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Bulletin SAF 1928


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Trois bretonnes à la maison de Saint-Cyr

J. Daniel

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1928 tome 55 - Pages 42 à 47

rOIS retonnes

a la

maIson
aint~C p

On sait que l'é~ablissement de Saint-Cyr fut fondé de
1684 à 1 686 par Mm. de Maintenon pour l'éducation des
demoiselles nobles sans fortune.
Le sou venir des misères et des difficultés de LouLe sorte
qu'elle avait rencontrées dans sa jeunesse lui avait fait ·
concevoir le dessein d'épargner aux jeunes filles pauvres
ce 'dont e lle a v ail elle-même souffert. Elle fit partager ses

vues au roi , alors fort préoccupé lui-même de l'état de la
noblesse qui se plaignait d'être sacrifiée.
Les élèves de Saint-Cyr étaient au nombre de 250,
toutes boursières. Le roi seul nommait aux bourses'après

une enquête très sérieuse sur la situation des familles.
Les jeunes filles admises de Î à 10 ans étaient entre­
tenues de toutes choses jusqu'à l'âge de 20 ans et une
dot leur était constituée à la sortie pour entrer soit en
ménage, soit au couvent.
Les familles qui désiraient faire admettre leurs enfants
à Saint-Cyr, recevaient un mémoire manuscrit indiquanL
les conditions d'admission.
Nous donnons ci-après des extraits du mémoire qui fut
adressé à la fa mille de Goulhezre, de Crozon, dont un
membre était officier de la Marine Royale:
Mémoire pour servir aux personnes qui désireront obtenir
des places pour des demoiselles dans la maison royale
de Saint-Louis à Saint-Cyr-Ies-Versailles.
« Par les lettres patentes de fondation de ladite maison,

nation et entière disposition de 250 places de demoiselles, qui
doivent être élevées en ladite maison, ponr en disposer en fa­
veur des filles nobles, et principalement de celles qui seront

issues de gentilshommes qui auront servi dans les troupes.

« Aucune demoiselle, suivant lesdites lettres, ne pourra
être pourvue de l'une deces places, si elle n'est âgée au moins
de 7 ans. Celles qui en auront plus de 12 ne pourront entrer,
encore que la grâce eut été accordée avant ' les douze ans
accomplis.
« Il faut, aux termes des mêmes lettres. que la demoiselle
qui sera présentée soit en état de justifier une possession de
noblesse au moins de 140 ans consécutifs.
« Les parents ou amis des demoiselles qui demanderont
une place, présenteront un placet au Roy contenant le nom
de celle pour laquelle ils postuleront, celui de ses père et \
mére, son âge, le lieu de sa naissance et les emplois que son
père ou autres parents ont ou ont eu dans les armées de sa
Majesté. Il contiendra aussi le nom et l'adresse des per­
sonnes qui la présenteront.
« Ceux qui ne seront pas en état de vellir, ou qui n'auront
personne à la Cour, pourront remettre leurs placets à mes­
sieurs les Intendants des provinces pour les envoyer à mon­
sieur le duc de Noailles. lequel, comme directeur du
Temporel de la maison de Saint-Louis, a le registre des
placets qui sont présentés au Roy. .
« Après qu'il aura plu à Sa Majesté ordonner qu'une
demoiselle sera admise, les parents ou amis qui auront pré­
senté les placets en seront informés SUL' le champ et Mm. la
Supérieure donnera les ordres nécessaires pour faire tra­
vailler à l'examen des preuves de noblesse.
«. .. Les parents ou amis de la demoiselle remettron t ou
envoyeront les titres de noblesse entre les mains de
M. d'Hozier, conseiller du Roy, généalogiste de Sa Majesté,
juge général des armes et blasons et garde de l'armorial
général de France, nommé à cet effet par les dames de la­
dite Maison Royale de Saint-Louis. Il demeure à Paris, rue
Saint-Avoye, vis à vis la rue de Braque,

« Les pièces qui doivent êlre reprèsentées pour établir les
preuves de noblesse sont les contrats de mariage du père,
de l'ayeul, du bisayeul et trisayeul, et autres ascendants en
ligne directe masculine en remontant jusqu'aux cent-qua:­
rante ans au moins ...
« Il faudra aussi rapporter des extraits des rôles des
tailles de la paroisse où les père et mère de la demoiselle ou
ses ayeuls ont fait leur résidence depuis 30 ans, et s'ils ont
demeuré dans des lieux taillables ou sujets à d'autres impo­
sitions ou charges sur les roturiers, les dits extraits des
rôles contenant que lesdits père, mère ou ayeuls ont tou­
jours été employés au chapitre des exempts comme nobles.
« Il faudra encore jOindre l'extrait de baptême de la
dèmoiselle dùment expédié par le greffier conservateur des
registres, s'il y en a un, sinon par le curé de la paroisse,
lequel extrait contiendra nécessairement le jour qu'elle est

nee.
«, Il faudra aussi rapporter un certificat de l'évêque diocé­
sain ou en cas de vacance et absence du vicaire général qui
fera men tion de l'absence ou de la vacance, lequel certificat
contiendra attestation que la demoiselle est pauvre et que
ses père et mère n'ont pas de biens suffisants pour l'éle­
ver selon sa condition.
« .. Tous les titres et pièces servant à établir la noblesse
telle qu'eile est requise pour èlre reçue dans la maison
seront rapportés en bonne forme, savoir: les actes pas Rés
devant notaire, par expédition signée des notaires qui en
auront la minute, les copies collationnées n'étant pas suf­
fisantes.
« .. , Les litres ayant été examinés et vérifiés, le généalo­
giste en dresse son procès-verbal et en délivrera son certi­
ficat. La dépense de ces examen et certificat et celle du
procès-verbal contenant l'arbre généalogique dont sera ci­
après parlé se payenL par la maison de Saint-Louis.
« La demoiselle sera ensuite présentée pour être examinée
par ordre de Mme la Supérieure, pour connaHre si elle est

mité ou maladie habituelle qui puisse l'empêcher d'être
reçue.
« Et si, sur le rapport qui sera fait du tout au Roy par
monsieur le Duc de Noailles, en qualité de directeur tempo-

rel, Sa Majesté juge que la demoiselle a les qualités requises,
elle ordonnera que le brevet de Don de l'une de ces places
soit expédié. .
« Après le brevet expédié, la demoiselle entrera dans
ladite maison pour y être élevée jusqu'à l'âge de 20 ans ac­
complis de la manière et en conformité desdites lettres de
fondation.

« Le procès-verbal contenant l'arbre généalogique avec
les preuves de noblesse sera inscrit dans un registre qui
sera gardé dans les archives de la maison.
« Ceux qui auront demandé des places sont exhortés de
faire attention à ce qui est dit ci-dessus au sujet de la per-

sonne de la demoiselle qu'ils présenteront: parce que s'il

arrivait qu'elle ne fùt pas tro.uvée être en l'état qui y est
marqué, quand d'ailleurs elle aurait toutes les autres qualités
requises, elle serait renvoyée, et toutes les démarches, frais
et voyages que l'on aurait pu faire jusqu'alors deviendraient
inutiles.
« L'on avertit aussi ceux qui ne seraient pas en état de
prouver la possession de cent quarante années consécutives

de noblesse de la manière et par les pièces ci-dessus énon-
cées, qu'ils ne se donnent pas la peine de présenter des pla­
cets pour être admis aux preuves, parce que cela ne leur
servirait de rien.
« Les parents des demoiselles qui voudront les voir pour­
ront y venir seulement dans les huit jours des octaves des
quatre fêtes annuelles, savoir: Pâques, Pentecôte, la Tous­
saint et Noël, à commencer le lendemain de chacune de ces
fêtes ,». '
Trois demoiselles de la famille de Goulhezre, origi­
naires de Crozon, furent présentées pour être admises
dans la maison de SainL-Louis; pour chacune d'elles il fut

constitué un dossier établissant les Litres de noblesse

reqUIse.
M. D'Hozier vérifia ces titres, dressa pour chacune
des demoiselles un procès-verbal contenanL l'arbre généa­
logique, et en déli vra un certificat attestant que leurs
preuves de noblesse remonLaient à l'année 1540. .
Toutes trois furent donc reçues dans la communauté,

saVOIr:
Milo Marie-Jeanne de Goulhezre, de Brest, admise en
170~, à l'âge de dix ans, quitta la maison de Saint-Louis
en lÎ 13 et une dot fut constituée à son profit le 27 juillet
1715 ;
Mlle Perrine de Goulhezre deRulan, de Crozon, admise
en 1704, en sortit en 1713, également avec une dot;
MIle Anne-None de Goulhezre de l'Isle, fille œun offi­
cier de vaisseau, de Crozon, fut admise en 1706 ; elle en

sortit en 1714 et le contrat de constitution de sa dot fut
.passé le 27 juillet 1715.
Ci-après copie du brevet de lieutenant de vaisseau de
Corentin de Goulhezre, père de cette dernière.
Brevet de lieutenant de vaisseau pour le Sr de L'Isle Goulhe· zre

(Original sur velin)
Aujourd'buy premier du mois de janvier mil six cent­
quatre-vingt-douze, le Roy, estant à Versailles, voulant com­
mettre des personnes capables et expérimentées au fait de la
guerre et de la navigation pour faire les fonctions de lieute­
nant sur les vaisseaux de guerre, et sacbant que le Sr de
L'Isle Goulbezre a les qualités nécessaires pour s'en bien ac­
quitter, Sa Majesté l'a retenu et ordonné, r.etient et ordonne
lieutenant de l'un des dits vaisseaux. Pour ladite cbarge
exercer, en jouir et user aux bonneurs, autorités. prérogati­
ves et droits y appartenant el aux appointements qui luy
seront ordonnés par les Etats et Ordonnances qui seront

expédiés à cet effet, Je tout sous J'autorité de M. le Comte
de 'l'oulouse, admirai de France et de::; vieadmiraux, lieute­
nan rs généraux, chefs d'escadre el capitaines de vaisseaux,
auxquels elle mande, et à tous autres officiers de marine
qu'il appartiendra, de reconnaîLre el faire reconnaître le
dit Sr de L'Isle Goulhezre en lad. qualité de lieutenant de
vaï'sseau et choses concernant lad. charge. Et pour lémoi­
gner de sa volonté, Sa Ma.iesté m'a commandé de lui expé­
dier le présent brevet qu'elle a voulu signer de sa main
el eslre contresigné par moy, conseiller secrétaire d'Estat
et de ses commandemell ts et finan ces.
Signé : LOUIS .

Contresigné : PHELYPEA U X.
Au verso: Enregistré au Contrôle Général de la Marine
par nous, cOnseiller du Roy, contrôleur général de la Marine
et des . Galères et des fortifications et réparations des places
maritimes.
A Paris, le cinquième mars mil six cent-quatre-vingt-douze .
. Signé : PERROTIN.
J. DANIEL.

119 -

DEUXIEME PARTIE
Table des Mémoires publiés en 1928
PAGES.
1. Matériaux pour la bibliugraphie de l'histoire de
la H.évolution dans le département du Finistère
par D. BERNARD. . . . . . . . . . . . .. 3
II. La légende du marquis de Guenand et la famille
Du Parc de Locmaria par L. LE GUENNEC . .. 15
Ill. Lettres de service du lieu tenan t-géI1éral marquis
de Locmaria par L. LE GUENNEC . . . . . .. 36
IV. Trois bretonnes à la maison de Saint-C)'r par
J. DANIEL. . . . . . . . . . . . . . . .. 42
V. Matériaux pour la bibliographie de l'histoire de
la Révolution (suite) par D. BERNARD. . . .. 48
VI. Au sujet d'une chapelle dans l'église paroissiale
de Crozon par J. DANIEL. . . . . . . .. . 68
VII. Notes sur des cachettes de prêtres assermentés à
Saint- Martin-des-Champs (près Morlaix) par
L. PÉRON .....

VIII. Notes sur quelques orfèvres bas-bretons
L. LE GUENNEC. . . . . . . . . . . . .

par

IX. Deux billets à Kerguélen par Auguste Dupouy ..
X. A propos d'une clef de voûte aux armes de la

maison de Trébéron par R. ANTHONY. . . .
XI. Marques et signes sur des pierres tombales à

. Penmarc'h par L. LE GUEN NEC. . . . . .. 100
XII. Curieuses signatures relevées ~ur les registres
. de baptêmes de Tréoultré-Penmarc'h par l'abbé
J. TOULElIiONT . . . . . . . . . . . . . .. 107
XIII. De quelques points intéressants de nos côtes
(Dinan, Lostmarc'h et Lesteven en Crozon) par
A. JARNO. . . . . . . . . . " lOg