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Bulletin SAF 1908


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La Tour d’Auvergne-Corret fut-il pauvre

M.J. Trévédy

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La situation de fortune de La Tottr d'Auvergne Corret,

• voilà l'unique objet de cette étude.
Le premier biographe. de La Tour d'Auvergne, Buhot de
Kersers, était le petit- fils d'une sœur · de Limon, beau-frère
de La Tour (i' ~uvergne: par conséquent il était neveu de .
Mme Guillard de Kersauzic, fille de Limon, et cousin de Mme
du Pontavice née de Kersauzic. Il a eu .entre les mains « la
correspond,ance n, et, comme il dit, les « documents les plus
authentiques ». Il aurait. pu, semble-t-il, ' nous renseigner
mieux q~e personne sur le point qui-nous occupe.

Buhot .rep.~ésente Correl comme n'étant pas « absolument

sans fortune», en 1778 (p. 60) ; et arrivé à l'année 1782,
• après la mort de Mme Corret" qu'il ne mentionne pas, ' ni son
héritage non plus, il écrit cette phrase singuliè~e, (p. 127) :
c( Sans avoir d'indications précises . sur. ses revenus, il
paraît, d ~après son · témgignage même, qu'ils dépassaient
ses appointements. J)

A ce moment les appointements du lieutenant étaient dé
900 francs. L'expression « Il paraît» et la suite de la phrase

montrent, et nous' allons 'avoir la preuve, combien Buhot était
peu ou mal ·informé des affaires de Corret. .
Plus loin, il écrira cette phrase : « Il paraît que son défaut

de fortune fut une des ' principales causes qui l'éloignèrent
du mariage (p. 286) ». Cet cc il parait » est inexact.
En faisant appel aux souvenirs de sa famille, j'ai presque
dit, aux souvenirs de Guingamp, Buhot aurait appris que
une sœur de sa grand'mère, sa grande-tante Pauline Limon,

UU FINISTERE
Hôte' de

Armes en broll:.r.e draguées à Hennes, dans la Yilaine,
lors de la rél'eclion des quais

dites dont personne ne paraît s'être préoccupé. Quelques
pièces m'ont été obligeamment fournies; mais mon dossier
est loin d'être complet.
Je dois prévenir que cette liquidation, qui demeurera fata-
lement incomplète, est loin d'être amusante: j'espère qu'elle
aura simplement quelque utilité. .
Une observation préliminaire
Au cours de cette étude, nous mentionnerons une somme
d'argent du XVIIe siècle et nombre de sommes de la seconde
moitié du XVIIIe. Il importe de ramener chacune de ces
sommes à sa valeur actuelle, au moins approximative. Or, si
l'on trouve de nombreux travaux sur l'évaluation actuellé des
monnaies des siècles antérieurs au XVIIe,il n'y a pas d'éludes
analogues pour les siècles postérieurs. Un érudit qui fait au-

lorité m'avait donné les indications qui suivent;
La livre de '16DO et années suivantes vaut 3 fr. 333. La
livre à partir de '1720 (Système de Law) 2 fr. '18.
La seconde évaluation semble à un autre érudit un peu
trop élevée surtout en approchant de '1789.J'emploierai donc,
comme multiplicatcur au lieu du chiffre 2. '18, le chiUre 2.00,
qui simplifiera le calcul et me permettra de ne pas le fa.ire
pour les petites sommes.
Du reste, je ferai observer que je mettrai toujours le chi/Tte
Faiblc, et négligerai les sous fractions de livre et les centimes
fractions de franc. Je veux prévenir tout soupçon d'exagé­
ration.
les pièces ou bribes de pièces dont j'ai 0
Maintenant,étuditms
eu communication.

1 Succession de Mathurin Corret, aïeul de Corret
A sa mort, le 2 mai nOD, Mathurin Corret laissait sous la
tutelle de leur mère, Barbe Le Scaffunec, cinq enfants:
BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉO . . u TOME XXXV (Mémoires i5).

troIS filles : Marie-Françoise, Marie-Claude, Marie-Anne,
et deux fUs : Olivier et Thomas. (1).
Le partage de la succession ne se fit qu'après la majorité
de Thomas, le 2Q février 1730. Nous n'avons pu retrouver cet
acte; mais nous savons, par ailleurs, qu'à cette date Marie:"
Claude entrée aux Ursulines de Carhaix (avant 1723), y était
professe; et que Thomas était entré aux 'Jésuites de Quimper

avec la résolution bien arrêtée de rester dans la compagnie.

Marie·Claude ne pouvait hériter, Thomas renonçait à ses

droits; la succession était à partager entre Marie-Françoise,

mariée (9 octobre 1714), à Malo Le Roux, sr de Kervasdoué,

Marie-Anne et Olivier. '

Nul doute que le partage n'ait été fait en trois lots égaux,
c'est-à-dire ToturièTement. '

Il ne serait venu ni à la mère, ni à son fils Olivier, l'idée de

faire ' un partage noble. On peut croire que Marie-Françoise

et son mari, M. Le Roux,qui l'assiste,n'auraient pas manqué

de s'opposer à cette fantaisie, si préjudiciable à leurs intérêts.

On sait en 'effet quels avantages le partage noble confère à
l'aîné: il lui attribue par préciput le p1'incipaL manoir avec
quelques entours (pourpris, jardin,etc.), l'espace que certaines

Coutumes appellent le Dol du chapon. De plus, l'aîné prend
« les deux tiers des terres nobles. Le tiers restant est partagé
par lots égal,lx avec les terres roturières. » (Art. Q41 de la

Coutume).
Dans le partage de cette succession, l'article de la Coutume
• n'aurait pas reçu une application' si étend'l1e, car, selon toute
apparence, il ne s'y ' trouvait que deux terres nobles.

En l'absence de l'acte nous connaissons du moins trois im-

(i) Né le 20 aVl'il l703, Thomas allait être Ol'donné prêtre en 1733, et
faire profession à Quimper, le 2 février 1739 . Vol. Deux Jésuites oncles

de La Tour d'AuveJ'gne.

meubles acquis par Corret en '1670, 1680 et 1699, et qui ont
dû figurer au partage (1). '
Les voici: 1 Une p'auvre tene roturière dans la paroisse
de Lanrivain (2), n'ayant d'autre nom que celui de ses humbles
vendeurs : une masure avec quelques arpents de terre.
Corret l'arrondit quelque peu. Après ces augmentations et des
réparations, cette tenue était affermée (en 174~) 300 livres
(environ 600 francs de nos jours).
C'est ce bien modeste, sa première acquisition, que Mathu­
rin nomma [(erbauffret. du nom du vil13ge où il était situé;
et il ajouta ce nom il son nom patronymique (3). .
2° Lampoul, en Trémargat (4), terre noble avec manoir,

bois. '
J'ai . sous les yeux le résumé d'une expertise de Lampoul, '
faite en '16~9,pour parvenir à un partage. L'expertise élève le
revenu' total (terre et bois) ,à 1829 li vres (environ 6000 fr). (t» . .

Il est clair qu'il s'agit du domaine tout entier. Depuis, Lam-
poul a été partagé en deux. Lampoul HueLLa et Lampoul .

Izella. Lampo'ullùwt et bas.
En ce moment, le manoir compris au bas Lampoul était
(( en ruines ». Il fut reconstruit, et Mathurin Corret l'acquérait

neuf, moins d'un demi-siècle après (vers 1680), quand il
acheta le Bas- Lampoul.

Vers '1750, le Bas-Lampoul était affermé avec quelques
(i) Barbe Le Scaffunec dut comparaitre à l'acte de partage. Je lis
dans une note que le partage est fait « du consentement de la mère. »
De cette expression, on peut, ce semble, induire qu'elle renonçait à son
dOHaire en faveur de ses enfants. Le douaire cOlltumier était de l'usufruit
du tiel'S des immeubles propres du m< ri décédé , Art. 1~55. '
(2) Lallriyain, CO" de E1t-Nicolas-du-Pelem, arr. de Guingamp, sur la rive
gauche du BJayet.
(3, Aujourd'hui la fantaisie transforme Kel'baufl'ret en château qu'il faut
chercher aux environs de Châteaulin, mais sous un autre nom (!)(Dépêclze
de Brest, 21 juin 1.900) ,
(4.) Lampoul, en Trémarg'at, canton de Hostrenen, arrondissement de
Guingamp. Trémarg'ut (l'ive droite) est séparé de Lanrivain (rive g'auche)
pal' le Blavet. ' 1
(5) Je multiplie ici par 3,333.

servitudes ~20 livres (environ '1040 francs de nos jours);
el il comprenait deux bois dont un grand de 76 arpents.

3 Un pré faisant partie d'un convenant noble, au lieu de
Sculliadec, paroisse de , Tl'émargat (acquêt du '18 mai '1699),
évalué 2'19 livres de revenu (438 francs) .
Kerbaufiret passa en indivis par moitié à Mme Le Roux' et
àsa sœur Marie-Anne.
Quatre ans après le partage, Marie-Ann~ allait rejoindre sa
sœur Marie-qaude au couvent des Ursulines; et, comptant

bien y rester, elle cédait ses droits indivis sur Kerbaufiret.à

sa ' sœur et à son frère, pour urie une rente de HW livres
(environ 300 francs). (Contrat du 3 octobre '1734). De ce jour.
Mme Le Roux fut fondée dans Kerbaufiret pour tro'is quarts,
et Olivier pour un quart. Il s'empressa de se défaire de ces
droits; et de Kerbauffret, il ne lui resta que le nom.
Lampoul passa dàns le lot d'Olivier, hien que dans quel­

ques actes antérieurs au partage, Mme Le Roux soit qualifiée

dame de Lampoul ('1). .

SculliÇldec semble aussi avoir été attribué à Olivier. Nous
v'oyons celui-ci faire deux acquisitions en augmentation de

Sculliadec (20 octobre '1726'et 20 décembre '1729). Le 29 ,avril
'1734, il passe une déclaratiQn du franc fiel dû par lui. Mais

Sculliadec ne se trouvera pas dans sa succession.

J. TREVEDY,
Ancien Président du Tl"ib~/1wl civil

de Quimper.

(A suivre).

(i) Mais il était convenu ~tvant le partage que Lampoul serait attribué
à Oliv,.ier : Le t9 avril173!~ (après le partage), Olivier passe la déclaration
de franc-fief' pour Lampoul (terre noble) ; et déclare « jouir de Lampoul
depuis le commencement de 1728, par désignation amiable de ses sœurs.»
Le droit avait été payé le 8 mars 1728. (Titres de Quintin).