Responsive image
 

Bulletin SAF 1939


Télécharger le bulletin 1939

L’Instruction dans le Finistère pendant la Révolution (à suivre)

L. Ogès

Avertissement : ce texte provient d'une reconnaissance optique de caractères

Société Archéologique du Finistère - SAF 1939 tome 66 - Pages 67 à 102

L'Instruction dans le Finistère
pendant la Révolution
1. De 1789 à 1793

APPLICATION
DES DÉCRETS DE UASSEMBLf:E NATIONALE

Sons l'anciell reg ime, la Ba~se-Bretagne possédai t llue­ organisation scolaire assez parliculiere ( 1) . Celle organ i alion­
fonctionnail so u s le contrôle du clerg~ et des assemblè('s
paroissiales. Les éco les eta ien t répandues,' non seulemelll
dan s les villes, mais encore dans les campagnes. Elles dis­
pensaient aux enfanls des co unai ssa nces . rudimenta ires certes ,

mais suffisantes pour l'époq ll e . Les collèges, très peuplés,
recevaient l'élile de ces écoles el préparaient aux I"o ll ctions
libéra les ou sacerdotales.
Les xv', XVI ' et :-;vu " s iècles ont été dans le L éon, le pays
d e Tréguier et la Cornouaille. 11011 pa s, comme on le croit
généralement, des siècles d obscuranlisme. m ais lI11 e époq ue
où J'instruclion ava it atteillt Uil niveau insollpço llné .
Ma lgré J'indifférence de la monarchi e, qui nég ligeaittola­
lement l'instruction du peuple, et malgré le mallvais vouloir
·du Parlement d e Brelagne le nivea u intellectuel de la Basse­
Brelagne était relativemen t élevé . Tandis qu e les écoles
françaises éta ie n l presq ue excl us i vem e ll t confessio nnell es . les
questions d'éd ucation générale on t len u chez nOli s un e
place plus imporlante dan s J'espril dll peuple. La COrI lo li a ill e
et surtout le Léon constituaient lIne d émocratie paysanne;
(, ) L. Ogès, L'Instruction sous l'ancien r-égime dans les
Finistère actuel, dans le Bulletin de la Soc. archéol. du
t. LXIII, 1.936 et LXIV, 193ï.
limites du

cette démocratie fonda. en colla bora lion a vec ses prêlres,
presque tous d 'origine roturière, d es églises et des chapelles ,
ma is auss i des écoles élevées pour le bénéfice de la collec-

li l'Ile . , .
L'a rl populaire breton et le développement de l'inslru c li on .
sem bien t a voi r élé étroi tement liés en Basse- Bretagne. Vers
le milieu dll XV III" siècle, l'instru c ti o n populaire et l'art pay~an

tl échiren t en même temps . .
L'organ isa l.i on scolaire, dont l'a c ti o n avait été heu~euse
io d'autres époques . avait besoin d'être réform ée. A la veille
de la Révoluli on, les col lèges et les petites écoles , ell raison
surto llt de la situatio n éco nom ique, avaient périclité; leur
nombre avait cons idérab lemen l diminuô. L'éd ifIce scolaire
dli a l'initiative de l'Eg li se et des g roupem ents paysans
011 bourgeoi s, éta it en t'Ilin es ; l'igno rance ,se répa ndait de
plus en plus.
Les Assemblées révoluti onn aires réussiront-elles a répandre .
a nouv ea u dan s le pays les bienfaits d'une in stru c tion dont
le beso in se fai sa it de plu s en plus sentir ? C'est ce qu'on se
propose de rechercher clan s celle él li cie.
La Consti tllante décid a sagement de garder provisoirem ent

le système scolaire de l'Anci en régim e. de n e pas détruire ce
(lllÎ exista it déjà. Le décret du [ :-1 octobre J 790 stipula qu'
« afin de ne pas arrête r le cours de l'in stru clion », les ren­
trées scolaires se ferai ellt comme à l'ordin aire.

Mais une sé ri e de mesures ne tarda pas a venir j eter le
trouble dans cette o rga nisa tion scolaire qu'on voulait main­
tenir. Le décret du 23 octobre décida la vente des biens des
"eligieux et reli g ieuses chargés de l'e nseignem ent public . Le
déc ret du [8 aoflt 1792 supprima la congrégation des Frères
d es Ecoles chré tiennes et interdit l'enseignemen~ aux religieu­
ses et aux prêtl'Cs . Enfin, le décret du 8 rriars IJ93 stipula

qu e les biens formant la dotation des établissements d'in s-
tru ction publiqu e seraient vendu s national ement. à l'exception
des bàtiments servant à l'enseignement et des logements cl es.
institutellrs. .
Cet ensemble de mesures chan gea trop brusqu ement J"all-

cien état des choses . La Con stitllante ne lennit compte ni des
mŒurs ni des instituti ons qui fon ctionnai ent depui s cles
siècles et allxqllelles o n était habitu é, Les revenu s des écoles .
qui en ass uraient le fO ll ctionn emeut, di sparai ssaient et il.
n'était p .I S créé d'aulres ressources pO lir les rempla cer ; l'all ­ cie ll personnel fut Dispersé avant que le recrlllement de

nouveaux m31lres eu t ete assure .

Qu el' va être dan s le Fini stère ( 1) le rés llltai. de ccs-
décis ions ?
En vu e d'assllrer le recrutement du collège de Quimper.
dont l'efl"ec tif se rédllisa it de plll S en plll S, le Bureau eccl é­ sias tiqll c du dio. cèse de Cornouaille ava it créé en 1787 dell x.
éco les à Pont· Cro ix et à Pl eyben. Les prêtres chargés de
ces écoles devaient prépa rer des sllj ets pO Ul' les collèges et
recevaieut, SUl' le foncls des décimes dll Blirea li di océsa ill , 1111
tr .li tement de 200 li vres par .In. Le traitement fllt payé jlI S­
qu'au 3 1 décembre 1789 ; il fllt sllpprim é lorsq ll e les bie ll s·
ecclés iastiqll es devinrent bi ens nati onallx .

Les écoles de Plp)'bell con ti n li èrent cepp nda n t il l'o nc ti on lI el'
SO ll S la direction de l'abbé Mocaë r, qui se croya it assllré d'lln e­
rémunéra ti oll . Il la Na tio ll ayant pris, en même temps qll e les
bien s ecclés iastiqll es , les dettes'contra ctées par le clergé sm'
ces bi ens ll . E n 179 1 il réclame au district ci e Châlen illin ses

(i ) La dlvisioll de la Bretagil P en cinq rlPparl pl.llents fui décid{'" p lr
l' Ass· mlJlér naliouale rlam , a sranœ ~u 14 jau'ier '17~IO ; OJais c," ne'
fu l qu e le 28 du n:ême mois qu~ purr nl Nre lixtlp~, après de VIV r S
polémiques, Ips li mi tes des différents dépa rtemelf ts Le fini slbu' fui.
apn\s des rllse ll,,~ i ,'ns passionnées. pa rl agé ~n neuf dlS'riels : dislriels
de Mol"ialx, Lrs oel'r n. (,Hll dp l"lleau , BI l'st, I:h:'tleaulin, Ca rhaix, 1'01l t­
Croix, Quimper el Quimperle .

·émolum ents pour J'année ' 790. Par arrêté du [ 0 mars 179'"
,le directenl' du di strict en autorise le paiement. mai s n'assure
,pllls ce pai ement pOllr l'avenir. L'abbé Mocaër ferma alors
son éco le et fut nommé curé de Leuhan.
Le sie lll' Quillivic, prêtre-illstituleur h Pont-Croix . récla­
ma iL ég.del nen t sa Il tra i t e rn en t à co m p L er cl u , '" j an vier ' 790.
Fréqllentée par 60 à 80 élèves, son école fonc tion nait dans le
loca l des archi ves de l'hôpital Sa int-Yves ; sepl élèves éta ient
en étal d'êt.re reçus vU col lège de Quimper. Il continua
d'exercerju sCju 'en ma!'s [79 [, puis, ne recevanta ll cun sa laire,
il abandon na 'ses fonc ti ons et devint vica ire constitülionnel
de Plozévet.
Les cap llcin s tenaient à Aacliern~ une école Lrès fréq ll ent ée
et q lli d ispensa it Iln ensei;\lnement sllpérieur à celui des peti­
tes écoles, Leut' établissement l'lit fermé conformément au
déc ret cil! 23 octobre '790 ; il contena it ci eux frères cap ucin s
e t cieux rpl igieux prêtres qlli prôtèrent serment; l'un d 'e llX
dev in t même présiden t de la société pap illaire d'Audierne,

en l'an I! l. Fa isa nt état clc lelll' civisme , la Tlluni cipalité
,d'Âucli el'lle demanda le Il1nillLien Il des religieux qui vaqu ent
à l'édllcatio n des enfanLs . lellr appren nent à lire, écrire,
même le lilt in , et leu r dOllnelJL qllelques notion s de pi lotage· »)
{ I), La rCljuèle demeura sa ns effet,
Le ï aoù t 1792, le Conseil général du Finistère décida qu e
les bàtill1t:nts du co u vellt servirai ent de pri so n aux prêtres
ëlgés a l! i Il fi l'm es .
Troi s des plll s imporlantes écoles rllral es du déparLement
-clisparure llL clonc du fai L dll décret du 23 octobre 1790.

(11 [)pl lllération du -17 se pleml,re -1790,
:\ moins d'indications contraires, les documents ulilisps dans cette
' tu Je. pl'o,ienncnt dèS Archiv es du Fi ll isli' I'e, srrie L, dossiers Instruc­
tion publique.
Les loi,,_ drcrets et rappol:ls ont été pris dans 0, Gréard, Législation

Le décret du ~ ,2 mars 1791,

obligeant les in stitnteursà
prêter le serm en t ci viqu e, allait agg raver la situation et pré­ . 'cipiter la ruine des p etites écoles .
Sou s l'Ancien régime, le Finistère ne possédait qu'un e seul e
école diri gée pa r les Frères de la Doctrin e chrétienne. Elle
fonc tionna it à Brest et à Recouvran ce depui s 1 '746 ; la sup ­ pression des classes à Recouvrance avait été déci'd ée « jus­ qu'à des temps plu, s h eul eux n.
En juin 1790, l'école des Frères continue à fonc ti onn er du '
,côté de Brest; elle est m ême trop exig uë, vu le nombre d'en­
fants qui la fréquenten t. A la suite des mesures p rises p ar la
Con stituante. les frères refusent ' : 1 ° de prêter le serment
prescrit par la loi du ~6 décembre J 790 ; ~ ' d'assis ter à la
messe paroissiale di le pa r un prêtre asserm enté et d'y condui re
leurs élèves ,
Appelés à s'expliquer deva nt le Conseil général de la ville,
les frères, dont le directeur se n omm e Pierre-Joseph Cll arpi,
·dit frère Fabi en ; le second, Claude Lo uvi o, dit Fraterne;

le troisième, Pierre Le Tellier, dit Co nstance et le quatrième.
J ea n- Louis Bazille, dit Hermanfroy , déclarent qu 'il est vrai
qu' il s ont cessé de conduire à la grand'messe paroissiale les
enfant~ co nfi és à leurs soins, ma is qu 'il s ne sont point dan s
cette obligati on ; du res te, leur conscience ne leur permet
pa s d'assister eux-m êmes à ces m esses qui sont célébrées par

des prêtres ayan t adopté la con stltu tion civile du clergé, ce

qu 'il s trou vent contraire à la religion; il s aj outent qu 'ils n e
d oivent au surplus compte de leurs opinion s qu'à Dieu seul.
Le Co nse il , « co nsidérant qu'il serait dan ge reux de confier

plu s longtemps l'éd ucati on des enfants à des hommes dont
le fanati sme se m anifes te au ssi publiqu ement; con sidérant
d 'ail leurs qu'il s ne sont point en éta t d'enseigner les premiers
principes qui do ivent servir de base à l'éducation des enfants

d'un peuple libre, arrête qu'à dater de ce jou r les dits frères
cesseront d'enseigner et de recevoir le traitement qui leur est
accordé par la Ville» .
Le traité, passé le 5 janvier 17L I'3 entre la Municipalité et le
Supérieur général de l'ln stiLLlt des Frères, relatait que la mai­
son d'école et le mobilier appartenaient à la Ville. Le 13 avril,
les scellés furent apposés sur l'établissement et il fut demand é
à l'Assemblée nationale de décider comment et en faveur de
qui on devait disposer des effets mentionnés dans l'in ven­
taire (1) .

Le Directoire du département du Fini stère interprèta le·
décret du 22 m ars 1791 comme s'appliquant seulement aux
maitres d'école payés par l'Etat. En répon se à une lettre du
Directoire du di strict de Morlaix, il écrit le 30 septembre 179 [ :

(( Nous vo us observon s qu'en pénétrant l'obj et de la loi, il
ne nous paraît pa s que vos maîtres d'école soient assujettis.
au serment qu'elle prescrit, non plu s que les fill es 'du Tiers­ Ordre de Saint-Dominique qui peuvent subsister en l'état
. comme congréga tion séculière. Nous ne rega rdons comme·
obligées à ce serment qu e les personn es chargées de l'in stmc­
tion publique dont les frais se payent par l'Etat. SO ll S ce
poiot de vue, vos dames Ursulin es nous paraissent dans le­
cas de le prêter pour les extern es et non pour les intern es,
parce que l'enseig nement public fait parti e de leur in stitut ».
Le Directoire départemental se trompai t : le décret du
22 mars 1791 visait tous les instituteurs et institutri ces pu­
bli cs ou privés.
A Morlaix . ville où les prin cipes révolutionnaires avaient
été accueilli s avec enthousiasme, quinze maîtres et deux

maîtresses d'école qui tellaient des écoles parLiculières.

(il D'après le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du.
26 mars i 791.

Dix seulement prêtent le $erment exigé par la loi ct·promet-
. tent d'élever les enfants, à eux connés, dans les principes de
la Constitution. Les sieurs Jaou en et Dubois prêtent serment
le 20 févri er Ti 9 1 ; Gilles Hamon et Joseph Cabon le prêtent
le 2? fév rier.-Quant aux autres, ils se font tirer l'oreille : il s
savent que les maîtl'es assermentés n'ont plu s la confiance
des famill es et perdent la presque totalit~ de leurs élèves . SUl"
no uvelle injo nc tion du maire. six autres s'exécutent cepen-

danl le 30 jllillet : François-Joseph Hoc hal"l, maître de ma-
th ém atiques. Ollivier Le Pi chon , 'La l'cher, Urbain Créisméas
et Cambon, dit La Pensée. .
Le même j our, le sieur Bougearcl, ex-chant.re, bonn etier et
maitre d'école, convoqué à l'hôtel de ville, refn se de prêter
sermen t. Accusé de donner à ses élèves des conseil s contraires
aux idées cie la Révolution, il est déclaré suspect et immédia­
tement concluit en priso n. En passa nt deva nt l'arbre ci e la
Liberté, il arrache cie so n bonnet la cocarcle tricolore et, la
jeta n t à terre, il la piéti ne . Co nd Il i t a Il Fort-la - loi. à Brest.
il comparaît, a près un e long ue détention, clevan t le tribun aL
révolnti onnaire de Brest qui le conda mne à mort, le 2 1 juil­
let ' 796 . Il fut g uillotin é le j ou I" même.
Les autres maitres d'école, Bu rid an , Aubry et Hervé Le
Bras, refnsèrent a uss i le sermen t et furen t déclarés s uspecls .

Il en fut de même pour h demoiselle P ica rd , maîtresse d'é-
cole de la rue cie BOl1rret et Marie-Fra nço ise Collonge, « ensei­
gnant à lire à plusieurs enfants clu sexe)). Injonctio n ful faite
aux. réfractaires de s'abstenir désormais de faire la classe,
. afin cie ne plus propager parm i leurs écoliers des principes.
d'i nci visme.
Quant a u sieur Capitaine, « maître ci e latin n, mis en de-

meu re cie se soum ettre à la loi, il déclare « ne vouloir prêter
aucun sermen t, même pas le sermen t civiqu e )) . Il vel lt par­
ler th éolog ie, mais le bllreau l'efnse cie l'écou ter et ex ige une
déclaration écrite. llllli est enj oint cie cesser imm éd ia tement

ses fOIl C lioll s, « aLtendu qu'un homme qui blâme et désap­
prouve la constituti on ne peut propager parmi ses élè ves que
·d es principes d'in civi sme et de désob éissance >J . ;

La municip::llité transmet au district les lIoms d es suspects
et demand e qu elles mesures il convient d e prendre à leur
égard. « Leur re fu s d e prêter serment, joint à un e résistance
opini âtre à nos sages représe ntati ons, les r end plu s qll e su s'­ pects a u publi c et à ceux qui sont dépbsitaires de la tr-anquil-

lité. Nous vo us faisons o!?server qu'ils paraissent indifférents
et insensibl es aux m eS Ures qu e la loi a d és ignées e t qui n o us
paraissent insuffisantes pour arrêtel' le cours de leur doctrine
pero icieuse » ( 1).
J ' ig nore la su ite donnée à cette demande.

U ne dénonciation non signée, provenant de la ·société des
Amis de la Constitution, parvint au district; e ll e demand ait
qu e les fill es d e Sa int-Dominiqu e « imbues des vieux préju­
gés dll clergé el sc ra ngeant au nombre des improbateurs de
la Con ~litut ion nouv ell e >J, fu ssent, elles aussi, soümises au
sermen t.
Les fill es du Tiers-ordre de Saint-Dominiqu e avaient, avant
1760, réuni da ns leur mai son des fillettes qu 'elles in strüi­
sa ient « à linger et dans le méti er de taiUeuses » , et auxquell es
elles donnaient les premiers enseignements scolaires . En vue
d'étendre les servi ces qu'e iles rendaient. des personnes ch a­ ritables leur avaient fait don c1 'une mai son; d'autres don s
leur ava ient permis de j oindre à l'édifice primitif un autre
auss i co nsidérable.
Appelées à prêter serment. elles refusèr ent; leur établi sse­ ment fut vendu comme bien national et la modes te école
-cessa de fonctionner.
Plu sieurs établissements reli gieux di sparurent dan s les
mêmes cond itions, en tre autres celui des Augustin es de

'Carh aix qui tenail un p en sionnat Ool'i ssant et ceux d~
Bres/' o ù les relig ie ll ses de Saint-Tho ma s et d e J' U nion
·chré ti elln e d onnaient aux fill es les premi e rs élém ents d'ins­ trn c t io n .
A Saint Pol de-Léon , vill e é pisco pale imbu e des idées de

l' An cien rég im e, l'é ta t d'esprit n'é tait pas favo rabl e a la
Révolilti o n . Plu sieurs m aîtres d'école continuai ent a e nsei­
g ne r sa li s av oir prê té serment. La muni cipa lité les fi t com­
pa raltrc deva nt ell e ; il s co nsentirent a se m eUre en règle
avec la lo i, a l'excep tio n dll sieur Mé nez qui s'y re fu sa n et­
te m ent, d éclarant que, s'il prêtait le serm ent , il p erdra it
to u s ses élèves ; il aj outa qu'a partir de ce j our il ferm ait
so n école. .

. Les dem oiselles Bléas fir ent les m ê mes déclaratio ns ; d éfe nse
lellr ful faile de conlinu er leurs écoles .
La commull e de Guimilia u avait p our in stituteur J acq ues
Coa t. dont Je civi s m e éla it d outeux. Il fnl dé no ncé pa r le
prètre co n slitillio llll ci de Lall1p al ll « co m me Ii o lo ire ment

conou pOllr ses pri:l c i[les in civiqu es e l in spirant a il p eupl e le
pill s g ra nd mépris pOli r les pl'êlres as~erme llt és >J , Une
enqll ête fut o uv erte le 30 décembre 1792 par les so in s du
m a réchal des Logis de Landi visia u. O n li t da ns le p rocès-ver­
b al rédi gf\ pal' cet agent:
{( J e certifi e (Ill'étan t se ul. la ve ill e . a il bourg de G ui m ili a u ,
e t voya nt un e qu a n tité cl c m ond e qui s:assembl a it da ns
J'église, je m' y s ui s tra nsport é a llX e n viro ns de 9 h. du m a tin .
. J'v a i troll vé un rassem bl e me n t très co nsid érabl e de mon de

de dijJérents sexes (sic) qui chantaient une espèce de plein

champ (resie). Ayant vu sur le maitre- autel deux c ie rges
.alillmés et plu sie lll's pa rti c llli ers clall s le c hœ ur , desq uels j 'a i
reco nnll Ja cCJlles Coa l, du dit bourg, qlli entonnait le dit
plein champ a u pupitre e t y fai sait les mê m es cérémonies CJue
les ci-devants prêtres .
Après a voir fa it la gaerre à l'œil pend a nt qu elques

ml!1U-

tes, j'ai aperç ll dans tout ce concours de monde, des airs.
menaçants par les regards qu'ils me faisai ent, ce qui m'a fait
p rendre le parti de m e retirer Sllr le champ dalls Ilne auberge

c!1l bourg Il .
La sui te réservée à ce rapporl ne nous est pa s con nue;
san s doute les fo nc ti ons d'institllteur furent- e ll es interd ites
au si eu r Coa t.
Recon naissons toutefois q Il e, si les fo nctions d ' in stituteurs

ou d ' in stitutrices é ta ient refu sées aux: propagandistes des
id ées reli g ieuses, elles l'étaient également aux: détract~urs de
la reli g ion.'Témoin la mesure pr ise contre le sieur Abiven,
instituteur à Cléder.
Yves-Guillaume Abiven, originaire du Folgoët, exerçait à
Cléder depuis 1787. Le 22 aoùt 1790, la municipalité le·
d énonce comme coupable:
1° D'nvoir proféré des discours impies da ns le public.

2° D'avoir, lo rs de ),As~emblée primaire à Cléder, trOll blé·
les scruta teurs.
3° De continu e l' les écoles à Cléder sans s'être conform é à,
la loi qui ex ige le consentement d e la municipalité.
Il rés ulte d e l 'enql](~te que C( le sieur Abiven a maintes fois·,
tenll les propos les pi liS d llrs contre les mini stres du culLc'
divill. 11 a dit et répété qll'il n'y avait ni Di eu ni Diable; que,'
CJuand Uil homme m ourait, SO Il âme passa it dans le co rps,
d 'un fl iltre ; enon , que les ecclésia stiqu es ci e Cléder n e me­ na ient pa s uu e vi e exemrlaire et qu'il s étaient galan ts ".
De nOll1breux tém oin s d éposent qu'Abiven à maintes foi s.
tenu des pro pos malhonn êtes il sa femm e, l'a mi se bors de la
ma i so n à des h eu l'es i nd ues . si bieu qu 'elle a d Ct se retirer à
Landi visia u, chez ses parents ,
« Le bon exemple es t le' meill eur maiLre qu'o n plli sse don ­ uer à des jeunes ge ns susceptibles, surtout dan s la ca illpagne ,.
d e se la isser entraîn er par les man l'ai ses impul sions ... Gnil -

la nrrie Abiven est pe ll prop re il éleve r la j eunesse .. , li

En con clu sion de l'enquête, signée p ar 35 habitant s de
'Cléder, le Con seil du di strict « fait défense au sieur Abiven
d e tenir à l'a venir aucun propos scand aleux et d'être plu s
- c ircon spect dans sa cOllduite , m ême de n e donner au cune

instru c tion publiqu e ou parti culi ère à la jeunesse de lad it.e
paroisse ou de toute autre san s y êl re préalablement a u-

'1on se )J .
Renchéri ssant sur cette d~cis ion, le Directoire du départe­ m ent interdit les foncti ons d 'enseign ell'lent à un · instituteur
. - qu'il juge indig ne de s'occuper de l'édll ca ti on des enfants. Il
lui ord onn e cie « porter resp ect à la reli g ion et d'être plu s
- circonspec t cl ans sa conduite, sous peill e d'être expul sé de la

paroisse ci e Cléder, n'en étant pa s ori gin aire l) .
Ce tte sage mesure dén ote qu'en ' 790 l'Admini stra tion

départem entale n'était pas aveuglée p ar l'esprit de pa rtI
et qu 'elle sa vait ju ger san s parti-pri s. Malheureusemen t,
- sou s la poussée des événements, ce t éta t de chose va bi entôt
' ·chan ger.

Pa rmi les co ng régations qui s'occupaient de l'in stru ction
des filles, la prin cipale était celJe d es U rsul ines . Ces reli gieu­
ses enseignaient à Quimpe r, Morlaix, Saint- Pol-de-Léon,
Landern eau. Carhaix , Quimperlé et Pont-C roix.
Requi ses de prèter serm ent, les Ursulin es de Quimper se
- conforment à la loi; le Directoire du département les autori se
à continuer leurs fonc tions, « p ui squ'il est notoirement connu
qu'ell es font gratuitement les écoles publiqu es et qu e cI'un
autre cô té les vertu s civiqu es de ces filles méritent les plu s
,g ra n ds éga rds. _
Toutefois elles seront tenues d'o béir à la loi ordonnant la
'suppression des costumes religieux ».
Leurs biens ayant été confisqués, les Ursulines reçurent un
-traitement variant de 5 0 0 francs pour les religieuses âgées d e
m oin s de 4 0 ans . à ,00 fran cs pour les sœurs àg-ées de Go au!:'
et au-dessus.

Cependant, quelque temps après , malgré les vertus civi-
qu es de ces religieuses qualifiées , dans un rapport. de « sans­
cu lottes v , le Dépa rtement dut à regret, et par ordre, pro­
noncer la di ssoluti on de la Communauté. En l'an II. l'enclos
du co uvent éta it occupé par des p ri so nni ers angla i~ .
A Morlaix, la muni cipalité versait aux Ursulin es un e sub­
ven tion pour l"enseig nemellt donné aux fill es pauvres de la
ville. Appelées à prêter serment, les religieuses s'y refu sent;
o rdr~ le u!" eS,t do n.né ~e . ferm~r leur ]établ.i sse m.ent. E lles
con tinu en t neanm Olns a InstrUll'e les penSIOnnaires et les­
extern es payantes . La mu nicipalité es tim e qll 'agissant ain si
eJles ne tombent pas so us le coup de la loi. Cependan t le
procureur Andri eux informe le Département que les Ursulines
élèvent les j eun es fill es qui leur sont co nfiées dan s des prin­ cipes erronnés en ' leur co nseillant de ne point assister aux
messes des prêtres ass~rmel1tés . « J'en ai la preuve, écrit · il ,
dans la déclaration souscrite que m'ont faite l'épouse dl] sieur
Coquil et la veuve Le Roux. C'est à vous," Messieurs, de voir
s'il co nvi ent de leur so ustraire les pensionnaires au- dessous
de quatorze ans . » ( 1) .
Le Directoire du Fini stère déclara qu'a ucune distin ction
ne pouvait être faite entre .les di verses ca tégo ries d'élèves et
ordonna la fermeture de l'établi ssement. Les religieuses furent·
exp ulsées le 28 octobre 1792 ; leur couvent fut transformé ·
en hôp ital militaire.
Les Ursulines de Saint-PoL-de- Léon quittèrent leur couvent
le 9 mars 179 2. Elles se dispersèrent et continuèrent à vivre
secrètement en communauté et à tenir des écoles soit à Saint­
Pol-de-Léon, so it dans les communes voisines .
Les renseignements fournis par le citoyen Guillou, à la

dema nd e du Commi ssaire centraIdu d épartement, nous ren­
seig nent sur leur ac ti vité : « Il ex i~ te à Saint-Pol-de- Léon
d ouze ci-deva nt religieuses Ursulin es . Le nombre des élèves
est de q uarante à cinqu ante. do nt neuf pensionnaires .
« Le genre d'instru ction co nsiste dans la lecture , l'écl'itu re,
les éléments d'arithmétiq ue et le ca téchisme chrétien.
« Leur e xistence dan s cette commune es t, de l'avis unani­
m e des bons citoyens , util e sous plu sieurs rapports ; le
témoig nage des républi cain s n'es t point équivoqu e à cet
égard. Je me suis ass uré que ces institutrices ne contrarient
p oint les vues du go uvernement et n e s'occupent que des
principes de la saine morale. Le soin qu'elles prennent d'ap-

prendre à leurs élèves les ouvrages ordinaires aux femm es
es t sing ulièrement recommandable. Notre commun e, privée

de toute autre resso urce d'enseig nement. applaudit au zèle,
aux talents et à la surveillance matern elle de ces citoyenn es .

« Il me serail impossible de peindre les ri'u ances d'opinion
p olitique des parents de leurs élèves , mais il m' es t doux de
vous annoncer qu e les citoyens dont le patriotisme épro uvé
es t généralement reconnu , co nfi ent leurs enfants à ces in sli-

tu tri ces ...
« Trois ci-devant relig ieuses ne vivent pas en commun;
l'une, Marie-Françoise Naye, de la communauté de Land er­
n eau, fait des écoles gratuites de simpl e lecture à un nombre
indétermin é de petites fill es indi gentes ... )) .
A Plouén an, 3 anciennes Ursulines vivent en commun et

instruisent 18 jeun es fill es, dont 1 2 g ratuitement; 4 autres
Ursulines vivent en commun à Plou goulm et réunissent 2 1
j eunes fill es, dont deux pensionnaires .
Les U rsulin es de Carhaix refu sent de se constitu er confor­
m ément à la loi. Malg ré cela, la municipalité carhaisienne
sollicite leur maintien . Le Directoire d épartem ental refu se de
faire droi.t à cette demande : « li dépend de ces fill es de don­
n er satisfaction au V Œ U des habitants en se soumettant à la .

loi comme l'ont fait plllsielH's communautés du départem ent.
Lo in de favo ri ser d'aussi mauvai ses citoyennes, ce se ra it un
de\'oir pOllr tOll S les patriotes de détruire des congrégations
pernicieuses, où J' a ristocratie et le fan a tisme préparent leurs
poisons les plus dangereux ... ))
Les Urslllines de Carhaix furent expulsées en avril 1792 .
La com m unau té des Ursul in es de Lesneven corn prenait en
J 79 1 vingt-six choristes e t. quatorze sœurs converses. Après
confisca ti o n de leu rs bien s, elles reçurent un traitement de

9.900 1. par an (300 1. pour chaqll e religieu se de chœur et

150 pour chaq ll e sœu r convp.rse ), Ce traitement leurfutretÏré
lorsqu'elles eurellt refusé de prêter sermen t. La municipalité
voulut empêcher l'expul sion des sœurs parce que leur couvent
ser va it de refuge à \.lu e soixanta ine d e reli gieuses appartenant
lUX communa utés supprim ées et parce que ce vaste bâtiment
ne trouverait pas acq uéreur lorsqu'il serait mis en vente.
L'administration n e tint pas compte de cette délii.Jération
et fit expu lser toutes les reli g ieuses .qui se trouvaient dan s
J'établissement. Le couvent fut tran sform é en hôpital pour
la marine. Le département l'acheta en 1828 et le donna sous
certaines cond itio ns a ux sœurs de la Retraite.
Le couven t des Urs ulin es de Lande/"Ilcaa.devint le siège de
l'administration départementale en 1;93, puis on y install a
un hôpital pour la Marine.
Les Ursu lin es de Ponl-Croix reçuren t, du premier j anvier
1792 jusqu'à leu r exp ulsio n , un traitement g lobal de 6.0001.;
le 20 septembi'e 1793, deux religieuses con tinu aieI!l ellcore à

enseigner.
Les Ursulines de QuimperLé avaient 40 élèves en mai [7 92 .
E ll es furent expulsées le 28 sep tembre 1792 et ollvrirent un e
école au Gorréciuer. Le couv ent fut vendu llaLionalement le
8 av ril 1793.
L'activité des religieu ses chassées de leur couvent con~intla '
à se déployer dans les campagnes OLI elles s'étaient retirées .

Un ar rêté du Dépa_rtemenl, en date du 1 3 juin 1793 ordonna
, que (1 en vue d'éloigner des campagn es les personn es dont
ies prin cipes entreti ennent un germ e de divi sions continu el­
l es, les ex-reli gieuses qui résid ent dan s l'étend ne des territoi­
t'es des di stri cls de Lesneven et de Carhaix d ev ront se rendre
~u plu s tôt dans l'un e des vill es de Brest, Landern ea u,
Quimper ou Quimperl é, où ell es seront ,son s la surveillance
des corps administratifs __ , )

Après l'application des décrets de J'Assemblee national e, la
'situation de l'enseignement dan s le Finistère était critique ;
la plupart des ancienn es écoles avaient disparu; aucun e nou­
velle école n'a vait été ou verte,
En 1792, les Administrateurs
~Iinistre de l'ln térie ll r J'état des
clans le département:
du Fini s tère' fourni ssen t au

établissemen ts d 'i nstruction
(( Il n'y a dan s ce département au cune université et il n'y
, existe qu e deux collèges, l'un placé à Quimper et l'au tre à

Saint-Pol-de- Léo n, Dang ces deux établissements l'instru c-
{ion a to uj ours été gratuite, et avant la Révoluti on ell e était
-confiée à des proressenrs ecclés iastiques , ..
« Les bâtiments occup és par ces étab li ssements leur appar-

tiennent en propriété; celui de Quimper es t des plu s vasles
-et l'un des b eaux éd ifices de ce département; celui de Léo n
· es t infiniment moins étendu , mais récenlment co nstruit et
très bien di stribu é, ,_
«( Il existait enco re quelques autres écoles peu importantes,
mais néanmoins ulil es et rnôme nécessaires pour se préparer
à l'entrée des co llèges . Trois ecclésiastiqu es donn aien t des

leçons à Pleyben e t. à Pont-Croix, Le clergé faisait à chacun
d 'eux un secours de 200 li vres sur le produit des décim es .
Ces écoles sont supprirn ées depllis I79I. A Carhaix, les reli­
g ieuses Augu stines avaient de petites écoles, recevaient des
pen sionnaires et en faisaien t leur bénéfjce. La suppression
d e ce tte communauté a privé ce district de ce bénéfice. A
Morlaix, des particuliers étaient les seuls in stituteurs et le
son t encore aujourd'hui. A Bre~t, des frères dits ignorantins,
salariés par la commune, servaient à élever les enfants et à
leur app rendre à lire et écrire ... ') ( T)
Ce rapport ne mentionne qu e quelqu es écoles ; il est très
incomp let. On s'étonne que d'importants établissements sco­
laires com me ceux d'Audi ern e et de Landern ea u tenus par
les Capucins, les co uvents d'Ursulines de Quimper, Morlaix,
Saint-Pol-de-Léon, Les neven, Landerneau, Carhaix, Pont­
Croix et Quimperl é n'y soient pas m entionnés . Les petites
écoles qui fon ctionnaient encore en 1789 dans les communes
rura les son t égalemen t passées sou s silence.

Toutes ces écoles ont du res te di sparu et ri en n'a encore­ été fait pour les remplacer; elles ont perdu leur budget pro­
venant des fondations particulières et des rentes créées par les
paroisses ; les octrois, don t le revenu assurait le fon c ti onn e­ ment de nombreu ses écoles , ont été supprimés en 1791 ; les
inqui étud es et les préoccupations de tout genre, J'état désas­ trenx des finances communal es et surtout l'interdiction d'en­
seigner faite aux anciens maîtres civil s ou 1 :eligieux qui
refusent le se rm ent, ont porlé un coup terrible à l'ensei­
gnement.
Le 8 mars [792, le Directoire départemental s'afni ge de cet
état de choses: cc Les habitants des campagnes vivent dans
la plus affreuse ig noran ce . Il n'y a, dan s nos municipalités
rurales, que peu de gens qu i parlent la langne fran çaise et un
plus petit nombre encore qui puissent lire et écrire le fran­
ça is. De là l'impossibilité où il s sont de saisir l'esprit d es
nouvell es loi s et d'en sen tir les bi enfail s ; de là leur fa cilité à
se laisser séd uire par les malveillants de tout genre, qui ont
(1) Arch. du Finislère, 7 L 3, fo 57.

intérêt à les tromper; de là leur in capnr:ité pour la cOllfecti olll"
des opération s relatives à l'assiette des contribution s ... » ( 1).
Le 23 mai 1793. l'Admini strati on central e du Finistère·
écrit: « Les événements importants et multipli és qui se sont
si rapidement succédé depui s le comm encement de la Révo­
luti on ont to uj ours éloig né le moment désiré où J'on doit
organi ser l'in stru ction publiqu e dan s ce département )) (:n
Le go uvernement cen tra 1. lil'éoccu pé, llli aussi, pa r de gra­
ves soucis, n'a pu encore interv enir pour essaye r de relever
les écoles . Aucun essai d'organisation n'a enco re été· tenté.
Dan s l'en semble de la Fran ce, la situ a ti on ne pa raît gll ère

meilleure qu e dans le Fini stère : partout les écoles languissent
ou disparaissen t. Ta lJeyrand d ema nd e à ]' Assem hl ée na tiona le
de s'e u occuper d' urgence : « La décadence presqu e sponta­
n ée des établi ssements actu els qui. dans toute la Fra~lce,
dépérissent comm e des plantes sur un terrain nouveall qui
les rej ette, annon ce clairement que le. moment es t venu d'en­
treprendre ce grand ouvrage ... » (3) .

CBÉATlONS D'É CO LES PUBLIQUES
En l'absence de directi ves olIl ciell es , les municipalités de
Bres t, Quimper et Lesneven prirent d'e lles- mêmes les mesu­
res nécessaires pour in struire les enfants. La première école
communale publiqu e et lai:qu e s'ouvri t à Brest le 14 novem­ bre I79I.
Depuis le départ des Frères , la ville se trouvait sa ns école.
Le Gon seilmunicipaJ songeait à en établir deux pO il!' les ga r-
l11 Arch. du Finistère, L 123, fO 1. 77. 8 lIIa rs '1792, lettre au Minis­ tre tl e l'intérieur. M . Toulèll1ont. aya n t fait dl's recllerches sur les écoles
a l'époque rév olutionnaire. a bien voulu Ole co:nmuniquer ~ps docu­
ments. Plusieurs de ces docnments,' dont la noie ci-d~ssus, ont été ulilisés
dans la présente étu de.
(2) Registre de l'Adrninislralion cenlrale du Fini stère, 1793, fo B 6.

çons, J'une du côté d e Brest. l'Rutre à Recollvrunce. Il dési­
rait que )'on pût en ouvrir également une pO Ul' les filles:
«( elles;t apprendraient non se ulement à lire et à écrire, mais
e ncore un métier quelco nqu e. Ce moyen pourrait garantir la
générati on fllture des calamités sans nombre qu e cause à la
vill e la dépravation des mœurs qui y es t à son combl e)) C l).
Dans sa séa nce du 27 aoùt 1791, la ll1uni cipalité adopta les
d ispos iti ons suivantes :
1° 11 sera établi à Brest deux écoles gratu ites publiques .
2° Ces écoles seront placées , pour le côté cie Brest, dans la
maison anciennement oCCllpée par les Frè!'es cles Ecoles chré­
tiennes, et, pO Ul' le côté cie Reco uvrance, clan s celle con nu e
, sou s le nom de Maison des prêtres ,
'3° Les écoles p ubliqu es sero n.t placées sous la surveillance

·directe de la ml1nicipalité ; elles seront dirigées par ci nq
instituteurs qu 'elle choisira et qu'ell e pourra changer à son g ré.
4' Ces institllteurs seront payés pal' la Vill e comme suit:
,deux mailres à I. OOO li vres chacun, ci eux" maîtres à 800 livres
-et un à 600 livres . '
5' Chaque école comprendra cieux classes et sera placée
:sous la d irection d'un in stituteur.
6° Le cinquième instituteu r sera particu lièrement des tin é
à remplace r celui des quatre qui serait absent pour cause de
maladie. Hors ce cas , il sera aITecté à la classe la plu s nom­
breuse.
7· TO l1 s les j eu nes ga rçons, âgés de six ans au moins, fils
de citoyens domi cili és à Bres t, seront adm is sur autorisation
du Bureau municipal. pourvu qu'ils aient appris les éléments
de la lecture .
8° Pou r exciter l'émulation des écoli ers, le Maire, en pré­
-sence du Conseil général cie la ville assemblé, distribuera,
a ux époqu es d'usage' , des prix à ceux qni les auront mérités .

(i ) SélJllce de juin i 790.

Le règlement suivant fnt mis en vigueur:

« J O Les instituteurs ouvriront leur classe respective le
J 4 novembre. -
2 ° Provisoirement, les livres d 'exercice dont les parent~
auront à se pourvoir. d'après l'avis des instituteurs, sont:
Le catéchisme de l'évêché et celui de la Constitution jran-

.çalse.

Les leço "s élémentair es d' histoire naturelle .
/..,' abrégé des sciences à l'usage des enjants .

L'abrégé de la grammaire de Vailly .
L'abrégé de la géographie par Lenglet-Dujres noy .
Les livres latins ordinaires.
3° Le bllrea u municipal fera exécuter dix c roix cI'émulation

en argent, pour être distribu ées chaque sema in e aux écoliers­ les pIns méritants (1 ).
4° Les instituteurs pourront se loger clans les appartements.
inutil es aux écoles .
5° Le traitement des cinq instituteurs sera payé « par quar­
tier )) il dater dn premier novembre.
6° L'emploi clu temps des écoles es t fix é comm e sllit :
, Première classe. - Ton s les nl3tin s, perfec ti onnemeut de

l'écriture. arithmétique et lecture des manll scrits. Tou s les
soirs. les éléments de la langue fran ça ise, de l'hi stoire et de
la gépgraphie et le ca téchi s me .

Seconde classe . Le matin et le soir, lecture des lan g ues
fran ça ise et latin e, les éléments de l'écritllre et les prin cipes
de la rel ig ion.
7" Les exercices dureront. le matin de 8 b. à 10 h . ; le soir,
de2 b. àL,h .
8° Les institnl.eurs doivent sentir qll e c'es t par la dO ll ceur
qu ' il faut 'rappeler les enfants à l'applica ti on. en leur fai siJnt
(i) La ville paya "u sieur Hervé, orfâvre, la som me de. 6'O livres pour
la fourniture de ces croi x.

c hérir l'étude; ils s'abstiendront d 'user d'aucun mauvais

,tra itement tel qu e férules. etc. )).
11 ressort de ce règl emen t que Ja classe ne durait que
'quatre heures par j onr, qu e l'étude du latin, préparant aux .
, études secondaires , était touj ours en fav eur et que J'étud e du
·ca léc hi sme continuait à se faire en classe, comme sous J'A n-

,C len regl me ,
Dan s sa séa nce dl! 22 octobre, le Conseil ch oisit, au scrutin
secret, les cinq in stitutenrs qui seront chargés des écoles .
Sont d és ig nés : Bourso n, 28 voix; Mo rel, 28 voix; Lelièvre,
fil s, 2 [ voix; Julien. 20 voix; R.egnaIJJt, [6 voix.
Le Conseil fix e ens uite à chacnn la place qu'il doi t occuper

cn raiso n d e son mérite et d e sa capacité . Bourson, second é
par Regnault. dirigera l'école d e Brest; Morel et Juli en ensei-

. g neront à Recollvran~e; Lelièvre sera suppléant.
Le 12 novembre 179 l. les maltres prêtent , devant le Conse il
·etl es éco liers rassemb lés . le se rment cl'être fidèl es à la Nati o n,

à la Loi et au Hoi. tl e maintenir d e tOllt leur pouv oir la Co ns­ titution décrétée pa r l'Assembl ée Ilati onale ct acceptée par le
Roi, d e [ 'empli r avec e xactitlld e les fonc ti ons qui leu/' sont
confi ée .

On ~ vu qll e le règlement p'a rli c/lli er de la ville n'admettait
dan les écoles l)IIbliqlJ es qu edes ellfant s ayant déj à appr is les
premiers éléments de la lecture. Les fam illes indigentes pro ­ testèrent : e ll es n 'ava it pas les m oye ns de confier leurs enfants
à d es maîl l'es particuliers chargés de leur apprendre à lire .
« Le COll seil co nsid érant qu e to ns les enfants d es citoyen s
-de la vill e de Bres t ont un droit éga l à l'instruction ", revient
sur sa premi ère décision et décid e que deux femmes seront
·chargées, l'un e du cô té d e Brest, l'autre du côté d e Recou­
vrance, de mettre les enfants co nfi és à leurs soins en état
d 'être admis al/x écoles des in stituteurs . Un traitem ent d e
1100 fran cs fut accordé à chacune.
La pre: ni ère di ~trib/ltion des prix eutlieu le (( février [792.

Les instituteurs et les élèves furent. introduits devant le
Conseil. Le Procureur de la Ville leur adressa « un discours
exortatoire et de félicitation)) qui fut vivement applaudi'
. M. Le Maire manifesta au nom du Conseil combien il éta it
satisfait des progrès des élèves; puis les institutems annon­
cèrent que le premier prix avait été mérité par l'élève Cordier,
16 ans; le second par Laisné, J 5 ans, et l'accessit par Eugène .
Petit, 15 ans.
Au nom de la Ville, M. le Maire fit don au premier d'un
o uvrage intitulé Le Lycée de lajennesse, en deux volumes;

au seco'nd des Entreliens d'Eraste, par l'abbé Filass ier ; au
troisième d'un Télémaque or ll é d'estampes .
La distribution faite, l'élève Cordier prononça, au nom de
ses camaraùes, lln d iscou rs fort applaudi. A ce moment, des
enfants porteurs de deux couron nes qu'ils avaient tenu
cachées, les posèrent sur la tête des deux premiers écoliers.
Aussitot, deux autres élèves sorti rent de leur poche des fifres
et jouèren t, avec la plus vive allégresse, J'air du Cà ira.
« Ain si se term ina cette petite fêle civique qui semblait
porter la joie et l'espérance dans tous les cœllrs » ( 1) .
En dehors des écoles publiques. l'enseignement était donné
à Bres t par des maîtres et des maîtresses privés qui avaient
prêté serment et receva ient les élèves dans leur propre loge­
ment. En voici la liste, dress ée le 1

germiual, an Il.
Institu teurs :

r. Canouville, Barthélémy. 47. rue de Siam . .
:1. Did elin, François, Ill, rue Keravel.
3 . Ju lien, Antoine, H.ecollvrance.
4. H.enault. Jacques, rue Neuve des Malcbaussés (1'. [(léber)
5. Viel, Vincent, 53, rue Neuve, Recouvrance.
6 Teinturier, Jean-Françoi s, 17, Rllbian, Recouvran ce.
7. Grannier, 87 , l'n e Haute de Kerave!.

8. Sabattier, Nicolas, 4 [, rue de Siam.
9- TourneIlec, nie Cal:iou.
In stitutrices :
[. Chaze, femme Aumaitre, 3, rue Saint-Louis.
:J. PetLon, femme Letellier, 35, place Saint-Louis.
3 .. Jumeaux, Honorée, [14, rue Keravel.

4. J3eIIevllle, Marie-Anne, rue de Cré.
5. Raccape t, femme Grivaux, 6, ru e [(eréon.
6. Cou pry, femme Dupocca, 1, rue de Trave rse du vieil
escalier.
7. Le Marchand, femme Renault. rue des Malchau ssés
Kléber).
8. Mériad ec, Ann e, 16, ru e Keravel.

(ru e
9. Renaud, Marie-Jeanne, 1 [, rue des Sept-Saints (ru e Ami­
ral Lin ois).
10. Lalo uet, Pétronille, [[ , rue des Sept-Saints.

Il. Fortin, femme Crotté, Il l, rue [(eravel.
12. Baptiste, femme Bourson, 5 et 6, ru e des Sept·Saints.
13. Le Gall, veuve Plu squellec, 44, rue de la f{aàlp e.
14. Fournier, Marie, 13. rue Saint-Yves (rue,Em ile-Zola l .

15 Esteinmesse, Elizabeth, Grande rue (rll e Louis Pas teur) .

Cette longue liste prouve que les moyens ci e s'in struire ne
faisaient pas défaut il Brest.
Dans la Marine, tbu t au moins à Brest, les jeunes marins

ig norants reçu rent un e certaine instruction. Le 18 octobre
1793, Jean Bon Saint-André prescrivit l'établissement à bord

cIe chaque navire de 20 canons au moins, d'un instituteur payé
80 l. sur le vai sseaux, 60 I. su r les frégales. « Cet in stituteur
sera chargé cIe donner aux mousses et au besoin aux malelots,
des leçons de lecture, d'écriture, de calcul, et autan t q ll e faire
se pou rra. ci e leur eùseigner les premiers éléments de la
théorie de la navi ga tion )) ( l ). ,
(1) Leval. Histoire de la Yille et port de Brest pendant la Terreur,
p. 160 . .

A l'exemple de ~rest, Quimper voulut avoir aussi son école
primaire puqliq ue.
Avant 'la Révolution, cette ville était, au dire d~ Cambry,

« l'endroit de Bi'ètagne où l'on trou.vait le plus cie connais­
sances, de talents, d'au1our pour l'étude )l. Il n'en est plus

ainsi en 1792 : le collège a périclité, les écoles tenues par les
particuliers ont disparu ("une après l'autre; les familles pau-
vres n'out aucun moyen de faire instmire leurs enfants,
Sur la demande de la municipalité, un e école primaire
publique fut ouverte Je 16 avril 1792 en vue d'in struire gra­
tuitement les enfants de la ville. La directi on en fllt confiée
à l'abbé Jean Le Coz. vicaire de la cathédrale, qui avait prêté
serment. Il fut secondé, pendant quelques mois, par l'abbé
Le Gac, ancien professeur au collège (1) .
L'école rut in stall ée dans un local dépendant du couvent
Saint-François (2). Elle fonctionna grâce aux dons patrioti­
ques des habitants de Quimper. On y enseigna la lecture,
l'écriture, le calcul et les éléments cie la latinité en vue de
l'admission des élèves au collège.
13ientôt les locaux ne su[firent plus à conten ir les nombreux
éco liers accourus de la ville et des communes voisines.
L'édifice, dll res te, menaçait mine; lin j our. la cheminée
de la cuisine qui servai t de classe et où s'assemblaient uu e
soixantaine d'enfants , s'écroula avec fracas . L'écroulement
n'eut heureusement pas lieu pendant la classe: les élèves

('1) Ayant refusé de prêter serment, l'abbé Le Gac dut se rél"ugler eu
Espagne. H evelJu il Plonévt'z-Porzay, sa paroisse nalale, il fut arrêté,
delpnu au Château du Tal1l?3U, puis dépodé en Allemagne. I\enl ré en
France après l'amnistie, il n)ourut chanoine de tH calhéd r 'alp.
(2) Le Couvent Saint-François ou des Cordeliers, le plus ancien
établiss~ment francis ca in de Brelag,H', fondé en 1232 par l'év L'que Rai­
naud, occupait tout l'espace qui s'étenrl enlre les rues du Parc, Saint­
François, Astor et le Quai du ~teïr. Vendu sous la RévolnLioll cOllîrre
bien nalional, il ful démoli en UI4.1i.

les plus rapprochés eussent infailliblement été écrasés; d'au ­ tres écroulements étaient à craindre ; il était urgent d e trou-
ver un autre loca l. -
L'abbé le Coz demanda que l'école fut tran sférée dans les
hâtiments inoccupés du collège, donnant sur l'hôpital Saint­
An toine (aujou l'd'hui. maison d'arrêl) .
. Le Directoire du département, " consid éra nt qu'il p.st de
son devoir de favo riser. autant qu'il est en son pouvoir, tout
eta blissemen t tendant à propager par u ne éd ucation bien
entend ll e ce t esprit public qui apprend à l'hom me à s'élever
à la bautellr de sa dignité, au to ri se M. le Coz à s'établir, à
dater du 10 septemb re 1792 , dans le bâtiment désigné par sa
pétition J) ( 1). '
Les éco liers furent répa rti s en cinq classes; il est à croire
qu'ils firent de rapid es progrès, ca r l'abbé Le Coz reçut les

félicitations du directoire départemental parce qu e son éta-
blissenlent propageait « les principes qui sont la base du
go uvernement français et que j'adm ini stra tion a été témoin
des progrès des élèves ; elle a applaudi à l'éduca tion qu'ils
reçoiven t » (2).

a) A l'ch. du Finistère. 4 L 1l *, fo 222 (22 aoùt i 792).
(2) L'abbé Jean Le Coz, né à Briec en 1.756, fut ordo nné prêlre en
1770 . Ancien professeur à Plouguernevel , puis au sélllinaire de 'luimper_
il éta it vicaire épiscop,l en 1792, lorsqu'il accepta la direction de l'ecole
primaire de Qnimp~r . Il abando nna les fonctions d'instituteur en 1794,
dev iot recteur de Châreaulin où il dirigea plus lard uoe importante
école. D e 18i4 ~ 18t 7 il fut cU!'é de Carhaix. On lit dans le répertoire
des personna\Jtps du Finistère dressé en i809 par le préfel Miollis:
« Cu ré rie Carhaix; membre du Con seil municipal. AgA de 50 ans;
revenu 4.000 [rHncs. Il a suivi avec beaucoup d'énergh la carrière de la
H évolulioll. Il avait bea uco up d'ennemis. Le zèle qu' il montra dans ses
fonctions curiales et ses connaissances ont réduit au silence Ilombre d'en-,
tre eux. Il a des lumières. On lui a été longtemps redevable de la seule
école qu'o[J"rit le vaste arrondissemenl rie Châteaulin qu'il a diri gpe no­ nob' tant ses f onclions curiales et qui n'existe plus aujou rd'hui. Il a
l'amb iti on de revenir à Quimper pour y être supérieur du séminaire ou
directeur du collège. Il a donné, il y a quelques.années, iO.OOO fran cs
à l'évêque ponr lH restauration du s~lI1inaire ». En i817, il ense igne au

Dès le 2 août 1790, la petite ville de Lesneven, regrettant
-son éco le paroissiale disparll e. ne voulu t pas laisser ses enfan ts
dan s l'igno rance et créa un e école intercommu nale dont 'la
direction fut confiée à l'an cien maître ès-arts Jean-Baptiste
Bourg uays .
Né à Cou leuvré (Manche) . en 1756 , Bourguays avait quitté
son pays depuis plu sieurs années. Avant la Révolution, il
·enseig nait le latin à Lesneven avec le titre de maÎlre ès-arts.
En 1790, la muni cipalité lui confia les fon c tions d'in stituteur

public avec appoinlemen ts de 600 livres payables, non par
la vill e se ule. mais par l'ensemble des commu nes du district,
l'école pouvant être fréqll ent ée par des enfants venus des
diverses localités du di stri c t.
Le contrat stipul e qu e Bourguays dev ra in struÎl'e g ratuile-

m ent les pauvres ; sa femm e, née Marguerile ROl lssea u,
in struira les fill etlf's .
L'école fonc tio nn e il la sa lisfac t.ion de tous; le nouvel in s­
tituteur prêle serm ent le 9 sep tembre 179 1. « Le sieur Bour-

gllays . écrit le P rocu reur Synd ic, join t à beaucoup de tal enls
et cl e lumi ères, d es mœu rs clollces et pures, des prin cipes
sllrs de re li gion et un e co nduite exemplaire ; son école es t
-celle des conna issa nces el cles vert ilS ». Cependant BQurg uays
r éclam e en vain le tra ilement qui lui a été promis; après
huit mois de trava Il , il n 'a enco re ri en reçu; il se prétend
. vi ctim e d ' un e vengeance parce 411'il es t notoirement cpnnu
comme « un grand ami de la Constituti on n. Le malheureux
ne dispose qu e de [ 2 livres pnr mois, qu'il reç. oit des écoliers
payants. pour régler son loyer. nourrir sa femme, ses trois
·enfants et ULl e domestiqu e. « Vo ilà. Messieurs. écril-il a u

I1raod sÉ'rni llilil'e ; eu juin i 822 il achèl.p. lps bâtiments dpstinés à rece­ voir le pptit sémin:Jil'e de Pon t- CI·oix. Il y meurt en 1845. ISur l'abbé
J ean Le Coz, voi r aussi le Bulletin diocésain, 1905 p. 41 à. 48) .

Directoire du Finistère, à quoi le civisme es t exposé dans la­
ville de Lesneven. La municipalité désire me déconcerter eL
m'obliger à chercher place ailleurs, et cela pour faire place à
un nommé Chrom, qui est septuagénaire, paralytique, ne·

voyant pour a in si dire plus et qui instruit déjà au moins.
cent jeunes gens tanl de la ville que dela campagne )).
La municipalilé ne se rend pas à une première somma lion
du Département qui lui enjoint de payer le traitement du
sieur Bourguays ; elle consent. seulement à contrib uer à ce
pa iement avec la total(té des communes du district. étant
donné que l'école reçoit nombre d 'élèves des autres localités.
L'administration départementale se rend à ces raisons et
ordonne que le dit traitement sera payé « sur les sous addi-

tionnels du ,district, attendu la publicité de l'école dont il
s'agit )) .
L'instituteur Bourguays n'était pas le premier venu. Le ,

4 oclobre 1790 il avait présenté au Direcloire du dislri c t de
Les ne\'en 1111 ouvrage tendant à faciliter aux débutants l'étude­
,des principes de la langue laline, Cet ouvrage se recomman­
dait par sa brièvelé, sa clarté et so n esprit de méthode; J'au­
teur lui-m êm e 1I0U S le présente ainsi : " Ce nouveau Rudi-

ment résu me Lou s les autres; les règles y sont par demandes.
e t ré[Jon~es comme Ull catéc hi sme e~ se rédui sent à 79. Cha­
que enfunL peut. cb,Hlue mo is, l'épeler son rudiment sans·
surcbarger sn mémoire . Ce l'IIdiment ne manquera pa s cle'
prendre fav ell r, car Iii simpl icité a vec laquelle les règles y
sont expl iqu ées, la 1TI,':tllode comle el fa cile de ces demandes
et l'éponses, ab rège ill[]nim elllie Lravilil des enfanls qLOi n'ont
poinLI'espri t embrouillé d 'une mulLiLud e d'exempl es tirés de'
Virg ile. d'Horace, de Quinte-Curee, d e Cicéron. en Lln mot,.
de LOlls les ilil leurs les plu s absLrails "
Le Direc Loire départemen tal eut son altention alli l'ée sllr le'
110llvel o U\'I'nge et cbargea l'abbé Claude Le Coz, principnl dn

collège de Qnimper, d e J'étlldiel' , Le futm évêqne de Hennes.

recommand e chaud ement le travail de Bourguays; le 20 mars
) 79I il écrit à l'allteur :
( ' J'ai III avec plai sir les choses honn êtes que vou s voulez

bi en me dire dans vot re lettre du m ois derni er et les sages
'observations que vous y avez in sérées . II serait à désirer que
{;h aque di strict possédât un certain nombre de citoyens de
votre mérite et de votre zèle ; l'instru cl ion de la j eun esse s'y
perfectionnerait et l'esprit de notre belle Constitution s'y pro­
pagerait d ans peu de temps . J'ai déjà. Monsieur, donn é au
. département mon avis sur le manuscrit qu'il m'avait commu­
niqué. Si vous en avez eu connai ssan ce, j'ose croire que vous
n'en aurez pas été mécontent. J'aime bi en . tou s les patriotes,
j e désire seconder leurs vu es bienfai santes . Contribu er à leur
bonheur serait p our moi chose agréa ble ; jugez combien vos

intérêts m e doivent, être ch ers, et avec quel plaisir j e saisirais
l'occasion de vous prou ver les sentim ents d' estime et de fra­
ternité avec lesquels j'ai l'honneur d'être, Mon sieur, votre
hum hie servi teu r ».
En 1792, Bourguays fut nomm é professeur de quatrième
au collège de Saint-Pol-de-Léon. Il y enseig na j\l squ'à la di s­ parition du co ll ège. Pa r décision du 2 prairial, an Il , les fon c­
tio ns d'in stituteu r primaire de Saint-Pol lui furent confiées .

La co nfiance des habitants lui valut de devenir ofIicier muni_
·cipal, puis commissaire du Directoire exécu tif. C'est lui qui
fit changer en Pol-Léon le nom de la VIlle qui" choquait
l'o reille de to us les bons républica in s en rappelant celui d'un
prélat mîtré ». '
L'amlli stie en faveur des prêtres réfraclaires lui valut la
perte de presque to us ses éco liers, Sans fortun e, sa ns place
lucrative, il vécut dans la m isère. En l'an VI il est père de
do uze enfants. Sollicitant un secours du dépa rtement, il rap­
p elle ses succès passés : n . J 'ai conduit à Morlaix, devant le
jury d'in stru c tion, plu sieurs de m es élèves pour y réciter par
·cœur la constitution en entier, les Droits de l'homme et du

citoyen, beau coup de traits héroïqu es des défenseurs de la,
Patrie et un abrégé de la géographie. A tou tes les fêtes publi­
qu es , ces mêmes élèves récitaient par cœur tous ces sllblimes

p L'ln clpes » .
SOI1S l'empire, Boul'guays se rallie au régim e napol éonien.
En (80ï, nO lls le retrouvons à Château lin com me professeur
de latinité. Une notice nou s le présente comme suit en (8 12:
« Bourguays, 55 ans, 8pprend à lire, à écrire et la langue
latin e. Père d'un e nom breuse fam ill e pour laquelle il a L oute
l'allention possible. Anc ien maitre ès-arts capabl e de form er
des élèves pour entrer en troisième et en seconde. Plu sieurs

de ses élèves se sont distin g ués dan s les coll èges où il s ont

été admi~ . Très attentif à l'éga rd de ses écoliers, et très exact
à ses devoirs, il donne l' exflmpl e des bonnes mœ urs. »
Après la chute de l'Empire, les fon cti ons d'in stituteur lui
furent interdites ; il éta it coté comme « dan gereux sous les
rapports religieux et politiqu es ».
En 18 r9, il inspira it ce pendant toute con(lance à la muni­
cipalité de Châteaulin, qu i le chargea de la direction de l'école
d'enseignement mutuel: il ava it alors 63 ans. Il mourut à.
Cbàteaulin à une date que nous n'avons pu précise r.
Il. Premier essai d'organisation
d'un enseignement publiC

LE DÉCRET DU 29 FRIMAIHE AN 11
( 19 DicEMBRE 179

En 1793, le nouveau régime scolaire conçu par la Hévo­ lution n'ava it pas encore reçu so n statut définitif. Des décrets .
dont celui du 7 brumaire an Il et du 23 fructidor an II,
(i ) Principaux ouvrages consultés :
O. Greard. La Législation de l'Instruction primaire en France depuis
1.789 jusqu'à nos jours. Paris 1889.

avaient pour but d'am éliorer la situation, mais il s étaient
restés lettre-morte . Dan s le Fi n is tère , nota m men t, il s ne
reçurent pas le m oindre commencement d'exécution .
Le déc ret du 29 ,frimaire crée enfin un sys tème d'instruc­
tion populaire. II déclare que l'enseigne ment es t li bre. Tou­
tefois, (( les citoyens et citoyenn es qui voudl'Ont user de la
liberté d'enseigner seront ten us : 1" de faire leur déclaration à

la municipalité; 2° de désig ner l'espèce de science ou art
qu'i ls se proposent d'enseigner; 3° d e ' produire un certifica t
de civism e et de bonn es mœurs signé par la municipalité et
les membres du Comité de surveillance . »

Les in stituteurs, et les institutrices son t placés sou s la sur-
veillance immédiate de la municipalité et de tous les citoyens .
S'ils enseignent des préceptes contraires a ux lois ou à la morale
républicain e, ou s'il s outragent les mœurs publiques, ils seront
traduits devant les tribunaux.
Des livres élémen taires seront publiés et les maîtres devront
s'y . conformer. Les premiers de ces livres seront: Les

Droits de "homme; La Constitution e t le Tableau des actions
héroïques ou vertueuses.
Les in s ti tu teu rs recev ron t a nnuellement de l' f: ta tun e rétri-
Guillaume. Procès-verbaux du Comité d'Instruction publique de
l'Assemblée législative. Paris 1889.
Guillaume. Procès-verbaux du Comité d'Instruction publ' ique de la
C onvention. PHis 189 1.
F. Buisson. Dictionnaire de Pédagogie, 1887.
Archives parlementaires.
A. Duruy. L'Instruction publique et la Révolution. Paris 1882.
V. Pierre. L'Ecole sous la Révolution Française.
E. Allain. L'OEuvre scolaire de la Révolution. Paris 1891.
E. Allain. Les Enquêtes scolaires de 1792 et de l'An 'Il' (Revue des
Questions historiqnes, juillet 1891 et octobre 1892),
E. Allain. La Révolution Française et Z' Enseignement national.
(Pa ris 1902 ):
Aulard el Mathiez. Ouv rHges el articl es divers traitant de l'œuvre
scolaire de la Rpvolutioll.
P. Caron , Bibliographie des travaux publics de 1866 à 1897 su/'
l'histoire de la France depuis 1.78&, pages BE à 631.

bution de 20 livres pour chaque élève et les institutrices
l5 livres .
Les enfants ne seront pas admi s avant six ans et devront
fréq uenter l'école au moins pendant. trois années consécut ives .
Maîtres et mallresses seront payés par trimestre sur la
produ ction ci e la li ste de leurs élèves, approuvée par la
municipalité.
La Convention revenait ainsi à une organisation se rappro­
chant de celle de l'Anci en Régim e : enseignement libre,
choix des maîtres , autori sa tion et surveillance confiés aux
mlllJicipalité~, rétributi on d'après le nombre des élèves . . Une

di(Té l'i~nce impurtante : l'enseignement est laïque; le certi-
ficat de civisme remplace l'attestation de ca tholicité fournie
par le curé. '

Comment le décret du 29 frimaire an Il fut - il appliqué
dans le Fini stère ~ . ,

Dès sa promulgation. la Commission administrative du
dépa rtement recommancla aux municipalités d'apporter toute

lellr attention à la nouvelle loi et de lui donner toute la
publicité possible.
Malgré d es exhortations réitérées, elle ne fut pas appliquée
avec la célérité désirée par le dépa[:lemenL. Le 28 thermidor,
la ville de Modaix n 'a pas encore organisé ses écoles; seules
celles de Bres t et de Quimper continuent à fonctionner. A la
lo ng ue cependant, quelques écoles s'ouv rent. Les , maîtres

étant payés d'après le nombre de leurs élèves, on comprend
qu' il s ne s'établiront que dan s les centres importants où
une nombreuse population leur laissera espérer un nombre
s uffi sant d'écoliers .
Trois in stituteurs, pourvus du certificat , de civisme s'ins­
tallent à Saint-Pol-de-Léon. Le plus favorisé, parce que le
plu s capable, était Jean-Guillaume Sévézen. Depuis l,50 il
exerçaï't la profession d'instituteur. 11 possédait des con nais­
sances pédagogiques certain es. Fort connu et estimé de la

population, il j ouissait de la confiance des familles , En
thermidor, an IlT, il instruit cent élèves pour lesquels il lui
es t dti, pour Je mois écou lé, fa somme de 166 livres I3 sols,
4 deniers, à raison de 33 sols 4 deniers par écolier, Ces
élèves ne sont pas uniquement o rigina.ires de Saint-Pol­
de-Léon; dans l'éta t nominatif, nous trouvons des écoliers
de Cléder, Plollzévédé, Trézilid é, Sibiril, Saint-Vougay,
Plouescate t Plounévez- Lochrist.
Alain LivoJan t et Yves Le Saout ont chacun 25 élèves ,
La municipalité ar rête que (1 la ci-devant église cathédrale
sera mise à la disposition des instituteurs des écoles pri­
maires; les boiseries inutiles de la ci-devant église seront
employées à faire des tables et des bancs pour les écoles ; les
fêtes décadaires seront exactement célébrées dans la com ­ mune et le peuple sera invité à se réunir les jours de décadi
dans la ci-devant église cathédrale à l'effet d'y en tendre la
lecture des lois et instructions publiques, Le Conseil se
transportera tous les décadis à dix heures du matin dans

le bâtiment destiné à l'in struction publique; les autres
fonctionnaires publics seron t invités à s'y trouver égale­
ment ».
La municipalité délègue les citoyens Peychaud et Varsa­
vaux à l'effet cie su rvei ller la concluite morale des instituteurs
et de se tran sporter fréquemment clans leurs écoles,
Les clélégués se rendent d'abord chez Alain Li volant à
l'effet de savoir (1 si ce citoyen a soin de mettre en tre les
mains cie ses élèves, cam me base cie la première instruction,
Les Droits de l'Homme, , La Constitution' et les livres élémen-

taires qui ont été adop tés par la Convention, si l'on observe
les décadis, si l'on y célèbre les fêles républicaines et si l'on
s'y h onore du nom de ci toyen,
« Le citoyen Livolant, interrogé ce touchant, en présence
de ses élèves, a déclaré qu' il ne faisa it lire à ses élèves que
les livres qui leur étaient clonn és par leurs parents, qui

consistent en livres d'histoires et autres livres anciens, tan t
français que latins,
« In vité et requi s de se p rocurer La Constitulion, Les
Droits de l'Homme et autres livres élémen ta ires, le citoyen
Li volant a fait observer à la Commission que, n'étant pas
salarié par la République, ses fac ulLés ne lui p ermettaien t
pas de faire cette emplette, assurant d'ailleurs q u'il faisait
observer les décadi s et exhortait ses élèves à célèbrer les fêtes
républicain es et qu'il enseignait dans so n écol e il lire, à
écrire, l'arithmétiqu e et la g ramm aire fran çaise ».
Les délégués visitèrent ensuite l'école du citoyen Sévézen,
père, Ce dernier leur déclara n'avoir pas mi s entre les mains
de ses élèves les livres m entionnés par le décret du 29 fri­
maire, an II, Il promit de se les procurer au plu s tôt et
déclara qu e, non seulemen t il apprenait à lire, à écrire et
l'arithmétique, mai s encore qu'il exerçait ses écoliers (c à lire
d'anciens titres et papi ers 'J ,
Le citoyen Yves Le Saoutfit à peu près la m ême dédarati on.
A Plouénan, deux instituteurs, Nicola s Béchu et Louis
P éron s'étaient associés et avaient ouvert une école au pres­ bytère ; ils y instrui sa ient 40 élèves des environs, dont
20 pensionnaires , Il s enseig naient la lecture, l'écriture et
la lang ue fra nçaise.
Cléder, avait pour in stituteurs Je citoyen Pard eau, du

b ourg de Plo ll esca t et Marie Le Lann, épouse du citoyen
P errot. greffi er du ju ge de paix du canlon ,
F rançois Quéméner et Noël Pont ense 5g naient à Lesneven ;,
K ernilis possédait un instituteur, Guillaume Madec, et deux

in stitutrices, Marie Soutré et Marie Crenn, A Trém aouézan,
le g reffier de la commune ajoutait à ses peu a bsorbantes
fO ll c ti ons celles de m aîLre cI 'école. L'in stiLuteur de Plougar,
Simon, était logé au presby L ère; celui clu Drennec, Jean­ Marie H ll g ll en, n'exerça que peu cie temps, n'ayant pu
réunir Uil nombre silffisant c1 'élèves ,

A BJ'asparts. r école d e Pierre Bi zien était fréqu entée par
25 élèves ; l' in stituteur receva it {~2 li vres par moi s, soit
5 1ivres par écoli er. Dan s la mêm e comniun e, la ci toyen n e

Gon rhaël in strui sa it 23 élèves à ra iso n de 3 1. 15 s . ( ( par
enfant femelle 1) .
ScMr ass urait le Distri ct « du zèle et de la di gnité»
qu'apportait à ses fO ll c tions le citoyen Lo uis Le Fur. secré­ taire de mairie etla citoyenne veuve Gnéguen. Cette d erni ère ,
n ou s apprend le rapport de la municipalité, a Iln e fill e d e
20 ans « qui l'aide beaucoup aux instructions qu'ell e doit
répandre da ns le cœur simple des en fants de nos frères les
culti va teu rs » .

li Pont-l'Abbé, les fonctions d 'in stituteur sont confi ées à
Yves Le Bihan des Garennes, âgé d e 64 an5, ancien avocat
et notaire.
Saint-Thégo nnec a pour in stituteur le citoyen Perrot qui,
très bien vu de la population , reçoit un grand n ombre
d'élèves .
A Plouézoc'h, le citoyen Sannier fait classe aux ga rço ns,
tandi s qu e les filles sont confiées à Mari e Main ga rd.
A Concarneau, l'école se ti ent dans l'égli se, édifice va ste
et froid ·où les' enfants gèlent l'hive r. -L'in stituteur ob ti ent
l'auto risatio n d e les réunir dans la c.hapell e de J'hôpital, dont
- les dimensions sont m oindres et où le froid se fait m oin s sentir.
L'école de Pont-Croix est dirigée par Alain Guézennec,
an cien sergent, âgé de 67 ans; il enseign e dans la chapell e
d es U rsulin es .
La région du Cap-Sizu n , j adi s très bien pouvu e de m oyen s
d 'in strn c tion et où l'on garda it dep ui s J'ancien régime Je
goùt des étud~s. voi t renaltre quelqu es écoles . Deux an ciens
élèves du sém in aire de Quimper, IJ enri Le Bra s et Gniliaume
Goarclo n. s'é tabli ssent comme ma.llres d'école, respectivement
à BeLlzec- ('ap-Sizun et à PlogojJ. A Cléden- (~ap-SiZLln , un
cultivatellf', ~.Iicltcl Arhan, réunit les éco li ers clans son

100
propre domicile. Jacqu es Keruzoret, ancien sergent il.
Crozon, s'est in sL allé comme in stiLuteu r à Beuz~c. que Le ;Bras
avait quitté; il Y meurt et est remp la cé par Jea n-Marie
Violant, ancien commis au g re ITe du marquisat de Pont­
Croi x: . A Audierne. l'ancien notaire, Jean Lannou, a pour
successeur Michel [(erloch, ancien élève du coliège de
Quimper. qui in struit l l3 élèves eIltassés debout dans un
gren ier sans fenêtres, sans tables et sans bancs. Le citoyen
Cosquéric, viei llard plus que sexagéna ire, exerce à Peumerit
et doit rés igner ses fonctions le 25 pluviôse a n Ill , n' élant
pas en état de faire le voyage pour se présenter devant le
jury d'instruction. Lastennet exerce à Goulien ; J ean-Co rentin
Donnars, ancien notaire, tient à Plouhinec un e école très
prospère, frequeI1tée pH une centa in e d'élèves ( 1) .

Un certain numbre de communes réussirent aussi à se
procurer des in stituteurs, mais il arriva' so uvent que ceux-ci
n'avaient pas d'élèves. Le citoyen Squiriou et sa sœur restent

deux ans à !{ernével sa ns qu'aucun écoli er se présente.
Nombreuses furent les mil n ici pa li tés qu i, so it par mau vaise
volonté, soit parce qlle les sI1jets faisa ient défaut, ne purent
procurer un institulellr à leu rs adm inistrés. L'agent national
de Mespaul, François Péron. écrit au District: « Citoyens

administrateurs, nous ne pOlll'on pas teu donner aucun nom
deux ceux et ce lles qn' ils sonl à lécolles pars-ce que nons
n'avon ny instituleur ny institntris enqua danssingner les
enfants >J . Le ma ire de Loc-EgLûner. lui aussi en coquetterie
avec l'orthographe et la langue frança ise, écrivait le deuxième
décadi de thermidor, an II : « Nans maire et a(ficiere munci­
peanx de la commune de Loc-Eglliner declaron que nous
naval ocun pour (aire Ecole sur notre commune 1) .
(i) Daniel B ernard . L'Enseignement primaire dans le D istrict de
Pont- eroi: :c en l'an II et en l'an III, p. 4-5. (Annales de Bretagne,
année 1.936). Ce consciencieux travail a été largement utilisé dans
celte etude pour ce qui concerne les écoles dans la regie'll du Cap-Sizun.

101
A Plounevez-Lochrist. trois publications on t été faites
pour essayer d e trouver un instituteur: elles ont été infruc­
tueu ses. Même résultat à Kerlouan, à Tréllao u éoan, à Unité­
des-Champs (Saint- Martin-des-Champs) ( 1), etc.
Le commissaire Le Guen, reodant compte de la situa tion
morale e t p olitiqu e du canton de La ndivisia u. signale que la
comm un e d e Plougourvest n'a pas d 'école. « Plougourves t,
la commun e la moins in struite du canton, écrit-il, renrerm e
des hab itants trop bornés pour apprécie r les avan tages de
l'in structio n e t du gouvernement républi cain )) .
Une con clu sion s'im pose : J"organisa ti on des écoles dans
le d épartement n'a d onn é que d es rés ulta ts sporadiqu es,
par suite du malique de personnel qualifié. par suite aussi
du mode de paiement adop té qui n e permellait pa s à l'in sti­
tuteur c'e vivre de son trava il dans les comm un es peu
importantes .

Les rapports géné raux publiés par le Com ité d'instruction
publiqlle n oVs apprennent qll e pour l'en semble de la France,

les résullats n 'ont pas été p lil s encourageants , La loi du
29 frimaire an Il n'a été entièrement exéclltée que dans
3LI districts seulemen t , parmi lesquels n e flgme natllrel­
lem ent aucun district ünisté ri en. Dans les L loo réponses à
la circnlai re du 12 lloréal an II. ad ressée aux districts, on
cons tate que, sur 23. 125 éco les Cj ni aura ient dù être é tablies,
il n'a été possible d'en ouvrir que 6 83 1. Partout on se plaint
de la disette d'ins tituteurs et du défaut d e li vres élémentaires .
Le Comité d'in , tru c tion publiqll e établi par la Convention
affirme, dans Ull style prétenti eux e t anlpoll lé qu' « il se rait

(i ) Le 22 fév rier i 793, la Convention avai t orùonné de changer les
noms des localités lorsq ue ces noms pouvaient l'appeler la royauté,
la féodalité ou la reli gion . C'est ainsi que Saint-~larlin-des-Champs
devint Unité-ri es-Champs ; Sainl-Pol-de-Léon devint Pol-Léon; Saint­
Thégonec, Thtlgonec ; Pool-l'Abbé, Pont-Libre ; Qnimper , l\'Iontagne­ sur-Odet ; Châteauliu, Ville- sur-Aulne; le Château de Bresl devint
F ort-la-Loi. etc,

102

nécessaire d e répandre avec profusion un Alphabet national

composé d e lettres dont l'ensemble exprimant les- m ots
régé nérés et con sacrés pa r la Li.évolution, rendrait bientô t
fa milières a ux enfants les id ées nature lles d e Libert é et
d 'Ega li té» ( 1). On se demand e en vain comment pOllvait
bi en être co nç ll un tel alpha bet!
Le 1 2 brumaire an fIl , 350 distri cts sur 550, plu s 36 sec­ ti o ns de Pa ri s, ont répondu à un e r,ouv ell e enC lu ête : ; -12 di s­ tri cts se ul ement ont orga ni sé leurs écoles conform ément à la
lo i _ li 1. en parti e se ul emen t et 277 n'ont pas ou presque pas
d'écoles .
L. OGÈS.
(à suivre)

(1 ) Procès-verbaux. du Comité d'instruction publique. Rapport nu
Bureau de la surveillance ,le l'exéculioo des lois, p. 89-1 à 900 el p. 2\j.
Communiqué pal' ~L L TOlll~mont) .

11 0 -
DEUXIÈME PARTIE

Table des mémoires publiés en 1939

1. Autour clu' Cartulaire cie Lancl évennec. Le roi
Gracllon. Le culte cie saint Guénolé ert Cor­
nouaille armori caine. La « Vita vVinwaloei »
de Gurclisten, par H. GüIRlEC (deux cartes hors
PAGES
texte) . . . , . , . . . . . . . . . . .. 3

II. Nouvelles de Quimper, 1751 , par H. W , . . .. 27
Ill. Le duc d'Angoulème à Quimper en juin 181LJ, par

D. BERNARD .. .... . ........ .

IV. Chan sons populaires bretonn es, par IL PÉRENNÈS . LJ6
V. L'Instru ction dans le Finistère pendant la Révo-
lution, par L. OGÈs (à suivre) . . . ' . . " 67

VI. La« salle synodale Il de J' ancien évêché de Quim-
per, par H. W. (une planche bors texte) . . . 103.