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Bulletin SAF 1937


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Le clergé régulier dans le Finistère en 1790

D. Bernard

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1937 tome 64 - Pages 100 à 125

en 1790
Nous nous sommes proposé, dans cette éLude, de faire
connaître l'état dn clergé régulier dans le territoire du dépar­
tement du Finistère à la veille de la Révolution; ce qu'il
devint pendant et après cette période et aussi ce qu'il advint
des couvents après la dispersion des religieux.
Notre travail n'étant qu'nne sorte de statistique, nous nous
contenterons d'indiquer l'origine des différentes maisons,
leur consistance, leurs revenus, leurs charges et leur per­
sonnel. Sur ce dernier, nou s donnerons les renseignements
biographiques les plus essentiels ( 1 l-
On sait que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, les
divers ordres religieux ne se recrutaient plus que difficile­
ment; l'austérité des règles avait fléchi dans la plupart des
couvents; même sans les mesures prises à leur égard par les
assemblées révolutionnaires, les instituts monastiques n'au­
raient probablement pas pu arrêter leur décomposition interne,
comme tout ce qui ne veut pas ou ne peut pas se réformer.
Les décisions de la Commission des Réguliers instituée en
1770, avaient également contribué à diminuer les vocations
(i ) Nous avons puisé ces renseignements à des sources très diverses.
Pour ne pas encombrer le bas des pages, nous nous abstiendrons de
- 101 -
religieuses; beaucoup de monastères subissaient en outre les
déplorables effets de la com mende ( 1).
La suppression des congrégations laissa généralement le
peuple indifférent; quand leu rs biens furent nationalisés et
mis en vente, il soumissionna sa ns hésitation ni scrupule, du
moins dès le déb llt ; on vit même dan s bea ucoup de commu-
n es des recteurs devenns maires qui seront plus tard des
in sermentés irréductibles et exallés seconder les ad minis-
tratiolls dans la recherche des b iens et pousser activement les
paysa ns aux enchères.
La dévolution des biens ecclés iastiques aux. besoin s de
l'Etat. du clergé paroissial, aux. œuv res d'assistance. aux
établissements d'enseignement, avait déjà été demandée par
un grand nombre de cahiers. Quant au personnel des monas­ tères , les mêm es cahi ers avaient préconisé son affectation à
la desserte des paroisses (2) .
Lor~que les assemblées révolutionnaires éd ictèrent des
mesures qui aboutirent. e n définitiv e à la supp ress ion des
ordres reli gieux, ell es se con formèren t donc ail vœu gé néral.
Rappelo ns brièvement ces mesu res .
Le 28 octobre 1789, l'Assemblée national e décréta la
suspension des vœux so lennels dans les monaslères des deux
sexes. Sanctionné par le roi le 1"' novembre suiva nt, ce décret
d evint d éfinitif le 13 fév rier 1790. En conséquence , les
congrégations « sont et demeurent sllpprim ées en Frallce,
sans qll'il puisse en être établi de semblables à l'avelli r n.
Les reli g ieux devenaient libres de sortir du cloître ; ceux
qui désiraient continuer la conventualité. sera ient tenu s de
fix er leur résidence dans les maisons qui leur serai elJt assi-

(t 1 V ni r Î.prin , Etude sur la Commission des Réguliers (Revue hi8tori­
que, i 8 7ü, 1876, 1877) ; L Lec~strf'J Abbayes et couvents d'hommes
en France. Liste générale d'après les papiers ile la Co mmission des
Régu.liers en 176/i. Paris, 1 !-I02.
\ 2' Sb" i 118 I~t Rprna rd, Cahiers de doléances des sénéchaussées de

102
gnées. Les administrations de département désigneraient les
couvents, en ayant soin de séparer les mendiants des non­
mendiants. Préalablement à ces réunions, les religieux
devaient déclarer leur intention devant les municipalités qui
furent chargées, en outre, de constater l'état des couvents et
de faire l'inventaire du mobilier et des propriétés .
Le décret du 26 octobre '790 avait pourvu au sort des
religieux en leur allouant une pension variant de 700 à
1.200 livres, suivant l'âge de chacun . Une mesure ultérieure
autorisait ceux qui sortiraient à disposer des meubles garnis­
sant leurs cellules; une subvention de 200 livres leur était
de plu s allouée (( pour leur va loir de vestiaire», étant dans
l' obliga tion de se procu rel' des vêtemen ts ci vils.
Pour se conformer au décret du 13 février, l'administration
du Finistère prit, le '2 décembre '790. l'arrêté suivant: « Le
conseil d'administration du F.inistère, considérant que le
nombre des religieux de son ressort s'élève à 143, tant men­
diants que rentés, savoir: 48 capucins, 4 cordeliers, 16 jaco­
bins, 28 récollets , 4 minimes, 3 augustins, 1 chanoine régu­
lier, 12 carmes déchaux, 12 grands carmes, 8 bénédictins,
7 bernardins; considérant que 12 de ces religieux ayant
manifesté leur intention de sortir, le nombre se trouve réduit
à 131 qu i doivent être répartis ... , le Consei l arrête:
« 1 ° qu e la communauté d'Audierne, district de Pont-Croix,
et celle de Roscoff. district de Morlaix, seron t recommandées
pour les 48 religieux capucins;
(( 2° celle des bénédictins de Quimperlé pour 20 récollets;
(( 3° celle des jacobins de Morlaix pour les 16 religieux: de
cet ordre;
« 4° celle des carmes de Brest pour les 24 religieux de ce
nom' ,

« 5° celle des carmes de Pont-l'Abbé pour 4 minimes,
1 chanoine réguli er. 3 augustins, 4 cordeliers et 7 récollets;

103
ci-devant rentés, les seuls d'entre les 16 du département qui
ont témoigné désirer de vivre en commuanté )J.
Les religieux qui optèrent pour la vie commune devaient se
rendre dans les maisons indiquées avant le 1

avril 1791; le
26 novembre de cette année, le directoire du département
constatait que les dispositions de son arrêté du 12 décembre
1790 n'étaient pas remplies. Il considérait donc « que ceux
des moines qui ne se sont pas conformés au dit arrêté, seront
censés avoir consommé l'option qu'ils avaient de renoncer à
la conventualité. En conséquence, les maisons désignées,
qui ne se trouvent point actuellement occupées par le nombre
de religieux fixé par la loi, seron t incessamment mises en

vente au profit de la nation, ou employées à des établisse-
ments d'utilité publique )J.
Le président Kergarioll résumait l'opinion de son conseil
devant ce résultat, en disant: « à ce moyen nous n'aurons
plus de moines et nous n'en sommes pas désolés» Cr).
La désignation des maisons de réunion avait été adoptée
après consultation des municipalités et des districts dans le
ressort desquels elles étaient situées. La plupart de ces
administrations avaient expressément déclaré que les
couvents indiqués ne pourraient convenir aux installations
projetées qu'après des aménagements et des réparations. Or,
dans la presque totalité des établissements, ces opérations ne
furent pas effectuées.
D'autre part, il répugnait à certains religie.ux de vivre en
communauté avec d'autres religieux étrangers à leur ordre.
Ils se trouvaient, de ce fait, dans l'impossibilité d'observer
les règles de leur institution. L'octroi d'un traitement était

incompatible avec les principes des moines mendiants qui
ne devaient vivre que de quêtes et d'aumônes. D'autres
considérations, d'un caractère plus vulgaire, s'opposaient à

- 104-
à la cohabition; les carmes déchaux de Brest déclarent se
sou mettre volontiers il la loi, mais observen t « que les grands
carmes, habitués à coucher dans de bons lits et dans des
draps, réclameront certainement d'autres lits que nos
couchettes qui ne sont composées que d'une planche, une
paillasse ou un petit matelas et une couverture, sans draps.
Nous n'avons de bons lits que dans nos infirmeries, pour les
malades » (1 ) .
La plupart des religieux n'ignoraient pas, en outre, que le
fait de sortir de leurs couvents ne constituait pas une apos­
tasie, car le Pape avait donné l'assurance aux supérieurs, par
l'intermédiaire de l'archevêque de Rouen, que des brefs de
sécularisation seraient accordés à tous ceux qui en demande­
raient, « afin qu' ils puissent profiter, en toute sûreté de
conscilmce, de la liberté qui leur était rendue ».
Quelle fut l'attitude du clergé régulier du Finistère devant
le serment à la constitution civile? On sait que l:J. loi du
27 novembre 1790 ne l'ohligeait pas à prononcer ce serment,

ses membres n'étant pas considérés comme fonctionnaires
publics. Cependant, plusieurs religieux sermentèrent dès le
début; un certain nombre pour pouvoir être affecté au clergé
paroissial. D'autres adhésions se produisirent lorsque la loi
du 27 novembre 1791 imposa le serment à tous les ecclésias­ tiqu es sans exception, sous peine d'être déclarés suspects .
La proportion des assermentés fut de 55 % parmi les
religieux appartenant à des ordres rentés et de 43 % pour
les autres.
Le tableau ci-après indiquera, en face dll nombre des
moines existant dans les di vers cou ven ts en 1790, le chiffre
des assermentés.

Noms ùes couvents
Bénédictins

Landévennec

Quimperlé

Saint-Mathieu ..
Bernardins:
Le Relecq . ....
Sainl-Maurice ..
Chanoines régu­
liers :
Daou las . . . .. .
Augustins:
Carhaix . ..... .
Capucins:
Audi erne .....

Bres l .... .. ... .
Landerneau . .
Morlaix . . .... .
Quimper . . .. .
Qui m perlé .. . .
Roscoff . " '"

~0Jli'...

A reporler. 68

.c rn~

Noms des couvents
Report . .
Carmes:

Brest.

Carhaix .. .

Pont-l'Abbé

St-Pol-de·Léon . .
Cordeliers :
Quimper . . " . .
Dominicains :
Morlaix .... . .
Q LI i m perlé ... .
Minimes:
Plourin .. . ..
St- l'ol-de-Léon .
Récollets :
Landel'neau . .
Lalldéda . ... . .
Les neven .. . . .
Morl aix (Cubu-
ri en).. .. ..

Total .. 1 1 32

0"'0 t:

61 (1)
(L ) !Jans celle liste ne sont compris qlle les reli gieux prêtres, à
l'exclusion des frèrps cnnvrrs, lais ou tertiaires. Oe plus, lé nombre des
assermentés est le nombre minimum, car nous ignorons la résolution de
106
PREMIÈRE PARTIE. LES ABBAYES
1. Bénédictins
LANDÉvENNEC
Fondée à une date inconnue, peut-être au VIlle siècle,
probablement par saint Guénolé, détruite par les Normands
en 913 ou 914, l'abbaye de Landévennec fut reconstruite
après la victoire d'Alain Barbetorte en 937'
Revenus de la mense: 17 .410 livres 15.
Charges: 9. 004 livres 12.
Créances en 1790 : 36.805 livres (1).
La mense abbatiale de Landévennec avait été unie à celle
de l'évêché de Cornouaille en 1783 ; l'évêque de Quimper,
devenu ainsi abbé commendataire, devait servir aux reli-

gieux une pension fixée à 380 livres par quartier .

Les délégués du district de Châteaulin dressèrent, le 16 avril
1792, l'état des lieux comme suit :
« La maison abbatiale est composée de deux bâtiments qui
s'entre joignent avec communication de l'un à l'autre, en
forme d'équerre sur l'angle au midi de sa cour. Le bâtiment
au couchant de la cour, nouvellement rebâti, en pierres de
grain, son rez-de-chaussée di visé en trois pièces, et un étage
divisé aussi en trois pièces éclairées par les mêmes fenêtres

que le rez-de-chaussée; le bâtiment au midi de la cour,
an tique, ayant ses principales ouvertures au nord sur la
cour, son rez-de-chaussée divisé en trois piéces, et son étage,
fréquenté par un escalier en dehors, aussi divisé en trois
pièces. le tout contenant vingt toises de longueur compensée,
(:. ) Cps renseignements ont été puisés dans les. déclarations des bénéfi­
ciers el les états dressés par les municipalités (séries Let (,! des Archi­
ves du Finistére).

y compris la remise existant au bout du nord du bâtiment
neuf, vingt pieds . de largeur aussi compensée, et dix-huit
pieds de hauteur à prendre des fondations .
« Au nord de la cour une écurie ayant ses ouvertures sur
la cour. Une première cour close, ayant sa porte au coin du
nord sur le bosquet. Au cOllchant du bâtiment neuf, une
petite cour close. Au midi des bâtiments, un jardin à trois
terrasses, mal plan lé et par aiIIeurs très négligé, ayant ses
fossés enlevés au cerne, fors en l'endroit des dits bâtiment~,
contenant cinquante-cinq cordes sous fonds, celui sous les
dits bâtiments et cou r compris ...
« Au levant de la cour et du jardin, un bosquet. ..
« Au sortir du premier bosquet pour arriver au bourg. un
autre bosquet ... un champ contenant cent-vingt-cinq cordes;
Parc-ar-Houldry contenant trois journaux ; parc Penforn con­ tenant deux journaux; Parquic-Creis contenant soixante
cordes; une pièce de terre chaude con lenan t quarante cordes;
un courtil à chanvre contenant trente cordes ...
. « Il résulte de l'estimation de ces différents objets que le
prix qui doit servir de base aux enchères, -pour parvenir à les
vendre . est une somme de dix-mille livres )) ...
La maison abbatiale et ses dépendances furent adjugées.
le 21 mai 1792, à Bouchet de Brest, pour la somme de 10.000
livres (1).
« L'église . où feux les Bénédictins priaient si assidûment,
ne dépendra plus de cette maison, et quand elle sera vendue,
ilsera de convenance que l'acquéreur recule la porte d'entrée

de son habitation, de manière à laisser celle de l'église libre à
tous ceux qui voudront la fréquenter, en conservant néan-

moins la propriété des arbres existant e~ le droit d'en planter
d'autres le long du chemin menant du bourg à la dite maison.
« La maison conyentuelle et ses dépendances consistent

108 -
dans une maison à trois fa çades en d ehors et qllatre fa çades sur
l'encein te du cloître , ayan t. to Il tcs leu!'s ou vertures en pierres
d e tail1 3, ga rni es pOllr la plupart de double vitrage et d'abal­
vent; le cloître ayant so n pavé et ses arcades en pi erres de
g rain finement taillées ; lln j ardin au levant de la maison;
d eux berceaux ou prom enad es et un e pépinière au nord du
jard in et de l'église ; un pavill on au coin du levant du jardin'
Je tout sur la g rêve ; lroi s maisonu e tl es en lign e, la no uv elle
boulangerie, façade sur le bOllt au midi de la mai so n co nven ­ tu elle ; les écuries el un e remise, allssi en li g ne, au cO ll chant
de la ma ison p rès la prin c ipa le porte d'entrée; un e conr d e
sépa rali o n entre les diles mai sons, écurie et rem ise, la dite
COll !' divisée en hau le et bass'e pa r clair vois, la haute servan t
de c hem in à voitures pour la fréq nentali o ll du j ardin cl de la
g rève par le jardin; un verger cern é de mnrs au midi et
conchant des écuries et rem ise, et un bosquet, dit le bosquet
d e Penfo rll. aya llt ses fossés au cern e, fo rs a u lp.va nl. la partie
autant qlle s'étend le dit bosquet . de la levée au nord, avec le
pont S Ul' r en trée du bosquet comp ri s.
« L'a ile de la maison S UI' le j a!'diu contient cen t cinquante
pieds de longuellr. ses principales ouvertures su r le j a rdin,
trente pieds d e profondeur, la largeur dtl cluître comp rise, et
vin g t·quatre pieds d e ha uteur compe ll sée, deux caves en terre
sous la dite aile.
« La façade au co uchant dite l'hôte lle ri e es l long ue d e
quatre-vingt-dix-huit pieds, la rge, avec le cloître, de vin g t­
huit pieds et haute de dix-n euf pieds.
« L'aile au midi, long ue d e qualre-vio g t pieds, a les mêmes
lar O'eur eL hauteur qu e la façade au co uchant.

« L'ail e au nord ,et sur J'ég lise es t longu e d e soixante
pieds , large, avec le cloître, d e vin g t-six pi ed s et haute de
dix-neu f.
«( Le rez-d e-chaussée d e la totalité de ces bâtim ents est divisé

-- 109 -
sur le jardin ; de ces dix-sept pièces, il y a trois salles, un
réfectoire et trois chambres qui sont superbement garnis en
meubles d'attache. boiseries et tapisseries de toute espèce.
{( L'étage, fréquenté par des degrés en pip.rre de taille (et
par un escalier dérobé dans l'hôtellerie), est divisé en vingt
pièces principales ou chambres. De ces charntires, il y en a
dix dont la somptuosité eut fait désirer au pieux Guénolé, s'il
en avait eu de pareilles, de voir proroger le terme de son
départ pour l'éternité. Cette maison e~t construite de manière
à durer pendant des siècles. surtout si l'on J' fait à temps
les réparations nécessaires.
(1 Le jardin situé entre la maison et la grève, ayant un
simple mur au midi et un mur avec une levée taluclés sur la
grêve, que l'on fréquente du jardin par une grande porte pra­
tiquée à cet effet, est divisé en plusieurs carrés séparés par des
allées et garni de leurs espaliers, etc.
(, Les berceaux et pépinières au nord du jardin. ont leurs
murs au cerne, fors Rur le jardin dont ils ne sont ~éparés que
par des haies en lauriers. Des arbres qui forment ces berceaux
les uns ne sont encore qu'à demi fait, les autres sont sur le
retou [' et la pépinière ne renferme que des fruitiers trop avancés
pour être replantés.
« Les trois maisonnettes, les écuries et remise sont dignes
du principal bâtiment dont ils sont les accessoires.
'( Le verger. cerné de murs, est planté de vieux fruitiers .
« Entre le coin a u levant du verger et la boulangerie, il y a
une grande porte pour fréquenter le bosquet et le lien de
Penforn.
« Le fonds sous les dits bâtiments . jardins, berceaux, verger,
cour, etc., contient quatre journaux et demi de terre.
( Le bosquet de Penforn contient, avec ses fossés et levées

au cerne, fors du levant, trois journaux de terre, plantés de
deux cent cinquante bons arbres et de quelques autres de
- 110 --
« J', 'stime que le prix qui doit servir de base aux enchères
est une somme de vingt quatre mille livres»
La maison conventuelle et ses dépendances furent acquises
par Jo~eph Richard-Duplessis, de Brest, le 21 mai 1792. pour
la somme de 24 000 livres.
Quant à l'église de J'abbaye. estimée le Ir fructidor an VI
(18 aoùt 1796 ) à 2.160 livres, elle fut adjugée pour cette
somme, le 30 fructidor ( 16 septembre). au même Richard ( 1).
Le mobilier de l'abbaye fut vendu le 4 mai 1791 et jours
suivants; la vente produisit 3.201 livres 9.
La bibliothèque contenait environ 2.000 volumes.
En 1768: 7 religieux; revenus: 7.089 livres (2) .
Personnel en 1790: Dom Pierre Lemoyne, prieur, né à
Vernon le 29 juin 174:3 Le 22 mai 1790, il déclara « qu'il
était pénétré de respect pour tous les décrets de l'Assemblée
nationale et demande à aller demeurer dans une maison de
son o rd re )). A sa sortie en 1791. il se retira à [(eréra u 1 t en
Plougastel-Daoulas. Il se rendit ensuite à Châteaulin, où il
prêta le serment le 5 juillet 1792. Il mourut à Brest, en
qualité de ministre du culte, en 1815 .
Dom Julien - Pierre Le Gall déclara (, qu'il est dansl'inten­
tion de sortir de son ordre à l'époque qui sera fixée par
l'Assemblée nationale »). Il devin t curé de Tréguidel dan s les
Côtes-du-Nord.
Dom Julien Jolive t déclara son intention de se retirer dans
sa famille par suite du mauvais état de sa santé.
La maison de Landévennec n'a pas été reconstituée. Les
bâtiments et l'église sont tombés en ruines, sauf le logis neuf
de l'abbatiale qui sert aujourd'hui d'habitation particulière.
Une partie des matériaux fut transportée à Brest par Pouliquen
et Roujoux et servit à la construction d'un quartier de la ville
(i) Arch. du Fiuistère, Q 12, nO 2384.
(2) Lecestre

op. cil., p. ifl.
III
.qui porte le nom du premier de ces entrepreneurs (1 ). Il ne
reste aucune trace du cloître, dont les débris. d'après Frémin-

ville. furent également dirigés sur Brest.
SAINTE- CROlX DE QUIMPERLÉ
Abbaye fondée en 1029 par Alain Caignart, comte de Cor­
nouaille, probablement sur l'emplacement de l'ermitage de
Saint-Guthiern. Les bâtiments conventuels ont été recons­
truits à la fin du xvu

siècle.
Revenus: 34.390 livres, 13 s.
Charges: 19,844 livres.
En 1768. 8 religieux; revenus: 4.523 livres.
L'abbé commendataire était Guillaume Davaux, né à la
Côte-Saint-André, en Dauphiné. le 1

mars 1740. Précepteur
des enfants de France, il fut pourvu dn bénéfice de
Sainte-Croix en 1785. Il mourut à Paris en 1822 avec les
titres de vicaire général de Soissons et de chanoine honoraire
de Saint-Denis (2).
Personnel en 1790; Dom Paul-Yves Malherbe, prieur, né à
Rennes le 9 octobre 1753. Il opta pour sortir. En 1792, il est
signalé à l ervégant,en Arzano, chez de Jacquelot, émigré_
En l'an X, il habitait à Rennes.
Do m Emmanuel FOllrnault déclara devant la municipalité

de Quimperlé, le 25 mai 1790, être dans l'intention de se
retirer à Coulommiers, en Brie; par la suite il alla résider au
village de Val de Suzon, district de Dijon.
Dom François Lezec, né à Argenton le 18 mars 1745.
ancien prieur de Doélàn, sortit le 25 mai 1790 et se relira
dans sa famille à Brest. Il prêta le serment devant la
(i) A. du Châtellier. Etude sur quelques anciens couvents de la Breta­
gne, p. I~O. Voir nussi : Levot, Notice sur Landévennec et son abbaye.
Brest, 1,858 : Bigot. Les ruines de Landévennec (Bull. de la Société­
arch. du Finistère. t . x, p. 295).
112
municipalité de Landévennec le 30 janvier 1791. Elu curé de
Lanhouarneau le 29 juin 1792, il ne s'y rendit pas et devint
aumônier de l'hôpital général de Brest. EII 1800, on le
retrouve comme vicaire d'office à Lesneven. Plus tard, il est
prêtre à Recouvrance. où il mourut en 1820 . .
Dom Jacques-Joseph Molle se retira dans sa famille à
Saint-Pierre-sur-Dives (Calvados), le 25 mai 1790 .
Dom Pierre Daveau naquit à Tours le 13 juin 175L
Religie ux. profès en 1772, il fut ordonné prêtre à Vannes le
:l0 septembre 1777' II résidait au monastère de Sainte-Croix
depuis le 9 août 1786. Aprés sa sortie, Davea u demeura à
Quimperlé. Il prêta le serment. le renouvela le 21 août 1792 .
Le 9 décembre 1792, il fut élu maire de Quimperlé, puis
membre du directoire du district. Instituteur pal' la suite,
puis secrétaire de la municipalité de Pont-Aven..; en l'an VIII,
il perd cette dernière place et se trouve sans ressources. Il
s'adresse à l'administration centrale du Finistère « de vouloir
bien me compter au nombre de ceux que vous désignerez à
Bonaparte ». Il fut. en effet, nommé secrétaire de la sous­
préfecture de Quimperlé. Au concordat. Daveau reprit . ses
fonctions sacerdotales à Brest comme vicaire; il Y mourut le
1 6 a v l'il 1 SoL! .
Le monastère de Sainte· Croix n'a pas repris sa destination
première. Son église est devenue église paroissiale; la
maison conventuelle abrite les principales administrations
de la ville; l'abbatiale a été transformée en hôtellerie.
SAlNT- MATHIEU
Fondée à une date inconnue, restaurée au XIe siècle, dévastée
à plusieurs reprises par les Anglais, cette abbaye eut ses
bâtiments reconstruits en grande partie au milieu du xvu·
siècle, par les !.\1auristes, qui s'y établirent à cette époque.
Revenus: 18 .198 livres, 7.
Charges: IL!.605 livres, 9 .
; .. fL'abbé commendataireétait ;Adrien de Robien, doyen de

la cathédrale d'Auxerre,· .pourvu en cour de Rome, . sur la

nomination ·dn roi, par . bulles de [780. , En vertu, ,d'un
~rrangement ,avec les religieux, il j ouissait d'un revenu

annuel, en form e de pension, de la somme de 6000 livres.

quitte de tau tes charges autres que celle des portions

congrues du recteur et des deux vicaires de Plougonyelin
'montant à 2600 livres.

Le 5 thermidm' an IV (23 juillet [796), les délégués du
district de Brest dressèrent un état des lieux comme suit:

. (( Le ci-devant couvent de Saint-Mathieu et dépendances
·consistant en un corps de logis en ruine total e, en deux
fa çades, une au levant, l'autre au nord, ayant leurs portes

et fenêtres au levant, midi, couchant et.nord. La façad e du
levant ayant cent huit pieds de long, vingt-cinq de large et
vingt-cinq de haut, ayant cuisine, réfectoire au rez-d e­ chaussée et cave au dessou s, chambres au-dessus et grenier
·au-dessus des. chambres. La façade donnant au nord ayant
cen t huit pieds de long, tren te de large et vingt-cinq de hau t;
salle. salon et çabinets au rez-de-chaussée, chambres et
greniers au-dessus; aire, cour, écu ries, crèches, fontain e au
nord, Les dits logements en dépérissement total et presque
sans couverture. n'ayant ni portes ni fenêtres, le tout étant
emporté et enlevé et pourri par la vissicitude et l'intempérie
du temps; j ardin aU levant, les mazières de la vieille église
au midi et couchant. du corps de logis ; le phare de

. Saint-Mathieu au m~di, le tout d!lns le même enclos entouré

d 'un · mur. gui a dou;,:e pieds de j:l~\Ut, cOI).ten!lnt le tO, ut,

compris le fonds sou s édifices cent-vingt-sept cordes et

demie, déduisan t les sept co l'des et demie pour l'étêndll è au

phare et le chemin de sa fréquentation, Au couchant de
l'enclos du dit couvent et hors ' (hcelui, un colombier avec
son issue el

deux petits rouels à rouir le linconlenanl onze

cordes.

. « Sommes d'avis que les dits héritages donnent en capital
-la somme de dix-huit-cents livres » (1)... .' '. ;:
Le couvent et ses dépendances furent vendus, le 9 thermidor
an IV (27 juillet 1796), pour la somme de 1800 livres, à
'Budoc Provost du Conquet (2). ' . . .:
La bibliothèque contenait 621 volumes. . .:"
En 1768 : 5 religieux; revenus: 5:660 livres (3). . .
Personnel en 1790: Dom Joseph Baron, prieur, originaire

de Rennes, titulaire du 'prieuré simple et régulier de
Saint-Symphorien d'Azay-le-Rideau, diocèse de Tours, dont
il prit possession en 1750. « Il en ignore le revenu " et les
. charges, mais il assure que sa valeur est très modique».
Le 21 octobre 1791, il annonça son.intention de se rendre à
Rennes. . '
Dom Félix Chatichart de la Vicomté, sous-prieur, né au
château de la Vicomté, près Saint-Malo, le 22 novembre 17

'Nous ignorons ce qu'il devint. .'
Dom Pierre Gendrot, procureur, né vers 1759,' auprès d;e
La Guerche. était titulaire du prieuré simple et régulier de
Saint-Brice-en-Coglès. dépendant de l'abbaye de Saint­
Florent-l e·Jeune à Saumur, dont il avait pris possession en

1786. Une partie des biens était affermé au recteur de .

Saint-Brice pour 800 livres et le surplus à divers particuliers
pour 1400 livres. « JI ignore absolument quels sont les
charges dont le dit prieuré est grevé ». Dom Gendrot fut élu
curé de Saint-Renan le 19 juin 179 I. Installé sous la protec-

tion de la troupe, il dut se retirer, après de multiples
aventures, en 1792 (4) . Ils se rendit à Coesmes près Rennes,
(1) Arch. du Finistère, Q 484.
(2) A rch. du Finistère, Q 7, n° 1286.
(3) Lecestrp, p. i5.

(4) Voir Peyron, Documents .. .!, p. 69, 13i, 196, 198; Levot, Bre$t

dont il devint curé constitutionnel. En 1801. il desservait
Sainte-Colombe ( [ 'J.
Dom Lauren t Thomas. né il Rennes, paroisse de Saint­
Germain, le 17 mai 1745. Vicaire à Saint-Sauveur de Brest le
6 juin 1791. En [808, il n'était pas encore réconcilié avec
l 'évêqne de Quimper. Il mOU!'llt il Brest-Recouvrance
le 6 mars 1817.
Ces quatres religieux prêlèrelll ie serment à la Constitution
civile.
L'abbaye comprenait encore un frère convers, Goulven
Kermaïdic, âgé de 68 ans, cuisinier, et six domestiques.
L'acquéreur démolit les bâtiments et vendit les matériaux
à divers particuliers. Il ne subsiste que les murs de l'église et
la. base du donjon (21 .

II. Bernardins

NOTRE-DAillE DU RELEC
Abbaye fondée en 1132 par des religi eux de l'abbaye cis­ tercienne de l'Aumône dans l'ancien diocèse de Chartres.
Revenus: 20.704 livres .
Charges: 5.004 livres.
A la mort du dernier abbé, en 1784, les revenus du Relec
furent affectés aux économats. Suivant le compte fourni au
district de Morlaix les LI et 8 janvier 1791, le montanL de la
recette du le janvier au 3l décembre 1790, ava it été de
6.893-livres, 16 sous, et les dépenses de 17 974 livres, 18 sous.
Voici l'état des bâtiments conventuels, tel qu'il fut dressé
par les estimateurs en 1790 ;
(1. ) Sevestre, Le clergé breton en 1801 (Annales de Bretagne, t. XXIX,
1.9t3, p. 1.27) .
(2 1 Voir: Levot, L'abbaye de Saint-Mathieu de Fineterre (Bulletin
de la Soc. académique de Brest, t. VlII, p. 3i51 : Urschp.Jler, La pointe
Il6
« Dans la ci-devant abbaye du Relecq, un édifice nommé
la maison des hôtes, ayant sa façade sur le jardin, cent
sohante dix-sept pieds de longueur sur vingt-sept de laize,
composé d'un rez-de-chaussée, un étage et grenier au-dessus
couvert en ardoises et construit en moëlons à l'exception des·
portes et croisées qui sont garnies en pierres de taille,
estimé huit cent livres.
« Autre édifice derrière celui ci-dessus appelé le dortoir ..
contenant en longueur cent cinquante-six pieds, sur trente
pieds de largeur en œuvre, composé aussi d'un rez-de-chaus­
sée, d'un létage et [grenier au-dessus, couverts en ardoises.
construit en moëlons, les portes, croisées et escaliers en
pierre de taille, estimé huit cents livres.
« Autre édifice joignant ce dernier nommé le bâtiment.
neuf, ayant de façade soixante pieds et de largeur en œuvre
trente pieds, composé également d'un rez-de-chaussée, d'un
étage et grenier, cou vert en ardoises, construiL en moëlons

ayant les jambages des portes el croisées, ainsi que le
cordon et la corniche en pierrres de taille, estimé cinq cents
livres.
« Le cloître conLenant en longueur cent vingt pieds et de
largeur quatre vingt seize pieds couvert en ardoises et
soutenu par des petites colonnes en pierres de taille, le tout
en ruine, estimée cinquante livres (1).
« Joignant et au couchant de la maison des hôtes, une
terrasse ayant des fossés au cerne, contenant en fonds trente­
trois cordes, aveec des arbres fruitiers; autre terrasse joignant
celle-ci au nord, quinze cordes et demie, laissant le surplus.
de cette terrasse pour la fréquentation du bâtiment neuf par
une lizière entre la maison des hôles et la première terrasse.
Joignant celte dernière terrasse, et au nord, un jardin
(1.) D'après ces données, le cloître avait 38 m 10 de long sur 31 de
large. M. Bigot lui avait attribué 30 mètres sur 29'" 70 (Les cloîtres du
nommé le jardin potager d'en bas, entouré de fossés pleins
d'eau, contenant cent dix sept cordes; ces trois articles estimés
ensemble cinq cents livres.
« Au même terroir du Relecq, au midi du jardin de Jean
du Baud, un fenil ou nourrice, y compris une lizière de terre
chaude au couchant du dit fenil, le tout contenant en fonds

cent huit cordes, compris ses fos sés, fors au nord, estimé,
avec les arbres et les plants qui s'y trouvent actuellement,
neuf cents livres.
La description des orgues de l'église, faite le 13 juillet 1792

nous paraît mériter d'être reproduite: .
« Estimation des orgues du Relecq par Joseph Gardet,
facteur d'orgues à Morlaix:
« Le positif composé d'une montre, bourdon, nazare,
doublette, tierce, fourniture cimbale et comhorne, évalué
trois cent cinquante livres.
« Le grand orgue composé d'une montre de quatre pieds,
d'un bourdon de huit pieds, d'un pressetant, nazare,
doublette, tierce, fourniture, cimbale trompette, clairon et
flageolet. estimé deux cent cinquante livres.
« Le cornet d'écho, comppsé d'une voix humaine et cornet,
estimé trente six livres)) (1) .
L'abbaye et ses dépendances furent adjugées, le 13 ventôse
an 1 1 (3 mars 1794), à André Le Hénaff père, marchand à
Morlaix, pour la somme de 16.500 livres (2).
Les archives concernant le district de Châteaulin furent
déposées au siège le 12 avril 1791 ; elles étaient renfermées
dans trois barriques. Celles relatives aux districts de Lander­
neau, Carhaix et Lannion, furent également réparties à la

meme epoque.
En 1768: 12 religieux; revenus: 9 .300 livres.
(1) Arch. du Finistère, Q 399.

118 -
Personn el en 1790: Dom Claud e Verguet, prieur. n é à
Saint-Chri stophe de Champlitte . diocèse de Dijon. le 28 mars
'744, fit professilJ n le 6 avril '7 62 . à l'abbaye de Citeaux.
Prieur de Sainte-Luce en Aunis. il ful n omm é rri eur du Relec
en 1784 . Elu député du cl prgé de Léon a ll x Eta ts généraux,
il emprunta avant son départ, le 15 août, du sieur Brulart
négociant à Morlaix. la ROmm e de 5000 livres « pour les
b esoin s pressants de la maison et notamment pour le mettre
à même de défr ayer au voyage qu'il était dan s le ca s de faire
incessamment à Versa illes» . Le 22 décembre '790, il
annon çait de Paris aux admini strateurs du Finistère qu 'il
venait d. e prêter « le serment civique d'être fid èle à la loi, au
Roy et de maintenir et de défendre la constitution de tout
m on pouvoir, mème aux dépens de ma vie, s'il le faut _.
Il déclarait également « qu e jll ~ques à ce que le départe­
m ent du Finislère ait prononcé sur la suppression ou
con servation de l'abbaye de Relecq . j e ne pourrai faire
conriaître ma résoluti on et le choix de genre de vie qui me
con viendra ».
A sa sortie de l'Assemblée, Claud e Verguet se retira dan s
son pays n ataL Nommé curé constitutionnel de Montarlot,
dan s la Haute-Saône, il abjura la prêtrise pend ant la Terreur
et devint prés id en t de district. En 1800, il fu t nom mé
sous-préfet de Lure. mai s donna sa démission peu de temps
ap rès avoir pris ses fo nctions . Il revint à Monta rlot où il
m ourut le 9 mars 1814 ( 1 ).
Dom Jean-Baptiste-Bernard Deforges, âgé de 70 an s,
devint vicaire constitutionnel à Morlaix. En l'an lU, il est
signalé à l'hospice de Morlaix comme cc infirme et imbécile».
Dom Thomas-Marie Barbier, originaire du Légué, âgé de
(i ) Sur Claurle V erguet, voir: Kerviler, Cent ans de l'eprésentation
breto nne, t. I, p. 161; Recherches et Notices sur les députés de
Bretagne, t. n, p. 30 '1,; Téphany, Histoire de la persécution religieuse
lIg

44 ans, prêta également le serment et se retira dans les
Côtes-du-Nord, à Merdrignac.
Dom Casimir Huo, procureur, âgé de ll3 ans.
Après la Révolution, Madame veuve Le Hénaff essaya
d'install er des Trappistes au Relec. Son proj et n'aboutit pas.
Plus tard, une nouvelle tentative d'y organiser une école
sous la direction des frères Lamennais échoua également.
Des rel igieuses des filles de la Croix y séjournèrent ensuite
pendant quelques années.
Actuellement il ne subsiste de l'abbaye qu e l'église et le

manoir abbatial ( [). Ce dernier est converti en ferme.
Quelqnes pans de murs de la salle capitulaire se remarquent
encore au nord de l'église .
NOTRE-DAME ou SAINT-MAURICE DE CARNOET
Abbaye fondée vers [170 par Conan IV, duc d e Bretagne.
Des premières constructions, il ne subsiste que la salle capi­
tulaire, élégant spécimen gothique de la seconde moitié du

siècle. La maison conventuelle a été reconstruite à la
fin du XVIIe 011 au début du XVIII' siècle.
Revenu s : [g .557 livres, 15 sous.
Charges: 8.0[3 livres, 12 sous.
L'abbé commendataire était Jérome-François de Keroulas,
né à Lesneven le ,6 d écembre 1735, prêtre en 1758, licencié
en droit, recteur de Saint-Martin de Morlaix en 1759,
chanoine de Lél)n et grand vicaire depuis '769 , Il fut
pourvu. du bénéfice de Saint- Maurice en 1780. Il percevait
sur les revenus de l'abbaye une pension de 5.600 livres;
il recevait en outre, en qualité de chanoine, 2854 livres ; de
l'abbaye de la Meilleraye. une pension de 1500 livres; la
chapellenie de Saint-André Le Barbu, en la cathédrale de
t ) Sur le Helpe, voir: cllanol oe PérE'onès, Notre-Darne du Relec, en
120

Léon, lui rapportait 678 livres ; comme archidiacre d'Ach, il

lui était alloué 407 livres. C'était un opulent prébendier.
Il s'embarqua pour l'Angleterre le 7 juillet 1791 et
débarqua à Roscoffle 18 juin 1802. Il mourut à l'hospice de
Quimper le 14 août 1808.
Nous extrayons du procès- verbal d'estimation de 1790, les
détails qui suiven t :
« La dite abbaye de Saint Maurice Carnoët consistant en la
maison conventuelle, église, la maison abbatiale, ancienne
procure, jardins. vergers, écuries et autres dépendances,
évalués trente quatre mille cent quatre vingt dix livres.
« Les bois de haute futaie proche l'étang de Saint-Maurice,
contenant environ douze arpents, évalués avec leur fonds
dix-sept mille six cent cinquante neuf livres.
cc La grande avenue de Saint-Maurice estimée avec son
fonds deux mille deux cent soixante dix livres.
(( Le quart de réserve attenant à la grande avenue à gauche

en sortant de l'abbaye, estimé douze cent livres.
(( Le grand pré, y compris les bois sur les fossés, estimé
trois mille huit cent soixante sept livres.
(( Le petit bois de l'étang, actuellement haute futaye, avec
son fonds. estimé deux mille quatre cent livres.
{( La grande lande contenant environ 40 journaux attenante
au grand bois, y compris trente chênes et deux cents pieds
de prusse qui s'y trouvent plantés, estimés dix sept cent
quarante cinq livres.
( Le pré nommé prat Jeannet, joignant la forêt de la
nation, les fossés et les hois estimés onze cent quatre-vingt
li vres.
cc Un parc dit le verger de la Croix, sous pa tu re, genêts et
. criniers, avec les fossés et les bois, estimés douze cent dix
huit li v res.

« Un parc sous lande nommé Nouaren estimé trois cent

121
n La grande taille contenant en fonds soixante-quatre ar­
pens, évalués avec son fonds dix neuf mille deux cents livres.
« Le petit taillis proche le petit Léti contenant en fonds
sept arpents estimé avec son fonds douze cents livres.
« Le grand bois de la Croix et celui du prè, cy-devant
haute futaie, y compris l'avenue avec le fonds du tout,
estimé cinq mille quatre cen ts livres.
« Le moulin de Saint-Maurice avec ses dépendances
consistant en une maison, pierres de moulage, crêche, verger
et placître avec ses bois , le conduit des eaux, la chaussée, la
fontaine, le renable du dit moulin, ses fossés et les bois qui
se trouvent dessus, estimé cinq mille cent seize livres .
« Le passage de Saint-Maurice, estimé quatre cents livres.
« Le fonds et la plantation des prussiers, au dessus du
passage, proche la rivière, estimés cent vingt livres .
. cc Un placître situé entre la rivière et le bout de l'avenue
du bois de la Croix, y compris les bois, estimés cent. livres 1).
Le premier acquéreur de l'abbaye et de ses dépendances,
Guillaume-Charles Lohéac de Quimperlé, renonça à son
acquisition le 4 juillet 1793 ; remis en adjudication, le
domaine fu t acheté par Pierre-Jacques Bodénan de Lorient,
pour la somme de 97.100 livres (1).
La bibliothèque con tenait 1.085 volumes; aucun manuscrit.
En 1768 : 7 religieux; revenus: 6300 livres.
Personnel en 1790 : Dom Robert Lallemant, prieur, né à
Epernay le 29 avril 1722, avait fait profession en l'abbaye de
Vaucler, diocèse de Laon , le 13 novembre 1739. Il prêta le
serment devant la municipalité de Quimperlé le 21 août 1792.
Il remit ses lettres de prêtrise le 20 avril 1794. sous la
contrainte des délégués de Jean Bon Saint André, Gauthier,
Babin et Le Cor. qui le nommèrent membre du district. Il
mourut à Quimperlé le 20 septembre 1807 .

- , 122
Dom Julien-Joachim Launay, né à Plumaugat le 8 sep­
tembre 1739, avait fait profession en l'abbaye de Prières,
le 24juin 1757. Il prêta le serment en même temps que son
confrère Lallemant. Launay fut autorisé par le nouveau
propriétaire à rester à Saint Maurice comme locataire; une
bande de chouans l'en enleva le 21 nivôse an VII (10 janvier
1799), le conduisit dans le bois avec un mouchoir sur les
yeux et ne le relâcha qu'après lui avoir fait promettre de ré­
tracter son serment. Il mourut à Saint Maurice le 18 octobre
1808.
Dom Pierre-Marie Veller, né à Saint Sauveur de Quimper
le 29 mai 1737, fit profession enl'abbaye de Prières, le 2 février
1766. Il fut dans sa jeunesse un moine turbulent et indisci­
pliné (1). A sa sortie de Saint-Maurice, il se rendit à Carhaixoù
il prêta le serment le 31 janvier 1791. En 1793, il était prêtre à
Poullaouen. Il abdiqua to"ute fonction ecclésiastique, sans
restriction quelconque, devant la rnunicipalîté de Carhaix, le
19 messidor an II (7 juillet 1794), Il mourut à Carhaix le 3
germinal an IV (23 mars 1796).
Il ne reste de l'abbaye de Saint Maurice que la maison con­
ventuelle, qui sert d'habitation particulière, et quelques pans
de murs de l'église.
III Chanoines réguliers de Saint-Augustin
DAOULAS
Fondée vers le milieu du Xli· siècle; l'église a été com-
mencée en 1167' -
. Les revenus de l'abbaye de Daoulas furent accordés aux
Jésuites du séminaire des aumôniers de la marine à Brest en
(i ) Voir A. Dupuy. Les lettres de cachet en Bretagne dans La
Bretagne a'l XVIIIe siècle (Bulletin de la Société académique de Brest,
t. IX, :I.883-i884) ; Albert David, Notre-Dame de Langonnet, pp. i!:l9 et s.

1692. Lors de la suppression des J ésu ites, en 1762,. les
revenus furent réunis aux économats. A celte date, ~es
revenus montaient à 22.000 livres et les charges à 7.680
livres ( 1). Nous n'avons pas retrouvé l'état qui dut être dressé
en 1790.
L'économat payait aux chanoines une somme de 3150 livres
pour pension quilte de toutes charges, sauf les intérêts d'un
emprunt de dix mille livres qu'il avaient dû contracter pour
soutenir \1n procès contre les Jésuites, et dont les arrérages
se montaient annuellement à 333 livres, 6 sous, 8 deniers (2).
« Le cou ven t consistan t en une cour pavée et entourée de
bâtiments en maçonnerie, un autre bâtiment à trois façades
avec aussi une cour cernée par le cloître, un jardin en deux
terrasses avec un garnd verger: un antre petit jardin et cinq
petites chapelles en dehors des murs et entourées de petites
parcelles de terre plantées de quelques jeunes arbres ,), fut
adjugé, le 12 juillet 1792, à M. François Guiastrennec, de
Brest, pour la somme de 13.200 livres (3).
Les deux chanoines résidant avaient quitté la maison le
le' janvier 1791, sur l'ordre du district de Landerneau.
Une ordre du roi du 21 mai 1785 avait fait défense au
prieur de Daoulas de recevoir aucun novice dans la maison
et d'admettre à la profession ceux qui pourraient s'y trouver.
Personn el en '790: Le chapitre ne comprenait que huit
chanoines, dont deux seulement vivaient en communauté :
Pierre-Joseph Kerlen, prieur clauslral et recteur de Daoulas,
né à Saint-Mathieu de Quimper en 17M. se retira dans sa
famille · à sa sortie de Daou las. Détenu aux capucins de
Landerneau en 1793, il fut déporté à Rochefort et mourut
sur le Waslü'1gton le 5 octobre 1794 Gilles-Baptiste Le Hars

(1) Levot, Daoulas et son abbaye, p. 7[J.
(2) Arch. fiu FiniSlère. Q aH.

né à Mahalon le 16 octobre 1727, prononça ses vœux en
l'église abbaliale de Daoulas en 1783. Après avoir été détenu
à diverses reprises au cours de la Révolution, il mourut à
Quimper le 30 floréal an X (20 mai 1802). Ces deux chanoines
assuraient outre l'office canonial et les fondations, le service
paroissial avec l'assistance d'un vicaire nommé Dhervé.
Les six autres chanoines étaient dispersés dans les
prieurés-cures dépendant de l'abbaye: à Ploudiry, Guillaume
Le Bris, ,né à Quimper en 1729, réfugié à jersey le 5 mai 1791,
recteur de Ploudiry au concordat, mort à Quimper comme
chanoine, le 9 mars 18 LI; à Irvillac, Joseph Corvaisier, né à
Quimper en [735, détenu au château de Brest en 1792, puis
déporté à Rochefort, où il mourut sur le Washington le
24 septembre 1794; à Plougastel-Daoulas, Thomas-Robert
Cornily. né à Quimper le 3 décembre 1743, réfugié en
Espagne, mort curé de Plougastel en 18[6; à Hanvec,
Pierre-Jean Bourillon, réfugié en Espagne et dont nous
ignorons le sort par la suite; à Saint-Thomas de Landerneau,
Pierre· Joseph Bodénés. né à Irvillac en 1726 incarcéré
plusieurs fois durant la Révolution, décédé à Landerneau le
29 vendémiaire an IX (21 octobre 1800); à Loperhet,
François-Damien Jannou, né à Quimper en 1752, prêtre en
1777. maire de Loperhet en 1790, élu membre du conseil
général du Finistère, prêta serment, puis se rétracta. Détenu
au château de Brest en 1792, il se rendit ensuite à Jersey
puis en Angleterre. Il mourut curé de Landerneau le
JO mai 1807.
Le 22 novembre 1790. la foudre tomba sur l'église et
endommagea considérablement le chœur; ce dernier fut
, démoli par Perrot et Roujoux qui firent transporter à Brest
les pierres tombales qui s'y trouvaient en grand nombre.
L'église, amputée en outre du porche, transporté à l'entrée
du cimetière et aménagé pour recevoir les cloches, sert
du cloître ont été relevées et reconstituées à leur emplacement
primitif (1).
(A suivre J.
(i) Voir Bigot, Les cloîtres du Finistère (Bulletin de la Soc. arch. du
Finistère, 188~; L. Lécureux, Daoulas (Congrès archéologiqne de
France, Brest-Vannes, 1914, p. 19).

DEUXIÈME PARTIE
Table des mémoires publiés en 1937
PAGES
1. L'Instruction sous l'Ancien Régime dans les limi-
les du Finistère actuel (suite), par 1. OGÈs .. 3
II. Les Bretons et la taille à Paris sous Philippe Le
Bel, par R. COUFFON. , . . . . . . . . ., 45
III. Les nécropoles préhistoriques de Lannoulouarn
et de Kerégan en Plouguin, par 1. L'HoSTls.. 50
IV. L'élection des députés du Finistère à la Convention
nationale, procès-verbal de l'assemblée élec-
torale, publié par J. SAVINA .
V. Le clergé régulier dans le Finistère en 1790,
D. BERNARD. . . .

QUIMPER - IMPRIMERIE Mme BARGAIN

par