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Bulletin SAF 1905


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La famille de Latour d’Auvergne-Corret

J. Trévédy

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1905 tome 32 - Pages 280 à 345

LA FA ILLE

Le Pretnier Grenadier

Vauban avait fortifié Brest et Concarneau, selon la méthode
nouvelle inaugurée par lui. Au printemps de 1694, il revint

en Bretagne. Le 7 juin, il séjournait à Quimper, et il y passait
la revue du ha n et arrière ban de l'évêché de Cornouaille( ' 1).
Le rôle des compagnies nous a été conservé (2): outre le
Mill de Nevet, colonel (3), et l'état-major composé de six per-
(1) Vauban alla de Quimper à Brest, où il arriva très à propos, Le 16
juin, une floLte Anglo-Hollandaise de 41 graüds bâtiments, sans compter
des brûlots et des transports, avec 10.000 hommes de débarquement, parut
devan l l'entrée de Brest. Le 17. un débarquemE:n t tu t tenté près de Camaret;
mais,canonnés par le's balteries voisines et vigoureusement assaillis par les -
, gardes marines, les pl'emiers débarqués se rembarquèrent à grand' peine,
laissant des morts et des prisonniers: Les ennemis s'éloignèrent sans autre
entreprise.
('2) Le rôle a été imprimé par le chevalier de Fréminville dans Antiquités
du rinislère ('2° partie, p. 482 et suiv.) sous ce titre: Revue passée par M. le
Maréchal de Vauban. Le titre est anticipé: Vauban, lieutenant général en
1693, ne devint maréchal qu'en 1703. ,
(3) Le marquis de Nevet. Il s'agit ùe Helll'i de Nevet, fils de René et de
Anne de Matignon, dernière fille de François de ~latignon, lieutenant
général, petit,fils du maréchal et fils d'Eléonore d'Orléans-Longueville.
Par tette aïeule, Anne de Matignon était alliée au Roi Louis XIV au di­
xième degré. René était mort à trente-quatre ans, le 13 avril 1676,
laissant Henri âgé de cinq ans. Celui ci fut. comme 3011 père, rommandant
du ban de Cornouaille. 1\ acquit le titre de colonel du régiment de Royal~
Vaisseaux; mais, en IGaa, sa mauvaise santé le contrllignit d'y renoncer.
II se retira avec sa mère au château de Beaubois pour y mourir: la mère
mourut la prem ;ère, au mois d'août, et son fils la su i vi t au mois de décembre

sonnes, le rôle ne nomme que 237 officièrs, brigadiers et cavà-
liers, répartis en onze compagnies très inégales (-l).
Mais une autre remarque a plus d'intérêt: du premiei' coup

d'œil on peut reconnaître des noms qui n'ont jamais été nobles.
Voici l'explication de ce fait qui peut sembler une anomalie.

Les anciennes mqntres ne comprenaient que les noms de
nobles ou de bourgeois possédant une terre noble, et, à ce

titre, tenus au service de guerre. Le service militaire était
antipathique aux bourgeois et l'exemption de ce service accor­
dée aux bourgeois de certaines villes, était une faveur enviée
par toutes (2). Au XVIIe siècle, l'exemption fu t générale: elle
parut au roi Louis XIII une nécessité. Les bourgeois posses­
seurs de terres nobles étaient si nombl;eux que, « vu leur peu
d'expérience de la guerre,)) leur présence à l'armée pouvait
être un embarras. Par déclaration du 29 novembre 164'1, le

roi supprima pour eux le service du ban et de l'arrière-ba~(3).
Donc, de ce jour, les nobles seuls seront inscrits aux rôles du
ban; mais, de ce jour aussi, voilà le8 bourgeois possesseurs
de fiefs nobles ou non, ambitionnant l'inscription au l'ôle qui
les effraY l:it autrefois. Heureux ceux qui peuvent se faufiler
au rôle du ban et aU rôle de la capitation noble! L'inscrip­
tion leur donne l'apparence de la noblesse: c'est quelque
chose ... en attendant mieux.
Parmi les noms roturiers inscrits au role de 169 ·~, je n'en
relève qu'un: celui d'un cavalier, du Rest Salaün, lisez
Salaün du Rest.

(1) Les compagnies comptent: 4 olficiers, -'1 brigadiers et des cavaliers:
il ya des compagnies de 31 cavalier~ et une n'en a pas un seul.
('2) En 149~, Charles VIII, pour récompenser les boul'geois ùe nennes
de leur fidélité à la clucheso;e Anne, les exempta du service militaire.
Lobineau. [h'!;t. p. 818). Ce privilège Cul confirm 1 par François 1

, Henri
II, Francois II, Charles IX et Hel1l'i IV.

(:3) Le roi constate que. la plus grande partie des francs-fiefs (biens
nobles) est aux mains des écch'siastiques, communautés et roturiers. » Et
on emeigne aujourd'hui que. tous les seigneurs étaient nobles! 1)
Pour 'iuelcjues détails, voir Acqitisilion de la noblesse }Jal' la possession
des fiefs nobles, par J. Trévédy, 1903. . ,

Il ·est inscrit l'avant-dernier des cavaliers de la 10e compa­
gnie ; et aussitôt apparaît, comme capitaine de la 11 e, M. de
. Penandreff. Je relève encore ce nom. Nous allons voir le fils
de M. de PenandretI épouser ]a petite-fiI1e'de Salaün du Rest;
et celle·ci d'un second mariage sera mère de La Tour d'Au­
vergne-Corret, le premier Grenadier.

C'est à ce titre que j'ai recueilli, e' t que je vais donner
quelques renseignements sur cette famille Salaün .
Le premier du nom que nous connaissions est Pierre, époux
de Plésou Le Moa!. Dans la seconde moitié du XVIIe siècle,
. il possédait en Collorec, trève de Plounévez-du-Faou (1), une
terre roturière dite le Rest. Il y construisit une maison
. ayant l'apparence d'une très modeste gentilhommière. Elle
subsiste encore et porte la date de 1664 .

Le Rest était-il l'unique ou du moins la principale posses-
sion de Pierre Salaün ? Du moins était-ce sa résidence, et il
en ajouta·le nom à son nom patronymique. Mais nous devons
dire qu'il n'eut aucune prétention à la noblesse, et qu'il ne
produisit pas à la réformation de 1668 .
Pierre Salaün mourut en 1671. Il laissait une fille nommée
Renée et un fils appelé Théophile.
Renée Salaün épousa, en octobre 1689, Guillaume Huchet,
sieur du Rest (en Irvillac), fils de Jean, demeurant à Quim-
per, rue Kéréon, paroisse Saint-Julien (2). .
Ils eurent entr'autres enfants un fils nommé Pierre-Char­
les, qui, « licencié en droit-canon de l'université de Paris »

(1) Collorec est aujourd'hui commune du canton de Châteauneuf-du-Faou,
arrondissement de Châteaulin.
Le mot breton 1'esl est interprété en français par andai'1/., l'espace par­
couru par la faux à chaqui pas du faucheur.
Ce mot est commun comme nom de terre en Basse-Bretagne. On l'a
francisé en l'écrivant reste, comme il se prononce en breton. .
(2) Irvillac, canton de Daoulas, arrondissement de Brest. Saint-Julien
tues Kéreon et Saint-François.

- 283 "

fut recleür de "Scrignac V1723), puis de Ploaré (172a). - Nous
le. retrouverons plus loin.
DeUx autres fils prirent les noms de du Guermeul' et d'An-

geville. Nous retrouveroris un fils du sieur d'Angeville (1) . .
Théophil e devint avocat en parlement. Il hérita et habi ta le
Rest. Il 'en prit le nom, comme son père; et . même, selon
un usage aussi commun alors qu'il nous semble déraisonna­
hIe, au lieu de se nommer Salaün du ]lest, il s'appela du Rest

Salaun. C'est cet avocat en parlement qui, jetant là pour UI)
jour la robe et la toque, comparut comme cavalier, à la revue
. de la noblesse passée à Quimper, en 169~.

Son inscription sur le rôle du ban noble semble l'indice de

prétentions que son père n'avait pas eues; disons pourtant que
Théophile Salaün ne se parait pas d'armoiries, puisqu'il ne

figure pas à l'armorial de 1696. '
Théophile épousa Catherine Paillard, de Brasparts, fille de .
Yves Paillard.

Yves avait un frére nommé Hièrôme, qui fut recteur de

Ploaré, où il mourut, en 1G7~. Outre Catherine mariée à
Théophile Salaün, Yves Paillard avait un fils, Guillaume,
docteur en Sorbonne, qui succéda à son oncle Hièrôme et tint
la cure de Ploaré, pendant un demi-siècle, jusqu'à sa mort en
' 1721). Il fut remplacé par son neveu Pierre-Charles Huchet,
nommé plus haut. Nous retrouverons celui-ci.
Théophile Salaün eut plusieurs filles au nombre desquelles

Catherine-Vincente, qui devint femme de Yvon de Grand-
maison, et Françoise Guillemette, femme de Michel-Maurice

(1) Les Huchet du Guermeur et d'Angeville avaient une parenté avec les

Huchet de Kerourain, aussi bourgeois de Quimper. Le 5 septembre 1746,
Michel Laënnec, avocat, épousa Jeanne Catherine Huchet de Kerourain,
fille de Guillaume, maire de Ouimper. Le 17 juillet 17H, elle fut mère de
Théophile-Marie, père (le 17 février 1781) de René Théophile-Hyacinthe,
l'illustre médecin. Voir Maison natale du. Dr Laënnec par J . Trévédy.
On voit que le docteur Laënnec et le Premier Grenadier ont eu des
ancêtres communs. ' ,

~8i _ 0

Ségalen ; il eut un fils, LOUIS, qui devint dominicain, enfin,
vers 1670, un fils nommé Charles qui hérita le Rest (1l.
A cette époque, les étudiants bretons allaient d'ordinaire
prendre leurs grades à Rennes ou à Nantes, Charles alla faire
son droit à Paris et il y prêta le serment d'avocat. C'est pourquoi

il prend le titre (( d'avocat en pal'lement de Paris )), dans son

. contrat de mariage- dressé à Rennes le -14 novembre 1710.
Mais l'acte de son mariage célébré à Toussaint de Rennes, le

10 janvier -171'1, lui donne, comme nous verrons, d'autres
titres.

Salaün avait quarante ans quand il épousa Françoise-Ro-

salie Morel, dame de la Touche. Elle était orpheline, âgée de
plus de vingt-sept ans, par conséquent majeure pour le

mariage, et comme elle dit, CI ttsante de ses droits n
Voici quelques renseignements sur la famille Morel (2) .

Vers le milieu du XVIIe siècle, Pierre Morel, avocat au

parlement, épousa Etiennette Car (ou Le Car), fille de Etienne
Car, alors maître-chimrgien,et depuis (avant 1674) chirurgien

ordinaire du Roi, demeurant à Rennes. De ce mariage
naquirent deux fils, Etienne et Pierre, avoca ts au parlement.
Etienne, sieur de Lourme, né et baptisé (Saint-Germain),
le 17 août '1650, eut 'pour parrain son aïeul maternel, Etienne
Car, et pour marraine son aïeule paternelle, Michelle Janin.­
Etienne épousa (Saint-Germain), le 30 avri1 1673, Simone
Frangeul, née (même paroisse) le 20août 165L, fille de Jacques
. . Frangeul, avocat à la cour, et de Jeanne de la Touche.
Entre 1674 et 1681, la dame Morel allait mettre au monde
sept enfants dont quatre fils (3); elle m )urut le ,2 L janvier 168~,

(1) Les registres de Collorec ffitlnquent pour celte époque. La date
approximative 1670 résulte de l'indication de l'âge dans l'acte de s~pulture.
(n .Jil dois ces rensrignements à mon ami M. Saulnier. conseiller hono­ raire à Hennes. C'e~t une garantie ab30lue d'exacltuJe.
(3) [" Etienne, 3 février 1671. - 2° Jacques, 27 janviet' 1675. 3°

... 285-
quand l'aîné de ses enfants n'avait pas dix ans et le dernier
quatre mois. .
Etienne Morel se remaria: le n septembre 1686, (Saint­
Germain),il épousa Jeanne Trémentier, fille de « noble homme

Pierre, avocat au parlement; )) elle lui donna au moins un fils,
Guy, néet baptisé le if août 1687 (1).
Françoise Rosalie, née et baptisée (Saint-Germain) le 12
mai 1682, était la sixième des enfants de Simone Frangeul et
la plus jeune de ses filles; elle eut pour parrain « Christophe
Ernault, avocat au Parlement, et pour marraine Françoise Le
Car, compagne d'écuyer Joseph Chuppeau, sieur de la Musse,
conseiller du Roi, juge et garde de la mon noie à Rennes. ) i La
marraine paraît être la sœur ou la fille de l'aïeul Etienne Car.

Dans l'acte de baptême de sa fille, « noble homme » Etienne
Morel n'a que le titre de sieur de Lourme et avocat en par­
lement ; mais dans le contrat de mariage il est dit « conseiller
du Roy, juge garde de la monnoie. » En effet, en 1684, il avait
succédé à Joseph Chuppeau, et il allait exercer ses fonctions
jusqu'à 1689 qui peut être l'année de sa mort.
Nous avons nommé plus haut Pierre Morel, frère d'Etienne.
Il~ est- dit, comme son frère, sieur de Lourme dans l'acte
de baptême de son fils Pierre-Jean-Baptiste (St-Germain de
Rennes, ' 15 septembre 1oUi). Faut-il voir un autre fils de
Pierre, dans Pierre-Jacques Morel, dit aussi sieur de Lourme,

Marguerite, '24 janvier 1876.- 4" Etiennette, 3 janvier 16ï8. 5° Pierre
Jean, 8 janyier 1679. , Go Françoise . Ros~lie, 1'2 mai 168'2. 7" Etienne,
7 septembre 16~4, . ,Tous baptisés à Saint-Germain, le jour de leur

naissance.
(1) Noble homme. Cette expre ;;sion se rencontre ici pour la première
fois. Un mot d'explication. Noble homme se disait autrefois des plus
grands seigneurs, notamment du duc de Bretagne (XIne et XIV" siècles) .
Mais au XVII l' siècle, il avait rem placé l'épithète honoraùle homme et. se
donnait à nombre de roturiers. C'était un titre purement bourgeois, et
l'accepter c'était se reconnaître non noble. V, mon étude Sur le titre noble
homme.

286

marié à Jacquette Le Corre (1), que nous trouvons établi à
Carhaix dans la première moitié du XVIIe siècle? Il eut un
fils nommé Pierre-Charles-Jean, qui fut marié, le 22 février
1762, à St- Pierre de Vannes.
D'après tout ce que nous avons dit, la famille Morel était
bourgeoise. Dans son acte de mariage Pierre-Charles s'anoblit,
et en même temps anoblit son père décédé, qui n'était pas là
pour prQtester contre cette usurpation (2).
Cet acte qui nous montre un Morel de Lourme, selon toute
apparence résidant à Carhaix, a pour nous quelque intérêt.
Nous pouvons conjecturer que c'est lui qui a fait le mariage
de sa cousine Françoise Rosalie avec Salaün du Rest ; et
quelques Morel que nous allons trouver dans des actes de l'é­
tat-civil dressés à Collorec, appartiennent sans doute à la
famille établie à Carhaix (3).

Da ns son a(;te de mariage, « N. maistre Charles Salaün, sieur
du Rest», est qualifié « avocat au Parlement, sénéchfll et seul
juge des juridictions et châtellenies du Granec, de Châteaugal
et autres, conseiller du Roy et son commissaire aux saisies
réelles des cours royales de Châteauneuf-du-Faou, Huelgoat,
Landeleau et autres» (4) .

(1) Ne serait-ce pas Le C?r? (ci-d'eesus p. 283) le nom est à peine lisible
dans l'acte de mariage ci-dessous.
('2) , Mariage de Messire Pierre-Charle:;·Jean-Morel, seigneu r du Roscouet,
capitaine gouverneur des ville et château de Guémené et capitaine de
chasse de la principauté du dit Guémené, fils majeur de feu Messire
Pierre-Jacques Morel, seigneur de. LOUl'me et de Dame ,Jacquette Le Corre
(? 1 originaire de la ville de Ca rhaix, paroisse de Plouguer et domicil ié de Gué­
mené, et Dilo Marguerite Louise Thomas de Coetdihuel, fille de N. (noble)
maislre Sébastien Thomas, sieur de Coetdihuel, conseiller du Roy lieutenant
civil et criminel au siége p,'ésidial de Vannes ».

(3) Notamment Angélique Morel fill. d'écuyer Jacques Morel et de Lau- .
rence du Gueriker,décédée au Rest le 20 et inhumée le 22 novembre [729.­
:-;ignent à l'acte Salaün du Rest et Alicot. (Nous trouverons ce nom plus
loin).
(i)Dans l'acte de baptême de sa fUie (H novernbr{l1714) il est dit« ::;énécqal

- 281-
Voilà bien des titres! et j'ai peur qu'il n'y ait dans cette

longue énumération quelque exagération vaniteuse. Les mots
et autres employés deux fois ouvrent à l'imagination de trop'

vas tes pers pee ti ves.
L'énumération des justices dont Salaün est sénéchal, sera
complète quand, au Granee et Châteaugal, nous aurons ajouté
les Isles, Kerdanet et La Haye, nommées dans le contrat de
mariage de 17'10 {'il. . .
D'autre part, nous ne voyons aucune justice à ajouter à cel-

les de Châteauneuf-du-Faou, Huelgoat et Landeleau. Ces trois
très petites juridictions ducales puis royales distinctes d'a-

bord, étaient alors réunies en un seul siège à Châteauneuf-
du-Faou. Elles étaient si peu occupées que plus tard elles furent
réunies à Carhaix (2). .
Au pied du contrat de mariage, auprès de la signature de
Rosalie Morel (elfe signe de son second prénom), on voit les
signatures Gabrielle Morel, Marie Morel, Suzon Morel, Jeanne

Françoise de Lourme-Morel, que nous retrouverons plus tard.
Ces prénoms ne sont pas ceux· des sœurs de Rosalie Morel
mentionnées plus haut (3). Ils appartiennent apparemment à
des cousines de Carhaix. .
Quoi qu'il en soit, Jeanne-Françoise de Lourme-Morel est
nommée dans une note de Corret, datée du 19 avril 1760 .. -

en plusieurs juridictions et receveur des deniers du Roi u.
Les commissaires aux saisies réelles créés par édits de février 16'26 et
juillet 1689, étaien t des ofIiciers établis auprès des justices royales. Ils avaient
l'entière administration des immeubles saisis qu'ils affermaient et dont ils
touchaient les revenus. V. au mot Commissaire ... Denisart - I. 2" . partie
p. 149 et Ferrière I. p. 44"2.
(1) Trois seigneuries des environs non châtellen ies. La Haye, en Locmaria­
Berrien fut acquise le 11 février 1779 par les Guillard de Kersauzic. Le

8 mai 1786, Mil. Limon, nièce de La Tour d'Auv. ergne, épousa Joachim
Guillard et devint ainsi dame de la Haye. Nous le verrons plus loin.
(2) Elles étaient distincles lors de l'établisse ment des présidiaux. Voir l'or~
donnance de Henri III. Mat's 155:~ n. st. dans Hévin. Questions Féodales p.
XVI. Cf. Organisation de la justice en, Bretayne, .par J. Trévédy.

(3) Ci~dessQs p. 283, note a .

., , 288

Elle est dite (c veuve de noble mÇlître Augustin-Marc de Mala ~
guet, avocat au parlement de Bretagne») (1) .
. Charles contractait un très honorable mais non riche
mariage. La fiancée déclare au contrat que « oùtre ses im- -
meubles cc qui ne sont pas mentionnés, elle possède « de
meubles et autres objets mobiliers pour une somme de 500
livres, (environ 1575 francs de notre monnaie) ; et elle stipule,
au cas de prédécès de son mari, « 200 livres pour le trousseau
et 250 livres de douaire,» (630 et 787 francs actuels) (2).
Dans cet acte il n'est pas question de l'avoir de Charles
Salaün. Son pètit~fils La Tour d'Auvergne-Corret fut proprié­
taire de domaines congéables dans les communes actuelles
de Saint-Thois (canton de Châteauneuf-du-Faou), Ploaré,
( canton de Douarnenez) et Plonévez-Porzay (Châteaulin) (3) :
ces biens lui venaient apparemment de son aïeul maternel.
Les époux Salaün habitèrent le Rest. Ils y eurent trois

(1) Elle était morte vers cettH époque. Voici ses héritiers: Dans l'estoc
paternel N. H. Joseph des Champs du Cerisier. (A) Jean-Louis Morel,
sieur de Lourme, Marie Morel femme dl) François Perrinet, sieur de la
Terre-Franche, demeurant au bourg de Villefagnan, province de Poitou;
- Jeanne-Lucrèce Salaün ;dont la part fut un constitut de 30 livres de

rente). .
Dans l'estoc maternel: Françoise Fouqueray, épouse de M. Adrien de
Beauvisage de Montégu, directeur des finances du Roi, demeurant à Poi
tiers; - et Catherine Thérèse Fouqueray, sa sœur, veuve d'écuyer Jean-
Michel Urvoy, sieur de la Motleaux Rochers. .
(A) Nous trouverons plus loin le nom de Mm. Lucrèce des Champs du
Rosier, ou des flosie1"S, marraine de Jeanne Lucrèce Salaün. .
(:2) Je suis les évaluations de Le Ber données pour 181.5, et un peu faibles
après soixante ans.
(3) Voir La Tour d'Auvergne, homme d'affaires' et 1'é!l-lsseur' de ~es biens,
par l'Abbé Guirriec. Bull. de la Société archéologique du Finistère
1002, p. 158-1G9.
Ces derniers domaines (de Ploaré et Plonévez) étaient situé" au fief de
Nevct ; et c'est sans doute 'ce voisinage qui mit Salaün en relations avec

la mai: .. on de Nevet, dont la dernière devint, en 1720, comtesse de Coigny,

La Tour d'Auvergne a écrit que son grand-pPl'e avait signé le compte de
tutelle de Monsieur' (Ii~ez de Madame) de Coigny. Ce qui est bien possible.
Mais il ne se comprend pas qu'il dise au même endroit que Charles Salaün
fut officier à Dauphin-Dragons. Nous viendrons à cette lettre .

. or 289 _.
enfants. L'aîné fut une fille, Jeanne-Lucrèce, née le 21 sep ..
tembre 17-14, et baptisée à Collorec, le 26 novembre s. uivant.
Elle eut pour parrain «( noble homme maUre Michel Ségalen,

mari de sa tante paternelle Françoise; et pour marraine

Lucrèce des Champs, dame du Rosier » (1). Mme des' Champs
appartenait à la famille maternelle. Nous avons vu Joseph
des Champs qui paraît être son fils, héritant d'une Morel de
LOUl'me.

Parmi les personnes qui signent cel acte de baptême avec
les parrain et marraine, et les père et mère de l'enfant, je
relève les noms de Yvon Grandmaison (le ma ri de Catherine
Salaün), de frère Louis Salaün, dominicain, frère de

Charles, le père; et de Catherine Paillard, apparemment
femme de Théophile et aïeule de l'enfant.
Jeanne Lucrèce Salaün, ordinairement nommée Lucrèce,

sera mère de Théophile-Malo Corret, le Premier Grenadier.
Un second enfant naquit au mois de juin 1716. Il fut
simplement ondoyé et ne laissa pas le tempi de suppléer les
cérémonies du baptême. Six semaines après, il mourait en
nourrice, au bOUI~g de Collorec, le 15 juillet '1716; l'acte de
sépulture lui donne le nom de Théophile (2).
Enfin, le 29 août 1720, naissait Charles-Thomas-Théophile,

baptisé le 1 er septembre. Il eut pour parrain « messire Thomas
du Mains, chevalier de Saint-Louis et brigadier des ingénieurs
des deux couronnes de France et d'Espagne» (3), et pour mar­
raine « Dlle Julienne-Françoise-Théophile Le Postee, dame de
Lanrozhir )). ' Parmi les signatures, je relève, outre celle du
père, celle de Catherine-Vincente Salaün et de Yves de
Grandmaison.

(1) L'acte de baptême que j'ai sous les yeux ne mentionne que lei
prénoms Jeanne-Lucrèce. D'autres actes la nomment Jeanne-Louise·Marie­
Lucrèce. (Ce dernier nom écrit toujours Lucresse).
(2) Assistent à ces modestes obsèques, la nOUl'rice et son mari, et troi~
è ménagers qui ne savent signer. )
(3) Qu'est-ce que ce titre?
- BULLETIN ARCHÉO. DU FINISTÈRE. MÉMOiRES XIX

-' 290 -,

Cet enfant dut mourir sans retard. J'infère ce fait et la mort

de Mme Salaün, d'un acte de baptême du 5 mars 1729, où
Lucrèce Salaün marraine est qualifiée dame du Rest (1),
c'est-à-dire héritière du Rest. Ce semble signifier qu'elle est

seule enfant, et que sa mère ne vtt plus pour lui donner frères
ou sœurs.
Presque tous les biographes célèbrent les grâces de Lucrèce

Salaün et les charmes de son esprit. Je n'y veux pas contredire,
mais on peut demander sur quelle autorité ils se fondent. Per­
sonne n'a cité ni un portrait ni une lettre de Mlle Salaün. Je
crois que ses lettres devaient être rares. Si j'en juge par

quelques fragments de comptes émanés d'elle, elle écrivait,
semble-t-il, com'me elle prononçait. Quand on lit une page de
sa main, . on est disposé ou bien à blâmer son père d'avoir
négligé l'instruction prima.ire de sa fille, ou à plaindre celle-ci
d'avoir si peu profité des leçons de ses maîtres (2).

Quoiqu'il en soit, elle sut plaire à un gentilhomme, le cheva,
lier de Penandreff, fils puiné de M. de PenandrefI, que nous ,

avons vu commandant une compagnie à la revue passée à
Quimper par Vauban (3).
Les fiançailles se firent le 14 janvier 1734, à Collorec, et Je
mariage fut célébré le 3 février par Mire Huchet, encore rect.eur
de Ploaré, oncle à la mode de Bretagne de la mariée (4).
Née le 20 septembre 1714, Lucrèce Salaün n'avait pas vingt
ans. Les biographes (je ne sais sur quelles preuves) représen­
tent son mari comme un vieillard. Je n'oserais dire que M.
(1) Le même titre lui est donné en des actes de 1730 (8 juin) et 1731 (t5

février) où eHe est marraine.
Cl) Un jour elle écrit: « sof tout may drois an général » J'ai sous les
yeux un g1'OS des biens fait P?rt elle en vue d'un parlage, j'y lis:
c Il y a de plus la sarge (charge) de Proqureur du Roy, dont M. Toulgoet
pet (paie), la rente constiluée ... » etc. ' « Il fot (faut) encore diminuer 100
livres, etc.» Les mots paie et char(Je sont écrits plusieurs fois ainsi ... etc.
(3) Ci-dessus, p. 281.
(4) Ci-dessus, p. '283. -

de PenandreiI lI:ût atteint la soixantaine; mais il n'en était pas
loin. Le 13 octobre 1698, il était majeur de vingt et un ans ('il,
eL trente-six années avaient passé depuis: a u jour de son
mariage, il avait donc au moins cinquante-sept ans.
L'acte de mariage signale ainsi le marié: « Jean- Baptiste
de PenandreiI, chevalier, seigneur du dit lieu (2) et de
I{eranstret, fils puîné et majeur de messire Jean-Baptiste de
PenandreiI,vivant chevalier, seigneur de Keranstret, - la Châ­
taigneraie (en breton Quistinic, en Briec), la Boissière, ' Pen-

venic, Pennelec et autres lieux, et capitaine d'une compagnie
de noblesse en l'évesché de Cornouaille; , et de dame Marie
Magdeleine Guillaume, héritière de KerjaiIrès (3), sa mère,
vivante, habituée dans la ville de Quimper, » sans doute dans
la parLJisse de la Chandeleur où les publications ont été
faites (4).

Mme de PenandreiI signe l'acte avec deux personnes du
même nom apparemment sœurs du marié ~ cieux gentilshom-

mes du nom de du Beaudiez signent, comme amis ou parents.
- Auprès de la mariée signent Catherine Salâün de Grand­
maison, sœur de son père, de Lourme-Morel (lisez 1\lorel de
Lourme), frère ou cousin de sa mère, et Suzon Morel.
L'acte de mariage nous révèle que Charles Salaün avait
(1) Le 13 octobre 1698. il plaide à Concarneau en qualité d'héritier
bénéficiaire de son père. A rch. Finistère B. 930. '
(2) Seigneur de PenandreII est une erreur, ou bien il ne s'agit pas ici de
PenandrelI, en Plourin, près de Morlaix, qui donn' a le nom à la famille,
Dès le XV· siècle, cette seigneurie avait passé par mariage aux Kersauzon
dits depuis de PenandrelI. '
M. de PenandreII était marié avant 1681 Il agit comme mari de Marie
Gui llaume, au 12 jùillet de cette année. (A1'c1lives du Finlstére, B. 6. f- 138).
Il était mort avant le 13 octobre 1688. (Ci-dessus note 1).
(3) RerjalIrès ou Kergeffroy (paroisse de Plufur, canton, de Plestin,
arr. de Lannion). Mme de Penandre1I possédait amsi des terres nobl(~s et
roturières à Plouguer-Carhnix, Ploune\'ézel (canton de Carhaix, arrondis­
sement de Châteaulin) et Treffrin (canlon de Maël-Carhnix, arrondissement
de GuingGmp). Arch. Finistère. fi. (j fo '28.
(4) Cette paroisse desserviè à la cathédrale comprenail la place Sé'lint­
Corentin, les rues du Frout et des Reguaircs et la place Toul al-Laer.

" 292 "

quitté ses fonctions de judicature. Il est qualifié seulement
({ ancien juge et avocat en le Parlement de Paris. »
Charle~ Salaün était alors âgé de soixante-quatre ans.
Son âge ou sa mauvaise santé lui rendait sans doute pénibles

les courses aux sièges des cinq justices dont il était l'unique

juge; et il avait pris sa retraite. Nous le verrons mourir
moins de cinq ans après le mariage de sa fille .
NOlIS n'avons pas le contrat. de mariage. M. de Penandrell
avait hérité de son père; mais il était cadet, et il ne paraît

pas qu'il fût riche. Du moins n'avait-il pas une maison de
campagne dont, selon la mode du temps, il eût fait son habi­
tation principale .
Il semble que les époux résidèrent d'abord au Rest. C'est là
que, dès le 30 novembre 1734, leur naquit un fils qui, le 24
décembre, reçut au. baptême les prénoms de Charles-Marie. ' .
Si ce fils premier-né porte les prénoms de son aïeul' mater­
nel, ce n'est pas celui-ci qui tint son petit-fils sur les fonts .
On lit, en effet, dans l'acte de baptême: « parrain et marraine
ont été Marc Benjamin de Collorec et Jeanne Le Nurioc du
viIJage de Gourmelen en c~tte trève, qui ne savent signer. 1)
Quelles sont ces personnes qui 'n'apposent pas leurs signa­
tures auprès de celles du grand-père, du père et de la mère?
Ce sont sans doute deux mendiants habituels de la maison du
Rest. . A cette époque, c'était un hum~le usage des maisons
bourgeoises et même nobles d'appeler des pauvres à tenir
l'un et souvent l'aîné de leurs enfants sur les fonts du baptê­
me (1).
Bientôt, M. et Mme de PenandretI résidèrent à Quimper l en
la paroisse du Saint-Esprit (2) .Du moins est-ce là que, quatorze
(1) Les actes dressés duns les Tilles portent souvent: « parrain et mar-
. raine N et N, pauvres de l'hôpital. » Dans les campagnes, où il n'y avait
pa~ d'hôpital, on prenait un mendiant et une mendiante parmi ceux qui
avaif'nt coutume de ye.nir recevoir l'aumône à la porte des parents du
baptisé.
(2) Cette paroisse dessenie dans la cathédrale comprenait les rurs Neuve

mois après la naissance de leur fils Charles,naquit, le 8 février
1736, une fille qui fut baptisée le surlendemain en cette. pa-
1'0isse et nommée Gabrielle-Made. Elle eut pour parrain
Henri-Gabriel du Dresic, chevalier, chef de nom et d'armes (1),
et pour marraine la sœur de son grand'père maternel,
Catherine Salaün, femme d'Yvon de Gl'andmaison.
On ne trouve aucune traQe de cette petite fille pas plus que
de son frère. Leurs actes de sépultures ne se trouvent pas à
Quimper. Selon l'usage du temps, mis en nourrice dans les
campagnes voisines, ils y seront.morts, et c'est là que leurs
sépultures ont été constatées. Je n'ai pas vu non plus · l'acte
de sépulture de M. de PenandretI. Les enfants sont morts

avant leur père, car il n'apparaît pas que leur mère ait rien
hérité d'eux. On ne voit pas non plus que la veuve ait joui
d'un douaire, ni qu'elle ait reçu de son mari un legs de quelque
importance.

Quoi qu'il en soit, Mme de PenandretI devint veuve avant le
, 14 juillet 1738, puisque le délai légal de dix mois était expiré
quand elle contracta un second mariage, le 14 mai t739.
Après son veuvage, Mme de PenandretI rentra ' au Rest en
deuil de ses enfants et de son· mari, pour donner les derniers
soins à son père qui allait mourir le 5 décembre suivant (173S).
Ici une observation qui semble à propos. La présence de
Théophile Salaün à la revue de la noblesse passée par Vauban

nous a fait présumer chez lui quelques prétentions nobiliaires.
Or son fils n'avait pas hérité ces illusions. Je trouve la
preuve de cette sagesse non dans le choix du parrain et de la
marraine de son premier pelit-fils, puisque ce choix, com, me
on l'a vu, s'explique autremênt. Mais je trouve cette ' preuve
dans un autre fait très honorable pour Charles Salaün.

el Sainte-Catherine, (ri'te gauche de l'Odet;, faubourg au fief de l'évêque
avec la ville close.
(t) Les Dt'ezic admis à la dernière réformation (huit générations), iuria
diction de Carhaix. Ils étaient seigneUl's de Kerforn, en Maël-Carhaix.

À l'époque ou nous nous reportons, il y avait à Collorec
comme aujourd'hui, plusieurs familles portant le nom de
Salaün, familles honnêtes, mais dans la situation la plus
modeste: tous ces Salaün étaient des cultivaLeurs dont pas un

ne sait signer. Or, « noble maUre Charles Salaün, avocat en
Parlement de Paris D, honoré cie fonctions judiciaires, ne
tient par ces braves gens à distance; et, si je ne me trompe,
il les reconnaît publiquement pour des parents, plus ou moins
éloignés peut-être, mais issus d'une souche commune (1). Il

nomme leurs enfants. En 172:J, sa fille, âgée alors de quinze
ans, et dite darne du Rest, est marraine clans une de ces
humbles familles: le parrain, un Salaün, ne sait pas signer,
et Charles Sataün appose sa signature auprès de celle sa
fille. ' Après son mariage, M. de PenandrefI entre dans la
généreuse pensée de son beau-père et de sa femme. Marié le

3 février 1731" il est parrain, le 8 avril suivant, d'un fils d'une

Marie Salaün, femme de Maudé Le Cra vec; il donne ses pré-

noms à son filleul, et Mme de PenandreIT assiste au baptême
et signe l'acte que le père du baptisé ne sait pas signer.
Jeanne-LucrèceSalaün veuve de M de Penandl'efI aura bien­
tôt d'autres pensées .

Nous verrons tout à l'heure que Charles Salaün laissait une
succession quelque peu embarrassée (2). La liquidation de

cette succession que sa fille avait acceptée nécessita l'assi~-

tance d'un homme d'affaire expérimenté; et Mme de Penan-

dreff appela à son secours Me Olivier Corret, avocat, demeurant
non loin de Collorec, en la paroisse de St-Hernin, limitrophe
de Carhaix .

Sans en rien savoir, des biographes nous le présentent comme

(1) Parents assez éloignés puisque nous ne les verrons pas appelés aux as­
semblées (conseils de famille) des cleseendants de Charles Salaün .
(2) En 172'?-'23. Vente de gl'llÏns saisis sur ~l' Charles Salaün, sieur
du Rést. (Ar'ch. du Finistère, B. 25)

295
Il lm bon jurisconsulte, un avocat éloquent »). Je ne demande­
rais pas mieux que de lui reconnaître même ce second titre;
mais je me demande où Corret aurait pu faire l'apprentissage
de l'éloquence, et sur quel théâtre il aura donné la mesure de
son talent oratoire,
Né en '1699 (1), il va faire son droit à Nantes, quand il
avait au moins vingt ans. Après trois ou quatre ans, il est
reçu licencié et prête serment d'avocat devant le Parlement.
A peine de rétour au pays natal, le jeune avocat, au lieu
d'attendre la clientèle, songe à tirer autrement profit de son
titre: il sollicite une charge judiciaire. Le 25 novembre t 726,
Mire Claude de Loz, comte de Beaucours, Beaulieu, Kerbastard
et autres lieux, conseiller honoraire au Parlement, nomme
Corret procureur fiscal de ses trois petites juridictions (2).
Or la seigneurie de Beaucours est dans la paroisse de
Botoha (3) ; le château et la seigneurie de Kerbastard, et la
seigneurie de Beaulieu, sont en la trève de Lanrivain. C'est
sans doute à ce titre que, dans un acte de '1728) Corret se

qualifie procureur fiscal de Lanrivain. Lanrivain est loin de
Carhaix, où demeure la mère de Corret, Botoha est encore
plus loin. Il est permis de croire que Corret dut résider au
manoir de Lampoul, en Trémargat (4), à proximité des sièges
ou peut-être du siège unique de ses trois juridictions.
C'e'st seulement quelques années après, que nous le voyons

(1) L'acle du baptême est introuvable, les actes de Tl'émargat pour
cette année et les années 1695 à 170'2 étant perdus. Nous inférons cette
date de l'âge indiqué à l'acte de sépulture.
('2) A rch. des Côtes· du-Nonl. Série B. Supp.Juridiction du duché de Lorges
au siège de Quintin.· Deux jours après sa nomination, Correl prête ser·
ment devant le sénéchal de Quintin.
(3) Botoha, autrefois très grande paroisse avec ses trèv€s de Canihuel,
Lanrivain,Querrien et Sainle Tréphime, comprenait 5'200 communiants
(Ogée I-p. 951. Les trèves sont devenues communes et paroisses; et l'ancien
chef-lieu, Botoha est un hameau de la commu!e de Saint-Nicolas du Pélem,
chef-lieu de canton.
(4 ) Lanrivain (rive gauche du Blavet), canton de Saint Nicolas; Trémar

gal (rive droite) canton de Rostrenen, arr. de GUingamp.

- 296

pourvu d'un titre plus à sa convenance: il· est sénéchal de
Trébrivan, c'est-à-dire de la seigneurie de l'Etang, en Tl'ébri­
van, au voisinage de Carhaix (1), et, situation plus lucrative,
il est receveur et admin. istrateur de la terre du I{ergoat,
paroisse de Saint-Hernin (2); et, à ce titre, il habite au château .

C'est à ce modeste homme d'affaires que Mme de Penandreff
confia la liquidation de la succession paternelle. Pour faire et
. très bien une liquidation, il n'est pas besoin de tantde science,
et encore moins d'éloquence: l'entente des affaires, avec un
peu de pratique, suffit.
Mais une liquidation avec règlement de comptes ne .se fait

. pas en un jour. Les affaires de la succession n'étaient pas .

réglées, que l'avocat, âgé de quarante ans, était agréé comme
mari par sa cliente, alors dans sa vingt-cinquième année.
J9 ne sais pourtant si Mme de Penandreff n'éprouva pas
quelque hésitation et n'eut pas à faire un sacrince (l'amour­
propre: elle tenait tant au nom de Penandreff 1 Elle le signera
les 6 et Il mai, et, après deux jOUl'S passés, le li mai, ell e

zera l'épouse du bourgeois Conet.

Or les · Corret étaient loin d'avoir une situation égale à
celle des Pen8ndreff. .
L'aïeul d'Olivier, Henri, était fils naturel non reconn u

d'Henri de La Tour d'Auvergne (le père de Turenne) duc de
Bouillon. Etranger à la Bretagne, Henri s'y était établi , il
y avait environ cent anS. Son fils Mathurin, devenu notaire à
Lanrivain, avait épousé deux filles nobles sans fortune, pu is
Une roturière, Barbe 'Le ScafIunec ayant quelque aisan ce.
Mathurin avait pu acquérir des immeubles,notamment à !{er­
bautIret une chaumière avec quelques champs dont il prit le
nom, et que la fantaisie a transformée en un château et fi ef

(1) Trébrivan, canton de Maël-Carhaix (arr. de Guingamp), limitrophe
. du canton de Carhaix ~t à sept kilomètres de celle ville.
(~) Et sans aucun doute des biens considérables de la dame de Kergoat j
si"tués dans les environs. Saint-llernin, canton de CarhaiX .

, 297 '

hoble (1). _. Son fils Louis-Olivier né de Barbe Le Scaffunèé
avait hérité de son père une estime bien méritée.
Henri était marié avant sa venue en Bretagne: Mathurin,
qui semble son seul fils, n'avait laissé d'enfants que de Barbe
Le ScatIunec (2). De là suit qu'Olivier, son frère et ses sœurs,
n'avaient de relations de parenté qu'avec et par les Scatlunec.
- Nous reviendrons sur ce point.
Dans le contrat de mariage, Mma de Penandretl est dite
demeurant au lieu du Rest, et Corret, habitant le château du
Kergoat, en SLHernin. Les biographes n'ont pas manqué de
transformer « noble homme Corret, en « Messire de Corre t,
châtelain de Kergoat; ») et, pour proportionner le château à la
modique fortune de son (( seigneur )), ils ont représenté Kergoat

comme «( une humble gentilhommière Yi. Par contraste, ona
montré «( le château' du Rest se dressant)) orgueilleusement
. auprès du modeste Kergoat.

La vérité est que Kergoat était un des plus beaux et vastes

châteaux du pays, qu'il appartenait à Mmo Marie-Gabrielle de
(I) La fantaisie des biographes s'imaginant que le nom de Kerbauff"et
surajouté au nom patronymique est une preuve de noblesse!
(2\ De dix enfants nés de 1688 à 1703, Mathurin Correl mourant le
12 mai 1705, ne laissa que les cinq qu i sui v€nt, tous nés à Lampoul, en
Trémargat
1" Marie-I 'rançoise, née le '23 juin [691, mariée le 5 octobre 1764 (Carhaix),
à Malo Le ROllx de Kervasdoué, veuve, vivait encore en 1777.
2" Marie-Claude, née entre 1691 et 1697, ursuline à Carhaix a survécu
à sa sœur qui suit: .
3" Marie-Anne, née vers 1697, ursulÎne à Carhaix, motte le 30 mnl's 1744-
à 47 ans. .
4" Louis-Olivier, né vers 1699, père du Premier Grenadier, mort le
11 avril 17'19 à 50 ans.
5· Thomas Olivier, né le 6 aolÎt 1703, entré aux Jésuites, 19 septembre
1719, fait profession le 2 février 17::19, directeur des missions bretonnes
. de 1748 à 1762, (expuI5ion), mort à Paris, le 17 octobre 178Z.
Ce 5aint et éminent religieux est ce vieil oncle que La Tour d'Auvergne
. honorait comme un père. Pas un biographe n'a cherchÉ' qui pouvai
être ce vieillard. (Voir Deux Jémites, oncles de la Tour d'Auvet'gne.)
J'ai dit (ci-dessus, p. 284 note 1) que les registres de Trémargal, dfl
1695 à 1702 ~ Il 'existent plus.

Kergus de Tl'ofIagan, femme de M. de Roquefeuil, depuis ami­
ra l, que Corret l'habitait ou plutôt en occupait une dépendance
en qualité de régisseur; qu'au contraire le beau château
du Rest était une maison modeste, à douze kilomètres à vol
d'oiseau d·u Kergoat.
Lucrèce n'apportait pas à son mari l'aisance dont la posses­
sion de ce prétendu châleau devait naturellement être l'indice.
Nous trouvons la preu~e de ce fait dans leur contrat de ma­
riage. Il peut se résumer ainsi:
Pas de communauté. Chacun paiera ses dettes. Corret
apporte trois mille livres ( environ 60:50 francs de notre mon­
naie) sans dettes.La fiancée « apporte les meubles que son père

a laissés et dont elle fera faire im'entaire, plus douze cents
livres de robes, nippes et effets qui sont de son pécule » (envi­
ron 2420 francs en monnaie actuelle); mais elle a recueilli
des dettes dans la succession paternelle et elle a des dettes
person nelles. .
Dans la prévision que les dettes seront payées par Corret, il

est convenu que les « avances qu'il fera en acquit des dettes
lui tiendront lieu de propres, et lui seront remboursées, mais
seulement au cas de prédécès de la dame ». S'il meurt le
premier, « il abandonne ses avances en don à elle et à ses
hériliers directs non à d'autres héritiers )) .

Voilà, reconnaissons le, une situation peu brillante . .
Mme de Penandreff aurait accompli sa vingt-cinquième

année, le 21 septembre 1739. Au printemps de cette année,
elle était encore mineure au point de vue du mariage. Il lui
fallait un curateur, qui nê pouvait donner son consentement

sans l'avis des parents. Ceux-ci se réunirent devant le séné-
chal de Châteauneuf-du-Faou, et sur leur avis favorable,

Lucrèce fut autorisée, ou comme on disait, décrétée de justice,
(7 mai 1739) (1) .

(1) Lors de son premier mariage, le consentement de son père avait sud,i
sans avis de parents; mais, malgré son émancipation par ce premier mariage,

Le curateur est « noble homme Jean-Marie Alicot demeuran t
au bourg de Collorec ». Il semble étranger à la famille: c'est
un brave homme qui aura par complaisance accepté une
charge éphémère exigeant son concours seulement à deux
actes, le contrat de mariage et l'as~emblée des parents devant

le juge de Châteauneuf (i).
Nous avons eu le regret de ne pas voir le décret ùe mariage.
Il nous aurait donné les noms des parents plus proches, six
au paternel, six au maternel (2).
L'acte de mariage ne nous donnera aucune lumière sur ce
point. Si les douze parents ont consenti au mariage, pas un
n'y assiste; au pied de l'acte de mariage se voient seulement

les signatures du curateur Alicot et des membres de sa famil-
le. Pour comble d'étonnement aucun parent du marié n'est
présent. ' .
Or, Olivier Corret a dans le proche voisinage une nom­
breuse famille: sa mère Barbe Le Scaffunec, ses deux sœurs
Marie-Françoise, veuve de Malo Le ' Roux de · Kervasdoué,
Marie-Anne, habitent Carhaix (3) ; et aux environs il a des

proches parents du côté de sa mère.
La mère septuagénaire, serait-elle empêchée par ses
soixante-treize ans ? Ce n'est pas probable; elle va vivre
encore quinze années, jusqu'à quatre-vingt huit ans, jusqu'au
15 mai 1754.
Mais les deux sœurs pourquoi ne sont-elles pas là? Chose
curieuse! Marie-Anne Corret est venu à Collorec avec son
frère, comme chaperon de la jeune veuve qui va devenir sa
en l'absence du père, le consentement du curateur, ne suffisait pas et il lui
fallait le décret pour le second mariage. Art. 406 de la Coutume.

(1) Le nom Alicot, qui n'est pas breton, n'existe plus dans la commune
de Collorec. .
(2) Deux actes postérieurs de ' 1749 et 1761 nous donneront les parents les
plus proches à ces dates et suppléeront en partie aux renseignements qui

nous font défaut en 1739.
(3) Je ne parle pas de sa sœur l\' Jarie-Claude, ursuline à Carhaix, ni de
son frère 1homas, le jésuite, supél'ieur des missions de Bretagne .

300 '.
belle-sœur. Le 6, le ft mai, deux jours avant le mariage elle
apposait sa signature auprès de celle de Mme « Salaün de Penan­
dreff, » à deux actes de l'état-civil. .. , et, le 14 mai,. elle ne
signe pas l'acte de mariage de son frère, elle n'est plus là ! .. (f).

Comment expliquer cette absence qui des deux côtés sem-
ble concertée?
Les deux familles seraient-elles mécontentes du mariage?
Quelle apparence? Les parents de la mariée ont donné un

avis favorable. L'éloignement de quelques uns d'entreeuxexpli. -
que leur absence: mais les autres ? .. Mystère. Mme Corret
mère aurait-elle consenti un peu malgré elle au mariage de
son fils? Non. La preuve c'est qu'elle a permis à Marie-Anne,

qui demeure avec elle, de séjourner auprès de sa future belle-
sœur. C'est à la veille du ma" riage que sa .fille a quitté le

Rest. Pourquoi?
Serait-ce que Lucrèce Salaün, si fière du nom de Penandreff,
aurait craint de voir les Scaffunec à son mariage? Olivier
Corre t, se rendant à la prière de sa fiancée, aurait-il eu la
faiblesse de ne les pas inviter? La vieille mère sentant vive­
ment l'injure faite aux siens aurait-elle dit à ses filles: « Les
miens n'y sont pas, ... nous n'y serons pas non plus! .. )

. " "Supposition gratuite, dira-t-on. Je désire me tromper; mais
ce qui suivra rend mon hypothèse assez plausible .

Entre 174' 1 et t7~7, Mme Corret va avoir quatre enfants.
Trois naîtront au Kergoat et seront baptisés à SLHernin. Seul,
Théophile, le futur Premier Grenadier, naîtra et sera baptisé

(I) ' Ceux qui aUront lu mes précédentes étuùes s'étonneront de voir, en
173D, à Collorec. Marie-Anne que j'ai dite entrée aux ursulines oe Carhaix,
le 3 octobre 1739. Son entrée au couvent est certaine et elle comptait si bien
y passer sa vie qu'au prix d'une modique pension vingère de 150 liv, elle
avait cédé à sa sœUl' Mm~ Le Roux et à son frère, les biens recueillis
par elle dans la succession de leur père. Partage du 22 février 1730. Sa
mauvaise santé sans doute aura déterminé sa sortie. Marie-Anne mourut
le 30 mars 1714, âgée de 47 ans (Acte de sépulture à Carhaix).
J'ai écrit qu'elle était morte religieuse je saisis l'occasion de me rectifier.

à Carhaix. · Voici la liste de cas enfants avec les noms des
parrains et marraines:
1° Marie-Anne-Michelle née et baptisée le 18 janvier 1741,
parrain noble homme Nicolas Ségalen (1), sieur de la Boues, '
sière, (cousin germain de Mme CarreL), marrain~ Marie-Anne
Corret (sœur de M. Corret) . . . Elle devint femme de Yves
Limon du Tymeur.
2° Joseph Olivier, né le 5 décembre et baptisé le 7 décembre
1-741, « parrain Allain Salaün, marchand magasiné à Château­
lin (2); marraine Marie-Thérèse Le Bronnec de Botsay. -

(mort à Carhaix, le 25 juillet 1760, dans sa dix-neuvième année.

Théophile-Malo, né à Carhaix le 23, baptisé le ~5 décem-
bre 1743; « parrai- n Théophile Mathurin Huchet, sieur d'An­
geville, conseiller du roi et son avocat au présidial de Quim-

pel'» (cousin issu de germain de Mme Con'et); marraine Vin-
cente Jeanne Le Roux de Kervasdoué~ (nièce de M. Corret. )
C'est le Premier Grenadier.
4° Thomas-Louis, né le 1

septembre 1747, baptisé le 22
avril 1748, parrain Joseph-Olivier (son frère âgé de six ans);

marraine Louise~Françoise Le Moyne (qui n'est pas parente.)
(mort sans alliance à Paris en f784.)

Ainsi la mère de Corret, vivante à Carhaix, n'est mar-
raine d'aucun de ses petits-enfants. De la famille maternelle,
les ScafIunec, p' as un ne sera parrain ni marraine. La sœur de
Corret, Marie-Aune, et sa nièce flUe de sa sœur aînée Mme Le
Roux, apparaîtront seules de la'famille à ces actes de baptême.

Que sont donc les Scatlunec?
Il N, Me Le Scatlunec 1) était notaire à Trébrivan; il habitait

Kervoel ou Kergouel à la limite de la paroisse de Treffrin (3),

(1) Nicolas Ségalen est lt: fils de Michel, parrain de Mn" Corret, en 1714.
L'enfant fut baptisé en préH'nce du prêtre de la paroisse par « Abibon
Paul Le Coz, prêtre déll'gué. » C'est un cousin de Mme Curret que nous re­
lrouyerons plus lard.
(2) Serait-ce un frère de Charles ou un neveu. cousin de Mm. Corret?
(3) 11 est qualifié fabrique de l'église de Trébrh'an et possession né en
Maël-Carhaix. (ATClltvts du Finistè1'e, .A-13 et A-16).

302

Sa femme, Marie Grall lui avait donné cinq enfants, deux
garçons, Maurice et Guillaume et trois filles, Catherine, Barbe
et Anne. Elle ne viVait plus lorsque mourut, le 16 juin 1676,
sa fille Anne. C'est l'acte d'inhumation de celle-ci (Trébrivan)
qui nous donne ces renseignements:
« Assistent au convoi avec leur père, Me Maurice, Guillaume,
Catherine, Barbe Scaffunec, Me Yves Hamon et Marie ScafIu­
nec, Messire Louis Lalauret, recteur,et l'abbé François Grall, ))
peut-être frère de la mère. (1).
Guillaume Le Scaffunec sera prêtre; Maurice, notaire
comme son père et sr de Guernamprat, épousera une fille noble
Claudine de Lesmais (2); la sœur Catherine épouse Guillaume

Hamon (Trébrivan, 4 jall\'ier f690) notaire royal, sr de Kergui-
rizin, dont les deux fils seront avocats en Parlement. Leur -
sœur Anne-Thérèse Hamon, deviendra femme de Yves Guillou,

sieur de Stangalen, dont les trois fils se parant des noms de
Stangalen ,-Kervenoal, et Goazangol deviendront: l'aîné, procu-
1'eur du roi, puis sénéchal de Carhaix (3), et les autres, avocats

en Parlement; et l'un d'entre eux prendra les mêmes armes que
les Le Guillou de Lanhouarvé, admis à la réformation de 1670.

Les Scaffunec et leurs enfants nous paraissent une de ces

honnêtes familles, comme il y avait beaucoup, vivant tran-
quilles sur leur patrimoine qu'augmentent le travail et
l'ordre; fournissant des prêtres à l'Eglise- , des officiers aux
justice5 seigneuriales du voisinage; en relations avec les

nobles de leurs cantons; rie les jalousant pas, comme on imagi-
ne aujourd'hui, estimés d'eux et contractant même mariage
avec des filles nobles quelquefois peu aisées (4); enfin mon­
tant dans l'échelle sociale.

(t) Marie ScafIunec, sans doute femme de Yves Hamon, est elle une troi­
sième sœur ou une tante paternelle de la décédée?
('2) Elle semble sa seconde femme. Maurice est mentionné comme époux
de Marie Le Couteller, ayant une maison à PlouguernéyeJ. Arch. du Finis­
tb·e. A-15-(en-1676).
(3) Nous les retrouverons plus loin.
(4) Une preuve entre plusieurs; le 8 mai iG86, lTreffrin) Messire Olivier

Voyez ici l'exemple de cette progression. Louis Le

Scaffunec est né au milieu des champs que laboure son pèti.
Il devient notaire et il a son étude au village natal. Un de
ses fils est prêtre, l'autre succède à son père et une fille épouse
un notaire royal. Ses deux fils sont ayocats en Parlement, et
leur sœur épouse un avocat; les trois fils seront avocats et
l'un d'eux sera procureur .du roi puis sénéchal de Carhaix.
Or au XVIIIe siècle, la différence est grande entre le notaire
de campagne et l'avocat. La profession de notaire, quelque
utile qu'elle soit, emporte dérogeance : au contraire non seule­
ment on reconnaît à l'avocat (comme au médecin) « la noblesse

de l'esprit )), mais, par toute la France, le noble peut « militer

comme avocat, » sans déroger (1) .

Mais Madame Corret, veuve de M. de Penandl'eff, ne connaît
plus les Scaffunec! Ces proches parents de son mari
n'apparaîtront auprès d'elle que dans les « assemblées de
parents » (les conseils de famille). Et, quand le sénéchal
appellera les Scaffunec et leur enfants au nombre des six
parents plus proches, il se conformera à la Coutume et non

aux désirs de Madame CorreL. Nous "errons cela plus loin.
(A suivre).

J. TREVE DY,
ancien président du Tribunal de Quimper .

de la Bouxière, cbef de nom et d'àrmes, seigneur de !{ernévez, tient un
enfant sur les fonts, avec « honorable fille» Barbe Le Seaffuncc.
Mathurin Corret époma deux nobles, Qtiellenec et Suasse. Maurice
Le Scaffunec épouse une Lesmais.
(1) Michelet a écrit d'Olivier Corret : II. Il était avocat quoique noble et
.~eiyneur de 1 imperceptible seignetwie èe KerbaulIret, petit jarliin des
moissons (de Carhaix apparemment). C'était un de ces nobles nécessiteux
auxquels l'indulgente Coutume de Bretagne permettait sans l1él'O!lel', de
plaider, naviguer, faire le commerce» (La Tour d',11lvcTyne dans les SJldats
de la R.évolutlOn, p. 40 et 4.1). Réponse: 1

Corret n'était pus noble, :2"
Kcrbauffret, très petite tenue n'était pas seigneurie. 3° La Coutume de
Bretagne n'a pas un texte relatif à la dérogeance. 4" Dans toute la France,
les avocats ne dérogaient pas. 5" Le commerce. de mer fut permis sans
dérogean~e par édit d'août 1669. 6" et If~ I:ommerce en grQs pal' édit de
décembre 1701. Six erreurs certaines.

357 ' -

DE'UXIEME PARTIE

Table des mémoires et documents publiés en 1905

III

VII
VII bis

VIIl

l'AGES
Excursion dans la commune de Ploujean par
M. LOUIS LE GUENNEC ........ ; . . . . . .. . ... . 3

Vagabonds de Basse-Bretagne au XVIII" Siècle
. par M. l'abbé ANTOINE F AVÉ . .............. . '. M5
Le Prieuré de Saint-Tutuarn ou de l'Ile Tristan
près de Douarnenez, par M. BOURDÈ DE LA
ROG ERIE ......... " ... ............... ; i8,148, 206

Nou velle décou verte (dé substructions et d'objets
de l'époque romaine) faite à Carhaix par M. P. DU
CHATELLIER . . . ............................ .
Campagne d'Islande sur le Château-Renaud
(1890), extrait du livre de bord de M. le Com-
mandant MARTIN (planche) ................. .
Toponymie de la Montagne d'Arrée par
M. CAMILLE V ALLAUX (carte) ............... .
Note sur l'occupation militaire de l'Armorique
par les Romains (suite) : IS par M. JOURDAN
DE LA P ASSARDlÈRE /3 cartes} ..... , ........ .

Une campagne de huit jours, récit d'un général
et d'armes de la Sénéchaussée de Lesneven en
1766, par M. J'abbt'> ANTOINE FAvÉ ......... ' .
Trois vases en argent découverts à Plovan (Fi-

nistère), par M. P. DU CHATELLIER (planche).
Les chapelles du Cap-Sizun (suite) : La cloche de
Monsieur SaincVrhey, par M. H. LE CARGUET.
Les Eglises et Chapelles du diocèse de Quimper
(suite) ; doyennés de Lesneven et de Plabennec,
par M. le chanoine PEYRON .................
Les peintures de la chapelle de la Madeleine à
Pont-}, Abbé, par 1\1. le chanoine'AsGRALL.. . .. ,

114

124
135

164
169
183
201

XII

XIlI
XIV

Le prieuré de Saint-Tutuarn ou de l'île Tristan
(suite: voirN°I), par M. BOURDE DE LA ROGERIE.
Les combattants bretons de la guerre améri-
caine, pa~' M. H. DE KERGUlFFINAN-FuRIc .....
Monument.mégalithique et "Coffret à Penfoënnec
en Elliant, par M. DE VILLIERS DU TERRAGE
PAGES
206

(planche) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273
XV La famille de La Tour d'Auvergne-Corret, par
M. J. TRÉVÉDY. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 280; 346

XVI La misère et les miséreux au Minihy de Léon:
San tee, par M. l'Abbé A. FA vÉ ............ 304

XVII Le prieuré de Saint-Tutuarn ou de. l'île Tristan
(suite: voir N° 1 et XII), par M. BOURDE DE
LA ROGERIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ... 330

XVIII La famille de La Tour d'Auvergne-Corret, (suite,
voir N° XV), par M. J TRÉVÉDY............ .346

FIN

Quimper. ' Imprimerie A. Leprince