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Bulletin SAF 1935


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A propos de Saint-Renan et des amours de Victor Hugo

L. Dujardin

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1935 tome 62 - Pages 64 à 74

amours

En 1833, trois semaines après la rep résentation de Lucrèce
Borg'ïa, ViclOl' Hu'go prit pour mallresse J ulietle Drouet.
Il n'y a vait pas, à Paris, dil-on, de plu s belle femm e. Cette
union a \'ec une femme intelli gente et dévouée devait durer
50 ans.
Julielte s'appelait en réalité Julienne Gauvain I[), née en
1 806 à Fougères où son père était tailleu r. Devenue orpheline,
elle fut co nfi ée à so n oncle le sous-lieutenant d'artill erie
Drouet, qui rut « ga rde-cô tes quelque part en Bretagne à la
l, [ 6 Cie ») . Julie tt e adopta son nom, pour ne plus se faire
appeler et n 'être connu e de la postérité que sou s celui de
J ulielle Drouet.

De Fougères elle s'en fu t à Paris. Modèle chez le sculpteur
Pradi er, Julielte en devint la maîtresse Une fille, Claire,
naquit de celle union. Julielle a vait 20 a ns. De Pradier elle
passa à Viclor Hugo . Pour avoir duré cin quante ans cette
liaison n'en fut pas moins entrecoupée de mulliples in cidents.
C'es t ain si q ll e le 0 2 aolÎt ,83l" un peu plu s d' un an après le
début de leur liaiso n, Juliette quitta Victor Hu go . De Paris
elle s'enfui t chez sa ~am r à Saint-Renan. So n ami COlll'ut la
chercher. Il la' ramena à Paris pa r antes el Etampes où le
(1) N ée le i O avril i 806, luI. ba plisée le lenfk>main ({ Julienne José­ phille, fille de .Jutien Gauvain et de l\iarie M arclJaud o't, maries calholi­
quelOent en i799, née d' hier, en cette paroisse, a été baptisée par nous
curé, le onze avril mil hu it cent six, parrain Jose ph llannier, son
cousin , marraine Julienne Piard. lesquels ne signput, le père présent
soussigné avec nous. J.-François Bannier, Julien Ga uv Jin , P. Beaulieu,
curé de Saint-Sulpice» .

25 août il écl'ivit la pièce X de ce livre « Mon bras pressait
sa taille frêle .. : )) (Co n/empla /ions. liv. II. Edil. des grand s
écrivains de la France. p. 89).
Pour quel motif quiLlait·elle son ami? Question d 'êll'gent;
dit M, Barthou (Lesa moars d'an poète, Paris, p. 67 et suiv.).
(( Le vend red i ! or aoû t il Y eut en tre eux une d iSC ll ssion
terrible. Des paroles violentes furent échangées . Les dettes
de Juliette cl'iaient leur menace et 80n passé. Elle ne pouvait
pilis faire face il des ex igences de plus en plu s pressantes .
Tout paraissait perdu pour elle : son a man t. auquel la révé­
lation de sa si tua Lion rée lle a vai t arraché les mots les plus
durs, et son engagLfnent à la Comédie Française, signé depuis
six mois. mais que tout désormais rendait impossible.
Accablée par le sort, brisée, déchue, ell e prit le parti de
fuir. Victor Hugo. remué pal' ce Lte résolution, qu'il sentait
celle fois inexorable. et rendu à son am our par la peur de
la perdre, ne ménagea pour la retenir ni les supplications.
ni les promesses, ni même les menaces. Il lui jurait sa
volonté de la sa uver pal' so n Lrava il et ses sacl'Ïfices et, en
mêl1Je temps, il lui fai sait 'redou ter. si elle partait, les pires
destin s. Ses pleurs et sa colère échouèrent Impuissant à la
convaincre il. lui tendit une main sèche en lui disant adieu
pour toujours)) .
De la part de Juliette c'était de la comédie, car le lende­ main elle lui écrivait :
« Samedi à midi, 2 août 1834,
(t A Victor. Adieu pour jamais, adieu pour toujours.
« C'est loi qui l'as dit, adieu donc et puisses-lu ,être heureux

« et admiré autant que j e suis malheureuse et déchue.

(( Adieu, ce mot là con tien t toute ma vie, toute ma j oie,
(( tout mon bonheur. Adieu. J ULIETTE Il .

En même temps elle écrivait à Marie. sa domestique, de

rùe du Paradis, au nom de M. Kraft, et cc enfin dites-moi
lout ce que vous saure..: sur lui Il. Ce ne sonl pas là ordi­
nairement procédés de rupture. Elle terminait ainsi sa lettre
à sa domestique: « Je vous écris de Hennes, où je suis
« arrivée très malade et ma fille aussi. J'espère cependant
(1 repartir demain chez ma sœur où vous m'écrirez il cette
(1 adresse: Madame Drouet chez Monsieur Louis Koch, à
« Saint-Renan, par Brest )J. JulieLle ne donne pas le nom de
sa sœur, L'I.cnée Gauvain, qui n'était pas, il cetle date,
l'épouse de Louis Koch, commerçan t, mais sa maîtresse.
C'est donG par erreur que M. Barthou la désigne à celle dale
comme élant Mm. Koch.
Le lundi, en cours de voyage, de Rennes, nouvelle lettre
de Juliette à Victor, aussi pleine d'amour que possible.
« Je repars, dit-elle, demain pour Brest, il 4 heures du ma­
« tin, j'arriverai le jeudi à 5 heures du soir )J
C'est Julielle elle-même qui nous fixe l'horaire de son
voyage par correspondance:
Paris. !! août samedi midi.
Rennes. Lundi!! heures et demi après midi (donc 4 août),
départ mardi 4 heures du matin (5 août).
Brest. Arrivée jeudi 5 heures du soir (7 août).
Elle est tellement brisée d'émotion et de fatigue qu'en
arrivant à Saint-Renan elle oublie les dates et écrit en tête
de sa première lettre:
cc Saint-Renan, !! heures du matin, (1 5 août 1834 .

(1 Victor, je t'aime, Victor, je me meurs loin de loi,
(1 j'ai besoin de toi pour vivre. Depuis que je t'ai tout dit,
(1 depuis surtout le moment où mes yeux n'ont plus ren-

« contré les tiens, il me semble qu'on m'a ouvert toutes les
« "èines et que ma vie s'en va, sans que j'aie la volonté de
« la retenir, je me sens mourir et je sens que je t'aime

« ner ~ M'airnes-tu encore ~ E~t-ce vrai que tu me hais, ,que
« je te suis odieuse, que tu me méprises, que tu me repous­
«( serais la figure sur le pavé, si je venais coller mes lèvres
« sur tes pieds en te demandant grâce ~ Oh ! si tu m'aimes
« encore, si tu peux m'estimer encore, si tu peux tout par­
« donner, dis-le et je ferai tou t ce que tu voudras. je ferai

« tout, mon Dieu! dis, veux-tu encore de moi ~ Je su is bien
« malade ».
A Marie, sa domestique, datant encore « 2 heures 5 août
1831

», elle écrivait: cc Voici encore une lettre pour M. Vic­
«( tOI' 1-1.. . Pour mon Victor. 3 heures du matin 19% ».
LeUre déchirante d'amour.
« 3 heures du matin (18%) .
« POUl\ MON VrCTon,
« Tant que j'ai espéré te voir je n'ai pas dormi. Mainte­
« nant que je n'ai plus d'espoir je ne dors pas davantage
« parce crue j'ai du chagrin, le 'chagrin de ne pas t'avoir vu,

«, le chagrin d'avoir été maussacle et hargneuse, quand toi tu
« étais doux et charmant; touLe ma soirée me repasse dans
« l'esprit et me canse une douleur de cœur atroce et insuppor­
« ' table; je me trouve bien coupable de te tourmenter et
« malgré moi je retombe dans ce tort qu'on appelle la
« jalousie. Je crains de te déplaire et je me défigure pal'
« cette passion hideuse, la jalousie. Je te rends malheureux
«( quand je voudrais Le saLurer de bonheur. Oh ! je suis bien
«( coupable, mais je suis bien à plaindre, car je sui::; jalouse,
«(et de qui ~ de la plus belle, la plus douce, de la plus
« admirable femme de la terre, et celte femme c'est la tienne.
« Mon Dien, pardonnez-moi, ce que je souffre est une assez
« grande expiation de ma faute.
cc Mon Dieu, mais je t'aime, je t'aime, mon Victor, tont
« est là, tu me pardonnes, n'est-ce pas ~ et tu m'aimes
«( autant ~ Je l'espère, ou bien j'aime autant mourir de

Il n'y a don o pa s lieu d'êlre surpris qu e M. Barthou,
négligeant de véri fie r les dales, ait commis à ce suj el quelques
erreurs .
En 1963, si j e sui s encore de ce mond e. et que la q ues tion
m'intéresse encore, j e m 'a llellerai au problème. ca r ce n'es l
qu'à celle ann ée qu e la Bibliolhèqu e Na tionale pprmellra de
prendre co nn aissance des documents q u'elle délient, tels
que {( les Lettres à Julielte et le livre de l'Anniversaire »,
A cell!' da te a ussi se ul ement nous sa lll'ons si Viclor Hugo
es l venu à Saint-Renan même rej oindre Julietle. A peine
a vail-elle, en eITe!., q uiLl é Pari s qu e « Vi ctor Hugo remu a
des pieds , des moin s el des o ngles pour la sa uver, qu'il
réussil à ramasser mille francs , q u 'il émut le cœur de pJ'odier
lui-m ême el qlle, d'accord enlre eux , des arrangements
fment pris. Pui s il décida d'a ller rejoindre el rechercher
Julielle ') . (Barthou , p . 67) '
C'esl à Brest le 9 ao û t qu e fut rescellée l'union en ce p ro-

cès-verba l. « Bres t, 9 ooût. Il est sep t heu l'es d u soir. Le
temps est comme notre destinée après un e joumée de brume
et d'orage, nou s ve nons d'avoir un beau jolll' ... l) (Barthou,
p . 68) . Ce q ui n'empêchait pas Viclor Hugo d'écrire une
heure plus la rd à sa femme : « Toutes mes joumées, main­
« L enant, mon Adèle, vont être pri ses ju squ'à la dernière
« minute. J e ne pourrai peut·être plu s t'écrire aussi SOllvent.

« Songe que j e pense à loi et à vous Lous ". .
Co mmen t Juliette et sa fill e efTectuèrent- plles lelll' voyage
de Pa ri s à Saint-Hena n ~ Il Y avait, à l'époque, trois moyens
de se rend re à Saint-Rellan : ou p rendre la malle-pos te qu i
parlait chaque j our de l'Hôtel des Postes, rue Jea n-Jacques­ B .oussea u, ou voyager pa r la Cie Loffitte, dont les départs
avaienllieu tous les deu x jours de la rue de Grenelle- Saint­ Honoré, ou par les Message ries, avec départ rue Notre-Dame
des Victoires . Le trojel le plu s rapide Paris-Bres t s'effectuait

il Rennes, une heure à Saint-Brieuc. Ce n'est pas celui qu'elle
utilisa. Le prix des places ét.ait de 1 16 fI'. 65 en malle-poste
et de 86 fr. 50. 78 fI'. 50, 74 fr. 50 en diligence selon les
places . La malle-post.e déposait ses voyageurs , l'LIe Vollaire,
n° LI. Les Messageries déposaient les leurs rue d'Aiguillon,
nO MI. La Cie Laffite les sîens 30, rue de la Mairie ,
De Brest à Saint- Renan: 13 kilomètres; ou bien J'on s'y
faisait conduire par les voitUl"es particulières de Chessé,
Penel, Tinévez ou Billard, ou bien l'on prenait le service
régulier Bossard de Saint-Renan, dont Je départ avait lieu
de la rue Crée, n° 7. Arrivée il Saint-Henan près de l'Eglise.
Le départ avait. lieu il 3 heure~ de l'après-midi et le voyage
coûlait 0 fr. 50.
Voici lulielte chez sa sœUl", René Gauvain : celle-ci n'est

pas à cette dale ( 183LI) Madame Louis Koch, ainsi qu'en
témoigne l'élat civil de Saint-Renan ( 1 ).
(i) « Ou Ho d'avril i833, à i heure du soir.
« Acte de naissance d'un enfant du sexe féminin, né de jour d'hier à
iD heures du malin, présenté par le sieur Louis Koch, commerçant, à
laquelle il donne les prénoms de Marie-Louise, se reconnaissant pour
êlre le père el domicilié en celle commune.
« Le sexe de l'enlant a été reconnu être féminin.
« i cr lémoin François Mingam, aubergiste, âgé de 30 ans, domicilié
SUI' celte commune qui signe.

lémoin Jacques Lenvec, aussi aubergiste, âgé de 29 ans, domicilié
sur celle commune qui signe.
C( Snr la réquisition à nous laite pal' ledit sieur Koch qui en se recon­
naissant pour Je père de l'enfant reconnalt l'avoir en de Reine Gauvain,
âgée rie 28 ans, demeurant ell son domicile ruo Saint-Sébastien ou est né
l'enfant, l~ lout en présence des témoins dénomm és ci-dessus, qui
signent avec ledit sieur Koch.
« Louis Koch, [françois Mingan, Lenvec Jacques.
« Constaté sui vant la loi par moi François-Marie Lev essel, maire,
laisant les loncHons d'officiel' public de l'état civil soussigné après
lecture donnée. LE VESSEL.
« ... Ladite Marie-Louise Koch a été légitimée suivant acte de ma­
riage fait à Brest le il. juin i8lJ,O ~\ .
En ' 1840 Louis Koch et Renée Cauvain régularisèrent leur
situation (1 ).
Qu'était Louis Koch ~ Il figure, à l'époqll e, comme sergellt
sur la li ste de la garde nationale de Saint-Hellan où il tenaH
un commerce de liquoriste en association avec M. Hocher,
rue Saint-Sébastien (2 1 . Dans l'histoire du co llège Joinville,
aujourd'hui lycée de Brest, figure sa biographie que nous
empruntons:
(, Parmi tou s les professeurs qui inaugurèrent le collège
Joinville. la physionomie la plus o riginale fut certes celle du
professeur d'allemand, M. Louis Koch. Avec sa rude et bonne
figure germanique, son accent tudesque, son langage
mi-français, mi- allemand, sa perruque roussie qui cachait
mal ses cheveux blancs . sa haute stature, sa mise négligée,
il réa lisait bien le type étrange du vieux savant allemand, tel
que peu ven t le dépeindre les contes fan tastiq ues d'Hoffmann.

Saint-Henan. « Marie-Louise, fille naturelle de Louis Koch (Coq) et de
Renée Cauvin, née il Saint-Henan le dix avril mil huit cent trente-trois,
a été le lendemain baptisée par le soussigné curé. Parrain et marraine,
Pl'igent-Marie-Constant Le Caill et Pélagie Mathieu. Le Hir, curé de
Saint-Renan ».
En marge : Coq/8. A remarquer l'orthographe de Coq, avec rature,
el Cauvio, et le report en mal·ge.
(:\.) Ainsi qu'en témoigne cette lettre, ell date du :1.5 juin :\.840,
adressée par le maire de Brest il celui de Sainl-Henan.
« MONSIEUR LE MAIRE,
« ( En exécution de l'article 49 du code civil, j'ai l'honneur de VOliS
« informer que par acte de mariage rarporté à la mairie de Brest le
« onze juin présent mois, Monsieur Louis Koch, professeui' de langue
« allemande, et demoiselle H enée-Françoise Gauvain se sont reconnus
« père et mère et ont légitimé Marie-Louise Koch, née d'eux en la
« commune de Saint-Henan le dix avril mil huit cent trente-trois. Je
« viens en conséquence, Monsieur le Maire. vous prier de vouloir bien
« raire mention de celte légitimation en marge de l'acte de naissance de
« cet enfant; par mes soins ulle semblable annotation a été faite sur le
« registre des naissances de ladite aunée dont vous avez lait le dépôt au
« greffe du Tribunal civil de Brest ».
(2) Dans la maison actuellement occupée par M.. P errot, négociant en

gl'ams.

(C Né à Lahr, grand-duché de Bade, en 1801, Louis l\och
était fils d'un père Français, ainsi que le constata le jugement
du Tribunal civil du 7 août 1848, qui, en vertu de J'article
du code civil: « tout enfant né d'un Français en pays étranger
est Francais)J, lui donnait le titre et les droits de citoyen
Français.
(, Après avoir servi quelque temps dans les troupes du
grand- duc de Bade, il fit ses études et il prit ses premiers
grades à l'Université d'Iéna; puis forcé de quiller l'Allemagne,
comme compromis dans une manifestation politique, il
s'engagea dans la légion de Hohenlohe, alors en garnison à
Brest. Il y parvint au grade d'adjudant sous-officier, qu'il
possédait au moment où les événements de 1830 amenèrent
le licenciement de la légion, Il se retira à Saint-Renan
jusqu'à la fin de 1834.
« JI entra alors comme professeur d'allemand à l'institution
Goëz, il se fit recevoir en France bachelier és- Iettres et il
obtint ensuite le diplôme de capacité pOUl' l'enseignement
de l'allemand. En celte qualité, il fut nommé professeur
de langue allemande au collège Joinville, le 18 septembre
1839. Il Y enseigna jusqu'en 1848.
« A cette époque, reconnu comme citoyen frauçais pal' le
jugement du Tribunal dont il a été question plus haut, il put
en cette qualité être mainten u comme professeur d'allemand
au Lycée national de Brest, et il resta dans sa chaire jusqu'à
sa mise à la retraite en 1876. Il mourut en février 1881.
« Il était, pal' sa femme, apparenté à Victor Hugo, e. t
jusqu'à sa mort, il conserva avec le grand poète les relations
les plus intimes .
« Son fils (Louis Koch) fut comme lui professeur d'alle­
mand; il prit sa retraite étant dans un grand lycée de Paris
(Saint-Louis ou Louis Le Grand ). Il allait souvent visiter
Victor Hugo. Le grand poète l'aimait beaucoup et l'accueillait

certain nombre de meubles précieux, d'autographes et de
dessins faits pal' lui. (20.000 leltres environ tant du sculpteur
Pradier que celles de Julielte à sa fille Claire Pradier et les
réponses de celle-ci).
« Lorsqu'il s'agit d'organiser un musée de souvenirs dans
l'ancien logem ent habité pal' Victor Hugo dans sa jeu liesse,
place des Vosges, autrefois place lI.oyaJe, Louis Koch s'y
employa avec un dévouement touchant. C'est pourquoi on ne
fit que lui rendre justice en le nommant conservateur du

nou veau m usee 1).
L'auteur se trompe en parlant de parenté, de cousinage des
Koch et de Viclor Hugo. La liaison ùe Julielte avec le poète
continue après la mort de Madame Hugo. entrecoupée
d'infidélités mulLiples, mais ne se résoud pas par leur mariage.
Et l'une de ces infidélités ayanl été découverte par Juliette,
celle- ci vient se réfugier à Brest ( [873 ) chez Louis Koch et
c;est grâce à son concours qu'elle revint encore une fois à
Hugo. Juliette mourut en 1883, d'un cancer, après cinquante
ans de liaison avec le grand poète. Son acte de décès comporte
la signature d'un Koch.
« Juliette-Joséphine Gauvain, dite J ulietle Drouet, fille de
Julien Gauvain et de Marie Marchandet, son épouse, née à

Fougères en 1806, morte à Paris, 50, avenue Victor Hugo,
(XVIe), le 1 mai 1883. Décès déclaré par MM. L. Trébuchet,
Poirson et [(och à la mairie du XVIe arrondissement ».
Je ne sais ce qu'est devenue Marie-Louise, dont mon grand­
parent Le Cail! était le parrain.
Saint-Renan avant 1830 et depuis longtemps était le cher­
lieu d'un quartier général; les vivres militaires y avaient des
fours et de grands magasins. Plusieurs milliers de soldats
séjournaient dans le pays dont l'importance militaire et
maritime était considérable, C'est ce qui expliquerait la
présence ici de Louis Koch et celle de Renée Gauvain, venue

En compulsant les archives de Plouzané, j'ai découvert un
François Cauvin, gendarme à la brigade de Saint-Renan pen­
dant la Révolution (an II), etaux archives de Ploumoguer une
correspondance adressée à M. Drouet, capitaine au Conquet,
chargé des batteries de côtes du secteur Plou moguer-Plouarzel
(mai 1808). Sans certifier de parenté, on ne peut manquer de
rapprocher les noms, les dates et les lieux. On tl'Ouve encore
un Dl'Ouet en l'an III, mais dans le sectel1l' militaire de
Quimper. (Général Bonté. Archives du Grégo, par Du Hal­
gouët, p. l,o) (1).
M. Charles Chassé a consacré à Victor Hugo en Bretagne
un article de la Dépêche de Brest du II avril 1923. Il écrit:
« Parmi les rares excursionnistes qui visitent Saint-Henan
d'un Œil distrait. combien en est-il qui se doutent que cette
bourgade a joué un rôle considérable dans la vie passion­ nelle de Victor Hugo et que le rappel seul de ce nom suffisait
à le faire frémir, car il évoquait pour lui les heures les plus
douloureuses de son amour pour Juliette Drouet ~
« Pendant les cinquante années d'amour qu'il consacra à
l'inspiratrice de la Trislesse d'Olympia, c'est toujours, en
effet. d'une retraite à Saint-Renan qu'elle le menaçait chaque
fois qu'une scène de jalousie éclatait entre eux. Même en
1873, alors que le poète avait 7 [ ans, elle dut encore simuler
un départ pour Saint-Renan afin d'arracher à des amours
ancillaires l'infatigable vieill ard .
(( Entre ces deux noms symboliques: Brest et Saint-Henan
oscille la vie amoureuse de Victor Hugo pendant cinquante

annees ll.
Charles Chassé exagère, à moins que les références qu'il
possède pour appuyer ses lignes ne soient ignorées de moi
malgré mes recherches. J'ai, en tous en cas, apporté les
(i) L'érudit historien de Fougères, M. Etienne Aub:'ée, dit «Jean­
Baptiste Drouet, sarde général des e~uJ(: et forêts»,
preuves qu'en 1840 Louis Koch et Henée Gauvain n'étaient
plus habitants de Saint-Henan. Disons donc simplement que

Saint-Renan a joué un rôle dans la vie amoureuse de Victor
Hugo, qu'aucun document actuel ne me permet de croire
que le grand poète ait passé ici quelques jours ni même quel­
ques heures. Et c'est bien dommage pour notre petit orgueil

local et aussi probablement pour la poésie, car le caractère
artistique de notre ville en 1834 avec ses vieilles halles
encadrées de logis seigneu dau x et le pittoresque de ses rues
n'eussent pas manqué d'inspirer Victor Hugo.
D' L. DUJAHDIN .

DEUXIEME PARTIE

Tab.le des mémoires publiés en 1935
L Comment les cacquins, cordiers et tonneliers
de Quillimérien en Plouzané obtinrent, en
170:1, le droit aux honneurs, charges, privi­
leges, sépultures dans l'église paroissiale et

Ill.
autres prérogatives, par 1. DUJARDIN. . . .
Le mouvement de la population dans le dépar­
tement du Finistère au cours de la période
1831-19:10 et depuis la fin de cette période,
par G. CALLON. . . . . . . . . . . . . .
Notes sur quelques mégalithes non encore
s, ignalés de la région de Ploudalmézeau
(Finistère), par Louis L' HOSTIS (planche hors-
texte). . ' . . . . . . . . . . . . . . . .
lV. La Tour d'Auvergne, amateur de chansons
pAGES

bretonnes, par J. SA VINA. . . . . . . .. 56
V. A propos de Sainl-Renan et des amOurs de
Victor Hugo, par L. DUJAUDlN . . . . .' 64
VI. Deux magistrats brelons du xvnr

siècle:
Germain-Gabriel Ruinet du Tailly (1726-1805)
et Jean-Marie Ruinet du Tailly (1760-1793),
par A. DURAND. . . . . . . . . . . " 75
VII. Un épisode ignoré de l'histoire de La Fonte-
nelle, par L. LE GumlNEc . . . . . . . .. 103
VllI. Les poteries de Lan veur en Lannilis (Finistère),
par M.-B. ClIEVALLlER-KERVERN. . . . .. 115

QUIMPER - IMPRIMERIE Mm. BARGAIN