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Société Archéologique du Finistère - SAF 1918 tome 45 - Pages 116 à 130
N'OTE~
01 es (e . ocrona lJ sur esa rI ues
. AU XVIII' SIECLE
L'histoire économique de la Bretagne estencor€ peu
connue. L'industrie et le commerce de la toile, qui flo ..
rissai, ent >Cians l,es régions , de Rennes, Quintiù; Uzel,
Morlaix, Locrünan, rùériteraient une étude parheul[(>r:\
qui serait fort intéressante (1). . .
Les notes qui vont suivre tenLtrOn t à -donner ll1l ,~ icl(c
üe la physiol1ômi-eet de l'actJvité de ceHeinrlusl r:f;
-tIans . un des centl~es de proCl1. lc· [ion. ."
( t) On pelit cCfllslllter SlU cette rjnestion :'. .
BOUUDE DE LA HOGERIE : Introduction al! t. III de 1'inven-
ta,ire d,es Archives du Finistère, section Toiles . -
. Dûpuy (A) ' : L' iYulüstrieet · 'e commerce ,en Bretag-n e ~l.il
'\ :T ., l 1 f) Z l l l S . 1 l . ;/]:J t t ' 1 l
. ,(' SIee e_ '. )1/ " . ce ({. , Qc'lele ,', cac ,e'Jn'/.(JlIe (I.e ,'l'es " '. , ,
sé1'ie, 50-80. . . ' '.
DE BLars (A) : Etat dU COnlIller Ce et de l'indllstrj.~ ,en nn~
tagne, antérIeurement an XVIIe siècle. (Bu ll. A ssOcintion
lJ'retonne, 1849, 176-179)_ .
DE CALAN : La Bretagne agricol.e, industri eUe et. ccm.mef
c'81e a u début du XVIIIe siècle. (B7.i ll. Association breton-
Iî C, 1895, 55-80). .
PTNCZON DG SEL DES :vrONTS : Considénüions S1lI' l e, COHl
o mer Cé d, e l a, Bret 8.gne. He1lnes, Vatar", XVIIIe sjècle', in-I).
GAUL'TlEH. DE KEHMOAL : Les Etats de Bl'et,f-l~ne et l'indus
triE ! d 0s toiles. U1,e?J7L-e cLe Bretaqne pi de r'endée, 1866, l,
l69-182 ; 307-323 ; 364, :373). .
, do ES( Ju :sses de l'i.n dustrie linière dans Je dé-
nartement d· es Côtes-dl! -Nol'd. Sa int:-Dl'ieuc, Guyon . 1866,
in -8. . . ,
Du CHATELLIER (A) : Recherch es statisticl11 8, S Slll' le .i':-
ni-stère. '
BOURDAIS (F,) : L'industri e et le COmrn81'Ce de ]a toi~e I.m
Bretagne du XVo au XIXP. siècJ.c:: (Annales de' R1'eta(fn e,
janvier 1907. Résumé d'lm lY lémolre encore inèdlt.
-- l't.7 -
est un
rUI
"l" et belle conuue une. cathédrale avec sa grosse
g . Il, U . , . .
IlmI10ii's, sa place pavee, ornee .ch . .11l élégant pUlts, les
,\ (lllO l,('s éWtiS8.11S, les maîtres-tisserands l)Ossé-
IH'clI\'. ":',' , . . ,.. ',' "'. ' .' .
' t c!lleicill alsance P, )Ul aVOll pu falle babr de tels
, 4 H le Il . .'
é·diHcrs. '. '
L{\~ fabt'iques de tojle de LQcomm existaient déjà au
\Y,/" _ sj&cJ.e · et leurs produits se vendaient même. jus
qu'C'1! Espagne (1 .),
Pe1.Hlant tout l,e XVIIe siècle, ceHeindustrje fit vivre
la population de Locronan et desepvü'ons ; mais nous
lIC possé,dons pas de renseignements sur cette époque.
JI nOlIS faut arriver au milieu du XVIIIe sjècle pour
aVJit' ([Llelques {létalls. ... .
En 1751, le nombre fte métiers ou de ti.sserands c;r,
rl'partissaitcomme suit : Locronan : 150 ; Guengat :
:'?/j'i Plogonnec : 8; Quimper : 1 ; Plouhjn~c : 5 ;' Ben- .
'lcc-cap-Sizun : 2 .; Pont-Croi.x : 2 ; POllllan : 12 ; Mel
la ['s : 34 ; Mahalon : 8 ; Pouldergat .: 1 ; Ploaré : 1 :
Saint-Nic: 2 ; Dinéau1t. : 2 ; Plomodiern : 6 ; Ploëven :
20 ; Plorrév, ez-Porzay : 55 ; Cast : 30 ; Quéménéven :
:Hî : Pleyben.: 4 ; Brasparts : 3. Soit, au total, 406 mé-
tiers, répandus dans 21 paroisses (2) . . « On estinie que
chacun de ces ouvriers ne s' oocupant que de la tanri
qu e, peut mettr,e en commerce 40 pièces de toiles nu
rùoins p,ar année, soit 6.000 pièces pour les 150 métiers
(1) V. Compte d'un B rr'éton
RS'(Ja(fnc (1 G30) , pae T EMPIER.
Nord, 1803, p . 161).
(2) Arch, d'I:.et-V. C. 3929,
voyag eur de COmm erc e en
(Bull, FJrmt-la.ti o 1'l- Côt es-fiH ..
118 " .
de Locronan; les aufres peuvent être portBs de 15 à I.t)
pièces aussi par année, attendu qu'ils travaillent aùssi
la t, erre. Cette manufacture doit donner, année COUt ..
mune, 10,000 pièces» (1), représentant environ 4:00,00.0
aunes (2). .
La condition d.e tisserand était fort pénible : le lneil~
leur ouvrier ne gagnait pas plus de 15 sols par jour et
il y avait, à Locronan, 132 familles dont la subsistance
l'l'était fondée-que sur ce travail (3). « Il ,est à r,emar~
quer que. le eomrnerce des toiles de Locronan se trouve,
pour ainsi dire, dans une seüle 'main et par conséquent
.le profit. Les ouvriers de cette fabrique, principalement
ceux de la ville, forment ,entr'eux un troupeau d'escla~
ves qui ne travaillent qve pour enrichir un fournisseur,
soit de la Compagnie des Indes, soit du Roy, 'qui se
rend maître de la fabfique, de manière que le profit du
fabricant est si mince, qu'il ne lui est pas possible
d'. augmenter le nombre de ses métiers~ car sur l, es 150
qui y sont actuellement, il y a 130 fabriquants qu'on
peut dire être presque tous des nùsérables qui ne tra-
va. illent que pour le pain, quand il n'y a pas de demande
de toiles ou que l'acheteur, qui est. presque toujours
unique, ne veut pas y mettre le prix» (4).
En 1779, le plus riche d, és fabricants de Locronan ,
aux dires du commis préposé à la marque, p0ssédait 2
vaches, un bon cheval pour le conduire aux foires et aux
marchés; ü portait au bureau 8 pièces de toile au
moins par semaine ; il pouvait avoir de bénéfice, 3 li-
vres sur chaque pièce, ce qui flaisait 24 livres par se-
(1). doC. 1531.
(2) La grande aune de Bretagne valait 50 pouces,
à-dire, 1 m. 353,497 et la petit~ àune, 44 pouces ou
191.077. '
(3) Arch. d'I.-etw V. C. 1532.
(4) doC. 3929.
c'est-
119 --
!lisseul's, l, es jnJermèdiaires et par un .certain nombre
d'llOlllllles üe loi: sénéchaux, procureUrs; avocats, no
taires, dépendant des juriüictions seigneuriales qui
~'exerçaient Ù Locron.an (3).
Les débouchés -de cette fabrique étaient l1
rin
c:ipale
ment la Cie {tes IIHles, les ports de Brest et de Lo
rienl . l./}CrOllan a fourni à.la Compagnie des Indes jus-
(fU'à 200,000 aunes de toile (/1:) 'En 17G4, sur l, es 400.000
aunes ,rI. :.; production annuelle, le port de Br· est n'en
'l'onSO-lllllla que 20;000, ce llii ,d· e Lorient que 50,000, .j
la Compagnie des Indes que 50,000 et les reste d·e la
province que 130.000 ; on essaya de faire passer le
l'este ,en Amérique; on en envoya aussi à Bayonne,
(1) Arch. d'I.-et-Vi. C. 1539.
(2) doC. 1547.
. (3) ! urid:etionsde Lese uz, Lezhal'SCbll.et,
Pl, essl.'-POl'zay. pcieuré de Locronan .
(4-) Arch. d'I.-et-V. C. 1532, . .' .
N evet K-8l'vent
120 -,'
' Dunkerque, La Rochelle, Bordeaux, Nantes, mais l' :~~
coulement ne se fit pas et la marclmndise revint aux
magasins (1) .
' L'établissemellt d'une manufacture ' ,royale à Brest,
par Choquet de Lindu,en : 1763-1764:, ~porîa. un nKle
coup à celles de Locronan. Cette fabrique envoyait Un
eommissionnaire chargé >Cl' acca pa.rer tous les chanvres
de l, a région. Le , conllnissa:ire de la marine dépéchait
même un ar' c.lwi' vers le prieur de Locronan , et plusieurs
autres recteurs pour les ,engager à avertiT leurs parois
siens que la , marine retenait leurs chanvres (2) « Cette
manière d'opérer étoit d'autant plus préjudiciable à
Locronan que le commissaire et l'intendant de la :ma-
rine à Brest usoient de leur influence en faveur d'une
. fabrique qui ni 'étoit nullement. au compte du roi, mais.
- d'un particulier qui vendoit ses toiles à la marine, de
sorte que ce particulier faisÛ'it seul tout le bénéfice qai
étoit auparavant répartj entre les habitants malheureux
d'un pays stérile ». (3).
Les teiiles de Locronan n'étaient d'ailleurs pas bien
conditionnées pour être utilement employées par la ma
rine. Il fut peI'lnis aux fabricants, par arrêt du 27 fé- .
vrier 1783, d'i augmenter le nombre de fils en chaine de
l-eurs toiles à voües en proportion de la largeur qu'elles
devaient avo:r pour pouvDir servir à la 'marine, afin de
cOinpléter .la fourniture insuffisante ' de la manufacture
de Brest. Et à .ce propos, l'intendant de la maripe écrit:
« ,le crois qu'on doit apporter beaucoup de prudence
. . dans ]' exécution de cet arrêt ,. attendu qtle les _ fabri -
quans attachés à leur routine, se déconcertent ajsérnent
quand on veut l· es - en détourner et abandonn'ent quel ..
(1) Arch. d'I.-et-V. C. 1532.
(2) doC. 1536.
. (3) doC. 1536.
12-1 --
fois leur état da.us 1« cramte Ü encourir des confis-
(Ile '. . _ . . , .
Co.l., .
. 15 e~tr;e warquees et malheul'eusernent, Ils .trouvent
saI '
'sSCUfS de la manne royale » . (1)
Locronan ne fil, que · diminuer. ne 10 .000 ' pièces eri
175 -1, eUe tomba à 8.000 ellvil'ou, en 1760 ; à 6329 en
1i70 ; elle se releva Hn peu pendant la guerre de l'in:V~
pendallce amérl, cajne, à cause des armements faits il
Brest et à Lorient, mais · ce regain d'activii.é lle se main
fjnt point et en 1780, l'année quj précéüa le transfert
{lu bllfeau de laruarque à Quünper, le nonîbre de pil~-
ces atteint seulement 6464. Les armées suivantes, la d i-
minution continue : ~554 'p:èces en 1783, 3.294, .n
1785 (2) . .
Voici queHes-ét ùent les causes de ce .. dépéri .'sselllell.l,
d'après l'in ; - ' 811clant (le la llHlTine de Br2s t, Hocqllart :
« La manufacture de LocrOllan, alltrefois el) rép uté!-
hO ll , tombe considérdblernent et ayant voulu en : appro fOllù il' les causes, j' ai appris que cet évé118 111Cllt ne pro
vena it ([u· e de .l.a. faveur (fue la COlllllélgni· e , des lncles ·
accorde aux lJlHllllf~lcture' qu i se SOllt ébablies ù All-
. ~e l's et à Beaufort et qu'elle ne tire acluellement dl'
Locronan C[u, e la llloüiéde ce qu'elle eu tü'oit dans les
n lLllé~s précédentes. Les vices qui. O.llt été reconnus üe
tout temps dans ces toiles, engagèrent les intendans de
1(1 marine, mes prédéeesseurs, à ét, ablir à Hecouvran ce
une manufacture royale de tolles à voiles. Depuis cette
époque, la marine s'est bornée à tirer -de Locrünan,
pOUl' I· e service du roi, que des toiles à 2 fils mélis dou bles, mélis simples à doublage · et à prélarts pour l'n-
{ 1) Arch. d'!. -et-v. C.1536.
(2) cl 0
1"' '1 C':!. "1
'. - - 122 .. ...
sage des rnoyens bâtiments et les voiles légèrgs' pour les
gros vaissaux. Les toiles prov,enant de cette manufac
ture ont les fils de chaîne beaucoup plus gros que les
fils ,de trame, oe qui rend les toiles déf,ectueuses et de
ma UV31S usage. .
(( La Compagnie des Indes tiroit autrefois toutes ses
toiles , de Locronan et avoit une : aHention particulière
pour les faire. bien fabriquer ; même elle avoit fait ve
nir des métiers et des ouvriers de Hollande ; mais, de- ..
puis 4 ou 5 ans, elle tire les premières , espèces de toile
des nouvelles manufactures d'Angers et de Saumur et
ne prend dans le quartier de Locronan que les mêmes
espèces de tqiles dont le roi se sert, ,et .c'est ce qui,
vnaisemblabl'ement, donne lieu à f.aire tomber les fabri-
CJnes üe Locronan et {le Poülan. On peut (ljre, en gé-
néral, lJue les matières qu' ony emploie ne sont point
assez préparées ni assez buandées et que les fils de
cbaîne et de trame son t mal assortis )) (1). .
Ce que l' intendant de la . marine ne dit pas c'est que
la manufacture de Brest avait tout fait pour attirer.
dans ses ateliers les meilleurs ouvders de Locronan, et
rel1xqui restèrent n' avnient ni les moyens ni les üapa-
cités v{}lllues pour relever une industrie fortement .cOll-
clI.rrencée par des fabriques beaucoup nüeux situées · pt .
mieux outillées. Le monopole s'était également intro
duit à Locronan et les deux ou trois fournisseurs ct
se1l1s acheteurs, s'entendaïent pour imposer aux tisse
ranLls les prix qu'ils vou]~ient. Ceux-ci se découragè
rent et la production s'en ressentit, en quantité et en .
qua.lité, de sorte que les négüciants de Landernel au ct
de M orl.ajx cessèrent également leurs achats (2).
On essaya d'organiser la fabrication et un règlement
('1 ) Arch. d'I -et-V. C.1532 (1754).
(2) Bl.bl. municp. de Rennes, Mss, 2941 (1785) .
- - 123 _. --
. lposé en date du 13 mars 1742. Pous lui emprun-
(u t lI) '- " ' " ' . . ,
'énul1leDatlOn les sortes (i.e toIles confectlOnne' ês
toUS
à Locronan : . " " .,
« Le Roy étant l11forme qll Il se fabnque a LokoOrnan,
l1aJ1, Plonevez-Porzay, Mahalon, Melard, PlOITlO-
. rn ploueven, ~ amt-[ l C, as, uemeneven, ogon-
(le , l' ' 1 . d t '1 '
GnenQ'atet autr, es Jeux oC es -envIrons, , r es. ' 01 es a.
Il . , u
voiles, pour la fabr;caLion desquelles les fabriquans ne
suivent aucuns règlemens, et que pour établir le b 0 r1
ordre dans c-es manufactures, il seroit nécessaire de
prescrire des règles pour aSE urer la bonne qualité des
dites toiles ; à quoi désirant pourvoir, vu l'avis des
Députez du Commerce, ouy le rapport du sieur Orry ,
Conseiller d'Etat , et ordinaire au Conseil royal, COll-
1rôleur général des Finances, ]e Hay étant en son Con
seil, a ordonné et ordonne ce qui suit:
1. « Les toiles à voiles apeUées PO'ulan et Lulwr-
nan, à deux fils, qui se f, abriquent dans les d.lieux et
aux environs, auront en , chaîne au moins vingt portées
de cinquante fils chacune, faisant mille fils, dix-neuf
pouces de largeur et trente à trente-d, eux aunes, me
sure de Paris, de longueur, a11 sortir du métier ; 10
, tout à peine de 00nfisfication d, es d. toil-es, qui seront
coupées de trojs aunes en trojs aunes, et de dix livres
d'mnenùe par çhaque , pièce - et pour chaque contrav-e n
tion.
II. « Les toiles ù vo]es apellées Noyales-triples, à
un fil, auront , en chaîne, au moins dix-neuf portées de
cinquante fils chacune, faisant neuf cent cinquante fil s,
dix-neuf pouces dB largeur et trente à trente-deux au
nes, mesur-ede Paris, de longueur, l au sortir du métier; ,
le tout sous les peines portées par l'artjcle précédent.
III. (( Les toH€s à :voiles apellées Noyales-simples,
auront , en chaîne, au moins seize portées de cinquan1 e
-- 124
fils chacune, faisant huit-'cens fils, dix-neuf. pouces {le
largeur et quarante-cinq à cinquante , aunes de lon-
gueuI'.
IV. « Les toiles appellées bandes de ris, à deux fils .
- destinées à faire des ris aux voiles, auront enchaîne,
au moins sept portées de . cinquante fils chacune, fa:-
santtrois-eent,cinqua ote fil~l six pc }Uces au moins ~ie
largeul', et qua.rante à ci.nquante aunes d, e longueur.
V. « La chaîne et la "lramedes toiles comprises dans
les articles préceüells, seront composées du premier
hr-i n du chanvr, e, apellébrin sur b'fin, sans. aucun mé.··
lange de ftl ' de lin, 'et seront l esdites toües frapées au
moins quatre coups en les tissant.
VI. « Les -'toiles à voiles (l,pellées 1nél'is, aUl'on t el)
chaîne, au lllÛÜ1S dix-huit portées.. {le \ cinq uante filS
chacune, faisant neuf-cens fils, vingt-cinq pouces de
largeur et quarante à quarante-cinq aunes de longueur.
VII. « Les toiles à vo]l.es apellées façon de Hollande )
a.uront en clmîne, au moins dix-huit portées de cin
Cjwlllte fils chacurle fe.ÜSé.lllt neuf-cens fils, vingt-cinq r'l
vingt-~.lx pOlices , le ], nrgeul' .et trente à trente-deux au-
Iles tle longueul'. .
V[jl. « Les · toiles à voi1Cs apellées jJl'f{u{ U), üe ~a
pl'-8tHi('jre sorte, pour d011blag.2s, aur0l1t en clJaJne, L1 U
moiDs seize pOTtées de cinquante fi1s chacune, faisact
twit-ceus fils, vjngt-trois à vingt-quatre pouces de lar
gel! r et quarante à cinquante , aunes üe loùgueur.
IX. « Les dites toiles à voiles apellées Prélat, de la
seconde sorte, auront en· chaîne, · au moins' quatorze '
portées ,de cinquante fils chacune, f.aisant s, ept-cens
fils, vingt-un pouces de largeur et quarante àcinquant.e .
aunes deé"'1onguenr. ~
(1) pour préhnt.
' 1) 'l(- Lt Ile la - trolsj,\~
X. (l Les toiles ù voiles ape- ees -te ','\.. ' -
[lIA et .élemjèl'. e sorte, auront en chaîne, au mOlliS qua-
torze portées de . cinquante fils chacune, faisant sept-
cens fils, vingt pouces de largeur et quar, ante a on-
qllan ie aunes de longueur ~ .
XI. cc Les toiles à voiles apellées Ollonnes, auront en
cl1aîne, au moins seize port.ées de cinquante fils ' cha-
nille, . f~üsant llUi_ t-cens fils, tr, ente pouces de largeur
. et Ircnte aunes justes de longueur.
XII. cc Lès tojles à sacs auront enchaîne, au moins
douze portées de dnquante fils chacune, faj 3ant six ('211S fils, vingt-quatre pouces de l3rgeur et _ quarante :'1
- cjnquanteaunes , de longueur »- ('1). _
Suit une longue instrllction sur la façon de l-essiver
les chaînes, -de les composer, ,cle les filer, etc ....
Malgré ceUe réglell enli a tj on et les m· en a ces de sanc-·
(ions sévères, l, es hsseri ands de Locronan cont :l1llh'en t 1 .
fabl quer leurs toiles .d'après leurs méthodes, ce qui
leur valut c.ette appl't'ciniioJl dA la [l él"rl d_ c l'intenùa lÜ
de Bretnglle : (c Ce bou rg esL r2mplj .de t isserands tf(~~
dîll~S , très insuborjonnés et Cllri n'ont · .i(unai~ connu
, d'n llll'eS lois que leur volonté ». (2)
CIl, aqlle fabrièant devait posséüer une marqu· e Pî1 ['-
t :culière formée d'un coin sur lequel étaient g:ravés~.n
première lettre {le son nom et .le n~m du hel1 de sa de- ll :CU l'e en ent ier. Il devait appliquer ceLt.e marque, avec
de l'huile f;t dn noir de fumée, à la têl -e el !l la qu-elle tk~
tllaque pièc.e ,de toile. Les pièces dev.a-ient ensuite être
por tées H il bureau -de - visi.te pOUf' être vér ifiées et mar-
quées à nonv· cau de l'empreinte offic iell e contennnt le
(1) Arch. d'I. .et-V. C. 1531.
(2) . do
C. 1539.
. nom et les armes de Locronau, avec le mot Visite et ln
dâte ed l'année (1).
A la tête üu bureau de. visite se trouvait un (:omnüs
nommé par le Conseil du Commerce, . Le Duff de M·eso- .
nan. Il avait 500 livres d'appointements efun homme
de peine lui était adjoint, payé 75 livres par an . Il tou-
chait en outre · iO Evres pour frais de bureau et 75 li-
vres pour le loy.er. Il percevait un sol six deniers par
pièce } iOUr la marque; les amendes et la vente de toiles
. confisquées, rapportèrent, en 1765, 23 livres 6 sous, ()
üClüers, Pendant la seconde mQ.itié du XVIIJc siècle, l€s
recettes ne dépassèrent que très rarement les dépenses.
Le commis -·el les inspecteurs se plaignaient souvent de
la vente faite üe toiles non marquées. Et cependant les
condamnat ions prononcées contre les délinquants
é~aient fort dures: C'est a.insi qu'en 1750, Yves Lan
nuzel et Millian Jannou, convaincus d'avoir contrefait
les em.preintes Ùu bureau de la visite, sur des 'pièces de
!oile par eux fabriquées -et v, enclues, furent condamnés
(c à servir le Roy -conune forçats sur ses galères, l'es
pace de trois ans, après avoir été préalablement flétris
des leUres G. A. 1,. , et -en plus, à 50 bvres d'amende
pour chaque pièce » (2).
Quelques années après, Roland Hascoët et Augustin
Le Mao furent condamnés, pour avoir vendu des toiles
non marquées, « à être battus -et fustigés de verges sur
les épaules par l'exécuteur criminel sur la plac-e publi
que de Locronan, bannis pour cinq ans de la province,
. leurs bi ens meubles eonfisq és )). .
En 17R1, sur l'avis du préposé à la marque, des Ü1S
r ecteurs ·des manufactures, de l' jntendant de Bretagne,
(1) Voir ]a r.eprodllction de cette marque au BuEetfn de
la Société Arch. du Finistèr·e , t, XXII, 1895, 398.
(2) Arch. d'I.-et-V. C. 1535 .
121
arret du Conseil décida le transfert du bureau de
un c , , 't fi J t" ct' ,
à QuimlJer (1.) . On s etaI ' ale par ce moyen, ' €-
VJSI t , . . ,
Ilh " .
Ils , de porter sur leurs epauLes a Qmmper, ou de payer
chevaux; pas un seul qm aIt unevOlture. Le_ conums
préposé à la marque était fort ,dur pour · eux , sou vent
de mauvaise humeur ; il faisait lui-même le commerce
des t-J il es en s'arrangeant av, ec quelques négociuns :\
qni il plocurait les lneilleures to:les à .la conc hUon ,tir
partager . avec lui les profits. M ais depuis quelques
tems, ne trouvant plus de complaisans, ilcommenç, a il
se plaindre, -des fa'briquans et à so1liciter le transfert d 11
btlreau à Quimper ».
L'Evêque de Quimper s'intéressa lui-même à leur
cause et écr:vit à l' intendant , 1e30 jüillel -178:1 :
« Ces na1.1VreS malhel1reux sont réduits par cet arrêt ,'i
la mendicité; ils ont déjà en partie abandonné leu ['s
mPtiers et plusieurs sont allés chercher a illeurs une
subs'istanc-e qu'ils ne trouvent plus chez eux (2). .
L'·éloignement du bureau de la visite , eut pour coris ·~
quenee de favoriser la vente :de toiles non marqu ées t=~ i
J'inspecteur des toiles de Morlaix é, crivait, en 178&., :
« Les f, abricans de Lokornan et des paroisses circonvoi-
sines viennent vendre en grande parti.e leurs toiles ù
Landernenu, ' l\f,orlaix ',et autres endroits de la Basse Bretagne, sans · les avoir préalablement fait visHer et
rnarquer a11 bureau ·de Quiràper; Hs allèguent pour
moyen de défense la distance où ils. sont actuellement
(1) 1:e procès-verbal de cette onération a été r, epl'oduit a u
BllJletm, t. XXII, 1895. p. 390-398. .
(2) Arch. d'I.-et-V. C. 1535 .
:t 28 ---
, de (Juimper.L 'étal annuel des toiles yisitées à Loko1'-
nan, mont oit c ;~mlInunémelJt à 7500 pièces et depuis
que le bureau a été transféré à Quimp.er, les étals ,lu
préposé n'Oont plus excèrlé 5000 pièces, ce qui prouve
évidenunent que c.ette fabriqlle fait . annuellement , entrBI'
dans le 'con: nnel'cc t au moins 2500 pièces non mar-
qnées ». (1) . .
Il Y avait cel'tainemcu t là quelqu ' exagération 'de .! Il
rmrt de l'inspecteur qui · chercJwit à j'tlstifter le -challge-
lJlent dü ]jell dv bureau d· e la manJue ~ changement qu'il
avait solli cité et fortement appuyé,car la production
a nnuelle de Locl'onan, pendant les dernières années de
l'ancien régime, n'atteignit j,amais 5.000 pièces.
Cependant ceUe industri e dépérissait toujou· rs. On .
essaya de remédier el d' encollI'ager les tjsseranùs I~n
rétablissant le ht1reau de Locronan, en 1787. Mais c-e
flltcn vain. Les pel. its méti ers nc re'prirent jmnais lenr
acljv: lé :et la. population de . Locrol1i:lll, autrefois si 1a-
hor i ~~ lIse , et si ajsée, tomba dans la mi sè re . Quclqll ~s
lIlIH" es nvu.nt 1.a Pévoluti on, le l'-8Clellf An~lré traçait ;\
l'intenüant {le Bretagne un sombre tahleau .(I.e la sitüa-
i iOil ~k se.~ ê1-l:m ini strés. Nous ne pourrons mieux t· er
miner ' cC'tte étnde cru ' en le r, eprodulsant en forniç dr
eOllcluslon : .
« J'a~[TOr) tardé à mettre sous vos yeux le tablüa11
afO;gennt de 1'excès {le ta misère du peuple de Locro~
tlan. La cause générale des calamités publiques, la
cherté des grajns, le flèau qui désole la Bretagne de-
rmis quelquesa.nnées, n'est pas l'un iqlle source dèS
malheurs (fui font gémir les Hlisérahles que j, e plains .
C'est leur commerce, totalement anéanti depuis 1)1 u-
sienrs années ; ils fournjssoient pour Br0st nü moi os
( t ) Ar h. dT -et-V . C. 1536 .
~ i "i 2. 9: . _. .
. Jante l)ièoos de -toile chaque; .s,.emaine~ S' -t;lVent. J'lJ . '
leJllS. .... .
les lettres; oes malheureux travalllOJent et leurs tOlle~
leur demeuroient. Il~ ont eté ~:lans, la dure. nécessité 1
d'aller les vendre à perte , à Brest, à Landerneau, .~ " .
Morlaix et à Lannion~ '. ". ':
« Ceux qui font de grosses tÇ)iles qu'ils vendoient
quinze sous l'aulne, il y a trois ans, ne les vendent au
jourd'hlli que douze ' sous. Sur. une' plècede toile de
trente aulnes qu'un homme ne fait que dans six jours;
il :(1 à peine quarante sous de bénéfice, et lorsqu'il ne
peut pas vendre .. sa toile, il ·faut qu'il paye pour la rap-
porter chez luy ·et 'toute la sèmaineil est désœuvré par
ce qu'il n'a ,pas' pu acheter dll 'fil. ·· '., ' , "
cc Aussi ai-Je la douleur de voir .chez moi; tous les
jours, . des lnalheureux qui annoncent leUr nijsère par
des sa,nglots · et par des , cris et :qùi me disent,. les lar-
mes al'X yeux, qu'ils n'bnt point niangé depuis vingt- .
quatre . heures. . .
« Mes entrailles s'émeuvent ' à la vue de ' ces miséra - .
hIes et si l'impuissanee . où je suis de ' les, soulag· er,
m'excuse devant Dieu, mon cœur n·'en . est que plus
~ensibl~ment déchiré. '"
cc Je ne sais s'il ne vaudroit pas mietlx éproùver soy~ ."
lîlême les misères de ces pauvres gens qlle. d'BO n être ,té
moin '~ans pouvoir leur nrocurer des secours suffisans.
Mais comment les procurer avec un bénéfice si modi-
que qlÎe le mien? Je suis à la portions congrue' ; i;an-
nee dernière; je n'en per:ç'lis" 'que' trôis":cent-cinquant~ ,
Bull . . de la Soc. Archéo.
- Tome . XLV. (Mém. 9).
, , 130 -,
livres. Cette année, f en auray à peine tro~s cents ,l,
vres, parce que le four banal affecté au payemt8l1L Je
cette portion, a exigé de grandes réparations. Quel , ' ca.
suel puis-je av-oir dans une paroisse de quatre-'cent .
cinquante cominunians dont les deux tiers sont à hl
mendicité? J'ai fàit cette Çtnnée deux noce.3, vingt-hult
baptêm, es et soixante-quiri~e enterrem~ns ; à peine ai,
je été payé ,ppurdix. , Dans" le. nombre il n'y a que ' six
grandes, persOl1Iles, la pe. tite v~.rol~~ a enlevé cinquante,
neuf enfans.. . ' . . ., " ., .' " ".' .,. ' , . ", ,
« Ah !~oulagez mon ' peuple', s'il est possible et . je .
seroy assez riche;' p'Ï'ocü~"ez-lui surtout le bureau p'Our
la marque ·. des toilesq~'une cabale , injuste luy a cn-
levé. Il en résultera pour ües malheur, eux , ce triple
avantage : ils · ,seront quittes des frais du transport · cle
leun tOÜAS ' à Quünpel' et de üeux ' du retour; les ma ) ' chands -des environs d, e 'Morlaix à qui jls vendent, vie ll-
dront en plus grand nombre icy, parce qu'ilsauI'Ollt
t.rois lieues de ' moins à fair,e et les deux marchands que
nous av:: ms icy, a, chèteront les toües un peu plus cher,
parce qu'ils seront qujttes des frais de voyag.e à Quim··
pel' » (1). '
Rennes, 16 janvier .1918.
Daniel B}J~nNAnv.
(1) Arch. d\l.-iÎ.-V. G. Supplément non côté (178 1).
235
DEUXI E PARTIE
Table des Mémoires et Documents publiés en 1918
Élie Fréron, par F. CORNOU ................... .
[Églises et chapelles du Finistère J. Archiprêtré de
Saint~Pol-de-Léon. Doyenné de Saint-Pol (suite).
Doyenné de Landivisiau par le chanoine
Pages
1 P. PEyRON ................ . ....... '. . . . . . . . . . . 33
III Le Recrutement écclésiastique et les écoles sec on-.
daires dans le Léon après la RévO'lution, par
l'abbé G. PONDAVEN . . .... : ...... " ..... , . . . . . . 46
Notes sur les fabriques ' de toiles de Locronan au
xvm
siècle par Daniel BERNARD............ 116
Excursion archéologique dans la commune de
Guimaëc par L. Le GUENNEd (carle). . . . . . . . . . 131
VI Notice sur le fonds Prosper Hémon des archives
du Finistère par H. W AQUET. . . . . . . . . . . . . . . . . . 197
VII Notes ' sur quelques bornes routières du temps
du duc d'Aiguillon par J. SAVINA.. ..... .. ..... 209
VIII Discours de fin d'année prononcé par M.
LE PRÉSIDENT.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215