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Société Archéologique du Finistère - SAF 1921 tome 48 - Pages 83 à 111
A LA FIN DE L'ANCIEN RÉGIME
L'Armorique intérieure avait conservé jusqu'à la fin du
moyen âge sa magnifique parure de forêts. Certes. les défri
cheurs et les forgerons avaient déjà pratiqué de larges éclaircies
dans ces masses fores tières. Mais, la légendaire Brocéliande
tl'On çonnée, la Bretagne demeu rait « la terre de granit recou
verte de chênes l), c( Coa t en he c'hreiz, mor en he zro.'
L'Argoat méritait encore son nom si caractéristique. Au cours
des XVIe et XVIIe siècles , la Bretagne perdit peu à peu son
caractère fores tier. Les terrains de rapport continuèrent de
s'accroître au détriment des bois, mais surtout la forêt fit
place à la lan de (r).
Lorsque, par sa fameu se ordonnance de 1669, Colbert
édicta des mesures préservatrices, il était déjà bien tard; une
exploitation inconsidérée avait causé d'irréparables ravages.
Cependant, malgré les besoins croissants de la marine royale
et de la métallurgie; une administration prévoyante eût pu,
en imposant de judicieux aménagements, conserver et peut-
être restaurer une bonne partie de nos richesses forestières (2) .
(1) Dès la première moitié du XVII" siècle, l'immeusité des landes bre tonnes étonnait les voyageurs étr3ngers. CI. Dub'uisso n - Aubenay :
Itinéraire de Bretagne en 1636, pp. 57,60,1.06,126. H. Bourde
de la Rogerie : Inventaire sommaire des Arch. du Fin. T. III.
Introduction , p. CL VI.
(2) « Si l'on eût conservé, daus cette Province, seulement les bois qui y
existaient avanll'ordonnance de 1669, ils en approvisionneraient abondam
ment nos chantiers qui dans 1.0 ans ne recevront plus rien. » Etat des
forêts du roi en Bretagne : résultat de la visite faite cn 1785 pal' le
Comte d'E ssuite, en exécution ri es ordres du Contrôlo,ur général de
Calonne. Arch. d'Ille-et- Vil. Si. C. Intendance, 2
suppIt non inven
torié reg . fO 1.7 .
Malheureusemeut les Maîtrises bretonnes persévérèren t dans
les anciens errements. L'incurie des uns, l'avidité des autres
concotlfurent à de nouvelles dévastations. Il ne subsista
bientôt plus que des lambeaux de forêts dispersés çà et là.
Les bois particuliers ne furent pas mieux traités que les forêts
royales (1). On se bâtait de vendre et d'abattre, mais on ne
se souciait guère de régénérer les peuplemen ts après leur
exploita tion. Souvent même, la forêt rnée, on afféageait le
sol, ou bien on le délaissait et alors, peu à peu, les riverains
se risquaient à l'usurper.
Une gestion si déplorable devait amener fatalement la
disette de tous les bois: des bois d' œu vre d'abord, des bois
de chauffage ens uite. C'est ce qui arriva dans les dernières
années de l'ancien réglme, à partir de 1783 notamment.
Le com te d'Essuite évaluait, en 1785, à 175.000 arpents
dont 30.000 de haute futaie, la superficie des bois, en Bre
tagne (2 '. L'évaluation nous semble un peu inférieure à la
réalité; sans doute faisait-on abstraction d'un assez grand
nombre de bosquets et de taillis de petites dimensions. Quoi
qu'il en soit, le taux de boisement en Bretagne ne devait guère
dépasser 3 % ' C'était insuffisant; les mines et les forges à
elles seules consommaient .le cinquième de la production.
A ce moment, des plaintes s'élevèrent de tous côtés en Bre
tagne, au sujet de la rareté et de la cherté des bois. L'Inten
dant s'en émut et il adressa. en Août 1783, une lettre circulaire
à ses subdélégués pour s'enquérir des causes de la disette et
des moyens d'y remédier. Voici, en ce qui concerne la subdé
.légation de Concarneau, la réponse du sénéchal Du Laurens
(i ) On sait avac quels regt"ets M me de Sévigné voyait son fils abattre
îes belles futaies du Buron. Les grands besoios d'argent créés par le
goût uu luxe et de la vie brilllante au xvn
siècle portèrent maints grands
seigneurs bretons à une exploitation'prématurée et trop intense de leurs
forêts.
(2) Etat des forêts du roi, op. cil. fa 25.
de la Barre. Pour en saisir toute ' la portée, il convient de
remarquer que cette circonscription était relativement très
boisée, assurément l'une des plus favorisées à cet égard dans
toute la Basse-Bretagne. Elle comprenait les importantes
futaies de Coatloc'h, de Cascadee et de Quimerc'h, les taillis
de Pleuven, d'Elliant, du Mur, de Goarlot pour ne citer que
les principaux massifs ligneux. « Tous les champs d'ailleurs,
déclare le subdélégué, sont cernés de fossés sur lesquels crois
sent des bois pour le chauffage. » Cependant, ajoute-t-il, « la
corde de bois se paie g livres . Le prix du bois a beaucoup aug
menté depuis 20 ans, de presque moitié. La corde ne valait
lors que cent sols. On coupe plus qu'on ne plante. Depuis
20 ans, la quantité des bois a beaucoup diminué et, dans
quelques années, on se ressentira de sa rareté. » (I)
Ailleurs, les plaintes sont plus vives. « Il s'opère une dévas
tation générale des bois dont la plus grande partie de la
Province est à la veille de manquer. » (2 ) « Les bois deviennent
très rares dans l'évêché de Cornouaille. Ils se trouvent d'une
cherté si extraordinaire qu'on est déjà surpris d'entendre le
prix d'une pairë de sabots. » (3) Très nombreuses sont, en
178g, dans les cahiers des paroisses, les doléances relatives à
la rareté des bois. Les paysans de Pouldreuzic « remontrent
que les seigneurs fonciers vendent ou, pour mieux dire, ont
presque tout vendu les bois qui croissent sur leurs domaines,
sans qu'aucun d'eux veuille faire aucune plantation pour
l'avenir. De façon que désormais le canton se trouvera hors
d'état de cultiver ses terres, par défaut de harnais et ustensiles
nécessairtls pour les manœuvrer, et même réduit à les qu iller
par défaut de maisons, n'ayant pas de bois pour les relever
quand elles tomberont en ruine (4). »
(i ) Archives d'Ille-et-Vilaine C. i634 .
(2) Arch. du Finistère, Sie B ,cahier de doléanCeS de Pont·Croix, art. 54.
(3) Ibid. Goulien, art. 2
(4) Ibid. Pouldreuzic, art. 6.
Les députés des campagnes de la sénéchaussée de Quimper,
dan s leur adresse à l'assemblée des électeurs du clergé de
Cornouaille, déclarent que « la position de la Bretagne fait
regretter qu'elle n'offre plus ces forêts immenses dont elle
pourrait encore être couverte si les seigneurs avaient rem
placé les bois qu'ils on t coupés ou si les habitants des cam
pagnes avaient eu qu elqu e encouragement pour multiplier
les arbres sur leurs t enues . » (1)
La plupart des cahiers imputent la pénurie des bois à la
nature du domaine congéable ( 2). Sou s ce régime, alors
presque universel en Cornouaille, tou s les arbres, à l'exception
des arbres fruitiers, appartenaient aux seigneurs fon ciers qui
en di sposaient à leur gré. Les domaniers n'étaient nullement
intéressés à la conservation de ces arbres dont ils avaient
cependant la garde. Ils en supportaient les inconvénients
sans compensation suffi sante. « Il n'y a plu s de plantations
d e bois parce que so uvent elles ont servi aux seigneurs m ême
à grever lellrs doma niers. » (3) « Si les domaniers avaient le
droit de couper pour leur usage et de planter, le bois ne
serait pas si rare. Les seigneurs vendent tou s leurs bois de
dessus leurs villages et personne ne plante. G'est ce qui fait
que le pays est tout nu et qu e le bois es t hors de prix. ))(4)
Certains paysan s demandent que la totalité des bois soit à
l'avenir attribuée ·aux domaniers, moyennant une juste
indemnité ; mais la plupart se trouveraient satisfaits, pourvu
(1) Archives du Finistère, S ie B., adre~,e des députés des campagnes ,
20 Avril 1789 .
(2) Il est curieux de constater qu e, lors de son inspection en Basse Bretagne, en 1785, le comte d'Essuite, qui n'était pas brelon, émeUait
une opin ion conrol'me à celle qui sera formulée li, ans plus lard par les
paysans corn ou aillais dans leurs cahiers de doléanc.es. Il jugeait très
sévèrement la nature du domaine congéable qu'il qualifiait de " droit
barbare . » Etat des forêts, op. cil. fO 16.
(3) Archives du Finistère, S ie B., cahier d'Esquihien, art. 3.
« que tout domanier ait désormais la liberté de planter et la
propriété de la moitié des bois qu'il aura élevés; qu'il sera
' L enu de désigner ses b ois su'r ses déclaration s et qu'il pourra
exploiter sa moitié en prévenant le seigneur. )) (1 ') Les m oin s
exigents désirent « que les arbres qui seront sur les fossés
ne puissen t être enlevés par les seigneurs qui détruisent, en
les coupan t, le travail du colon. Ce serait le moyen de mulLi
plier les bois qui diminu ent de jour en jour. )) (2)
Sous la Révolution, quand l'Etat disposa non seulement
des anciennes forêts royales m ais de celles des abbayes et des
grands propriétaires émig rés, les boi s furent exploités avec
encore moins de ménagement. (3) Au ssi Cambry, parcourant
le Finistère, dans l'hiver de 1794-95, constate que la disette
des bois existe dans tout le département. ,( La hache frappe,
abat, détruit, sans qu'une sage économie remplace. Le Finis
tère jadis couvert de bois est, dans sa presque totalité forcé
d'avo ir recours aux landes, aux genets, à la tourbe, à la fi en te
des vach es pour se chauffer, pour cuire ses aliments. » (4)
« Dans le district de Morlaix, on se procure du bois avec la
plus grande diIIiculté ... Brest a tout consommé. )) Même
dan s le pays de Carhaix, « le chauffage est à présent fort
cher ; les mines ont tout consommé ou disposen t de toutes
les coupes. )) (5)
En face d'une crise imminente, quels avaient été les prin
cipes d'économie forestière suivis par les Maîtrises des eaux
et forêts à la fin de l'ancien régime ~ Quelles étaient l'étendue
et la valeur des forêts royales de notre région ~ Comment
étaient-elles gérées ~ Qu elle était leur production annuelle ~
Autant de question s qui DOU S ont paru m ériter une étude
(i ) Arch. du Finistère, S ie B" cahier d'Audierne, art. i6.
(2) Ibid. Kerfeuuteun, art. H.
(3) Camille Vallaux : La Basse-Bretagne, p. 95 ,
(4) Cambry: Voyage dans le Finistère; éd. Fréminville, p. 22.
succincte limitée aux deux circonscriptions forestières de la Cor-
nouaille: la Maîtrise de Carhaix et la Gru erie de Quimperlé. (1)
Les forêts royales couvraient en Bretagne environ 42.000
arpents, soit à peu près le cinquième de la superficie boisée.
Mais la proportion des délaissements, landes et vagues, y était
considérable. 25 % en moyenne, si bien que le sol sous fu taies
ou taillis ne dépassait pas 32 .082 arpents.
Ces forêts ro)'ales, où la proportion des futaies étai t plus
forte que dans les bois pa rticuliers, étaient très inégalement
réparties entre la Haute et la Basse-Bretagne. Alors que plus
de 15.000 arpents se trouvaien t en l'évêché de Rennes et
9 .000 en celui de Nantes, les cinq évêchés de Basse- Bretagne
n'en comptaient, au total, que 7.900, (7 .300 en Cornouaille,
600 en Vannes). Les évêchés de Léon, Tréguier et St-Brieuc ne
contenaien t aucune forêt royale.
La Maîtrise générale des eaux. et forêts de Bretagne se sub
divisait en 9 circonscriptions administratives, 7 maîtrises et 2
grueries qui étaient par ordre d'importance: 1 ° Rennes, 2° Le
Gâvre, 3° Carhaix· Cornouaille, 4° Fougères, 5° Bazouges-Vil
lecartier, 6° Nantes, 7° Vann es . Les grueries de Quimperlé et
de Bosquen étaient rattachées, la première à la maîtrise de
Carhaix et la seconde à la maîtrise de Rennes . (2)
(1 ) Nous avons particulièrement utilis~ pour ce Ira vail les docunlE'nts
suivants conservés aux Archives départementales d'We-et- Vilaine (Sie C.
Intendance. 2
suppl. non inventorié. )
Etat des forêts du roi en Bretagne, reg . in-1° de 334, los, op . cil .
A1nénagement des forêts royales de Bretagne en 1787 et 1788 par
Chaillou l'ainé, i ngén ieu rh yd rographe du roi, reg . in · f" .
En i 91il, quand nous avons entrep ris cette étude, interrompue pal' la
guerre, M. Fatou inspecteur des eaux et forêts il Lorient et 1\1 . Guerles
quin. sOlls-iu specteur à M orlaix, nous ont très obligeamment commuui·
qué d'inlhessants renseignements sur l'état actuel des forêts domaniales
da us le Fi Dis tère .
(2) Cf. R. Durand: Les forêts royales en Bretagne avant 1789. Annales
de Bretagne, janvier 191.7, p. 10 el sq . - Dans celle étude, M. Durand ,
par inadv.ertan ce, évalu p. l'~lJ·pent il 2. ares 34,. JNote 2, pa~e 14,). La 'perche
carree n'etaIt pas de 22 pIeds carres maIs blf' 11 un carre de 22 pIeds de
Maîtrise particulière de Cornouaille
établie à Carhaix
La Maîtrise de Cornouaille avait eu jadis son siège au cbef
lieu du _ comté, à Quimper, mais quand la déforestation se fut
accomplie en Basse- Cornouaille, on tran sféra ce siège à Car
haix, plu s à p ortée de la zone fores tière. (1) La Maîtrise élait
à la fois un e circonscription administra live chargée de la ges
tion des bois du domaine royal et une juridiction royale d'a t-
tribution, compétente pour les délits forestiers. Par l'édit de
1669, «les Grands-Maîtres et, sous eux les maîtres particuliers,
furent faits à la fois gardes des forêts, dénonciateurs et juges
de tou s "les délits et régisseurs absolument arbitraires de tous
les boi s du roi (2). ,)
La Maîtrise d~ Carhaix comprenait 8 offices dont les gages
étaient les snivants : 1 maître parli culier 3681., 1 procureur
du roi, 1931., 1 lieutenant 40 1., 1 garde-marteau 85 1., 1
greffier 9
1., 1 garde-scel 131., 1 arpenteur 50 1., 1 garde go
1. (3) Les gages étaient m odiqu es ; cependant ces offices coû- .
taient un e finan ce consid érable puisqu e ces gages n'en repré sentaient que l'intérêt au denier 40. Toutefois, les officiers n'y
p erdaient sans doute pas ; des errements dès longtemps tolé
rés leur permettaient, d'autre part, de se faire rémun érer
(i ) Les maîtres particuliers prenaient ordinairement le titre de « maître-
, particulier des eaux, bois et forêts de C ornouaille, Léon, Tréguier, grue rie de Quimperlé et annexes. » C't3st ainsi qne s'in li tu lent: en 1682,
Pierre Veller, sieur de Guerdigen; ('n 1.690, François Gilart, sieur de
Larc'hantel, écuyer; eo 1.723, Charles-Louis de Pemndreff, chevalier,
seigneur du dit lieu et de la Châtaigneraie ; en i 733, écuyer Joseph Ol y mant-Keroéguez. (Arcbives du Fillislère, Ponds de la Maîtrise de Car
baix, registres des visi tes genérales de 1690, 1723 et 1733.)
(2) Etat des forêts, op. cit. f
largem ent leurs services. Tous d'ailleurs cumulaient diverses
fonctions plus ou moins compatibles:
Le maître particulier avait été, jusqu'en 1785, Claude-Louis
Guezno de Penanster. (1) Celui ci fut remplacé, le 1 6 avril
1785, par J. Nouvel de la Flèche (2) qui habitait le château de
la Coudraie près du Huelgoat, au Clllltre d'un délaissement
d'une trentaine d'hectares . Le procureur du roi, Proux: (3),
était officier de la compagnie d es mines et résidait à Poul laouen. Le lieu tenant, Yves Pourcelet, cumulait avec ses fonc tions l'office de garde-marteau; il était aussi sénéchal à Car haix: et par surcroît subdélégué de l'Intendant. Le greffier de
la Maîtrise, Joseph Perrault, était en même temps greffier de .
la sénéchaussée, L'office de garde-scel était propriété collec
tive des officiers d e la Maîtrise. Enfin, Olivier des Brulais (4),
arpenteur, et François Le Moing, garde-général, étaient aussi
propriétaires de leurs charges .
. Quatorze forêts dépendaient de la Maîtrise de Carhaix, s'éten
dant de l'est à l'ouest entre Duault et Châleaulin, du nord au
sud, en tre Morlail-; et Gourin. Elles couvraient, enchiiTres ronds
4,900 arpents (2.500 ha. ) d ont 3 .900 arpents étaient censés
sous futa ie et 1.000 sous taillis . En réalité, comme les délais
sements e t les parties vides atteignaient un millier d'arpents,
la superficie boisée ne dépassait pas, au total, 3'900 arpents .
La dispersion de ces forêts éparpillées sur plus dé 60 lieues
carrées était un obstacle à leur bonne gestion; la dispersion
\ 1.) Guezllo de Penansler se relira, sous la Révolution à ~laël-Carhaix.
Son fils ful chef rie chouans et lui-même. après avoir favo risé la chou
annrrie, lut arrêté en 1.804 à propos rie la Conspiration de Cadoudal. li
était oncle du conventionnel Mathieu-Claude GlIezoo de Botsey, d'Au
diel'l1e.
(2) Nouvel de la Flèche lul arrêté à la Coudraie, en août 1.792, sur
ordr~ du district de Carhaix. Il fut le graod - père ùe lVW Nomel de la
[ 'lèche, évêque de Quimper de 1.872 li. 1.887.
(3) Sans doute l'aIeul du barde-chansonnier Prosper Proux:.
des officiers de la Maîtrise en était un autre. « Le maître-par
ticulier habite son délaissement au centre de la forêt du Huel
goa t, ce qui n' es t pas d'un bon exemple; le procureur du roi
résid e à Poullaouen où il n'est à portée ni de son siège ni des
gardes, obligés à chaque évènement de faire un voyage chez
lui, un de uxième chez le màître-particulier et un troisième
enfin à la ville (de Carhaix), le greffier y étant. » (r)
I . FUTAIES
Forêt de Boflval'ec. - La futaie de Bodvarec, situ ée en
Locmaria, trève de Berrien, sur la rive droite de l'Auln e, au
bord de la route de Carhaix à La Feuillée, (2) avait une
superficie de 285 arpents dont 220 réellement boisés . L' es-
sence dominante était le chêne. Les parties les plus anciennes
n'avaient pa s 60 ans en 1785. Cette jeune futai e, assise sur
les schistes carbonifères du bassin de Carhaix-Châteaulin, à
une altitude de looà [50 m. avaitfortbell t' apparence. (C'est,
disait le comte d'E ssuite, la plus superbe et la mieux venante
que nous ayons jamais vue. Dans 50 ou 60 ans, le roi n'aura
pas de plu s belle futaie dan s le royaume.» Le garde habitait
au centre de la forêt et y joui ssait d'un délaissement d'environ
ro arpents. (3)
(i) Etat des forêts, op. cit fo i36.
(2) La route de Carhaix il Landerneau par La Feuillée, ouverte en
1764, facilita considérablement le transport li Brest des bois du Huel goat et · des produits de la mine de Poullaouen. Cette voie était enll'ete nue, entre La E"euill ée et Carhaix, pal' les paroisses de La Feuillée,
Loqueffret, Plouyè, Kergloff. Cléden et Plouguer. Les paroisses rie Poul laouen, Berrien elles trèves de Huelgoat et Locmaria conservèren t leur tâche
SUl' l'ancienne roule rie Carhaix ~ Morlaix. (Arch. d'Ille-et-V., C l~ 883).
(3)Eni690 il n'y avait qu'un seul garde pourlaforêtde Bodvarec. « Le
forestier io uit pour gages d'une porti on de pré valant rie revenu 30 l.
C'est un paysa n nommé d'office que l'on chang~ tous les ,ans » (A l'chi
ves du Finistère, Registres des visites générales, 1.690. Etat des gardes
Forêts de Saint-Ambroise et du Hélas. -
Situées en
Locmaria·Berrien ~ enlre le Squiriou affiuent de l'A ulne et l'an
cienne route de Carhaix à Morlaix, ces deux futaies réunies
couvraient 500 arpen ts dont 360 seulement étaient boisés. A
une altitude de 100 à l go 01 ., elles s' étendaien t, à l'ouest, sur
les pentes g ranitiques du massif du Huelgoat et, à l'est. sur
des terrains de tran sition Les délaissements avoués s'élevaient
à 30 arpents . Les essences comprenaient deux tiers de hêtres
et un ti ers de chênes. 36 arpents de futaie dont 6 « propres
à la marine », avaient plus de 100 ans; 36 autres arpents
« approchaient )} de 100 ans.
Le triage de Saint-Ambroise qui à lui seul con tenait plus
de 600 arpents a u XVII " siècle élait fort réduit en 1785. D'abord
exploité san s mesure par la CI. des mines, il fu t bientôt vendu
à cette Cie , ainsi qu e les bois du Hélas, du Beuchcoat, de
Lestrézec, d u Bruly et de la Grande-Lande, jadis traités en
futaies. (1)
Forêts de lUeinguen, H.uelgoat et Roc·hmarec. Ces
forêts s'étendaient, en la parroisse de Berrien et ses deux
trèves , Huelgoat et Locmaria, sur environ 800 arpents dont
6 0 0 réellemen t b oisés .
A une altitude de 100 à 2 !Om., sur le granit à l'ouest et au
nord, sur des schistes dévoniens au sud-est, ces futaies com
prenaient en quantités à peu près égales du chêne et du hêtre
et aussi quelques bois blancs . La forêt domaniale du Huelgoat .
contient aujourd'hui une forLe proportion de pin sylvestre,
(60 0/ 0), il n 'en était pas de m ême au xvm
siècle.
Soixante-dix arpents étaient au-dessus de 100 ans et sur ce
nombre, I l, arpents étaient jugés propres à la marine. Ces
forêts prod uisaient, année moyenne 2.657 J. Les délaissemen ts
y étaient consid érables. Le maître-particulier Nouvel de la '
(1) Ces bois ont été cédés à divers particuliers en 1865, après la di -
Flèche qu i habitait le manoir de la Coudraie, à 2 km . du
Huelgoat, jouissait à lui seul de plus de 60 arpents. (1)
FOl'êt (lu Fl'é~l1l. - Tout entière en terrain de transition,
à une altitude de 120 à 203
. , la forêt du Fréau couvrait
f .000 arpents dans la paroisse de Poullaouen. Les parties
boisées n'occupaient effectivement que 800 arpents dont 600
seulement en véritable futai e. Le garde j ouissait d'un ta illi s
de 63 arpents à titre de délaissement, ce qui lui tenait lieu de
gages .
Le chêne et le hêtre y croissaient également vigonreux; le
chêne dominait et il était particulièrement estimé dans la
région : « il est regardé dans tous les chantiers comme le
meilleur de la Province. » Cinquante arpents de futaie dont
1 2 pouvaient convenir aux constructions navales dépassaient
100 ans. Cette belle forêt était fort mal aménagée . Les coupes
y étaient très variables; tantôt 3, 6,9 ou 1 l arpents . En 1682,
la cou pe était de 8 arpents 28 perches, dans la forêt du Fréau.
En 1690, le maître particulier écrivait : « Cette forêt est fort
étendue. Il s'y commet tous les ans des vols, pillages et dé
gradations très considérables par les habitants des paroisses
de Scrignac, Carnoët et partie de la paroisse de Poullaouen,
contre lesquels il est impossible de mettre les rôles des amendes
à exécution, qui montent depuis les 10 à 12 ans à plus de 20.000
livres, ou environ , attendu qu'ils sont gens craints et redoutés
(1) En 1690, il n'y avait qu'Uti garde pour la forêt de Roc'hmarcc ; il
était nommé d'office et ne J OUIssait d'arcuns gages. « Il est absolument
nécessaire pour la conservation de celte forêt et empêcher les vols et
pillages qui s'y commettent par les habitants de la ville de Huelgoat de
nommer 2 gardes a vec des gages con venables; autrèment celle forêt sera
en tièrement pillée. »
A la même date, il y avait deux gard es pour la forêt de Mainguen :
Jean Le Coz et Jean Le Menez. « Ces forestiers jnuissent, pour gages,
des bruyères étant dans les landes, aux issues de la forêt, valant de re venu au plus 20 1. )) (Archives du Finistère, état des gardes et
et contre lesquels on poursui t sur instances criminelles, en
exécution d'arrêt du Conseil ... pour cause d'un so ulèvement
et rébellion par eux faits contre 8 officiers chargés du rôle
des amendes qui furent très maltraités à coups de fusils. Pour
pouvoir mettre ce rôle des amendes à exécution , il faut abso
lument que les huissiers qui en seront chargés soient escortés
de IOO dragons et autant de grenadiers. »
« Il est absolument nécessai re, pour la conservation et garde
de celte forêt et empêcher la ruine et destruction en tière par
les grand s vols et pillages qui s'y font journellement et dont
on ne peut arrêter le cours, · d'établir 2 ga rdes à cheval et deux
autres à pied, ou du moins l~ gardes à pied, avec des gages
convenables pour leur subsistance. 1)
« Les 3 forestiers Guillaume Pasquiou, Jean Le DuIT et
Joseph Le Fon qui en ont la garde sont nommés d'offi ce et
ne jouissent pour gages que de quelques landes et pièces de
terre frostes, aux issues de la forêt, et valant revenu d'environ
l~o 1. » (1)
En 7 ans, de 1777 à 1783, il Y fut vendu 29 arpents 58
perches qui rapportèrent 22 .610 livres, soit un produit m oyen
annuel de 3.230 1. L'arpent de futaie était donc vendu sur
pied, environ 769 1. La majeure partie de ces bois
sommée par la mine de Poullaouen . (2)
etmt con-
Forêt de Lémézec. - Sur la rive gauche de l'Aulne, dans
l'angle N. O. de la paroisse de Poullaouen, la forêt de Lémé
zec contenait 207 arpents dont 170 de futaie. Le hêtre s'y
(1.) Archives du Finistère, Registres des visites générales, 1682 et
1. 690 .
(2) D'après un état fourni par le dislrict de Carh aix, le 7 pluviôse an
III, il existait dans la commune de Poullaouen environ 6.000 arbres
dont 3.600 hêtres et 2.400 chênes susceptibles n'être exploités . Dans
la commune de Locmaria, il y avait 1. HO hêtres et 740 chênes . Le
district en tier pouvait fournir 1.3. 790 chênes et 7.700 hêtres. (Arch. du
Finistère L. 31. 7 )
trouvait dans la proportion de 75 % ; le res te était formé de
chênes « mal venants. » 50 arpents dépassaient 100 ans, mais
aucune ven te n'y avait été faite depuis 1777. Qu elques hêtres
seulement étaient propres à la marine.
Bois du Nel'go'lt. Ce bois qui devait contenir 83 arpents
venait d'être aliéné. En 17811, le domaine céda à la Ci' des
min es 76 arpents de belle fulaie pour la somme de 15 .000 1.
Selon l'estimation du comte cl'Essuite, cette futaie valait au
moins 60.'000 1.
Forêt de Coatbihan. - Située en Plonévez-du-Faou, à
mi-chemin en tre Plonëvez et Landeleau, devait con tenir 239
arpents . Il n'en subsistait que 120 arpents de futaie dont un
tiers de très beaux hêtres, un tiers de mauvais chênes e t. le
reste de bois blanc. 10 arpents avaient plus de 100 ans , 1 2
autres plus de -90 . (1 )
Forêt de Duault. Située en Saint-Servais, trève de
Duault, cette futaie dessinait un long croissant sur le rebord
occidental du ma ssif granitique de Duault· Quintin. Elle figu
rait sur les états de la Maîtrise pour 832 arpents, mais · 680
arpents seulemen t étaient sous futaie dont trois quarts de
hêtres et un quart de chênes . « Les baliveaux dans cette forêt,
ainsi que dans presque toutes les autres réussissent fort maL
Ils sont abattus par les vents ou s'ils résistent, ils se couron nent et restent en forme de pommiers. »
Cette forêt d'un meilleur rendement que celle du Fréau, .
produisait année commune 4 .06 1 1. Il n'y avait qu'un seul
(1) Mathieu Le Page et Gilles Lalouet sont, en 1690, ga rd es de la forêt
de Coalbiban. « Ces forestiers, pour leurs gages, ne jouissent que de
quelques pièces de terre frostes, aux issues de la .dite forêt, valant au
plus revenu de 20 1. Ce sont des paysans villageois . 1) (Archives du
garde ; il en eû t fallu deux , étant donnée son ex tension en un
ruban de plus d'une lieue.
Dans la région de Duault on faisait beaucoup de charbon
qui se transportait à Callac, à Morlaix et à la mine de Poul
laouen . C'était un centre actif d'industries de la forêt. Outre
les bûcherons et les charbonniers, de nombreux sabotiers des
fabricants d'outils et d'ustensiles en bois vivaient clan s des
" loges" su l' la lisière de la forêt. ( [)
II. TAILLIS
Taillis de Bl'oès. Sur la rive gauche du Ster-Goan ez, en
Châteauneuf-du-Faou, ce bois, traité en taillis à la révolution
de 25 ans, couvrait 125 arpents . Presque tout entier en
chêne, il ne contenait ni balivea ux ni arbres de lisière. « Le
sol convient parfaitement au bois : il y croît d e toute beauté.
Aucune forêt du roi en Bretagne n'es t aussi bien conservée
et close. » Les délaissem ents a voués par le garde étaien t des
terrain s d'une valeur locative de 100 1. ; en réalité, ce garde,
comme les au tres, outrepassait son droit car, écrit le com te
d'Essuite, ~ ce qu'on nous a dit lui appartenir doit produire
plus de 300 1. »
Taillis (le Benc'bcoat. (Berrien). - Contigu à la forêt du
Hélas et jadis comm e elle traité en fu taie, le Beuc'hcoat
n'était plu s qu'un taillis de 200 arpents de hêtre et de chêne.
Quelques arbres de lisière subsistaient à l'ouest. Les délaisse
ments avoués s'élevaient à 10 arpents .
(i) En 1683, la conpe était de 5 arpents et drmi, dans la forêt de
Duaull. Il n'y ava itqu'un seul forestier: Michel Guezno en 1683, Denis
Bahezre en i690 «Ce forestier joui t pour gages de quelques pi èces de
terre, près le taillis de Moëlan, pouvant lu i produire par an 50 1. ou
environ. Il esl nécessa ire d'établir 2 gardes p OUl' celto forêt qui co ntient
près de 2 lieues de longueur; autrement cette forêt continuera d'être
Le Pal'c-au-Duc. Le taillis du Parc-au-Duc qui figurait
encore au XVIII' siècle sur les états de la Maîtrise de Carhaix
était un lambeau de ce « beau, grand et spacieux parc ferm é
de hautes murailles 9 situé aux portes de Morlaix et où, au
moyen âge, lès ducs de Bretagne se plaisaient à chasser. Ce
parc, qui avait au XVe siècle une superficie de 688 arpents
dont 412 en taillis (1), était réduit au début du XVIII' siècle
à J75 arpents. Le reste. peu à peu était sorti du domaine
royal par suite d'afféagements ou d'usurpations. Vers 1784,
ce bois presque entièrement détruit avait été afféagé par Suffren
de Saint-Tropez.
Forêt de Lestl'ézec. (Berrien). Taillis de chêne à la rho·
lution de 25 ans; 300 arpents dont 12 délaissés au garde. (2 )
Bois de la. ~Iotte. (Poullaouen). 56 arpents presque tout
chêne, traités à la révolutiD n de 25 à 30 ans.
Bois de Quilvel'n et du Duc. - Ces bois silués en Spézet
contenaient 75 arpents. Jadis, ils avaient été traités en futaie ;
en 1785, le tout se trouvait sous taillis. Le chêne dominait
mais il existait une notable proportion de bouleau. Les délai s sements avo ués s'élevaient, en principe, à 5 arpents; ils
s'étaient accrus progressivement, si bien que le ga rde à lui
seul jouissait d'une « véritable métairie valant 300 1. par an. )l
(1) Cf . Le Guennee : Excursion dans la commune de Plourin-Tré
guier, dans le Bull. société archéol. 190t" p. M.
(2) En 1.690, il Y avait 2 gardes à la forêt de Leslrézee . «Ces for es tiers sont nommés d'o[fiee ct n'ont point de gages . Dans ce tte forêt, il
se commet tous les ans quantité de vols et pillages par les habitants de
Scrignac qui sont gens craints el redoutés et contre lesquels on ne peut
mettre les rôles des amendes à exécution, faute d'hui ssiers qui ,,:oulus sent s'en cbarger. II
Le Beue'heoat et le quartier du HeH as avaient aussi 2 gardes : Pierre
Coent et Guillaume Le Seoua1'llee, également · nommés d'office. « L~s
vols sont encore en plus grand nombre, surtout dans le quartier du Hd
Le Bois du Duc. - Près de Châteaulin,
de l'Aulne, dans une boucle de la rivière,
sur la rive gauche
en face de Port-
Launay. C'était une dépendance de l'antique Castel-Nin, un
débris, sans doute, de cet immense Parc-au-Duc, clos de murs,
qui au moyen-âge s'étendait au sud de Châteaulin jusque vers
Cast et la chapelle de Notre-Dame des Fontaines. (r)
Ce bois qui au XVIIe siècle s'étendait encore sur 70 arpents
n'en comptait plus que 20; 50 arpents avaient été usurpés
par les riverains et le res te était ( totalement abandonné
comme terrain nul. » « Les officiers de la Maîtrise, celui même
des Domaines ignoraient en quel lieu il avait existé et nous
n'avons pu le découvrir qu'en payant abondamment un vieil
lard de Châteaulin qui craignait de se compromettre vis à vis
des usurpateurs»
III. PRODUOTION FORESTIÈRE
Ces forêts étant mal aménagées et les coupes irrégulières,
la production annuelle était nécessairement très variable. Il
est possible cependant de se faire une idée approximative du
rendement forestier en considérant une période suffisamment
étendue. En 7 ans, il fu t vendu dans la forêt du Fréau 29
arpents 58 perches de futaie qui rapportèrent 22.6ro 1. Dans
la même période, de 1777 à 1783, dans l'étendue de la Maî
trise, le total des ventes s'éleva à 553 arpents de futaie et
taillis . Les adjudications montèrent à 153.5IO 1. Il était perçu.
en sus, un droit de 26 deniers par livre, soit r6.6IO livre 5.
Les amendes ayant été de 2. r39 l., le produit total fut de
17 2.813 1. Dédu ction faite des gages et vacations des officiers
et préposés, il resta net au trésor 166.1401.
Ainsi, la moyenne ann uelle des ven tes ressortait à 79 arpents
produisant 23 734 1. La superficie des forêts de la Maîtrise
(i ) cr. Toscer : Le- Finistère pittorèsque, t. Il. p. 102 .
étant de 4.904 arpents, l'arpent rapportait en moyenne 4 1.
I7 sous. C'était un revenu annuel de 9 fI'. 50 à l'hectare.
Gruerie de o.uimperlé
La Gruerie de Quimperlé comprena it :J. 900 arpen ts
(1.479 h a) , se décomposant comme suit; bois 2.506 arpents,
landes 34, délaissements aux officiers ;4, délaissements aux
gardes 248, en maisons et terrains aux gardes 5, en afTéage ments 23, en usurpations J 3. Les parties réellement boisées
contenaient environ 2.000 arpents de futaie et 500 arpents de
taillis (1) .
La Gruerie de Quimperlé eût pu être avantageusement
annexée à là. Maîtrise de Vannes « dont les soins se bornent à
un bouque~ ·de bois de 500 arpents ». Celte circonscription se
maintint cependant par la force de la tradition et peut-être
aussi, par l'influence du Grand-Maître des eaux et forêts de
Bretagne, Du Couédic, qui résidait à Quimperlé.
La Gruerie comptait 6 officiers. Le juge- gruyer, Joseph
Hyacinthe Frogerays (2) avait 671. de gages; le procureur du
roi, Capitaine du Boisdaniel (3) 601., le greffier Claude I-lervo
20 1. , le garde-marteau, Guillaume Le Gallic 201., l'arpenteur,
Huo de Querio 23 L, et le garde général Al. Dubois 135 1.
Celte Gruerie, quoique résidence du Grand-Maître, fut sévè-
Ci) Aménagement des forêts royales, passim.
(2) J.-H . Frogerays fut maire de Quimperlé en 1789. SOIl père, Robert
Frogerays, sieur de Sl-}Iandé, était en i 756 subdélégué à Quimperlé.
(3) Bonaventure-René-Augustin Capitaine du Boisdaniel avocat à
Quimperlé, élu en juin -1.790 procureur général syndic du département
100
remen t appréciée par le comle d'Essuite. « Les forêts qui en
dépendent sont en aussi mauvais état que les autres. Les
délaissements y sont si multipliés qu e su r ~eur excès on a fait
des traitemen ts à des gardes de la Maîtrise de Carhaix »
I. FUTAIES
Forêt de Cal'lloët. - Assise sur le granit, à une altitude
de 6 à 7511l dans les paroisses de Lolhéa et de Clohars-Carnoët,
cetle forêt avait un e superfi cie de 1.600 arpents dont
1.000 seulement sous véritable fulaie. Le chêne et le hêtre
élaient les essences dominantes et s'y trouvaient en quantités
. à peu près égales. Çà et là on y rencontrait du buis et quelques
bois blan cs. Cette futaie mal aménagée, traitée à la révolution
de 100 à 1 JO ans produisait, année commune, 9.432 1. Les
coupes y étaient de 8, 9 ou ra arpents. Les gardes , au nombre
de deux demeuraient à Lolhéa.
« Les bois de Carnoët quoique médiocres en beauté se ven
dent fort cher à cau se de la facilité de les embarquer sur la
ri vière de Laïta que les barques remonten t facile men t au
moyen du flux, jusqu'à la forêt même où elles viennent les
prendre pour les porter à Lorient n .
Tous ces bois étaient consommés par la marine comme
bois de charpente, bois de corde ou charbon. Sur la vente de
. chaque année on délivrait aux religieux de St-Maurice 50 cordes
de bois et autant aux Jacobins de Quimperlé.
Dans la forêt de Carnoèï et St-Maurice, en 1682 , la coupe
était de 9 arpents 84 perches. Elle fut achetée, cette année là,
pa r le sieur Olliveau, marchand .
En 1690, le maître particulier écrivait : cc Cette forêt est des
pl us grandes. On y commet encore journellement des pillages.
vols et dégrada tions très considérables, tant par les habitants
de Quimperlé que par les troupes qui y sont en quartier. L'on
-101 -
assure m êm e qu'il y a dans cette ville, actuellem ent, plus de
2 0 0 hommes et femmes, gueux et sans biens, qui ne viven t
que par les vols de bois, qui vont journ ellem ent dans ce lte
forêt, venden t aux habitants dudit Quimperlé, avec lesquels
ils font com merce de tout temps. »
« Il serait nécessaire d'établir 2 gardes à cheval et 2 autres à
pied, avec des gages convenables, et de faire donner un arrêt
qui condamnera les habitants de Quimperlé aux amendes et
restitution s prononcées contre les dits h omm es et femmes,
gueux et sans bien s, et les soldats de m arine, attendu qu'ils
leur donnent retraite et font commerce des dits bois volés,
avec eux , nonobstant les défenses qui ont été plusieurs t'ois
publiées au dit Quimperlé.
« Les 3 forestier s actuellement en charge, Pierre Queille,
Pierre Pasquiou et Jean Pasquiou, sont des villageois riverain s
nommés d'office, L ou s les ans, ne jouissant pou r gages que
de quelques pièçes de terre fros tes, aux issues de la dite forêt,
valan L 40 1. de ren tes en viron (1) )) .
Forêt de Coatloc·h. Située sur la rive gauche du Ster-
Goz affiuent de l'A ven , celte forêt de 600 arpents ne contenait
que 450 arpents de futaie. Le hêtre dominait, « venant au
mieux )) ; le chêne, dans la proportion d'un quart y était
parfois « dépérissant et mal venu ». Exploitée à 100 ou J 20 an s,
les coup es y étaient d'environ 4 arpents et produisaient année
moyenne 5 .930 1. « Ces bois servent à la m arine soit en char
pente, soit en merrains ou en charbon qui sont transportés à
Lorien t et à Concarneau; ils se vendent fort cher ».
A partir de 1787, la coupe fut portée à 5 arpents à la révo lution de 1 20 ans. L'exploita tion semble- t-il ne se faisait pas
avec beaucoup de m éthode et cela tenait sans doute au mau
vais état des routes . « Si l'on rassemblait les beaux arbres que
102
l'on trouve épars de tous côtés, sans qu'on puisse imaginer
pourquoi ils ont été laissés, on n'en trouverait guère moins
de 700, presque tous propres à la marine. » (1).
Le garde résidait au centre de la forêt (2).
TAILLIS
Bois du Due. Sur la rive gauche de la LaHa, en
St-David, trêve de Redené, ce taillis de 65 arpents de chêne
était exploité à 25 ans. Le comte d'Essuite estimait qu'étant
donnée sa situation avantageuse, il y aurait eu grand profit à
l'aménager en futaie. « Chaque arpent de ce taillis à 25 ans
doit être vendu 200 1. Mis en haute futaie, à 100 ans, chaque
arpent, vu sa situation. serait vendu [00 louis n.
Bols de Pleuven. En St-Yvy, trêve d'Elliant, ce taillis
contenait 300 arpents . Le chêne y croissait parfaitement, mais
la Gruerie forçait les coupes qui étaient de 18 arpents à 15 ans .
Ce taillis rapportait, année commune, 2.31 [ 1. « Le garde de
ce bois est boucher à Rosporden et y demeure. Il s'est pres
crit d'y venir une fois par mois et paraît tenir parole. On ne
l'y voit pas plus souvent. »
(i) Dix ans plus tard (i 795), Cambry faisait la même remarque :
cc On a iq, coupes de 5 arpents à faire encore dans celte superbe forêt;
mais les charrois y sont d'une telle difficulté qne j'ai vu des bois équar
ris perdus dans les broussailles, abandonnés par leurs propriétaires l).
Cambry prétend que la forêt de Coatloc'h fut un rendez-vous de chasse
des Ducs . « On y voit; dit-il. les débris d'un antique château ... Cette
forêt était entourée d'un mur épais dont on voit encore les ruines. »
Voyage dans le Finistère, p. 398.
(2) En f690 , il y avait 2 gardes pour la forêt de Coatloc'h : Jérôme
Ln Beuz et Yves Derrien. « Ces foresti ers ont 601. désignées â prendre
sur les amendes prononcées par la Gruerie, desquelles on ne reçoit rien,
étant prononcées contre des gueux et, à supposer qu'ils recevraient, c'est
une très médiocre somme pour garder cette forêt » (Etat des gardes et
" . 103
Bois d"Elliant . . - Dans la paroisse d'Elliant, sur la rive
rlroite du J et; taillis de 130 arpents dont 3/ 4 de chêne et le
reste de bouleau. Les bois y étaient de bonne quali té ; ils
s'exploitaient à 25 ans. Les délaissements étaient importants
et la lisière avait été « déchiquetée par les usurpations». Dans
le voisinage, des landes considérables appartenaient au roi.
Le moulin du Duc situé à proximité avait été afféagé ainsi
qu'un c( pré superbe» qui en dépendait (1).
Taillis de ~Ioë]all. Au milieu d'une lande immense, au
bord de la route de Moëlan à Quimperlé, ce taillis autrefois
considérable était réduit à moins de 60 arpents. « On a usurpé
sur ce bois de Lous. côtés. Un beau taillis à des particuliers
pourrait être un d es débris de la taille de Moëlan. Il Bien que
silué en terrain plat et à proximité de la mer, ce taillis avait
été laissé dans un abandon déplorable. Pourtant le chêne )'
était « très bien. venant et pouvait être laissé à grand âge avec
sucees. »
III. P:R.ODUCTION DE LA GRUERIE
La moyenne annuelle des coupes de futaie était de 10
arpents dans la forêt de Carnoët et de 4 dans celle de Coatloch.
De 1777 à 1783, il fut vendu au total, dans la Gruerie, :.124
arpents de bois dont 98 d e futaie et 126 de taillis pour la
somme de 124.6791., )' compris le droit de 26 deniers par
livre. Déduction faite des gages et vacations, le produit net
(1) Dans ce hois d'Elliant, on signalait en 1785 , les débris d'un
ancien château consistant en des fossés et des monceaux immenses de
pierres culbutpes au hasard. sans vesli f.es de ciment ni de mortier ». Ce
sont sa us do ute les ruines décrites par M. Villiers du Terrage dans ses
« Notes sur les anciens chemins de la paroisse d'Elliant», dans le Bull.
-104 -
fut de 123 . 171 1., soit.un revenu annuel de 17.596 L produit
par 2.755 arpents. Le revenu moyen était donc de 6 L 8 sous
par arpent ou 12 fr. 50 par hectare.
rendement en Cornouaille
En résum é, pour l'en semble des deux circonscriptions fa l 'es tières de la Cornouaille, 7.659 arpen ts de forêt,s fournissaien t
JI' arpents de coupes annuelles valant 4' .330 L Ain si, le
revenu moyen de l'arpent était de 5 L 8 sous, soit par hectare
10 fI', 60,
Le comte d'Essuile estimait que dans la Maîtrise de Carhaix
les coupes annuelles auraient dû être de 98 a /'p~nts au lieu de
79 et, dan s la Gruerie de Quimperlé, 44 au lieu de 32. Un meil
leur aménagemen t. tau tes choses d'ailleurs restan t égales.
eût augmenté l'étendue des coupes d'enviL'On 30 0/ 0. En
d'autres termes, il résultait de son inspection, qui paraît avoir
été consciencieuse, que près d'un tiers de la superficie pré-
tendue boisée res tait improd uctif. (1)
(i ) Une comparaison exacte entre le rendemen't ancien et le reudement
actuP.\ t'st dirficile à établir. Elle exigerait uue analyse détaillée de tous
les aménagements. D e plus, dt'puis 130 ans, les éléments qu i peuvent ser
vir de base aux calculs ont considé rnblement varié eu quantité et eu
qu~ lité . D es facteurs nouveaux. perfectionnement des moyens d'exploitation
et de transport, introù uctiou 'd'essences nouvelles dans les peuplements,
ont moùifié l~s données anciennfs, Enfin . dans la sylviculture, en ce qui
'concerne surtout les futaies. les améliorations ne portent tous leurs résul
tats qu'à lrès longue échéance.
105 _.
Les abus
Des étendues immenses ayan t été déboisées auraien t dû
être replantées Ces terrains abandonnés devenaient des lan
des improductives. Alors se présentaient des spéculateurs
avisés qui en obtenaient la concession à vil prix. (( Il s'est
établi sur les laodes innombrables qui appartiennent au roi
un monopole odieux par des négociants et gentilshomm es. Ils
ont obtenu, ils sollicitent encore des concessions immenses
de ces terrains. L'administration les accorde avec empresse
ment, croyant en accélérer la culture. L'unique spéculation
. de ces concessionnaires c'est d'arrenter en détail aux simples
journaliers, à 6 1. par an, l'arpen t dont ils ne paient au roi
que 6 sous. » (1)
Les officiers et préposés des maîtrises n'ayant que des
gages dérisoires se recrutaient mal. (( On n'exige d'eux
aucune connaissance des fon cti ons vraiment importantes
qu'on va leur confier. Un certificat de catholicité et de bon
nes vi~ et mœ urs leur suffi t. C'est assez qu'ils fournissent une
En période normale, (1913) le produit brut dt>s forêts domaniales du
Fini stère s'est elevé à 212.24.2 fI'. Défal ca tion faite du produit dt>s dunes
et çlcs traitements des agents des eaux et forêts, on peut évaluer à envi
ron 183.000 II'. le produit net des 3.41.9 ha. de forêts régulièrement
aménagées, soit un revenu de 53 Il'. 50 à l'hecta re.
En 1785, ce revenu n'était que de 10 Ir. 60; ainsi, nominalement, le
revenu net aurait été quintuplé. Mais il faut év idemment tenir compte de la
diminution du pouvoi r d'achat des monnaies. Eu admettant que l'indice
d'augmentation du prix des bois , entre i785 et 1913, ait été de 2, 5 ou
mêllle de 3, il en résulterait que le rendement à l'hectare aurait été accru
de 70 il 100 01 0 L'améliol'ation a porté à la fois sur la qualité et sur la
quantité : sur la qualité par l'allonge ment des l'évolutions, tant dans les
futaies que dans les taillis, sur la quantité par le reboisement des parties
jadis improductives. Le mérite en revient pour une large part à l'admi
nistration des eaux et forêts dont la ges tion, depuis un sièc le, a été plus'
éclairée et plus con sciencieuse que celle des anciennes Maîtrises.
106 .. -
fi nance considérableà un demi pour cent d'in térêt. Co mm en t n e
p as soup çonner leurs vu es lorsqu'ils font de tels sacrifices ~ (r)
Naturellement. offi ciers et gardes p arven aient n éanmoins à
rendre leurs o ffices profita bles. Leurs expédients trouvaient
des circon stances atténuantes : « on en avait fait en quelque
sorte, des troupes légères qu'on privait de p aie parce qu'on
leur p ermettait de m ettre le p ays à contribution. )) En
somme, concluait spirituellement le comte d'Essuite, « les
gardes des forêts du roi en sont les destructeurs privilégiés.
Que p eut-on attendre d 'un journalier à qui l'on donne au
plus 80 1. de gages pour sa n ourriture qui seule lui coûte
200 1. ~ Il suffit qu'il accepte un tel pos te p our décid er qu'il
est un fripon. » (2 )
D' anciens errements, p eu il p eu érigés en principes, avaient
p ermis aux. offi ciers et même aux gardes de cultiver à leur
profit des délaissements des forêts qui leur étaient confiées,
pour tenir lieu d'au gm entation de gages . Le maître-particu
lier put mettre en valeur jusqu'à 200 1. de revenu et ses
subordonnés, en prop ortion . Les délaissements furent tou
j ours ch oisis dan s les m eilleurs terrain s et san s cesse agran
dis bien au-delà du revenu de 200 1. Dans les m oindres forêts,
comme à Quilvern, de simples gardes eurent de véritables
m étairies et l'on p eut croire que ces métairies furent bien
entretenues, au détriment de la sylviculture. De plu s, de
n ombreu x bestiaux étaient nourris toute l'ann ée dan s les
forêts.
{( NuUe administration n' es t moin s en règle qu e celle des
(i ) Ibid. fo26-27 .
(2) Au XVlT
siècle, par un erremcnt déplorable, on renouvelait
chaque année les ga rd es et verdiers. « Il est fi remarquer que tous les
ans et lors de la visite générale dans les forêts ail c.hauge de gardes et
verdiers et le procureur dn roi en nom" me d'~utres en leur lieu R t place,
lesquels sont des paysans et villageois riverains ries dites forêts qui n'ont
107
bois : tout y es t arbitraire », disait l'inspecteur. Les ventes
étaient sou vent retardées mal à propos, les coupes déplacées
abusivement. Chose plus grave, les adju dica taires étaient
so uvent choisis par les officiers. Il y avait, en effet, peu de
concurrents sérieux aux ventes : c c on connaissait trop le
danger de s'en charger malgré les offi ciers . ) ) (1 )
. Les incendies étaient fréquents parce que les gard es. affer
mant la pâture dans les forêts, accordaient la permission d'y
brûler les feuill es sèch es, D'ailleurs, le public prétend ait qu e
« la légère inflamm ation des feuill es dans un demi a rpent de
bois était un prétexte pour en recéper dix bien venants et
sains ; qu e la combu stion des feuilles seulement était un
moyen de supposer le tout réduit en cendres et de vendre le
prétendu recépage à vil pri x. " Enfin, les ga rdes permettaient
d'arracher des plants dans les forêts et pactisaient presque
toujours avec les délinquants.
Au xvn' siède, les vols de bois, dans les forêts de la maî trise de Carhaix, s'opét·aient sur une vaste échelle. « Il est
absolument nécessaire pour empêcher le commerce très con
sid érable q ui se fait, en la ville de Morlaix, par les riverains
des forêts de Botva rec, Rochmarec, Main guen, Lestrézec,
Beuchcoa t, Le RelIas , Lemézec, Nergoat et Le Fréau, des bois
qu'il s volent dans les dites forêts et qu'ils rédui sent en poutres
et poutrea ux, chevrons et autres bois de charpentage, plan ches, tirants, lattes, sabots, essieux de charrettes et autres
ouvrages, d'établir un commis en ladite vill e de Morlaix, à
l'entrée d'icelle, avec des gages co nvenables, lequ el aura tous
pou voirs et comm ission de voir et visiter tou tes les charrettes
de bois et charpentages, planches ... , Ces bois devront être
martelés du m arteau de l'adjudicataire des parcelles , dont on
lui remettra les emprei ntes. conlorm ément à l'ordonn ance,
fau te de quoi, il lui sera permis de les arrêter et confi squer même
108 -
les harnais, charrettes et chevaux, au profit du roi, et en
outre des p eines et amend es contre les marchand s qui les
auront ach etés ou qui commerceront avec lesdits voleurs. De
cette manière, on arrêtera le cou rs du grand commerce, qui
se fait dans cette ville de Morlaix, des bois volés des dites
forêts, que l'on prétend monter à plu s de 10 à 12.000 livres
p aran (I ). ») .
Les forêts et les mines
Les min es de Poullaouen et du Huelgoat situées au cœur
de la Maîtrise consommaient des quantités énormes de bois.
La majeure partie des coupes du Fréau, du Hélas- Sain t -Am
b roise, du Beuc'hcoat et du Huelgoat était chaque année
·adjugée à la Compa gnie, à des conditions touj ours avanta
geuses . L'ad ministra tion royale protégeait et encoura geait la
0 ; par tous les moyens. Un officier de la compag nie remplis sait les fonctions de procureur dl1 roi à la Maîtrise et ce cumul,
san s doute, ne tenait pas au seul hasard . Dans la forêt du
Fréau où les bois étaient eX 'cellents et justement réputés , l'ar pent de futa ie au-dess us de [00 ans ne rapportait q n e 769 1. ;
l'arpeut dans les mêmes conditions, rapportait 943 1. à Car
noët et 1482 1. à Coatloc'h.
Il es t certain que les intérêts du trésor furent parfoi s scan
daleusemen t lésés. En 1784, ( le roi accorda, sur des exposés
peu exacts, la totalité de la forêt du Nergoat, contenant 76
arpents de fu taie superbe et trop jeune encore. L'adjudication
(1) Archives du Finistére, état des gardes et verdiers.
-109 -
à laquelle il ne fut point reçu d' enchères fut faite (à la compa
gnie des mines) pour 15.000 1. Cette futaie valait au-delà d e
50.0001. » (1) . L'exploitation des mines de Poullaouen et du
Huelgoat fut donc, sans nul doute, onéreuse pour la Maîtrise
de Carhaix.
Vers 1785, ces mines produi saient: argent en culots,
27°.0001., plomb en saumons, 347.000 1., soit un produit
total brut de 617.500 1. (2). Le comte d'Essuite, qu'un zèle
ardent p ortait à la d éfense des forêts, disait, avec un peu
d'exagération peut-être .: « Les mines consomment une telle
quantité de b ois qu' elle dépasse la valeur du prC?duit » ; il
ajoutait: « Si cette mine continue d'être exploitée 10 ans
encore, elle anéantira les res tes de ces forêts autrefoi s superbes
e t tres lmportantes encore» .
On accusait les mines d e bien d'autres méfaits. Non seule
m ent « elles privent la province d'une partie de son chauf
fa ge » et « le canton des bras nécessaires à la culture », mais
« elles sont les ennemies de tout ce qui est vivant aux envi ron s ». « Les mines de plomb sont toujours chargées d'arsenic.
On lave les min es ; toute la rivière y est employée et son eall
en so rt laiteu se et épaissie d e tout l'arsenic qu'elle a dissous
et qu'elle p orte à plusieurs lieu es plus bas . Lorsque la rivière
d éborde , tous les prés qu'elle a m ouillés, jusqu'à 2 et 3 lieues,
son t brûlés comme si la flamme la plu s ardente y avait passé .
Les fumées des fourneaux sont pestilentielles ». (3).
(i ) Ibid. Io i37.
(2) En i8H, « les produits estimés 500.000 francs, ne couvraient
plus les Irais d'exploitation » . H. B. de la Rogerie : 1nt7"oduction, op.
cil. p. CCV.
(3) « La déplorable prodigalité qu'elle (la Oe) mit à abattre de beaux
mass ifs de bois n'est pas douteuse ; la pollution des eaux et la destruction
ri e la végétation, le long des rivières qui recevaient les écoulements de
la mine, furent juridiquement établis» . H. B. de la Rogerie : 1nt7"0-
duction, op. cil. p. ccm.
-110
Les
nouvelles forêts domaniales
Depuis 1783, l'Etat a vendu à des particuliers 1.142 b. de
bois dêpendan t des anciennes forêts royales de la Cornouaille,
(337
de futaie et 765h. de taillis). A l' exception du taillis de
La Motte conservé par l'Etat et actuellement traité en futaie,
\ L ous les taillis de la Maîtrise de Carhaix ainsi qu e ceux de la
Gru erie de Quimperlé appartiennent auj ourd'hui à des parti
culiers. Les futai es vendu es ont été détruites: de celles du
Hélas-Saint-Ambroise, il ne subsiste que 87 ha de taillis
exploités à 1 2 ails. Celle du Coatbihan est réduite en taillis à
18 ans. Les tailli s de Broès, Beuc'hoa t et Lémézec sont exploi
tés à 1 2 an s ; celui de Quilvern à 18 an s.
Par contre, depuis la Révolution, le domain e de l'Etat, en
Cornouaille, s'est enrichi des deux belles forêts du Cran ou
(606 ha) et de Landévennec (470 h') . Ces forêts, d'une superficie
à peu près équivalente à celle des taillis alién és , sont d'un
bien meilleur rapport. .
Forêt de LaJl(lévennec. Elle comprend les deux: bois
du Folgoat et du Loc'h, auj ourd'hui traités en taillis sou s
futaie, à la révolution de 30 ans. Ces taillis dépendaient de
l'abbaye de Landévennec. Presque tout entiers en chêne, ils
étniént, avant la Révolution, exploités à 25 ans. Leur situ ation
avantageuse, au bord de la m er, non loin du port de Brest,
les rendait d'un excellent rap port. D'une superficie d'environ
620 arpents, il s étaient, en 1780, affermés à bail, pour 9 ans
au sieur Nou vel, du Faou, à la charge : 1 ° de payer 5.000 1.,
de prix: de fermage, 2° 18 1. au garde pour bougie, 3° d'envoyer
6 cordes de bois au receveur de l'abbé, 4° de ne point faire de
111
charbon, 5° de fournir caution (1). A ce compte, l'arpent à
25 ans devait rapporter à l'abbaye environ 204 1., soit un
revenu moyen de 81. 4 sous par arpent ou 16 fr. 13 par hec-
tare.
Forêt du Cl'allOU. Située dan s la paroisse de H anvec
et dan s sa trêve de Rum engol, elle couvrait environ 1. 200
arpen ts en futai e et taillis don t 2/3 d e chêne et J /3 de h être.
Ancienne possession des vicom tes du Faou, le Cranou appar
tenait avant la Révolution a u marqUis de La Gervesais, lVlagon
de la Lande.
Les bois du Cranou exploités pour le compte d e la marine
. étaient transportés au Faou puis embarqués pour Brest (2).
Cette forêt devenue domaniale n'était pas encore régulièremen t
aménagée en 1836 (3). Depuis 186 [, elle est traitée en futaie
régulière par la m éthode du réensemencement n aturel et des
éclaircies, à la j'évolution d e J 50 ans.
JEAN SA VINA .
(1) Archives du Finistère. 2 H. 25. Un arrêt du Conseil, en date
du q,. Juillet 1.693, avait fixé la portion de l'abbé à environ M9 arpents
et celle des religieux à 71.. Suivant sentence du Grand-Mai tre des eaux
et forêts, en 1.752, su r les coupes annuelles, il revena it à l'abbé environ
22 arpents et aux religieux 2 arpents 815 perches . (Ibid. 2 H. 215).
(2) En 1720, le sieur de la Morinière, éc rivain du roi, était cbargé
de l'économie de l'ex ploitation de la forêt du Cranou. (Arch. du Finis-
tère,E.SS7. ) .
(3) E . Souvestre : Le Finistère en 1836, p. 221.
-174 -
DEUXIÈME PARTIE
Table des Mémoires publiés en 1921
PAGES
l Claude de Rohan, évêque de Cornouaille (1479-15'10)
par If. DU HALGOUET. . . . . . . . . . . . . 3
JI Laennec après 1806, d'après un livre récent, par le
Dr LAGRIFFE . . . . . . . . . . . . . . .. 9
III Deuxième campagne de fouilles dans la région de la
Torche et les îles Glénans, par le commandant
BÉNARD, l'abbé FAVRET, GEORGES A. BOISSELIER, '
Th. M ONOD [22 planches]. . . . . . . . . '. 22
IV Un prélat amateur des jardins, François de Coetlo-
gon, évêque de Cornouaille (1 668-1706) par H . .
W AQUET l2 planches] . . . . . . . . . . '. 49
V Les forêts royales en Cornouaille à la fin de l'ancien
régime, par JEAN SA VINA. . . . . . . . . " 8 :~
VI L'Elégie de Monsieur de Névet et le baron Huet,
par 1. LE GUENNEC . . . . . . . . . . . . . 112
VII Introduction à l'étude des vitraux de Bretagne, par
PAU L ConoZE et FERNAND GUEY [2 planches] . . . 122
VIII Les anciens manoirs des environs de Quïmper par
L. LE GUENNEC ............... 144