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Bulletin SAF 1925


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Liste des juridictions exercées au XVIIè et au XVIIIè siècles dans le ressort du présidial de Quimper (suite). Sénéchaussée de Morlaix et de Lanmeur

H. Borde de La Rogerie

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1925 tome 52 - Pages 13 à 34

LISTE
D ES

JURIDICTIONS EXERCÉES ; AU XVIIe ET AU XVIIIe. SIECLES

DANS LE RESSORT

DU PRÉSIDIAL DE QUIMPER
(suite)

Sénéchaussée de ~Iorlaix et de Lanmeur (1)

1 .1 8 . Les deux SÉNÉCHAUSS ÉES DE MO RLAIX ET DE LA N-
ME U R 'furent réunies en 1755 et ne formèrent plus qu'un siml
ressort judiciaire jusqu'à la Révolution. Un premier essai de
réunion avait été fait au XVIe siècle ; des lettres patentes données

(t ) Les premiers chapitres de cette liste ont été publiés de t9tO à i9i4
dans les lomes XXXVII, XXXVIII et XLI du Bulletin de la So ciété archéolo­
gique du Finlstère. Il n'est sans doute pas inutile de rappeler l'objet etle
plan du travail que les circonstances nous ont forcé d'interrompre pen­
dant plusieurs années , Désirant faire connaître l'organisation judiciaire de
la région qui formait le ressort du présidial de Quimper, (correspondant'au
département du Finistère, moins t9 communes, à 21 communes des CÔ tes­ du-Nord et à 6 du Morbihan), nous énumérons et décri vons très som­
mairement les juridictions ordinaires royales et seigneuriales (ire partie
de la liste) et les juridictions extraordinaires ou d'altribution (2- partie).
La notice sur le Présidial' (N ° i, tome XXXVII, année i 9tO) est suivie
n e chapitres citant les juridictions qui étaient exercées aux xvn

et xvm

siècles dans chacune des neuf sénéchaussées relevant dn Présidial :. les
s&net;haussées de Brest et Saint-Renan (N°' 2 à i2), Carhaix (i3 à 42),
Châteaulin (43 à 61). Châteauneuf. Huelgoat et Landeleau (62 à 69); Con­
carneau , Fouesnant et Rosporden (70 à 80

') , Gourin (81 à 91 ), Lesneven
(92 à H7 ), M orlaix et Lanmeur (H8 à :1.4,4), Quimper (1.45 et suivant).
La liste est nressée à l'aide d'états fourni s aux intendants par lesmagis­

à Troyes le 29 mars 1564 supprimèrent quelques unes des
barres ou sénéchaussées royales de Bretagne, jugées trop
nombreuses. Lanmeur fut un des tribunaux sacrifiés; d'autres

sièges furent condamnés au mois d'octobre 1565 par l'édit de
Châteaubriant qui ne conserva, dan s le ressort du présidial
de Quimper, que les sénéchaussées de Carhaix, Lesneven,
Morlaix et Quimper; mais les habitants , les États, le Par­
lement même, protestèrent contre ces suppressions qui ren­
daient les tribunaux moins facilement accessibles aux justi­ ciables. Brest et Saint-Renan furent rétablis en mai 1574 ;
Conq, Fouesnant et Rosporden en mai 1575; Lanmeur, Châ­
teaulin, Châteauneuf, Gourin et huit sièges compris sous
d'au tres présidiaux en janvier 1576 (1). Lanmeur ne recouvra
toutefois qu'une existence précaire. Souvent les mêmes ma­
gistrats siègeaient dans les deux tribunaux: en 1539, Pierre
Le Cozic était sénéchal de Morlaix et de Lanm eur (2) ; en 1550,
Jehan de Kergariou, docteur de Toulou se, et Raoul de la
Forêt de Kerbastiou furent nommés l'un sénéchal, l'autre
procureur du Roi dans les deux sièges (3) qui paraissent n'en

former qu'un seul dans des actes de 156:1 (l) ) . On constate la
même union de fait après le rétablissemen t de 1576.
Les magistrats siègeaient alternativement dan s les deux
localités; on les vit même fuir Morlaix en temps d'épidémie
et tenir dans leur auditoire de Lanmeur les audiences spéciales

ter et de rectifier ces rlocuments, assez médiocres, en consultant les
dossiers des anciennes juridictions (arch. du ~'inis lère , serie B), les débris
des titres de la commission de réformation des justices et la correspon­
dance des intenda nts de Bretagne (arch. d'lIle-et-Vilaine, séries B et C)
et les papiers des familles conservées aux archives du Finistère, des
COtes-au-Nord et de l'Ille-et-Vilaine.
(i ) Arch. d'Ille-et-Vilaine; Parlement. 6

Rég. d'Eregistrement, fo 99.
- Cf. Etats de Bretagne, C. 26iJ,O, 2M:2.
(2) Et en outre de Lannion (Procès-verbal de la Coutume de Bretagne) .
(3) Notes de Hené Ballavesne écrites il la suite d'une copie de la
Réformation du domaine de Morlaix (Arch. Finistère, A. t8 1 .

aux causes morlaisiennes . Si Lanmeur etait menacé, on
transportait les audiences à Saint-Jean-du-Doigt (1).
La sénéchaussée de Lanmeur . subsistait cependant en

théorie: elle avait son sceau particulier (2l. ParfoiS" l'union
personnelle des charges cessait d'exister; Guy Le Borgne,
auteur du célèbre armorial publié en 1666, était aHoué de
Lanmeur; en 1696, il y avait un sénéchal qui habitait la ville
ainsi que cinq procureurs, un avocat, deux .notaires et deu,,"
sergen ts; en 1740, on constatait que plusieurs charges
n'avaient pu trouver d'achetenrs : l'intendant proposait de
réunir le ressort à celui de Lannion (3). Cependant il y avait
encore un sénéchal quand la senéchaussée fut supprimée par
un édit au mois d'avril 1755, enregistré sans difficulté par le
. Parlement le 28 juillet.
Cet acte porte que les charges sont vacantes, ce qui n· 'était
qu'en partie exact, ·et qllela localité n'est pas assez considé­
rable pour que la juridiction puisse être exercée convenable­
ment; les deux sièges son t déclarés unis et il est spécifié que
les appels de l'un et de l'autre devront suivre la même voie;
le siège de Lanmeur, qui appartenait au ressort du présidial de
Rennes, en est donc distrait pour être uni à celui de Quimper .
L'édit donnait une mince 'satisfaction aux habitants de Lan­
meur qui, en perdant leur sénéchaussée, perdaient le dernier
souvenir de l'importance ancienne de la cité: il était ordonné
que, une fois par an, les juges de Morlaix-Lanmeur viendraient
tenir audience dans la ville déchue (4). L'arrêt du Parlement
ordonnant l'exécution de l'édit fut publié le 18 août à
Lanmeur. Les juridictions seigneuriales exercées à Lanmeur
(t ) Audience du 6 octobre i598 (Arch, du Finistère, i85 G. 2). .
(2) Un sceau-matrice du XVIIe siècle est conservé' au musée archéolo­
gique de Nantes (vitrine 65, nO 35) ; il porte l'écu de France accosté dl'
deux mouchetures d'hermine.
(3) Arch. d'Ille-et-Vilaine, C. 1.827, i835.
(4) Arch. Finistère, B. i677.

se transportèrent à . Morlaix; l'auditoire, qui n'était plus
entretenu, fut aff~agé à Claude CoUinet de Goazallain en vertu
d'un arrêt du. conseil du 7 août 1787 ( 1). .
. Les procès soumis à la Sénéchaussée de Morlaix-Lanmeur
. ~taient nom breux et i m portan ts, car le greffe était loué en 1762,
3 130 livres, chiITre plus élevé que ceux obtenu s dans la plu­
part des sénéchaussées: Gourin, 1200 L, Châteauneuf 1625,
Quimperlé 1900, Concarneau 2700, Châtea ulin 2750 (2). Ce
gre' ITe paraît avoir été aussi mal tenu que . celui du Consulat
dont l'histoirien Da.um esnil déplore le désordre ; la sénéchaus­
sée n'est représentée aux Archives du Finistère que· par. des

dossiers peu anciens et moins importants que ceux des autres
sièges royaux .de la région (3 ). Les magistrats ne furent pas

toujours exempts de reproche : on regrettait en l606 que le
bailli Barnard Le Bihan eût encouru dans sa jeunesse une con­
damnation à mort pourmellrtre et qu'il fût sous le coup de
poursuites criminelles pour concussion (4). En 1632 , le Par­
lemen. t fut inFo rmé que Yves Richard, greffier de la Cour royale
et sénéchal de Pensez et de Daoudour, avai t été jadis condamné
pour faux par la Cour des Aides de Paris (5). A la même épo­
q ue, le procureur du Roi Amaury Jascob de Pellan, avait des
relations suspectes avec l'énigma tique baro n de Beausoleil (6 ,
(i l Arch. d' llle-et-Vilai ne. C. 1.96,2.
(2) Arch. d'Hle-et-Vilaine, c. 5057, 5210,5211., 5216,.
(3) Un état so mmaire de ce fond, comprena:!l25 registres et H21iasses
se trouve rlans le Rapport présente en i890 au conseil général du Finistère '
par l'archiviste Luze!: . .
(6,) Arch. d'Ille-et- Vilai ne; Parlement, Registres secrets, audience du
23 méirs 1.606. - Carré, (,e Parlement de Bretagne après la Ligue,
Paris, t888, ~o, p. 66-67. .

(5) Arch. d'lIle-et-Vilaine, Parlement: aLiministration de la Proviuce
(cote provisoire). . .

(6) V,e df' Villiers du Terrage. Les recherches de , l'or dans le Finistère
(Bull. de la Soc. archeol. du Finistère, tome xxx, 19U3). A. D escoqs.
La Bretagne 1ninière et les prespections du baron' et de la baronne de
Beausoleil (Bull. Soc. géologique de Bretagne, t. 1. 1920, p. 227 -240) .

et réussissait à soustraire au grand prévôt de la province
les papiers concernant les opérations du baron" qui appro­
chaient plus de la fausse monnaie que de la qualité qu'il

(Beausoleil) prend de prince étranger, général des mines de
France" (1). En 177')"le Sénéchal évaluait sa charge 40.000 L,
le bailli 4.000, le lieutenant 3 .000, le procureur du Roi 8.000 ('),).
L'auditoire de la sénéchaussée situé ·sur la place des halles
était un édifice médiocre; il confinait à la prison qui était un
objet de scandale. Dans une ancienne tour que baignait la
ri vière, une salle commune abritait les détenus des deux sexes ';
pendant quelque vingt ans les autorités religieuses, adminis­
tratives et judiciaires échangèrent des doléances sur cet éta't
de choses et étudièrent les moyens d'y remédier. Les difficultés
financières firent longtemps ajourner l'exécution d'un projet
de reconstruction: les travaux furent cependant commencés
vers 1783 (3). La prison était à peine achevée lorsq u'éclata la

,Révolution; plusieurs magistrats furent parmi ses premiers

hôtes.
L'auditoire servait à la sénéchaussée, à l'amirauté et au
siège des traites, Plusieurs juridictions seigneuriales y tenaient
aussi leurs audiences: Bodister, Kerohan, Crechonvel, Kerga­
riou-Coatgral et Coatanscour (4), Après l'union du ressort de
Lanmeur, d'autres tribunaux vinrent siéger dans le même
local : le Ponthou, l'Armorique-Kerantour et Rosampou1.
Des arrêts du Parlement autorisèrent le même déplacement
pour les justices de Plougasnou (1759) et de Coetcoazer (1 769 ) :
(i) Arch. d'Ille-el-Vilaine, Parlement, police de la Province j procès­
verbaux des i2 el Hi novembre 1631 j le Parlement ne parait pas avoir
donné suite à la plainte du grand Prévôt contre le Procureur du Roi.
(2) Arch. du Finistère, B, Morlaix. Liasse iO B : déclarations faites
en exécution de l'édit de février i77 1.

(3) Arch. d'Ille-et-Vilaine, c. H3, :1.26, (plan de l'auditoire et de la
tour-prison dressé en :1.778).

l'opposition des justiciables fit rapporler ces décisions en
178:l (1). .
Il est impossible de donner la liste certaine des paroisses
dans (2) lesquelles s'étendait l'autorité de la cour royale . En
ce qui concerne l'ancien siège de Lanmeur, les documents
,s'accordent pour nommer -Lanmeur, et sa trève de Locquirec,
Guimaëc, Plou ézoch , Plougasnou et Saint-Jean-du-Doigt,
Plouégat-Guerrand et une grande partie de Garlan. Les parois­
ses suivantes appartenaient sans contestation à la cour de
Morlaix: les trois paroisses de la ville, moins le faubourg de
la Villeneuve qui dépendait de la juridiction de Pensez et de
la sénéchaussée de Lesneven, Plougonven et ses trèves de
Lannéanou et de Saint-Eutrope, Plourin et sa trève du Cloître,
Ploujean, Plounérin, Plouigneau,lePonthou, Plouégat-Moysan

et une petite partie de Garlan. Des documents ajoutent Plou-
miliau et les trèves de Keraudy et de Locquémeau, Saint­
Michel-en-Grève, Plouzelambre, Guerlesquin, Botsorhel,
Trédrez ; mais ces dernières paroisses étaient contestées entre
les juridictions de Morlaix, de Lannion et de Guingamp. Le
Dictionnaire de Bretagne d'Ogée, généralement exact en ce

qui concerne le ressort des sénéchaussées 3), place Botsorhel,
Plestin, Ploumiliau et Plouaret dans le ressort de Morlaix,
mais il attribue à Lannion Saint-Michel-en-Grève. Trédrez et
Guerlesquin. Un état fourni en 1760 à la commission des

(i) Arch. d'Ille-et-Vilaine. Parlement: pièces du procès des paroissiens
de Lanm~ur et de Guimaëc, contre Anne Bernier, épouse Michel; dame
de Coatcoazer.
(2) Nous rappelons que le territoire de quantité de paroisses était par­
tagé entre deux et même trois sénéchaussées; on dis~it qu'une paroisse
appartenait à telle sénéchaussée lorsque l'église se trouvait dans le ressorl
de cette cour. '
(3) C'est prohablement d'après Ogée que J. Trévédy a écrit à tort
(Organisa~ion judiciaire de la Bretagne) que Plestin et Plouaret appar­
tenaient au ressort du présidial de Quimper; il met Plouzelambre dans

domaines des Etats de Bretc lgne laisse Botsorhel à la séné­
chaussée de Morlaix, mais comprend Plestin, Plouaret et
Guerlesquin dans le ressort de Lannion. Cette incertitude sur
la limite des sénéchaussées avait probablement des origines
très anciennes et remontait peut-être aux lettres du Duc de
Bretagne du 8 juin 1425 transférant de la châtellenie de Guin­
gamp à celle de Morlaix les causes des vassaux de Jean de
Penhoet. amiral de Bretagne, résidant dans les paroisses de
Guerlesquin, Botsorhel. Plounét'in, Plougras et Plestin (1).
Il serait sans utilité d'énumérer les actes qui donnent des
renseignements contradictoires ou discordants: montres des
nobles au XVI" siècle, réformation du domaine au XVIIe siècle,

chiffrature et dépôt des registres d'état-civil au XVIII· siècle,
etc. Les textes les plus nombreux et les plus probants placent
Saint-Michel-en-Grève et Plouzelambre, ou du moins l'église,
chef-lieu de ces paroisses, dans le ressort de Morlaix, Trédrez,
Ploumiliau, Plestin et Trémel dans celui de Lannion et
enfin Botsorhel et Guerlesquin dans celui de Guingamp
(sénéchaussée de Rennes). Dans toutes ces paroisses, les trois
sièges avaient peu de ressort direct; aussi l'incertitude ne
présentait-elle pas de grands inconvénients. Pour la faire ces­
ser, on n'entreprit pas de remonter aux origines, c'est-à-dire
de dresser la liste des paroisses comprises dans les châtellenies
de Morlaix et de Lannion à l'époque de la réunion au domaine .
ducal. Les paroisses restèrent litigieuses jusqu'à la Révolution.
En 1789, lors des opérations préparatoires à la réunion des
Etats généraux, l'intendant de Bretagne prit le parti de convo­
quer à la fois à Morlaix et à Rennes les habitants de Saint­
Michel-en-Grève, Plouzelambre, Plougonven, Garlan, Plou­
milliau, Plounérin; et Plouégat-Moysan qui firent défaut à.
Rennes et comparurent à Morlaix, et ceux de Botsorhel et de
Guerlesquin qui firent défaut à Morlaix et se présentèrent à

(i) Dom Mariee, Preuves, T. II, vol. H74.

Rennes (1). Les circulaires de l'intendance avaient été lancées
un peu au hasard: la convocation à Rennes de Garlan et de
Plougonven était injustifiable; les habitants des paroisses
vraiment incertaines ou litigieuses comme Saint-Michel-en­
Grève, Botsorhel, Guerlesquin, Ploumiliau, choisirent la séné­
chaussée qui leur convenait.
D'après les rapports fournis il l'intendance en 17 17 et en
1768 par les subdélégués de Morlaix (2) le ressort direct de la
sénéchaussée comprenait la totalité des paroisses de Morlaix
(moins la Villeneuve). quatorze villages de Plougonven, trois
de Garlan, quatre de Plourin, un de Guerlesquin, six de
Ploujean, deux de Plounérin, toute la paroisse de Lanmeur,
trois maisons de Botsorhel, une partie de Guimaëc et de
Plouézoch. A Morlaix, l'importance de la cour royale était
diminuée par l'existence de la juridiction municipale de police,
du consulat et (au XVIIl' siècle) de l'amirauté.
Il est particulièrement difficile d'établir la liste des nom-

breuses juridictions seigneuriales exercees au XVIIe et XVIIIe
siècle dans le ressort de Morlaix-Lanmeur: ces juridictions
dépendaient de seigneuries dont la consistance fut parfois
modifiée (voir infra n O ' 119, 121, 133, 139 etc. ) ; plusieurs
d'entre elles portaient des noms qui prêtent à la confusion:
Kergariou et Kergariou-Coatgrall, Keralliou) Kergallon et
Kergallou, Kerhuel et Keruel, etc. Celles qui se trouvaient
dans les paroisses litigieuses étaient elles- mêmes contestées
entre les sénéchaussées limitrophes; les propriétaires de justice
(i) Rennes était la juridiction supérieure de Guingamp et le lieu de
réunion des députés de toutes les paroisses du ressort. Plestin lut convo-
_ qué à Lannion et à Rennes: il opta pour Lannion. Le cahier de doléances
de Guerlesquin n'a pas été retrouvé par MM. H. Sée et A. Lesort, qui
ont publié. le cahier de Botsorhel dans Cahiers de doléances de la séné­
chaussée de Rennes pour les Etats-généraux de 1789, Rennes, 19B, in-8°,
T. IV, p. 224-226.
(2) Arch. d'Ille-et-Vilaine, C . .18:1.9, 3479.

modifiaient à leur gré l'organisation judiciaire, érigeant
des tribunaux nouveaux (nOs 135 et 142) ou réunissant au
ressort judiciaire des fiefs nouvellement acquis qui ne faisaient
pas partie de la seignellrie primitive (n° 126). En 1665, les
magistrats interrogés par Charles Colbert qualifièrent
" prétendues" ou " usurpées " presque toutes les juridictions
seigneuriales qu'ils énumérèrent (1). Les usurpations étaient
facilitées par la négligence des juges royaux qui ne paraissent
pas avoir procédé aussi exactement qu'on le faisait dans les
autres sénéchaussées à la réception des magistrats seigneu­
riaux et qui, du moins au XVIII" siècle, n'appelaient pas les
menéants aux plaids généraux. Les listes .données en 1668, en

I7 17 et en 1768 (2) ne son t pas complètes et exactes ; celle

qui suit n'est point sans doute exempte d'erreur, Nous
nommerons d'abord les sièges du ressort primitif de Morlaix
(n O' 119-135), puis ceux de l'ancien ressort de Lanmeur (n O'
136- 144).
119. - Bodister. - Cette haute, moyenne et basse justice,
exercée au xvm

siècle à Morlaix, était la première menéante
de la sénéchaussée. Le ressort comprenait presque tout Ploui­
gneau, la plus grande partie de Plourin et une portion de
Plougonven. Bodister était un des plus anciens fiefs du pays,
mais il était en partie formé au XVIII ' siècle d'arrière-fiefs
autres que ceux qui l'avaient constitué à l'origine (3). Les pro­
priétaires de terres démembrées de la seigneurie primitive pré­
tendaient, comme de coutume, jouir des privilèges de justice '
(i) Bibliothèque nationale, Mss, ~91 des 500 de Colbert, f

89 et sui­
vants.
(2) Arch. d'lile-et-Vilaine, C. i817-1819.
(3) Sur l'histoire de Bodister, voir Arch. du Finistère, serie E, fonds
Desnos des Fossés ; Arch. de la Loire-Inférieure, B. i 787 ; Le Guennec,
Excursion dans la commune de Plourin- Tréguier (Bull. Soc. archéol. du
Finistère, tome XXXI, 1.904, p. 53-54,). .....

qui avaient été reconp.us aux: premiers seigneurs de Bodister ;
cette prétention fut rejetée à l'encontre de M me de Talhouet de
Bonamour, propriétaire des seigneuries de Kerloaguen et de
Gaspern, par la chambre de Réformation du Domaine en 1678
et en 1696 (1 i. D'après le rapport de Charles Colbert, qui ajoute
une partie du territoire de Garlan au ressort de Bodister, cette
haute justice était la juridiction d'appel de six ou sept sièges
secondaires: l'Armorique, Crechonvel, Coatgrall et Kergariou
en Ploujean, Kerohan en Garlan, Goesbriant et Kerviniou en
Plougonven. Au X.VIII

siècle, les mêmes magistrats occupaient
les sièges de Bodister et du Ponthou, mais les deuxj uridictions
n'étaient pas réunies.
120. - Runfao, deuxième menéant de Morlaix:, avait son
ressort dispersé dans 12 paroisses comprises pour la plupart
dans la sénéchaussée de Lannion (2) où se trouvaient la
seigneurie de Runfao (paroïsse de Ploubezre), la potence à
quatre piliers et l'auditoire (Loguivy les Lannion). Le ressort ·

morlaisien comprenait presque toute la paroisse de Ploumi-
liau et une partie de Plouzelambre et de Saint-Michel-en­
Grève. Le rapport de Charles Colbert (1665) porte que Run­
fao recevait les appels de Lanascol (n° 135) et de Kerneyan,
mais ces deux terres étaient presque en entier corpprises dans
la sénéchaussée de Lannion.
121. Trogoff, qui contestait à Guerlesquin (n° 122)

le privilège d'être appelée au 3' rang de la menée des plaids
généraux, était une très ancienne seigneurie; elle conserve

auprès des historiens un prestige particulier à raison des
combats livrés près du château au XIVe siècle et aussi par

(:1.) Arch. Loire-Inférieure, B. i8B.
(2) Arch. d'Ille-et-Vilaine, c. {8i8. Arch. des Côtes-du-Nord. B.

suite de confusion avec deux autres seigneuries du même
nom: Trogoff en Plouescat (sénéchaussée de Lesneven) et
Trogoff en Plu mergat (sénéchaussée d'Auray) fief d'une bran­
che des barons de Lan vaux. La seigneurie située en Plouégat­
Moysan changea souvent de propriétaire (1) et son territoire
fut plusieurs fois augmenté ou diminué, notamment en 1683
(voir n° 133, Rosampoul). Au XVIIIe siècle, elle appartenait
à la famille morlaisienne Allain de la Mare, dont les papiers
partagés entre les archives du Finistère et les archives d'Ille-

et-Vilaine renferment de nombreux renseignements concer­
nant les droits judiciaires. En 17:16, le seignenr recevait 75
livres de redevance annuelle du sénéchal, et :14 livres du

procureur fiscal; les deux charges de notaire et de procureur
n'ayant pu trouve); acheteur étaient données gratuitement;
le greffe loué 72 livres par an de 1695 à 1775 fut affermé
81 livres de 1719 à 1779 (2). Ces chiffres indiquent que la
jnridiction était peu importante et possédait peu de justicia­
bles; c'étaient des habitants de Plouégat-Moysan; en 16:10,
les seigneurs furent autorisés à faire bâtir un auditoire et une
prison au village de Saint-Méen; un nouvel auditoire
établi plus tard au bourg, fut vendu en l'an III et servit
d'école et de maison d'arrêt pendant la Révolution et l'Em- .
pire; il a été démoli vers 1900 (3).
(:1.) Sur les seigneuries et seigneurs de Trogoff, voir entre aulres
ouvrages, V. de Montifault, Notice sur les seigneuries de Trogoff dans
les Evêchés de Tréguier et de Léon (Bull. de la Soc. archéol. du Finis­
tère, T. Il, 1.874, p. 72-93) vte L. Drvoy de Portzamparc, Généa­
logie de la maison de Trogolt [ de Lanvaux] ; extrait de la Revue histo­
rique de l'Ouest, Vannes, t900, in·8°. Documents pour servir à
l'histoire de la maison de Kergorlay, Paris, i92t, in-8° p. XCVI. -
. J.-A. Quiniou, Plouégat-Moysan, Morlaix, 1922, in-i2, p. 20, 29-39.
(2) Arch. du Finistère, E. 39:1., 409. Arch. d'llle-et-Vilaine, E,
fonds de la Boordonnaye-Montluc.
(3) Quinion, Plouégat-Moysa1!-, p. H7.

122.'- GuerlEisquin. - Si le chef-lieu ·· de la paroisse,
c:est-à-dire l'église, était litigieux cntre les sénéchaussées de
Morlaix et de Rennes, la juridiction seigneuriale appartenait
sans contestation depuis l'acte de T425 cité plus haut au
premier de ces sièges (1) ; mais aux XVIIe et XVIIIe siècles la
seigneurie s'étendait aussi dàns le ressort de Limnion pour des
fiefs situés dans les paroisses de Blougras, Loguivy et
Plounérin (2) et même dans le ressort de Carhaix. Le territoire
soümis à J'appel à Morlaix, dont Guerlesquin était la troisième
ou quatrième menée, était compris dans la paroisse de Guer­
lesquin et dans la partie morlaisienne de Plounérin La
châtellenie de Guerlesquin, qui appartenait en 1425 à Jean
. de Penhoet et qui comprenait les fiefs de Charuel, du Ménez
' et de Kerael-Kergariou, différait sensiblement de celle du XVlll

siècle : les magistrats prenaient ' le titre de juges de Guer­
lesquin et annexes : Charuel (Guerlesquin), Ménez (idem),
Bettou et Trogorre (Loguivy-Plougras.) (3). L'ancienne prison
seigneuriale est devenue la mairiè de Guerlesquin; ce curieux
édifice, du commencement du XVIIe siècle, est classé comme

monument historique. '
'. 123. Coatanscour, qui relevait de Bodister d'après le
rapport de 1665, avait pO\lr ressort la trentième partie de la

paroisse de Plourin. C'était peu de chose, car, d'après le
Dictionnaire de Bretagne d'Ogée (1778), Plourin et ses trèves
comptaient 3200 communiants. La haute justice avait donc
(i) Et les appels, dans les" deux cas de l'Edit" allaient au présidial
de Quimper. (Arch. Finistère, B. 597).
(2) Arch. Côtes-du-Nord, B. 463.
(3) D'après le rapport rédigé par le subdélégué en :1.765, Beffou et
Trogorre auraient été deux hautrs justices distinctes ayant leur auditoire
à Gu~rlesquin. Ces deux seigneuries étaient en Loguivy-Plougras, par
conséquent en dehors dElla sénéchaussée j il est possibJe que des audiences
aient été tenues il. Guerlesquin pour les causes intéressant les vassaux

106 justiciables: environ, Le greffe était loué 15 livres en
1749, soit la 14g

partie du revenu net (2207 livres) de la
seigneurie déclaré par le marquis de Coatanscour lors de la
confection des rôles du vingtième (1). I.e soubassement des
poteaux patibulaires subsiste sur le plateau de Goarem ar ­ Justiçou, à 240 mètres d'altitude, dans un site dont la beauté
a frappé tous les auteurs qui ont décrit les environs de
Morlaix.
124. Bruillac était exercé à Plounérin, où s'étendait
son ressort, partagé quant aux appels entre Morlaix et Guin-

gamp. En [665, cette haute justice était, comme beaucoup
d'autres , qualifiée d'usurpée ; elle était peu importante mai ..
subsistait encore en 1787 (2)

, 125. Crec'honvel, qui n'était peut-être qu'une mo-

yenne justice, ressortissait à Bodister et était exercé à Morlaix;
le ressort comprenait une petite partie de Ploujean.

126. Gaspern, moyenne JustlC~ mOlfis lmportante en-
core que Coatanscour, étendait son autorité sur la quarantième
partie de Plougonven, soit soixante'quinze justiciables envi­
ron. Cette seigneurie avait été autrefois plus considérable: la
émIr et juridiction, haute et basse, et le gibet à quatre piliers

sont cités dans un aveu rendu le 3 janvier 1540 à Jehan de
Laval, seigneur de Bodister, par Marc de Carné, curateur de
Adelice de Kerloaguen, dame de Rosampoul et de Gaspern ;
un aveu de 1630 mentionne seulement la juridiction que le
seigneur de Gaspern prétend exercer à Plougonven (3) .

(1) Arch. du Finistère, série C. Subdélégation de Morlaix:.

(2) Arch. Côtes-du-Nord, E. 1566. Arch. Ille-et-Vilaine, C.
389~: Arch. Loire-Inférieure, B. 1796.
(3) Arch. Finistère, E. 633.

127. Kerallioù-Botsorhel, exercée au bourg de Bot-
sorhel, avait ses- justiciables dans cette paroisse. Elle ressor­
tissait au premier degré il. Guerlesquin et au second à Morlaix
ou à Guingamp, car Keralliou s'étendait sur les deux séné­
chaussées. Les dossiers provenant du greffe fOl'ment aux archi­
ves du Finistère un fond assez important (1).
128. Kergariou, formait avec Kervenniou, Kerde-
nis, la Ferté et le Gouarguen une haute justice exercée au
village de la Villeneuve en Plouigneau. En dehors de cette
paroisse, le ressort s'étendait dans celle de Botsorhel, mais
dans la partie qui relevait en appel de Guingamp et du
présidial de Rennes (:. ).
129. Kergariou-Coetgrall, moyenne et basse justice,
était un des sièges les moins importants de la sénéchaussée,
car le ressort ne comprenait qu'une très petite partie de Plou­
jean. En 15:.4, J. de Kergariou avait été autorisé par Fran­
çois Ior à élever un gibet à quatre patibulaires dont on a
retrouvé récemment le soubassement près de la limite de
Ploujean, de Garlan et de Plouigneau (3). En 1765, le subdé­
légué écrivait que cette juridiction n'était plus exercée.
130. Kerohan, exercée en 1766en l'auditoire de Morlaix,
comprenait près' du tiers de la paroisse de Garlan : une par-

(i) Arch. Finistère, E. 959.
(2) Arch. Ille-et-Vilaine, B. Présidial de Rennes: appel en 1789 de Y.
Le Buanic, condamné pour divers crimes par les juridictious, de Kerga­
riou-Botsorhel et de Keralliou-8otsorhel. L'état des juridictions fourni
en 1765 compte pour cinq sièges Kergariou, Kervenniou etc. et pour
quatre Guerlesquin, Ménez, etc. Cet état qui énumèl'e 38 juridictions sei­
gueuriales correspond à la subdélégation de Morlaix dont le territoire était
différent de celui de la sénéchaussée (Arch. Ille-et-Vilaine, 8. 1819).
(3) Le 'Guennec, Notes historiques sur Ploujean. Morlaix, 1908, in 8°,

tie ressortissait nuement de la sénéchaussée; pour d'autres
villages, les appels devaient passer par Bodister. Le greffe
était loué 30 1. en 1716.
131. - Lesmoalch, auquel on ajoute parfois le nom de
Faouet, avait, croyons-nous, une existence intermittente;
l'auditoire et le ressort étaient en Plounérin.
132. Le Ponthou, haute justice exercée en 1554 au
Ponthou (1 ), en 1750 à Morlaix, en 1780 à Guerlesquin éten­
dait son autorité sur toute la paroisse du Ponthou. La seigneu­
rie fut possédée au xvu' et au XVIII" siècle par la même famille
que le Guerrand ; les juridictions furent ordinairement pour­
vues des mêmes juges (2), mais elles ne ·furent pas unies.
133. Rosampoul avait des droits de haute, moyenne et

basse justice établis par des actes particulièrement anciens (3) ;
le fief originaire fut mo.difié au XVIIe siècle par des échan­
ges ou des acquisitions qui l'augmentèrent de portions des
seigneuries de Bodister, du Ponthou, de Crechbos (en Bot­
sorhel) et de Trogofl; des lettres patentes de 1652 et de 1683,
autorisèrent l'annexion de ces terres au ressort judiciaire de
Rosampoul, qui s'étendit en Saint-Eutrope, Plouigneau,
Plourin, Plounérin, Plourin, Botsorhel ; les justiciables
dispersés dans ces six paroisses n'étaient pas nombreux, car
le greffe n'était loué que 60 1. en 1720. L'auditoire était à'
Saint-Eutrope.
(t ) Arch. Finistère, série A : aveu de Jeallne de Maure, mère et tutrice
de Cbarles du Quélennec.
(2) Rapport de Charles Colbert. Arch. Finistère, B. Morlaix, liasse
i08. Arch. Loire-Inférieure, B. i798.

(3) Mandement ducal du 2 Novembre 1.486 en faveur de Jean de Ker­
loaguen. (Arch. Finistère, E. 363
biS

134. Saint-Michel-en-Grève, haute justice exercée à
. Saint-Michel, comprenait presque toute la paroisse de ce nom
et une très petite partie de Tréduder. Elle ne relevait qu'en
partie de Morlaix; pour les fiefs de Tréduder et même pour
ceux d'une partie de Saint-Michel, les appels étaient portés à
Lannion ou à Guingamp ([). L'enchevêtrement judiciaire de
cette région était vraiment extraordinaire: les juridictions de
Coatredes, ou Coatredès-Coatfrec confirmée en 1673 par
arrêt de la chambre royale du Domaine (:J ), et de Keruel-Ker­
bi riou avaient une partie de leur ressort en Saint- Michel-en­
Grève, mais, croyons-nous, dans la partie lannionaise. L'une
et l'autre furent d'abord exercées au bourg de Saint-Michel ·;
l'auditoire de Keruel-Kerbiriou fut plus tard transféré à Lan­
nion ; un pilier aux armes de la seigneurie, marque honorifi­
que plutôt que poteau patibulaire était élevé en face de l'église
de Ploumilliau (3).

135. Nous groupons sous ce numéro sept juridictions
douteuses ou qui ne furent pas exercées d'une façon continue.
D'après le rapport de Charles Colbert (1665 ), les magistrats de
Morlaix avaient réussi à faire disparaître un siège que le sieur
de la Cornillère voulait ériger dans sa seigneurie d'Ancrevel
(Plouigneau). Le même document cite la justice de Kerminou,

probablement Kervenniou, annexe de Kergariou (N° 128),
Goesbriand en Plouigneau, relevant de Bodister, Lanascol
(1 ) Arch. Côtes-du-Nord, B. 4,67. La juridiction de Saint-Michel
n'est pas citée dans le rapport de Charles Colbert (i665).
(2) Arch. Côtes-du-Nord, B. 286, E. i674.
(3) Arch. Côtes-du-Nord, B. 550, 2035, 2038, 2053. Nous ne
savons si cette juridiction de Kerhuel-Kerbiriou était la même que celle
de Keruel dont les juges de Morlaix avaient empêché l'exercice à Plouzé­
lambrc (Rapport Colbert) et qu'une juridiction de Kerhuel exercée à Plou-
milliau en i760 (Rapport du directeur des Domaines). .

dont le ressort en Plouzelambre, Ploumiliau et Keraudy (1)

était pour la plus grande partie, sinon pour la totalité. compris
dan s la sénéchaussée de Lannion. Le même rapport mentionne
encore en la paroisse de Plourin" la juridiction prétendue de
l'abbaye du Relec, appartenant au sieur abbé de Feuquières,
seigneur en partie de ladite paroisse de Plourin, qui est me­
néant de la barre royale". Nous ne connaissons pas d'autre men-

tion d'un siège judiciaire dépendant de l'abbaye de Relec à
Plourin, mais il est possible que l'abbé ait établi temporaire­
men t et plus ou moins régulièrement un tribunal pou r ses
vassaux du pays de Morlaix comme le fit l'abbé de Bégar au
Ponthou (N° 142). Les appels des causes de la juridiction du
Relec, dont le siège principal se trouvait dans la sénéchaussée
de Lesneven et qui n'était pas ménéante de Morlaix, étaient
présentés directement au Parlement.
La haute, moyenne et basse justice du Disquiou est citée
dans un aveu rendu au Roi en 1517 par Jean de Laval pour
Castel Dinan en Plouigneau et Chastel an Disqueou en Plou­
gonven ; au mois d'avril 1644, le Roi autorisa l'union
de plusieurs fiefs acquis par Yves Le Cozic de Kermellec en
une seule juridiction avec fourches patibulaires à quatre pi­
liers. Le Parlement ordonna une enquête (::1) qui ne ful sans
doute pas favorable au seigneur du Disquiou, car on ne trouve
pas de trace de l'existence de ce siège au xvu

et au x-vm

siècle.
136. Boiséon était une des plus anciennes seigneuries
du pays. Un comte de Boiséon, qui au XVIIe siècle entreprit
d'écrire l'histoire de sa famille, raconte que la terre de Boiséon,

en breton Coateusen, en latin Buccidus ou Silva Yvonis, avait
été donnée par les rois de Bretagne, successeurs de Conan
Mériadec, à leurs cadets les comtes de Kerfeunteun ou de Lan-

(i) Arch. Côtes-du-Nord, B. 667.
(2) Arch. Finistère, E. 633.

meur: ceux-ci en dotèrent leurs puînés, les Buccidus; la famille
avait longtemps conservé les titres de cette donation" trans­
crits sur des cahiers en velours brodé d'or et d'argent avec des
fermoirs de vermail doré", mais ce trésor avait disparu lors du
pillage du château de Kerouzéré par les Ligueurs (1). Hercule­
François de Boiséon inséra toute cette histoire dans la requête
présentée à la commission de réformation des justices: il avait
heureusement des titres plus sérieux à faire valoir, notamment
des lettres de confirmation octroyées par Louis XII en 1500.
Le droit de haute justice fut maintenu pal' arrêt du 15 novem­
bre 1673 (2). L'auditoire se trouvait à Lanmeur; le ressort
s'étendait en Lanmeur et dans une partie de Garlan évaluée
par les rapports des subdélégués en 1717 aux trois qllarts, ce
qui ne s'accorde pas avec d'autres passages de ces documents
donnant un tiers de Garlan à la juridiction de Kerohant et
six villages au ressort direct de la sénéchaussée de Morlaix.
137. - Coetcoazer possédait le droit de justice et de
menée de temps immémorial; le ressort était pour la plus
grande partie à Plouégat-Guérand et pour le fief uni de Tré­
léver, en Guimaëc; un arrêt du Parlement du 23 févrierI76g
autorisa le transfert de Lanmeur à Morlaix de l'exercice de la
juridiction et de ses annexes situées en Plouézoc'h, : la Noe-
. Verte, Bren, Triéven et Keraudy ; les habitants du ressort,
en Guimaëc et Lanmeur, qui ne s'étaient pas opposés à la de­
mande du seigneur, protestèrent tardivement en 1770 . A cette
époque les mêmes juges occupaient les sièges de Coatcoazer
et annexes et ceux de l'Armorique.

(1) Arch. llle-et-Vilaine. E. fonds de La Bourdonnaye Montluc, liasse
53. (Les papiers provenant de la famille de Boiséon forment 167 liasses
de ce fonds).
(2) Arch. Ille-et-Vilaine, B. Parlement. Réformatiou des Justices: M.
de Boiséon fut maintenu le même jour en possession des . juridictions de

138. L'Armorique, une haute justice qui s'éten-
dait sur presque tout Plouézoch et sur une partie de Ploujean,
fut confirmée par lettres patentes de 16I!l et de 1663 (1); elle
n'était pas exercée en 1765 quand le subdélégué donna la
liste des sièges du ressort; elle l'était en 1768, plus ou moins
unie au siège de Coatcoazer et annexes, et souvent qualifiée
l'Armorique et Kerantour. La juridiction possédait un cu­
rieux. et précieux privilège, reconnu ou confirmé par des
lettres patentes de 1588, 16,2 et 1663 : elle connaissait d, e tous
les procès qui surgissaient à Morlaix et dans les faubourgs
quinze jours avant l'ouverture de la foire Saint-Ma rtin, pen ­ dant la durée de cette foire et huit jours après: 'le sénéchal
de Morlaix. remettait solennellement au sénéchal de l 'Armo ­ rique une gaule ou verge qui était le symbole de son autorité.
D'après le rapport de Charles Colbert, les appels de cette juri­
diction étaient présentés à Bodisler ; nous croyons que cette
subordination n'existait que pour quelques village; la plupart
des causes allaient directement en appel à la sénéchaussée.
139. - Le Guerrand, dont la juridiction était appelée en
1577 Le Guerrand. Porsmeur, Pennenez et Lesquern (2)
était une vieille seigneurie qui fut érigée en marquisat. en

1637 et qui fut augmentée à la même époque de terres très
importantes. Le Ponthou , Botsorhel, Charuel Gu erlesquin).
Coatsaouff (Plouigneau), Plougasnou, Bodister, unies au
marquisat en 1637 et en 1654. mais sans réunion des droits de
justice en une seule juridiction (3). En 1756 le marquis de

(i) Cte de Rosmorduc, La Noblesse de Bretagne devant la Chambre d, e
la Réformation, p i 73 . Arch. Ille-et· Vilaine, B. Parlement, reforma-
tion des Justices. Arch. Finistère, B. Morlaix, liasse :l08.
(2) Arch. Finistère, E. fonds Barbier de Lescoet, seigneurie de Kerguidou.
(3) Arch. Finistère, E. fonds du Parc: aveu du 20 Mai 1730. -
Arch. d'Ille-et-Vilaine, réformation des Justices. Arch. Loire-
Inlérieure, B. 1808 .

Locmaria demandait la réunion au Guerrand de ses justices
de Kerael, Plougasnou, Kergariou (relevant de Bodister) et du

Ponthou: le subdélégué de Morlaix, Guillotou de Kerd u
écrivait à l'intendant que l'union était désirable, car dans les,
petits sièges on ne pouvait trouver que des magistrats
ignorants et trop disposés à faire des procédures inutiles (1),
cependant l'union ne paraît pas avoir été réalisée; le
marquis du Guerrand possédait encore les juridictions de
Km'hallon et de TrogofI : en 1780, un seul sénéchal fut reçu
pour ces deux sièges et pour celui du Guerrand, mais il avait
été nommé par trois mandements distincts (2) .
La paroisse de Plouégat-Guerrand et une très petite partie
de Guimaëc formaient le ressort de la juridiction qui était
exercée au bourg de Plouégat ; l'auditoire existe encore,
tran sformé en maison particulière (3).

140. Kerael, exercée à Lanmeur, du moins jusqu'à
1765, était une moyenne justice ayant son ressort en Botsorhel;
les archives du Finistère possèdent les registres d'audience
de ce siège de 1745 à 1761 qui paraît avoir été peu important.
141. Kergallon , exercée à Lanmeur pui~ au bourg de
Plonégat-Guerr'and, avait ses justiciables dans la paroisse de
Plouégat-Guerrand (jadis Plouégat -Gallun). La commission
de réformation des justices maintint le 17 novembre 1673
J-B. du Groesqller en possession de cette juridiction ; l'arrêt vise
ces lettres de la reine Anneet de Louis XII de janvier et décem­
bre 1512, des lettres patentes de Henry IV de 160 l, des arrêts de
la chambre des comptes de 1635,1653 et 1671 ; les quatre po­
teaux patibulaires se trou vaien t dans la lande de Lanyvinec (4) .
(i) Arch. Ille-et-Vilaine, C. 2464.

(2) Arch. Finistère, B. M orlai"{, liasse !O8.
(3) Le Guennec, Guide du pays de Lanmeur, Morlaix, S. O., in-t.8°,·p. 56.
(~) Arch. d'Ille-el-Vilaine, Réformation des justices.

Les archives du Finistère ont recueilli quelques documents
du greffe: registres d'audience de 1740 il 17go répertoires et
minutes de notaires de 1705 à 1767 etc. On ne doit pas con­
fondre Kergallon, souvent écrit Kergallon ou Kerhallon avec
une juridiction de même IJom s'étendant en Plestin (ressort
de Lannion), et qui dépendait du même château situé dans la
vallée du Dourdutf, entre Plouégat et Plestin (1).
142. Penlan-Bégar. Les droits de justice de l'abbaye
de Bégar furent confirmés par la duchesse Anne en 14g8. Les
fiefs très étendus et surtout très dispersés qui formaient la sei­
gneurie de Penlan-Bégar comptaient au moins trois siègesjudi­
ciaires : l'un se trouvait il Lannion, un autre tenait ses plaids

généraux au Menez-Bré et ses audiences ordinaires dans quel-
que bourgade voisine (2), un troisième fonctionnait au Pon­
thou (1700 ) et plus tard à Lanmeur (1765). Le siège du Pon­
thou-Lanmeur n'était qu'un démembrement de celui de Lan­
nion établi pour les justiciables habitant Lanmeur et Ploui­
gneau " MM. de Bégar, pour la commodité de leurs vassaux
et égard au peu de bien et au très-peu de vassaux, ont obtenu
de faire tenir une petite juridiction au passage du Ponthou".
Le démembrement des sièges et l'établissement de tribunaux
dans les villages était en apparence favorables aux intérêts des
paysans, mais ils présentaient de sérieux inconvénients ainsi
que l'écrivait en 1769 le subdélégué de Guingamp à propos
d'une demande d'érection de tribunal seigneurial à Bellisle-en­
Terre. "Plus j'avance dans la carrière, plus je pense qu'il serait
de la bon té du Roi de supprimer cette fou rmillière de juridictions
de village qui détournent les laboureurs de l'agriculture et rui­
nent cette portion de citoyens si précieuse à l'Etat ., (3) .
(i ) Arch Côtes-du-Nord, B. i002. Arch. Loire-Inférieure, B. 22.
(2) Arch. Côtes-du-Nord, B. t 18, i53, i59.

143. Plougasnou aurait été un siège assez important
s'il avait eu pour ressort toute la paroisse de Plougasnou et
une partie de Guimaëc, comme l'écrivait le subdélégué de
Morlaix en (7 (7: le renseignement n'était pas exact, puisque le
ressort de la juridiction de Saint-Georges était compris dans

la même paroisse. En (540, J ean de Châteaubriand cassa tous
les notaires établis dans ses nombreuses seigneuries, entr'au­
tre Bodister et Plougasnou, parce qu'ils "sont en nombre con­
fu s et excessif. sont les uns déambulatoires, occupés à autres
vacations, et au tres non résida ns surIes lieux" (1). Les habi tants
de Plougasnou souhaitaient en 1789 que l'on fît subir le
même sort aux juges seigneuriaux: le cahier de doléances (::1)
propose leur remplacemen t par un certain nombre de jurés
établis dan s chaque paroisse pour juger rapidem e!J t et sans
frais les affaires de minime importance, Le siège de la juri­
diction, établi en (640 à Saint-Jean-du-Doigt, fut plus tard trans­
porté à Lanmeur; il émigra à Morlaix en 1759, mais l'oppo-
sition des vassaux le ramena à Lanmeur en 1782. ,
144. Saint-Geol'ges, exercé à Lanmeur, dépendait
du prieuré de ce nom relevant de l'abbaye de Saint-Georges
de Rennes. Les archives d'Ille· et- Vilaine possèden t un long
procès-verbal du 29 mai 16:A2 énumérant toutes les terres qui
relevaient de la haute justice dans la paroisse de Plougasnou,
L'ab besse défendait les privilèges féodaux et judiciaires du

prieuré avec opiniâtreté: elle réussit à maintenir le droit de
b ris, au m oins en théorie sur les côtes de la seigneurie jusqu'à
une date singulièrement tardive : il ne fut aboli, par arrêt du
Conseil, que le 31 Janvier 1764 (3).
(A suivre). H, BOURDE DE LA ROGERIE.
(i ) Arch. Finistère, série A. A veux.
(2) A la mairie de Plougasnou. M ême demande dans denomureuxcahiers,
(3) Arch, IUe-et- Vilaine, 2 H i, 294"

-124 -
DEUXIÈME PARTIE .

Table des ,Mémoires publiés en 1925

I. Manoirs et rues de Penmarc'h, par
F. QUINIOU [ nne planche]. . . . . . .
l'abbé

II. Liste des juridictions exercées au XVIIe et au
xvm

siècles dans le ressort du présidial de
Quimper (suite) , Sénéchaussée de Morlaix et

PAGES

de Lanmeur, par IL BOURDE DE LA ROGERIE.. 13
Ill. 1 Documents sur le Cap-Sizun. Il Les habitants
du Cap-Sizun demandent un médecin (1609).
III Requête du Roi... pour êtr~ déchargés de
certains impôts (1566). IV Etat du monastère
des Ursulines de Pont-Croix en 1720, par
DANIEL BERNARD . . . . . . . . . . . .. 35
IV. Deux lettres de Guillaume Laënnec sur la guerre
navale en 1779, . . . . . . . . . . . ., 44
V. Quelques réflexions sur l'ordonnance autographe
de Laënnec, par le Dr L LAGRIFFE [une
planche]. . . . . . . . . . . . . . . 49
VI. Nos vieux grands chemins et la corvée en Cor­
nouaille et en Léon à la fin de l'ancien régime,
par J. SAVINA [une planche] ....... , 52
VIL Saint Corentin et ses vies latines à propos d'une
publication récente, par LARGILLIÈRE. . . .. 86
VIII. Première contribution à l'étude des noms d'hom-
mes et de lieux du Cap-Sizun, par J. LOTH et
D. BERNARD. Introduction par J. LOTH ...