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Bulletin SAF 1924


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Le clocher de Ploaré (étude architectonique)

Charles Chaussepied

Avertissement : ce texte provient d'une reconnaissance optique de caractères

Société Archéologique du Finistère - SAF 1924 tome 51 - Pages 92 à 94

(Étude architectonique)

L'une des plus belles flèches de la région cornouaillaise est
certainement celle de l'église de Ploaré. Située sur un point
~levé, au cen tre du bourg, elle domine tout le pays environ-

nant. On l'aperçoit de plusieurs lieues à la ronde découpant
sa silhouette hardie que la lumière modifie constamment.
Le clocher qu'elle couronne 'a été construit dans la seconde
moitié du XVIe siècle. A mesure que l'on y monte on lit les
dates de 1550, 1557,1583, 1586 (1).
Par sa forme générale, il appartient encore aux œuvres de
la dernière période ogivale tandis qu'il est franchement de la
Renaissance dans sa décoration.

Bâti sur plan carré, à l'extrémité Ouest de l'église, il s'élève
à plus de 65 mètres de hauteur, dépassant de beaucoup la
grande toiture de la nef.
Son soubassement, sorte de porche ajouré, est formé de
gros piliers polygonaux recevant d'épaisses arcades moulurées
donnant sur les bas côtés.
La porte d'entrée est entourée de nervures, cantonnées de
minces pinacles et couronnée d'un gable élancé. Au-dessus
règne une galerie reliant les deux escaliers; le premier à
gauche, pratiqué dans l'épaisseur du mur, l'autre à droite,
montant derrière un contrefo'rtjusqu'aux galeries supérieures.
(1 ) Chanoine Abgrall, Inscriptions gravées et sculptées sur les églises
et monuments du Finistère, dans le Bulletin de la Société archéologique
du Finistère, 1916, p. 74.. ..

Entre l'étage de la tribune et celui du beffroi existe un
grand vide amorcé en vou tes d'arêle à sa partie inférieure, et
destiné à recevoir un plancher pour la chambre de l'horloge
placée au-dessus des arcs projelés.
Cette partie est éclairée de longues et étroites ou verlures
encadrées de' plusieurs rangs de moulures et couronnées
d'accolades fleuronnées. La tour est alors flanquée aux angles
de puissants contreforts à pinacles s'étageant les uns au­
dessus des autres, et qui, ornés de niches à leur base, contri­
buent à la décoration de la façade Ouest.
C'est au-dessus de grandes baies que se développe la double
galerie qui forme une si belle couronne à cette tour. Ces deux
galeries sont reliées par une élégante arcature reliée aux angles
par de hauts clochelons ajourés montant jusqu'à plus de la
moitié de la flèche.
La tour passe alors à la forme polygonale qu'elle conservera
jusqu'au faîte.
Une dernière galerie court au -dessous de la naissance de
la flèche, passant derrière les grands pinacles . Cette flèche
- êlancée est décorée sur ses quatres faces de hautes lucarnes
richement sculptées.
Ce qu'il y a de particulier dans ce clocher, et ce qui nous
a engagé à en faire les dessins relevés, est le curieux mélange
des formes ogivales et Renaissance. Il semblerait que l'artiste
ait mélangé ces styles à plaisir et voulu dérouter la pos­
térité .

C'est ainsi que les clochetons gothiques sont. coiffés de
dômes et que les deux autres, de style Henri Il, ont reçu des
flèches pour couronnement. Là ne s'arrêta pas la fantaisie du
maitre d'œuvre, imbu probablement des idées nouvelles qui
commençaient à orienter les 'arts vers les œuvres d'Italie.
Les rampants des flèches sont ornés de crochets en formes
de consoles renversées. Les nombreuses figures sculptées à la

franchement Renaissance, et les énormes têtes qui surmontent
les lucarnes sont presques de l'époque Henri IV.
Par la disposition de ses motifs d'architecture, par la
majesté de son ensemble, le clocher de Ploaré offre des

aspects fort divers et très curieux, de quelque côté qu'on le
regarde. Il faut le voir surtout le soir à la tombée du jour.
Alors sa silhouette bizarre se détache en masse sombre sur un
ci. el de couchant, ou bien par un clair de lune, quand les
ombres et les lumières s'accrochent ou s'enfoncent pour lui
donner des formes fantastiques qui semblent se marier à
celles des vieux chênesque dessinait Yan-Dargent.
Quimper, le :JO Mai 1924.
CHARLES CHAUSSE PIED, .
Architecte .

109 ..
DEüXIÈME ' PARTIE
Table des Mémoires publiés en 1924
PAGES

I. La thèse de Laënnec, par le D' LAGRIFFE . . " 3
II. Quelques réflexions sur les origines du peuple bre-
ton et sur la persistance de la langue bretonne
. d'après les écrits d'Albert Travers, par CAMILLE
. V ALLAUX. . . . . . . . . . . .

III. Les anciens manoirs des environs de Quimper
(sui te et fin), par 1. LE GUENNEC. . . . . .. 25
IV. Les mouvements populaires en Juillet et Août 1789
d'après quelques letlres inédites de Ange Conen
de Saint-Luc, par JEAN SAVINA . . . . . .. 46
V. Quelques mots sur l'Emigration bretonneen Armo­
rique, en réponse aux « Quelques réflexions l) ,
par J . LOTH. . . . . . . . . . . . . . .. 68
VI. Une rentrée des classes à Quimper, en l'an VlU,
par fI . W AQ UET .. . . . . . . . . . . . ., 74
VII. Vieilles chansons bretonnes. III Le Clerc de

Trom~lin, par 1. LE GUENNEC. .... . . 78
VIII. La ville d'Iso Ses origines, sa submersion, par
E. DELÉCLUSE. . . . . . . . . .. '.. 85
IX. Le clocher de Ploaré (étude architectonique), par
CHARLES CHAUSSEPIED [u ne planche J. . . . .' 92
X. Le dernier évêque de Léon: Jean-François de La