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Bulletin SAF 1918


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Excursion archéologique dans la commune de Guimaëc

L. Le Guennec

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1918 tome 45 - Pages 131 à 196

xcurSJon

dans

Commune de Guimaëc

l"a commune de Guimaëcfait partie du canton de Lan­
m~ur, arrondissement de Morlaix (Finistère). Elle dépen ­ dait autrefois de l'évêché de Tréguier et de l'archidiaconé
de Plougastel dont la presque totalité, comprise entre les
deux dvihes du Douron et du Queffleut, fut, en 179

corp()~ée ·à nDtre département. Trois mDnographies ont
déjà été consacrées à l'histoire de cette paroisse. La pre­
mi je èst l'œuvre de Guillaume Le Jean, le futur explo­
rateur de l'Abyssinie, qui la publia en 1846 dans l'Ec7/O
de j \t[ o'ylaix ; la seconde, composée par notre regretté con­
frere M. E. Bergevin, a paru e n 1891 dans la R e'vue
F-listoriqu.e de l)Ouest ; la troisième enfin a été publié~
dans le Bulletin de la Commission diocésaine de 191 l
(pp. 337-345 et 375-383). 'Malgré leur valeur, ces diverses
notices n'ont pas épuisé l'intérêt du sujet. Guillaume Le
Jean s'est bDrné à une paraphrase un peu sèche , de l'arti­
cle des continuateurs d 'Ogée consacré à , Guimaëc. Le tr=.-l­
vai1 de 1VI. de Bergevin n'est qu'un relevé des actes qui,

dans les ancIens regIstres paroIssIaux, concernent les fa-

milles nobles de la région, avec un préambule d'apprécÏ.1-
bles, mais trop brèves nDtes archéologiques. MM. les cha­
noines 'Peyron et Abgrall se sont placés à U1~ point de VUé
spécialement religieux et ecclésiastique. Je voudrais, non
rectifier, mais cDmpléter l'œuvre de mes devanciers l''n
consignant ici le résultat de m;üntes excursions à travers
cet attachant coin de terre qui CDnserve des traits épar:s
de son antique physionomie, viellx manoirs et chapelles
dont l'une, Notre-Dame de la Joie, est tellement riche en
œuvres d'art qu'apr{~s le consciencieux examen de 1\'1. le

132

chanoine Abgrall, j'y' ai pu trouver encore de l'inédit ;1
admirer et à décrire. Je constaterai aussi plus d'une fois
_ d'affligeants ravages où la main de l'homme n'a que tr,)])
aidé a l'action du temps, en fbrmant une fois de plus le
vœu purement platonique, hélas! que les autorités
locales s'efforcent de sauver les restes précieux dont elles
ont, au moins moral~mérit, assumé la 'garde, au lieu de .;e
faire, .par ignorance et inertie. les complices d'ineptes des~
tructions, ' .

Guimaëc s'interpose singulièrement entre les territoires
de Lanmeur, l'ancienne métropole du pays, et de sa trêve
de Locquirec, qu'elle sépare l'une d e l'autre. Leurs limi­
tes respectives en sont si bizarrement dessinées, qu'une
partie du bourg de Guimaëc est en Lanmeur. De plus,
toute une portion de Locquirec, . formant la frérie ou s~c­
tion de Lezengar, ' est enclavée dai1s Guimaëc, sans au L re
communication avec le surplus d e la commune qu'un F)nt
jeté sur le ruisseau de Kergonnr, ;l sondéboucbé au fond
. de l'anse charmante du Moulin . d e la Rive. Ces anomali':s

font supposer que la paroisse d e Guimaëc n'est qu'un ,d.'- .
membrement de Lanmeur, rattaché par les évêques de Tré­
guier ~l leur diocèse, tandis que Lanmeur et Locquirec
·continuaient de dépendre de l'évêché de Dol. Le patron
actuel de l'église est saint Pierre, qui a supplanté en Bre­
tagne tant de saints indig~tes, et a remplacé ici un smnt
Maec, Maeoc, Mahuc, Mahouc, Mieu (1), l'un des prin­
cipaux disciples de saint Sams-on. Ce dernier ftyant long­
temps vécu à Lanmeur et y ayant établi un monastère vers
le milieu du VIe siecle, riend 'étonnant que l'on retrouve
aux alentours le souvenir d'un de ses plus fidèl:;s compa­
g nons. Il est très possible que l'église de .. Guimaëc ait été
fondée par le saint même qui a laissé son nom à la pa­
roisse (Guic-l 1!aec) . La tradition du pays fait 'pourtant de
saint Maec l'un d es douze condisciples de saint Kirec,
avec Saint Engar, qui a une chapelle en Locquirec, saint
Milon, vénéré dans cette chapelle. Saint Garan, qui a une
chapelle en Plestin, saint Kémo, patron -cl 'une ancienn e

(1) J. Loth. Les noms des Saints bretons; p. 86 .

- 133

tr ld et P10uégat-Mo)Tsan, sall1t N érin, I)atron ' de
Guerrar ' ' , ,
Plounérin, etc. , . ' ' "
T 1 qu'on l'aperçoit -de la route de Lanmeur, le bourg , '
~ sial fait de loin bon effet sur son plateau bocager et '
parOIS . bl l ' . A '
'.' t serrant ses maIsons anc 1es aux toitures gnsatres

'uillées autour d~un clocher trapu épaule de deux tou-
OU ro . , l' , , . d ., d d IZ l
,lIes. Dernere ecran ' es pll1e es ' e erven, a . mer
~t la valléedu Dour~l~ cre~se é~ l'est ~_ün v~rdoyant fosse,
ar où la brume et 1 air sal1n s engoufrrent jU,squ'aux gras
le sol plus pauvre se dénude, se dépeuple, et la viê s 'y con_
centre presque entièrement sur une étroite bande du litto­
ral, tandis qu'a l'intérieur sont des landes solitaires, han­
tées jadis par des loups et des fantômes, encore pàrse~

mées de mystérieu~ méga1ith~s. Puis c'est la fin des ter-
res, la brusque cassure du continent aux farouches falai­
ses de Kerbaul, qu'étaye l'énorme éperon de la pointe de
Beg-an-Fry (le bout du nez), dressant à plus de soix~nte
mètres ses rudes _ assises de granit rosé où les vagues , vien­
nent s'écraser furieusement en neigeuses fusées d'écume.

La route de Lanmeur a Locquirec, qui traverse le bourg,
n'est pas l'ancienne voie gauloise ou gallo-romaine qu'on
utilisait jadis pour se rendre de l'antique ]{e'vfeunteun au
prieuré fondé par l'ermite Kirec dans les ruines d'un post'3
militaire placé à l'embouchure du Douron. Cette voie pas­
se au sud du chemin actuel, par Kervidou et Kerlaëron en
Lanmeur, et ne se raccorde à celui-ci qu'à l'est de Gui­
maëc, près du manoir de Kerven. Deux autres voies se­
condaires coupaient la paroIsse; l'une menait de Locquirec
au fameux château , qe Primel en Plougasnou" vrai bastion
naturel renforcé de remparts et de retranchements, où Ar­
moricains, . Romains, Bretons, Français, Espagnols tin­
rent garnison tour a tour jusqu'aux guerres de la Ligue.
L'autre conduisait du même château de Primel à Toul-an­
Héry, port ducal de Lanmeur au moyen-âge, et plus an­
ciennement oppidum gallo':'romain dont les vestiges, subs­
tructions, tuiles, enduits polychromes, sont encore visi­
bles.
lie procès-verbal dress : le 27 septembre 1679 par Fral1-

134

çois Bouyn, sieur de Rains, maître aux Comptes (1) nous
montre l'église de Guimaëc à cette époque. De l'édifi .::e

ainsi décrit, seuls le clocher et la longère de droite du
chœur sont parvenus jusqü'à nous, mais les vocables des
autels n'ont .pa& varié. Le recteur, Messire Louis .çIe Cre­
:wUes, ne recoi,1l1aissait aucUn seigneur fondateur. Les
prééminences , de la maîtresse:-vitre flamboyante étaient
partagées entre les terres de Trémédern, ancien fief de
bannière, et de Tréléver, les deux plus considérables mai­
sons de la paroisse .. Dans la partie droite du tympan bril­
lait le blason de Tréméderil : bandé d'or et de · s[J,ble de

s'Îx pièces, avec celui des Kerrerault, sieurs de Trcmédern

au XVIIe siècle., et diverses alliances, Ribé, N uz, etc .. A
gauche étaient les armes de Treléver : de gueules ù trois
bandes · d'henn'ines, et celles de familles propriétaires de .::c
fief, Kermerchou. Le N epveu, Toulcoet. La dame de Ker­
jan-P ;tstour revendiquait un écusson de la grande vitre
pour sa terre de Kerambellec.
Du côté d~ l'évangile du maître-autel, la chapelle de
Sainte Anne dépendait de la terre de Kervéguen, possé­
dée par le sieur de Kermenguy. Une vitre à deux soufflers
contenait les armoiries des Goezbriand-Roslan : d'azur à,
la fasce d' O'Y, au l[J,mbel de guetûes, pleines et écartelées
d 'alliances. Les deux bancs placés au-dessus appartenaient
au seigneur de Kervégllen) ainsi que l'autel suivant, dé­
dié à saint Sébasti~n,; dont le retable offrait un écusson
aux armoiries écartelées de Christophe d e Goezbriand,
sieur de Roslan, Kervéguen, et de sa femme Marie de Ker­ saintgily, mariés en I620. La dame de KermabolY et le
sieur de Keramedan Huon, de Plestin, avaient des bancs
devant . cet autel.
Du côté de l'épître du sànctuaire se trouvaient le banc
du marquis de Locmaria et la chapelle de la Trinité, dé­
pendant de Trémbdern. Un vitrail colorié décorait ' la fe­
nêtre ' ; on y voyait les effigies agenouillées et' armorié~s
,de François de Kerrerau1t, sieur de Tréméd~rn, et de ' Ca­
therine N uz. dame . de Kergomer, sa femme, vivant en
I610. Les blasons des soufHets portaient les armes des
Kerrerau1t : d'iazu' J' fretté d'Œrgenf:, une fleur de lis de
même eYl chef, parti de Trémédern, Perennez, N uz, etc.

~1) Arch. du FInistère. A-19, '- ._.'-..... ·- ·:i -· ·· ' , . . ,.~.·Z .. -"3'

'. ' p, -135 ..

: b' " T isins étaient arinoriés de' même,mais le
DeuX ancs \ 0 " . ' . .... . J
. : l i\ 'I

arùbez Kergus soutenaIt e· ... re en posseSSIOn u

ïeLll · c e lV ez .' . 1 ..'
.s . d " i clue d'u'ne petItc baIe "vitree aux armes de
.,econ , al11.S .' . . .
rrél11édern. ..' . . ' .' . "" 1 . .

o··te chapelle deux arcadesc 'c' sepultures appar~
ans ' v L . '
, . ' t l 'ui1e au sieur de Kerangouez Coetmen de sa
1" Il lI en , . . . .
~ . ' d " K er'g ' adiou, l 'autre au SIeur de Kerrerault de sa
t -n e e ' .
. ' .'" . de Trémédern. En face, il y avait trois bancs, le pre-
. 1 en e· .' . cl P . . d 1
. .... . . : aux héritiers du SIeur , e. estrvlen . e euc terre , d t:
mIe l d' . d 1\ "" b l cl .
) pl,.ttlCsecon . , au SIeur e uezam ' ez et . e " er11ler,
1 enal11 ('," . .
'1 Ile' a' 'un hon, au ' SIeur du Roudour Le BIhan, de sa
. 1> 'lS0 11 . . .
.. ( de pradigou., Dans le chœur, aU''res bali.Cs au corn te
terre . . I

de Boiséon et au . SIeur de . :\..efJan-Pastour, de sa terre ce

. Kcrambellec. . . . . ' . , .
Le bas-côté gauche , de la nef possédait l'autel '. de la
Sainte Vierge ou du Rosaire, dépendant de ' la terre de
\iezaudren . . Il off rai t les armes : cl' argent à la c'yoix pat­
tée d'(/,z'u.r,des Robert ou Ropa~·tz, anciens seigneurs du
li~ü, et le banc adjacent était au sieur de Mesaudren Thé­
·pault. Sur une tombe haute possédée par le sieur de la
Villeneuve Rolland se lisait : RUNTANIC, nom d'un vieux
manoir d e Guimaëcoù résida la famille Queffarazre.

. . . L'autel d-e droite, dédié au Saint-Sacrement, portait un

écusson aux armes ·des de l'Isle, sieurs de Penam'prat :

de gue' uZe à dix bi.Uettes d'o1', 4. 3· 2; 1, alliées à celles des
Riou: de sable. à tro1~s che'vr011S cl 'argent. La vitre voisine
avait les mêmes blasons, ainsi q'un mi-parti de de l'Isle
et de lVIarc'hec, et le banc situé devant l'autel . était aux
. enfahts du sieur de Pestivien. Plus bas, une autre fenêtre

dépendant du i1.1anoir de Mesaudren contenait les armoi-
ries des Thépault : de gueules à la c1'Oix alésée cl' or, can­
timnée d'une l'IJ.âcle cleo même, et celles des Ropartz avec
leurs alliances : Le Cozic, J agu, Trdgoff. Enfin, la petite
fenêtre des fonts baptismaux était sans armes, ainsi que
celle qui surmontait la principale porte de l'église, et la
tour portait quatre ou cinq écussons sculptés aux armoi­
ries de Trémédern et de Kerrerault.

L'église de Guimaëc, dassée depuis peu au nombre des

monuments hlstonques, se compose d'une nef de trOIS tra-
vées, avec bas-côtés, et d'im cnœur aussi de trois travées,
fla, nqué de deux larges ç~j:J :~elles. Les piliers carrés à. sim-

,. .136

p1es taillqirs soutiennent des arcades en pl~in cintre indi~
quant le début du XVI Il o . siède, D'un édifice gothique, an~

té rieur , il subsiste la muraille. ,de -Groite du chœur, ' percée

d'une petite fenêtre ,ronde et d'un bénitier og·iv-al. .Du
mêmç côlé; dans l'à,ngle rentrautforme par: .le ,collatéral de
. la nef, est logé le clocher, robuste construction d'ùn gm­
nit jaurleet friable. A sa base, .une porte à l'archi"olte
coupée de claveaux est ornee. de deux écussons dQut J'lm
porte encore . le bandé .des Trémédern.. Au-dessus, un fron-

ton en arC' offre un écusson .fruste, incliné et timbré cl 'un

casque, 'Plus haut, une seconde àrcàde montre un écuss'Ol1
en bannière, timbré et supporté d~ deux aigles, au .champ
indéchiffrable. peux autres .écus plus petits, tenus par des
anges faisant sa,illie sur le mur oilt également été marte-
lés. A tôté se lit la date: 1655. .
Ce clocher est accosté de deux tourelles ou cages d'cs­
caliers amorties .en .dôme ; cette dualité est un fait assez
ra're dans le Tréguier, où je ne cOllnais qu'un autre clocher
similaire, 'celui de Saint-Quay, près de Perros-Gui. rec . . De

massifs contreforts épaulent ses angle et une· corniche très

saillante, do.nt les nombreuses moulures se .poursuivent Sl1~'

les tourelles, soutient la galerie de la plate-forine. Le bef-
froi, '3, trois chambres de' cloches,' est sommé d'une courte
pyramide ajourée de quelques baies rondes.

Le chœur et ses deux ailes, sous toitures distinctes, se
tern}inent par des pignons droits ; au central s'appuie unç
sacristie hexag-or:ale. Le porche, refait au XVIIIe siècle, a
gar· dé . son arcade ogivale pauvrement moulurée, hi date de

1558 inscrite en gothique: M.VC.DVIII. et deux lions
formant gargouille::; au ' b l;s , des rampan t.1s. La porte inté-

Heure, surmontée d'une niche contenant la statue archaï-

que de Saint-Pierre, patron de la paroisse" est flanquée de
pilastres, à chapiteaux étranges, nœuds de corde ou cornes
enroulées,. et accompagnée cl 'un bénitier garni ,d'une tête
de mort en haut:relief. Au pignon ouest, la porte à. tym­
pan .. arrondi, · orné d'une vieille statue d'évêque, 'a ;les van­
taux sculptés figurant quatre scenes de l'Evangile: l'An­
nonciation, a Nativi,té, la Présentation au Temple ct la
Fuite en Egypte. Dans ,cette dernière, Marie, as?ise sur
l'âne, allaite le divin Enfé\tH çrnma,i1lott~ dç bélndçs Cf 0';'

ToU/-4'"

Flsle

Kermorvl/ll
( Mégi1lith~S)

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'l17. te
~g·an-

7-ar-Veii1

lin de

xCflâ
leqan

N~ _les Noms sou/ignés
.sont ceux dilnciens manoil's,

/'lsle-B/~ndt81

la Joie

ezaud"en

Pont ·Meno , '-.2

131" · .
, '. ' , . . t Sacré-Cœur ~
, oô . t sans va e . .
la B. i\:J.é:\.rie A~coqu~r parait. m ' ~ e-rne e · " ' . clef a la
droite 'est un samt PIerre a~sJs, tiare en tete

, \'" l\1fè l 'au· t,,.l du bas cot.
ft . H u'aUCllC une 'I.et'g'e-t l te· . . .. '" . ~ .
roi . ~ . ', . . >
feus Il arcatures ogtv~les. Le premler dep€ndalt,. comn~

l'avons vu ; du mail0ir .de Kergadiou ';. le .,~co,nd.. ~lus
fre le bCLli· dé des selg'h~ut'S de .. rréllléde!h. ,I:?e:ran,t la .ba·
lustra .le de l' àut:1?e :r()~ve ~l1e 'dalte d~ont 1 epJtaphe sem,
hIe élvoir été effacee 'a desscill. On y lIt enco~e . : .. :.174°.
Pries Dieu· po·WY le ' l'epos · de son d;m.e. Il est a Crmre qu~
cette dalle couvràit la sépulture de ~a~11e Hélène-Olive Pa~
tour dou lirièrède Penampr~t-PestlvleIT, m{)~te: . le 7 . mars
hiliaire~ Rttribuées à. la defunte. '.
Co petit tabernade Reh~issançe, or11é de la statuette du .
Sauveur, se voit sur l'a1,ltel de gauche; d;ans lès niches
latérales, saint Paul tendnt l'épée et .apôtre mun.i d':un H,.
ne . . \u-dessus, groupe ; :de sainte An,ne et de la Sainte
Vierge portant l'Enfant j'Jésus ~ bénissànt, et statues des'
saints C(;me et Damien, si'ayant ni le eo"stuIll.e de docteurs,
ni les vases renfermant leurs remèdes traditionnels, angé.,.
lique et mandragore. Ces images _ peuvent dater de la Hn
du XVIIe sièc1e.

DailS la nef, grand ct vieu?:: Christ de bois. Aux deux
autels latéraux, tableaux sans grand mérite, signés :'
BLEVIN. 1790, Celui ae droite représente saint . Roch. pan­
sant la blessure de sa jambe ; celui de gauche, l'Euçh:l- '

nstle adoree par des , 3rlges et des prêtres. La ('uve des
fonts est un bassin de' granit octogonal, gar.ni sur chaque
p;m cl 'une tête humaine s~mante, et accompag'né d \mê p.e-

tlte plscmc.

On cons:rvè. au. presbyt ère un joli calice en argent pçr·
tant cette mscnptIon : I.\NA : V~L6I ! KVUO : 1583, Sur le
no;ud,. couyert· de f~ui1lages dorés. sont six pdits fleuroJ);"
d.emaIl vert. Lepied,diviséenhuitlobes.offredesrl'll-.
çe"t,lX gr .. wés ~tt trait. et ~ .n tr~s peth Christ en ~toiN.. b~

" ..: .. " -"t3S ' - -" " ..

:.:.:)~;ùinçon, :,fOfrn-é ,' des'de~ux 'lettr~s F ,'et 1:" séparé,e:(:,p~r une
., .... · éto·il::t· :-'Dourra"it Nh:~· ,cèlui " . de . Frat1cÇlÎs Labouz, orfèvre . à

, . '. , MorlQixc.'àda .. fii1. d'û"XVI~ si~cle. Dans las'acristie; p!u~ieurs
. :. "sta:·tue5: ;'prove1'laht de , l! église ei.aë la chapelle ru~née de
.'.:- saÎnt"Mélar av~üei1t lro, LLvéasile, riotarriment ul1grollpe de

· , . . .. ~ saint Yves' ~ntlele:ticheél ·lepau·vre.l\-l~is iLn'~l). ,.~~bsis-
.' : :' tait plus, en i914,'qu'üri E(~ce Jf om~ ,et un s(iip.t. Sé,b.,a.S:ien '
,,' :'::qtH~ :fVL-,.Yabbé · lV!6àla> 1:)iènv()U1u;'a ' m ' a, prlère',, :, '0époser :m
'. _ : . ·:mus~e ,de:' TZerj'ean; 'a:il)sï ' qü'U'né vieille' f rég~ t~. : vQ.tjye qui
.. " ügUrai-t aux ,pfodessiQ'i1's'il ya un:demi~si ,~cl~.',.": : . .

, Les , con f réries desseniÏes.· en l'ég1ise étaierït c'clles de
.'. ,?aint : . . P.ierre.,· : du· Rqsaire':-etdu Saint-·~acremétÏt. , A. celk­
::. ~ci . )ncomp;:titl'eritretien 'de " la' lami)é du sanctuair~, ·t~ndis
" que h ' Rosai·r-e:' :assurait'· le bon' fcm.éÜ6nneme'nt dé, l'hot-:­
',. ' loge.:_ : . ç.'.est .à . tort., semble-t'.:.:i1, :que fiL de Berge'vin men- ·
. ,.",·ti mne ·l'existence,;·au· bourg', d'.üne':chapelle d~ saint Roch
tr;a.nsformêe:, en.:·mairie, carcelle-ci'ri'a nulieniei1t l'aspect '
· "1' 'd' c 1" Il 1" ... J ' t'" Il' . 1
. .0 UD,. e . 1.nc~', te 19:,l e UX\' " a )fen ' eXIste une Clape .ente '.'e
· ~ ·sfl .ini,Roçh, : fondée' en· japvier ' 1 500P~i- M$.~Üre" Guillat~me
, Le. Du, prêtre, recteur .de Loguivy et originaire de Gui­
" p}aëc', Jliaiscette chapellepie 'se desservait da'ns l'ég'1ise, sur

. , 1 '.ü .. u"tGl d Il. ,même: ,vocable: I,,,' acte de fonda~ iOtl e'st aux Ar-

"c!li'r.e.s . Dépélrt~ment.ales (r}," consigné ' sur'un ' parchern in
' .. long de pxe,;;cl:e 2·.,n?-etr~s, d'une vétusté qui 'en rend Üfec­
'. ture pénible .. J\pres , de curieuses : considératidns rnystiques

. sur.1a mort du Sauveur·.et l'institution du sacrifice divin,
·Maître.0ulllaùm'e· {;léclare. établirune,chapelFeriie de dëux
nlesses' helSdolnadaires à basse voix, l'une le nï.ardi t;n
l'honneur d~ la tres. heureuse Vierge ivlarie, l'autre le ven­
dredien: 1)1i.ol111eu~t: de, la Sainte ... Croix!~ .: a estrc · dictes' en

,l' e:,gli?eparrocJli~111e de ., Guicmec , SUt; ~l' 3.ulte1 ' d.3 . Messielirs
' -Sa~nct~ El()y et. R_oc,no~yen~n:;en.t: y: Jai8tz et éonstruictz
, par lè di'ct' Maisfre .GÙi11aume ), ). '. ,. . .. :' .. " .'

" , Lès titulaires de · ce . bénéfice s'intitulaient parfois clB-
naines de Saint-Roch. Le dernier fut Missire J ea.n Michel~
pourvu en 1763 par présentation des fabriques cn charge,
après le déd~s de Valentin Le Doher, précédent chapelain.
Le 4 octobre 1790, il fournit déclaration pour le temporel
· de sa chapellenie, compr, enant une grande maison a trois
étages, sise au bourg, et quelques pièces de terre, le tout

(1) G. 538,

139

livres de rev enu, Arrê~é par la gendarmerie en
" a ln nt l 2 5
l'abbé Michel est enfermé au château de Brest,

'uillet [792,
" . détenu aux Capucins d 'Audierne et' d e ..Landerneau"
pUI~ " l'b 1 l . '1
. L\ 'é de 71 ans et caduc», 11 est rcnl lS en 1 ertc e 2 avn .
(c g " S' V ' () .
_( ~ et se retire a amt- ougay 1.
l, J,J 1 dl' 1 l'
N[i\1. Abgrall et Peyron ont donne 1 ans ~ eur, notIce a IS-
les
recteurs d e Guimaëc de 16, 3 au Concordat. ;\1. ÙC
te C I '
13ero'evin cn nomme un au'. re, Geffroy N édelec, recteur ~n
~8~. A propos de l'abbé Isaac Le Breton, recteur au tenlps
1,J ,J. . l' d .
de la RévolutlOn, Le Jean raconte an ec ote sUlvan~e . :
Un dimanche ,de l'année 1789, le pasteur de la pa rOIsse
commença ainsi son prône dominical : c( NIes chers en­
fants, le Roi vient de convoqûer ' les. Etats à Paris pour
notre bonheur...)) - « Dites pour notre malheur L )) in­
terrompit une voix dans la foule . . Plus 'card, · les partisan::;
de l'ancien' ordre de choses virent dans cette parole une
prophétie tragiquement confirmée par les faits, et les vieil-
lards vers 1840, s'en rappelaient encore. .

Privé de son rectorat pour refus de serment, l'abbé Le
Breton fu t remplacé, à la fin de janvier 1792, par son an-

ci en vicaire, Paul Buhot de Kersers, mais il demeura ca-

ché dans la paroisse. Avant que M. de Bergevin eut ac-
quis et remanié le manoir de Kerven, on y montrait, au
sommet d, e la tour 211e, une étroit~ . chambre secrète qui
servit de refuge aux prêtres insermentés. LU. Le B reton
a vait une au ~re retr aite a u manoir · d :: .Pennanéac' h , et s'y
i.enait habiL uelleme'nt. Plus 'humain que beaucoup de ses

collègues, moins fielleux surtout que son frère ou cousin)
le trop fam,::ux curé constitulionnel d u G uerlesquin, l'i. 'l­
trus ne le tracassait gLl-'~rc, et mênic, dit-:on, l 'av~rti~;sa i l
toujours ~L l'avance lorsqu e d e·s · v:sites domi cijiaires . dt.>
vaient être efJectu- ées, · lui épargnant ainsi captivité e.t clé:
porta tion. -. ,

Le presbytere, vendu nationalement, devint la propriété
de i\L .!\ndré La Cour-R c}zec, m embre du Directoire du
District d e Morlaix en 1793, qui s'y retira dans la suite
et y mourut nonagénaire en r8S6. L e bon -et venérable abbé
Tanguy, 3 ncien recteur de la F euillée ct de PlougouLm,
décédé il ya quelques années, m'a plus d'une fois radé de
ce La Cour-R ozec, qu'il conl11.Ü il (~uimaëc avant sa mor!: .

(1) Chan. P€yron, DucU'lnents II. 111, 116, 121, 149, 157.

i4,O

Le révolutionnaire repenti était devenuull' chr, étien exem-

plaire, assistant presque journellement à la messe, s'ab-
sorbant en longues 'oraisons. Il n'aimait point qu'on lui
rappelât le passé, et il éludait sur ce chapitre les questions
du jeune vicaire. Il lui ' confia pourtant la cniinte qu'il ,
avait eue de subir le sort des infortunés administrateurs

du Finistère, après l'échec du mouvement fédéJ-aliste, au-
quel il s'était associé. Il légua par testament le presbytère
à la fabrique (J). Ce presbytère est une vieille construction

du XVIIQ siècle, où se lit, sur la façad e du yardin, ,une

ll1CSnptlOn ecornee :

JAN : CLECH ... PASCO (?) : A : MASEAS :PROC.
A droitè du grand échalier du cimetière, on voit encastré

dans la niaçonnerie, au ras du sol, un lec'h renversé, bloc
quadrangulaire de granit terminé en pointe' arrondie (~t
mesurant rmètre 92 de long sur 0 m. 75 de largeur
moyenne. C'est la « pierre de Rannou )), ce Gargantua 10-
tal dont j'ai essayé, ici-même, ,de narrer la légende. On
dit qu'il la lança d~ son château de Tré1éver, dûstant d'au
moins 3 kilomètres, sur une . maison du bourg où des com­
mères s'étaient assemblées pour le dénigrer. Son projec­
tile renversa la cheminée et s'en fut se planter dans le mur
(lu cimetière, olt il est resté ,depuis. Cet angle de l'enclos
doit être, paraît-il, coupé prochainement afin d'élargir la
route. L'agent-voyer devra veiller ù ce que le Iecb d e Ran-

nOl! soit conserve 111 tact .

L'abbaye du Relecq avait sept qUe'vaises près du bourg
de Guimaëc, au lieu dit DouaY'-an A bbad (la terre de l'ab­
bé) (1) devenu à présent Runaba~ , . Dans le triste vieux lo­
gis , de Kerilis , s'éteignit übscmément, en 177 ;4, messire
Yves du Plesssis, chef de nom ct d'armes , chevalier;, s'::Î'­ gneur de Coatserhô, vieillard de 86 ans avec lequel dis­
parut le nom ,d'une lignée morlaisienne jadis riche et con­
sidérée, mais tombée dans la misère. De sa belle terre de

Coatserhô '(en Ploujean), depuis longtemps vendue, il ne
lui ' demeurait plus qu'un' dérisoire surnom seigneurial. ..

(1) Abbé Tanguy.
ti.cn, p. ,
AVe~l de l'Abbayr;

Unê v-:lle b'1"etonne pend'ant la Révolu-

d l.l Hel ec-q

en 19S3.Arch,de Les }lJiffiolJ,

-d vers la mer. Nous franchIssons blentot un ruis-
aU n , , .

au moulin ,de Rupont, et nous voyons a droite, , dans
sea , . .
1 coulée les toits moussus · du manOIr de Kerambellec,
':~ssjon d'Yvon de K.erduel, leur père. Olivier de Kerduel
heritière, Catherine, épouse Olivier de Kerverder, qui fait
hommage en 1527 à la seigneurie de'. Plougasnou. Leur
fils D'rançois, sieur , de Kerambellec, marié ~l Marthe de la
D'orest, [nt pere ,de Christ.ophe de Kerverder, 'époux d~
Chretienne Polard. Il partage ses puînés en 1561. et I568,
d, le Il août 1585, conclut un açcord 'avec les paroissi(' j ~;
pour placer ses armes dans une fenê~re qu'il percera ~l ses
frais afin de donner du jour aux fonts baptismaux.
Sa fille aînée et héritière, Jeanne de Kel'verder, darne de
Kerambellec, épouse écuyer Pi€Tr€ Le Guennec, sieur (1'0
Launay en Trélévern,' dont 3 en:ant.s : Louis, mort jeune,
Claude, relig.:ell'Se bénédicLne' à ~(orlaix ,en 1640, et Fl'an­
ço:se, héritière de Launay et de Kel:ambellec, ma,l' :ée en
1632 à écuyer Guillaum, e Pastour, sieur de Pontplancoet en
Plougasnou. A la sui~le de cette alliarwe, la fam:m.e PO:3-
tOUl' vint habiter Guimaëc et résida à Kerari1bellec dllran~
trois quarts de siècle. Pierre Pastour, si.eur de Kerjàn, Ke­
rnmbel1ec, fils aîné des précédents, épo IlSû : 1

Ànne de
Trogoff-Coatallio et 2

Franço:se de Coëtmen, qui lu! : don­
nèrent 14 ·enfant.s, baptisés à Guima, ëc d· e 1656 il 1687. Il
m O U1'l1 t ·à son manoir de Kerambellec le 31 décembl'e 1699
- le. dern:er jour du grand siècle! précédé dans la tomb€
par son fils 81né Yves Pastour, décédé en 1692. .

Ce dernier la ~ssait un fils lmique, Louis-François Pa:s~
t O: Œ , 'so·us la tutelle de sa mère Jeanne-Françoise Huon de
j{~r :5'us, enrôlée. dans la capitation de 1703 à Grtiinaëc pour
~O livre's, , et autant pOlir son fils. A 17 ans Louis-Fl'unçojs
P~st?~ll' epousa (contrat du 14 oc. tobre )707) une opulente
her' tleAre de Plongasnol/, CatheLne de Kerc'hoent, âgée_
€l1 e-meme d. e: 29 ans. Il est fâcheux que les conjOints n'ai-e-nt
pu .é ·~hange'l:' leur âge en même temps que leurs sernl€nts,
malS d· es raIsons de convenanee et d'intérêt militaient sans
rlo l~{e en faveur de cette fi/sion de deux riches familles, Et
]'uni,on c msi contractée fut · hellr, G!lSe et féconde. Dès. lors
les Pastour délaissèrent Kerambellec pOlU' leur château dé
j\[esgollez, en Pl' ::lUgasnon, et le m8.noÜ, converti , en :e1'me,
passa Dai' n~li::mce aux l [wn ;].y de Pontgirault, .Huon ùe
. Kermadec ' et dé Bergevin.

Le portail extüieur de Kerambd1ec, ~t portes cavalière
et piétonne aujourd'hui abattues, était défendu ~l gauche
par un solide pavillon orné de lucarne~ à fronton et garni
d'une échaugu::tte portée sur des mâcbicoulis. CetLe lo­
gette est percée de meurtrières, et du perron de l'escalier
qui mène ~l la sal1~ haute du pavillon, on pouvait faire feu
par une autre embrasure pratiquée obliquement~ , Le bâti- ,
ment principal, au f.ond de la cour, n'offre , qu'une port'~
ogivale, ,av~c " arca;ure ' saillante ;.l écu~sons mutilés. Les
fenêtres ont perdu· leurs croislllons de pierre, et le colom­
'biera été démoli. 'Au ,bas . des prairies, entre deux taillis

inclinés que dom ine.éri1ergeant de la verdure compacue de
ses ' sapins, la svelte poivri '~re de K erven; tr1Urn,~ C:' .c{C~
le- 1l10ulins~ig:neurial. .. Un fait s'y est passe, m'a-t-on ra-

,. ' A" l' \ 1 r' l d l ;J,1'
" co-nte,· ,qUl ,pourraü ' etreep11l.ge a a .,egeI7ce e a 1 1'l.ort

:.c{' Ana ~':ole , Le Braz, chapitre des avertissements et .des in-
ters-ignes. Le m eunier du lieu avait sa vieille mère tres
malade etprocbe de ses derniers moments., Un matin, la
trou vant plus calme, il crut pouvoir la quitter sans risqu es
02, s'en .alla remettre seS meules en marche. L v mouli'1
tou rna quelque temps, . puis s'arrêta. Sur:pJ~is, noti'e homme
~;ort it et monta sur la chaussee; la vanne était toujours
1evé:~ et l'étang, rempli, mais l'eau ne coulait plus dans
. le hi f, ~1 tel point qu'une femme qui lavait du linge un peu
: cn aval , vit ~out a coup Je lit du ruisseau s'assécher devant

elle,. « Cest un il1 tersigne », pensa Je meunier. cc Ma
rnere va .mourir et me rapp~llc, H Il regagna la maison
et courut au che,;et de la rnoribonc1e. Celle-ci semblait n'aL
t. ndre oue le r~(our .de son fils pour
rendit l'âm " Cif)q minutes plus tard.

trépasser, car elle

, l " l'llisse" u 'l d '" Ke'r~n"l)"'J l ,~~ ",n--! .'l d''' L1X lrj'lo" 11, 6trps v"rs
J "-' ~ l ....... . l . .. . ... _ . .... . . ""' . .1 ., l ....... .. . . ..... . .i. _ ....., ........ __ . ..

1 'ouest

, de la fontain e rie Keranrun, au pied du Tossel?-
'S'ani:-Fieh" petite butte herbeuse semée d e h1 ocs. de granit
)lrroil,dis, qu'on croirait volontiers être des mégalithes,
mais qui sont sans doute des ro-ches naturelles;' D eux an­
ciennes vo:'?s se croisen ~ sur ce tertre, l'ùne m enant · du
hou rg ,d e ' Guimaëc Jl u passage d e Sai nt- T ulien. en Ploué.­
ioc'h, l'autre conduisant de Carhaix par ' Lanmeur, à. J'im­
portant poste gaulois et romain de Primel, en 'Plougasnou.
. C~tt(' dernière· ,. qui ·félit ,la limite ,de Lanmeur et Ide Gui- '

maëc) fut,.1ongtemps utilisé~ par les pèl~rins de Cornouai11e

. l ' e \'cr · ..: le sanctuaire de Traon-Mériadec, h SaÎnt-
il Ir 'Il c 1 ' oJ
~n' ~du-Dojg : . Un ·témoin subsiste enCore de ces pieus ,s .
1 ... 111 " 1 . ' j . , "
. 'o' 'ltions. Au carrdour, l Y a un VIel oratOIre voute, .
11110r.: 1 " , cl S' l"
. délJCndait ,de la chapet e VOlSl ne , e all1t- - lacre, en
UI , ' r. "
. . lbit la statue , du patron d es ]ardl11lers. A cote" aSSIS sur .
l . l' banc de pierré, se tenait le fabrique, prônan t les mérites
un . '. 1 ff cl " ' 1 . \ l ' d ']
,1 son Salll'~.' recevant es 0 ran es '~êS pe enns ' ont 1

po li va i ts u ~~ell1er- l~p~§$,~~~e p~~' '. :e~~.: ~Çtl,t:~S, . :!~l.el;ll~~fl ~r~:~ .,·:,;· .::,>: '.:
m!vcrt~s aù !l.urd .el ~.u~ J1Lld" ~L \.J.llO.urd hJjl" l;,1:chàp~:1le $.:';!~,t .,·;:,.! ;· c·::::'.> '.
écroulée, ' lei . . fi~èle.s, a~l~B.aptiste.;?J?t.: :q.~serlG . l'.a}~t~que." .YQi~ . : · :: . ,',:; ::"
pavée p~ùr . : des rpu tes . pl~s .. coinmÜ!d~,S-, . et,r~f:l.lg if. : :dan

 

:~';:'; : ';:
'1 r .... b 1" l " l' , d" . , 1 \ 1 " ",'
'son oratO! lrë ; rai1 a rit, neg l'Ke. ~tous., . ·re.qta l,. a·· ~neamtJ :J:~ · . ; '. . ';;;';
. table détresse, l ë sai 11 {à':c.kn1i -: yeX.iTIG, LüU. s8mbl. e. éCO)Jt~r en" :'~ '~": . :.: :
.core si, le pas , de q llelqu'.3 péle;.in .ch~~itçlb~e. n~ .T~~(,)p.1J\} .:.f:h'·~ :: : :'~ : :'. ; ' .

nu loin su'r le ".c ieux cl).crnin. a'bands'mpé, ' . ' . . ... -;' ;: .. . ~ . _: ; :. '; ,'> , .

L'infortune .8. peut.:"êtr:~ : .. ~.igiLJ)1Ut:neur · ~e. : _sa~10,t : Fi- acrq,.-. ;; . . :: :' ~;:'.
toujours ~st~î ,l qu"if c!1ât, ié :c.[..ueV GjTlent l e5; irr~n~rerl,c.f)s;. ,:Tt,; .. ; .~ . :,:. : "
main la ·tragjque~ryéntùre d\ln pàysanprls de b,9isS:011 qui;. : .'.': ,:0;- ~ :::
tra ve rsanJ un jour ) :,: 1.0 S s ç 1]. . -:", 5? ~~,).? .. '} dÇ. . ..f[. t.l~per.;; la ;;·.Rt3.hl~." :;. :,.; -~ .; .. ;
élU visage, e n }ùi hUa~ùi.(j~~~ di,~"tan ·.inhir~cu'l\. .c.n ·,cour.s :clan? .:;;:- .. ;,,;;'. :
l l~' . pay s :.. .. ". . '..:. " .; . " ./ ' .: ', ... "::. . .' ." . '. :i .~> " .: . . :: ..... , -: . ,' , .

Salit Fieh; , - : . .. .. . S;;tint. Fi~lCC2 ,. . .. . .. : . . .. :.-

j'fic '; hieh, .

Glaou'renneh -

, . .\tlorveux .. . , .

-Bayeux, ' .

Lrw1' (f daouzeli h'IVe17neh i · , V t) ku r de douze .SO l,.l.S. ; . , .. '" : .' ; . "

1\ l'instarit, le sang j'8-ilJit dü, nez ': ,de J 'îvrogilé j . cb'i"i.~nïe . :~; : ' ;'.
si tout le vin ingùrg ité dans les Gabarets , de 'L'l:ihiïië'Li~- Tùi· .. .. ; ':; ' :

coulait par,les nariJles, EpOUY3nté, ';:il;~dégril1g-bra jUSq\l':~Xi. - ...... . .

K.eranrt1 n et hoquetà sonJ1istoire. Les .gei1s :1uL·Cb'11c-iiÎl1ère~""t . : ' ,. ; ';" -" .
d'aller aussi~ôt vider ·h fOI1talne: , du 'saiht,:dans 'l'espo'it ::" . . ,. .. . . "',:

d'apaiser son .ressentimen:' .. Le' malhéureux."se ' mità la· b-è ... ·· ·; :·' " .. ," : '
sogne, mais -ses. veïnessetarlrent·;plüs: .. vite-que 'là:"s()ùrce;-": ' :' : .':; :
et on le ran:lassamort « aubou t. dE;~ ~son ', :sarig:' ')')", 12 écuellG .':. " 7, .. :.: :;:
encore serrée dans sac-main raidie, : .. ": :._ " ';' .. , : ;':- "'~.' . , ', / :.-::' ';.:., . : . .. :

Le vieux ' village de K eranrUn peuts'eri.orgùeillir ·d'êtt: i;·; : ·-;· ·· \;; ·; :
le b~rceau de cette .famille Coët,anle.m: ;i, laqtlelle,:~D;1J~itrt'f~'::i . ," ... ," .

naicn t Jean ç()~t~tplel ,T1I. le c~J~Q .F~,.cors:ai ~e:hre l.on·':d e:;: hl': .1-1:n-··:··" ·;;::·:': . ': :. " :.: .
du quinziem·e. siècle, . à la foi:;· arrll.ate-ur et p.irate,-i~ffn) i· ; . :ô· .:> .. : '
d~s. Anglaise.t ,de~ Espag:~l ,o.1~. qui. 'deviotvers. " ,:"49'2. grand:"' :' ;::' , :.: . :', .,:;';'
amIral de 1~ort.ugal,.~eL . .s011 11eveuNicQlus.- .Coë~;fnlemi: · 10~: -·~"'·:;: ·" ·' . ::,

. .. .. . i44 _ .

r'.f:Chts.5ij.n/.:~ ntîgc).{:i-ant ù:lO. r'lai

 

΀I'l; qui èOl1struls it et anna ~'êl
fam~usc nef Lf!. C01'il~li~te, si glorieusement sombré(! ('~f\
151'2 . âvec son capitî.:.Îpe Porsrl1ogucr. H~rvé Le Lionruu,
témoin ent.endp dans l'el"lquêt.e ouvérte en J 539 au sujet
de la nobles-se de.s Coêtan}em, ' dèpogeen effet avoir ouï
dire que II l~ source prinçipale d'ctil~et leurs prédéces­
seurs et consa:nguins 11 etait {( d'ung lieu .noble appelé Ke­
ranrun, en la juridiction de I .. anmeur. quel lieu noble eS.
toit et apartint audit feu l 'von Coaulnle~et audit feu Ni­
colas ·C6atanl~m, ~on filz ~). lI. s'agit hieh icj du Keranrun
de Guirn~ëc, puisque la réformation 9 . c {543 attribue cette
terre à Guillaume de Trogoft', sieur d~ Ktrgadio\l; en Plou ...
gasnou. qui avait épousé Jeann'e ~etan~m, 4· fille de ,Ni
cola~ et de : Méance Le Borgne, sa femme (1). _

Au sud de Keranrun est le 11ameau' .,.dk Pradig'ou, · autre

lieu noble qui avait banc et tombe dan~ lréglise paroi-ssiale.
Jean Le Lagadec, sieur du Roudour, lé possédait en I54]}
et le transmit par allianc~ aux. familles d-e la ,F orest et Le '
Bih'1n. U ne ,des maisons a g-ardé un escalier extérieur en
pieTres) . a~Tec terrasse abritée sous un auvent d'ardùi~('s.
Tout ct CÔté, la ferme du Cosquer a remplacé un vieux ma­
noir avec fief incorporé au comté de Boi~éon, en. Lanmeur.
La réformation de r .426 cite « le manoir du sire de Boy­
séon . au Quozl{er 'et l'9ste1 an GaUan Il. Peut..:être ce ma"
nOir avait-il précédemment appartenû ~l une famille d~
même nom car la même réformation mentionne une ( Le-

venez· du Quozker. ;' demeurant ;\ son .hostel près le bourg
de Guymaoc )). . Ii .
Sur l'autre versant. du Tossen-Sat1t-Fie.k;, entre l~ voie

romain'!. de Prili:clet la route de Gui ,rri~ëç II Saint-Jean-du ...
Doigt, s.e troùvait le ma'noir de Penna'iàeach, François Es­
tienne, si.'eur de Pennaneach, archer ~~t. . cheval ~l la montre

de Trég-l'liel" en 1543, contribua .à la .' construction de La
chapelle voisine de Christ, où son ~cusson : d'azur li

[-rois coquilles d' argent 1;>lasonn~ ~encore une fenêtre.
Sa. fille 'héritière JNtnne Estienne, is~ue .de son mariag€

__ · 0.--. "_0 -- _ -.~ , I _____ _ _ ~_~_--__ -~~.:._''"___' .~----.. .. , . ... ' - _ _ ,L'. ""' "n l , ", "0 'tI 1 ,, ' " , ' . , ' , IL:
ft) A. D

lHnv. ' Les Coatllm1, eUL Bullet île la Société Acad . .
,de Breo;.t. t.V, 18'V7~7R , pp. 39.37 ..... CL, :(111 même: Hi.stoil"e
rJ.P. 1'1 .. -r!.UJ?-j.6Tl dl' la Br~t.a(/'(Ie li 1 . f.1.F'TmTu:.l>; , 1AAO . l'l. 255 ,~t
315·317. ~~ A. de B-ergevin.Monog. de Guimaec. 1891, tiré III

Jan

... 145

, Jean

Qorre de Kerlamarec, épousa, Jean Ke.rbo~­
~l,veLsieur d~ Cosquer en Louannec., Leur petlt-fils ~ran~ols
llC, "'C SI'eur' d· a Pennaneach epousa , en 1607 . a Samt-
yel'b· ::J·UIl 'V d K t
\. l 'ne de Morlaix DlleFrançoise Noulele ,'3rven e y
l\I~l~~U t le 25 septembre 1634, « préoc-cupé, par la mort d:u~1,e
111 'on sur le cœur )l, dit doctoralement son acte de, dece~.
tlLIXlenfants .ayant dispa.ru 'jeunes, p.ennaneach passa a .
S~Slcent 'Kerbouric, époux en 1616 ,de J acquette ~u. Boys. ~ l
V~~éda en 1655, laissant ce' ~anOlr a. ~a. fille am8~ M~I'le .
de 'iéeen 1638 à un bourO'eOls mi o,rlmslen. FrançoIs Lelez
J~~l cLes Anges), sieur . de Kervella. O~ .y ,voit

,e~core Uin8
pont-ct..lez -ou escaher exteneur. '.

Regagnons, après ce long circuit, la route ,de Kerbaul "
qui tr~verse, à 1~00 mètres ~du bourg, le. l:ameau,'~e Christ,
oTOupe autour d une chapelle du XVIe slède batte sur tm
~ertre muré et ombragé, et découvrant, par -delà les talus
buissonneux des champs, un joli"'horizon de mer et de Cô-'
tes lointaines~ Elle se compose d'Une nef avec bras de crûix
au sud. Son pignon ouest, garni de crochets,est surmonté
cl'un clocheton amorti en lanternon à dôme, et percé ,~'url,e
porte dont l'archivolte gothique, ornée de crossettes, :;e
termin en fleuron végétal.. Les gargouilles des r~tl11p 1l1b

figurent. ~l droite un lion, à gauche un jO\Jeur d,~ biniOl:.
La longère nor, cl offre une autre porte un peu plus riche
que la précédente, arcature à crossettes, pinacles bosselés,
fleuron terminal, écussons frustes. Les vantaux ont des

sculpture.s flamboyantes tout engluées ,de peinture. A gau-
che, inscription: A. CABON : F. L : 1700. Il s'agit d'une res­
tauration de cette facade. La long'ère sud avait aussi un

si~c1e plus tôt, subi une restauration analogue, car' on v
lit \: F : GENTIL: 1600. Elle a' une porte gothique dans le
genre des deux autres. Le pignon du chevet, en pierres de
taille, est percé d'une fenêtre flamboyante à quatre pall­
neaux et une mouchette. Deux fenêtres à deux pani1'~a:lx et
une mouchette éclairent le bras de croix.
Dans le' tympan de la. grande v~tre subsistent des écus­
sons aux ·armes des Kergus, sieurs de Mézambez, fonda­
teurs de la chapelle.. Celui du lobe supérieur a disparu', et
on ne VOlt plus que le- cart;ouche Renaissance' aui l'entou­
rait. , D'~près M. de Be.rgevin, util1sant d, es notes de Pol de
Courcy que j'ai sous les yeux, cet écusson portait mi-parti
Bull. de la Soc. Archéo. " TOUl€ XLV. Métr1! iO).

146 . -
au 1 d'argent au, huchet d·'azu1' l.ié e. t engu.iché de gueules,
qui estl Kergus,au 2 coupé au 1 bandé d'or et d'azur, au
canton de gueulles cha, rgé d'une fiewr de lis d'argent, q.ui
est la Haye de. l'Isle', au 2 d'or .à la fasce d'aZl~r su. rmontée
(rune rn,erlette de m. êrn, e. quii est Calloët.. La généalogie des
Kergus-Mezambez n'indique pourtant · aucune alUance avec
les La Haye, fion dus dès 1530 dans Toupin. Peut-être a-t-on
associé sur Coe blas.on les armoir~es des fondat,eurs, les Ker.
gus, à. celles du fief de l'Isle, en Saint-Jean-du-Doigt, qui
s'étendait 'Sur ce quartier de Gwimaëc, ,et que posséd~it, en
1630, -écuyer Jacques Le Chaussee, 'sieur de Kerbri3nt,
époux de Renée Calloët.
Plus bas s.ont deux écuss'Ûns, l'un de Kergus plein, l'au-
. tre mi-parti de Kergu8 et de Kerr,era,ult. Dans la fenêtre la­
térale. mi-parti de Kergus et d'un bandé d'or et de sable,
qud. est Le Marec'h de Mezambez, ralilage de Trémédern ;
et dans celle du pignon sud, d'azurr à tTois co'quilles tt'ar­
gent, qui est Estienne de Pennanéach .
Deux piliers roulds, à l'entrée du chœur, présentent l'a-
· morce d'une arcade qu: n'a probablement jamais été faite.
A la maÎtresse-vître est adossé un beau Christ en robe rou­
ge flottante, ~ longs cheveux, coiffé d'une couronne rofale,
grandeur 2/3 nature. Sur le maître-autel de granit est un
retable en bois sculpté et peint à cinq compartiments, of-

frant des scènes de la Passion: la Flagellation le Porte-
ment de Croix le Crucifiement. Les ' Saintes Femmes
soutiennent la Sainte Vierge pâmée, et le centurion dési­
gne du doigt le' Christ. . La Descente de Croix .' TA
Résurj"ecti0n. Jésus s'élànce hors du tombeau, Une ban­
nière à la. main. Les boiseries latérales om: quelques pein-
, tures, têtes d'anges et motifs divers. A g'auche de l'autel,
Vierge-Mère avec draperies soignées, mais visag"e médio­
cre; sous ses pieds s'Ont un croissant, un monstre à buste
de femme et queue de · serpent, et Jessé endormi. Elle de­
vai t être entourée d'un arbre de Jessé, analogue à ce1i..ti
de Lücquirec, et qui n'existe plus. A droite, Joseph d'Ari­
mathie porte le suaire du Christ, la couronne d'épines et
les tenailles. .

L'autel latéral était naguére surmonté d'un petit- Christ
en robe qui a disparu, enlevé probablement par des tou­
ristes sans scrupules. On y trouve une Trinité gothique et
un saint ten~nt livre et bâton; dans la frise du lambris se
distinguent un saint Yves argumentant sur' ses doigts,
deux anges munis d'écussons et un grotesque déroulant
une b ;lll:derole. .

. - 1.47

muraille nord, groupe de Sainte Anne présen.
Contre a . . . J ' S .
grapp
'O ',cl ... , ralsm à l'Enfant esus que la amIe
tune '-- '- . ' .

orte sur s.on genou. Le volet de ' la niche qui ren-
Vierge p é" l'
't ces statues, sur lequel talent pellltes es Images
ferfllai . J dû' 1 .
. t Pierre et de samt acques, a exciter a conVOl-
e salO .,.

saint évêque bénissant et saint Dominique ayant à
côt , . b l'

ieds le chIen sym olque. -
ses .-
L chœur est fermé par ~ne grille de beaux balustres
tour , d" 'é
ntre des restes e pellltures, moüfs et fleurons van s.
composée de. six , médaillons encadrant des têtes masculi­
nes et fémini, e

coiffées de casque. ou de , chapeaux dans
la note Henri II l, que sou tiennent d'étranges génies bar­
bus sortes de korrigans enlacés de souples arabesques vé.;; ,
et une femme nus. Deux compartiments plus petits, sur­
montant la porte, conÙennent l'un un écusson brisé sup-

porté par deux génies, l'autre un élégant fleuron. Les
montants de cette porte sont aussi couverts de sculptures
d'une grande verve ; on y voit un dragon tricéphale mena­
çant deux hommes séparés par une haute t4ge épanouie en
un double dragon aux têtes affrontées.

La c.orniche supérieure, décorée d'un cord.on de pampres
fruités, porte le Christ en croix, entre la Sainte Vierge et
saint' Jean, et les deux larrons, avec quatre autres statues,
_ . saint Sébastien saint Laurent, un saint évêque et un

saint moine. A la grille s'appuie, à droite, un autel b·
pierre ou table d'offrandes, offrant en belles lettres gothi­
ques cette date : LAN : MIL : vc : LVI (1556). Le lambris I de
la nef avait une sablière sculptée ; dans les fragments qui
subsistent se remarque un ivrogne étendu à plat ventre la

clef d'un tonneau dans la bouche, et- se frottant l'est.omac
avec jubilation .

Derriere la chapelle 'coule la f.on taine de dévotion sous .
son édicule pointu, d'où l'eau se déverse dans une larae

plscme ,de pIerre. Tout pres, à l'entré. e d'un .chemin creux),
se dresse une grande croix à personnages~ montée sur ' un
~oc1e. à. quatre marches et sur un dé mouluré portant une
lOScnptlbn gothique à peu près illisible. Les statues S9

148

à l'avers, le Christ, la IVladeleine, saint Jean et un ECce
H omo décapité ; aU revers. un Christ en robe et couronné
saint Pierre, une saiIlte Femme et un saint mutilé, debo

sur un dragon" peut-être saint Paut" Aurélien, vénéré à Ker_
baul. On raconte que sous la Révolution, quand l'ordre.
vint d'abattre les croix, les patriotes de Guimaëc s'att

querent .,d'abord à celle-ci, et, pour la renverser, nouerent

au fût un gros câble qu'ils f1rent tirer par douze chevaux.
~1ais tous leurs efforts ne réussirent pas à ébranler la croi'(
que maintenait en place une puissance surnaturelle, et le
câble se rompit enfin, blessant plusieurs des iconoclastes,
lesquels jugerent prudent d'arrêterlà leur entreprise sacri­
lège.

Les archives du Finistère conservent une dizaine de

comptes de la chapelle de Christ, compris entre les années

1599 et 1681. Ils sont rendus, tantôt à l'archidiacre , de
Plougastel, tantôt au r .::cteur de Guimaëc, tantôt au sei­
gneur de Mezambez qualifié, en 1629, de foncier, et en

1659. dB propriéta~re de la chapelle. qui perçoit les reli-
quats et en donne quittance. En 1619 .et en 1624, le fabrique
, , note l'achat d'une paire de gants et d'une douzaine d'ai­
guillettes, qui semblent être destinés à quelque devoir sei­
gneurial. Le plus ancien des comptes (1599-1603) est rendu
par ce François Le Gentil dont le nom se lit encore sur la

façade sud, qu'il restaura au moyen d'une fillerye (quête de
fil) qui produisit 4 poix et demi . de lin vendus 8 escus 3
réalles. Yves Le Bronnec, maçon, releva la muraille pour
9 écus, et ce: côté dé la toiture fut aussi refait moyennant
5 écus, plus 9 réalles aux charretiers qui avaient transporté
des ardoises de' Locquirec.

Un fondeur léonard , Jean Cadoudal, refondit en 1599 la
cloche de la chapelle (1). Il reçut un salaire de 4 écus, et il
y eut divers frais aocessoires : 20 sols pour'l'inévitable col­
lation « en faisant le' marché »), charbon, suif, fourneau,
modèle en bois, location ,de soufflets pose ,de liens de fer

et d'un battant, un pot de vin de 8 sols au recteur « appres
qu'il auroit baptizé lad. doc1~e », 3 pintes de vin de 12
!:iOls « aux compagnons qui assisi:2rent pour monter lad.

(1) Il refond 'aussi, cette mêm,e année,
de l'église' de PliOuézoch (Reg. par.).

les deux cloches

cloche », et un
fonte.

149 _ .

,.1 sols aux ouvriers le jour de la
souper ue 20

o ne montèrent
. ' . b , d t 44 l1vres Cil
Dans la sUIte elles dev1l1rent plus a on an es,
' , . ,. 1 fi du beurre'
il Y avait parfois -des dons testamentaires. Le bon a nque

~rancois Le Gentil n'oublie pas en mourant sa chapelle et

lui lègue 1 écu. Un champ dit 'Pœrc-cw-Chapel. est. a . er. m

livres en 1659. Les nombreux pèlerins qui arriVaIent du
Tré Tuier et du Goëllo, par Toul-an-Heiy, aux pardons de
Sai;t-Jean-du-Doigt déposaient en passant leur aumône
dans le tronc ou sur la table de j\1 on.sieur Sainct Cristo
L'affluence était nombreuse aux deux pardons annuels, Je
jour de Saincte Crucis (Invention de .la ~ainte-C~oix) le :2-
mai, et le jour de l'Exaltation de la Sa1l1te-CrOlx, le 14
septembre. Le clergé de Guimaëc, les prêtres de Lanmeur,
Plougasnou, Saint-] ean-du-Doigt, y venaient en proces­
sion, avec croix et bannières. En retour, le marguillier leur
payait, « suivant la tradition et manière ancienne »,. des
repas et collations où fondait le plus clair du revenu. Le
menu, pain, vin et chair, et le prix, 60 sols, en étaient in­
variables.En 1662, anné~ de la grande cheretté, cela coûta

pourtant 10 s-ols de plus. En 1669, .le pardon de septembre
dut tomber un jour d'abstinence, car on servit aux prêtres
et chapelains de Guimaëc, ainsi qu'aux menuisiers qui
avaient besogné' dans la chapelle, un dîner maigre compo ;é
de pain, de beurre frais, de poisson assaisonné d'huile et de
vinaigre, et arrosé de 4 pots de vin a 15 sols le po~. A cette
occasion fut placé dans le chœur un tableau de saint Joseph,
qu'un homme a cheval était allé quérir a LannioI)., et qui
n'existe plus. Un chapelain attitré ' (Allain Le Déan en
1600) recevait 1 écu par an pour y célébrer une messe bas5e
aux dimanches et. fêtes. On s'y rendait encore procession­
nellement à l'Ascension et aux Rogations . .

En 161,2. Jean Raul étant fabrique. ((certaine nuict par
. ung turbuillon de vant la: grande porte fut overte et en
partie roumpue, . deux paneulx de la grande viltre brisés,
dont il bailla a monsieur La Roze pour' avoir acommodé
lad. viltre 6 livres 15 sols )). La toiture fut également ré­
parée. ~t il en coûta 15 livres en « vin. pain et chair pour

le disner de 3S homes qui furent au charroi des pierres ;l.
Les dépens~s somptuaires sont rares et modiques. En 16

un. accoustremeat d'esglise est payé 5 ' écus, un calice d'é:
tain béni à Morlaix 20 sols. En 161 1, « ungne etolle et Unrr
fanol et petit corporal en voulouz d'orange avecq du pa~
samen, t d'or » . c'oûte 10 livres. Le clocher· fut réparé en
1629, les lambris en I625 et I653. .

Aujourd'hui, la chapelle de Christ, est bien délaissée et
bien misérable. Les descendants ' i de ceux qui la bâtirent,
qui y prièrent, qui vécurent à son ombre, ne s'en soucient
plus. Le pardon est déserté, les q-ffranéles ont cessé de tom.
ber , sur la table de granit ou dans le vieux tronc bardé de
fer. Les murs se disjoignent; la ' pluie traverse le toit Idéla.
bréet pourrit les voûtes fléchissant~s ; les enfants brisent
à coups de pierre les vitraux 'armoriés que le bon recteur
s'évertue à entretenir. Personne du voisinage ne voulant ::'e
charger des clefs les portes demeurent presque constam·

ment ouvertes, ce qui donne lieu à de fâcheux larcins. Pour.

' tant, par ses statues de style, ses sculptures, ses bas-re-

lief. la pauvre' chapelle 'mérite qu'on s'intéresse à sa
conservation, et qu'on lui épargne le pitoyable sort qui la
guette, elle' et tant d'autres pieux sanctuaires dépourvus
de fi,dèles, dépouillés de revenus et de ressourc~s, dont le
mobilier d'art deviendra, si l'on n'avise point, la proie des
vers ou celle de -rapaces brocanteurs.

La chapelle de Christ est située au point de jonction des
deux voi~s de Locquirec et ,de TouI-an.,.Héry à Primel, qui
se confondent ensuite en un e seule jusqu'à Saint-Jean-du­
Doigt. Au carrefour où r- ce dernier chemin quitte la route de
Kerbaul ,pour s'enfoncer , dans les solitudes de M échou­
Christ, il yale socle d'une vieille croix détruite, sur

lequel on a posé un fragment du croisillon portant, d'un
côté, une Pitié informe, et de l'autre un écusson écartelé
aUx 1 et 4 d!une fasce surmontée d'une meuble indistict.
aux 2 et 3 d'wn bandé de six pièces. Ce bandé doit être le
blaso~ de Trémédern, qui possédaient près de la chapelle
le manoir de Ker-Christ, cité dan's la réformation de 1426,
et dont le lieu tqut voisin de Coz-Castel indique peut-être

i5i

' ëc par les villages de Kerdalaher, Kersalaun, Ke. -
Ulma , . L' f h'
rilly et Keradennec ; elle entre en ocqUlrec en ranc .IS-
o t le ruisseau de Kergomar, passe au Varcq et descend

AI ' kilomètre au sud-ouest de Christ se trouvaÎt le ma-
noir de Mezambez (M eçzs-an-Bé J la plaine, du tombeau)
ainsi nommé, croit-on, d'un monument mégalithique exis­
tant sur ses dépendances et que nous verrons plus loin. ,
Alain Marec 011 Le Marc'hec".sieur de Mézambe.z,
« .noble qui s'a,rme » à la réformation de 1426, é,ait un .
cadet del s sires de Tréméd,e'rn , e.t en portait les armes. , Son f
fils Guillaume épousa vers 1430 Amice. Le BÛlrgne· et Iut

oère d, e J, e,an, marié en 1477 à AnI?ette· de la ~'Ûis.sière,
fille de Kerohant en Garlan, dont Je ne · cornnaIS pas la
desc: endanoe. Vers Ja fin du :s : .ècle suivant, Mézambez
{Lppar~enait à, J, e'an de K, e1 rgus, miseuiI", à Modaix en 156S,
capitaIne du f,ort du Tau.reau ,en 1569, Juge' consul · en 1578,
époux dei Jeamne. dei Pensornou, M. Le Menn a ublié
dé.YUS notre bulletin un curieux certificat émanant . 'Yves
Tanguy, vicaire, d~ Saint Mel a.in.e, et att~stant avoir pu-
bHé dans Clette eghse « ,en vulg-alre langalge

. bœton », lu
dimanche ·16 JUillet 1581, la dé cl a, r ati on faite par Jean
de l\!e: rg-us, sieur de Mezanbetz, -de renoncer au

négoce d
ne vouloir « à l'advenir faire commerce ou négociatiQIll
'de marchandise, ne chose .aulcune desrog, el ante à la no-'
bloesse, laquelle dè. s ce }our il reprend les privilèges d'Ï­
ce .D.e ... , déclairant qu'il veult se gouverner do resnav ant
comme noble homme doibt et est tenu ,de faire, , et vivre de
s a I rente annuelle et servir lei royaux év:ocations. -du ban
et arrière'-ban, comme il l'a fait au pasl sé », sans qu'il
se soit présenté aucun opposant. ' ,
. Son fils J, ean, époux d'Anne de Ke, rgournadech, fut père
d'autre Jean, marié · en 1612 à Jeanne . .de Kerrerault et
mo·rt à Mezambez .en 1634, laisi sant, outr:el un fils a.îné
J e· an, deux fiUes, Ca,therine, qui épousai en 1637 dansül. .
quin .en PI; ouég-at-Guerrand, et élène, f.emme de Pie, rre
d e. Kerme, rchou, sieulr du Cosquer en PlouO'àsnou. Jean de

Kerg-u, s, ecuyer, sieur de' Mezambez, Coasvoult ,etc né en
1616, ép o.usa 1

Ma.rie de KermaDcm, mOTte' à' M.üriaixen
1644, 2° Catherine de Cr.ezolles. Du i second lit issuflent plu­
sieul's enfants bapti~és à Guimaëc ·et dont l'aîné René
de Kerg-us., cheyalier seigneur de Mezambe, z, fut' aussi
marié deux fois, à Marie, de Ta,nouarn, morte en 1671 puis
à Ma.rie-Anne de BoUoy: Cene-ci Iuti. , donna 3 enf~nts :
René-J.~)se'Ph, né en 1674, mort sans . alliance, Jean-Baptiste,
, chevalIer de Mez,ambez, mort à 19 ans> en 1675, et Louise-

i52 .. .'

Gillette, héritière d· e Mezambez, née en 1676 qui épo'usa
en 1692 AJJ ain-Franço:ùs d.e Coëtlosquet, si'eur des Isles)
cad.et de la maiEc m d0 Coët.losquet en Plounéour-Menez.
Après le déG ès de 1690, de R,ené de K, e-rgus, seigneur de .
Mézambez, père des précédents, -on ne trouve plus ce ma­
noir habité par des g.entilshD mmes. Cependant, la famille
de Kergus forma encor,e,avant de disparaîtr, e, de,ux ou!
t:ro'i, s génér,ations à St-Melaine de Morlaix. André de Ker-
,gus, frère, di e René, se fit prêtre , et müurLtt. chano:nG du
Mur en 1691. Joseph, autrel .frère de René, né en 1660, mort
en 1706, .épousa 1 ° Thérèse Franquet, dont UllGi fille morte
.en bas-âg.e ; 2° Françds,e Guillotou, morte, en couches en
1702 , avec '8on ',enfant'«ondoyé sur une partie qui apparut ));
3° M~..rie Mol, dont naq uit), en 1705 J eanMarie de, Ker-
. gus" che, v,alier, s,eigneur dudit lieu', marié vers 1727 à
Françoise-Marte, -Josèphe de Keroulas. Us ,eurent 5 enfants .
baptisés à St-Melaine .de' 1728 à 1735, et sl emblent, après
1753, a vo~r quitté la paroisse.

Le manoir de Mézambez, aujourd'hui démoli, existait
encore vers ~850 ; c'était une grande construction du sei­
zième siècle, à tourelle et double , portail. Quelques lin-
6~aux de fenêtres garnis d'accolades, des pierres de taiHe
moullurées ont été replacés sur les ouvertures de la ferme
actuelle. Le manoir tout voisin des Isles (au hâzi) , ainsi
désigné de sa situation dans des terrains bas que 1 'hiver
· ttansforme en marécage, a subi le même sort. ' Le 26 sep­
tembre I460, Olivier Le Blonsart et Anne Doudron sa
femme, fournissent aveu à la seigneurie de Boiséonpour .
le manoir des IsJes.

L,eur fils i J ean Le B1ons, a; rt, si,eur ,des Isles, et de
· .Kel'sg.biec, époux de· Marguerite de K. eraudy. comparaît
en archer en brig.andine à la m,J'TItre de 1503 parmlle, s
noble'sde PlounetVe, z-Lochra.s, t, paroisse O:ù se t;ri üuvaÏL
s crn manüi, r de K,ers abi,e'c , pi.1,s,sé plus t.a,rd, aux
Siochan. Il fut père· de' François ' Le B16n::art, , cité rMm
1543 à Guimaëc : « -- An Inizi à FrançOis, L3 Blonss,art
demeurant ,enL.éon; c'e'StiIlot.oire qu'il est no·ble )J. sà
lJ'~üte-fille Plézo Lli Le Blonsart. dame de Kersabj, ec, épousa
lm Ke1 f'ouzéré et la t,erre d·es Isles était ' possédée, vers
1580, par l,es ~ergus, de Mézambez, dont un ca.c1et, Jacques
de; Kerg,us, SIeU! de,~ Isles, commandait une compagnie
de 100 arquei buslers a cheval, danil l'armé0 de la Ligue,
en 1589.(1) , .

A. de Barthélemy - nO'C1.pnents inédits SUT' la Liç/ue en
BTeta' (Jne , 1879, p. 59,

.... 153

Au 5.iède· suivant, elle appart~?ait à la f.amille de Coët­
lOsquet, Alain-François . da Coetlosquet, SIeur. des .Isles,
'. ~ou:::a 1692, nous j', avons vu plus haut, LO 'Uls8-Glllette>
~g K:e.r~·us, héritière de Méz:=tmbe::.:. U~ -de leu~'s fils, J ean­
Gill, es. né en 1700 au manOlr d~ ~eng-ou, pres St-Po~ d,e
l éOll -illustra par s· es Tares mer~tes , e, 128 charges emI­
D'entes qu'ils lui permirent d'ex,ercer, l'antiqùe nom dG
Coët.losquet. Evêqu'e de Li~oges en 1739, m· embre

de l'A­
cadémie' française en 1761, abbéd.e Tournus. et d: 8 Saint
p.3,ul il fut . choisi pour être le précepteur d,e, s En~ants de
France', .et, privilègl 8 sans doute, unique dan.s l'histoüe, il
dir-~gea 'l'éd uca tian d· e trois rois, La ui~ .X VI , L~)U~s XVIII
et Charl les X, s'acqu'ittant de .c.e:tt(~: dehcate mISSiOn avec
. . une cQnscienc'8 : , un zèle, une, dignité auxqu, els, t'Jus Jes con­
t..smp'Ürains ont rendu hommage. Le· 2 octob:re 1751, il est
pxrrain p.a.r pr:ücuration à Saint-l\;'IelaiJ::,e , de M~)I'laix, d:e
Jean-Baphste-Gllles, fils de son trere mne Rene-Françols
de Go,e-Uo. squ, et, cheval er, I seignef ur des Isles. et de feue
dame Ursule Orio de Co· etamo'ur, né le 20 Août précédent,
,ct;)nt la naiss'a·nce avait cqûté la. vie à sa. mèr; e. Le 11 Juin
1781, jJ nomm,e encore', étant repl'és,entépar M. Sébastien
du Penquer Tânguy, prêtr

8>, .son petit-nevl eu J e3!n-Ba. ptiste­
Gilles Le, Ro·ux d, e Kerninon, fils de lVfr

Pi,erre-Jean, chev;).­
Jier,se::gneur du Chât.el, de Vildé, et.::: .. et dei Mar~,e-Jeanne

de Coëtlosquet de la Palue.. Il mourut à Paris tr.o· is ans
après. S.a mère Ginette de Kergus, décédé'3' à Morlaix en
1762, à l'âgc' de' 86 ans, fut jm.humé'3 dans l'église du cou-
d' )3 Capucins, en Plouje.an. .

La voie de Saint-Jean-du-Doigi~ traverse, à l'ouest de
lé!. chapelle de Christ, une étrange plaine infertile et qU2t­
si-déserte, détaillée en vastes landes, en fouge~aies, en
bruyères entremêlées de taillis et . de maigres cultures. On
chemine longuement sur la viei,l1~ piste argileusa,coûpée
de fondrières', , envahie par . les broussailles, tristement
enserrée entre deux hau~s talus palissadés de ronces et
d'ajoncs, et montrant par iJ(laces, sous l'herbe roussie, des
restes de 'son fruste 'pavage de galets. Une sorte, de mys­
tère ancien et de vag,ue · effroi flotte encore sur cetfe terre
qu'il faut parcour'ir, comme je l'ai fait, sous un ciel dé­
solé . de novembre qu'empliSsent seuls la plainte du vent
et la rumeur sourde de la mer battant les falai3es proches
de Sainte-Rose et de Beg-an-Fry. Jadis, des loups rôdaient
dans ces solitudes, et les c'omptes de Saint-Jean, ainsi
que ceux de la chapelle Christ mentionnent, de r600 à
1630, de nombreuses gratifications accordées. ~ux veneurs
deM. de Coetnizan (~ pour avoir prins des loups )) ü la

- - ' i 54- ' -

Lande Verte, Craiz-an-Vrach et ailleurs. D'autres êtres
plus immatériels peuplaient aussi ce vieux sol jonché de '
ruines mégalithiques, dolmens abattu~, menhirs déraci­
nés, cromlechs dispersés. Les korrigans y dansaient, sous
la pleine lune de juin, autour des grosses pierres, et v

étalaient leurs trésors au grand soleil des jours d-'été .
L'abbé Clech nous a laissé, , dans ses curieux Rêves d'un
glaneur celtomane (1) où l'on recuei11e tant d'utiles in­
dications pêle-mêle aveC de bizarres étymologies et des

rapprochements dignes de Le Br;igant, le compte-ren-
du de ses courses a,rchéülogiques à travers , la , région. Le
premier, il a signaJlé et décrit le monument que nous ren­
contronS, à 500 mètres de la chapell: e, sur l'ancienne voie;
_ c'est un dolmen mutilé· formé de 9 pierres debout, 4 de
chaque côté, la dernière au fond : longueur, 3 m. 40, lar­
geur ° m. 80, hauteur, de ° m. 50' à ° m. 70. Quand
l'abbé Clech le vit, II pierres étaient encore en pl..tce et
les débris de tables gisaient à l'entour. Ce pâtour qui le
guidait lui dit 'que c~ dolmen s'appelait le Lit de la Fileuse
- (Gwele-an-Inkinerez) , que cette Fileuse était -une sorcière
et que, lorsqu'en filant elle lançait son fuseau à droite,
il allait tomber à la poi:p.te, de Primel ; si eUe le lançait
à gauche, ill tombait au rocher de Roc'h-HeJlaz, Sur la
Lieue de Grève. A présent, 'la sorcièce est oubliée, le mo:­
nument s- e nomme le Lit de Saint Jean (Gwele-Sa.nt-Yan) ,et
les passants ont cessé de se frotter les reins à la pierre du
chevet pour gùérir leurs rhumatismes .

P~us . avant, le même pâtour lui ' mon'tra un bloc ;'de
quartz lancé par le diable, sur lequel, à la nuit, une dame

blancJ:1e venait s'asseoir, une baguette à .la main. Je n'ai
pu le retrouver, mais j'ai vu quelques restes des deux

cromlechs qu'il situe dans, les mêmes parages. Le temps
m'a manqué pour identifier ses autres trouyailles, le tu­
- mulus de Run-ar-Morvan et le dolmen de Run-ar-C'horred

(le tertre des Nains), dressé, avec plusieurs neulvens et

blocs, sur une pente dominant au sud le hameau de Ker- '
morvan.

(1) Publiés ,dans L'Echo de' M01·~aix. années 1842 8t 43.

Les:-ermes de Tala:œ, n (anciennem'ent TaUaou, en) et d· e
Fl1ntanic, à l'ouest de Mezambez, \ont été d'hum~les ma-
1lO-11's, le premier pos: sédé en .1426. par J ehan Col1ot.m, nob~,e
qui s'arme. Guillaum, e Collott~, ,s~eur de TaUaouen, s~ pre­
sentI e à la. montre de 1481 · e\n eqUlpage d'archer en brIgan­
dine. En ~543 ce, lieu était à P, rigent Calloët. A 1::1 même
d,ate Guillaume· Qu· effararz8', sieur de Runtanic üomparaît
en ,a~:çh:er à , cheval à la montre de Tréguier, puis à celle de
Guingamp (1549) et f~it défaut à · cene .de 1568. Son fils YVOll
meurt ,en 1627, et le nom de Queffarazfl8' disparait avec M:s­
sire Prigent, prêtre, sieu'r te.mpoT 'e.l de ~untanic,. chape­
lain à. Guim, aëc, décédé en 1668. Ce mano;r app:::Lrhent en
1679 a.u sieu! r de la Ville(t1· 3uV8

Rolland, dont .la. fille aînée
Je.a!nne, mûre héritière de, 42 pr:intemps, conv:ole

le 13 Jan­
v;:. e:r 1698, dans la chapeUe· de Christ, twe,c un Çauvre

cadet
.l.annionna.is, écuyer Jean de Lezormel, . sieur de Pencrech,
âgé ,de 27 ans, declal'é i sans biens » à la c. '1pitaU,on d, c
1703. Ils mourl.~pent sans po'sté'rité, l'une en 1733, l'autre en
1741, , et ce de'l'nier fut bientôt suivi dans la tombe pat son
frère, écuyer Jean-Franço'Îs de Lezorm, e' l, si,euJ" dudit lieu,
diécédé à Runtanic le 10 ,avril 1741 et enterré clans l'ég-lise
de Brelevenez, à Lannion. ' .
Sans dépasser l'énigmatique « Lit de la Fileuse », re­
gagnons la route de Kerbaul et suivons à l'est, vers la
côte, un vieux chemin à l'entrée duquel veille en sentinelle
un petit menhir haut de 1 m. 60. ' Nous traversons la ga­
renne de Lan-ar-Vein t.a lande des pierres) plateau her­
b~ux où des . blocs moussus émergent parmi les touffes
d'ajoncs ; puis nous passons devant Lezirfin, ancienne
. maison noble totalement rajeunie. « Lezirfin, à Claude
. . Le Rune1 », lit-on dans la réformation , de 1543, « qu'ils
(les témoins) disent vivre noblement, mais ne connaissent -
pas de son extraction ». En 1650 y d~meurait Jacques Le
- N y, écuyer, sieur de Lezirfin, cadet de Coatudave1 en
Plouvorn, et sa femme Françoise de Tüomelin y mit au
monde, le 10 Janvier 165 l, une fille baptisée à Guimaëc
sous le nom d'Antoinette. Cette ' Françoise de Tuomelin,
morte, à Morlaix en 1694, âgée de 83 ans, est enterrée
clans l'église , des Jacobins ; sa fille aînée Marie Le Ny,
dame de Lezirfin, sœur du Tiers-Ordre de Saint-Domini­
que~ est inhumée le 20 avdl 1710 dans l'église de Saint··
Melaine, à l'âge de 60 anS.

Près du hameau voisin . de Kernod s'élève la chapelle
de Sainte-Rose-de-Lima, admirablement campée sur une .

, ~ - .. 156
montagne dominant la mer de plus de 80 mètr'es et dé­
vallant par une pente vertigineuse jusqu'à la jolie plage
ignorée de Pou1-RoudoUr, fin tapis de sable blond étalé
au pied d'abruptes falaises. En face, (( les Charrues )) dé­
chirent de leurs socs de granit la gl~be mouv:ante de la
mer, et la côte de Lannion s'allonge au loin vaporeuse,
teintée d'ombres rosées ou violettes. Cette chapelle est

un petit édifice flanqué d'un bras de croix a l'est. Le pi-
gnon ouest porte un c1och~ton XVIIIo siècle, et la vitre
a des meneaux flamboyants formés de deux panneaux ct

d'une mouchette. Un œil-de-bœuf ovale ajoure le bqs-côté .

Un Christ adossé à la fenêtre surmonte le maitre-autel.
A droite, statue de Saili.te Rose, visage bistré d'Indienne,
la tête coiffée d'un , voile de dentelle, la ceinture entourée
d'unecü;rdelière, un livre- a 1.a main. '. Elle est contenue
dans une armoire sur les volets ·de laquelle sont deux

scènes en bas-reüiefs : d'un côté, un prêtre 'agenouillé de-.
vant un autel regarde une colombe volant au-dessus de
lui, et lève les bras en signe d'étonnement ; de l'aUtre,
perSonnage en robe, la main droite levée et tenant un
bâton sur son épaule gauche, paraît sortir d'un palais ou
d'un temple. A gauche, Vierge-Mère dans une seconde
armoü~e à volets sculptés, offrant un évêque bénissant et
un saint religieux portant livre, chapelet et bâton. D"!;ns
le bas-côté, autel de pierre sous la fenêtre, Sainte Anne
triple et Saint Eloi. .

Une vieiUe gwerze bretonne narre ainsi l'origine tou- '
chante de cette Chapelle. Un j-our, una jeune fille appelée
Rose suivait le sentier de la grève, lorsqu'elle trouva, au
milieu d'épaves reje~ées par les flots, le Corps d'une fem­
me qui pressait enoore un tout petit· enfant sur son cœur.
Ce cœur, hélas, ne battait plus, mais il restait au .bébé un
fragile souffl· e de vie, que le froid et l'épuisement' allaient

, bientôt éteindre. ' Dans un élan de compassion, Ro&' e sai-
sit la petite créature, la réchauffa ,Contre Sa poitrine et
.lui présenta son sein virginal, gonflé à l'instant d'un lait
miraculeusement apparu. L'enfant en but tout son ' soûl,
et s '~ndormit réconforté dans les bras de sa mère adop­
tive) qui continua dès lors de le nourrir et d'en prendre
soin. Pour commémorer un tel prodige, on bâtit sur le

157

rivag'c un oratoire , dédié à Sainte-Rose- ,ùe-Lim~, patron:1e
'de la jeune fille, el on y plaça un tableau representant la
'scène de l'allaitement merveilleux, tableau supprimé de- '
puis par pruderie. Les ' ancien~ assu~aien.t que cha~ue ~n­
née, le jour du pardon, la samte peruvienne venait d A- , ,
mérique visiter sa chapelle, et qu'on l'apercevait parfois
traçant en l'air un lumineux sillage. ._

Les seigneurs de Kervéguen étaient fondateurs de Saill-
te-ROse ; le -recteur de, Guimaëc leur deva,it, en cette qua­
li0 é, un droit féodal relaté dans un aveu de 1703 que cite
M. de Bergevin. Le dimanche du par, don, les fermiers de
la dîme' rectorale dans les cordelées de Kerouriou et Ker­
baul avaient l'obligation d'apporter sur le placître « plein
une brassée de cordes de pois en gousses pour y estre en
l'endroit brûlez, ou à défaut de ce, payer à ladite sei­
gneurie 60 sols d'amende . . » La procession des Rogations
s'y rendait annuellement, et on y disait une meSse de fon­
dation le jour des Gras .

Par Kerellon , ·et Kerouriou, nous atteignons le vieux
hameau de Kerbaul, dont les maisons vétustes, entre leurs
cours closes à portails cintrés et leurs courtils enceints
de ruineuses murailles enlierrées et moussues, ont un peu
l'apparence de manoirs. C'est un lieu très anciennement
habité ; .on y a trou'vé des haches de pierre, et un chemin

mentionné danS des actes du XVIe siècle, le reliait direc-
tement à Morlaix. En tête de la réformation de 1426 à
Guimaëc figure « le bourg de ' Kerbaul .0 ses appartenan­
ces )l, et trois de ses notables habitants, Yvon de l'Isle,
Hervé Nédelec et Hervé LelVlerdy, comparaissent Comme
témüins. Perdu tout au bout des terres, ~ur Sün dos de
promontoire venteux et pierreux, où les longues houles
vertes de la Manches s'acharnent inlassabl

ement, où de
rares arbres étiques plüient l'échine Sous l'haleine vio­
lente des fl.ots,. Kerbaul semble être, à ·cette pointe du lit­
toral trégorrois, une , colonie léonaise, et ses fondateurs y
auraient abordé par mer dans la crique abritée derrière 1e
gigantesque écran de Beg-an-Fry, apportant avec eux
leurs vieux saints et leurs lég.endes. La çhapelle de Ker­
baul avait, en effet pour patron le 'grand apôtre du Léon,
Paul Aurélien, et la famille de Kergournadec'h, issue , du

, i 158

chevalier N uz, . qui combattit avec lui le dragon de l'iIe
de Batz, possédait tout près de la, sur les confins de
Plougasnou, .le manoir de Kermorvan. D'autres maisons
léonaises, les Riou, les Pontplanc6et, avaient aussi des

hostels nobles au mem:e terrOir,

Ainsi qu'il arrive d'ordinaire, ·les survenants ne tar­
dèrent Ras à localiser dans le pays la légende de leur
saint protecteur. On raconte que Paul Aurélien, en tournée
d'évangéiisation, passait un jour à Guimaëc, lorsque les
gens le supplièrent de les débarrasser d'une horrible bête,
dragon ou serpent, qui avait son repaire dans les rochel S
de la côte;' et · dévorait tout · être vivant, homme ou bétail',
aux alentours. Le saint marcha hardiment a sa rencontre,
la dompta d'un coup de · Sa crosse sur le crâne, lui fixa
son étoI'e autour du cou ' et la oonduisit jusqu'à une fon­
taine où il lui plongea la tête pour l'étouffer. Le monstre
tardant a mourir, Paul le traîna sur la falaise voisine et
ltii commanda de se précipiter dans la mer. L'endroit
où il s'engloutit a gardé, comme a l'île de Batz, ' le nom
de Toul-ar-Sarpant et les vagues y mugissent étrange­
ment dans les jours de bourrasque. La légende ajoute que ' .
l'eau de la fontaine, a laquelle le dragon mêla sa: bave ven~­
meuse, conserve depuis la propriété de guérir les chiens

,enragés ~qu 'un instinct Sieorl et y conduit deF~us;ieurs
lieues a la ronde.

On peut croire que cette tradition a, été apportée et 10·
calisée dans le pays par la famille Ide K.ergournadec'h.
bien qu'ici ' l'e saint ait tout fait par lui-même, sans Je
concours du Chevalier Nuz ou d'auCun autre brave. Le
souvenir du dragon est d'ailleurs demeuré vivace aux
alentours. A la chapelle de Christ, on voit son image
sculptée en granit au. pignon et en bois sur le chancel.
Son oorpS squameux ondule encore dans les frises de
l'église de Saint-Jean et de l'oratoire du Sacre, : sur iè
cimetière. C'est toujours lui qui ' vient en sifflant pàr ' les
airs darder sa langue embrasée dans le Tmitad ou bû-

cher du grand pardon de juin, et le nom de Parc-ar-G-rif-
fonnec., resté a l'un des champs du terroir de Kermorvan,

rappelle a n'en pas douter, qu'il y dévora quelqu'une
de ses victimes,

....,...., 159 _.

Sur la fontaine où Saint ~aulp~nsa noyer :a b~te, on
ntruis

une chapelle, qUI, refaite en dernIer heu :m
co , " '1 "d'
seizième sIècle, exIstait enCore 1 y a ' une qumzame, an-
ées, Accroupie sur son arpent de gazon planté d'une
lisait le type parfait , de ces sanctuaires vét\lstes, . hantés
(le l'esprit des anciens âges, mille .fois plus expressifs et
plus évocateurs dans leur dénuement que les chapelles
trop bien cimentées et recrépies de maintes paroisses se­
mi-urbaines, Telle que je l'aperçus pour la première fois,
détachant sur l'admirable rideau bleu de la mer, brodé
d'écume et de paillettes diamantées, sa fruste nef de moel­
lons jaunes et son toit arrondi plaqué de mousses d'or
f.auve, elle m'a laissé une impression inoubliable'. l:1a~ie
en équerre, elle ouvrait sur sa façade sud, prequ'au ras
du sol, deux petites fenêtres, l'une ogivale, l'autre ronde.
Une troisième, divisée en deux panneaux trilobés, ajou­
· rait la façade est, et près de la porte latérale coulait la
légendaire fontaine sous une arcàde creusée dans la mu-
raille. . . .

Au maître-autel étaient deux statues : une Pitié assez
difforme et ba,rbare dans' une niche aux volets arrachés ;
la Sainte Vierge, assise sur le bord du sépulcre, portait
Sur ses genoux le Christ ayant sous les pieds deu. x peti- '
tes têtes humaines, sans doute Adam et Eve. Un Saint
Paul Aurélien en évêque, accompagné· du dragon qui
mord l'extrémité· de la crosse. Deux autres statues

posées sur l'autel, anonymes et Sans attributs très ca-
ractéristiq\les, figuraient, l'une un saint coiffé d'un cha­
peron, longs chevèux ondulés, barbe en pointe, chapelet
passé au cou, un livre à la main, peut-être Saint Jacques; .
l'autre un saint prêtre, tête nue, en surplis, manteau sur
les épaules, ayant les mains brisées. Comme je soulevais
la première, placée de guingois a l'angle de l'autel, pour
rexal!1iner de plus près, j'~us la surprise cl 'en entendre

tomber une dizaine de · gros sous qu'un fidèle , avait in-
troduits dans le trou Olt s'emboîte la cheville destinée a
maintenir d'aplomb les statues de bois sur leur socle. A
qu.el vœ~, à quel rite se rapportait cette offrande si bi­
zarrement çissimulée ? '

160- ·

Dans la chapelle latérale, autel de pierre. Une grille
à balustres fennant le chœur ~tait surmontée d'un grand

Christ mutilé, et pres de la porte, il y avait une ancienne
table d'aumônes, en bois, soutenue de deux tres curieuses
cariatides, l'une d'un homme nu, ayant le type hindou ou

mongol, Icoiffé ,d'une .sor~e de turban aux Ü.on~s plis

flottants, le ventre proéminent, tenant à deux mains un
cartouche en losange . .offrant une tête aux yeux bridés,
aux moustaches tOJ:rlbantes, avec une · auréole , de rayons
ondulés ; l"autre d 'une femme également nue, chevelure
bouffante, portant une croix, et d.ont le buste subsistait
seul. Le lambris était semé de fleurs de lis et d'étoiles,
avec quelques ébauches de masques grotesques dans la
frise. Une arcade, à l'entrée de l'aile droite, avait à sa
clef un écusson aux armes peintes et presque effacée:':,
des de l'Isle de Penamprat : cle gueules à 10 billettes d'o1' .

Bien délabrée déjà lors de ma -visite, cette chapelle
pouvait encore, au prix d'un peu de générosité et d'en­
tente, être réparée et sauvée. On n'en a rien fait, et on
ne , lui a même pas permis de devenir, dans sa combe
solitaire, une pittoresque ' ruine drapée de verdure, qu~
eût continué de poétiser l'âpre paysage dont elle était
l'âme. LOJsque M. le chanoine Abgrall et moi y avons
pa'ssé en 19I3, nous l'avons :trouvée saccagée ·et anéantie;
la Kul~ur allemande n'eut pas mieux fait. Boiseries, ar­
doises, pierres de taille, tout a été pillé; les statues ont
été brûlées, m'a-.t-on dit, sauf la Vierge de Pitié, qu'une
bonne vieille de Kerbaul a recueillie, et les -vandales ont
poussé .leur rage de destructi.on jusqu'à renverser la croix
du pladtre, qui gît en morceaux sur le sol. Honte à ceux,
quels qu'ils soient, qui ont commis cette , laide et mauvaise
. action !
A l kilometre au sud-ouest se trouve le vieux manoir

de Penamprat, qu'un~ carte de Bre~agne gravée .au XYIIO
s, iecle et reproduite à petite échelle dans la Bretagne A r­
moYicaine de QuelJien nomme Bout du, P, i. Guimaëc n'y
est pas indiqué, et, vers l'emplacement qu'il devrait o~~
cuper, se voit une lccalité appelée Leclresse, dans laquelle
on ne peut reconnaître que la Leo-clrez, la « Lieu. e-cle­
Grève » qui sépare Saint Efflam de Saint Michel. Tout

cela ne fait guère l'éloge du géographe Robert, auteur

1.61

,..J'te C;lrte. En 1426, 'Yvon de l'Isle possédait Penam-
kl,ld
lll
, 'T b'l"
e.. 1»1 de Courcv veut Je rattacher, (dans son ~ \ () L1wre,
'f'lt. l J . '
~' . " im3 0 'inaire famille des Isles, à laquelle Il donne pour
'1 LIlle.. b G. ..·
, " "'lll la. terre du même nom, en .rUlmaec, et attnbue
hel

· Iles de Penamprat et l\.ergomar, meme parOIsse, malS
ce. f 1 . ,. l' ,
\!. p. de LIsle ~u Dre~euc. a,ort. Jien .e~ab 1, en s ".:ppu-
· t c:ur la parfaite conrormlte des armOines et sür divers

: '.eus des Archives , des Côtes-du- Tord (1), que les diverse:.
) ln de la seü,'neurie haute J'usticière Ije l'IsJe-Mousterus, '
J11l ' '-'
· r'~s Guing'amp.

Get Yvon de l'Isle épousa Françoise. de Kermabon, ,eL
:lItt pèl"(: } de FI"8:n ço,is, '~m,~ ·1.rié à Cathe,rine Le. Corre de- K81'1.1 -
z ,[ll'é. L,cul' peüt-fils (ru:lla1lJue de l'Isle, l'HeUr de Pen:lm­
);l'at, po's:el s! S ,ellr .d'lm fief de 14,0 1'lvre, 3 de l'entes à G.uimaëC',
, cOIllo8.l'mt en bl'lgandu.n,(~, uvec archer et pag-e ,8l:X moutrcs
de 147U €t .1481. ~a réfo, rma,tion d e· 1543 at.tl'ibu e Penftm­
nra.t et Eerbaul à Yvon de l'Isle, étreher à cbev[1.] ·aux
épousa. ·une !.:p,üas, clame , d.e, Kergoff . en l-0~lgn.~r:10il, ql1l
llli dOI:1na tro's enf.aJlts : Rol1:lnd de l'Isle, S!elJr de Pen­
[l,mpr: a.t, haH Ii. de Plo-ug3 Sl1:)'UI en 1599, mort s:ans postéri­
té de sa f,emIne, Jle8nne ,de Cr,ezolles ; GuiHallme, del'IsJe,
jJrêtre et ~h,aJ?~]~a i~n di e SÇlillt P.aul, mo,rt e,~l 1617, et lYIari~
de l'Is! le., nenher: e de Pen8mpnl.t, Kergofi, Kergll, eff, qUI
épOllS84 v, el'S 1577 Fra.nçois de Ke.rgarion, sie,ur de Keram­
provost.
Le. m' fils VaJ,entin .de Rcrgal'ioLl, écuyer, sie'llr de Pen­
~1ll1P]·8.t, Kel'gofi, etc. commlmiqu, a, à Albert Lei Grand,
l'auteur de, la Vie des Saints de la Bretagne Armorique,

la charte .qui rel atait le 111 lracle, SIJ,rVenn er,l 1506 è, S.aint-
Je.an-dtl-Dolgt, lors de la visite' de la reine Anne, charte
J'eü'ouvée' plus ta.l'd pal' ::\Iiorc-ec de Kerdanet. 8 , t insérée
cl8 1l'S se, s préciellses notes sur ]'.ouvI'n.ge .du pie,ux DOlYlmi­
('ain, Vale,!lijn de Kel'g.'lrioHsembJ, e n'oNoir guère .résidé
à PeIlarnprat ; ·il Y .décéda cependant Je 20 A'oût 1669,
« d'un'e mort subite et [mpolll'vüe » , s,ans la.issl e, r postérité
de son aninnce avec ::\InTie de RerJechdll Ch.'1ste1. et S8,
sœur J en n n.(~i de Kergarioll, m ,ariée à un gemtilhomme cor­
nOlmi,ua'is, Guillaume dei p.estivjen, sieul' de. Keroudrcm,
Apporta dans cett· e: mais,on l'héI'itage des .de l'Isle.
Los PesUvien étaient de
éc.rh l'ahbé d.e Pelo.amprat

vieille race. « Ils se p l~étenden1:
dans sion Nobilia."iTe brreton, ma~
(1) p. de Lisle du
1887, p. 40 'et 41.
Dreluenc. - A.nnoiries et pTéém,inence,

Bull. de ]a Soc. Archéo.

- Tome XLV. Mém. 11.

162

nus, crlt de 17'74, issus -d'un Ü'èDe de Tristan de, Pestivien
pris ,et' blessé à la bataiUei · des Tre.nt.e: en 1351, et porte.n t
les mêmes arm, e· s que GLliillallme de Pe.stiviJen, chevaliel'
en 1397,mais e,e.tte filiation n'étant appnyée que, :SUT' le brUit
puLl1c, ils. ne purent -obtenir lE:-s titres d,e chevaLeTs ni
d'écuyers d'ancienne extraction ». En efi, e, t, l'arrêt 1"'eIlUL.
le 29 Juillet 1669 par la Chambre de la Réf.o-rmat.i·cn 1003111'
attribue' sle ~ulement la, nobless,e d'exü'action. maïs Courcy,
de son autorllté propre, a infirmé cette E ·entence, et lem'
déce, rnechevale, rie etext.ract~.on ancienne, .c-omme, descen­
dantsi .des sir,es 'et bar.ons de Pestivi, en.
Douairière, en 1673, Je,anne de Kergario'U vint habite.t
Peuamprat avec son fils. Fr.anç'ois de PesLvien, S10U1' de
Keroudr; en, ma, rllé en 1670 à Franç":::is,e.-Lou:se de Coëtlos­
qUiet; il mourut à Morlaix en .1676, à p8line âgé de 32 ans,
et fut inhumé dans l'église de Salnte-Mel::1ine: Sa veuve
(jpolLsa Sébastien de, La.uza,~ne ', seligneLl,r de Kerau(er, pUlS
1 ' 80 sieur dei la Nocherie PTincey, ,et mouTut à Penampl'at
Ie, 9 juin 1703.
S::m fils Flançois-Jose, ph d'3 Pestivien, chevalier, se:gneul'
cle, :K,E.~roud.ren, Pein.ampr,ar~, . Kerestrla.sl, c.apl~ta,lIl!e d;e la
paroisse de Guimaëc, né ·en 1672, épous-e le 20 judn Hî95
Hélène-OJiv,e Pastour de Ke,rj an. Son fils aîné Pierre­
Uonis; , siel , r de Keroudren, décéda sans allianc, e en 1760 ;

8,c,ond, YvC,s.-Joseph, seigneulr baron de Pelsti lien, né
à Penamprat en 1698, fut marié à Morlaix (St-Me:Ja:ne)
le 12 s.eptembrre, 1704 à Ca.therdnc-Niüole. Or;.ot de · Coe­ tamo'iu, qui lui donna. un fils unique, Marie'-Jos,eph-Alexis,
né ,en 1746, baptisé le 24 janvier 1747, , avec po'ur pal'T,ain,
1 , 81 ma.rqü~,s. d.e Coëtmen, brigadIe, r des armée: s, comm: :mdant
en Bretag-ne, g, ouVel"11, eUr de Brel st et de Tréguier. Yve'S­ Jo! sleph de Pestiivien mOl urnt Ù Penamprat en 1755 et sa
veuve. sie remaria ·en 1760, dans la chap, eUe de Saint Pa,ul,
avec- Sébastien-François Jégou, s,e-igneulr de, Ke:ramel,
chevalier de Saint-Lou-is, brigadier des mousquetadres à
cheval de la ga l'de, . L'une die' ,s'8'S sœurs, IVlarie-- Françoisc
Oriot, , ava,it époulsé en 1749, dans la même .chapeUe

Jac
ques-Claude-Toussaint Le Bihan, chevalier, , s,eigneur ete
Pennelé, veuf de Ma.rle-Claud, e-Thérèse de C.Jët.losquet.
Ma:rle-Jose'Ph-Ale, xi,s. emporta préma,turément dans la
tombe l',antique nom des Pe.stivi, en. Mous,queta:ire d'e la

compagni, e de là garde' e, t qualifié baron de, Pestivien,
il épous,aen 1774 une Nantaisl e, Matie-Gahri.eUe de Ja
Rüche-Sa.imt-André. Une fille, Marie-Henriet, te, leur naqnit
à MÜ'I'laix le 1

mai 1776. Le 15 juin suivant, son père
mO' 11.:rait à l'âge de: 30 ansl , bientôt su i .vi pa,r , elle, au 'cer­ cu! eH (13 juille, t), eft la terre d· e· P.3namprat passa à la h­
mille de. Tavigno':q, en r~Lli ,~on du mariat;e, en 1731, de
Jeanrne-Françols'e dB Pes, tlvl·en, , sœl1ir d'Yve:s,-JIQ, seph, ave, c
écuyer Jean-Baptiste de Tavignon s, ienf de, Keràllv, de
laI ville de Pontrieux. ' / ' .

16:3

. que divers actes du XVIIIe siècle donnent au ma-
BIen A
. _ de Penamprat le nom !t: !.c château, les batlments qUi
11 0 11 . ' . d . d 1 b 1 r~ c. t
. sistent 11 'mdI-quen t nen e oonS1 ' era e. \...-e ~on
sulJ d' 1 1 l 1 d 1
J - éditkes ' 'llleg-a e .lauteur

aspectes au nor. , perces
( a UX .
(~~ quelques port s ci~trées .~t de fenêtres moulurées dans la
te Louis XIV, malS n'offrant au surplus aucune recher-
nO . SIl b' . d

d!'archltecture. eu, Je g-ros co om 1 er . qUl se re~se
c le - . .
"vanl de la ferme, comme une tour de défense, impri-
en " . 1
me encore au man011- dechu un certain cachet seIgneu-
rial.
La pointe d e Beg-an-Fry termine majestueusement
aU nord-ouest, l'abrupt terroir de Kerbaul. On y acc~de en
traversant uD e lande dont le sol, calciné il y a quelqu~~s

années par un lei1t incendie, s'est recouvert d'une m ou">::
rougeât·re d'aspect sinistre. Au sommet du pronl0nl0ir(~ .
élevé de 50 metres au moins et strié de gran.des failL::,
obliques, une étroite plate-forme talutée portait jadis un
mât !::i'e s\gnaux qui correspondait avec ceux des forts '.1. ;
Primel, en Plougasnou, et de Beg-ar-C'hastel, en Locqui­
rec. La cÔle est très accore, et dans les plus beaux JOU J ' .

les vagues brisent viojemrncnt au pied du rocher, s'épa- ·
nouissant en gerbes d'écume, s'engouffrant à grand brui L
dans les ca vernes et les crevasses que l~ur action sécl1 -
laire a creusées de toutes parts. 'On /d it qu'à l'une d'elles
se raccorde le mystérieux conduit qui fait communiquLr

avec la mer la source enfouie sous la crypte de Lanmeur,
et qu'un canard, lâché ;\ Beg-an-Fry, fut retrouve nageant
paisihlement dans la vasque de la fontaine. La légende
ajoute que les flots se précipiteront par cette ouvcrtnn~
ceçtain dimanche Ide la Trinité, à l'heure de la grand'mes~
se, et qu'ils inonderont .J'église de Lanmeur, en noyant
tous les fidèles. Pour preserver ceux-ci d'un SOrL aussi
funesLe, 011 célèbre, ce jour-là, la messe dominicale à la
chapelle de Kernitron.
Le paysage -marin qu'on embrasse du haut de Beg-an­
Fry est d' une sévère beauté. La pointe dentelée de Primel
s'étend longuement à l'ouest, masquant en partie le;~
lointains rivages violâtres du Léon, et la mer s 'él end

ImmenS.e, écumeuse, empl:e de vent et de soleil. Vers l'est,
derrière l'abri du cap, elle baigne les montagnes de Sainte

164

Rose et de Brézéhantid"une calme eau bleue, aux tOll~
presque méditerranéens, et contourne la: vieilJe commal1~
derie de Locquirec pour aller battre les falaises rousses de
Trédrez et de Trébeutden, dont 1 'œil suit le profil in fié~
chi jusqu'aux roches brumeuses d'Enez-Veur, devant It~_
queilesvei11e en sentinelle perdue. la blanche tour des Tria~.
goz. .

Regagnons directement le bourg par cette même route
de Christ et de Kerbau1 parcourue à l'aner, et suivons à
présent, entre d eux talus élevés tout barbelés d'ajoncs, le
chemin de Locquirec. Bientôt, nous rencontrons', au C2X­
réour d'une voie charretière menant au manoir !àu RelIès ..

en Lanmeur, une croL" primitive de schiste, assez plate ,
aux bras- légèrement pattés, haute d'environ l mètre, en­ tée dans un mégalithe arrondi. , On raconte que cette
pierre servait de boule au diable, et que. des chrétiens
ayant joué à celui-ci le mauvais tour d'y planter une croix,
Satan furieux s'efforça kle la déraciner en s'y agrippant

de toutes ses forces, mais il ne parvint qu'à se retourn '.: r
les ongles Sur la pierre inébranlable. Les . traces en sont
restées sous la forme d'une douzaine de cupules apparen­
tes sur la face nord de la croix. Celle-'ci est appelée Croaz-

FuZu.p (croix Philippe) du nom d'une vieille lignée de pro-
cureurs et de notaires de Lanmeur, qualifiés s, ieurs de
Rumarc et Runtraon au XVIIIe, siècle .

Un peu plus loin s'ouvre à gauche, dans une planta,
tion serrée de pins et sapins, l'allée du manoir de Ker­
ven. La, terre de Kerguen ou Kerven (le lieu blanc ou bém) .
appartenait en I480 a J ehanStéphan (Estienne) archer en
brigandine à la montre de I481. Il comparaît en I507 dans
une enquête ju!diciaire ouverte pour informer si le lieu de
Keryven en Plougasnou était contributif . 1 fouage , et il est
dit âgé alors de 76 ans.. Son petit-fils ]acqùes Stépha n
est cité oomme sieur de ' Kerguei11 a la rM )rmation de
I543 ; il se présente en archer à cheval à hi montre de
I543 et meurt avant celle de 1549, ou François Le My­
niec parait en armes pour sa fille mineure. Kerven pas.:>c
ensute: à la famille Calloet, et il est possédé en 1588 par
Yves Calloet, témoin ,dans un acte prônaI Ide cette année

165

. 1alyse 1\1. de Bergevin. Je suis fâché de contredire
(1 L1 aJ , lAI' d Ir . ffi
' ,,' 1'01)inion du regrette c 1ate am 'e '>..erven, qUI a r-
1,.,1 , d . 1 XV .
,, 't que S011 manoIr n avait, ' epUIS e e Jusqu'au
J)"ll , f -'11
XVIIIe siècle, apparte~1u a aucun~ .autre 'amie qu·au.x
X ouel ou N édellec, m~ls ce~t~ asser~lOn ne peut prévaloir
tl"C Ides textes aUSSi explicites.
con .

'ves Calloët était un cadet de la maison de Lannidy eIl
Plouigneau. Sa fiNe héri,tière Françoise épousa, vers 15

Olivier Nouel, qui semble issu de la maison de Kermor­
van, en Plouigneau également ; il résidait à Saint-Melaine
de Morlaix, fut maire Ide cette villé en J 598, en s'enrichit
par le négoce maritime. Sa piété et sa charité en faisaient
le digne époux de sa " sainte femme, dont la vie a été
narrée d'une façon pittoresque par le F. Simon Malle­
vaud, préldiicateur récollet, dans. ses A 1mnZes Calvér-icn11,es
(P. Yvain, Angers, 1671) ou )dom Lobineau a puisé les é­
h~ments de la notice plus guindée et plus froide qu'il.. lui
a consacrée. On y trouve, tracé d'une plume naïve et colo­
ré '), un tableau très évocateur de la vie religieuse d'une
.cité basse-bretonne de Pépoque, et du grar~d, élan mysti­
que qui, au sortir des sauvageries de la Ligue, jeta tant
d'âmes hautes dans l-es voies du sacrifice et du renonce­
ment. François Canoës répondit, une des premières, a
cet appel de Dieu, qui la guida vers l'idéale petfection
par l'âpre chemin des épreuves terrestres. Elle perdit plu­
sieurs enfants, entre autres sa fille Fiacre, déjà. en pleine
jeunesse et fiancée ; elle disputa vainement son mari à la
mort, qui le prit le 5 août 1620. Demeurée veuve, elle fon­
(Î.a, en 1625, le couvent Ides Bénédictines de IVIorlaix, et
s 'y retira avec sa servante Françoise Loscun,pieuse fille.
morte en odeur de sainteté, dont les reliques ont fait des
miracles. Elle y trépassa en 1634, entre les bras de son
fils, le fameux P. Joseph de Morlaix, une des illustratioils
de l'ordre des Capucins au XVIIe siècle.
Les notices biographiques font naître celui-ci à Gui­
maëc, au manoir de Kerven, mais il a vu le jour à Mor­
Jaix, puisque Sün oraison funèbre, prononcée en r661 dans
l'église des Calvairiennes du Temple à Paris par le P. Jo­
seph de Dreux, nous apprend qu'il naquit cc pendant les
solennités de Pâques» de l'année J606.- ür, j'ai trouvé,

166

.dans les registres de Saint .Melaine, a la date du 2 Avril
1606, l'acte de baptême d'Yves, fils d'Olivier' Nouet et , rle
Françoise Calloët, sieur et dame de Kerven, et ce dernier_
né de leurs neuf enfants peut donc être idenLifié en toute
certitude avec le P. Joseph. La figure de ce raillant mis_
sionnaire breton est magistralement dessinée dans la belle
.' et solide biographie qu'en a publiée en 19I2 le P. René de
Nantes (1). A l'âge I de 8 ans, le zèle de la prédicatiDn l'a­
niniait déja; de retour de l'église, où il avait accompagné
sa mère au sennon, SDn plaisir était de rassembler :::'e~ .

petits camarades et de prêcher ft cet auditoir~ cnfan:in en
ré::;élant tout ce Clue sa mémüire avait gardé ,des paroles
du ' jJn{:dicateur. Il haranguait aussi en breton les pauvres
qui venaient par troupes frapper ~l la porte du logis, et,
son homélie t erminée, faisait succédera cette charmante
« aumosne Spirituelle )) une / large diSlribution de pain et
d ::- \deniers.

La venue des Capucins à Morlaix, en 16I2, produisit Sur
sa jeune âme une impression d'autant plus profonde que
son père avait d'abord hébergé les religieux chez lui et
qu'il s'était employé, avec une générosité inlassable, a
faciliter l'établissement de leur couvent. L'année suivante,
le fils aîné k : !.e :\11. de Kerven, Jean N Quel, renonçait aux
. espérances de ce monde et revêtait la robe d e bure de:::,

Capucins sous le nom de Fr. Séverin de Morlaix. Il cle-

vait devenir un membre renommé de l 'oridre, être élu
neuf fois provincial de Bretagne et mourir a l'île Bour-

bon en 1?58. Son jeune frère Yves ' se sentait également
attiré vers la vie apostolique. C'était pour lui une joie
que de fré.quenter ces bons n~ligieux, .de prier dan':s leur
chapelle, d'y servir la meSse. El). 16J5, le P. Joseph d~
Paris, la célèbre Em, inence Grise, confident et conseiller
,~l..e Richelieu, voulut lui donner la première communion de

ses propres 111a111S.

. l\Jais l'âge

lOnglemps a

" .:,T es N ouel et sa t' , , . , t
.1 J. san -e precalre s opposen
la réalisation de Ses désirs. Rebuté' par les

(1) P. René de Nantes. Un capucin bTetO'n a.u XVIIe siècle,
le P. Joseph de Mor~aix, in-8, 1912.

--,.,; 167

. - ucin's de l\Iorlaix. puis par les Jacobins de ' Renne's,
,lP . A 'Il '1 ' 1 b'

llis aux Carmes de la meme VI e, 1 en est retire Ieri-
~c l '1 d").. d 1
t' t IJaf sa mère, qUI restee veuve et ayant' eJa. ' onne tant
tl) 1 ',. 1
l,.l - siens c\ DIeu, ne se reSlgn~ pas a VOIr son Ultime ap-
r·le !':>
. ui l'abandonner à son tour. Elle If7 place au collège des
r .. . . d'f 1 d fiè d
Icsuites d~ POltIers, maIson· e . Ol:tes ~~u es, et re A es
~ucces qu'Il y remporte, dIe Le voit dép, (d'ans ses reves

atcrnels, occupant les plus hautes dignités kl.e la province,
Y~lillS espoirs ! Tour.menté plus qué jamais par l'attirance

lle
vie d e dévouement et d'humilité, Yves Nouel songe.
r.'lnS cesse à unir son sort il célui de son frère. Sa voca-

tian l'entraîne irrésistiblement dans les rangs de la milice
franciscaine) et ayant, il force de volonté et Ide prières,
surmonté tous les obstacles, il prend l'habit religieux à
.\Ilgers, en 1622, sous le nom du P. Joseph dcMorla,ix;
Ayant prodigué soins et secours aux pestiférés de Mor­
laix, . lors d~ la peste de 1630, le jeune profès part pour
Pome où il est fait ?rédicateur. A son retour, il prêche
son premier carême Idans Sa ville natale, et recueille le der­
nier soupir de sa mère, morte au couvent du Calvaire

qu'eUe avait fondé. Les débuts oratoires du P. Joseph
attirent en peu de temps l'attention de ses supérieurs. Il

est envoyé en Poitou, puis, a la demande du duc . de BouU.., .
Ion, il se rend a Sedan pour organiser une mission dans
cette ville alors consild.érée comme l'une des citade.1les du

protestantisme. La tâche était rude, et le courageux mis-
sionnaire dut engager une longue et périlleuse lutte contre
les tout-puissants pasteurs calvinistes. Son labeur eut de '
consolants résultats, et lui procura une grande réputat}on. .
Il prêcha il maintes reprises devant le roi, à N otre-D'ame
ou dans la chapeHe du Louvre. Les contemporains font de
lui les plus vifs éloges, et le chroniqueur Loret lui-même ..
l'a célébré en vers dans sa Muse historique :

Le Pèr'e Joseph (de MorIaye (sic),
De son ordre grand ornement,
Prêche au Louvre admirablement,
OÜ, sans mentir, son éloquence
Réveille plus d'une conscience;
Son discours est libre et touchant,
C'est au vice un glaive tranchant,

-- 168 -- '
Contre luy toujours il éclate,
Il instruit et jamais ne flatte .
Chaque auditeur en est rav)',
Il est ex'; rêmement sui "y)
Et bref, il est par sa morale,
Digne de la chaire royale~

La sainte liberté de son langage lui attira pourtant plus
\ d'une inimitié, mais le p. Juseph ne savait taire ce que
. sa conscience lui ordonnait de révéler. Prêchant lecarê­
me' de 1658 devant Louis XIV, il eut la .hàrdiesse de faire
entendre au monarque le cri de douleur de .seS sujets ex­
ploites par dîlùl'ignes ministres. l ,laniant aussi bien la
langue bretonne qu le français, .le P . Joseph dispensa sou­
vent à son· pays d'origine les bienfaits de sa parole. L'é­
vêque de Tréguier, Nod Deslandes, lui offrit en vain d'être
son coadjuteur, puis son successeur ; il resta tout entier

à. l'Ordre 'franciscain, qui l'élut provincial de Bretagne .
En 1658, il tomba malade au coq,rs d'une prédication .

ainsi qu'un soldat s'affaisse frappé sur le champ de batail-
le, et il mourut, ~ll'âge d e 53 ans, au coU\'ent de Nantes .
« Ainsi s'éteignit, dit son bitOgraphe, l'un ,des hommes les
pluS remarquables en science et ell vertu que la Brel agne
ait jamais donné à l'Ordred.e Saint-François. Son · ârnc
forte ne· connut aucuhe défailance. Le caractère de CC'[
humble religieux occupe une place d'honneur, non seule­
ment dans l'histoire' de son olHre, mais enCOre dans celle
de son pays. »

Apres l'entrée en religion de son dernier fils, pour sub-
venir aux frais de la construction et de J'ameublement dL!
couvent des Bénéldictines, Madame de Kerven vendit son

manoir. L'acquéreur (contrat du 12 octobre 1627) fut un
notable commerçant morlaisien, écuyer François' Le
BloIlsart, sieur de Kertanguy, epoux de Margu-:rite Quin­
tin de Kerhamon. Le négoü~ ,de mer, qui faisa.it sommeil­
ler la noblesse sans ' l'étei indre, lui avait procuré une helle
fortune, ,et il acheta pour son fi, 1s Yves Le Blonsart, sieur
de Lambezre, né en 162 1, la lucrative charge de sénéchal
au siege royal de Morlaix. Mais la mort permit ~l peine
au jeune magistrat d'entrer en fonctions; il trépassa le
;2 [ octobre 1655, sanS enfants de sa femme Perrine Au-

169

mont, dame de Kerantrez. Son père, sans doute frappé au
cœur par ce terrible coup, lui survécut ,seulement une an­
lée et le rejoignit le 2ï novembre 1656, dans l'enfeu go-.
S~ünt-l\ [eJaine, « en la chapelle de sa maison qui est Saint
Isidore JJ. Dès lors, les terres de K:ertanguy (en. Garlan),
de Lambezre (en Plougar) ·et de' Kerven (en Guimaëc) pas- ,
sèrent a sa fine uüique 1'larle Le Blonsart, dame de Le­
zengar, née en 1624, et qui avait épousé le 23 février 16p
un gentiHlOmme trégorrois ' de vieille souche, écuyer Yves
de Kermabon, sieur td1e Roudüumeur, puis dudit lieu de
Kermabon en Plougasnou. .

Marie Le Blonsart résidait habituellement à son manoir

.de. Kerven; elle y moUn:lt le 30 avriJ 1686 et fut inhumée
dans l'église en présence de son fils cadet Pierre de Kex­
mabon, si.eur de Lambezre « et de plusieurs personnes de
qualité JJ.. .'

Le 31 déüembre! 1696, :Vlathieu de Léz,ormel sieur u\.l
Ker,oufi,ou, sénéchal -d, e Lanme'ur, veuf d'une 'derrwiselle
de Ke:rmabon, l'end aveu au Hoi pOUfr le manülir: ert la mé­ t :::tirie ,r:llt}bh~iS de Ke, l'ven, 8

Ppartenant à sa fl)le N[al'ie­ Anne die, Lézormel, à la suite du r'etr'ait lignage, r qu'H en
a, vait fait SUl' JacqLl'eltt~ des Anges, veuve de Nicolas Lt
Di6ug!:, el, sieu.!' de Tl'emelur (1). Ce,u, e Mar:he, -Anne de Le­
zorm·el dut mourir sans. postérité, ca. r Kerven demeura

dans lai. iÏam iJle d:e> Ke! rmo..bon. Il , appa.rtena.it ,el n' 1737 ri
Cél, e>stin dJ -9 Ke,nna bon, officiel' de's vaislseaux du Roi (2),
épourx de Mai rie-Anne de' Mathézou, qui signe en qualité
de mD.l'l'n/Ïne lmade d'e baptême en 1743. Mais ,e[1 1751,
on voit un Cm"entin Le Dan de, TrlQ! melin se qu,alifier de­
sl etgnenr die, Kâven comm'e pe tit-fils et hériU,er d,e, Gillette­
FlriaUlÇiÜ'ls, e-Re'lé,e de! Kermabo'n, dame de Roudoumeur,

. mD.,rlée à LanmNl, le 30 octobre 1689, avec Jérôme Le
Dal, l, sieur de Che:deJJ0stang, de Le:snevem. Au momént d-e
la. Révolutlioll, Kerven était posl sédé pa, r Messir'8. Sébas­ Eeu-Cbl'i8'ntin Lei Dall de Tromelin, chanoine et a.rlchidia­ c, r'8 de Tréguier, ancien abbé .de Paimpont, puis abbé de ,
Murleaux, ,ordrel des Prémontrés, diocèse de Toul. Il émi­ g-ra 'e>n Angleterre, CLevünt à s'Ûn retour chano:ime (Le Smuv
Briel?!~ et mourut dans cette ville en 1808 (1).

(1) Arch. de la Loil"8'-Inférbeure B-1784.
(2) Ibid. .
(1) Abbé Tresvaux, 1 .'Eglise de Bretagne, 536.

170
Le manoir de Kerven, saisi nationalement, ne fut rendu

aux Le Dal1 de Tromelin qu'en 1810. Il était depuis long-
temps converti en ferme et très dégradé, lorsqu'il fut ac­
quis vers r872 par M. Edouard de Bergevin, ancien offi­
cier aux chasseurs d'Afrique, que son mariage avec Made­
moiselle Francéza Huon de Yermadec ava:it fixé dans l~
pays. Tandis que Madame de Bergevin reprenait, us
de deux siècles d'intervalle, les bienfaisantes traditions
1::1'une autre châtelaine de Kerven, son mari put se livrer,
dans cette calme retraite dominant la mer et les poétiques
campagnes trégorroises où les souvenirs du passé s'éveil­
lent à chaque pas, aux goûts qui l'inclinaient verS' les re­
cherches généalogiques et héraldiques. Il fut le collabo­
rateur diligent de son oncle Pol de Courcy pour l'~ifica­
tion Idéfinitive du fier monument que ce rude travailleur a
dtessé a la gloire de la noblesse bretonne, dans lequel cer­
taines imperfections de détail n'altèrent pas sensiblement
l'harmonie et la grandeur de l'ensemhle. M. de Bergevin
a b: ien voulu m'honorer id'e son amitié, encourager mes pre­
miers essais, mettre à ma disposition, avec une bonté et
un complaisance admirables, les plus précieux ouvrages,
les documents les plus rarés de sa belle bibliothèque bre­
tonne. Bien des fois, je l'ai visité à Kerven, le trouvant
totijours à sa table ,de travail, Id, ans la grande salle qu'il
avait vu transformée en étable à bestiaux, et dont il avait
fait une sorte de musée, ,devant la magnifique cheminée
de granit aux sculptures Renaissance. II y passait sa vie,
aussi ponctuel qu'un employé de bureau, couvrant pages
sur pages de sa rapBe et nette écriture qui lui faisait
parfois redire en riant le mot de Philippe II : « Si
j'avais été pauvre, ma plume m'eut enrichi.)) Cette
plume en effet besognait infatigable, transcrivant tour à
tour de poudreux manuscrits armor:iés sortis des archives
de quelque manoir, iies registres paroissiaux, les copies,
les notes, les renseignements que M. de -Bergevin sollici­
tai t et recevait de toùs côtés .

Mais' s'il se complaisait, dans cette existence de béné­
dictin, à engranger une patierite et abondante moisson, sa
générosité ne savait se \d.éfendre d'en faire part à autrui .
. Ni temps ni labeur ne lui coûtaient pour documenter ceux
qui recouraient à lui ; je ~l'ai vu répondre à la requête d'un

-- 171 - "

inconnu en lui adressant au moins trente pages de texte
écri tes de sa main, et se déclarer d ' avance payé de sa pei­
ne en songeant à la satisfaction de son correspondant.
Un exces de modestie le confinait dans le rôle de collecteur
et \J'assembleur de matédaux qu'il , laissait à d'autres le
soin de mettre en œuvre. Outre la refonte du, Dictionnaire
J-Ié'rali/Jque de Courcy, M. de Bergevin n'a livré à l'im-

pression que d eux monographies paroissiales, celle de
Guimaëc dans la Re'vue ~Histo 'rique de l'Ouest et celle de
Lanmeur dans no.tre Bulletin. Mais nombreux sont les
c;1ercheurseL les écrivains bretons dont. il a été l'auxiliaire
empressé .et discret, et les quelques étu~des que j'ai publiées
ici doivent extrêmement à son in}assable bo.nne grâce. Sa
convec at:on vive,enjouée,o.riginale de ton et d'esprit, etal'L
nourrie ·d'anecdotes qui en doublaient l'attrait, et je con­
serve de lui une lo.ngue et précieuse correspondance. Pa­
triole ardent, son cœur de vieux soldat Ide iO, encore sai­
gnant de nos défaites, avait -bondi lors de la déclaration
de guerre ; il suivait anxieusemnet, avec une foi inébran­
lable dans le triomph e et leshaut'es destinées du pays,
1~'S péripéties du drame mondial do.nt nous vivons en ce
moment le dernier acLe. Dieu ne lui a pas donné d'en
connaîb-e le dénouement sur cette terre. Apres plusieurs
mois de dures épreuves physiques et mo.rales, il a rappelé
à Lui, presque en meme temps, le châte:ain de Kerven
et sa charitable et dévouée oompagne, pleurée des pauvres
du canton. Tous deux kl.orment dans l'étroit cimetière aux
dalles pressées, et, en dédiant à leur memoire cette étude
qu'ils m'ont inspirée, je d!épose sur 1a tombe de cet homme '
et de cette femme de bien ,l'hommage de mes regrel~,
de mo.n fidèle souvenir ·et de ma respectueuse reoo.nnais­
sance.

L~ manoir de 'Kerven, acquis par M. de Kersauson, of-
ficier de lckagons, est un édifice de la fin du XVIe siècle,
avec diverses additions ultérieures. Sur la façade lan
saillie une jolie tour hexagonale coiffée d'une longue poi­
vrière conique; au pied s'ouvre , la porte, déoo.rée ,de cla­
nam;: 2t de pilastres ioniques supportant un fronton tri­
angulaire garni au tympan , .cl 'un écusson ovale martelé.
Le portail eX1'érieur, à double baie, . .offre une ornementa­
tion. analogue et se hérisse d'un e rangée de cr~neaux. Troi~

172
lucarnes de pien-es al11or~ ies en arc-c1e:..ccrc1e ct relevées
de volutes, counent la corniche du toit. . Le pavillon de gau ..

çhe, c0'nstruit par M. de Bergevin ,en matériaux de schiste
vert provenant d'un vieux · manoir de Locquirec et iden_
tiques à ceux jjes parti-es anciennes, a sa lucarne gothique
timbrée des armes de Bergevin et de Huon de Kermadec
en alliance. Les parties rema,rquables de' l'intérieur SUl1l

le bel escalier de granit enroulé dans la tourelle et la mo-
numentale cheminée de. la gran\de salle, aux jambages
richement ciselés. Une statue de Vierg-e-lVlère placée dans
le vestibule vient de la chapeUe détruite de Saints Simon
et J uc1e, au château de Lanüverte en Pr:ouézoch.
A l'angl.e nord du vaste jarldin muré se trouve: la cha­
pelle domestique, refaite en I906. M. de C0'urcy avait vu
vers I835, dans l'ancien oratoire" disparu, qui était dé­
dié à Saint Sébastien, un bon tableau du martyred~ ce
saint, signé: de la Fitte 1789, exécuté sans doute par les
soins du chanoine Sébastien Le Dall de Tromelil1, derIller
seigneur de Kerven, en l'honneur de son patron. Pour r e­
bâtir cette chapelle, M. tde . Hergevin a utilisé les pierres
cl 'un autre sanctuaire ruiné de la paroisse, celui de Saint
Mélar, dont le clocher, les chaînes d'angle; la fenêtre de
chevet et l'encadrement des portes 0'nt été rec0'nstitués.
Il a aussi retrouvé et racheté les deux statues de N otre­
Dame de Bonne Nouvelle et de Saint Sébastien, grandes
images de la fin du XVIIe sede. Un bénitier de pierre,

rencontré en creusant les fondations! porte un écusstJH
fascé de 6 pièces, timbré H :'une croSse abbatiale et d'une
m,itre, qu'on peut attribue~ à Mgr Melchior de Polignac,
cardinal et archevêque d'Auch, membre de l'Académie

française) diplomate et écrivain de mérite, abbé de Bégard
en 1707. La fontaine a été également restaurée et munie
d'un st Jtuette de Saint Sébastien.

Qu;ttons Kerven apres un coup IdI'(B!il au paysage si bre­
ton que surveille au J.ciin sa fine tourelle : la baie de Saint
IVIlkhel, Ja vallée sylvestre. du Douron, les houles vertes des
hautes terres fuyant aux arrieres-plans vaporeux, et le ma-

173
melon bleu du Menez-CharueJ, vieille cime féodale dressée
sur l'horizon du sud comme une vi'g·ie . . Passons à Kcr~èt­
laÜl1, maison noble amputée naguère d'un pavillon rusti­
que qui lui procurait quelque allure. l'vfartin Barruaui
sieur ,de Kersalaün, est témoin en . 1585 l:iians un act~ prô­
naI (r ). On trouve en 1643 une demoiselle Mari~ Lhénoret
ou Lhonoré, dame de Kersalaün, inhumée à Sainte-Me­
laine de Morla·ix. Elus tard, ce lieu appartint a une famil­
le Riou, issue d'un procureur de la juridiction /die Lan­
meur, qui fit enregistrer ses armes : d)oy au rocher de
sulJlej pŒrti d'az'nr èt, trois pa.lmiers d) argent, 2, l, il
l'Armorial général de 1696. N. h. François-Marie Riou,
sieur de Kersalaül1, capitaine die vaiss .::al! . marchand, veuf
de Claudine Le Pen, meurt à Morlaix (St-Melaine) le 3

mai 1776 , lai.ssant un fils qui devint préfet et baron de
l' E111pi,re~

Au sud de Kerven et de la route! de Locquirec, une

voie charretiere nous fait rejoin!:J.!re a dr-oiÎte l'avenue dé-
bo·isée du manoir de Trémédern, jadis châtellenie et fief
de bannie, re, dont les seigneurs étaient sergents' féodé::l
de Lanmeur et siégea.ient aux Etats de Bretagne comme
barons et conseillers Id! u duc. Les sires de Trémédern --
1:1. forme primitive est Tremeldeœrn ou Tremedea" rne (RLn.
1427) ont combattu aux Croisades, si l'on en croit
];a légende relative a la fondatiOn de la chapelle voisine
de Notre-Dame-de-la-Joie. PJus tarld., les documents his­
toriqu.les nous les montrent servant la cause frança, ise de
leur vaillante épée durant la guerre de Cent Ans. Alain
de Trémédern fait montre en 1379, à la bastille de Saint­
GOl ueznou, pres Brest, ent.re les 163 écuyers du sire de
CJ,isson, le rédoutable « boucher des Anglais »). n paraît
dans d'autres montres de 1380 à Ploërmel, Josselin, e.~,
devenu chevali'2r, il part avec une comp::lgni.e de 13 écuy­
ers rangés sous sa bannière dans l'ar~ée du connétable
de Clisson « pour servir le roi de France ès parties ' de
P.oitou, Siantonge, Angoui lême et Périgord)) en 1383.

(1) de Bergevin. Monog de

Guimaëc

i74

Sa femme, .T e>anne du Plessis-Eon, dame> dudit lieu en
Plnfur, lui .cJ.G nna di eux fils, Robert et Jean. Robert siège
[lli pa'lJernent. de, Ploënnel en 1410 et g-uerro;e en 1415 sons
Tanguy du Chastel, d'après (( la. mCY.nsl-r.2, Me.ss-ire Robert
de T.réméd.ern che'va.lier hanneret, ,et dO'lIz, e el scll':iers receuz
à P:lrli s le 15 novembre 1415 pour s,Brvir soubz :\'1. le pl'é­ VÛlSI t. ,de Pal':s », qn'il sce]].e de son t:,ce·an fi~ltr:ant lUe
homme armé tenant un écu banclé (le 6 7J, i.èces. Il c:st rn O"ffi ­ IHé :en dernie'L heu dans] Ft. liste des 'seigneu1 1 s brl etons I .l_
gués a.vel c le duc contre les Penthièvre, le 16 O-ctobre H,2Ü',
au Par-lem,ent de Vannes.
Son frèl·e. Jehan fut aus, sl le' compa9;n on d 'o.Tmels d:'2' Tan­
guy dul Cha,st, el et figure p, a/rmi les 8 écnyel f's -de ,sa -COITl­
cagn5e ,en 1415. Ecuyer et chambellan du duc, il ,donne
Q11,j. ttanc-e au gal'de-robi€,r, le 2 ja.nv;e. r 1418, d'av,oir .reçn
'en cette rrualité 3 manteaux et clem?J Œe c01l"stez rle marte,)

pour f.ourrer une robe. Il suit le .cluc au voyag· e

d'Amiens,
en févriJer et mars 1418, p.rend part à la li~u-e contre l, e
Penthièvre, et ' e>st cité C ·01l1 me· pe-nsii!}nna, i.r8 dl]1 duc dans Je
compte de J'Goba, TI Péri-Oll , en U20. En 1427, son · so'1Jvera;n
l'adjo!int. à ]a tête d'une compag-ni.e de, 23 homme, s d'ar­
mes ·et de 22 homme,::; de- trait, a:u seoo:nI'S qn'il envoie à
son frèr.e le connét-àble ' de Richemont. Jeh:lTI de Trfm é­
dern ,eut l'insigne h onne,nr de· déployer sa bannièN~1 à la
victol "iien.8 e journé, e de Patay, près , de l'or lfla:mme de Jean­
n'3 d'Arc, ,etd"entra.îner ses soldats. dornt. b e-aucoun ét.aient
dl1 Pa.yi S de Morl.aix, sur les pa. s de ]a, Pucelle. Son nom
di spara.ît dès lof's del s, rôl es. , d,ë m ontr'es, ce qu i penit fa ire
~,uppos ,e 'r qu'il sera tombé en brave, comm: 8 son frère aîné,
Sll.l" qnelque champ de baüüHe. (1) .
Lei u;r 'sœu.r J, ela,nne porte le fief de Tréméderü dans la
maison de Ma].eiS ,tro '~ t paf' son mariage a velc J,e:han de lVll:l..­
lel sl t.mit, sire -d'e Ker: aër ,et de Beaumont. Dellll81..uée veuve,
1311 el épo 'll .s ~e Yv-on de Plusquellec, c8det de BruUli:J.c, ql.lÏ
paraît i a,ux Ertatl s de Vannes en 1451 üomm, e se:igneur de
Trémédœ"n par .r-eprés, eruiation de' sa femme. Mais celle-Cl
me:l1rtavant 1455, et :s: on fils , aîné d.l] pr'eill')ier Et, J,ehan
de' Malel stroit, sire dè }{,er:t,ër, baron d e Lar~o.nët. ma.réchal
de Bre1-aQ:ne, se prés.ente à l'appel de, s bainne.rets, aux
Eat,s de: V,annel s , efn 1455, pour .sa, terre, de TrémédeTn . . 11
figUl~e -encore comme hanner, e, t 'et sergent féo.dé de LaYl­
meUT :lUX Eta,ts d, e 1462 'e, t f.ournit en 1.4-68 ('t, n dp-c mn R.veu
collectif üomprenant les seig·m.enr'ies . de, Tréméclei J 'Yl, le
POl'tzme, lll' (€U P.l,ouégat-Guérand), Ke,rnévez (en Bot.sorhel),
Kn8!chnours (en\ P.les.tin) .etc. (2).

(1) Sllrh f:lmille d, e Trémédern, v. dom Mork,e, PTeU?)CS,
JI . 20:i 205.207.21·6.255,472,848.910,912,915,963,976 ,
!)?~. 1060. 106"1. 1065, 1066, 1084" 1206, 1357, 1571, 1572, If)7~~ ,
};)17; "1631: 1673.

. . i 75
a l'éIorma, tion de 1543 ,attribue TréméCLern et .h..ergnst
c . ltla del, c de :\-Ial osll~oH, s,eigne.m'. d·e K~l'~lër ; cC'Per~dant
tinventa,ire des Archlves de la. LOJ.r~-Inferleure mentlO,~oe
]3. 1426) ·un ,al~·eu rendu aUAH~l ·en b19 par GUyOICl d~ / :=t

d'Isl1bea.n Esmeos, sa. me1"'8 , pour les domam8's de- Ker­
nt::venec, ,au .Faouët 'et ,~,e ,Trémé~ern , .A la fin ~~1 XVIe
c;iède., ce fief apparteiunt a ï\'lessue Nlcülas du: 1 alhoé'!,
;:lw",alie. r, slei~'~ leur de KeT~"8,::,a?-~, Le Dreortz .. etc .. capl­
la;n

ode

J'arrle.r· e-barn de l'evecne d,e CornÜ'ua.llle en 15~!:),
'{lfi [l,près en avooir aliéné divers convenants eil dépendan­
{ces', finit. par vendre la pièce principale ~e la seign.eurj(~
'1 \'ran ;'Ols de Kerre: rault, cadet dI e l a wa180n de ce nom,
~n Plougaste:l-Da.oulas, el t receveuI' del s fouag,e· s d. e l'évêCllt:l

'~ Tré~uieT à lVIorlaix en 1589. '

Ce François de K,eTr(~ ,rm!lt avait ép·~usé Catherine Le
~uz, dame du m.anoir tout. proche de K,ergoma, r ; H em.plo­ ,"fi lel s pierrelS du v~e 'lJx donjon. moyenât.~eux de T r émé­ (lel'l1, depuis longtemps délaissé .et .croulant, à rebâtir UlIe
demeurB plus habitable, mais il faisait. sa rési':dence co u­
tumière à Saint :Vlelaine. d.e; Morla:ix, où 12: 8 ,registres pa
1.:;i ss'811),', qui s'ouvrent ,en 1593. c·cntiennent les a.ctes Ge
1 )[1,ptème de' cinq de .sœ en ·~!:mts . On n 'y trouve pülulam
l}as c,e'hli de sün fi.lI S aimé Fl'ançüj'S ode Kerr1eral ult. éC'Jye l' ,
~j2 11r d. e TrémédeT'D., conse, Hle, l' d:1t Roi e' t son sénéchal ~1l1
siège

de' La.nmeur ün 1620, marlé vers 1616 à Hélène G~lI'­
n'· el', et mort en 1629. Il ne lRlssa Cfp,e d,ss fille· s d ont 1"8 1-
Inée, François6, héritière (V3' Trémédern, s'a.llla en 1655 tt
Clément de Bégal s,son, sireu.r de: I.a. Villegu'lcba.rd ,en Sérent,
évêché de Vannes , Un de l~urs fils, Jean, naît à Tré!l1é-
] ", J' - 16"'() t t]',· t
c1e.n18 ~) , u;n ;). e y meUJr . a,n118el SUIVaŒl ·e.
Lel ln' flll:eaînèe. Hélèr:1, eI-Gilettel de Bégasl son , d: a:m, e de' la
Villeg.uichard, Trémédern, épOllS'e' René de, Kermabon, C~le­
vaUe: r. E;.elgm,eur di e Kerprlgent en P lüugasnol1 ; tons d'e·ux
l'2nd"mt aw:m' au RoI en 1694 po·m' del s convem .. ants de 1.a
jr;~' ;'e rl.C TrémédeTn (1 ). Hélène .de Bégasson d écéda à
Traméd:erl1, .en 1725, à l'âge: de. 64 ans, sans postér:té, et
ce domiline, eintra dans la famille' GrjgnaTt. en raison du
mariag·e dei sa sœur cad.eif., te Mathul';:ne-Sébas.tienne avec
Guy-Henri Gr~gna.rd, sieur d,e Champsavoy. ·en 1684:. A la
Révo1:

tion il n.ppD.rtenait à MelssiI'e Jos.eph-Marie Gr:gnart
( 1.8 Ch.:=tTnpSlavoy, capitaine, de dragons al u régime[nt d'All­
hig;né, chevalier de Saint-Louis, prés:d,ent d'e l'ordre de la
nohle,s,se aux Etat.s d, e· 1785, éI)O· llX de Renée-Louis·e :Milon
de BelLevue.

(1) Ar.ch de l a Lofr,e-Inférl,eure.
B-1787 .

- 170

Le manoir Ide. Tréméde. rn existe -encore, mais mutilé et
totalement défiguré. Ses édifices encadrent une énorme
cour payée que ferme au nord un mur surmonté de piliers
en maçonnerie; 8. droite se trouve un petit oratoire Séi.n;:,
st Y le; ~l gauche, quelques , vieux bâtiments à portes cin­
trées, fenêtres moulurées et gamies ~d'accolades, peu inté­
ressants en somme. Derriere règnent les clôtures ... enlier­
rées et chancelantes d'un immense jardin, presqu'un parc.
A son extrémité sud, sur 'le penchant (dI'une r,i,ante coulée
boisée, se voit' « le vieux ' château », enceinte retranchée
. J 'Ul1aire qui mesure lOS mètres dans Sa plus grande
ueur. Un fort parapet de terre l'enveloppe de toutes.
parts,' sauf du côté de la Motte, logée à l'angle ouest de
l'ouvrage, et d'une hauteur de 4 mètres sur 50 mètres de

circonférence. Contre cette motte viennent buter les talus,
élevés de 3 mètres et précédés d'une douve du côté de la
pente du coteau. Sur l'autre grande face, qui commande
le vallon, un fossé protecteur eut été inutile, et il n'en ct
~as été creusé. L'angle aigu \:lle l'enceinte, orienté au nord·.
est, paraît avoir été muni d'une petite redoute. La porte
est pratiquée au nord. Aucune substruction n'est appa-
rente dans l'aire intérieure, mais sur la motte il y a un
enclos carré de 4 mètres de côté dont l'appareil en moëllons
. semble peu ancien. La pensée reconstitue fac.ilement la
physionom, ie du "jeux castel carolingien, avec sa lourde
tour carrée ou crculaire plantée sur la butte, les" logis
des serviteurs, écuries, magasins; étroitement groupes 8.
SeS pieds ; et le rempart garni d'une double palissade.
La juridiction de Trémédern semble n'avoir point été .
exercée à partir du seizième siècle. Outre ses prééminen­
ces '.: rc l'égEse de Guimaëc, cette terre possédait un banc
dans celle de Lanmeur (1). EUe avait aussi, en 1°79, son
écusson lmndé d'or et de sable dans la maîtresse vitre de
l'égli-se tréviale de Locquirec, et un banc blasonné des ar­
mes de Kerrerault ldevant l'autel de Saint Fierre, du côté
de l'épître du chœur de la dite église (2) .

(1) DicUorm aire Ogé, e, éd. Martevi ne. 1.
(2) AI'Ch. du Fimistère A. 1D. .

332.

. . 1.77· -"

. ' dis)' ointe que franchit 1 anclenn~ VOle de Toul-an-Hery
;:,ee l' 1 . d'
i, Saint-Jean et. a Prime, pUtS remontons a. nve r~lte,
l'espace d'un. k~lometre, .p~r un agrest~ · sentier fraye au
travers ' des taIllIs le long d un versant ou quelques grands
rbres dominent id 'épaisses cépées de chataigniers et de
ahênes. Au premier carrefour, un 'vieux chemin herbeux}
lad~ d'un trait la colline en nous montrant tout en haut,
sous une ondoyante voûte de branches feuillues, le pig~on
et le olIocheton d'une chapelle ; derrière nous, une tour~I1e
éventrée, aux embrasures démolie.s, surgit parmi les' ron­
ceS et le lierre, à l'angle d'Une m'.1raill~ chenue que termine
un martial tronçûn d e oourtine encore garni de mâchicou-

lis et ide meurtrières. Cette chapelle. c'est Notre-:Dame-de-
la~ Joie; ces ruines c'est tout ce qui subsiste du man-û;ir de
Kergomar, romantiquement blotti au creux du vall-on, bai­
gné par l'eau vive, dans le plus apaiiSant et le plus frais
des paysages. .

Une branche eadett-e des · d, e l'Isle de Penamprat posseoa
jadis Kergomar ; en 1479, il appartenait à Pi-err-e -de l'Is1.e .
arche, r de la garde ducale, mort avant la montre de 1481,
où s,on fils mineur Jehan e·st enrôlé pour 30 livres de· rente.
Ce Jehan de l'Isle. fit rebâtir la chapelle voisine de la Joie,
où son écusson dix billettes rangées 4. 3, 2 1 a1.J>ec un

I. G7I1bel en clut ·orn e la de: ? ·de· la maîtr,esse-v,ltre. 1'..1l

1543, Kergoma-r avait passé à Robert Le Borgne, ·et, à la
fin du même siècle, à la famille .morlaisi,enne Le Nuz ou
Nuz, .dont l'unedel s filles, Catherine, . l'apporta au:){ ,Ken'€­
rault, p8.I' son mariage avec François de Kerr:erault, l'ac­
quéreur de Trémédern.
ILs donnèr·ent Kergomar en d ,-:;t à le-l..lI" fille l\1ari-::\ marih
€fl 1606 à écuyer FTanço~s Le Ség~:tler, sieur du, Mesgouezen
. Plougasnou, sénéchal de Lanmeur en 1606, puis bailli au
siège roval de Mo-rlaix en 1620. Ell-e mourut le 17 féVl'leJ
1626, deLix jours apr.ès la naissance de sa fine Antoinett b,
. h ,:s;s·a.nt 'deux fils, Jean et Franço;s. Ce dernier, né ,en
1624, se fit prêtre, était en 1650 prieur de Saint.e Ciltherine
près ~1orlaix et -en 1665 recteur de Guimaëc, où H mourut
ru 1671. Son frère aîné Jean Le, Ségaler, sie un:' de Kergo­
ma, r, vend par contrat du 16 mars 1642 l'o:fk8 de baUF
er: la COLlr de Morlaix., pr-ov€.nant de la sucoession de son
1ler\?, déeédé le 11 janvic'I' préc.édent, à son oncle Pierre
Le Ségaler, . sielJr de la Villen-euve, et au fils de celui-ci,

2ulletin de la Soc. Archéo, _ . - Tome XL\" . .Mém 12, '

- 178 " . .

Ren~ . . Si!?I;tT ,d~ Kerf.ra,val) . pOUl: la s omm'e de 29.0OQlivre~ ~.l).
Il :(i.e déla.issa .pourtant pas' la. ro'be, si recherchèë à cetfb
époque dés rneiUeurs . geritilshoilll les, par'ce que lucf9.tive ··
et nette d>e ·dérogeance. 11 était e : 1· 1669 proc uxeur du Hoi
aUI préstdial de -Nante: s et- , r'em.pEt Q..ussi la· cha.rge d'a voc.aL
générai . à la · Chambr.e des ' Comptes de Bretagne. oh ne.
trouve. pas une seùle f.ois sa signatul'I edans les registres
parol issiaux ' d'€i' Gliimaëc, . iton pills que celle de s.o.nfils .
René, ' issu de ' , son mariage aVe, c' ·Marguer.te Bonnet; et
épou x luj.,.mêm.e de R enée Blanchard.. . .
Cettet brançhe nanta5s'e de la. famine Le Ségale.r s'éteignit
a v, a;nt la fin du XVIIe sfècle, sèmble .. t-il, car la terre d.e
K.e-rgorria! l' 'fit r,e~our aux Kerrerault, Yves . d, 8!KeTre'rauJt,
sleulr de Me, sguen, fils cadet de Franço'iset de Catherine
Nuz, i sie'l).l' . et dame de Kergomai l'. T·réméden né en 15~~,
avaitépüusé 'Françoise Qué:hou de Penangu,ér ·en . 1623.
Leur fils aîné ·Jeande Kel;Terault, écuyer; sieur de Bbis- .
. sauveur"é-t.aJit bailli au. iSièg.e de Saint Paul i en 1654, et il .
S!"allia ,à une Rosco. vite, Renée Jam~s, qUi 'lui donna 'plu­
sieurs .enfants dont l'aîné, Henry -Lou tS de Kerrcrau lt,
époux de , Ftrançois'e-LÜ'uis, e" Vell el' , se qualifie de . seigneur
de Ker; go, mar dans. l'a,cte de baptême de leur fils René-Ber­
trand, à Saint~Mèlaine d-e lVlorlEdx, le 27 avril '1676. Il mOUL
rut à 35 ans en 1687. S.on fils Messire René-Bertrand ' de
Kerre,rault, chevalier, sed.gne1 urde K,ergom, a.r, Coaiquénan,
par:aSt ne s'être', pas marié et fut inbumé dans l'église de
Sa.in,t-Melaine, le, 12 mars 174~, à l'âg-e de 73 ans, laissa-rit .
son hé.ritage à .s~s neVejl, X, l, e: s Le M~arant de K~'fdailièl et
ChI~est ien , de la. Mass.e. .' .

Le ' mario, if dê ' Kergomar. était; au témoignage de .ceux
qUl en, ont. vu: les restes. une curieuse petite maison forte.
Son portail, ouvert 'sur le chemin, était protégé à gauche
par' üne" étroite toureVec'a:rrée à meurtrières et mâchicoù·
lis, Aue ~an.quait un~ fortëmuntilJe pareillement défenaUt.
On en trouve encore les débris, mais ,dans la cour, pavée
de galets placés sur leur:· pointe, les bâtiments 'sont moder­
l1esef il ne stlbsiste plus, contre' lé ,pignon nord du corps
de 1 , ogis, que des ruines. ihformesnoyées dans le lierre. U he
claire': eau oouf(;i.nt~ -rafraîchit l'ancien ja·rdin devenu ver­
ger 'et prairie. U il éou, sson . hexag'onal, encastré dans son
mur , d'enclos, porte Unmi-partî ' au l ' d'un fretté chargé

d'une neurde lis ; aH 2 de ,.trois jumelles sUrmontées d'un
cmnetet~ arme des K~rrerault et (di es Le Nuz. La métairie
a survécu au manoir; ' elle présente pittoresqu'emertt ses

~1) de , Bepgevin. Mq'(Log. de Guirnaëc, p . .. 24" ,

. _ . .. i 7S' .. '0 "0

gothique de son portail, à

l'e~trée du chemin qui ploI1ge sous un' vrai tunnél Ide -ver-
dure. o.
Sans nous Y engager, montons jusqu'à la chapelle de
N otre-Dame-de-Ia-Joie, si bien as'sisesur son tertre do­
J11/:nant, au-dessus des riants vallons bocagers qu'elle dé-
. couvre et bénit. C'est un édifice du début du seizième sièclc:;,
reparé au ' sièole sUivant. L'apparence extérieure en 0 est
serieuse et sobre, et ne prépare guère à l'entassement mu­
site d'œuvres d'art qu'elle abrite. 'Elle est bâtie en tau,
nef et d eux chapelles latérales s'.alignant avec le chevet.
Sut le pignon ouest, seul en pierres de taille, la porte à
claveaUX ·est surmontée de la date 1629 c.f d 'un e c-u;,:;UlJ .
mi-parti de Kerrerault et Le N uz. Plus haut, il y a un
œil·de-bœuf, et à droite et à gauche deux contreforts. La
longère sud 'Offre une fenêtre à deux panneaux et tympan

flamboyant. Trois panIieaux et tr.ois mouchettes composent
la maîtresse-vître, timbrée à sa def des billettes héraldiques
des de I I'Isle de Kergomar. La façade nord n'a .rautre

ouverture que la fenêtre ogivale du bras de croix. Un mur
d'enclos muni d'un banc pour le repos des pèlerins entoure
la chapelle, et quatre massifs piliers ld! u XVIIIe siècle, amor- .

Lis en doucines œnversées, la précèdent à l'ouest. Derrière

le chevet,. une avancée arrondie pourrait bien avoir servi de
chaire, pour prêcher en p; lein air à la foule reunle. sur le
placître) aujourd'hui boisé et morcelé .

A l'intérieur, le grand autel possédait un beau retable
sur lequel des groupes de statuettes en hatit relief, peinte};
et dorées, figuraient toutes les scènes de la Passion. Plü­
. sieurs .ont disparu, enlevées par · des visiteurs sans vergo-

gne. M.Le chanoine Abgrall y a reconnu : IoLe Couron~
nement d'épines, Ol! les soldats portent la cuirasse et la
salade du temps d'Henri In. ' 2° J\T. S. cond1..lIit peu les '
solda.ts (cette scène manque). 3° la.lI!ontée (LU Calvaire,
episode d e Simon le Cyrénée.n. -- 4

. le CrUCifiement (le­ Christ manque; la Sa:nte Vic erge se pâme entre les bras
des Saintes Femmes). 5° la Descente de Croix (cette
scene manque). 6 ° la Mise au Tombeau. Il y avait aussi,
semb1e-t-il, la scène de la Résu· yreCÜ017, dont il reste un
fragment . le tombeau ga-rdé par deux soldats endormis

. posé am-dessus de la porte principale du Ghancel.

180 -

. La fenêtre du .fond est entourée de sujets en bas-relief

, rep,résehtant le Baiser de J uda~, la Descente de Jésus aux
Limbes, ·les six apôtres Saint Pi~rre, Saint André, Saint
Jean, Saint Paul, Saint Mathieu et Sain~ Jacques. Sur 1~
côffrede l'autel se voit peinte une très Jolie scene de la
: N ativ~ité. Les Bergers viennent apporter leurs présents ü
l'Enfant; l'un offre un agneau~ un autre un lapin. A gau­
che s'étend une campagne verte parsemée ide troupeaux ;
a Id\roite arrivent les Rois Mages, suivis d'un cortege nom­
breux '; ,sur eux brille l'éto;,Ie et dans le ciel, des ange,> dé
. p+oient une banderole ou on .lit: GLORIA: IN : EXCEL. ,
SIS : D EO .: ET : IN : TERRA : PAX. A dr6ite et à gau­
che de cette scene sont deux saints rois, Saint HENRY' .
couronné, l'épée a la main, et Saint LOUIS couront.é, por­
tant le sceptre et la couronne d' épine,s. 11 · est vraistLU-

, blable que nous devons a la piété d'Henri-Louis de K.t.:l-
. r~rau1t, seigneur de Kergomar en r680, l'image Ide ses
saints patrons et les peintures de même style qui les d.t.>
oompagnent . .
Sur des coffres placé? aux côtés de l'autel, on voit peints
-. a droite, une religieuse en voile nôir, agenouillée, a qui
un ange présente ' un livre, et, a gauche Saint François .
d'Assise, agenouillé, recevant les stigmates des plaies du
Christ. La balustrade du sanctuaire 'offre cette inscription:
F : F : PAR: F : BERTHO : r718 .

Les · parois latérales du chœur sont toutes tapissées de

peintures sur bois de l'époque de Louis XIV. Du côté de
~ l'évangile, on trouve. d'abord une grande scene de la Nais­
sance d'e la Sainte Vierge, que des femmes lavent idtans
un bassin ; au fond, Sainte Anne est étendue sur un beau

lit a colonnes et courtines. Puis vient .1' A r~nonciation,; en-
suite le Mariage de la Sainte Vierge, qui logi: quement au­
rait dt . précé:der l'Annonciation ; enfin Jésus au milieu des .
DoC't.eurs. Du. côté de l'épître, il y a cinq autre scènes :

. la Promesse d'un Rédempteur. La Sainte V~erge est no-
blement posée sur Il e globe terrestre, qu'étreint le serpent
tenallt dàns sa gueule la pomme de perdition; devant elle,

Adam et Eve sont a genoux. la Présentation au Tem-
Ple, la Visitation, la Fuite en Egypte. On n'y dis­
tingue que les bustes de' la Sainte Vierge allaitant l'Enf.ant
Jésus, et, de . S~int . J.p~~ph. Je . n'al pas. recon~~, p~ut-êt~e.

"- 181-"

ar inad vertance, l~ scene , de la renoontre de Saint J 6a~ ,
~hirn et d e Sainte Anne à la Porte dorée, que mentionne ':.
aussi M. le chanoine Abgral1. , f '
Au-d,=ssus des deux por t.es latéral, es du .chœur, à ripté-:
rieur d e celui-ci, il y a deux scenes peintes. · Dans cell~de"
gauche, se voit un enfant agenouillé aux pieds, d 'un évê­ que; derrière cet enfant se tient un personnage portant un
casque et une cuirasse sur une robe de m~ine , ; il a 1,ln
livre à .la main et s'appuie sur une hallepar; de. A droite

un moine dominicain présente ' à un cardinal vêtu ;de pour-

pre une coupe d'ou s'échappe, un serpent ailé. ~a paroi in-
térieure de la façade du chancel offre huit figures de saints
et saintes , d'une factur~ un peu moins soignée. Ce sont, "
a gauche, de haut en ba s;, St AUGUSTIN; as'sis,teiiant '
une plume et un cœur enflammé. - St ANTOINNE : ,DE:

PADE : portant ,J'Enfant Jésus ' : un lis; St COREN.:..

TIN, en évêque, montrant sa ' fontaine et s.on poisson. '
Sainte religieuse, vêtue de no: ir" dont le nom est caché par
un banc. A droite; du b,aut en bas, St SERVAIS, en évê­ que, bénissant. - St HIASEINTE portant ostensoir ct
statuette de Vierge-Mere. St BERNARD, une plum, e à
la main, devant une table ou sont disposés un cahier et
une écritoire ; vers lui d escend l'Esprit Saint. ' , Enfin une
sainte décapitée, tenant sa tête entre ses mains, qui pou~­
raitrait être Sainte Triphine, tuée, selon la légende locale"
au manoir voisin de Kerbourand 'en Lanmeur,par son

époux Conomor, et ressuscitée par S'aint Gildas.

A gauche \du sanctuaire est appendu au chancel un an­
cien tableau restauré, représentant , le Vénérable Michel
Le Nohletz, que fait connaitre l'inscription : MICHEL ' :
LE NOBLETZ : P. : Il porte une chape " blanche tres

riche et Line étole rouge, et se tient à genoux près · ,d!'une .

table couverte d'un tapis vert, à l'angle duquel un double

écusson timbré d'un casque offre les armes , ;l'Yves de Ker-
rerauIt, sieur de Mesguen , et de sa femme Françoise Qué­
hou (dJor à six mticles dJazur) mariés en I623' Derrière ,

lui sont plusieurs personnages, femmes et enfants, vêtus
, (d:U costume bourgeois du temps de Louis :f{IV. Deux d'en­
tre eux, une dame d?un certain âge et une autre plus jeune,
présentent de ,la main un garçonnet agenouillé sur le de- .
va..i.1t, et paraissent .l'offrir à la Sainte Vierge qui se mon~

tre au-dessus" po· rtant l'Enfant Jésus qui tient une oouron.
ne eti une pa1m€'. Il doit s'agir d'Un vœu pour la vocation
ecdésiastique d'un fils de la maison de Kerr.erault sous les
auspices de Michel Le Nobletz. On regrette que le blason
die cette famille n'y soit pas acoompagné de son émouvante
devise: 1\1{ ervel da iJeva (Mourir pour vivre). '.
Aux encoignures du chancel sont deux statues : à droite
un saint: Yves soutenu par un grotesque tenant un éCusson
qui semble porter, soit un chevronné) soit le bandé de Tré-
. médern ; à gauche, une Vierge-Mère. A la clef de voûte
du lambris du chœur, un ange formant pendentif tient Un
écusson aux armes des Le Ségaler, sieurs d e KergoUlar
en 1650 : d'azur au sauto' ir d)a,rgent accompagné ile 4
quintefeuilles d'or. .
. . Le chancel qui clôt le chœur de trois côtés se compose
d'ùnebase pleine, d'une rangée Ide colonnes tordues et. en­ trecroisées d'assez mauvais goût, et d'une fdse supérieure.
Cette frise est un ~dmirable travail de' la Renaissance,
bien plus beau que cduï que nous avons vu à la chapelle
de Christ. Elle comprend douze sujets ciselés et découpés
à jour, par un ciseau Id'une habileté et d'une richesse sur­ prenantes, et l'on donneraÏ't beauooup pour savoir le nom
. du maître-ouvrier qui sculpta ce chef-d'œuvre. Les sujets
qui décorent les deux vantaux de la porte du chœur sont

surtout remarquables ; ce SOnt deux génies ailés sonnant
de ' Da trompette, dont le corps se termine, chez l'un, par

des ' enroulements végétaux élégants et déliés, chez l'autre
par une gyivre aux dents menaçantes. Dans les autres su­ jets, tous différents, on trouve des motifs et des fleurons
d'une facture délicate, ayant pour supports des génies aux
ailes de papillon, des griffons, des aigles, Id:es licornes mer­
veiUeusement galbées, des pe,rsbnnages gracieux ou gro­ tesques. Les deux portes latérales ont des tympans aj-ou-

rés, avec masques de lions entourés d'enroulefnents et d'~-
rabesques fleur'Îes. .

. La chapelle de gauche contient l'autel ,die Notre-Darne-
de-Ia-Joie, belle Vierge-Mère gothique aux 'Îûngs. cheveux
onduMs couronnés ·de roses et tombant sur les épaules ;
elle tient un sceptre de .la main droite; à ses pieds sont
trois cœu'rsenfl"ammés. L'enfant Jésus bénissant porte un
livre Soous l~ bras gauche. Sur le. s volets ide la niche sont

' .. . ,. 183 '

1 ' ' . - :'_0 r 'l ! - -l ·· ! -
l ' 1 . ! 'I

peint, es quatre' scènes dJune facture mlnutieu'se et étrange,
malh'8ureusement as, s'ez dégradées. Elles figurent l'A dora-

tion des klag'es,la P1'ésentation au Temple, l' Asso~ption
et le COuronnémentde la Sa, inte Vierge; M. '.le chaù()ine
Abgral1 les a décrites en reproduisant les , 'inschpüons la­
tines qui 'Ir es accompagnent. Après la troisième '~e lit la

signature de l'artiste :p. Barazerfecit, que suivait la date
1593, lue par .MM. de Courcy et de , B ergevi n, . . mais au­
' jourd'hui effacée. Ce Pierre ou Pezre Barazer était un pein.:.
tre morlaisien, de la paroisse de Saint .Martin ; on le tr0'uve
cité dans quelques o0'mptes d'é !.?'li ~ , , entre autres dans ceux

de Plougasn0'u , en 1596. Il est ".lssi l'auteur d'un plan
c0l10'âé, sur parchemin" de l'anoi>e: nne église de Ploudaniel
en 1618, conservé aux; archives de Lesquiffiou. De lui des-

cend, en ligne directe, la famille Barazer die Lan'nuri,en.

Sur le dais de bois qui abrite l'autel, sont: peints deux
. anges al' abondante chevelure, figurés en buste et portant
les instruments )j;e la Passion. Le ooffrè est décQré d'une

beMe peinture dU martyre ' de Saint Etienne, que trois
juifs assomment a coups de pierre. Légende : PRIE :
POUR : VOS : ENIMI. (sic). En face, statue gothique
de Sainte Barbe, costumée en châtelaine du seizième siècle,
et portant une haute tour. '
L'autel de l'aile ,droite est consacré a Saint Herbot, dont
'la statue le m0'ntre vêtu d'un froc de moine et muni d'un
livl c, et d'un~ bâton a riboter. Sur les volets de sa niche,
images peintes de Saint Pierre, tenant sa clef, et de Saint
Baul avec s0'n épée. Au-dessous, sur la boiserie, est ' pein-
, te une scène représeJltant, a:u centre, Saint Herbot en priè-

res a l'entrée d'une grotte de rochers; autour de Jui, des
vaches pâturent; au seconid' pbn, on voit, d'un côté, la
chê.pelle de la Joie très reconnaissable, et de l'autre, une
jolie perspective de collines termiriée par un ' coin de mer.
Le coffre de l'autel _ est chargé de deux peint'..lres. A gau­
ChE. un ange lave la plaie qu'un pèlerin tenant un buuroon
porte à la cuisse ; a droite, scène de Tobie; de l'ange et du '
poisson que le jeune voyageur t'ire .hors de l'eau par les
c-uïes. Au-dessus de l'autel, dais sculpté soufenu de deux
chimeres élégamment galbées. Dans la chape1I~ , saint évê­
oue sans attribnts, et poutres terminées en têtes de dra~
gons.

184

Un Christ en croix entre la Sainte Vierge et Saint , J eal}
surmonte la porte I du . chœur. Dans la nef, il n'y a ·qu'une '
seule statue, un long Saint François d'Assise avec une
petite tête, mOntrant. ses stigmates. Sur le garde-corps de
la tribune sont- peints les douze Apôtres, et le Christ au mi­
lieu. Leurs nüms se voient sous leurs figureS : St PIERE, ,
St POL St JACQVE St MATHIEV St IAN .
SAL VATOR MONI)! . St ANDRE St PHILIPE --

St BERTHELEMI St SIMON St MATIA, prie POU1'
nos: I6S0. Les panneaux de la porte, de cette tribune of­
frent des fleurons et des motifs décoratifs. Au-dessous, sur
un massif bénitier de granit qui provient I de la chapelle
ruinée de Saint Mélar, on lit : J. : MAHE : FABR~QUE :
Iï73. Sur certaines d es dalles d'ardoisine vert~ qui pavent
la chapelle, des noms s6nt inscrits en caracteres gothiques;
l'une d'. eUes porte celui de J : HEMERI, d'une famine
noble qui. possÉiJ,ait au XVIe siècle le manoir d ..:; Kergadiou ;
sur une autre, j'ai cru lire le nom des Barruau, seigneurs
de Kersalaun. Les nümbreux écussons aux armes d e K~r-

rerault, et alliances qui émaillaient les vitres en 1679 ont

tous pen .

Au devant de la chapelle est une croix montée ' sur un
sode hexagonal et un dé aux angles ornés de griffes. Cette
croix a beauooup voyagé pour en arriver la. l-~lle a va:t été

primitivement é1evée à l'entrée de l'avenue du manoir de
Keropartzen LanmeU'r, par Michel Le Lévyer, sénéchal

de Lanm~eur en I600, et sa femme Barbe Quintin, sieur
et Hame de Restigou et , de Keropartz, et elle est toujours
hlasonnée aux armes de ces deux époux: une fasce surmon­
tée d'une merbette et accompagnée de trois t, rèfl'es, mi-parti
d'un lion. accom: pagné de trois molettes. Transportée au
cimetière de Guimaëc, elle fut ensuite placée près de la
chapelle. de Saint Mélar, et, après la chute de ' celle-ci, on
la transféra à la Joie, olt elle a remplacé avantageusement
une croix très pauvre de 1790. ' Les statues ont été. inter-

verties; ce sont celles de la Sainte Vierge, de Saint Jean ,
de Saint Michel équipé en homme d'armes et terrassant
le. dragon, de 'Sainte Barbe; d'une Pitié, et l'image des
Cinq-Plaies. .

La traoclition attribue la fondation de la chapelle de . la .

Joie (on l::loit aussi très commünément : N otre~Da.rne-des·

, . i55 ---,- ,

]CJies, et eN breio' Fl : Cha.peZ Cl-r Jaou) aux :sires de Trémé-
derç.. L'un d'eux avait pris la croix rouge, et suivi s~n
suzerain a la conquête de la Palestine. Plusieurs années
s'éc-Oulèrent sans qu'on reçut de ses nouvelles, et sa . fa-
111 il 11e , apres l'avoir longt..::mps attendu, ne songea plus
qu'à pŒeurer ?a mort. Un jour, le frere de l'absent, chevau­
chan t à travers I.e domaine, rencontra., dans un chemin
creux, un cheva!ier armé d~ toutes pièces et la visière
baissée. Le lieu était trop étroit pour leur permettre de
passer de front, et l'un et l'autre s'obstinant .à ne p0'int
reculer, i,:s oonv;n rent de vider aussitôt leur différend en
. combat singul, ier. Comme ils dégaînaient, ,l'inconnu pro­
nonça tristement : « Sainte Vierge, mourrais-je donc ici,
après avâ.r échappé à J ant de péTils, si près de la demeure
I: !e mon p~re et sans l'avoir revu?» cc Qui êtes-vous
donc ? questionna s0'n adversaire. cc Je suis le fils , . du

sire de Trémédem )) répondit le chevalier eil levant ' ~a
visière, et alors les deux frères, se reconnaissant" jetèrent
loin d'eux , leurs épées et s'embrassèrent en pl: eurant. Avant
de quitter le tertre qui avait failli devenir le théâtre d'une
lutte fratricide, et était devenu celui d'épanchements jo­
yeux, . Hs s ~unirent dans la même oraison et promirent à la
, Sainte Vierge d'y édifier un sanctuaire ens0'uvenir de leur
rencontre. Ce fut N0'tre-Dame-de-la-Joie.

Plus . tard, les prér:ogatives des Trémédernfurent usur-
pées par les seigneurs de Kergomar, voisins de la chapçlle,
et qui s'en attribuèrent les prééminenües. Leurs armoiries

y figurent seule~" et l'acte du mariage id'écuyer L0'uis de

Ploesquellec, sieur de Kerprovost, et d e Mari~-Françoise
de KerrerauIt, célébré le 9 septembre I672' en la chapelle
ode ;c Notre-Darne des Joyes », dit, f0'rmelle-ment 'qu'elle
dépendait de la maison de Kergomar, où fut rékiigé et si­
gné ledit acte. L'étonnante quantité d'œuvres 'artistiques
qu'on trouve dans ce sanctuaire établit qu'il fut' jadis un
but de pelerinage réputé, et que les aumônes des hdële~
y t0'mbaient en abon/:l'ance. Dès l 5 18, Oon voit le grand ar- .
mateur mo,rTaisien N: icolas Coëtanlem léguer par testa­
ment un écu d'0'r a la chapelle de Toute-Jaye, près Lan­
meur (1). Les familles Le Ségaler et de Kerrerault ' méri-

(1) Ar, ch. de, l'Hôpital .de Mo.fl:aix. V. BuUe.t. de la Société ,
d'Etl udcs Scientifiques du Finistère. 1882 .

". , .. ' 186

tent d 'être louees pour le soinqu'eHes prirent de faire dé~
corer et enrichir de peintures une cinquantaine au moins
- le pieux sanctuaire qui dominait leur manoir. A présenl
les Ideux sources auxquelles s'alimentait l'humble budget
de nos·chapelles, munificence seigneuriale et, charité p0pu~
1aire, se sont taries l'une et 'l'autre, ici comme ailleurs .

Loin d'accroître l'inestimable patrimd, ine artistique . que .
nous avait légué l'ancit:nne Bretagne, notre âge l'a négli~
gé et gaspillé de désolante faç0l!. Lorsque Courcy, vers
r 850, visita la chapelle de b J o~e, il la trouva si délabrée
qu'if ne puf identifier les scènes peintes sur les autels et les
volets qu'au moyen d'une éponge imbibée d'eau, et gue
ldes chouettes, arrachées par son intrusion à leur paisible
sommeil sous le toit crevassé, venaient voler autour de

lui. Depuis, quelques mesures de conservation et d'entre.
tien ont été pr:ises. Un oouvreur He village a refait la toi~
ture, en profitant de la circonstance pour mutiler les che~
vronnières des pignons; on a nettoyé les peintures. rejoin­
toyé l, es murs; on a, dernièrement, classé la: chapelle parmi
les monuments historiqu~s. Souhaitons que cette garantie
de préservation ne demeure pas illusoire et qu'un gaI1dien­
nage sérioe:ux empêche les « touristes » de s'y founiir à bon
compte de spécimens du vieil art breton. .

A part la signature de Pierre Barazer, je n'ai remarqué
aucun ' nom d'artiste sur les scènes et personnages peints
à N otre-Dame~de-Ia-Joi.e. Les peintures qui couvrent les
autels et leurs intervalles semblent être de la m~me main;
e11es révèlent un dessinat~ur habile et un ooloriste entendu .

Le tlableau de Michel Le Nobletz pourrait être attribué à
son quasi-homonyme, Jacques Noblet, sieur du Pré, « ex­ ceUent peintre » au dire de son actr; de ,décès, en date du 2
juin 1662. C'était un Modaisienquelque peu a:?parenté à
la f.a::i:nille Ide Kerrerault, et il a exécuté en r6 57, pour la
chapel1e du manoir de Su. ciniou en Ploujean. un tabl.eau
votif O:ü figure une Vierge-Mère dont l'attitude pt l'expres­
sion ne sont pas sans rapports aveC celles de la Sainte­
Vjerge représentée ici. Il est bien fâcheux qu'aucun compte
ancien de cette chapelle n'ait survécu au naufrage total
des archives rdigieuses de Guimaëc; car leur i d!estl-uction
nous prive de données intéressantes.
Rejoignons, à 200 mètrel s au sud, la route le ~Guimaëc

aU passage de Toul-arr-Héry. Jetons un coup d'œil à la
métairie noble de Kerazézec, solide maison de 1725 à
tournure de manoir, lucarnes de pierré, pavillon, puits
à auvent pratiqué dans le pignon,' vastes remises et crèches
bordant la cour pavée, ens~mble évoquant une existence
paysanne aisée et digne telle qu'en menaient ces « honora­
bJes hOmmes ' » du XVIIIe siède qui siégeaient au corps
poEtique de la " paroisse, ' fai~a.ient de le~rs fUs des notaires
et , dE!s procureurs et! , rmanalent parfo;s : leurs filles à de
petits geritilshommes rurauxde mince pécune. Puis prenons
la direction de" l'est. Au premier carrefour se dresse une
jolie croix ldi e pierre, socle rond en maçonnerie; dé cu­
bique à pans moulurés, haute gaule portant, au revers du
Christ, une Vierge-Mèr~ couronnée, et sur Les console~ la­
térales un Saint Pierre portant def et uri autre saint. Un
auvent à -doubLe pente,particularité rare dans le pays,
abrite les statues. Cette croix passe pour être celle que le
géant Rannou Tœé1éver portait jadis aux processions, lia ju­
geant seule digne d'être érigée au-dessus du 'cortège par
ses bras athlétiques et ses poignets d'acier. Il ~a planta lui-

même au seuil de ses domaines et s'en munissait pour se

rendre . aux pardons renommés d'alentour.

Peu après, nous atteignons la route de Plouégat-Guer-
rand à Locquirec d evant les deux pitons dénudés (Cléguer­
braz et bihan) qui forment sur la lande, à 73 mètres d'al­
titude, un curieux pointemi ent de quartzites d'une éc.la­
t@.nte ,bJancheur, . aux flancs . desquds .J'·émeraude des

mousses, l'or des genêts et l'améthyste des bruyères bro-
dent de tons somptueux la trame végétale qui les erigaine.
On raconta à l'abbé Olech qu'un tauf;eau étrangement
bigarré faisait sa retraite dans une crevasse de ces roche~,
qu'on l' apercevaü souvent oocupé à paitre · à leur pied,
mais qu'il y disparaissait dès qu'on s'appro'chait de lui.
C'est le fa'meux taro-briz qui hante tant de ruines ou de

lieux mal famés dans nos campagnes.
Du haut du CI: éguer-braz} la vue est belle sur la région,
la mer et l'estuaire du Douron. Au nord se massent les
bois du château de Kergadiou, tout à l'extrémité de Gui..:
maëc, C'est là - encore une vieille terre seigneuriale, que
Tiphai'ne de Kerga.diou porta par mariage, vers I481, à
la famille Hémery. Jean Hémery, sieur de Kergadiou, se

, . " , , 18 8 ----.-,
fit représ~nter a la montre de 1543 par Me Hervé, 'Son fils,
qui 'comparut aussi en son propre nom comme archer à
cheval, et fut père de Pierre Hémery, sieur de Kergadio

mott en 16I5. Ce dernier eut, de son mariage avec Cons­
tance Le Sparler, une fille hé.ritière, Isabelle, laquelle
épousa vers 1606 Pierre de CoëL men, sieur de Kerangouez

, en Plouigneau, issu de la branche de BOlsguezennec, ,ra-
meau de l'illustre maison des vicomtes de Coëtmen ' et de
Tonquédec, qui sortait elle-même, par les d'A vaugour et
les Penthièvre, des ducs de Bretagrie.

La famille de Coëtmen habita Kergadiou , jusqu'a la fin
d'u XVIIIe siècLe. Messir:e Olivier de Coëtmen" chevalier,
seigneur de Kergadiou, Kerango.uez, Roscerff, fils des pré­
cédents, y mourut le 25 août 1689, a l'âge de 77 ans. Il
avait été maint1 enu en qualité d'écuyer et chevalier d'an­
cienne extraction, par arrêt du 10 janvier 1669. Sa femme
Catherine de Launay lui donna huit enfants, parmi lesquels
Yves, prêtre, curé de , Locquirec en 1689; Marie-Sainte,
mariée en 1658, dan.s la chapelle de Leingouez, a René
Pastour, sieur de Kerjean, et Renée-Madeleine, supérieure
des Augustines de Guingamp en 1709.

L'ainé, Jean-Baptiste de Coëtmen, chevalier, épousa
avant 1673 Magdeleine Chrestien de Po.mmü:rio et cessa de
résider au manoir de Kergadiou. So.n fils Olivier-Jo.seph,
mestre de camp ,~e dragons, tué a l'attaque d e Douai, fut
pere d} Alexis-René, qui racheta l'antique baronnie . de
Coëtmen en 173'7, ·et réclama en 1738, a cause de Ce fief,
le droit d '3 présider la noblesse aux Etats de la ' province.
Il mourut en :i:750 maréchal d e camp, gouverneur de Tré­
guier', commandant de Brést et des quatr: e évêchés de
Basse-Bretagne, ' laissant de sa femme Julie de Gouyou
. , de Vaudurand, sœur d e l'évêque .de Léon, d eu}' filles dont
l'ai:i1ée, Marie-Claude'-J eanne-J U'I.ie, épousa -en 1; 748 Pierre­
François de Bougé, s'eigneur de la Belliere, ' en Anjou, ma­
réchal d e camp. Tous deux habitaieilt Kergadiou en- 1754,
et Madame d e ' Rougé y rr: it au monde une Elle, Mari'e­ Georges,baptisée a Guimaëc Ie 10 décembre de cette année.
Mais la terre de Kerga,diou fut ait.ribué en po.rtàge a :-ca
, sœur caJdiette, ' mariée en 1759 au marquis de Caradeuc,' fils
du célèbre proèureur-g~l1.ér;~L et ·, çles 4Ili Çl.p.çes l'on t depuÎ ~

.. 1S9-
transmise .. , aux familles Hay de Bonteville, de · Kermarec,
et NlaudUlt . du Plessis. .. ,
L'ancien manoir, conservé en · partie, se trouve au nord
du châ~eau actuel, sur la lisière du bois. Il éta:t en

aU dire de Guillaume Le Jean, ' dans un état de · délabre­
ment complet, et lui parut dater du XVe siècle. Le bâtiment
principal, ;ciéooré de lucarnes a crochets et fleurons go­
thiques , s'appuyait sur une t'our ; il est aujourd'hui détruit, .
ainsi qu'une partie de J'aile droite; l'autre aile et les C0I1~"

trucüons qui subsistent montrent une porte en ogive, que1-
cilies fenêtres a:ml:,utées de leurs meneaux et diverses baies
a lint; eaux et pieds-droits moulurés. Le portail de la cour
a ses portes cavaliere et piétonne flanquéeS . de pilastres'
cannèlés, a chapitaux ioniques. Il est .défendu, a drOite,
par une batterie de trois embrasures, et a gauche par une
jolie échauguette Tonde, à cul-de-lampe, posée sur l'angle
du ' pignon et percée de quatre meurtrières. L'écusson des
Coëtmen, enlevé pendant la période révolutionnaire, a ·

laissé sa place vide au fronton du portail. Un délicieux
chemin . vert, ombragé , d'arbres vénérab}es, · descend du
vieux manoir v, ers la baie, dont la vibrante eau bleue luit
parmi le . feuiUage, et mène a la chapelle gothique de
N otre-D.ame de Leingouez, située .en la paroisse de Loc-

qU1rec. .
Ce sanctuaire dépendait jadis de la seigneurie de Ker­
gadiou, tout comme une autre chapelle, celle de .Saint­
Mélar, bâL'Îe sur le bord de la route de Plouégat, au pied
des Clégue, r. Nous en voyons les vestiges, dans un enclos
humide où l'on a scellé une croix de fer slirun . ancien fût
éc:oté. Je l'ai dessinée il y a vingt ans, déjà en ruines, et
si pittoresque sous son toit mi-effondré aux lourdes ardoi­
ses doréees par les mousses, avec ses pignons pointus f't

se9 f.enêtres .ro-nde

3en

châssant. un pan cire :ciel. On la
nommaÜ la chapelle Neuve (Chapel-Névez), parce qu'elle
était la dernière endat'e bâtie à Guimaëc. F : LAN: - 1638 :
PAR: Y : LAGEAT, lisait-on sur les contrefarts de l'ab­
s;de a trois pans, terminant une nef rectangulaire accostée
de deux bras de croix. Depuis, elle a été totalement rasée _
et ses ·matériaux ont se, rvi à la construction de la chapelle
de Kerven. On visite encore la fOl: üaine, sol~de édicule de

granit creuse au fond d'une niche Renaissancè où' j'ai vu

. ,."' 190 -'.--. ' .

la stàtue de Saint Mélar, disparue aujourd'hui, et les meres
y font boire leurs enfants pour les fo: rtifier. La cloche,
remont~e dans son clocheton rétabli à Kerven, porte les
armoiries des' Coëtmen : de gueules à néuf annelets d'ar_
gent, 3, '3,3, et des Pastour de Kerjean : d'or au lion de

gueules accompagné de s, ept billettes d'àzu-Y', ainsi que
cette inscri:ptiü' n :' Iay ' estée nommée par 1Hessire Ollivier
de Coatmen, seigneur de Kerancoez K'ercadiou, etc. et da­
moiselle Françoise' de Coatmen, dame de Keria11. I669.
Sain't

Mélar pas plus que Saint Fiacre, et malgré la

douceur et la candeur /30nt le parent les actes. de son mar-
tyre, ne tolere aisément qu'on lui manque de respect; té­
témoin le fait suivant, que m'a narré un habitant de Gui­
maëc. Uri jour, un homme de la ·ferm~· voisine de Kermelven
passait, quelque p~u pris de 90isso· n, . devant la Chapelle.

Neuve. L'idée saugrenue lui vin~ d'y entrer et d'emporter
la statue du saint· jusqu'à l'auber'ge la plus proche; là, il .
l'installasur une chaise, lui offrant à boire, lui présentant
son verre plein au visage, mêlant il ses exhortations bouf­
f.onnes des . railleries sacrilèges. Les personnes présentes
se lassèr;ent de ce ,jeu; .elles ôtèrent la statue des rnains
. de l'ivrogne e t la replacèrent dans sa chapelle. De ce mo

ment, le blasphémateur ne fit que dépéri, r. Un mal inconnu
le terrassa; il ne put jamais remettre le pi ::d à l'auberge
où il avait commis son méfait, et, ' ayant langui d eux ou .
trois mois, il mourut. Saint Mélar s'était vengé.
A 500 mètres au sud, nous croi~,ons le chemin qui va
nous conduire au bourg; mais, avant d~ le suivre vers
l'ouest, allons visiter, . idu côté opposé, au bord de J'estuaire
diu Douron, les ruines du vieux château de Tréléver. Elles

Couronnent un mam~lon r'ocheux, élevé d'une douzain' .:; d e
mèLres, très escarpé au-dessus de la rivière et bordé de
deux ' ldépressions marécageuses. ' Leur plan de'ssine un l.n­
pèze irrégulier, dont la face aspectée à l'ouest, la plus
visibl e;, a une longueur de 20 metres. On Y' d.istingue Je
vide du portail et la base des deux tourelle; qui en flan­
quaient les arigles. Le reste d e l'enceinte appelée C O fmmL­
,nément Castel-ar-Sallou (le château des' Salles) est noyé
sous. un inextricable fourré )dl'arbustes, d'ajoncs et de
ronces. . . .

LitnGm des' sires de Tré! éver paraît p@ur la prfimien:

, dans la montre de , Monsieur Bues Ke.rautret, chev { "
fOlS, ' , P . d T 'l' fi
. reçue à Pans en 135

. ngent e re ever y ' gure
heL , , b é S
, nombre des 27 ecuyers retons pass s en revue. 0')
aU , . , h l' b h Z' d

rIs aîné Prigent est CIte comme c eva 1er ac, e 1er ans

montre du sire de Léon, aux gages tiu r6i de France,
l' (lU '~ ü Gouesnou en 1378, avec un Olivier ' de Tl ,~l~\Ter ; ,
le traité ,de .Guéran~-e ,en 1381, et il était en 1382 maître­ d'J16te1' et conseiller,du duc, qui lui confi~ en l 383 l~ gou­
vernement du pays de Rais. Epoux de Thomine de ' K~ri­
J11~Ù, fiUe du, maréchal de Bretagne, et 'seigneur d'impor':
tanCè à la cour de Jean IV, Prigent de Tréléver n'a pour- ,_

tant laissé aucune , trace dans la mémoire des descend::tnts
de s~s anciens vassaux; mais, par contre, ils. n'ont pas ou­
blié' sOn frere Rannou, de qui la prodigieuse vigueur et '
les exploits herculéens ont encore, dans 1:1 région, des' mo-
numents ' tangibles ' et d'impérissables témoins. ,

Je ne referai pas ici l'étude que j'ai' consacrée, dans le
BuUehn de 1912, à ce fam eux 'Gargantua bas-breton; )e
me bornerai seulement à prendre acte de l,'intéressante
contribution que lui a , apportée notre distingué confrère'
et secrétaire, }\/1. Oges" par son histoire du terrible pen-baz
de fer sous les coups duquel Rannoü fracassa et abîma
un navire empli de pirates qui étaient entrés ,dans la baie

de Toul-.an-Béry pour détrousser les riverains. On m' a
signalé depuis un autre bât'on de Rannou, en pierre celui­
la, monolithe de gran;t long d'environ 2 metres, proba­
blQment" un lech , qui gisait Idans la douve du chemin, près
du manoir du Bellès. Un propriétaire de Lanmeur, 1\-1.
Léon, l'a naguere relevé en ,guise de pilier au portail de
sa cour. Enfin ' M. de la Chenelière (Invent., 82) situe en
Plestin la Chaise .de Rannou, pierre ~ bass~ns ayant à t>a
partie supérieure une cavité. formant siege. Le géant l'avait
lancée, de Tréléver, sur des oiseaux qui picoraient ses
champs ensemencés, et' l'un des côtés a gar

1é l'empreinte
de sa bêche.
Je voüdra:s aussi rectifier la citation erronée que j'ai
fait e, dans cette étude, d'un passage des P'Yeuves de dom
Moric~ transcrit de secon!de main. 11 s'agit de la victoire
navale de Sa;nÎ.. : Mathieu' en 1403, à 'laquelle Rannou dut

contribuer' de tout le poids de s'a formi, dable épé, e, et.. de , _,

1.92 -

la gratifi-catioli qu'ilobtiiÏ' t lorsque l'am:ral ' de Penhoët
i'envoya pottèr la nouvelle de ce brillant succès à la -Cout
. de France, oü setrouvài'=nt alors le jeune duc Jean Vi­
gendre du roi et son ttlt-eur le duc de Bourgogne : .
« A Renoul U 'ava~s é-cri~; Raoul) de T-relev8z, par mand~­
ment de M. de Bourg(ogne)du XXVIII juillet MccccnII,
pour avoi-ra'pris àmondit seigneur de Bourg(ogne) et ;\
M: ·· le duc les premières nou: velles de la des-coi:lfiture que
l'Admiral de Bretaigne et ' ceux de sa compaignie avoient
eu'e sur les Anglois" C. livr. » (1).
'Marguerite de Tréléver, fille héritière de Prigent, épou6a
Rolland Péan, -chevalier, seigneur de Grand-boys et de ja
Roche-Jagu. Leur fils Jehan obtint du duc Pierre II .Q-:s
lettres' l'aul:orisantà élever sùr ses terr'e: s et celles de sa

mère ' justi-ce patibulaire à quatre posts" et . fut p~re, d::
PierrePé.aIi, qui fournit aveu en 1474 pour la seigneurie
de T réléver. ' Vers 148 1, il la donna en partage à sa sœur
Madeleine, 'femme: d'Odet 'de Loy'n ' et mère 'de François
de Loyon, seigneur d e Tréléver en 1520. La réformation
de 1543 attribue ce fief à Franço;s Bégaignon, dont, la fille
héritière Jeanne épousa vers 1569 François des Nos, sieur
d,= -la Marre-Coëtquen.. .

Le ch. âteau était sans doute ruiné dès cette époque, E't
la seigneurie fut morcelée entre divers acquéreurs morIai­
siens qui se qualifient simultanément de sieurs de Tréléver .

Vincent de Kermerchou, l'un d'eux, mort en 1601, eut

d'Anne Nouel autr'e Vincent, s:eur de Tréléver, procureur

du Roi \ 'au siège de Morlaix en 1616 sénéchal !de Saint

Pol . en 1624, qui .laissa de son mariage avec Guillemette de
Botmeur une posl érité éteinte à Morlaix au XVIIIe s:ècle.

En 1612, noble homme Mi ;hel Le Nepveu, époux d'Anne
de Kermerchou, est dit résider en son manoir de Trélèver.

Guy Le Borgne lui donne pour armes : d'or à trois tOUI'-
teaux de gueules, au chef d'a, ygent chargé d'une hure de
sangZier de scd"le, et ce blason se distingua,it encore en

79 sur la maîtresse-vitre de Gu:maëc, avec ·celui des
Toulg'oët : d'or à la quintefeuiZe cl' azur} qui possédaien t

(1) D. Moriee, Preu.ves. II . 736. Sur ' lR f.amille de Tré.
l.éve-r, v. [bief. L 1501 : II, 187, 275; 427, 448, 481, 484, 486,
545/ 557, 7iM>, 1311, 1563, 1712,

·· , 1.93 ,',

__ ' des droits seigneuriaux à Tréléver. Messire Alexandre
'tLlSSl . bb ' cl'
: . 19'oët prend en r6ïo les titres d'a e commen atalre
lou , . ' d Q G 1
de Saint : Maunce, recteur e uempe, r- uezennec et SIeur
d' 'l'réléver dans l'acte de bap:ême de son neveu Alexandre
\1l'h
1ine
Ide i\Iorlalx, et d Y vonne-Gertrude 1oulgoet, sa

(tu f .
~ Hathieu Croizier, sieur lui-même de 'l'réléver en 1684,

est nommé en 1685 procuteur-syndic et mÎseur de Morlaix,
. ,init peu apres une banqueroute de 100.000 livres et prend
la fuite, laissant la caisse de la ville à sec. -Le registre
[J1 un icip aI de r685 à r687 cont.ient des lettres du duc de
Chaulnes et Ide nombreuses délibérations ' relatives à cette
affaire. En 1686, Mathieu Croizier était rentré à Morlaix,
et le ' marquis de Lavardin devait; lui interdire de s'ingérer
U : ans la gestion des finances communales, sous prétexte
que le temps de son syndicat n'était pas encore rév04u., Il
mourut en 1689. En' 1 ï i 2, la ville met opposition sur les
deniersl provenant de la vente du sieur Croizi,er parce
qu 'elle en est créancière. ,
François Cuillerot de , la Pignonniè're, ancien maire et
.\niseur de Morlaix, rend aveu au Roi en r7s8 pour sa terre
de Tréléver (r), qui appartenait en , r770 à Pierre de la
Lande de Calan, seigneur de ChateaugoëJ.l.o, époux et pUr
cureur de ldroit de Marie-Bernardine-Corentine du Rufflay,

ct en l ïï r à Nicolas-] acques Le Forestier, chevalier, sei­
gneur de Kerosven, comte de Boiséon, etc., ' ancien officier , .
de marin'e, demeurant en son hôtel à Morlaix, rue de Bour-

ret.
Le chemin qui nous reconduit au bourg de GuimaëC
pJonge bientôt dans la coulée de Kergomar, en amont du
point où nous l'avons naguère franchie. Il y a là un char­
mant carrefour Ide vallons, séparés pa'r des croupes buisson­
neuses dont chacune porte un vieux manoir : Mezaudren,
Keroig-na,nt, Kerbourand, avec sa Chambre Blanche qu'ha­
bita Sainte Triphine, le Hellès et son , belliqueux portail .
crénelé. Mais Mezaudren seul est en Guimaëc, les autres
s'espaçant sur les confins de Lanmeur. Yvon Ropartz, sieur
de Mezaudren, se présente en archer à cheval à la montre

(1) Arch: de la Loire-Inférieulfe, B-1790.

Bulletin de laSoe. Arehéo ' Tome XLV. Mém. 13

-·194 ,

trie 1'réguier en 1543 ; il meUrt avant celle die Gllin,
gamp en 1549, et ses héritiers sont excusés de ne point
comparaître « pour ce que la saesie y est par vertu de son
decoix ». Sa sœur .ou fiHe Françoise Ropartz, dame de Mc,
:zaudren, veuve d'Yvon C.or.oller, rend aveu en 1556 au fi
de Boiséon. . Leur fiUe héri tiere épouse Thounas J agu
sieur de Kernégues en Plougasnou, greffier civil de Mor.
laix en 1568" maire de cette ville en 1 57 1, dont une fille,
Genevieve Jagu, mort1 e en 1633 sans alliance à son ma~
nO'ir de Mezaudren .

En 1642, celui-ci appartenait, par voie d'acquêt, a
Maurice Thépault,sieur Ide Leinquelvez en Garlan, bailli
au siège royal de Lanmeur, épO'ux de Jeanne de Kergroas.
Un de leur fi'lis, François Thépault, sieur de Mezaudren,
mourut prêtre et chanoine de Mur à Morlaix en 1687. Mes.
sire Jean-Louis-Anne Thépault, chevalier, seigneur de
Tréfalégan, et dame Thérèse J égou du Laz, 'sa femnle,
ren(ient aveu en 1773 a la seigneurie de Tréléver pOur
leur terre de Mezaudren, chargée envers ce fielf d'une rrente
de 20 quartiers froment et une livre de poivre.
Le manoir est aujourd'hui bien délabr· é. II a garde
,cependant la dO'uble arca\j,e de son pO'rtail, encadrée d'un
oordO'n saiUant 00 up é. d'écuss:ôns 'frustes, et la grande porte
en ogiv. e du corps de logis, qu'éclairent deux larges fe-
0 , nêtres à croisées de pierre. A gauche, dans un courtil élevé,
le vieux colorilbi-er tout habillé lde lierre sent chaque jour
chanceler davantage sa tourelle lézardée ,du haut en bas .
Un, peu plus loin cou~e au flanc du vallon la « fontaine des
Trois Rectleurs » ' (Feunteun an tri Personn) où se touchent
!eS) trois paroisses die Guimaëc, Lanmeur, et Plouégét\.­
Guerrand .
En écornant le t~rritoire ' de Lanmeur,nous gagnons
au nord un autre vallon plus profond et plus idiscret, au­
dessus duquel miroitent les faîtages aigus des trois pavi! .
lO'n's du HeIlès. Notre route grimpe à flanc du côteau, en
coupant! des garennes d~clives, dominées' par a'un de ces
majestueux colombiers seigneuriaux qui font Id,ire que jadis,
en Bretagne, les 'pigeons étaient mieux logés que leurs
maîtres. Celui-ci dépendait du manoir de Kervéguen, dont
les murailles drapées de ver~lUre couronnent, à dr.oite, une
coIline boisée. On en connaît les possesseurs depuis 1382 ;

-·\1.95: - ,
'étaient alors Robert Co.etilez et Mahaut, sa femme, père
Leur fils Alain" cité dans 1a réformation 'de 1427. ~rit part
à la ligue des seigneurs bretons contre les Penthievre et
s'employa , à la déhvrancedu 'duc' Jean V qui, pour l'en
réoompenser, le gratiiia des biens saisis sur Eon Blouin,
l'un des co.mplices de la rébel1ion '( 1). De son mariage avec

Amice Le Borgne, il laissa une fille, Jeanne Coëtilez, darne
de Kervéguen, qui ,épousa Jacques Estienne. -
Alain Estienne, sieur de Kervéguen, leur fils, paraît en
archer en brigandine et page aux montres de I479 et 14

pour son fief de Gu~maëc, valant 120 iivres de rente. Epoux
de Jeanne Menou, il en eut Jehan, marié à Isabeau Le
, Rouge d'Ancremel, dont Guyon, mentionné en 1543 comme
possédant Kervéguen et une métairie jouxte. Il est excusé
à la montre Ide Guingamp en 1549, , « à cause qu'il a la
charge de coste marine et cappitaine d'icelle paroisse »~
Il s'aJUia à Marie de Goezbriand du Roscoët. Son fils Jean
mourut sans ' postérité de Constance du Périer 5 et sa fille
Louise, marié en 1584 à Yves de Goezbriand, sieur de
Roslan en P~ougasnou, porta Idans cette maison la ter.re de
Kervégllen.

Dans Le Cahier du Seigneur de R Gslan (Bulletin, 1912),
j'ai donné sur ces, deux époux et leur descèndance de nom­
breux détails extraits d'un sorte .de L ne \Je raisori conservé
aux archives du ch:Heau :lc Kervolongar en Garlan. Je n'y
r 2viendrai donc pas, ' pour ne point allonger cette étude
déjà trop étendue. Des Goezbriand, le manoj' r de Kervé-

guen a passé par mariage aux Kermenguy en 165 l, puis
aux Diellieveult. Le ' bâtiment principal ' est aujourd'hui
abattu, mais il subsiste, des deux côtés de la gran(de cour
pavée de galets, des constructions du seizième siècle, aux
ouvertures entourées de moulures et de gorges dans ~a
note du temps. Les lucarnes so.nt sommees d'épis en terre
cuite bosselés, t els qu'en bbriquai ent les vieux potiers de
Lanmeur.
U~·, dernier kilomètre, et,
achevons notre randonnée à

(1) Arch. de Lesquiffiou.
15 -janvier 1442.
en atteignant le bourg,
travers cette attachante

nous
COnl-
Fonds Le Boralle

- , - Acte du

, 1.96' "

thune ' tregorroise dont la part en souvenirs d'autre.fois le.

méufe erioôre belle, malgré de tristes destrucÛons qu'on
eût pu éviter ou restreindre. Mais parmi les œuvres d'art,
les monuments de tout genre que nous venons d'invento­
rier,oombien sont idl éjà. menacés dans leur intégrité et même
leur existence 1 Que notre -Société redouble d'efforts pour
iritéresserl, es autorités locales à. la préservation, au sauve­
tage de . tant de précieux vest.:iges que déciment chaque
jour l"ignorance, l'indifférence, le mercantilisme. NuMe

besogne n'est plus urgente, plus digne de ses préoccupa-
tions quecelle-Έ.. Si dans l'Est les fureurs de l'odieuse
[{ ultur s'acharnent sauvagement sur les merveilles de notre
architectur: e . nationale, infligent au patrimoine artistique
de la France d'irrémédiables pertes., ici du 'moins,travamons
à conserver au pays tout ce qu'il est possible, défendons
contre le pic du maçon et la griffe , dtt brocanteur ces débris
sacrés où . s'épèle notre histoire, arrachons aux mains
brutales ou cupides les restes · de cette parure sans prix
dont les siècles futurs nous demank:lleront sévèrement

. compte.

L. LE G UENNEC.

235
DEUXI E PARTIE

Table des Mémoires et Documents publiés en 1918

Élie Fréron, par F. CORNOU ................... .
[Églises et chapelles du Finistère J. Archiprêtré de
Saint~Pol-de-Léon. Doyenné de Saint-Pol (suite).
Doyenné de Landivisiau par le chanoine
Pages

1 P. PEyRON ................ . ....... '. . . . . . . . . . . 33

III Le Recrutement écclésiastique et les écoles sec on-.

daires dans le Léon après la RévO'lution, par
l'abbé G. PONDAVEN . . .... : ...... " ..... , . . . . . . 46
Notes sur les fabriques ' de toiles de Locronan au
xvm

siècle par Daniel BERNARD............ 116
Excursion archéologique dans la commune de
Guimaëc par L. Le GUENNEd (carle). . . . . . . . . . 131
VI Notice sur le fonds Prosper Hémon des archives
du Finistère par H. W AQUET. . . . . . . . . . . . . . . . . . 197
VII Notes ' sur quelques bornes routières du temps
du duc d'Aiguillon par J. SAVINA.. ..... .. ..... 209
VIII Discours de fin d'année prononcé par M.
LE PRÉSIDENT.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215