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Bulletin SAF 1922


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Sur l’étude de la civilisation préhistorique armoricaine, d’après ses monuments

Alfred Devoir

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1922 tome 49 - Pages 3 à 19

PRÉHISTORIQUE ARMORICAINE
D'APRÈS SES MONUMENTS
Texte intégral du Mémoire
adressé au Congrès · international d'Anthropologie
Session de Liège 1921

Les notes qui suivent sont consacrées a la
partie de la Bretagne située a l'O uest du méridien

nati onal de cinq degrés, et a cette région seule;
je ne veux pa rler que de ce ·que j'ai vu et par­
couru a maintes reprises, depuis plus de trente
ans, par voie de terre et de m er.
Pays de roches auciennes, la Bretagne occi­
dentale n'attire pas seulement par ce « charme
pénétrant » qu'Elisée RECLUS lui attribuait si juste­ ment; elle est susceptible de passionnel' au plus
haut point celui qui chel'che a en saisir la struc­
ture tourmentée, et l'archéologue y peut étudier,
dans une aire d'étendue modérée et sur des res­ tes nombreux et divers , la moins lointaine . des .

grandes périodes de l'évolution préhistorique .

C'est que le passé humain de l'Armorique est à
nos yeux relativement récent : les races quater­
naires n'ont laissé que peu de traces sur un so l
où les grandes alluvions sont marines et les ca­
vernes l'ares; les glaces avaient depuis longtemps

abandonné les régions baltiques quand ce sol vit
se d6velopper des groupements de quelque den­
sitè, et une civilisation que je veux essayer de
caracté riser dans ces notes brèves, sans me dis­
simul er toute la complexité d'un problème à
pein e entrevu, et sur lequel nos continuateurs
peineront encore dans bien des siècles, si toute­
fois notre époque fait tout le nécessaire pour leur
en conserver les moyens: nul ne peut préj uger
des suivan tes.

Les deux notions auxquelles je viens de faire
appel, densité de population ou de gro upes
et réalité d'une civilisation perceptible à la men­
talité moderne, au moins sous certains rapports, ­ ne sont pas des évidences a priori J. toutes
deux doivent, pour devenir acceptables, dériver
de farts incontestables d'observation: c'est pour­
quoi je demande à ceux qui m'écoutent de me
faire confia nce pendant quelqu es instants; les
in connues se dégageront du cours de mon
exposition.
Et tout d'abord ce mot de civilisation J si difficile
à définir quand il s'agit des temps historiques,
a-t-i l un sens pour ces époques lointaines où
l'homme ne se révèle à nous que par de trop

précisément par celles qui utilisèrent et transfor­
mèrent des matériaux susceptibles de résister,
penda nt d'énormes durées, à l'incessante attaqu e
des agents naturels ~
Certes l'idée de progrès s'impose quand nous
com parons l)uniqu e outil chelléen aux instru­
ments si va riés du cavernicole vezerien ; mais
l'i ndustrie, q ui app aru t avec la premi ère lu eur
d'intelligence, a pu rester, pendant des centaines
de siècles, strictem ent individ uell e, co mm e le
travail lui-même, jusqu'au jour où des efforts
s'associèrent pour l'obten tion d'un même b ut
dur 'able, dépassant nettement la puissance de
chacun.
Ces asso ciations sont pour nous des réalités,
puisqu'il reste d'incontestables témoins de leur
activité, ét le -mot de civilisation semble pouvoir
justement s'appliquer à tout état social préhisto­ rique où la production d'utilités que chaq ll e indi­
vidu, à l'imitation de ses loint ains devanciers,
réserve pour lui-même et pour ses proches, put
m archer de pair avec la produ ction d'œ uvres col­
lectives , s usceptibles ou no n d'approp ria tions
restreintes.
En Bretagne, les œ U Vl'es collectives des groupe
ments préhistori ques son t des constructions em­
ployant la roche en blocs parfois énormes, des
matériaux meubles, terres ou vases, et des fmg­
ments pierreux de médiocre volume : elles domi­
nent souvent de leurs masses de plus ou moins
nombreuses prod Llctions d'industries in di viduelles,
d'usage co urant ou ri tuel, voisina nt ou non avec

Les auteurs du XIxe siècle ont assez soigneuse-

ment étudié les outillages préhistoriques bretons,
et surtout ceux de-pierre-polie, pour qu'il n'y ait
pas grand'chose â dire après eux, et cela depuis
longtemps déjà ; les recherches plus récentes

n'ont fait que multiplier le nombre des échantil-
lons qui pour la plupart sont très voisins, soit
comme matières premières, soit comme formes
travaillantes, de ceux récoltés dans les vestiges
préhistoriques d'autres pays, et aussi de ceux que
confectionnaient, il y a cinquante ans, les habi-

tants attardés de plusieurs archipels polynésiens:
de légères différen 2.es de silhouette entre ces ins­ truments exotiques et les europ éens paraissent
dériver de IR dissemblance des mentalités; les

premiers seuls sont dyssymétriques.·
Les mêmes écrivains se sont beaucoup moins
occupés des constructions, ' qu 'ils considéraient
pratiquement comme des gîtes à trouvailles, ils
en ont toutefois donné quelques descriptions som­
maires, accompagnées, pour certain es, de croquis
à petite échelle, de précision modérée notamment

en ce qui concerne les orientations, et dépourvus
de cotes. Le but essentiellement poursuivi était
de leur assigner une destination.- la fun éraire
ou plus exactement l'uniquement funéraire fut
choisie pour toutes : cette solution éminemment
commode et simple garde encore aujourd'hui de

très nombreux fidèles, mais simplicité n'est pas
marque infaillible de vérité.
Il nous est heureusement possibl e de reprendre

d'exemple ou d'indication, et pour ne pas sortir
des limites posées , je donnerai seulement ici,
pour les types principaux d'œuvres collectives des
anciens armoricains, des définitions s'appuyant

sur des opérations de géométrie élémentaire, et
aussi inattaq uables, par suite, que le principe .
même de ces opérations : il en résultera des

acquisitions non iOujettes à l"evision.

Un procédé commode consiste a utiliser des
signes du genre de ceux adoptés, en 1874, par le

Congrès de Stockholm, mais complétés dans tous
les cas, par la figuration d'une ligne de terre qui ·
représente le niveau du sol naturel environnant
immédiatement la construction, et supposé hori­
zontal, ce qui est le cas le plus fréquent: cette

ligne de -terre n'est e n réalité que la trace d'un
plan de comparaison des hauteur's ; j'en mon­
trerai bientôt l'extrême importance.
MENHIR. Le menhir est un bloc rocheux
dont une dimension est toujours nettement plus
grande que l'une des deux autres, et dans l'im-

mense majorité des cas que les deux: ce bloc est
implanté dans le sol de telle façon que la grande
dimension soit verticale, ou à très peu près.
Cette définition s'entend du volume apparent,

et de menhirs vraisemblablement entiers .

. Il convient de dire que la condition de vel'tica-
lité s'imposait aux architectes préhistoriqu es,

comme répondant seule à un équilibre durable,
résultant soit de la préparation d'une surface de

et d'un plan de pose résistant et horizontal, ce
qui m'a conduit à qualifier ces menhirs de « self-

standing ») soit de la constitution de calages
latéraux, si le bloc se termine vers · le bas
en forme plus ou moins pyramidale : ces
remarques dérivent de l'examen de menhirs
gisanL sur le sol, mais authentifiés de ce fait
qu'ils appartiennent à un alignement non res­
tauré, ou qu'ils ont été vus debout par des témoins
donnant des garanties, ou encore photographiés
avant chûte.
L'obj ection me sera faite qu'il ne manque pas
de menhirs inclinés, je répon. drai seulement que
leur nombre, s'il n'existait pas de menhirs self­
standing, devrait être au moins égal au nombre
total des m enhirs ay.ant subi des fouilles profon­
des; on ne dérange pas, sans compromettre la
stabilité des pierres plantées se terminant en
pyramides grossières, des calages qui l'ont
assurée pendant des milliers d'années : toute
inclinaison est indice d'équilibre instable, et d'un
chavirement plus ou moins lointain, mais inévita­
ble, sauf au prix. d'un redressem ent suivi de l'éta­
blissement d'un néo-calage) pour lequel l'emploi
de béton ne serait pas de trop; l'expérience mon­
tre qu'entre une fouille profonde et la chûte
cO Ilséq uen te,. il peut s'écoule" moins de 30 ans.

L'originelle destination du menhir fut, avant
tout) la vedicalité) et comme à distance l'œil n e
conserve que cette impression et celle de hauteur,

des matérialisations plus ou moins grossières,-
suivant que le bloc est resté fruste, ou montre les
traces évidentes d'un long et remarquable travail,
de la verticale d'un point ou de ' ce point lui­
m ême; ainsi se trouve posé le troublant problème
des inter-relations) qui peut d'ailleurs faire inter­
venir d eH constructions d'autres types: il n'en est
peut-être pas de plus important, parmi le très
grand nombre de ceux qu'excluait la conception
uniquement funéraire.
La définition graphique du menhir se traduit
par l'un des signes suivants: -1 = menhir inviolé
ou violé tout récemment; 1_ = menhir
fouillé profondément et en cours de chûte;
= menhir gisant sU[' le soL probablement
après fouilles; les paysan s n'abattent que pour
débiter.
DOLMEN. On écrirait facilement de longues
pages motivées sur l'architecture des dolmens;
saos parler ici des tracés de parois, infiniment
variés, et de leur projection horizontale, considé­
ron s seulement la sèction verticale d'un dolmen
à table, les autres ~ont de très rares exceptions,
- pal' un plan nO l'mal à sa plus gl'ande dimension,
ou plus simplement des vues photographiques de
dolmens bl'etons, en tel nombre que l'on voudra,
parmi celles ou un personnage ou un objet de
loogu eul' connue fournit un repère des hauteurs '.'
la définition géométrique suivante s'en déduit:
« construction mégahthique form ée de blocs im­

OU presque, à une hauteur au-dessus de ce sol
grossièrement égale à la taille d)un homme debout)
un ou plusieurs autres blocs dont la moindl'e
dimension est t épaisseur» ; ceci revient à la figure
schématique i'ï' , la hauteur totale représentée

étant d'environ 1

7, en moyenne, quantité qu e je
désigne du nom de surélévation.
Cette définition est si réellem ent vraie que toute
s urélévation nettement m oindre est, en Bretagne,
un indice sûr de remaniement, le plu s souvent
naturel, du sol au temps de l'édification: les dol­
m ens à p etite surélévation sont tous ou presque
en bordure des rivages, et à l'intérieur des contours
délimitant les dunes, sur la Carte géologique de
France au 1/ 80000' ; elle éli mine de plus 1':wCÏenne
conception, formulée par l'école m orbihann::tise et
ses disciples, du dolmen « enfoui le p lus souvent
dans le sol naturel» (Docteur Alfred FOUQUET, sous
le couvert (( de plusieurs antiquaires morbihan-
na ~·s » (1853) et d'autres) .

La constatation) de visu, de la surélévation des

dolmens bretons, indépendante de toute hypothèse)
entraîne un e déduction plus importante encore, et

tout aussi inattaquable, le m ot surélévation COI11-
pOl'te non seulem ent une idée de position, c'est-à­
dire de résultat obtenu, il s'applique de plus à
l'action qui permet ou a permis d'y atteindre. Or
il est de toute évidence mécanique qu e des tables,
même relativement légères, n>(jnt pas pu être mises
en place à bras f rancs, quelque fût le nor'nbre
d'hommes disponible, et que rimplantation préa-

lable des supports rendait impossible l'lJ>5age de
leviers comme engins principaux ou uniques de
soulèvement: dans ces conditions, les construc- .
teurs eurent forcément recours à l'un des autres
genres de machines simples, ou à tous les deux;
des cordes, formées de matières périssables, rien
ne s'est conservé jusqu'à nous, nous savons tou­
tefois, par l'ornemention de quelques vases que
les préhistoriques en possédaient.
Par contre, leur.') plans inclinés existent encore)
assez nO!71,breux: ils entourent les faces externes
des supports, sans jamais s'élever jusqu'au som­
m et de ceux qui soutiennent effectivement les
tables) et permettaient le hissage de celles-ci sui­
vant des azimuts très divers, sans préjudice des
facilités m.ntérieurement données pour l'implanta­
tion verticale des blocs de parois: j'ai depuis
longtemps donné à ces dispositifs simples,formés
de terres et de moëlIons, le nom de tertres de
constructi.on; il en est de consolidés très ration­
nellement par des blocs pénétrant d'autre part
dans le sol naturel, comme le montre la: partie
droite du schèma (Voir planche A).
La constatation n'était pas difficile à faire, mais
les fougueux anti-Celtomanes morbihannais du
siècle dernier étaient dominés par leurs pré-con­
ceptions, et telle est la puissance de la contagion
mentale, appuyée par la beauté des premières
trouvailles, que Henri Martin s'obstina à voir,
dans les indispensables engins de hissage des

tables) des vestiges hypothétiques « des tumulus
qui a l)aient enveloppé les dolmens ».
Il importe de remarquer incidemm ent que la
vedicalité des suppor ts n'est pas moin s nécessaire
à la stabilité d'un dolmen que la verticalité d'un
menhir à la conservation de celui-ci dan s son état

originel : la figuration ci-dessus ne saurait
donc con venir Cf u' à des dolmens inviolés) tandis
que le signe caractéristiqu e du congres de Stoc­ kholm, avec ses supports convergents 1 ... donne
plutôt l'idée d'une constru ction en cours d'effon­
drement : ce signe ne correspond, en réalité qu'à
une situation temporaire et je n'en veux citer qu'un

exemple : une tres importa nte galerie dolméniqu e

que j'ai visitée et photogl'aphiée en 1910, à quel-
ques jours d'une fouille profonde, montl'ait tout
récemment une paroi inclinée de 23° S Ul' la verti­
cale; en raiso n de la faible épaisseur des supports ,
cette fouille avait, en onze ans) donné des résul­
tats sensibles èt mesu cables (Il e Grande, Côtes­
du-Nord), en attendant le chavirement total.
. Je n'ai pas voulu dire, quelques lignes plus haut,
que tous les dolmens sont restés à l'air libre
depuis leur édification, sachant fort bien qu e l'en­ Jouissement total est ÏI'ldéniable p our un peu moins
d>u71e douzaine, tous en bordure des rivages s ud­
finistériens et morbihann ais .

C'est un fait r emarquable que les deux régions
qai les contiennent tous rep résentent : l'une 11700' de
la surface totale du Finistère, r autre f / 120' de la

montrent des vestiges d'occupations proto-histori­
ques indiscutées , ou dominé8s par des ruines
romaines; comme les écrivains bretons du siècle
dernier avaienL imaginé l'enfouissement originel
et en règle absolue de tous les dolmens pour étayer
leur pré-conception d

une destination uniquernent
fu néraire, il ne reste aux tenants de cette croyance
" qu'à reprendre la question d'après leurs seules
observations personnelles pour conclure seulement
plus tard ,. les belles haches polies n'en seront
pas moins belles. .
Je reconnais que cet évano uissement en en­ traîne beaucoup d'au tres, et notamment qu e les
" récoltes de milieux artificiels ne pouvaient conti­
nuer longtemps à être considérées comme de

valeur chronométriqu e équivalente à celles des
récoltes faites dans des milieux natw'els, strati­
fiés ou pseudo-stratifiés; nous perdons quelques
hypothèses , dont plusieurs faisaient figures de
simples ajJirmations, pour gagner un petit nom­
bre de cel 'Litudes, et des possibilités de progrès.
Le tumulus, rarement superposé à des dolmens
Vl'aisemblablement antélo ieurs, d'un stade indus­
triel peu t-être, reste, en dehors -de ces exceptions,
partie pl'Ïncipale de la plupart des sépultures
préhistoriqu es bretonnes, qui comprennent d'au­
tre part des constructions totalement ou presque
totalement enfouies dans le sol naturel , et ci
contour fermé) plus sou vent rectangulaire que
curviligne, lorsqu'elles ne sont pas simplement
formées de cendres ou de débris osseux déposés,

à l'abri de quelques petites pierres plates, sur un
lit de sable ou de galets à fleur de sol, ou de ce
lit seul, sans rien de plus.
Les schémas de la planche B dispensent d'ailleurs '
de parler plus longuement de ces sépultures, après
ces tL'ois remarques, dont les deux premières éli­
minent des ca uses de disparition fréquemment
invoquées : des tumulus simplement terreux gar- '
dent encore de forts r eliefs, quatre ou cinq metres
et plus ; dans un~ région où les précipitations

atmosphériques sont abondantes, l'absence de
ravinements sur leurs surfaces latérales témoigne
d'une singulière résistance aux intempéries; des
sillons escaladent et dévallent les p entes de cer­ tains tumulus, c~ qui revient à dire qu'ils ne
gênent pas les cultures ; les arasements n'ont
généralement lieu qu'après fouilles; enfin les
sépultures en colTres ou en fosses ne sont jamais
points déterminatifs d'un alignement : un e fosse
fait seule exception, elle contenait Un grand nom­
bre d'objets de pierre polie) mais, paraît-il, pas
de restes humains (Mané er Hroeck).
Toutes ces constructions à destination unique-

ment' fun éraire, dont l'amas terreux ou pierreuX.
apparaissait seul au-dessus du sol) et pour les­
quels aucu ne manœuvre en élévation de blocs
pesants n'était néces~aire, se différencient à ces
points de vu es; et à beaucoup d'atHres encore, de
cell0s que leur ossature mégalithique désigne à
nos regards, comme elle les désignait aux regards

de nos lointains ancêtres; à ces dernières seules

- que leur surélévation soit ou variable ou sen­
siblement constante doit être réservé le nom
de monuments mégalithiques; l'adjectif mégali­
tlûques, qui ne vise pas à la précision, est bien;
« barolithiques » eut été plus expressif encore,

les poids à élever caractérisant mieux que les
dimensions, l'énormité de travaux quine purent
être que collecùfs, dans leur exécution.
J'ai examiné ces monuments au point de vue
géométrique, ou si l'on veut architectural: ils
nous ont montré que leur édification nécessitait
des efforts considérables, que pouvaient seuls
fournir des groupements. rapprochés ou très den­
ses:' de pareilles opérations ne peuvent être
menées à bien sans une direction: aujourd'hui,

quand plusie-urs hommes s'occupent au déplace-
ment d'un fardeau, le premier dont le cri déclan­
che un mouvement d'ensernble de\'ient de ce fait
chef de travail: aux temps de la préhistoire bre­
tonne la préparation de la manœuvre et la cons­
titution des multiplicateurs pouvaient ne pas être
à 'la portée de tous : il fallait une direction
intelligente.
Mais ce n'est là qu'un des aspects du vaste
problème monumental, qui en comporte beaucoup
d'autres: les éléments ne me manquent pas pour
étudier les teacés complexes non restaurés et leurs

recoupements à angle droit, ou l es relations des
blocs plantés avec les assises qui en supportent
la charge et avec les matériaux disponibl@s à
proximité .

J'aurais pu montrer comment des alignements,
'llongs ou courts intervalles, ont été établis pour
coïncider, en azimuts, avec des constantes abso­
lu es ou des variables lentes de leur horizon, et
pa r suite de la planète, sans que nous puissions
espérer en dAduire, même à des millénaires près,
l'âge de ces alignements, tandis qu'ils nous ont
permis la définition du calendrier préhistorique,
supérieur à certains égards à cel ui des anciens
Egyptiens , calendrier qu'un sculpteur des temps
lointains a figuré sur le g rand support de la Table
des Marchands, pièce uniqu e en Bretagne et peut­
être au monde ; j'ai pu en donner une interpréta­
tior. du moins rationnelle, par des considéra tions
de très simple géométrie, rapprochées des résul­
tats de mes travaux su r les grands ensembles
mégalithiques non restaurés et non remaniés du
Finistèl "e : des tracés rectilignes y voisinent a vec
des curvilignes, à l'exclusion de toutes sinuosités.
Toutes ces recherches, sans compter celles où

nous utilisons les monuments pour des buts que
leurs auteurs ne pouvaient pas prévoir, comme '
l'étude des variations des rivages et du modelé
des reliefs terrestres, font intervenir les rudiments
de sciences très diverses et de tous ordres, et
nous en déduisons logiquement l'existence d'une
ancienne élite intellectuelle, directrice de travaux
eL fondatrice d'u ne civilisation qui nous apparaît
comme proto-scientifique.
Si les architectes bretons ont possédé quelques

sciences que nous cultivons aujourd'hui, géomé­
trie, mécanique, astronomie, minéralogie et peut­
être numération, nous pouvons et devons nous
relier à eux par leurs. œuvres monumentales: don c
étudions ces œuvres et conservons-les à nos con-

tinuateurs: les monuments répondent à qui les
interroge, le mètre à la main et la boussole à l'œil.
Je veux finir sur ces paroles, en m'excusant
d'avoir outrepassé les limites fixées par le pro­
gramme du Congrès: nous voulons faire plus et
autre chose que nos prédécesseurs du siècle d~r­
nier~ suivant le conseil de notre grand Descartes:

G: Si donc l'on veut chercher sérieusement la
« vérité, il ne faut pas s'appliquer à une seule
« science; elles se tiennent toutes entre elles, et

G: dépendent - naturellement les unes des autres ».
(Règles pour la direction ' de l'Esprit) .

ALFRED DEVOIR,
Membre de l'lmtitut international d'Anthropologie.

Brest, 8 Juillet 1~21.

PLANCHE. A

SCHÉMA DE DOLMEN COMPLET

AVEC TERTRE DE CONSTRUCTION

( VESTIGES DE TUMULUS» de la plupart des auteurs)

LEGENDE
x y Ligne de terre (surface du sol naturel).
s surélévation; la comparaison grossière à la taille de l'homme debout
tient compte des différences.
b hloc de soutènement du tertre de certains dolmens à lourdes tables. La figw'e

se rapporte à un monument dans son équilibre original, non ébranlé
par une fouille profonde ou « m éthodique» .
(Contour à une ou deux ouvertures).

PLANCHE B
SCHÉMAS DES PRINCIPAUX TYPES DE CONSTRUCTIONS ENFOUIES

. (UNIQUEMENT FUNÉRA.IRES)

LEGENDE

œ y Ligne de terre (surface du sol naturel).
1 COFFRE SOUS-TUMULAIRE.
FIG. 1 à III
contours
fermés
II COFFRE DE PLEIN SOL.
III FOSSE PAREMENTÉE; « dolmen à maçonnerie de pierres sèches .
- « chamb,'e dolménique » etc . de divers auteurs.
p ' profondeur, généralement de 1 à 2 m., quelquefois plus.
Les murets peuvent être partiellement remplacés par un placage en
dalles, rarement par des blocs couchés (Mané er Hroeck).
FIG. lV. - Sépulture sur lit de sable ou de galets reposant lui-même sur le 801, protec­
tion des restes par petites pierres plates.
Fm. V. - . Cénotaphe: lit de galets ou de sable reposant sur le sol .

136
DEUXIÈME

PARTIE
Table des Mémoires publiés en 1922
1 Sur l'étude de la civilisa tion préhistorique armori­
caine, d'après ses monuments, par ALF RED
P AGES
DEvou'\, . . . . . . . . , . . . . . . " 3
II Élie Fréron,d'après un livre récent, par 1. LAGRIFFE 20
III Vieilles chansons bretonn es : I. François de Coëtlo-
gon, prieur de Kernitron, par L. LE GUENNE C. 26
IV Le bouton breton, par E. CHARBONNIER . . . ., 33
V Troisième campagne de fouilles en pays bigouden ,
par le commandant BÉNARD, l'abbé FAVRET,
GE ORGES A. - 1. BOISSELIER, GEOR GES M ONOT
[2 planches]. . . . . . . ' . . . . . . . .' 37
VI Les sépultures à coffrets et la chapelle Saint-Gilles
en Bénodet, par 1. OGÈs . . . . . . . . .. 51
VII Les anciens manoirs des environs de Quimper,
par 1. LE GUEN 'EC (suite) . . . ' . . . . 57, 11 7
VIII Le chemin du « Tro-Breiz )) entre Quimper et Sain t·

Pol· de-Léon, par le chanoine ABGRA LL et 1. LE

GUENNEC r 1 planche] . . . . . , . . . . . . 65
IX Le Cap Sizun à l'époque néoliLhique, par H. LE
CARGPET. . ..... , , .. , .... , 99.
X Quimper au XVIIIe siècl e. Notes et documents (II),
par DANIEL BERNAR D,

105

Quimper, - Imp. Mm . BARGAIN & C" , 1, Rue Astor et Quai du Stéir