui sont à Landévenec.
Scène huitième;
GWENNOFÉ, BUDOC, RIOU.
GWENNOLÉ.
Approchez, mes frères, pour entendre mes paroles:
Il m'a été révélé, de la part du vrai Seigneur, (B)
Que je dois demain paraître devant lui:
C'est pourquoi, écoutez-moi, à :non heure dernière: (c)
Je déstre à présent mettre mon cousin
Pour commander à ma place et être votre gouverneur, (D)
Car je dois, demain, quitter ce monde,
. Après que j'aurai chanté ma dernière messe. (E)
RIOU.
Mon cousin Gwennolé, j'éprouve une grande joie
De ce que vous me donnez la charge de commander après vous,
à notre Sauveur béni
Mais je demande la grâce
Que nous allions bientôt vous voir, au ciel. (F)
Mon cousin, je vous en supplie, au nom de Dieu,
avant la fin de votre vie.
Donnez-moi votre bénédiction,
GWENNOLÉ.
Riou, mon cousin et mon ami parfait,
Je vous consacre abbé, au nom de la Trinité; (40)
vous qui porterez -la croix, par la grâce de l'Eternel, (G)
C'est
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
(A) Ms. L. B. : - Je vais les enterrer ici, au bord du chemin.
(B) Ms. L. B. : Il m'a été révélé de la part de Dieu, le vrai Seigneur,
Ms. L. B. : C'est pourquoi, écoutez-moi encore, à mon dernier moment.
(n) Ms. L. B.: Pour commander à ma place, celui-là sera gouverneur.
(E) Ms. L. B. : Après avoir chanté la messe, pour la dernière fois.
(F) Ms. L, B. :- D'abréger notre vie, pour aller bientôt vous voir.
(G) Ms. L. B. : ' Vous porterez cette croix, au nom de l'Eternel •
M'ho suppli, ma breudeur, da dont d'am assistan,
Breman hec'h an da gana ma offern diwezan.
Ann Introïbo a lârin, en traon ann aoter;
Jesus a c'houlenne pardon 'wit al' pec'her.
Soutenet buhan ma c'horf, hec'h an da finissan ;
Etre ho tiou-vreac'h, ma Doue, ma ine a rent~n.
AZéan a ra en eur gador .
GABRIEL; gant eur gurunen.
Ine caer evurus, me deu d'ho saludin,
ann Eternel ez ê commandet d'in
A-beurz
Reï d'ac'h eur gurunenn : en nevo ez eo grêt
eo bet al~lOuret.
Ewidoc'h, Gwennolé, hac
Auditored prudent, setu al' fin~ aman
A vuhe Gwennolé hac he dad al' prinz Fregan,
Pere ho deus conduët ho buhe agreabl
Hac ho deus obtenet graço Doue ann Tad .
. FIN EUZ A VUHE SANT GWENNOLÉ, ABBAD. -
- ...... o::«,
Je vous prie, mes frères, de m'assister,
à présent, chanter ma dernière messe.
Je vais,
l'[ntroïbo au bas de l'autel;
Je réciterai
Jésus demande pardon pour le pécheur.
finir; (mourir).
Soutenez, vite, mon corps, je vais
Entre vos bras, mon Dieu, je rends mon âme . .
Il s'asseoit sur un siège.
GABRIEL, tenant une couronne.
Ame belle et bienheureuse, je viens vou.s saluer;
m'a été commandé
De la part de l'Eternel, il
De vous donner (apporter) une couronne: elle a été faite au ciel
Pour vous, Gwennolé, et elle a été dorée .
Auditeurs prudents, voici la fin
Saint-;-Gwennolé et de son père, le prince Fragan,
De la vie de
Qui ont mené une vie agréable (~) .
Et ont obtenu les grâces de Dieu le Père. (41)
- FIN DE LA VIE DE SAINT GWENNOLÉ, ABBÉ. -
NOTES •
Dès les premiers vers du mystère, le roi Grallon nous parle de la
de son royaume, la ville d'Is, dont il fait un pompeux
capitale
Or, le Cartulaire est absolument muet· sur cette fameuse
éloge.
de Paris (par Is, l'égale d' Is, nous dit la tradition orale), ce
rivale
qui est, sinon une preuve incontestable, du moins une forte
son existence réelle. C'est, du reste, une légende
présomptioh contre
des villes englouties par la mer, et on la trouve un
banale que celle
Is ou 1z pourrait être une abréviation de izel, bas, et
peu partout.
il est incontestable qua souvent des habitations situées au bord de
la mer ont dl1 disparaitre, en Bretagne et ailleurs, dans des tempêtes
ou simplement par l'effet des progrès et
oudes marées extraordinaires,
des envahissements contiuus de la mer sur nos côtes. La .légende
ne devait pas être encore née, au V', ni même au IX' siècle,
d'Is
quand Gurdisten écrivit la vie de saint Gwennolé.
Dans le manuscrit breton de la Vie de sl1int Gwennolé que m'a
communiqué M. de la Borderie, et qui diffère fort peu du mien, au
point que tous les deux me semblent avoir été copiés sur un
on écrit Grollon; le mien porte Grâlon, par un a
troisième,
long; le Cartulaire dit Gradlon. J'écris, en français, Grallon, par
l, parce que le nom de GraU, encore très répandu aujourd'hui,
deux
me semble être une abréviation de Grallon, porte toujours
. et qui
l. Cependant, dans les premières pages, les corrections d'après
deux
le tirage définitif ne porte
les épreuves n'ayant pas été faites toutes,
quelquefois qu'un
(1) « Cet héritage me vient de mes ancêtres. »
C'est à tort que Grallon se dit roi de toute la Bretagne, et prétend
de ses pètes : il était roi ou comte de la
avoir reçu cet héritage
le dit clairement le Cart"ulaire. Mais
Cornouaille seulement, comme
les limites de la Cornouaille, à cette époque, sont difficiles, sinon
impossibles à déterminer, d'une manière précise.
(2) Oppositiou de la paix et du calme dont on jouit dans la
Bretagne armoricaine avec les troubles, la guerre et les calamités
de toute sorte qui désolent l'île. L'auteur y revient souvent, et se
trouve là-dessus d'accord avec le Cariulaire et Gildas, De excidio
Britanniœ.
(3) Grallon ne pouvait établir Fragan comme gouverneur de la
Grande-Bretagne, sur laquelle il n'avait aucun droit, et qu'il fuyait,
parce qu'il n'y pouvait plus rester lui-même.
(4) Fragan était cousin, selon le Cartulaire, d'un petit roi breton,
nomlué Catoui, mais, contrairement au mystère, le Cartulaire
n'établit aucun lien de parenté entre lui et Grallon.
(5) « Je vais donc en Grande-Bretagne, pour voir ma femme. »
Fragan fut un des premiers à quitter l'iIe, avec un certain nombre
de parents et d'amis, et à fonder un Plo't~ sur le continent. Il prit
terre, non il. l'île de Bréhat comme le dit notre mystère, mais bien
de Brahec (B1-àhec1is- ort1ls), aujo~rd'hui Bré~e~" dans
au petit port
la baie de Saint-Brieuc) et s'étab it sur les rIves de la rIVlere le
Gouët (Sanqu:is ), qui toinbe dans cette baie, à l'endroit où l'on voit
de Ploufragan (Plebs ou plo'ti Fra
encore aujourd'hui la commune
cani) , qUI lui doit son nom. Il n'e~t pas admissible, quoi qu'en dise
le mystère breton, qu'en quittant l'ite, il n'emmena pas avec lui sa
femme et ses enfants.
(6) C'est par erreur que les chiffres dC3 notes vont de 5 à 7.
6 a été sauté. .
(7) « Si .le suis attaqué par les Sarrasins. »
Les Sarrasins viennent ici mal il propos; il est vrai qu'on les
fait intervenir, quand même, dans presque toutes les pièces du
hreton; mais c'est évidemment des pirates du nord, des
théâtre
qu'il s'agit, dans le cas présent .
Saxons,
(8) Le mélange de chants et de récitatifs, fréquent dans cette
mètre différent du dialogue ordinaire,semble attester
pièce, et dans un
une origine assez reculée, car il ne se rencontre pas souvent dans
nos autres mystères bretons.
(9) L'indication de la note 9 a été omise. EUe s'applique à la
scène 2 du 1" acte p. 6L
La conversation entre les seigneurs de la Grande-Bretagne,
si bizarres, nous expose la corl'll ption des
dont les noms sont
Catoui, et dans toute l'île de Bretagne, avec
mœurs, au pays de
les désordres de tout genre et les calamités auxquels ce mal
pays èSt en proie: la tyrannie, les Saxons, la guerre,
heureux
la peste ... L'anteur du mystère est encore d'accord, sur
la famine,
ce point, avec le tableau navrant que nous en fait Gildas, dans le
De excidio britanniœ, et après lui, Gurdristen. On lit, en effet,
livre 1"·, pages 7 et 8 du Cnrtulaire :
••• « l\Inis tont ce pays, abusant de sa prospérité, l'abondance des
« biens devint pour lui une cnuse de maux. Par suite de cette
« abondance, la lux.ure eL les pnssions honteuses, les idolatries, les
« sacrilèges, les vols, les adultè(es, les parjures, les meurtres et
« toutes les sortes de vices auxquels est slIjette l'lmmanité grau
« direllt à l'envie. l)
Et plus loin:
« Dans le môme temps, une peste aITreuse ayant éclaté (dans
« l'île), les malheureux demeurés sur le sol paternel tombent par
« 1I1aSSeS innombrables ct leurs misérables corps gisent sans sépul
« turc: ce fléau désole la plus grande partie de l'ancien pays des
« Bretons. Enfin, lm ve1it nombre d'entre eux,' lm très petit"
« nombre, écbappés non sans peine à ce double désastre et donlou-
« reusement contraints de fjl1it1f'r ]0 sol nRial pour cbercber un
BU.LLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVI. (MémOires); 17
« refJlg(~ à l'étranger, passèrent les uns au pays des Scots (Irlande),
« qui cependant étaient leurs ennemis, . et les autres en Belgique.
« (Traduction La Borderie) .
. Mais la partie de beancoup la plus considérable de l'émigration,
passa. en Armorique, c'est-à-dire dans notre pays (vers 460), où
elle s'établit sans guerre et paisiblement, sur le rivage: ad oram
sine bello quieta.
On dirait que l'auteur du mystère a eu connaissance de l'œuvre
de Gurdisten ou de celle de Gildas, car il met exactement en action
la scène dans le royaume de Grallon,
leur récit, en transporta1lt
sa ville d'Is, dont les habitants et leur roi, peut-être sans des
dans
chargés de tous les crimes des habitants de
raisons suffisantes, sont
l'He, et punis en conséquence.
(10) Pourquoi l'auteur appelle-t-il la femme de Fragan Alba, de
son nom latin, au lieu de G'Lwnn, qui était son nom breton? Anrait
il encore pris ce nom dans Gurdisten? En tontcas, il semble prouvé
qu'il savait le latin, comme on le verra par d'autres passages, par
exemple la parodie du Credo, que l'on trouve plus loin.
(11) Le chiffre a été mal placé et n'a pas de raison d'être .
(12) Au début du 2' acte, nous trouvons Fragan dans son palais
de gouverneur de l'île de la Grande-Bretagne. Il n'a encore que
trois ellfDnts, Jacut, Weithnoc ou Venoc et Clervie, ce qui est d'ac
le Cartulaire, qui nous dit que Guenn ou Alba ne donna
cord avec
le jour à Gwennolé qu'après son établissen)ent sur le continent, à
Ploufragan. Quant au gonvernemeni de la Grande-Bretagne donnée
à Fragan, il est purement imaginaire. Mais l'auteur me
par Grallon
l'He de Grande-Bretagne a vecla vi Ile de Breiz
semble confondre parfois
.Meur, fondée, dit-il, par Grallon sur les côtes du pays de Léon, et qui
n'a non plus jamais existé que dans son imagination. De si grosses
erreurs géographiques et historiques étonnent et choquent, mais
de l'ancienneté de la pièce.
plaident peut-être en faveur
(13) -« Par mon nom de Fragan, Breton de nation. »
Fragan jure par lui-même, par son propre nom, ce qui parait
une coutume ancienne chez les :Bretons, car dans lcs Jlfabiêtre
nogion, on rencontre souvent cette formule de serment: par moi
et Dieu! surtout dans le Alabinogi, de Pw'Îl. (Voir la nouvelle
édition critique des lIfabinog'ion, par M. Loth).
(14) « C'est pourquoi, dis-lui de se rendre à Bréhat. »
On avait cru, jusqu'à ces derniers temps, que c'est il l'ile ùe
Bréhat que Fragan débarqua d'abord, et notre auteur est aussi de
cet avis; mais 1\1. de la Borderie me semble avoir prouvé, d'une
manière incontestable, qu'il faut remplacer Bréhat par Bréhec,
qui est une petite anse sur la baie de Saint-Brieuc. (Voir de la Bor ..
derie, préface du Cartnlaire de Landévennec).
(15) « Car à mesure qu'on assassine, on les laisse dans la rue,»
(Voir la note, 9).
(16) Ce voyage de Grallon à l'ne de Bréhat est supposé par l'au- .
te ur du drame.
(17) Donation par Grallon à Fragan de l'île de Bréhat, également
supposée, et sans ancun fondement hist.orique.
(18) Quelle naïveté de mise en scène! Le château se trouve
terminé aussitôt qu'on nous dit qu'on vient de commencer à y
travailler. .
(19 au lieu de 20). Gwennolé naît, et aussitôt nous avons la scène
inévitable de tout drame breton, la diablerie, où les princes de
l'enfer complotent contre ses jonrs, atIn de faire avorter l'œuvre
qu'il est appelé à accomplir.
(20) C'est une parodie du Credo ou Credo à rebours. Le
texte en est altéré par les copistes modernes, mais malgré
on voit que l'auteur du mystère devait savoir le latin. Dans
tout,
le manuscrit que m'a communiqué M. de la Borderie, je trouve
ne sont pas dans le mien. Elles viennent par rang,
deux lignes qui
les 5' et 6' : les voici:
Confiteor ore, sed non corde, Deo ;
A-fagnam ,'mperbiam, in'Didiarn amo.
La 8' ligne de ce manuscrit, qui est la 6' du mien, n'est pas plus
intelligible que chez moi.
(21) « Une petite ville en Léon, qui sera appelée Breiz-llfeur. J)
Hreiz-llfell,r signifie h la lettre Grande-B1"etagne. Le Cartulaire,
l'histoire et même la légende sont absolument muets au sujet de
cette prétendue ville, qui n'a jamais existé.
(22) Le mystère est d'accord avec le Cartulaire en conduisant
à l'école de Budoc, da ns l'île Laurée ou l'He Verte (ins1ûa
Gwennolé
en ès Larrec, en Breton, séparée seulement de l'ile de
La'ureu)
Bréhat par uue étroite grève, qui déconvre, à marée basse. L'école
Budoc était célèbre de son temps, et dans un vieux
du moine
possède de ta vie de saint Divy, ms de sainte
manuscrit que je
Nonn, on assiste A une scène curieuse entre ses écoliers. Budoc y
est représenté comme étant aveugle, de vieillesse, sans doute .
(23) La guérison miraculeuse de l'élève de Budoc, qui s'est cassé
la jambe, est aussi dans le Cartulaire. .
(24) « Il n'y a que trois ans que vous êtes né. )) .
Dans le Cartulaire, saint Gwmmolé est âgé de sept ans, quand
son père le conduit ft l'éeole de Budoc-. Il y resta jusqu'à l'âge de
21 ans, époque à laquelle il vint s'établir, avec onze autres moines,
dans l'île de Tapopegia ou Tibidi.
(25) Le Cartulaire ne dit pas que Budoc accompagna Gwennolé,
il retourna auptès de son père, ou plutôt quand ,il s'établit
quand
à Topopegia, cal' on ne parle pas d'une visite antérieure à Fragan,
qui était sans doute mort, à cette époque.
(26) La visite de Belflor, prétendu cousin de Gwennolé, à Bréhat,
de Fragan et de Gwennolé au roi Grallon, sont de
ainsi que celle
pure fantaisie et de l'invention de l'auteut du dtame.
(2,7) Voir ce qui est dit de la ville d'Is, au commencement de ces
notes.
(28) Il n'est dit nulle part que saint Gwennolé se rendit à Quimper,
auprès de saint Corentin, surtout pour recevoir les Ordres ou être con
abbé de Laudévénec, où il s'était établi de sa propre
sacré prêtre et
autorité et vivait indépendant de tout pouvoir tempon~l. Gurdisten
pas connaitre non plus si Gwennolé ~était prêtre, lors
ne nous fait
qu'il quitta Budoc ; il l'insinue seulement.
(29) « Deus septem ari'IJores gratiarum ... »
.Te ne sais ce que cela peut être. Il est prouvé que l'autenr du
it le latin, mais les eopistes ne le savaient pas, ordi
mystère sava
nairement, le nôtre du moins, et de là ces éttanges altérations.
(30) La foi des Romains, la loi romaine doivent, sans doute, s'en
de la religion catholique, apostolique et romaine .
tendre
(31) Poul-C'harvan est, je pense, le même que Trégarvan, qui
est une petite commune située sur uue ause nommé.e de Garvan,
la rivière de Chàteaulin, en amont de Landévénec et vis-à-vis
sur
de Rosnoën.
Dans le Cartulaire, partie diplomatique, p. 146, il est dit que !.'l.
la première rencontre du roi Grallon et de saint Gwenuolé eut lieu
à Poulcarvan. ObDÙ/;S f1.lJit (Gradlonus) ·illi per 'lJiarn i.n loco qui
vocat1.lr Pulcarvan.
(31) Notre auteur représente, à plusieurs reprises, GraUon commo
roi de toute la Bretagne, ce qui est inexact; il était seulement roi
de la Cornouaille, Cornllbiœ, et un des plus puissants de
ou comte
toute la Bretagne. .
(33) Darbot signifie à la lettre tesson, et est oomposé dcda?'n,
partie et de pot, pot, vase. Il s'entend spécialement dn vase où l'on
prépare de la bouillie de frornent ponr les tout petits enf:mts qui
têtent encore, et qu'Alanie se propo:-se de lécher, comme une frian
di$e.
(3,1) Les dictiollnaires, au mot Larnb1'ezec, ne donlien t que lam]Jro'ie,
poisson; j'ai cru pouvoir traduire par radoteur, quoique je n€!
voie pas bien le rapport de l'un à l'autre. .
(36) Il est évident (lue si le mot café se trouve dans le manuscrit
le plus ancien, la pièce ne peut pas être du XVI'
on l'imprimé
siècle; mais lions avons sans doute affaire, ici, à nne interpolation
de copiste.
(37') Le jeu de cartes appelé la bète est encore très répandu parmi
les paysans bretolls .
. (38) Il faut remarql1er l'accord parfnit qui existe entre le Cnrtn
laire et le mystère, sur la date de 1[1 mort de saint Gwennolé.
en effet, comme l'auteur du mystère, le fait mourir,
Gurdisten
1 revètu de' ses ornements sacerdotaux, devant l'autel où il vient de
célébrer la messe, nu milieu de ses moines qui l'assistent et chan
tent avec lui les louanges de Dieu, le Me1"credi de la première
semaine de carème, le tro'isièrne j01/;1" d1/; mois de mars.
(39) Ce vol de grains, dans les greniers de l'abbaye, la punition
des voleurs, leur gnérison miraculeuse par Gwennolé et leur con
version se trouvent aussi rapportés dans le Cartulaire (pages 86 à
91 et 114-115), et en termes presqu'identiques, de l1ull1ière qu'il
parait difficile de douter que l'auteur du drame breton ait eu con
naissance de l'œuvre de Gurdisten. Le guet-apens où les mêmes
le saint, n'est pas dans le Cartulaire.
voleurs' lapident, plus tard,
(40) Le Cartulaire ne fait aucune mention d'un moine Riou comme
. cousin et successeur de saint Gwennolé comme abbé de Landévenec;
la liste des
c'est Gwennaël qui vient partout en seconde ligne sur
Pourtant Gurdisten parle d'un moine Rioc, qui doit être le
abbés.
même que .notre Riou, ami de saint Gwennolé qui accepta de lui
la donation d'une petite terre, son patrimoine, don'Lo/1, preparvurn,
quoiqu'il eût refusé de rien accepter du roi Gralion. .
(41) Ces quatre derniers vers, qui peuvent avoir été composés
par un acteur, à l'occasion d'une représentation peu ancienne de la
pièce, tiennent lieu d'épilogue, à défaut d'un discours plus étendu
et pIns fleuri, comme ceux qui terminent ordinairement les repré- .
sentations de ces jeux populaires. "
A la page 70, vers 1", mon manuscrit porte: Gant turt hen
disaeret, et je mets en note, h 1[1 page suivante, que ne connaissant
pas le mot d'isaeret, je n'ai pn le traduire. Dans le manuscrit que
m'a communiqué M. de la Borderie, .le lis: en tones t1/;t q1œn
disacret. Disacret est, je crois, la bonne leçon, et signifie, à la
lettre, désacrés, impies, pai"'mi des ge-ns si impies. Le mot disaeret
pourrait aussi passel', à la rigueur, et ètre traduit par di~~ol~iS. On
lit en effet, dans le Dictionnair'e breton moyen de M. E. Ernault,
la suite du mystère breton de sainte Barbe, p. 271: D'isaeren,
délivrer, délier, déchaîner; participe passé disaeret. Mais, je le
d'isacret, du manuserit la Borderie.
repète, la bonne leçon doit être
la page 72, après le chant de Alba et avant celui de l'Ange
le manuscrit de la Borderie met dans la bouelJe de Clervie
Gabriel,
les quatre vers suivants, qui manquent à notre manuscrit:
A c'houi, 01 sent ha sentezecl ,
En hon horfou consideret,
Ha pedet evidomp eun Doue
Ma halfomp heuil he volon le.
Et vous tous, saints et saintes,
. Considérez no,s corps,
. Et priez pour nous Dieu,
Pour que nous puissions suiHe sa volonté.
A la page 74, les six vers (lni com~nencent ain::;i :
Ne ôn ket ma c'halon hac hen a resisto
et qui sont dits par Fragan, dans notre manuscrit, SOllt lll i:; d~Ü1S
la bouche d'Alba par le manu~crit (le la Borderie, et les sept ver:;
qui suivent et qui com mencent ainsi :
o ia, ma gwir bried, neb a fi en Doue
sont attribués à Fragan, au lieu de Alba.
A la page 103, ligne 22, la traduction du vers breton correspon
il faut la restituer ainsi:
dant a été omise;
Vois-tu, mon ami? te voilà abattu,