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Bulletin SAF 1909


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Les Ardoises dans les sépultures néolithiques armoricaines

M.A. Martin

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1909 tome 36 - Pages 278 à 300
278 -
les rdoises les

Néolit iques Armoricaines
Au cours des fouilles exécu tées da ns ' nos mon u men ts
mégalithiques bretons, dolmen s, allées couvertes, chambres à
ciel ouvert, plusieurs arch éolog ues .ont recueilli sur l'aire de

la sépulture, à la surface de ce que nous appelons la co uche

archéologique et mêlés aux objets constituant l e mobilier
funéraire ordinaire, vases, haches et outils en pierre, pende-

loques, grains de co llier, J ames et éclats de silex, un certain
nombre de plaques et morceaux d'ardoise. Plusieurs affectent

des formes régulières. voulues; quelques-unes même portent
sur une de leurs faces unies des traits, signes ou dessins plus
ou moins compliqués; mais souvent ce ne sont que des

fragments informes ne présentant aucune trace d'un travail

d'appropriation quelconque. Dans les deux premiers cas il ne
peut y avoir de doute que ces plaques façonnées ou gravées

ont été mises intentionnellement au même titre que les
autres parties du mobi lier.
On s'explique moins la présence des derni ères qu'on serait
tenté d'attribuer à une cause toute fortuife, par exemple à
l'apport, dans les matériaux ayant servi à l'érection du monu-
. ment, de débris d'ardoise dont quelques-unes aura ient pu
tomber dans la chambre fun éra ire. Le fait sera it possible en
pays ardoisier; mais nous verrons que toutes les trouvailles
de l'espèce faites jusqu'à ce jour l'ont été en région de roches

primitives sur des points souvent très éloigùés de gisements
de schiste ardoisier .

Dans la chambre à coupole du grand tumulus inviolé du
Tosse n-ar-run, en Yvias, canton de Paimpol, Côtes-du· Nord,

279 -
j'ai rencontré, à la surface de l'épaisse couche d'argile damée
qui recouvrait tout le fond de la sépulture, un certain nombre
de fragments d'ardoise, sans formes définies, sans aucun
signe gra-vé, mêlés aux autres objets qui avaient été déposés
autour du corps du jeune mort (1). Ils ne peuvent provenir
de l'enveloppe tumulaire composée de grès armoricain, de

porphyrites et de schistes cristallins dont est formé le sol
environnant la butte, le tout recouvert d'une argile très pure.
La peine prise pour se les procurer (2) et la place très spéciale
qu'on leur a donnée dans la sépulture semblent bien indiquer
qu'ils avaient une destination précise, qu'ils jouaient un rôle
dans la composition du mobilier funéraire. Ces débris
d'ardoise et une partie des autres objets recueillis ont été
malheureusement perdus.
Dans l'allée couverte de la Ville-au-Bourg, en Rouillac,
canton de Broons, Côtes-du-Nord (3) avec sa cbambre dévastée
mais sa longue galerie vierge de tou te profanation, j'ai
recueilli sur la couche archéologique d'argile tassée, alternant
avec des haches en pierre, poignard et lances en silex,

curieuses molettes et très singulier instrument en granit,
bien en place, plusieurs plaquettes d'ardoise dont quelques­
unes tout à fait informes. Ici nous sommes en terrain de grès
dévonien dOllt sont faits les mégalithes du monument. Mais
je dois ajouter qu'à quelques kilomètres seulement dans l'Est
se trouvent les derniers rameaux du filon ardoisier de Guitté .

Il a cependant fallu aller les y chercher. Comme on le verra
plus loin, le même fait, c'est-à-dire la rencontre dans les
sépultures néolithiques, de simples morceaux de schiste bruts,
a été constaté et signalé par des archéologues que leur compé-
. tence, la précision de leur esprit d'observation, le soin méli-
(i) Mémoires de la Société d'Emulation des Côtes-du-Nord, 1901, p. 24.
(2) Les filons de schiste ardoisier les plus voisins sont ceux de Mur à
plus de 60 kilomètres dans le sud du département.
(3) Mémoires de la Société d'Emulation des Côtcs-du-Nord, 1898. p. 19 .

- 280 .... '.
culeux apporté dans leurs recherches, placent au premier
rang des fouilleurs bretons et marquent leurs trouvailles du
sceau de l'authenticité la plus indiscutable.

En dehors des ardoises ayant subi une opération préalable

de taille ou de gravure avant d'être déposées auprès des morts,
il est donc établi que, dans certains cas, les néolithiques pla­
çaient aussi des échantillons de cette pierre n'ayant aucun
caractère d'appropriation, mais c'était de l'ardoise et l'on peut
se demander si sa présence dans les tombeaux n'était pas
commandée par un rite religieux. Elle paraît tout au moins
êt re devenue une coutume très répandue .

Dans quel but les ardoises figurent-elles dans la compo-
sition des mobiliers funéraires des sépultures néolithiques?
Quelle pouvait être leur destination? Quelques-unes semblent
vouloir répondre d'elles-mêmes à la question. Elles affectent
la forme d'armes, d'ou tils, d'ornements, d'amulettes avec
dessins variés grossièrement ou naïvement exécutés dans
une pierre tendre, présentant des surfaces unies poui' la
gravure à la pointe sèche, et qui ne seraient que des simu­
lacres destinés à remplacer, près du mort, des objets sem~
blables trop précieux pour être enfouis et perdus.
L'ardoise est la seule pierre qui offre, à la fois, les avan­
tages de débiféh minces feuillets, de poli naturel et d'extrême
facilité à se laisser tailler, couper, inciser, toutes qualités
éminemment favorable~ à la confection de fac-similés de
petits objets, à la reproduction, en copies réduites, de gra­
vures rupestres, de figurations symboliques, emblématiques
ou totémiques de grande dimension, enfin de tout ce qui
pouvait rappeler au mort le souvenir d'une chose qui lui
avait été chère, à laquelle il avait attaché du prix durant sa
vie. Par contre sa fissilité, sa fragilité la rendaient impropre

à l'exécution d'objets d'usage courant, d'un travail fini exigeant
un polissage, pierres à aiguiser ou brassards, bracelets, per.­
deloques, perles

etc., et ceux de l'espèce trouvés dans les

281 -
dolmens sont en schiste compact à défaut de roches plus dures.
Pour toutes ces raisons l'ardoise aurait été réservée exclusive­
men t à l'emploi très spécial que l'étude des trop rares exem­
plaires que nous possédons peut aider cependant à faire entre­
voir, c'est-à-dire à prendre la place, dans les dépôts funéraires,
de pièces d'une autre matière dont on ne voulait ou ne pouvait
faire le sacrifice. Et son usage, à l'origine, de simple et utile
auxiliaire dans les cérémonies funèbres aurait pris, par la
consécration de l'habitude, le caractère rituel qui expliquerait
sa présence, même à l'état brut, dans les sépultures. Les filons
d'ardoise, sont nombreux en Bretagne. Ils se présentent d'ordi­
naire sous la forme de longues bandes, plus au moins étroites,
quelquefois coupées de failles, d'une direction générale se
rapprochant de l'E.-S.-E., O.-N .-0., émergeant, çà et là,
depuis Vitré jusqu'à l'extrême pointe de la presqu'île, au
milieu de roches éruptives ou cristallines au contact desquelles
ils se sont parfois métamorphisés. Très développés dans l'Ille­
et-Vilaine, à Vitré, Guichen, Pléchatel, Langon, on les
retrouve à Nozay, dans la Loire-Inférieure; à Rochefort-eri­
terre, Malestroit, dans le Morbihan ; à Guitté, près de
Caulnes, puis à Mur, Caurel, dans les Côtes-du-Nord ; enfin,
dans le Finistère, à Gourin et Châteaulin où ils sont très
. importants, puis à la pointe de Crozon. On remarquera qu'ils
occupent le milieu de la presqu'île et que les régions côtières
du Nord et du Sud, sur un large espace, sont complètement
dépourvues de filons ardoisiers alors que c'est sur ces terrains,
p~esqu'en entier granitiques, que se dressent les monuments
mégalithiques qui on t fourni les ardoises faisant l'objet de

celte étude. Même en ne tenant pas compte de nombreuses
couches ou poches schisteuses profondes exploitées de nos
jours, le sol breton renfermait assez de gisements ardoisiers
à ciel ouvert pour que les populations néolithiques aient pu

. connaître de bonne heure l'ardoise, et, avec leur sens pratique .

- 282-
dans le choix des roches erriployées,à la fabrication de leurs
armes, outils et objets de parure; des terres et argiles destinées

à protéger des intempéries la demeure des morts, ils ont dû
apprécier toute la valeur d'une pierre, unique en son genre,
d'aspect sI original, si séduisant, se prêtant si merveilleuse­
ment à un tni.vail de taille et de gravure prompt et facile,
qu'elle serait devenue bientôt un produit rtlcherché et aurait
donné lieu à un commerce d'échànge de tribu à tribu, '

Les ardoises ouvrées ont bien été recueillies par' quelques
archéologues; mais combien d'exemplaires ont dû échapper

aux regards de la majorité des fouilleurs ' préoccupés de plus
riches découvertes, de bibelots de collection plus précieux,
alors surtout que leur attention n'avaIt pas été appelée 'sur
ce genre de trouvailles. Quant aux fragments d'ardoise bruts,
non façonnés, ils ont été pris le plus souvent pour de vul­
gaires cailloux sans importance et laissés sur place. J'estime
que le nombre en serait grand si on 'les avait tous ramassés.
Les faits suivants qui m'ont été rapportés par un témoin ocu-

laire et auriculaire montrent le peu de cas que l'on faisait
alors des ardoises trouvées dans les sépultures néolithiques
et peuvent servir à expliquer leur rareté dans les musées et
dans les collections privées.

Il Y a près de 30 ans un archéologue faisait opérer de

nombreuses fouilles dans la région de Carnac. Ses ouvriers

avaient reçu l'ordre de mettre de côté, dans un èndroit bien

dégagé, près du chantier, généralement une table de granit,
tous les objets rencontrés au cours de leurs recherches. Quand
lui-même arrivait sur les lieux, son premier soin était de les
examiner et d'en faire le triage. Le témoin dont je parle, qui

l'accompagnait presque toujours, a gardé le souvenir très '

précis de ce qui s'est passé pour au moins deux de ces
fouilles , celles des dolmens du Mané-er-Gragneux, eh Carnac,
et du Mané-er-Gongre, en Locmariaquer, où des fragments

. .. . 283 -
rejetés par lui dans les déblais avec ces mots: (c mais ce sont
de simples ardoises n. "-
Que de documents perdus! et les monuments mégalithiques
encore intacts en tout ou en partie, deviennent trop rares
pour qu'on puisse espérer que de nouvelles découvertes vien­
dront apporter un peu plus de lumière sur le point d'archéolo­ gie armoricaine qui sert de titre à la présente note.
Voici la li ste des sépultures néolithiques bretonnes dans
lesquelles des ardoises ont été trouvées au milieu des mobiliers
fu néraires, avec la description de chacune d'elles. Les musées
départementaux ou dfJS sociétés d'archéologie ne m'ont fourni
aucun objet de l'espèce, à l'exception de celui de Vannes, et
c'est aux collections particulières et tout spécialement au
riche musée de Kernuz que je suis redevable des documents
qui vont servi- r de base à l'essai que je tente d'une monogra­
phie de ces sin gu liers petits monuments .
Parmi ces sépu ltures quelques-unes étaient bouleversées au
moment où se firent les explorations dont nous avons à faire
connaître les résliltats ; mais il a suffi que les plaques d'ar­
doise aient été rencontrées sur un point non remanié de la
co uche dite archéologique de l'aire sépu lcra le, mêlées aux
autres objets du mobilier funéraire, pour qu'on puisse les
considérer comme en faisant partie au même titre que ces
derniers. Toutes ont éte trouvées dans ces conditions, deux
seu les exceptées, celle du Mané-Kerioned, recueillie en dehors
de la sépu lture et celle de Th ourie dont on ignore le lieu précis
où elle a été ramassée .

DEPARTEMENT DU FINISTERE
Dolmen et chambres de Ar-Voguer-men, en Plogoff,
canton de Pont-Groix:
Un long objet en ardoise épaisse de plus de OmOI, grossière­
ment taillé en pointe, avec large encoche sur un des côtés,

PLANCHE 1

FIG . ~ .

FIG .- 3 .

285
près de la base. Longueur Omi3, largeur en bas Om045. (Pl. l,
fig. 1). Représentation non douteuse d'une pointe de lance ou
d'un poignard.
Le monument se dresse en terrain granulitique.
Fouilles de M. P. du . Chatellier . MUSÉE DE KERNUZ.
Allée couverte de Kerbanalec, en Beuzec-Cap-Sizun,
canton de Pont-Croix:
Deux morceaux d'ardoise épaisse taillées à éclats sur toutes
les faces, le premier de forme ovalaire, OmiO sur Om07, le
second triangulaire Om055 sur Om045. où l'on peu t reconnaître
des copies d'une hache et d'une pointe de javelot en silex
(Pl. II, fig. 1 et 2). Un troisième morceau aHecte une forme
plus régulièrement géométrique; c'est un bloc de schiste
ardoisier parallépipédique, les deux grandes faces bien unies,

celles des deux grands côtés, aux arêtes internes encore
vives et rectilignes, coupées en biseaux doritles tranchants
sont aujourd'hui très ébréchés, enfin les deux autres petites .
faces d'épaisseur assez irrégulières et déformées (Pl. II, fig. 3).
Est·ce un outil ou son simulacre? Je ne çonnais rien d'appro­
chant en pierre dure. J'y verrais plulôtle produit d'une for­
mation naturelle due à des plans de clivage de strati­
fication venant couper sous un certain angle ceux de clivage
schisteux. Ce curieux échantillon, à cause de sa singularité
aurait été mis intact dans la sépulture .

Le sol est encore de la granulite.
Fouilles d.e M. P. du ChateLlieT. MUSÉE DE KERNUZ.
Allée couverte de Lesconil, en, Poullan, canton de
Douarnenez:
Une grossière pointe de flèche en schiste ardoisier. Un
petit fragment d'ardoise très mince, OmOO'! à Om0015, portant
deux traits rectilignes et quelques signes gravés d'une main
très sûre qui donnent J'illusion q'une écriture. La plaquette

. 287

n'est pas entière (PI. III, fig. 1). A remarquer sa forme en

trapèze.
Nous sommes encore en terrain granulilique.
Fouilles de M. P. du Chatellier. M USÉE DE KERN tJ Z .

Chambre et galerie sous tumulus du Rosmeur, en
Penmarc'h, canton de Pont-l'Abbé:
Une plaque d'ardoise de Orn OO:J à OmOO? d'épaisseur, bien
unie sur les deux faces, assez rég ulièrement déco upée en

forme de trapèze, hauteur Om08, largeur Om05:J et Om04:J. Elle
fait songer aux plaquettes d'ardoise du Portugal, de la Casa
da Moura, mais sans trou de suspension et sans ornementa­
tion, et mieux encore à celle trouvées par M. E. Cartailbac,

sous les Pierres-Levées des Cévennes. Un angle de la base est
cassé (Pl. III, fig. 2).
Sur un sol toujours granulitique.
Fouilles de M. P. du Chatellier. M USÉE DE KERN UZ .

Allée couverte sous tumulus de Goarem-Goulelès,
en Tréguennec, canton de Pont-l'Abbé: .
Une plaque d'ardoise de OmOQi d'épaisseur, de forme à peu

près carrée, les angles arrondis, ne portant aucun signe sur

les faces planes dont l'une semble avoir été polie par frotte-
ment (Pl. V, fig. 4).
Terrain de micascbiste.
Fouilles de JI. P. du Chatellier. . M USÉE DE KER NVZ .
Dolmen et chambres de Tronwel, en Plobannalec,

canton de Pont-l'Abbé :

Disque en ardoise à peu . près rond malgré ses cassures,
ayant de Om007 à Om008 d'épaisseur etOmO:J de diamètre. Sur
une des faces se voit le dessin fait à trait larges, avec une
pointe mousse,. d'un carré et de ses deux diagonales,â'une
marelle dont. un des angles a disparu par éclatement de lames

schisteuses en cet endroit (PI. IV, fig. 1). Sur la face opposée

.r IG. .... .

FIG. 5.

FIG. j.

FIG. 3.

FIG. 4.

- 289 -

existent aussi des traits de même largeur, mais moins nets,
dont deux réunis à angle droit ont dû être le commencement
du tracé d'un carré. Ils sont coupés de nombreuses lignes en
désurdre. On dirait un dessin manqué qu'on a voulu effacer
par des rayures en tout sens. Les enfants des néolithiques
jouaient-ils à la marelle comme ceux de nos jours? Dans la
sépulture de l'un d'eux, ses parents auraient placé, comme
Dieux souvenir, la copie sur ardoise de son jeu préféré.
Le. sol est ici de la granulite.
Fouilles de JI. P. du Chatellier. MUSÉE DE KERNUZ .

Dolmen de Kervadel, en Plobannalec, canton de
Pont-l'Abbé:
Dans un vase, plusieurs petits disques' ronds en ardoise .
percés d'un trou centra l. Ils n'ont que Om006 de diamètre sur
OroOOt d'épaisseur, et se 80 nt désagrégés en les touchant.
Près de ce même vase, plusieurs fragments de plaques d'ar-

. doise au pourtour plus ou moins arrondi et montrant les
restes d'un large trou central. L'un d'eux montre des signes
bien 'nets, ' tracés à la pointe sèche, un arc de cercle que des
traits rectilignes et des chevrons viennent couper à peu près

normalement (PI . IV, fig. 2) .
Un morceau informe couvert, sur une des faces, de traits
in cohérents .
. Enfin une très cu ri euse plaquette, en forme de long trapèze,
hauteur Om07, largeur OrnOn et OmOi5, le sommet un peu
détérioré, mais sur une partie seulement de son épaisseur, ce
qui permet de constater qu'i l n'a pas existé de troll de sus­
pension . U.ne des faces, très plate et unie, est richement
décorée de dessins aux traits bien accusés où l'on croit
reconnaître: au milieu, la représentation du soleil irradié; en
bas, une ornementation végétale à laquelle on a donné le nom
de feuilles de fougère; en haut, des groupes indéterminables
BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉO. - TOME XXXVI (Mémoires 19)

291
de traits assemblés cependant avec un certain ordre et qu i
pourraient bien avoir la même sign ification (PI. IV, fig. 3\, le
tout rappelant certains dessins des gravures rupestres et des
poteries néolithiques. Le vase d'un dolmen ruiné de Baden,

Morbihan, porte en haut de la panse, des cercles ornés de
points internes d'où partent des rayons divergents, comme
celui de notre plaquette (i l. Doit-on voir dans ce très primitif
dessin le symbole de l'action fécondante du soleil sur les
plante:;; ; c'est-à·dire une manifestation écrite d'un culte

solaire? Le soin particulier apporté à l'exécution de cette
figure plus compliquée et cependant plus compréhensible. que
toutes les autres gravures sur ardoise que nous possédons,
dont l'incohérence des lignes déjoue, le plus souvent, toute
tentative d'interprétation, le sentiment d'art bien rudimen­
taire et grossier, mais réel cependant qu'elle décèle, en font,

dans tous les cas, une page à part dans la glyptique néolIthi-
que. Les autres ardoises de la sépulture de Kervadel rentrent
dans la catégorie ordinaire des simulacres, perles de col li er
et objets d'usage indéterm in é, ou de simple fragment à carac-

tère rituel et votif.

Nous sommes ici en région granitique.
Fouilles de M. P. du Chatellier. MUSÉE DE KERNUZ.
Nécropole néolithique de Lesconil, en Plobanna-
lec, canton de Pont-l'Abbé: .
Deux petits fragments informes d'ardoise ' assez mince dont
les fac es planes ne portent aucune trace de gravure (PI. l,
fig. 2 et 3).
Le sol est de granu lite. .
Fouilles de .11. P. ' du ChatelLiel·. MU~ÉE DE KERNUZ.
Allée couverte de .Kerandréze, en Moëlan, canton
de Pont-Aven:

Trois morceaux d'ardoise, sans forme bien définie, deux à
(1) La poterie aux époques préhistoriques et gauloise e11 Arl1loriq'ue, par
P. DU CHATELLIER. PI. V. fig. 6 ct 7 .

PLANCHE V.

FIG. 2 .

FIG. L

FIG. 3.
FIG. 4

- 293-

peu près triangulaires, la troisième presque carrée, ayant
chacune de om004 à om005 d'épaisseur. Leurs dimensions
varient de Om06 à Om04 de plus grande longueur. Ils sont

couverts, sur une de leurs fa(~es, - de stries absolument inco-

hérentes, les unes assez profondément gravées, les autres plus
'légèrement. Pas un trait droit; un vrai gribou illage de petit
enfant, car on ne peut nier qu'ils sont l'œuvre d'une main
humaine (PI. V"fig. 1, 2 et 3).
Sol granitique.
Fouilles de M. P. du Chatellier. MUSÉE DE KERNUZ.
DÉPARTEMENT DES COTES-OU-NORD
Allée couverte de la Ville-au-Bourg, en Rouillac,

canton de Broons:

Deux morceaux d'ardoise inform es.
Un pelit fragment taillé en pointe, long de Om03 et qui

pourrait représenter une pointe de flèche ( Pl. III, fig. 3).

Un autre fragment triangulaire de même longueur, mais plus
largE\ qui serait une pointe de javelot ( PI. III, fig 4).
Un objet en ardoise qui avec son manche ou soie solide, sa
lame à dos épais et .à tranchant bien marqué semble la copie
d'un genre spécial de couteaux en silex qui a servi plus lard
de modèle pour les couteaux, tranchets et rasoirs en bronze de
même forme (PI. m, fig. 5).
Terrain de grès quartzeux.
Fouilles du Commandant A . . HaTlin. MUSÉE DE KERNUZ.

Chambre à coupole sous tumulus de Tossen-ar-run,
en Yvias, canton de Paimpol.
Un grand nombre de morceaux d'ardoise, mis avec soin de

PLANCHE VI.

FIG. 4.

FIG. 3 .

FIG. l.

- 295-

côté, mais qui ont été perdus avant d'avoir pu être examinés

et étudiés en détail chez moi.
Terrain de porphyrite.
Fouilles du Commandant A. Martin.
DÉPARTEM~NT DU MOR IHAN
Dolmens accouplés sous tumulus de Kerroc'h, en
Quéven, canton de Pont-Scorff :
Une plaque d'ardoise incomplète, longueur OmO?, plus grande

largeur OmOti, portant sur une face 19 traits gravés à peu près
rectilignes et 11 cupules ou restes de cupules. Elle donne
l'impression d'une de ces grandes pages rupestres ornées des
cupules si chères aux néolithiques dont on aurait voulu
mettre, près du mort, à défaut de J'original, une copie fidèle
gravée sur la pierre consacrée à ces hommages de pieux
souvenir (Pl. VI, fig. 1) .
Fragment d'un objet en ardoise mince de forme ronde, Om05
à Om06 de diamètre, d 'ont les bords étaient taillés en biseau, à

. arête assez vive (Pl. VI, fig. 2).
Sur un sol granitique.
Fouilles de MM. Le Pontois
et R. K eTviler. COLLECTION R. KERVILER .

. Monument mégalithique de Tinikeii, en Plœmeur,
arrondissement de Lorient:
Une 'plaque d'ardoise de OmOi d'épaisseur, de forme à peu
près ronde, 0

07 à Om08 de diamètre. Ne porte aucun signe sur
ses 2 faces planes (pl. VII, fig.i).
Terrain de granulite .

Fouilles du Commandant J:e Pontois. MUSÉE DE KERNUZ

PL.ANCHE VII.

FIG. 2 .

297
Monument mègalithique du Tuchen-Pol, en Plœ­
meur:
Un fragment d'ardoise portant quelques traits rectilignes
in cohérents .

Une autre plaque, longueur 0'"085, largeur Om06 , épa isseur
Om006 à omOOï, grossièl'ement rectangulaire, montre sur une
de ses fa ces bien polie une longue rayure très nette, large de
plus de OmOOt obtenue avec une pointe mousse qui a certaine­ ment été guidée par une règle (Pl. VII, fig. 2).
Même sol granul itique.
Fouilles du Commandant Le Pontais. MUSËE DE KERNUZ.
Monument mègalithique sous tumulus du Butten-er-
harh, Ile-de-Groix. .

Un grand fragment d'ardoise, long de Om105, large de Om055

à 0"'045, épais de plus de OmO l à l'un des bouts, avec un e
face plçlt1e sur laquell e sont tracés quatre traits parallèles, en
deux gro upes, l'un plus profondément gravé que l'autre. Ici
encore ila été fait usage d'un'e règle directrice. Quelques

autres rayures incertaines, en sens variés, SUl' la même face.
La seconde face est irrégu lière (P l. VI, fig. 3 ).
Un petit fragment d'ardoise avec les restes de deux trous
(Pl. VI, fig . 4).
Deux petits disques en ardoise de ù

02 de diamètre.
Tout le sol de l'ile est en schiste chloriteux.
FouilLes du Commandunt I.e Pantois. MUSÉE DE KEI1NlIZ.
Dolmen d'Er-vil, en Locmariaquer, canton d'Auray:
Une plaque d'ardoise, de Om006 d'épaisseur, qui a pu être

un trapèze, des cassures l'ayant grandement déformée.
Elle es t percée d'un trou central. Une des faces, bien
plane, porte quelques traits gravés, l'un rectiligne, les
autres groupés en faisceau divergent. La face du revers est
en ti èrement co uverte d'empreintes fossiles en relief présen­
tant une certaine ressemblance avec cell es laissées sur les

PLANCHE VIII.

FIG. 2.

FIG. 3.

FIG. L

1 !II '( ". /11/1'
J { r r

299 -
schistes houilliers par des éca illes de poisson
végétal, le Lepidodrendron (Pl. VIII, fig. 1).
Sol de granulite.

ou par un
Fouilles de M. M aM MUSÉE DE VANNES.
Les dolmens de la Trinité-sur-Mer, canton de .
Quiberon. Dolmens accouplés no s 8.
Une plaquette en ardoise, régulièrement trapézoïdale, avec
un trou au milieu. Beaucoup plus petite que la précédente,
elle rappellerait celles des dolmens des Cévennes (Pl. VIII,

fig. 2) (1). .

Même sol granulitique.
Fouilles de MM. David de Cussé et 1. Galles. MUSÉE DE VANNES
Ces deux dernières ardoises doivent certainement aux

trous qu'elles portent d'avoir été sauvées. Prises pour des
pendeloques elles ont été recueillies à ce titre.
Les dolmens du Mané-Kerioned, en Carnac.
La plaque d'ardoise dont il va être question n'a pas été
recueillie à l'intérieur d'une sépulture; on l'a trouvée isolé­
ment, par hasard, il y a quelques années, dans des déblais
au Sud et en contre-bas d'un des dolmens sus-nommés Sa
forme est rectangulaire ou mieux légèrement trapézoïdale;
longueur Om09, largeur Om043 à om045, en haut où existe un
-trou médian à O

Oi du bord, de Om048 à OrnOti en bas où la
pierre est très grossièrement taillée en biseau par frottement
comme si on avait voulu simuler le tranchant d'une hache.
Epaisseur OrnOOï. Pourtour détérioré par ébrèchemen t et
cassures en lamelles. Les deux faces planes sont couvertes
de nombreux signes gravés; sur l'une, trois cupules et des
traits à la pointe sèche. plus ou moins accentués, formant
des lignes droites, courbes, brisées, dirigées en tous sens,

(I)E. CARTAILRA C- Ages préhistoriques de l'Espagne et du Portugal, p. iOO .

300 -
défiant toute conjecture; s)lr l'autre, un dessin ferm é, diffici­
lemen t assimilable, flanqu é de petits traits rectilignes très
nets (P l. VIII, fig. 3). Le fa cies général de la plaquette, le

mode de perforation du trou, la technique des gravures et
l'a nalogie de quelques-unes avec celles d'a utres plaques de
provenance certaine donn ent bi en l'impression qu'on est en
présence d'une ardoise de nos dolmens, et je n'ai pas hésité à
la joindre aux exemplaires trouvés en place dans l'itltérieur
des sépultures. Amulette ou copie d'une grande page lapi­
daire, elle offre de l'intérêt.
M USÉE MILN .

DEPARTEMENT DE L'ILLE-ET-VILAINE

Je ferai la même observation , avec plus de réserves cepen­
dan t. au sujet d'un disque en schiste ardoisier, épais de Om009,
d' un diamètre moyen de om055, un véritable palet, avec un
trou cen tral très évasé du cô tè de la face ornée. Celle-ci est

irrégulière, comme d'ailleurs la face du revers, des lamell es
schisteuse s'en étant déta chées. On y distingue pourtant quatre
cupul es bien nettes, puis deux larges traits légèrement curvi­
lignes se co upant et deux petits traits rectilignes en chevron,

un peu effacés par l'u sage de la pierrB longtemps exposée à
l'air. Il a été trouvé dans la com mune de Thourie où les

vestiges de monum en ts mégalithiques so nt assez nombreux.
Il fai sa it pa rtie de la co ll ection de M. Deco mbes, ancien
conserva teu r du Musée archéologique de Renn es . La nature
de la pierre, la facture du trou, la présence de traits gravés

et tout particulièrement des cupul es, autorisent à penser que
cet objet provient aussi d'une sépulture et peut figurer au
nombre de nos ardoises néolithiques (Pl. V, fi g. 5) .
Renr,tes, le 1/5lVovembTe 1909 .

A. MARTIN .

VII.
VIII .

369

DEUXIEME PA RT IE

Table des MémoiTes et Documenls publiés en 1YO!J
l'ages
Épisodes et Anecdotes, par M. l'abbé ANTOINE
FAVÉ .. . ... , ... . ... ' .. . . . . , ... , ' , ' . . " 1, 79, t 97
Églises et Chapelles du Finistèr e (suite, voir
tomes XXX, XXXI, XXXII, XXXrV) . Doyen nés
de Ploudalmézeau (fin), Ploudiry, Saint-Renan, .
Châteaulin, Châleaun euf et Carhaix, par M. le
chanoine P. PEYRON ...... . . , . . . ' . , . . . , . . .. '33, 30t
Les Hameçons préhistoriques, par M. A. MARTIN
(planche) ............... , .. . , , . . .......... ' . , .
Étude sur l'Architecture romane du Finistère.­
École régionale de Pont-Croix, pal' M. CH.
CHA USSEPIED. . .. . .. ' .. . .... . .. '. , .. . . . . . .
Outil préhistorique en pierre : le Ra bo t- Râpe,
par M. A. MARTIN (planche) .. , ...... . .. . . ' ... .
Rapport sur la Chapelle de Saint-Tugen, en Pri­ melin, par M. CH. CHAUSSEPIED (planche ) ..... '
Excursion A rchéologique dans la comm une de
Garlan, par , M. L. LE GUENNEC (3 planches) . ..
Chapelle de Notre-Dame du Crann, en Spézet,
par M. le chanoIne J.-M. ABGRALL ...... . .. . . ,
Fouille d'un tumulus au Ménez-Glujeau, en Lo­ érec, le 30 juin 1909, par' M. L. LE GUENNEC
lane/le) . .. .. ~ . ..... .. . . ......... . ....... . .. .

109
113
244

255
X. Études sur le Cap-Sizun:
II. La chapelle de Langroaz et la seigneu­
rie de Keridiern, en Cléden-Cap-Sizun, par M.
DANIEL BERNARD .... .. ... . .... .. , . . .... . . , . .. , 262
XI. Les Ardoises dans les sépultures néolithiques
ar.moricaines, par M. A. MAR:I'lN (8 planches l.. 278
, XII. L'Église de Saint-Jean-du-Doigt (Notes poUt' ser-
vir à son histoire), par M. H. BOURDE DE LA
ROGERIE. . . . . . . .. . .... , .... , . .. ' . ' . , . , .. . . . . 324

- FIN -

vnprlmérie CO TONNEC, LEPRINCE Suce - QUimper