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Bulletin SAF 1939


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Le duc d’Angoulème à Quimper en juin 1814

D. Bernard

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1939 tome 66 - Pages 32 à 45

Le Duc d'Angoulême à

ulmper
en Juin 1814
Pnr ol'donnance royale du 18m ai 1814, Louis XVIII
cont (~ I'a la baute cha['ge de gmnd amiml de France
au duc d'Angoulême, fils aîné du comte d'AI'tois.
Mais ce prince, « laid, gauche, timide, inintelli­
geu t» (1), q II oiC] ue cc ct 'u n cœur' ho n II ète et d l'oit, étai t
affli gé de tics et de manies, qui foul'Oi ssaient une
matièr e in épui sable au~ plus étranges r écits» (2).
De ce fait, sa pl'l'sence Et la cour n'était pn.s désirée
et lui-m ême se fût volontiers tenu Et l'écart.

11 fut donc décidé, en raison des prérogatives

de sa charge, d'en faire un agent de propagande
dans les dl;parten1Pnts m aritimes, et on l'envoya
tout d'abord dans la région de l'Ou est

('1) Charl tl ly, La H estauratian, p. 1.6 \t.lV Je l'Hisloire conl"lIlporaine
de La visse) .
(2 \ Vaul~bè llè , lIislaires des deux H estuttratians, t. 11, p. 147. Louis­
Antoin'l rie Bou i bon, Duc d'Angoulême, né en 1775, était le fils aîné du
cOlllle d'A riois et de la priOGeSSe Marie-Thérèse de Sa VOl e , elle 1 rère du
Duc de Berry .
JI émlgl'a au débul de la Révolulion, se fixa d'abord à Turin, puis en
Angl~ teI're et en !\ussie, où il épousa Marie-Thérèse-Charlolle de France,
Mad ame Boyale, sa cousine, fille de Louis XVI et de Morie-Alltoinelte.
Forcé de quiller la Russie, il revint en Augleterre, en mpme temps que
les aulres membres de la famllle royal e. Au commencement de 18111, 11
se trouvait en Espagne, dan g l'armPè ~llglaise, J'entra en [ 'rance avec
celle-ci el se rendit à Bordeaux, puis à Paris. Au moment du débar­
quement de Napoléon . il se mit il la tête des lroupes qui devaient arrêter
sa m~rci1e . li dut capituler et put ~e rendre en Espajl;ne, où il essaya
d'entraîner le roi à enyahir le Midi de la France. Après la chute de
l'Empire. il re,'inl à Pal·is. Pendant le règne de Charles x, il s'occupa
de questions militaires. En 1830, il se rendit en Allgleterre, en Bohème,
puis à Goritz, dans le Frioul, où il mourut en 1SiJ,4,.

L'i ti nél'ai re du voyage a vlli t été fixé par Dreux,
:Mflypnne, Renn es, St-Brieuc, BI'est, Quimper,
LOI'i ent) NantE:s, BombofJ-Vendée [La Roch e-sur­
Yon], Nior't, La Roche lle, etc' H
Le Duc quitta Paris le 20 juin, accompagné de
douze personne'::;,parmi les(-!uelles sept domesti­
ques ; le 23, il était à St-Brieuc et il arriva à Brest

le 26, e~co l'té depuis Mo r'la ix par le comte de Fel'-
riè l'es , commissaire extraordinaire de Louis XYJII
dan s lét. 13" div ision militaire (1). Le Prefet du Finis­ tèr e, le comte de Saint-Luc, nommé le 1ùjuin 1814,
en re mplaceme nt du baro n Abrial, après avoir
pri s possession de l'administf'ntion du département,
le 22 juin au matin, partit ce même jo ue d(~ Quim­
p er « pour aller aux limites du Fini::otère recevoir
son Altesse roya le » (2) ,
P OUl' r "'h a usse f' l'éclat d e la l'éception à Quim­
p el', le maii'e, Jacl!ues-F(~!ix Calloc'h de Kerillis~
prit, le 23 jui n l'arrêté suivant:
«( ' Vu les JeUres de i\l onsieur le Sous-P réfe t de l'arro)1di s­ sement en date du 20 et du 22 de ce moi s, annonçant que
son Altesse Roya le le Du c d'Angoulême, grand Amiral de
France, doit arrive r incessam ment dans le Départem ent du
.Fini stère et CIll'il est présumable que son Altesse Royale
passera par Qu imper ;
« Considérant que la ,'ill e de Qu imper , qui a toujours

manifesté les sentiments les pius sin cères d'amour et de f1dé-
(i ) Voir. R. Durand, Un c{)1n1nissaire extraordinaire de Louis XYIIl
-en Bretagne. en 1814 (Bull. de la Socièté d'histoire et d'archéologie de
Bretagne, t. xv, : t934, p, 131 et s.) .
(2) R eg, d'arrêté; du Préfet du Finistère, nO 32, [0 500 (Arch. du
,Finistère ),

lité pour l'augu ste famill e des Bourbon s, ne saurait assez
témoigner sa joie et son allégresse de posséder dans son sein
un des rejetons chéris de cette illustre fam ille, le maire arrête:
1° Il sera dressé un arc de triomphe à la porte dela villé,sur
la route de Châteaulin , par où en trera son Altesse royale ;
2° le corps municipal, accompagné de la musiqu e de la garde­ nationale, se rend ra à 250 pas en dehors des limites de la

commune, pour recevoir son AlLesse royale et la conduire à
son logement; 3° la cohorte urbain e p-rendra les arm es, tant
pour aller à la rencontre de son Altesse à 250 pas en avant du
lieu où le corps municipal l'attendra, que pour border la
haye sur son passage ; 4° il sera tiré une salve de 21 coups de
canon lors de l'entrée de son Altesse royale dan s la ville ;_
5° le soir toute la ville sera illuminée; 6° au départ de son
Altesse ro yale, le corps municipal se trou vera à la porte de la
vi lle, su r la l'Oute de Rosporden, accompagné de la coh orte­ urbaine et du corps de musique; 7° il sera tiré une salve de-
2 [ coups de canon à la sor tie de son Altesse royale de la
ville )) (1). -
La « cohorte» était placée so us les ordres de
MM. Leisségues - Légerville, de La Hubaudière

frères, Golias et Authouin. Le 27 juin, le préfet mit
à la disposition de la municipalité, pour armer la
cohorte, 91 fusils, 5 sabre.::; et 53 gibernes et four-­ rea ux de baïonnettes.
Après un séjour de trois jours à Brest, le mes­
sager royal se dirigea-vers Quimper, où il arriva
dans la soirée du 29 juin. Voici le compte rendu,
offieiel de la réception organisée en son honneur:

(i) Arch. municipales de Quimper. Reg. d'arrêtés de la municipalité,
i er août Hll.:!-i5 février i 832, JO 7.

« Quimper, 30 juin 181'4.
Mgr le Duc d'Angoulême, qni était depuis quelques jours à
Brest, est arrivé hier à Quimper, entre six et sept heures du

SOlI'.
M. de Saint-Luc, Préfet du Finistère , s'étant rendu à la

limite du département, à l'arrivée du Prince, lui avait
adressé le discours suivant:
« Monseigneur,

« Habitants d'un des pays les plus éloignés du Trône, nous
en étions peut-être les plus rapprochés par nos sentiments.
La patrie des Duguesclin et des Duguay-Trouin reçoit enfin
sa récompense, puisqu'elle a le bonheur de posséder votre
Altesse Royale.
« Malgré sa longue et cruelle absence, v·otre auguste
famille n'a jamais cessé de régner sur tous nos cœurs, et
l'amour sacré pour nos Rois ne finira qu'avec le dernier de
nos enfants. A votre présence, tou s nos maux ont disparu.
Nous ne compterons plus nos jours que par vos bienfaits et

un bonheur toujours renaissant Il.
M. de Saint-Luc était rentré hier à Quimper, quelques
heures avant l'arrivée du Prince.
Un grand nombre d'officiers étaient allés le matin à cheval
au devant de son Altesse .

Mgr le Duc d'Angoulême, en arriv.ant aux limites de la
commune, a daigné recevoir, sous un arc de triomphe qui avait
été élevé, les nouveaux hommages de M. le Préfet et ceux de
M. le Maire, en présence des autorités et de tous les fonction-

naIres.
Son Altesse Royale a été reçue aux acclamations de toute la
ville de Quimper et d' un grand nombre d'habitants des villes
et campagnes voisines, qui s'y étaient rendus, et aux cris

mill e fois répétés de Vive le Roi! Vive Mg r le Duc d'An­
goulême ! Vive Mada me la Du c hesse d'Ango ulême 1 Vivent
les Bo u l'bons!
Elle est montée à cheval et s'es t rendue à la Préfecture, où
e lle a daig né accepter un logement. précédée et suivie par

toules les a utorités , to us les fo nctionnaires , la garde na tio nale
d e Quim per et de Pont -Labbé, ayant la mu siqu e en tête ; la
gendarm erie, les employés d es d o uanes , et a u milieu d 'un e
populati o n ivre de joie e t de bonheur, qui se portait en foule

-sur les lieux de passage pour contempler les traits cbéri s d'un
Prince de la Ma iso n de Bourbon.
Les rues étaient ten cl ues ; le drapeau blanc fl ottait à un
g ra n cl nombre ci e fenêtres .
S. A. a eu la bonté de perm ettre qu e to us les fonc tionnaires
d e tous les ordres lui fu ssent présentés , et d 'aclm ettre à sa
ta Ll e des membres des principal es autorités.
Pendant le dîner, des coupl ets, dont so n Altl!sse avait ag réé
l'homm age, on t été chantés pa r un mu sic ien de la ga rde
natio nale de Quim per. e t la mu siq ue de ce co rps a fait enten­
d re l'air chéri des Fra nça i s : Vi ve H en ri 1V . a uC[ uell a présence
d u Prin ce ajou t3. it un deg ré in exprimable d'intérê t.
Après le din er, Mg r le Du c d'Angoulême a bien voulu p er­
mettre que 26 j eun es demo isell es 1 ui oITt'issent , au no m ci e la
vill e, une corbe ill e de fl eurs, et qu 'un e g rande partie d es
h abitants de Quim per fu t ad mise da us ses appartements.
S. A. a acco rdé la déco ra tio n du lis aux autorités, à un
g ra nd nom bre de fonctionnaires et d'h om mes recommanda­
bl es par leu rs ser vices et leu r attachement à la mai son de
Bo u ['bons, et à la ga l'd e na tiona le de Qu i mpe r e t de Po n t-Labbé.
U n g rand nombre de placets a été pnlse n té au Prince, qui
les a to us reçus, et a écouté toutes les récl amation s a vec la
b onté héréditaire dans son au g uste famille.

Ce matin, à cinq heures e t demie, S. A. s'est rendu e à la
-cathédrale, pour y entendre la messe qui a été célébrée par

Mgr l'Evêque, et de là est montée en voiture pour se rendre
à Lo ri en t.
S .. A., en traversant le dépa rtement pour se rendre à Brest
et de là à Lorient, a trouvé constamment, sur son passage . la
population entière des communes, précédée des · autorités
locales qui s'étaient rendu es sur la route et fai saient retentir
l'air de ses acclamations. Elle a été consta mm ent escortée par
un g rand nombre de citoyens de toules les classes , et de cu l­
tivateurs en habit de fête, qui form aient spontanément un e
garde d'honn eur, dont le Prin ce a eu la bo nté d'agréer le
service ... » ( r).
Nou s ne saurions rien d'autre de la fête, si un e
aimab le Quimpéroise n'eût pri s la peine d'en
écrire une rel ation destin ée au directeur du journal
La Quotidienne .
Cette l'elation ne fut pas p ub liée : ne fut-elle pas
envoyée ou ne p ar vint-e ll e pas à destination '?
Nous l'ig norons. To uj ours est-il qu e la lettre qui
la contient fu t fl cquise pour les Arch ives du Finis­ tère, où nous l'avo ns retrouvée. Nous pensons
faire plaisir à nos lecteurs en la reprodu isant.
(c Mon sieur,
« Arrivée ic i depn is trois semain es, établi e da ns un modeste
en tresol une pr,l'sonne obligeante qui a eu piti é de mon isole­ m en t m'a apporté li ne vin g lai ne d e feu ill es ayan t pO il r ti tre la.
Quotidienne . J'y ai trouvé tout ce q ui co nvient à m es opinions,

à mon goût et à mon cœu !'. Je me su is dit: quand on aura
réparé l'azil e que j 'ava is dan s le départem ent de l' Aisne et q ue
(1) Jou.rnal admim stratif du département du
mardi 12 juillet 1814.
Finistère, nO 211., du

je serai réunie à mon époux, à mes enfants ... à mes chers
petits enfan ts qu'un coup de foud l'e a dispersés , je m'abonne­
'rai à la Quotidienne. En attendan t je veux écrire à son estima­
ble rédacteur et lui faire connaître qu elqu es particularités

intéressantes du passage de S A. R. Monseig neur le Duc
-d'Angou lême dans le Finistère.C'est là, où, de refuge en refu ge,
j'étais enfin parvenue qu elqu es j ours avant l'arri vée clu Prin ce;
·c'est là que j'ai reçu le témoignage de bienveillance le plus
,doux et le plus flatteur ! ...
Ma fille a été désignée pOlir porter la parole au nom des
jeunes personnes cha rgées d'offrir une corbeille de fleurs à
S. A. R. On avait décidé qu e les j eun es demoiselles qui ne
·comp tai ent pas trois lu stres ne seraient point admises à par­
tager l'honora ble faveur que tant de mères ambitionnaient
pour leurs tilles, ce qui fit 'dire tout naturellement à la mienne,
en s'adressant à S. A. R.
Le bel âge es t, dit-on, quinze an s,
Heureusement les mi ens vienn ent d'éclore ;
. C'est mon seul titre, je le sens,

A l'emploi glo rieux dont la ville m'honore.
Prince, si le. plus pur encens,
Si les vœux les plus doux, le plu s mod es te hommage,
Obtiennent par ma voix votre auguste suffrage,
J'aurai vu mon plus beau printemps!

Je n'essayerai point de vou s peindre la j oie vive et franche
,d es habitants de Quimper . Toutes les dames, un bouquet de
li s sur la tête, ga rni ssaient les fenêtres, et la plupart d'entre
elles avaient des roses effeuillées qu'elles jetaient sur le passa.ge
du Prince.
Au milieu des plus douces acclamations on entendit: A bas
J es droits réu nis. M. le Préfet dit au prin ce avec un accent
,douloureux: ab ! Monseigneur, quelle tache ! Elle est
effacée par la pluie de fleurs dont on m'a couvert.

Les demoiselles qui cam posaien t le cortège devaient déposer
·aux pieds de S. A. R. une branche de roses dont chacune
avait eu soin d'ôter les épines. E lles eurent en cette occasion
une bien utile prévoyance, car l'excellent prince a tout reçu
de sa main et, le faisceau grossissant, ses bras ont form é une
seconde corbeille bien plus précieuse que celle qu'on lui avait
·offerte .
Ces branches de roses déposées sur une console ont été
soigneusement examinées pa r l'ordre de son Altesse, qui pré­ sumait que quelques-unes de ces j eunes personnes pouvaient
avoir joint (pour un père ou pour un frère) quelque f euille
suppliante au feuillage de so n bouquet. Ce trait de bonté a
donné un nouveau degré d'exa ltation au sentiment qu'on
éprouvail déjil . Chacun a fait sa demande . .. la seule qu'on eût
-à faire, et c'est au ciel qu'on a demandé de longs j ours pour
le Roi, pour M me la Duchesse d'Angou lême et la famille adorée

. des Bourbons .
J'ai tout vu , tou t entendu, mai s je n'ai pas encore tout dit.

Je suis très parfaitement, Monsieur ,
Votre très humble servante, A ... Vicom tesse de P ... ry Il .
[Audouyn, vicomtesse de Pompery] ( r)

L'auteur de cette lettre est déjà connue pa l' une
- correspondance qui a été publiée en 1884. sous le
titre: Un com de la BretafJne pendant [a R évotu­
-tion. Correspondance de M me Audouyn de Pompery
avec son cousin et Bernardin de St Pierre. Intro­ ·duchon et nottce par E. de Pompery (2).

Cette corl 'espondance, écrite dans un style alerte,
abonde en détails curieux et pittoresques sur la
-vie à Quimper pendant les demières années de

(i ) Arch. du Finistère, E 233

(Copie).
(2) Paris, Lemerre, :1.884, 2 vol. in-12 .

l'ancien régime et pendant la Révolution . C'est un
r eflet fidè le du milieu dans lequel a vécu l'aimab le
et spirituelle épistolière. On ne saurait trop en

recommander la lectul'e à tous les cu rieux de la .
vie du passé dans notre ville.
Quelques détails biographiques sur cette excel­
lente femme doivent tout naturellement trouver ici
leu t' place.
Anne-MarieAudouyn naquit à Quimper, paroisse
de StJulien, le 31janvier 176"2, de Maître Guillaume­
Fl'ançois, avocat à la COUl", et de Louo ise-Elisabeth
Taupin, E lle fut élevé~ au cou vent de Kerlot et
n'en sortit que pour se marier . Elle épousa, le
29 avril 1786, Fmn çois-Hyacinthe de Pompery,
ex-garde du corps, capitai ne-lieutenant de la

maréchaussée de Bretagne, e n résidence à Quim-
per (2). .

Le 12juin 1791, M. de Pompery fllt nommé li eute- . .

nant-colonel de la gendarmer-ie du Finistère, sur
la pl'éserHation du Dil'ectoire du département; le
24 juin, il prêta serment en cette qualité . 11 · fut
réformé en conséquence de la loi du 29 avril 1792,
avec un e pension de 1800 fra ncs.
M. et Mme de Pompery 1'8sidèrent à Quimper­ pendant les prem ières année~ de leul' mariage
cc puis en une petite maison des champs, à Pen­ hars », maison qui existe toujours, au s ud du
bourg, entourée de granqs murs, ou quelques .
(i ) M. de Pompery avait épousé en premières noces, en 1783, Marie-·
Corentine du Marchallach, veuve deJoachim de La Saudraye, qui mourut.

Girondins trouvèrent un refuge provisoire en
août 1793 .

Après quelques vell éités d'émigrer, vite aban-
données, MadRme de Pompery et sa famil] e s'en
allèrent à Pon t-I ' Ab bé, puis s' i nstall el'en tau Séq uer ,.
petit manoir' situé non loil) de cette dernière ville
et qui appartenait à M. Audouyn.
Mise en arrestation au château, au début de
novembre 1793, Mme de Pompery fut relâchée au
bout d'un mùis. Un an plus tar d, les deux époux
furent de nouveau incarcérés à Quimper, jusqu'au
19 novembre 1794. Il s n'eurent pas autrement à
souffrir de la Révolu tion, à laquelle, dit E. de Pom­
pery, sa grand'mère « ne comprenait rien ll.
En 1805, toute la fam ille de Pompe!'Y quitta la
Bretagne pour le Soissonnais. « Malgré le déchire­
m ent cruel que j'éprouve à quitter mon pays, ma
maison neuve) ma jo lie cou r, ,mon petit cabinet
solitaire, mes voisins et amis », aVClue-t-elle, l'in-

térêt ·de ses enfants la déc id a à se fi~er au château
de Couvrelles, dan s la com m u ne de B l 'a isne (Aisne).
Madame de Pompe l 'y eut tl'ois enfants : Louis­ Charles, né à Quimper; Antoine-Nicolas, né au
Séquer, le 25 brumaire an IV (16 novembre 1795)­
et Marie-Victoire-Al exand rine, née également au
Séqu er, le 15 gE:;l'minal an VII (4 avril 1799).
Cette dernière avait donc bien qu inze ans, quand
elle eut l'honneur de complimenter le Duc d'An­
goulêm8 lors de son passage à Quimper en 1814.
Elle épousa, en 1818) M. Duparc-Locmaria, officier

dans la garde royale. Sa mère a raconté elle-même, .

:lans la dernière lettre qu'elle éCI 'ivit à son cousin
de Kergus, le 4 octobre 1818, les préliminaires du

m ariage : « Un gentil bas-br'eton, officier de la
garde royale, s'est présenté chez nous, de part le
r oi, un billet de logement à la main. Je me suis
rappelé que je l'ava is fait danser sur mes bras, à
l'abbaye de la Joie [près d'Hennebo'nt] , en 92, et.

en qualité de compatriote, j'ai dér-ogé en sa faveur
à la loi, que je m'étuis imposée, de ne pas recevoir'
de militaires. Il s'est plu dans notre société et n'a
cultivé qu'elle à Soissons ... Après dix-huit mois
d'épreuves et de réflexion, nous avons conclu
l'hyme n, à la satisfaction des deux familles )J ...
Madame de Pompery mourut à Soissons le
. 20 avril 1820 .
Da ni el BEHNARD .

Appendices

YEnS BRETOXS ADRESSES A LA DUCHESSE D ANGOULEME PAn

UXE DELEGATION DES MAIRES DU FINISTERE, QUI LUI FUT
PUÉSENTÉE A PAR I S . LE 14 .JUr:N 18 14,
« Hron '". Ar brud eus bo furnez dreist ordinal el' bed
A so betec ho r bro hac e peb leac' h clevet.
·Ebars el' Breiz-lzel, e fin eu s an douar,
'Ni oa beuzet a zaelou, ha cargu et a glac' bar .
'Leun a dist ridig u ez, n'hor boa qnet ehanet
Da vouela d'hoc'h anquen, d'ho poaniou diremet;
' Gueneoc'h en hon tou ez, chetu ê di stroet
H or laon en idign ez hac hon da elon sec'het.
H a gant anaondeguez evit ur vad quer bras,
Ehars 0 treid e te uomp , bo l' c'halon da digaz .
Ar sooch a g ll e ment-mâ a vo d 'hor bugale

Un tenso r ar c' haëra d'an nep a d euï hor goud e ,
'Leun omp a garaotez evit ho r princes vad ;
;Praest da vervel evit-hi, e n hor scuilla bor goad ,
'Dre nerz h or plijadur, e n hano hor barraezioll,
E criomp a galon, quel' coul s hac a c'h enou :
Bevit, Princes , be vit ' ... Merc'h bia o Sant-Loïs ;
Squer ao holl vertllzion, esperao ç bo l' broïs,
Bevit, bol' Roue I1lad ! ... Bevit-ta, Bourbonnet,
Ha dent al' c' benta poss ub l e creis al' Bretonoet '),
1l Ar Bl'incet vad a respontas gant cals a vadelez
e bre;;onnee (si e) : Gant ca ls a blij adur em eus
-elevet al' pez !1oe'!1 eu~ lavaret din-me ; n'an cou­
,nec'haïn biquen an dé\'ez-ma : m e a oar pen:1.US
:tud Breys a so bet bepr'ed mad ha praest da r eï
,betee 0 buez evit Dour ha~ al' Roue » (1).

(i) Journal
'5 juillet 18i4,

Il. ADRESSE A LOUIS XVIII, EN BRETON

Le 30 avril 1814, cinquan te maires des commu­ nes rurales du Finistère, réuni" a LanJ ern ea u"
({ ' témoins de l'ivresse de leul"s ad mini st l"és, en
apprenant l'h eureux retour de notre bon Roi a u
miheu de ses enfants, et son rétab lissement sur­ Ie trône de ses pères ", rédigèrent, a u nom de
leurs commun es, l'adresse ci-après, en Br'eton et ,
en Français :

« Sire,
An oH Fra ncisien 0 deveu s ar guir da exprima ar p eurs
gommeront 'er'j oa public p ebhini en e c'hi s,
o su gidi fidel eus a Vreis-isel a fel! deo ive cass 0 mou ez.
betec 0 Trôn, Pli che gueoeoch , Sire, receo h on homm aich
gant quement a blij adur evel en offromp deoch :
[ i so evit a n darn vuia tiëien paour , maes beza on deveu s
e,'it quemense, ac bel on deveus a bep amser, en andret or
Rou e, al' galon le un a de neridig l.l ez evit e garet ag a gouraich
evit e Difeo .
Gant ar sa llLimanchou-ze e criomp L ouL assambl ès :
Vive Lou is an Tl'ivechvet ! Vive ar Roue m ad, p ehini n'en
deus quen desir nemert da re nLa deomp an eurusdet or boa
collet
Map bian da Sa nL Loui s, chui laca io ar Reli g ion. al' peoch
ag a l' lealdet da ren adarré en o n touez ,

Map bian da Herri ar pevaré, e vezzoch vel'ta n Roue an dud
va illant a Tad ar labourerien. Breur da Loui s ar chu esecvet

ehui. epquem a el! secha an daëlou a scuillomp abaouë an,
devez trist en péini e voë Jequeat dar maro gant e vugale,
dallet a dinatur.

Ag en so euru s, Sire, an amser a brepar Doue deomp en e
vadelez ...
« Bevit, ev it peur-aehui ar pez oeh eus eommaneet... Bevit,
'Sire, a Bevit pell, evit o r bonheur ag or gloar» (I).

La pièce de vers et le texte breton de l'Ddresse

doivent êtt'e J'œuv t'e de P . D. de Goësb t ' iand, maire
de Saint-Urbain. près Landern eau, qui fit paraître,
à la même époque, les .trois poésies breton ne::; ci-

apres :
1. Chanson compose! gant muer -Lannurvan,
·er bLoas 1814. -
II. Cantlq Bretonnet (DlOualùt :zr Roue ... ),
18 16.

111.- Chanson F1erri Pevare.' En e umser R oue
eus a Frans, ag unan eus 0 tadou-coz or Roue a
so 0 ren hirlo présan t. Sans date. (Cf. J. Ollivier,
Catalogue bibliographique de la Chanson popu­
laire bretonne sur feuilles volantes. N° 363. An-

nales de Bretagne, 1938, p. 340) .
Pièrre-Désiré de Goësbriand est égalemen t
connu par des Fables de La Funtaine t,"[[duites en

vers bretons. Morlaix, Gu il mer, 11:);36, in-8, 32 p,

et pa r Gwerz emgan an Trégont a Vretonet a

enep Trégont Saux, e q~!ichen an Derven hanter-
hent, etre Jùsse/m ha Ploarmel, er bloas 1350
(Combat des Trente) . Morlaix, Gu il mer, s . d . in-8,
24 p. . .

(il Archives nationales, Fie m, 3.

11 0 -
DEUXIÈME PARTIE

Table des mémoires publiés en 1939

1. Autour clu' Cartulaire cie Lancl évennec. Le roi
Gracllon. Le culte cie saint Guénolé ert Cor­
nouaille armori caine. La « Vita vVinwaloei »
de Gurclisten, par H. GüIRlEC (deux cartes hors
PAGES
texte) . . . , . , . . . . . . . . . . .. 3

II. Nouvelles de Quimper, 1751 , par H. W , . . .. 27
Ill. Le duc d'Angoulème à Quimper en juin 181LJ, par

D. BERNARD .. .... . ........ .

IV. Chan sons populaires bretonn es, par IL PÉRENNÈS . LJ6
V. L'Instru ction dans le Finistère pendant la Révo-
lution, par L. OGÈs (à suivre) . . . ' . . " 67

VI. La« salle synodale Il de J' ancien évêché de Quim-
per, par H. W. (une planche bors texte) . . . 103.