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Bulletin SAF 1905


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Excursion dans la commune de Ploujean

Louis Le Guennec

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Société Archéologique du Finistère - SAF 1905 tome 32 - Pages 3 à 44

EXCURSION DANS LA COMMUNE DE PLOUJEAN

L'une des plus riantes communes du Trégorrois finistérien,
ce Ploujean, composé, d'après M. de Blois, «d'One ' alter­
native de jolies collines qui, pour la plupart,'se déroulent sur

la rive droite de la rivière de Morlaix». Enserré entte deux.
longs bras de mer sinueux et profonds,avec sa ceinture
d'épaisses futaies, les grasses prairies où s'élaborent les
éléments de son célèbre beurre, et le fertile plateau d'où

émerge au loin, par delà les hauts talus empanachés d'ajoncs,
l'aiguille roussâtre de ce vieux clocher que le bienheureux
P. Quintin saluait toujours d'une prosternation, pour remer­
cier Dieu d'avoir été fait chrétien à son ombre, Ploujean a
été apprécié par maints artistes et chanté par maints poètes
- sans parler des gourmets. Cependant les archéologues l'ont
jusqu'ici quelque peu négligé, bien qu'il en ait abrité d'aussi
aimables qu'érudits sous les feuillées de Keranroux . et du
Launay. Aussi n'est-il pas, croyons~nous, trop tard pour
venir soumettre à la Société le résultat de nos explorations,

également intéressantes, à travers ses fraîches campagnes
et parmi les poussiéreuses archives de sa mairie, si obli­
geamment ouverte5 à notre curiosité.

A peine a-t-on quitté Morlaix et franchi le ruisseau de
Troudousten, en pénétrant dans la eommune par le quai de
Tréguier, qu'apparaît à droite, parmi des jardins, un ancien
édifice à grandos toitures. Ce sont les restes du couvent
des Capucins, fondé en 16H par René Barbier, seigneur
de Kerjean, et son frère cadet Léonard, qui y fit profession,
sur la terre du Stivel, appartenant à leur mère Catherine

de Goezbriand, mariée en 1~89 à François Barbier. Philippe­
Emmanuel de Gondy, duc de Retz et châtelain de Bodister,
fief dont relevait la paroisse de Ploujean, en posa la première

pierre ('1), et la dérlicace de l'église fut faite le 2 août 16'18
par l'évêque de Tréguier, Pierre Cornulier. Le fameux Père
Joseph d'Audierne était en 1737 . gardien de ce couvent;

il Y présida cette année à l'abjuration d'un commerçant
livorlien, Johann Ramm ·Joaissoh I( de l'héréSie luthérienne
dans laquelle il avoit esté élevé dès son jeune âge, entre les
mains du R. P. Marie de Dornac, canton Suisse, de la
. communauté de Morlaix ». En '1790, lors de la descente qu'y
firent les officiers municipaux de Ploujean, le monastère ne
contenait plu~ que huit religieux (2), dont le gardien était le
R. P. François de Morlaix, dit dans le monde Le Rouge de

Guerdavid, et une affiliée, sœur Jeanne le Minihy, qui
recevait les aumônes .
. L'inventaire dressé à cette occasion mentionne « trois
c - orps de logis et une église renfermant le cloître, une petite
maison et une cour pour loger la sœur affiliée, un bocage de
différents bois de ha ute futaye, un jardin à deux terrasses

et une allée d'ormeaux conduisant du perron à la croix ... une
bibliothèque composée d'environ 2.000 volumes vieux et dis­
para tes, sans autre manuscrit qu'un cahier relatant les décès

(t) Albert le Grand (Catal. des évêques de Tl'éguie1', p. 35'2-:353. édit.
de 1659) n'indique pas la date exacte de cette cérémonie, mais une note

que nous ayons relevée sur un ancien registre de i)aptêmes de Saint-Melaine
la précise en ces termes : (' Lan mil six cenlz ume, le vingt uniesme
« juing fut planté la croix pour les Uabucins au bois du Stivel, estant
fi la procession general accompClgne de Monsieur le duc de Hais, Mons" de
« Cüatenisan, Mons' cie Kerjean, fondateur, Mons" de ..... et aultres gen­
(( tilzhomes et infimes et toutz les bourgeois de Morlaix, ' estant lors
« vicaire de Saint-Melaine Goulfen GoU )J.
('{) Parmi lesquels « le Rhérend Père Joseph de RoscoU, prédicateur
missionnaire, dit dans le monde Mével, âgé cie 6) ans )J, qui fut exécuté
quatre ans plus tard, à Brest, le 30 juillet 1791, pour avoir secrètement
célébré la messé dans une maison du quartier des Hàlles, à Morlaix . .

de a9 soldats enterrés dans l'enclos en : 1779 que la 'ma- isùn
était prisa pour hôpital.._, six petits calices, un so'leil et un
ciboire, vingt ornements de diverses couleurs sans galon
d'or ni d'argent et le simple nécessaire en linge d'église ...

quelques tableaux dans le réfectoire et l'église, de peu ' de
valeur .. , )). Les moines furent expulsés en 1792, et l'autorité
militaire transforma leur demeure en caserne; elle garda
cette destination jusqu'après 1838, époque vers laquelle on
démolit l'église, qui avait vu, le 21 juillet 1750~ Mgr Charles
Guy le Borgne de Kermorvan, évêque et comte de Tréguier,
bénir l'union de Messire Jacques Madeleine Artur, seigneur
de Keralio et Lezversault; avec demoiselle Marie Josèphe
Boudin de Tromelin. Il ne subsiste plus aujourd'hui du cou­
vent qu'un bâtiment devenu propriété particulière, et le
portail de la cour, daté de 1612.
Au dessus de l'enclos des Capucins s'élève, pittoresque­
ment campé sur ses vieilles murailles frangées de lierre, le -
manoir de Penanru, reconstruit au dix-septième siècle.
C'est à Penanru, dans un édifice antérieur, que mourut le
négociant et corsaire morlaisien, Nicolas de Coëtanlem, sieur
de Keraudy, vieux soldat de Saint-Aubin-du-Cormier et
constructeur de La. CordeLière. Le 'il avril 'la 18, il Y avait
fait son testament (1), et, pour expier les gros et men us
méfaits de son existence aventureuse dont MM. de la
Borderie et Dupuy nous ont ·dévoilé de caractéristiques épi­
sodes il avait comblé de legs et de fonda Lions toutes les
églises et chapelles jouissant à la ronde de quelque renom­
mée. Son tombeau. armorié de ses armes mi-parti avec
celles de sa mère Catherine Calloët et de SR femme Méance
Le Borgne, se voyait encore en 1679 sous la quatrième arcade
et enfeu du côté de l'évangile de l'église des Dominicains de

. (1) V. 1

fascicule du Bulletin de la Société d'Etudes scientifiques dit Fi­
nistàede 1885.

Morlaix (A-19), mais il a disparu pendant la Révolution .
L'aînée de ~es quatre ' filles, Marguerite de Coëtanlem,
héritière de Keraudy, Stivel, Penanru, Kerivalen, Triévin,
apporta ces terres par alliance dans la maison de Goez­
briand, en 1500. Au siècle suivant, Penanru avait passé à la
famille Quintin. Pierre Quintin, sieur de Rochglas et de
Penanru, maire de Morlaix en 1616; épousa en 1609 Chris­
tine Nouël, et en eut deux fils; 1

Bernard Quintin, écuyer,

sieur de Kerhuon, Rochglas, Penanru, marié en 1636 à
{\nne Salaun, et maire de Morlaix en 1643; il décéda
à Penanru, sans enfants, le 13 décembre -1657 et (( ·fust son

corps enterré en l'église des Pères Récolletz du Cuburien- ,
evesché de Léon. » 2

Alexandre Quintin, sieur de Ker$cau,
époux en 1641 de Marguerite Tournemouche, dame . de Tro
griffon, dont Pierre-Joseph Quintin, sieur de Penanru et de

Trogriffon, capitaine de la paroisse de Ploujean en 1660, qui
vendit avant ' 1670 la terre de Penanru à noble homme René
Bonnemetz, sieur du Bois, maire de Morlaix en 168'1. Le fil· s
de ce dernier, Jacques Bonnemetz, receveur des fouages de
l'évêché de Tréguier en 1691, laissa de sa femme Guillemette

Cozten, César-François Bonnemetz, sieur du' Neckoat, sec ré-

taire du Roi en 'l734et Jacquemine, héritièrè de Penanru,
mariée le 2L novembre 1713, à Saint-Mathieu de Morlaix, à
Messire François-René de Kerouartz, chevalier seigneur de
Lézarazien. .

. Vers 'l700, la Ferme du Tabac loua aux Bonnemetz le ma­
noir de Penanru, pour y établir une manufacture . . Celle-ci, l'une

des plus anciennes de France, existait d'ailleurs auparavant
- on ignore en quel endroit de Morlaix- car dès ' 1689 le's
enfants recueillis à l'hospice travaillaient pour elle. Toutefois,
c'est seulement le 11 juin 1700 qu'apparaît sur .les registres
paroissiaux de Ploujean la signature de noble homme
François Dupleix, conseiller du Roi et son receveur général

d _ ans la Ferme du Tabac, qui s'intitule en avril '1706 ( Directeur

général et Inspecteur de la manufacture royale de Morlaix·)).
Originaire, ainsi que sa femme Louise de Massac, « de la ville
de Landrecies dans le Hainaut n, François Dupleix devait
étre le propre oncle pa ternel du fameux Joseph Dupleix,
gouverneur de Pondichéry et des Indes Françaises, né dans
cette même villl~ en -1697. Il · eut pour successeur, en 17'18,
Jean-François Baronnet, sieur de Richemont, qui épousa une
MorIaisienne, Marguerite Cottonec de Penyern. L'pxdmen
des cahiers d'état-civil révèle à cette manufacture un personnel
très important; il n'y manquait même pas une impi'imerie~
dirigée par maître Antoine Camarec, « imprimeur de li!
Compagnie dans la Ferme du Tabac ». Le monopole de la fabri­
cation appartint en effet, de 1723 à 1747, à la Compagnie
des Indes, .qui en retira des bénéfices considérables; aussi,

constatant l'insuffisa nce des bâtiments occupés. par son
établissement à Penanru et Troudousten. fit-elle en 1730 .

. commencer au Clos-Marant, sur la rive gauche du port qe
Morlaix, la construction de la manufacture actuelle, achevée
en 1736. Quelques années plus tard, les Kerouartz vendirent

Penanru à noble maître Hyacinthe Marie Tilly de Chefdubois, .
avocat au parlement de Paris; ce dernier tenta inutilement,
en '1764, d'y ouvrir un collège. La terre de Penanru a dep~is
appartenu aux familles Gratien c1ê Saint-Maurice; Querret,

du Bourquet de Quenguen, du Laurens de la Barre, Homon,
et enfin de la Berrurière de Saint-Laon.
Les seigneurs de Penanru avaient leur banc dans l'église

collégiale du Mur, joignant le pignon de l'autel de N. D. ~e
Pitié, « armoyé mye partye d'un lion (armes des Quinti n) et .
a l'autre partye de trois fleurs de lys 2 et 1 et en abisme une
étoilLe (armes des Corran) avec le collier de l'ordre». Ce

banc était prétendu en 1679 par le sieur du Bois Bonnemelz
(A-t9).
Le populeux faubourg de Troudousten, qui s'étend à .l'est

de Penanru, doit son origine à une vieille « maison noble.»

, qui montre encore, au bas de la montée de Kerscau, son
portail en ogive et sa tourelle carrée se dégageant du tbit, et à la
chapelle de Saint-Sébastien, à laquelle Nicolas de Coëtanlem
légua , ung escu en Hit8. Cet oratoire n'existe plus depuis la
Révolution; sa fontaine consacrée, devenue lavoir commun,
est surmontée d'une statue de Vierge-Mère, d'allure gothique;
une autre statuette de pierre orne une façade, dans la partie
basse du village. De l'installation à Penanru de la manufacture
des tabacs date la prospérité de Troudousten; alors furent

bâties cette file de vieilles maiso'ns grises qui s'échelonnent au
versant du plateau, formant la montueuse rue du Port, pour
-y loger les ouvriers et leurs familles, et lorsqu'on tra nsféra

l'établissement au Clos.:.Marant, le hameau n'en continua pas
moins à croître. Il comptait déjà 250 habitants en 1780.
A l'extrémité du quai de Tréguier s'amorce le cours Beau­
mont, qui nous fait longer le parc de Coatserc'hô et ses
rochers, couronnés d'arbres séculaires, d'où jaillit l'historique
Fontaine des Anglais, de sanglante mémoire. On trouve
dès 130 l un Benoît de Coatserc'hô garde de la forêt de
Cuburien pour le vicomte de Léon; au seizième sièclé, cette
terre appartenait aux du Plessis. Jean du Plessis, sieur de
Coatserc'hô, maire de Morlaix en 1587, était le frère aîné de
. Guillaume du Plessis, sieur de Kerangoïf, effronté pillard
qui profita aes troubles de la ligue pour s'emparer du château
du Taureau et en rester neuf ans le maître, arrêtant au
passage les navires et en vendant à son profit la cargaison,
' rançonnant de notables bourgeois, faisant saisir à Morlaix
même ses ennemis, qui eut l'honneur de recevoir des lettres
autographes de Henri IV, ne délogea que sur un ordre formel
de lui (1604) et s'en revint à Morlaix présenter à la commu­
nauté une note formidable de dépenses; il lui extorqua environ
28.000 livres, mais ne jouit pas longtemps du produit de ses
rapines, car il mourut à Coatserc'hô le 3l mars 1606 et fut
inhumé le lendemain dans l'église de Saint-Dominique .

Son neveu Jean du Plessis, sieur de Coatserc'hô, 'époux de

Marguerite le Cozie, décéda le 28 août '16t8, laissant pour
fils François du Plessis, marié en ' 1642 'à Renée' de Lanloup,
dont Marc-Toussaint du Plessis, écuyer, sieur de Coatserc'hô,
qui épousa à Saint-Melaine, le 26 novembre '166:5, Marie
Nouël du Trohoat. Leur petit-fils Jean du Plessis et ~a femme
Anne-Charlotte du Boisboessel vendirent vers '1740 la terre et

seigneurie de Coatserc'hô (en s'en réservant le nom) à Jé1cquès
Guillaume Bou_ din, sieur de Tromelin, Kerhallic, Lannuguy,
époux de Marie-Françoise le Diouguel de Penanrun. La famille
Boudin a construit le château actuel, où naquit en 177tet

mourut en t842 le lieutenant-général comte de Tl'Omelin .

Pendant qu'il chouannait sur les côtes de Normandie, en .

. attendant d'aller, comme major des troupes turques, arrêter
Bonaparte devant les remparts de Saint-Jean":d'Acre, sa mère
née du Buisson, put continuer à résider à Coatserc'hô; grâce. à
la protection du savant physicien et astronome de Rochon, qui
avait épousé une de ses filles et installé au manoir un atelier,
mentionné pa~ Cambry (1) pour 'la fabrication .de réseaux et
de trames en fils de fer. Le général de Tromelin et son fils,
député de Morlaix sous le second Empire 'enrichirent leur
demeure de précieuses collections, aujourd'hui dispersées La
propriété de Coatserc'hô, mise en vente en 1892, a été acquise
par la famille Tardieu de Maleyssie. ,
Il existe encore, au haut du parc, un manoir RenaissanCe
édifié par les du Plessis et Jort bien conservé; sa façade,

percée d'une'jolie porte à fronton et garnie de lucarnes en hémi-
cycle, s'appuie à droite sur deux tourelles accolée~, . J'une
carrée, l'autre ronde. Un fragment voisin du vieux mur
d'enceinte conserve aussi une tour basse percée de meur­
trièr"es. Des avant '1679, les du Plessis avaient vendu cette
partie de leurs terres, ainsi que leurs prééminences de l'église

(1) Voyage dans le F'inistàe, p, 4.

de Ploujean, consistant en la deuxième arcade et enfeu, banc
y élant, diI côté de l'évangile, à noble homme Nicolas le
Diouguel, sieur de Tromeur, conseiller du Roi à l'Amirauté

de Tréguier en 1692. Un banc et une tombe armoriée, devan t
l'autel de saint Etienne et saint Laurent, en l'église de saint
. Melaine dépendaient également de Coatserc'ho (A-19).

La route de Lannion sépare les bois de Coatserc'ho de ceux
du Neckoat, parmi lesquels se montrent les poivrières et les
ginuettes d'un beau château moderne. Il y avaJt là jadis deux
manoirs, Neckoat et Kernec'hcoat. possédés vers 1580 par les
Kergournadec'h de Kermoal et appartenant au siècle suivant à
la famille C)roller. Yves Coroller, sieur de Kerdanneau, maire
de Morlaix en -1641, épousa en 1633 Guillemette le Borgne et
en eut dix-huit enfants dont l'aîné, noble homme Philippe

Coroller,sieul' de Kerdanneau,sénéchal du marquisat de Guer-

rand, Guicaznou et Bodister, résidait en '1676 à son manoir
de Kernec'hcoat; sa postérité s'est éteinte en 1752 dans
Kermel. Son frère cadet Joseph Coroller, sieur de . Neckoat,
maire de Morlaix en 1679, 'juge consul en 1684, ne laissa que
deux filles, mariées dans les familles Boudin de Launay et
Michel de Hosconnet, et la terre de Neckoat passa aux Bon­
nemeLz, puis aux Kerouartz, sur qui elle a été s~isie
nationalement. C'est au château de Neckoat que résidait et
que mourut en '1887 le général Le Flô, ancien ambassadeur
en Russie, j'unè des gloires contemporaines de la Bretagne.
Voici Keranroux, la plus belle de toutes ces propriétés qui,
sans interruption, bordent les deux rives du Dossen en aval
de Morlaix; désormais, nous longerons jusqu'à Ploujean le
mur d'enceinte de son vaste parc, au milieu duquel un
château du dix-huitième giècle, assis à mi-pente, détache sa
blanche façade et ses combles élevés sur un rideau de futaies. .
Eon . de Keranroux était en 1301, garde de la forêt de

Cuburien ; un autre Eon de Keranroux fait montre en 142'1
parmi les gens d'armes de la retenue de Bertran.d de Dinan .

La réformation de ' 1427 à Ploujean mentionne'Jehan Estienne,
sieur 'de Keranroux. En H:i43, cette terre appartenait à Alain

de la 'Forest, père d'Yves, sieur de Keranroux et Coatgrall,
qui épo1Jsa Catherine Marc'hec, dame de Guicquelleau. Leur
fils Charles s~ maria à Françoise de Kerc'hoent, dame du
HerJan ,et de Boisru ;l.ult, dont Françoise de la Forest, dame
héritière de'Keranroux, Coatgrall, Guicquelleau, Herlan, etc.,
mariée vers 1600 à Messire François du Parc, seigneur de
Lezversault. Il mourut au manoir de Guicquelleau près
Lesneven le 26 mars 1629, et sa femme à Keranroux le

~ avril 1622.

Ronan du Parc, seigneur de Lezversault, Keranrou.x, etc.,
leur fils aîné, épousa '10 Renée Le Moyne, morte en 1627;
2° Renée Le Cardinal, et décéda le 17 ocLobre '1636, laissant du '

second lit François du Parc, seigneur de LezversaulL, né le
9 février 1629, mort le 'i3juin 1658, marié v~rs 16~2 à Marie­
Olive de Clisson. Il en eut deux fils, Olivier et Claude:-Joseph ,
Olivier, maintenu en qualité d'écuy~r et chevalier d'ancienne

extraction par'arrêt du 10 juillet 1669, capitaine d'e dragons
et chevalier de Saint-Louis, se 'qualifie en 1686 de seigneur
comte de Lézerdault" et en 1691 de marquis de Lézerdaultet

de Keranroux. Il mourut à Paris avant 1696 sans avoir
d'enfants de sa femme Jeanne-Françoise-Elisabeth de Kerrhel,
qu'il avait épousée en Hi73. Cette dernière, liée avec Madame
de Maintenon, qui lui donna son portrait,fonda en 1703, dans
son hôtel de Tréguier, l'ordre des Dames Paulines, voué à

l'instruction des jeunes filles pauvres, et disparu depuis
la Révolution (1). '
Le frère cadet d'Olivier du Parc, Claude Joseph, hérita de
lui. Il était en 1705 capitaine des milices garde-côtes de la
paroisfle de Ploujean, ' et mourut en .'1707 au manoir de
Keranroux. ,De SOi}' mariage avec . Charlotte Rogon de 'Carca-

'. (1) V.l'EI/lise de Bretagne, par l'abbé l'resvaux. p. 374. et 6'28, -630.

radec, il laissa cinq enfants, dont deux survécurent, Joseph
Gabriel, comte de · Lézerdault, et Claude, demoiselle de
Lézerdault. Le premier épousa d'abord Marie-Josèphe­
Ursule de Kersulguen, morte à 20 ans, le 28 mai 1727, puis
Marie-Anne-Gabrielle de Cleuz du Gage, qui lui donna un fils~
Charles-Marie-Gabriel dù Parc, seigneur de Lézerdault, et
marquis de Locmaria et du Guerrand par . donation et
testament de son cousin Jean-Marie-François du Parc,

marquis de Locmaria, mort en 174Q, avec lequel s'éteignit la
branche aînée. Ainsi devenu possesseur d'un des plus riches
tlatrimoines de Bretagne, le jeune marquis ne sut qU'f;'n
gaspiller follement à Paris les magnifiques revenus et s'en
revint mourir à son château de Guenand, le 29 ' décembre

1769, sans avoir eu d'enfants de son alliance avec Marie-

Louise de Ploësquellec. .
Une grande partie de ses biens fit retour à sa tante Claude
dU ,Parc, déjà sexagénaire, qui vivait pauvrement à Morlaix
d'une modique pension. Ayant été plus d'une fois secourue
dans sa détresse par la famille Caradeuc de la Chalotais, dont
elle était parente, elle l'en récompensa royalement en offrant
g ,ussitôt le domaine de Keranroux et dépendances à sa petite
uièce Sophie de Caradeuc, fille du fameux procureur général et
femme de François-Marie-Gabriel de la Fruglaye de Kervers;
ceux-ci bâtirent en t77'2-73 le château actuel, saisi pendant la
Révolution comme bien d'émigré, mais rendu, après l'amnistie
de 180.2, à leur fUs M. Paul-Emile, comte de la Fruglaye, ma-

réchal de camp et pair de France sous la Restauration, anti-
quaire et géologue renommé. Il y décéda en 18~0, laissant cette
terre à sa fille, Madame Nompère de Champagny. Keranroux
appartient actuellement, par l3uccession, à ]a famille de
Gouyon de Geaufort. On y admire le beau musée créé par le
comte de la Fruglaye; dans le parc se voit une ruine factice
de chapelle. fantaisie romantique qui a servi de prétexte à un
curieux groupement de débris anciens: écussons aux armes

des Barbier et des .la Forest celles-ci pleines et. parti d'un
vairé statues de pierre, sculptures mutilées, jusqu'au tom­
beau d'un homme d'armes étendu dans sa cuirasse· de granit
sur la dalle funéraire; ce mausolée, provenant de' l'église ge

plounez près Pai m pol ('1), y avait été érigé à Gilles de La noé,.sieu l'
de Couespeur, la Villefebvre, le Plessis, qu'une anciennegénéa-

logie de la mai son Le Borgne dit fils du sieur de Couespeur,
capitaine dans les troupes de la Ligue et de Marguerite Le

Véer, dame de Coëtnévénoy, que celui-ci contraignit à l'épou-

ser après s'être emparé du châtea u de Coëtnévénoy et y a voir tué
son premier mari, Jean Le Borgne, sieur de I(erfalais. '
Les seigneurs de Keranroux ' possédaient la chapelle située
à gauche du maître-autel' de l'église de Ploujean, dite en '1622
de Sainte Catherine, en 1679 de la ·Trinité. La vitre contenait

leurs armes, 1

d'argent à trois ju, melles de gueules, qui est du
Parc, 2

parti au 1 de du Parc, au 2 coupé au 1 d'or au lion de
sable, à ln fasce de gueules broch.ant qui est Huon de Herlan,
au 2 d'azur à six quintefeuilles d'or, qui est la Forest, Ils y
avaient leur tombe sous une arcade, et deux bancs joignant les

balustres du chœur. De Keranroux dépendait encore la seconde
vitre de J'autel de la Trinité, en l'église collégiale du Mur; on
y voyait en 1679 trois écussons, le 1

écartelé de du Parc,
Huon, Clisson, de la Forest; le 2

de la Forest plein; le 3" parti
de la Forest et d'hermines à la quinteFeuille de gueules, qui doit
être le Lagadec « et dans ladite vitre sont.plusieurs priantz et
priantes armoyez des mesmes armes et au dessoubz est une
arcade chargé de deux escussons en bocze des me. smes
armes ... et dans ladite arcade, il y a un banc ... au dessoubz ,
duquel il y a des tumbes armoyez ». Près du pilier où s'ap­
puyait la chaire à prêcher était aussi un autre banc (l apparte-

nant au sieur de Lezerzault du Parc, armoyé de ses armes, el
de celles de Keranroux » CA. 19). .
(l( Antiquités des Côtes-du Nord, de Fréminville, p; 121-122.

Après -avoir gravi une longue pente; on ·parvient au bourg

de Ploujean,' posé au rebord du plateaU, autour de sa vieille

église, édifice peu monumental, mais non indigne d'une visite.
La nef. formée de rustiques et massives piles rectangulaires
SGutenant des arcades romanes très basses, remonte au moins

ail onzième siècle, si même elle n'est pas antérieure aux inva-
sion" normandes. Un arc ogival surmonté extérieurement d'un

. clocheton la sépare du chœur, qui semble dater du quinzième
siècle, avec son chevet droit percé d'une grande fenêtre cen­
trale garnie d'une rose au tympan, et ses colonnes hexagonales
à chapiteaux. Le clocher, flanqué d'une tourelle d'escalier à
' dôme el terminé par une flèche fut reconstruit en 1586, ainsi
' que le portail, dans le style de la Renaissance; une fenêtre de
']a nef est encore plus moderne, et enfin le porche et une partie
des murs attenants ont été récemment refaits.

Les bas-côtés conservent de's restes de frises sculptées et
peintes, têtes grotesques grimaçant à travers un enroulement
fantastique de feuillages, de pamp'res, de banderoles et, sta­
luettes munies'd'écussons ou -de cartouches. Dans le lambris
de la chapelle de Sainte-Anne, à droite, se distinguent deux
écussons armoriés, l'un de la Forest, l'autre parti au 1. d'azur

au poignard d'd, rgent en pal, garni d'a}', accosté vers le chef
d'une étoile et d'un croissant d'argent, qui est Danglade de
Kervéno et au 2,de la Forest (1). A la clef de voûte, un ange
tient un autre écusson chargé de neuf mouchetures d'hermines,
et sur le pignon, au dessus de la fenêtre, on lit en caractères
gothiques la devise de la famille de Kersulguen : Laissez dire,

surmontant un blason frusté. Aubas du même collatéral sont

]esfonts baptismaux; coiffés d'un baldaquin écaillé que sup-

portent quatre colonnettes torses enguirlandées de vignes et
offrant cette inscription gravée sur la corniche.
Fait du ternpsJ anH1'aouezecq et JanPTigent (abriques: 1660.

(t) Nous ne connaissons pas cette alliance d~s la Forest.

Les orgues sont de la fin du dix-septième siècle, du i'ectorat
de René-Yves Le Rouge, sieur de Pradelan (' 167'1 --1683); ,le

rétable du maître-autel fut refait par M. Bahezre de Lanla,)",
recteur de 1768 à 1791. On remarque encore dans l'église
.quatre enfeus .gothiques, trois à gauche,un à droite, cr,
dernie'r contenant une tombe plate bla,;onnée de deux écussons
indéchiffrable." jadis des dépendances de la terre de Launay,
et une dalle tumulaire aux armes de Goezbriand, d'az ur à la

fasce d'or. Les statues sont presque toutes modemes, ainsi
que les deux cloches, qui ont. en 1839 et 1870, remplacé
deux autres cloches du dix-septième siècle fondues à la
Révolution. La petite avait été bénite le 2'1 décembre ' 161:3 par
M essire Çhristophe Marcadé, recteur, et nommée René par les
très illustres jeunes gens très noble René de Goezbriand,
chevalier (miles torquatus), et Anne du Parc, en ,présence

d'une foule de paroissiens (il. La grande cloche, bénite le
23 septembre 1695, offrait les armoiries des du Parc, seigneurs

de Bodister, et reçut de noble homme Jean d'Alançon, sieur des
Essarts, et de demoiselle Marie-Anne Brénugat, dame de la

Sauldraye, le nom de Jean-MaTie-Anne.
. François Bouyn, sieur de Rains, maître à la Chambre des

C omptes de Bretagne, chargé de réformer le domaine royal
dans les sénéchaussées de Morlaix et Lanmeur, descendit à
Ploujean le 7 novembre 167~ pOUl' faire état des prééminences
de l'église paroissiale et de la chapelle, aujourd'hui disparue,
de Notre-Dame. Le procès verbal (2) qu'il dressa nous apprend
que la maîtresse vitre contenait, en supériorité, les armes de
France et de Bretagne, puis quatre écus, sons aux armes des

G oezbriand, parti de Coatredrez, de Boiséon, du Ponthou et

de la Boissière-Plourin (3) Dans les panneaux étaient quatre
(1) Acte latin des registres paroissiaux. .
(2) Mss. A. 19 des Arch. départ. f' 144 -1i9.
(3) Les généalogies des Goezbriand n'indiquent point d'alliance avec les
la Boissière. ' ,

-- l '1 U

effigiés de 7J'rifint'z avec des 'prie-Di: eu, 'aux' mêmes armes
pani 'dePoothou, de' Toupin 'et de' la Boissière; ' enfin, au

bas du vitrail, cinq écussons aux armes des Métiadec, Ker-
sulguen, Qu'intio, Le Lévyer et parti de 'Mériadec et de
TrogofI. Ecuyer Chades du Parc, sieur de -Kerguiniou, pro­
cureur fiscal , de Guicaznou et faisaflt pour le marquis de
Locmaria, seigneur de Bodister, protesta contre l'usurpation, '
pal' les'Goezbriand, des droits de fondateurs et premiers préé­
minenciers, et représenta au commissaire un arrêt de la
Cour du 1:7 - octobre 1673 ordonnant l'enlèvement, aux frais

du marquis de Goezbriand; des écussons à ses armes placés
dans la maîtresse vitre, ainsi qu'un autre arrêt du ~6 juin
'167'l maintenant le marquis de Locmaria dans les prérogatives '
de fondateur de l'église, à cause de son fief de Bodister.
La chapelle de Notre-Dame, située dans le cimetière, a été
démolie en 1809" et la statue vénérée de sa patronne, Vierge­
Mère drapée, couronnée et hanchée ' dans la note ' gothique
orn'e actuellement un autel sous le mêrpe vocable, dans
l'église. La maîtresse vitre de cette chapelle, qui passait pour
être l'ancienne Mère-Eglise, renfermait dix écussons aux ar­
moiries de, Bodister (Dinan-Monta filant ), de Goezbriand parti '
de Dinan, de Goezbriand parti de Coëtredrez, de Guicaznou,
Collin et alliances, de Kersulguen, de Goezbriand et de Le
Bihan, et quelques panneaux de couleur où se distinguaient
les effigies de deux priantz portant sur leurs vêtements un mi­
parti de Goezbriand et du Ponthou. La lizière du chœur et de la
nef offrait les blas~ns alternés des Kergariou et des Le Moyne
de Trévigny. A gauche de l'autel était la chapelle de saint
Yves, avec fenêtre aux armes des Goezbriand parti de
Coëtanlem, et à droite, celle de saint Michel, dépendant de
Trofeunteniou; il y avait, au milieu du chœur, une tombe
élevée de la maison de Kergariou. Lors de la démolition, on
y trouva le cœur d'Alexandre de Kergariou, seigneur dudit
lieu, ' gouverneur de Mof1aix, mort à Saint-Mathieu , le .6 mai ,

1592 et inhumé à Ploujean le 5 , juillet suivant; ce cœur,
contenu dans une boîte de plomb, fut rendu par M. de la Fru-
glaye à la famille de Kergariou" .
Le reliquaire ou chapelle de Saint-Roc'h, dont l'existence
est menacée depuis la ~ésaffectation du cimetière en 190.2-03,

est un robuste édifice du seizième siècle percé sur la façade

d'une série de baies en plein cintre que séparent de petites
colonnettes cylindriques, et au pignon est d'une fenêtre à
meneaux éclairant un autel intérieur. On y voit une vieille
sta tue de sainte Marguerite debout 'SUl' la tarasque.
Le premier recteur de Ploujean connu est Hervé Le Floch,
vi va nt en lo~g . Lors de la surprise et du pillage de Morlaix,
en 1~22, un autre recteur de Ploujean, qui se nommait,
d'après M. Charles de Blois, Jehan Piriou . arquebusa ' Ies
Anglais du clocher de Notre-Dame du Mur, dont ilélait
chapelain, et combattit jusqu'à la mort. Parmi les successp,Ul"S
de ce vaillant se trouvent Nicolas Collonges, ardent ligueur
et prédicateur de mérite, mort en '1~94 ; François Le Lévyer,
chanoine de Tréguier, èt archidiacre de Plougastel, mort en
j6l~; Guy Pinart, chanoine de Tréguier, décédé à Saint-:Yle­
laine le ter septembre '1619 ; Christophe le Cardinal, emporté
en 1610 par une terrible épidémie de peste qui décima ses
ouailles; Jean du Parc, sieur de Kermoal, mort en '1671; René
Le Rouge, sieur de Pradf'lan, mort en ' 1683, etc ... En '1790, le
véllérable M. François Bahezre de Lanlay était à la tête de la .
paroisse. Dénoncé pJr le procureur-syndic Denis de Trobriant

pour son refus de prêter serment et le courageux discours où
il exposa ses raisons aux fidèles, il fut arrêté au château du
Guerrand en juin 1792, détenu à Brest, puis à Saint-Lô, ' et
s'en revint mourir parmi son troupeau, le 22 mai 1795.
En quittant le bourg par la route de l'Armorique, on laisse
à gauche, dans un vallon humide et vert, le vieux manoir de
Keroc'hiou . lourd bâtiment aux murs jaunis, daté de 1563 et
orné d'une élégante lucarne. Une tourelle carrée domine la

BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXXII (Mémoires) 2

c6ur;dans laquelle donne accès Un grand portail ogival offrant
les armoiries (une quintefeuille) des Toulgoët, pleines et parti
de ForgeL(lTois croissants) et de Porzpozen (un lion). Une croix

de granit érigée jadis à l'e'ntrée de l'avenue, et renversée sous
la Révolution, présente aussi, sur ses débris relégués dans la

cour de la ferme de Kermellec, la quintefeuille des Toulgoët
mi-parti du lion des Porzpozen. Cette dernière famille apporta

en ' 1509, par alliance, la terre de Keroc'hiou aux Toulgoët.
Marie Toulgoët, filJe et héritière de Jean Toulgoët, écuyer,
·sieur de Kel'véguen, Keroc'hiou, Cleuziou, ' et de Madeleine
de Kermabon, 'épousa d'abord en ·1615 Jean dé Guernisac,
sieur du Band, mort sans enfants, puis Pierre de Kergariou,
sieur de Kergrist, sénéchal de Morlaix en t638, lequel se
démit en · 1649 de cette chalge en faveur de son fils Jonathas,
baptisé en 1624 à Ploujean et marié à Renée Mauricette Le

Gouz. Ces derniers vendirent Keroc'hiou aux Oriot du Runiou
d'où il a passé aux Haudeneau de Breugnon et aux Le Bihan
de Pennelé. De ce manoir dépendaient deux bancs dans l'église

de Ploujean, l'un appuyé aux balustres du chœur, armorié
en '1679 d'un mi-parti de Oriot et de Le Borgne, .l'autre près
de la chapelle du Sacrement, du côté de l'évangile, armorié

de ToulgoëL . ~,
, Un second Keroc'hiou, vieille ferme voisine, appartint aux
Le Bou touiller, Boiséon de Guerrand et Le Lévyer. Jean Le
Lévyer, sieur de Keroc'hiou, était maire de Morlaix en J573'
et conseill er au Parlement en '1588; son fils Tanguy Le Lévyer,
sieur du Meshir, Ii1aire de Morlaix en ' 1629, mourut sans
laisser postérité de sa femme Françoise Thépault, et ce

Keroc'hiou fut aussi acquis par les Oriot du Runiou, qui
revendiquai ent, en 1679, un ' banc placé devant l'autel de
saint Yves, en la chapelle de Notre-Dame de Ploujean, et
timbré du blason des Le Lévyer, d'argent à la face d'aZU1'
surmontée d'une merlette de même et accompagnée , de troi-s
trèfles de gueules. ' .'

De l'autre côté de la route existe le hameau de Kerédern,
formé de deux ou trois anciennes métairies nobles. Maurice
Guillouzou, sieur de Kerédern, prit possession du gouveé-

nement de Morlaix ' au nom du marquis de la Dobiays, le .
9 mars '1693. Messire Hiérosme de Carné, seigneur de
Kerédern, épouse à Saint-Melaine de Morlaix, le 28 novembre
'1654, Catherine Harscouët, dame ùe Kerombeau; lors de la
réformation de '1669, il ré~idait à Plouénan et comparaît en
"1672 dans une revue Prass€e par le duc de Chaulnes, en
qualité de maréchal des logis de la 'compagnie de cavalede du
marquis da Coëtanfao. Son fils Jérôme de Carné, seigneur de
Kerédern, épousa Françoise de Pensornou, dont au moins
une fille, Julitte-Françoise-Eléonore, mariée à Ploujean, le
9 mai '17'19, à écuyer Pierre Balannet, sieurde Kerjégu . Nous
ne savons lequel de ces deux Kerédern a passé ensuite à une
branche de la famille Denis de Trobrian t.

On iaisse' ensuite à gauche les ruines de la petite chapelle
de St Quiriau, où fut célébré, le 27 octobre 1646, le mariage de
François de Kermabon, sieur de Kerprigent, avec demoiselle
Gilette Corbel, dame de Kerochiou. Il n'en subsiste plus que
quelques pans de mur enlierrés, et une fontaine à édicul~
coulant, par sa rigole de granit, jusqu'au doué ombragé de
. vieux frênes.

Devant nous surgit la nue et fauve colline de Trégonezre,
point culminant de Ploujean 95 mètres d'altitude que la

nature a si à propos dressée à l'extrémité de la commune, au
confluent des l ';ivières de Morlaix et du Dourdu, comme un
écran protecteur contre les bourrasques de la Manche. Un
coin de mer scintille à gauche, au-dessus ctes futaies de l'Ar­ morique, et sur la lisière du bois, dominan t un frais vallon,
dort à l'ombre de chênes centenaires u~ ancien manoir ruiné.
Ce fief de l'Armorique était jadis le plus important de la
paroisse; outre leurs droits de hauts justiciers, les seigneurs
du lieu possédaient héréditairement la charge de prévôùi de

Morlaix, et percevaient la septième partie des debvoirs et
co-ust-urnes des foires de ville pendant toute la durée desquelles
le sénéchal leur con~iait les verges de la justice, symbole de
son pouvoir, et les investissait du gouv' ernement de la cité,
avec juridiction plénière sur les habitants (1). D'après A Ibert
Le Grand (2), c'est à l'Armorique qu'aurait débarqué en 382
l'aventurier romain Flavius Ma'ximus Clemens, venu de
Grande-Bretagne pour envahir la Gaule et s'y tailler un

empire; sans s'arrêter même à discuter l'hypothèse du passage
de Maxime à l'Armorique, puisque, d'après l'historien
contemporain Zozime, sa descente euJ lieu à l'embouchure
du Rhin, il ne faut sans doute voir dans cette tradition qu'un
confus souvenir de l'arrivée sur nos côtes, au sixième siècle,
d'un de ces clans domnonéens chassés de leur patrie par .les
hordes saxonl1es.
L'Armorique semble être un débris du beau partage accordé

par Charles de Dinan, sire de Montafilant et de Bodister, à
son frère cadet Jouhan de Dinan, époux de Philippe
du Guesclin, sœur du connétable. « Se lit en certaines
enquestes, dit une ancienne généalogie de la maison de
Lannion (3), que ledit Jouhan de Dinan avoit eu en partage les

terres et seigneuries de Plogano et de Bodister, mais il nen
jouist ny ses cnfentz et successeurs parce que les officiel's de
son aisrié recouvrèrent et emblèrentles lettres dudict partage n.
Sa fille unique Annette de Dinan, dame de l'Armorique, fut
mariée à Jean Foucault, sire de Lescouloùarn, d'un illustre
et vieil estoc de la Marche d'où sont issus les Lusignan, rois
de Chypre, et les ducs de la Rochefoucauld. Eon Foucault,
leur petit-fils, capitaine de Concarneau en ' 1413, chevalier
dans l'armée levée contre les Penthièvre en 1420, épousa
(1) Notes de M. de Blois sur le mss. Daumesnil, Bibliot. mun. de Morlaix.
(2) Catalogue des évêques de Tréguier, p. 306, éd. de 1659
(i:I) Comm uniquée par M. de Bergevin ,

Aliette de Launay, dont Yvon Foucault, sire de lJescoulollarn,
l'Armorique, le Bois de la Roche, banneret aux Etats de 1455.
sergent féodé de Morlaix aux Etats de ' 1462, marié à Jeanne
de Rosmadec-Gouarlot; il laissa un fils, Yvon, mort sans hoirs,
et une fille, Jeanne,qui porta par alliance les biens de sa maison
auX Langueouez. Veuve de Jean de Langueouez, seigneur
dudit. lieu, -elle se remaria à noble et puissant Guillaume de
Penhoët, seigneur de la Marche, Coëtfrec, Kerimel, cité en
tête des nobles de Ploujean à la montre de '1481, à cause du
fief de l'Armorique, possédé par sa femme, et devant le
service militaire en équipement d'homme d'armes ou de
(( lance ».
Des Languéouez,· l'Armorique a passé par mariage aux
Talhoët, puis aux Guengat. Jacques de Guengat et Marie-

Jeanne de Talhoët, seigneur et dame de Languéouez, Lescou-
louarn, etc., la vendirent en 1550 à Yves de Goezbriand,
seigneur dudit lieu, . capitaine de Morlaix en '15:58, dont les
descendants se qualifiaient de barons de l'Armorique et dis­
putaient aux marq~is de Locmaria le titre de fondateurs de
l'église de Ploujean, où ils avaient une tombe haute. Au
dix-huitième siècle, cette terre fut acquise par les Le Minihy

du Rumen, et a depuis appartenu aux Mauduit du Plessis, de
Maczon, Guillemot de la Villebiot et enfin de Lugré. Un
manoir moderne s'est élevé près de l'ancienne habitation,
convertie en ferme, et qui n'offre guère à l'attention du
visiteur que le portail de la cour, à portes cavalière et
piétonne, et les grands murs vêtus de lierre de son jardin.
En gravissant la montagne de Trégonezre par le sentier qui
mêne à Suciniou, on découvre, de sa crête déchirée et venteuse,
un incomparable panorama de terre et d'eau. Au nord, la rade
se montre tout entière, dans son cadre de promontoire~
roussâtres, avec les îles et la côte du Léon; vers le sud, le
pays de Morlaix, vaste cirque creusé de vallons, bossué de
collines, étale aux regards son orographie tourmentée, jusqu'à

i 22 _'

la chaîne onduleuse et bleuâtre de l'Arrée, et l'on y compte
au moins vingt-cinq clochers~ de l'île de Batz à Comanna, de

Plougasnou à Lambader. Sur la pente opposée à l'Armorique,
un grand bois de chênes et de sapins enveloppe et cache le
vieux manoir de Suciniou, type délicieux de gentilhommière

bretonne si bien enfouie dans le feuillage qu'à grand'peine en
émergent les girouettes de ses tourelles. Une magnifique
avenue de hêtres conduil au portail, couronné de créneaux et
adossé à une petite chapelle au toit plaqué de mousses vertes;
à en juger par l'arcature ogivale de sa porte, le corps de logis
principal semble dater du seizième siècle, mais le pavillon et
les deux tours sont moins anciens et ont dû lui être ajoutés
vers 1660, par les Bellin de la Furtays; ·sur le parapet de la

terrasse, un curieux cadran solaire du dix-huitième siècle

offre deux écussons timbrés d'une couronne comtale, l'un
chargé d'une fasc e accompagnée de trois casques de profil, qui
est Chrétien de la Masse, l'autre d'un (J'etté brise d'une fieu' !'
de lys ,qui est Kerrerault.
Yves Cam, sieur de Kerouzien et de Suciniou, épousa Mar­
guerite Bidégan, le '19 octobre '1600; son fils aîné Yves Cam,
sieur de Kerouzien, vendit Suciniou aux Bellin, qui agran­
dirent le manoir et construisirent la ch~pelle, où se lit
l'inscription suivante, imprimée sur une feuille de parchemin:
Cette ChappeUe a été benite par noble Messire Jean du Pau,
Rl' de Ploujan, dédiée à N.-D. de (Trace par permission de
Mgr BaltazaT arangier, E-oèque et Comte de Treguier, le
19 may 1661, jourde JUr St Yues, l'ondee par Noble Homme
Julien Rélin et DUe Francaise Coroller. Sr ct Dame de La

Furtais, pour y dire La messe toutes Les fètes et dimanches de
l'année lors excepté Les jours de Pâq Lies, Pentecote, la Toussaint,
Nouel et juur de la dédicace de la Paroisse.
On voitaussi dans cette chapelle les statues de saint Bernard
et de saint Yves, et au maître-autel,un ancien tableau sur toile
figurant une petite fille. vêtue de blanc et agenouillée sur un

coussin, entre un saint moine et un personn: age en riche
costume Louis XIII, l'épée au côté et la tête auréolée. Au ciel
paraît la Sainte-Vierge portan t l'Enfan t-Jésus et escortée .
d'anges, dont l'un tient un cartel avec ces mots: No st-re Da.me
de UToce. Cette fillette serait, selon la tradition. Françoise
Bellin , fille de Julien Bellin, accompagnée de son patron saint
François d'Assise et celui de son père, saint Julien l'Hospi-
talier, à l'intercession desquels elle dut u ne guérison quasi
miraculeuse. Elle épousa le 7 février 166t en la chapelle de
sa int Nicolas, paroisse de Saint-Melaine, noble homme Jean .
Crouézé, sieur de la Maillardière, conseiller du Roi et son a
sénéchal au siège de Morlaix. Le iableau, signé: du P'té
Noblet lecit 1656, est l'œuvre, non dépourvue ':ie mérite, d'un
Morlaisien, noble homme Jacques Noblet, sieur du Pré, marié
lu le 2 juillet '1643, à Saint-Melain e, à M arie C olas, dame
du Roslan et 2° à Saint-Mathieu , à Ca therine Bla,ncha'rd, le
11:) août 166"1. Il mourut à Saint-Melaine le 2 ju in 1662, ügé

de 1:)0 ans, et fut inhumé dans l'église. Son Çl.cte de décès le
qualifie (( d'excellent peintre » et nous révéle ainsi un
nouveau et fort honorable nom à joindre à la liste malheureu­
sement si incomplète de nos vieux artistes bas-b re tons.
Possédée en '1696 par noble bomme Yves d' AJa nçon, sieur
. de Traonévez, avocat au Parlement, la terre de Suciniou passa
ensuite aux Chrétien de la Masse, puis par héritage aux
Ploësquellec de Kerprovost, sur qui elle fut saisie nationale-

ment. Le capitaine de vaisseau en retraite Charles Cornie,
chassé de Bordeaux par la terreur qu'y fit régner en t 794 le
féroce proconsul Tallien, lorsqu'il vint, selon son expression
(( couper la tête des meneurs et saigner la bourse des riches
égoïstes 11, acquit la propriété; il Y exécuta de grands travaux,
enclôt de murs la partie du parc conf1nant à la grève et bâti
près de l'Armorique l'étrange édifice auquel on a conservé le
nom de «( Cornic». Suciniou appartient toujours aux héritiers
du vaillant corsaire morlaisien .

Il Y avait une autre maison noble de Suciniou, que possé-
dalt en 1602 Martin NOllël, époux de ~ratienne Nocher, et
père de Vincent Nouël, sieut' de Suciniou, baptisé à Saint­
Melaine le 7 avril 16' 14, marié à Marie de l'Estang, laquelle
mourut à Suciniou le 15 novembre lG80, à l'âge de 60 ans­
Ce manoir est démoli.

A peu de distance se montrent encore les bois du Cosquérou,
autre lambeau de cette toison de forêts qui ceignait jadis la
montagne de Trégonezre. C'était un lieu noble dépendant de
Keranroux, que les du 'Parc de Lezversault vendirent vers
1660 à Guillaume Denis, sieur du Gorrequer, Kerfanéfas,

Trobriant, etc., ma'J'chand à Morlaix et époux en 1656 de
' Claude du Gratz; leur fils aîné Jean-Elie Denis, sieur de
Trobriant, né le ' JO juillet 16û'I, à Saint-Melaine, maintenu en
qualité d'écuyer par arrêt du Conseil en 1715, mort en 1725,
est l'auteur des branches du Cosquérou, de la Villeneuve et
de Keredern, dont la première, alliée aux familles de Suasse,
Drouet et Le Gris du Clos, est aujourd'hui deillte Entre le
Cosquérou et Ploujean existait la mare de Poul-ar-Bellee qui

tirait 'son nom de ce que « Missire Mathurin Merer, prestre et
chapalain de la paroisse » y fut trouvé noyé le 19 février IG~i6.
Du Cosquérou dépendait un banc dans le chœur de la
chapelle de Notre-Dame, au bourg, armorié de du Pa.rc Et
'prétendu en 1679 par les hérit.iers du feu sieur de Gorrequer
Denis.
Les hauteurs de Trégonezre commandent le joli estuaire
du DOUl'du et le débouché de cette combe sauvage par où,

la mer pénètre profondément dans l'intérieur du pays, telle,

a dit poétiquement M. Anatole Le Braz, une sirène égarée
parmi des Oréades, remplissant à chaque marée l'abrupte
coupure ouverte entre Ploujean et Plouézoc'h. Au point
pi'écis où s'arrête le flot. qui jadis trop souvent jetait sur
nos côtes des flottilles d'écumeurs, de ces pirates anglais
dont nos vieilles rrwerziou redisent encore les rapts et les

crimes ('1), près du pont qu'enjambait la chaussée pavée
attribuée à la duchesse Anne comme d'autres voies gallo-

romaines le sont à la princesse Ahès, une tour féodale dressée
. à la pointe d'un roc surveillait et protégeait à la fois la rivière
et la route. Ses châtelains en avaient pris leur nom', de Keran­
toUl~, et blasonnaient d'or' à une fleur de lys d'azur accompa­
gnée de trois coqllilles de gueulps. Cette famille s'est fondue
en 1:250 dans · la maison de GlJezbriànd, qui posséda ce fief
pendant plusieurs siècles et en annexa la hautè, basse et
moyen nt' justice à celle de l'Armorique pour n'en former
qu'une seule juridiction, exercée jusqu'à la fin de l'ancien
régime. L'emplacement de la ·forteresse de Kerantour se
retrouve à la cime d'un escarpement schisteux dominant un
coude de la vallée: à gauche du chemin de Morlaix à Plou­
gasnou, étroite pla te-forme presque inaccessible du côté de la
rivière. Des débris de murailles cernent ce tertre, mais lïnté­
rieur a été mis en culture et les dernières ruines du château
de Kerantour ont servi à édifier les bâtiments de la ferme
act.uelle.
Suivons maintenant la grande r9ute de Morlaix, rejoillte

près de Kerantour. Toutau haut. de la monlée, une blaliche
auberge se montre où nous pourrons « bonjourer }) en passan t
l'excellent Parkik, le déjà renommé directeur de la troupe
bretonne de Ploujean, et nous faire indiquer par lui toutes les ­ curiosités des alentours. CJest d'abord à quelques champs de

là, la Villeneuve, encore une de ces gentilhommières déchues
comme nos paroisses rurales en ont tant gardé: sombre logis,
croisées de pierre, cour et jardin murés. François Le Blonsart,
sieur de Kervezec, maire de Morlaix en lG57, époux de Marie
du Gratz, y résidait habituellement et y mourut le 1 L février
166'1. La Villeneuve a depuis appartenu aux Tilly de Chefdu-

bois et aux du Trévou. On y montrait naguère l'entrée d'un

(1) Cf. les Gwer1oiou Breiz.-l%el, de Luzel, L. l, p. 350 .

souterrain, sorte d'excavation bouchée depuis qu'un animal
domestique s'y laissa choir. '
Tout près commence le vaste bois de Trofeunteniou. Une
des principales de la paroisse, cette terre appartenait, en '1450,
à Mériadec de Guicaznou, seigneur dudit lieu et de Primel,
époux de Catherine Adam, et père ;lB Geffroy, marié à Mar- '
guerite Doudron. De ces derniers issut Yves de Guicaznou,
seigneur dudit lieu et de Trofeunteniou, époux en 1:51'1 d'Anne

de Goezbriand,don t Gui lIaume,cité dans la réformation de1543 à
Ploujean et allié à Françoise de Kerguésay. Leur fille Marie,
, héritière de Guicaznnu et de Tro~eunteniou épousa en 151.5
Philippe de la Forest, chevalier, seigneur du Hellès, gentil­
hom me ordinaire de la Chambre, qui décéda à Morlaix le
9 juillet Hn5. De leur petit-fils Pierre de la Forest, seigneur
de Guicaznou, Trofeunteniou, l'Isle, et de sa première femme
Gi ll ette-Renée de Kerouzéré naquit une seule fille, Catherine
cie la Forest, baptisée le 18 avril 1637, et mariée le 29 no­
vembre 1661 « en la chappelle dédiée à N,'e Dame de Pitié
près ladite maison de Traoufeunteniou)) à Messire Jean­
Baptiste du Trévou, chef de nom et d'armes dudit lieu, seigneur
de Kersauzon, Baloré, Kerriec.

Pierre de la Forest mourut le 5 juillet 1662; le décès de
son demier, fils André, survenu le 18 septembre 1665, laissa
la dame du Trévou en possession du bel apanage de sa
famille; elle ne mourut, à Trofeunteniou, que le 20 novembre
t 712. La capitation de la noblesse de Ploujean en t 703 la
mentionne ainsi : la dame douairière de 'Kersauson 'du Tré-lJou,
f/natl'c ningt dix lil1res . une gouvernante, qttatre livres dix
sols pour quatre domestiques, six livTes. Son fils aîné
Tuussaint du Trévou, seigneur de Brefeillac, épousa par
contrat du 12 mars ' 1698 Anne Le Borgne de Keruzoret,
dont Joseph du Trévou, comte de Brefeillac, officier au
régiment clu Roi-Infanterie et chevalier de Saint-Louis, marié

à Marguerite Jégou de Boisalain, dame de Penanvern, le ·

Botdon, Ket'alsy, etc; il en eut deux fils, qui périrent l'un et
l'autre pendant la Révolution M. Prosper Hémon (1) a narré la

fin tragique du premier, Sébastien Jean-Baptiste, lieutenant de

vaisseau, le eruel commandant de l'aviso le Papillon, noyé dans

la nuit du 20 janvier '1793 en tentant de s'év'ader du château
du Taureau, où le Directoire du Finistère l'avait emprisonné;
son frère Joseph-Jean, aussi lieu tenant de vaisseau, fut fusillé
à Auray en 1795, après la descente de· Quiberon. Vers ' 1800,
les du Trévou de Brefeillac, aujourd'hui transplantés à la .
Martinique, vendirent la terre de Trofeunteniou aux Le Graet
de Kerouvriou, qui l'.ont transmise aux Tixier-Damas de
Saint-Prix, puis aux de la Jaille et actuellement, par acquêt, .
à M. le lieutefiant-colonei Foch, ancien professeur à l'Ecole
de guerre. .
Le château ne remonte pas au delà du dix-huitième siècle.

_ C'est un long bâtiment à un étage, sans autres détails
architecturaux que le fronton de la façade, en face d'une
esplanade bordée d'arbres centenaires d'où la vue s'étend, au
loin sur la vallée du DOUl'du et les terres de Gadan, Lanmeur et
Plouigneau. Le colombier gothique a été rasé il y a quelques
années; un petit oratoire sans style a remplacé l'antique
chapelle, dans laquelle des évêques et comtes de Tréguier

bénirent de brillants mariages, et les majestueuses avenues
qui, le second dimanche de juillet, offraient leur mousse et
leurs ombrages aux fidèles accourus pour le pardon, sont ·
tombées sous la cognée.,. Au nord-est du château, SUl' .la
lisière du bois, se remarque ' un monticule circulaire de
60 mètres environ de pourtour sur 3 de hauteur, et qui est très
probablement un tumulus. Aux environs a été découverte une

cachette de fondeur, signalée dans la carte des monuments
préhistoriques du Finistère dressée par notre éminent pré~
sident.

( l) Le comtr :, dl? 1'1'évou, in ·8° 190:1. .

Les seigneurs de-Trofeunteniou avai-ent trois bancs en l'église
de Ploujean, devant l'autel de la Trinité, près de l'a,utel de saint
Germain, etdans la chapelle de saint Sébastien, Ils possédaient
également la qhapelle de saint Michel dans l'église de Notre­
Dame, éclair, ée d'une vitre contenant un écusson en bannière
des armes de Bretagne et deux autres de Guicaznou
d'a l'gent fretté d'azur plein et parti de Goezbriand coupé de
Boiséon, « et du cos té de lépistre duditautel sont deux voultes
au dessus desqlz sont deux escussons en pierre portant l, es
a l'mes de la Forrest de Guicaznou et dans la seconde voulte
est un banc ... et au dessus sont deux tumbes plattes armoyez
c\esdiLz armes de la Forrest, appartenant au sieur et d!Jme

c\l~ Carsoson-du Trévou pour leur terre de Trofeunteniou ))
(A-l9).
De l'autre côté de la route existait le manoir de Kerduté.
I.a réformation de 1446 à Plolljean signale une Aliette de
Kerezdutté, ( damoiselle veuve )). En 1ti29, François de la

Boissière, chevalier de Malte, était seigneur de Kerdutté, qui,
au siècle suivant, appartenait aux Kersulguen et fut par eux
vendu aux le Minihy du Rumen. Françoise de Paule le
Minihy du Rumen, dame de Kercluté, l'apporta aux la Gran­
dière, en épousant à Morlaix, le 4 février 1760, Charles-Marie
de la Grandière, seigneur du Boisgaultier, chef d'escadre
commandant la marine à Brest en '1787, grand'croix de Saint­
Louis, chevalier de Cincinnatus et contre-amiral, mort à
Rennes en 1812. C , e manoir, édifice du seizième siècle, subsiste

en partie. '
Un charmant petit vallon Le val des fontaines - sépare
la propriété de Trofeunteniou du hameau de Coatmorvan, 'que
st.: l'mon te le .faîtage aigu du pavillon d'un vieux manoir
récemment restauré. Nicolas Pezron, sieur de Coatmorvan,
i3t sa femme Guyonne du Parc, vivant en H524, nous sont

connus par les registres de Plouezoc'h; leur fils aîné et
principal héritier Guillaume Pezron, parrain à Plouézoc'h en

1526, dut mourir jeune, car la réformation de 1!)43 attribue
C oatmorvan à Yvon Pezron, sans doute son puîné, père de
Guillaume Pezron, sieur de Coatmorvan, époux de Marie

Fouquet de Kervézec, dont la fille Françoise Pezron, héritière
du lieu, épousa François de Coatanscour, sieur de Keevény.
C O':ltmorvall a depuis passé par alliance aux Arel, puis par
acquêt aux- Lollivier et aux du Parc-LezversauIt en '1680.
Plus important était le manoir ' tout voisin de Coatgeall,
avec haute et basse justice Jean de Guicaznou, sieur de

C oatgrall, mentionné dans la réformation de '1427, époux

vers 1400 de Mahaut du Tertee, fut l'aïeul d'autl'e Jean de
Guicaznou, homme d'armes des Compagniès d'ordonnance
du duc, et cité comme tel à la mon tee de 148'1. Il Y était
entré en 146!), car on le trouve dans un compte de celte
année (1 \ (c parmi les gentilshommes à qui le duc a fait des
dons pour les aider à soy mettre en abillement de hommes

d'armes pour entrer dans les CCCC lances de sa ganle ») Il
pei t part à la guerre de France et était en 1489 l'u n des cen t

gentilhommes de la maison de la duchesse Anne. Sa fille
Françoise épousa Guyon Lidic, dont postérité éteinte dans la
Boissière-Plourin, et Coatgrall, acquis par les la Forest de
Keranroux, a depuis appartenu aux du Parc-Lezversault et
aux Caradeuc de la Chalotais. Les seigneurs de Coatgrall
étaient prévôts féodés de Lanmeur. L'ancienne demeure a
totalement disparu; il ne subsiste que le moulin, pittoresque

construction épaulée de contreforts et campée au confluent du
Dourdu et d'un petit ruisseau sorti des étangs de Kero-
zac'h. .
En revenant de Coatgrall vers le carrefour de Croasquérou,
on rencontre à droite les ruines du manoir de Kermoal,
possédé jadis par une branche cadette de la fameuse maison
de Kergournadec'h, issue de Nuz Kergournadec'h, fils cadet
(1) Dom Lobineau. Preuves. 1. 1367.

de Sa'Iomon, seigne'u r dudi t lieu, et de Marie' de 'Coafgoureden,
lequel fut partagé én 1429 et s'établit dans le Tréguier. Jean

de Kergournadec'h, sieur de Ke-rmoal, et sa femme Marguerite

de Goezbriand vivaient en 15:50; leur fils Tanguy de Kergour-

nadec'h, sieur de Kermoal et Quilbignon, mourut à Morlaix

'le 7 avril 1:596, laissant pour héritière sa fille Jeanne, mariée

à Vincent Toulbodou, sieur de Guiffos. En '1679, Maître Claude

Allouin, marchand de toiles à Morlaix, prétendait un banc

situé devant l'autel de saint Germain, en l'église de Ploujean

- ethlasonne d'un chicquetté, armes des Kergournadec'h, ainsi

qu'un ' autre banc dans le bas-côté droït ' de la chapelle de .
NoÜ'e-Dame, timbre aux mêmes armes, et dépendant tous

deux de sa tèrre de Kermoal, qui, en '173'1, avait passé

aux Le Borgne de Villeroche. .

Un grand portail défendu par des meurtrières donnait accès

dans la cour du marioir, où se voyait, à gauche, la chapelle

domestique, qui n'est plus qu'un amas de décombres; l'édifice

principal, en équerre, s'appuyait sur une haute tourelle du
. sommet de laquelle on distinguait, paraît-il, la montagne de

Méné~Bré à l'horizon; à sa base s'ouvrait une porte garnie

de pilastres et de moulures Renaissance, et surmontée des
armes dès Kergournadec'h. Il y a quelques années, en creusant

dans J'ancien jardin, on a exhumé une pierre chargée d'un

écusson aux mêmes armoiries, échiqueté (l'or et de gueules,

parfaitement coriservée . .

Saluons la vieille croix écotée de Croasquérou, et poursuivons

notre chemin vers Morlaix, que nous signale là· bas, planant
sur sa brumeuse vallée, la tour élancée de Saint ·Martin.:.des-

Champs'. Au prochain carrefour, se montre sur la gauche la

ferme de Kergariou, où plus rien ne subsiste du berceau d'une

des principales familles du Bas-Tréguier, souche féconde de

. vaillants et de preux dont on retrouve les noms à chaque page
de l'histoite bretonne, depuis les croisades jusqu'aux guerres
. de la Révolution. Suivant une tradition rapportée par Guérin de

la Grasserie ('1),saint-!liok ou Riou, anachorète'du quatrième
siècle,a urait appartenu à cette maison; un de ses arrière-neveux ,
Riou, dA la suite du juc Alain Fergent au onZième siècle,
fu t père de Jarnagon et de Guillaume, surnommé (la.riou
(ko'l'-ll'iou, parent de Riou). Ce dernier quitta la Cornouaille,
qu'avaient habité ses ancêtres et vint s'établir dans la paroisse
de Ploujean, au centre de laquelle il se bâtit un chàteau, qu'il .
appela Kergariou. De lui descendaient Guillaume de Kergariou,
croisé en '1248; Philippe de Kergariou, capitaine de Morlaix
en 144:2, et Jean de Kergariou, sénéchal de Morlaix en 1553,
époux de Jeanne du Quélennec et père de / 1

Alexandre de
Kergariou, seigneur dudit lieu, Kerhezrou, Kerguiniou, marié
par contrat du '17 juillet 1~81 à Marie de Lannion, fille de
Lanoëverte, et mort gouverneur de Morlaix le 6 mai 1592, sans
laisser d'enfants; 2° Yvon, héritier de son frère aîné, qui fit le
15 septembre Hi92 assiette de douaire à la veuve de celui-ci,
laquelle décéda à Morlaix le 4: avril lt>97; il épousa Marie de
la Tour et moul'Llt sans hoirs; 3° Hélène, héritière, après ses
frères, de Kergariou, Kerhezrou, Kerguiniou et.dernière de la
branche aînée, qui épousa Guillaume Guynement,' sieur de
Lalunec, en Poullaouën.Elle moUrut au manoir de Kergariou,
le 18 avril ' 16'17 et fut inhumée dans les enfeus de ses ancêtres,
en l'église Notre ·Dame de Ploujean. Trois ans plus tard, son
unique fil :e, Jeanne Guynement « dam~ héréditaire de Kerga­
riou » épousait à Saint-Melaine , leH septembre 1620, noble

el puissant messire Pierre Le Moyne, seigneur de Kermoné,
fils aîné de Messire Vincent Le Moyne et d'Anne de Penien,
seigneur et dame de Tré-vigné. De cette alliance issurent

Tous'3aint Le Moyne, marquis de Trévigné, gouverneur de
Dinan en 1 646, et Catherine, dame de Kergoët, mariée en
1663 à Jacques de Saint-Simon, grand prévôt de Normandie.
Jeanne Guynement décéda le 3ljuillet 1630 à Saint-Melaine) .

(1) Annorîal de Bretagne, 1845-48; l. l, p. '28~.

et les Le Moyne vendirent la terre de Kergariou à Yves
Lollivier, sieur de Lochrist, Saint-Maure, la Villeneuve, époux
de Marie Quintin, dame de Coatamour; leur fils aîné, Pierre

. Lollivier, sieur de Saint-Maure et Lochrist, revendit Kergariou,
par contrat du 10 février 'l(}80, à Olivier du Parc, seigneur de
. Lezversault et de Keranroux. Les héritiers de ce dernier l'ont
depuis transmis aux Caradeuc de la Chalotais, de la Fruglaye
et aujourd'hui de Kergariou de la Grandville (1).
L'ancien manoir datait de 1G6g,; il a totalement disparu,
ainsi que sa chapelle, dédiée à sainte Barbe, où Jacques de
Penfeunteniou, écuyer, sieur du Cosquer, avait épousé Jeanne
Lollivie!', le 21 juillet 1671. Kergariou était haute justice,

et les potences de sa juridiction se trouvaient à la CToix-Rouge,
sur la limite des paroisses de Ploujean, Garlan et Plouigneau,

où l'on a découvert récemment dans une pièce de terre circu- .
laire dite Parc-ar-Justiçou, les trois socles de pierre du gibet
seigneurial. De la croix, il ne subsiste plus que la base, ornée
de deux écussons, dont l'un présente encore les armoiries de
Jean,seigneur de K ergariou qui reçut en Hi2g, congé d'ajoute!'
un troisième poteau à sa justice, en considération des services
rendus par lui lors de l'expédition d'Italie, à laquelle il avait
pris part comme homme d'armes de la compagnie d'ordon­
nance du maréchal de Rohan, alliées à celles de Marguerite
de Quélen, qu'il épousa en tG18.

La terre de Kergariou avait une chapelle prohibitive dans

l'église de Ploujean, dite du Sacrement (actuellement des
Trépassés), avec vitre aux armes des Kergariou parti de

Quélen et du Quélennec, et lizière· blasonnée de Le Moyne-
Trévigné et alliances. Elle possédai t a ussi les premières
(1) On s'explique mal comment Courcy, d'ordinaire si exact, a pu faire
(Ann. et Nob. de Bretagne, 3" éd., t. JI, p. 86) la branche aînée des .
Kergariou s'éteindre dans la Forest de Keranroux, et ne mentionner ni les
Guynement, ni les Le Moyne, ni les Lollivier au nombre des possesseurs
de Kergariou.

prééminences de l'église Notre-Dame, lizières extérIeures et
intérieures, bancs armoriés et tombe élevéR sous la première
arcade du chœur. L'autel et les murailles du reliquaire
offraient également les armoiries des Kergariou. TouLes ces
nombreuses etimportant@s prérogatives, qui attestent l'an­
cienne puissance de la maison de Kergariou, étaient en ' 1679
prétendues par le sieur de Lochrist Lo llivier.
Rendus à la Croix-Neuve, où s'embranchent cinq routes,
nous voyons à droite la vieille · ferme de. Kervézelec, terre
noble de la fa mille OrioL en 1614, qui a conservé un bâtiment
garni de fenêtres à meneaux et d'une lucarne gothique, el de
l'autre côté les ruines du manoir de la Boissière, jadis seigneu-

rie considérable. De la famille du même nom, elle passa par

alliance, en 1402, aux Kersulguen. Tanguy de Kersulguen,
bailli de Morlaix et Lanmeur en 1455, épousa Constance Le
Voyer, et fut père de Jean, bailli de Morlaix en 1484, marié à
Béatrix de Keramborgne ; leur fils Pierre, allié à Margueri te
du Perrier, dame de Bongoat, « se rendit, dit Guy Le Boi'gne (t),
si agréable à la duchesse Anne en qualité de l'un de ses gen­
tilshommes ordinaires, qu'elle ne dédaigna de prendre son
logement en ladite Maison (de la Boissière), faisant une tour­
née par le pays )). Ajoutons à ceLLe intéressante note du bon
alloué de Lanmeur, que c'est en faisant le pélerinage de Saint­
Jean-du-Do'gt, en 1:50:5, pour demander au Précurseur la gué-

rison de son œil malade, que la reine honora la Boissière de sa
visite. '
Messire Michel de Kersulguen, seigneur de la Boissière,
Crechl'onvel, Kerduté, Troudous. ten, etc., épousa vers 1638
Philippe de Lanloup; il mourut le :5 septembre 1657 et fut
enterré le lendemain dans l'église « en sa tumbe eslevée au
milieu du chœur ). Son fils aîné Jean décéda en 1686 sans

laisser d'enfants de sa femme Françoise du Parc; le frère cadet
1. A1'morial B1'eton, p. n .

BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XXXII (Mémoires) 3

- c 34

de celui-ci, Michel, hérita de ses biens, mais abandonna le
séjour de la Boissière pour aller résider au château de Kerca­
bin, en Plouëc, et la famille de Kersulguen, après avoir produit
un président de la noblesse bretonne aux Etats de 173\, s'est
fondue dans les maisons de Tinténiac et de .Lannion. De cette
dernière, la terre de la Boissière a passé aux Stapleton, origi­
naires de Grande-Bretagne, sur lesquels elle fut saisie natio­
nalement.
Du ma noir, que précédaient d'e longues aven.ue~ de hêtres et
de chênes, il ne subsiste qu'un pavillon carré flanqué d'ulle
petite tourelle à cul-de-lampe, le portail ogival de la cour, de
vieilles murailles croulantes etun colombier. Lors de la démo-

Jition, M. Le Vacher a acquis et fait placer sur une terrasse de
sa villa de Roc'harbrini, en Ploujean, l'écusson armorié qui
surmontait la porte On y trouve les armes de Jean de Kersul­ guen et celles de sa femme Béatrix de Keramborgne, seign~ur
et dame du lieu en '1480 parti au t coupé au '1 d'tin lion
accompagne d'un canton écartelé, qui estKel'sulguen, au 2 de
sept annelets, qui est la Boissière; au 2 d'un heaume acr;om­
pagne de trois coquilles, qui est Keramborgne. Ce blason, d'un
beau reliefet.d'une conservation parfaite, est supporté par une
aigle éployée qui le tientdans ses serres, et accôté de deux figu­
rines d'anges déployant des banderoles sur lesquelles se lit en .
caractères gothiques, la devise des Kersulguen : Lesse,Z dire. -
On conserve au Musée de Morlaix une minuscule et curieuse
statuette d'or gallo-romaine, découverte en \780 dans le jar-
din de la Boissière et acquise par NI Duplessis-Quéméneur,

procureur du roi. De cette terre dépendaient une tombe haute,

armoriée de Kersulguen parti de Mériadec et de Lanloup;
dans le sanctuaire de l'église de Ploujean, un banc et une
chaise aux mêmes armes contre le second pilier du chœur,
à gauche du maître autel, et la chapelle prohibitive de saint
Sébastien (aujourd'hui sainte Anne),du côté de l'épître, entou-

rée d'une lizière des armes des Kersulguen et alliances. Outre

ces prééminences, les seigneurs de la Boissière avaient encore
dans l'église du Mur à Morlaix, une chapelle dédiée à saint
pierre, joignant le maître-autel du côté de l'épître et éclairée
d'une grande vitre contenant quatre écussons de Kersulguen
plein et parti de la Boissière, le Voyer et du Perier. Plus bas, '
une autre vitre offrait huit écussons des mêmes armes et de
leut's alliances, et « au dessoubz dicelle vittre est une voulte
avec un écusson aux mes mes armes qui est un lion cantonné
chicqueté d'or et de gueules )) (A, '19),
L'une des anciennes avenues, maintenant herbeuse, déserte
et veuve de ses grands arbres, nous mènera en quelques mi-

nutes à la chapelle de sainte Geneviève, si joliment cachée,
dans son bouquet de hêtres, au fond de l'étroi te et fraîche
coulée où bruit le modeste ruisseau que nos ancêtres ont, par
antiphrase sans doute, nommé le Dourmeur. C'est Ull édifice
monumental de la fin du seizième siècle, avec d'épaisses rnu-

railles de granit aux forts soubassements moulurés, un clocher
élégant flanqué d'une tourelle ronde d'escalier et une grande
maîtresse vitre à demi-maçonnée. Une porte latérale de la Re­
naissance, aujourd'hui bouchée, Était ornée des armoiries des
Kersulguen,qu'on reconnaîtà leur devise: Lessez dire,gra vée sous
l'écusson mutilé. Sur le rétable du maître-autel se lit cette ins­
cription: Hervé Le Cottie fabrique en charge lan 1727; au-

dessus du tabernacle, deux petites figures de femmes aux
mains jointes soutiennent sur leurs-têtes une couronne royale
fleurdelysée, et derrière est un ancien tableau de sainte Gene-

viève) assise, tenant un livre et un cierge qU'Lln ange vient
allumer en lui présentant une couronne: Cette scène, qui fait
allusion à un épisode connu de la vie de la sainte, se trouve
répétée dans un groupe placé du côté de l'évangile. On voit
encore dans le chœur la statue de sainte Barbe et un vieux
banc seigneurial à trois sièges; le dosseret du central, riche-

ment sculpté, est surmonté d'un écusson mi-parti d'un lion et
de six annelets posés 3, 2, 1, armes de Michel de Kersulguen,

seigneur de la Boissière sauf cependant le canton, que le
défaut de place a. interdit au sculpteur de figurer et de sa
femme Philippe de Lanloup, vivant en 1640. Sur ce banc,
unique survivan t, dans toute la région morlaisienne, de ceux
qui remplissaien t autrefois nos églises et dont l'énumération et
le « mesurage' » allongent outre mesure les anciens procès­
verbaux de prééminences, venaient s'asseoir, dans l'enceinte
même du sanctuaire, les châtelains du manoir, tandis que les
gros fermiers des alentours se partageaient les escabeaux du
, chœur et qu'en dehors, derrière la grille à balustres, le menu
peuple s'agenouillait sur les dalles de pierre ...
La chapelle latérale de droite contient l'autel de Notre
Dame de Pitié et celle de gauche l'autel de Notre Dame de
Grâce. Le chœur est séparé de la nef par une balustrade ou
chancel surmonté d'un Christ et d'un saint Michel terrassant
le dragon; sur la frise intérieure court cette inscription:

FAICT: FAIRE: PAR: IAN: LAVIEC: LORS.

GOVVERNEVR: E: METRE: GUJLLA VME: I}DE-
LA NT : CHAPALAIN: DE: CESTE: CHAPELLE: 1639.
Dans la nef sont les statues de saint François d'Assise,
montrant les stigmates de ses màins, et de sainte Anne tenant
dans ses bras la Sainte-Vierge, qui porte elle-même l'Enfant­
Jésus armé d'un livre. Une série de charmants panneaux
Renaissance, malheureusement fort dégradés et un bas relief
figurant l'ensevelissement du Christ, décorent la tribune"
L'ancien lambris voûté en ogive et très élevé subsiste encore,

quoiqu'en mauvais état, avec ses clefs de 'voûte historiées et
et ses sablières aux sta tuettes d'anges munis d'attributs et de
cartels, sur l'un desquels on lit: Jéga,den tabriq, 15 ... Le
pavage formé de grandes dalles d'ardoisine et de pavés de
granit géométriquement groupés, est daté de 1640. Sainte
Geneviève avait jadis son chapelain attitré, qui y célébrait
régulièrement la messe; c'était, en 1661, noble Messire
Guillaume de Boyshardy, auteur d'une petite brochure

édifiante: A1' bugucl tu?" da t?"i blaas, réimprimée en '1874
chez Haslé, à Morlaix .
Les fondateurs de cette chapelle étaient les seigneurs de
Crechronvel, manoir dont les restes convertis en ferme

s'élèvent non loin de là, sur une esplanade dominant le
vallon de Dourmeur. Jean Mériadec,sieur de Crechronvel, vi­
vant en '1400, fut père d'Hector Mériadec,chevalier du Porc-Epie
en '1438 et de l'Hermine en 14;51., qui se disti ngua aux côtés du
connétable de Bichemont à la bataille de Formigny eu '1450,
et d'Hervé . Mériadec, aussi chevalier du Porc-Epie el de
l'Hermine, gouverneur de Carhaix en 1457 et commissaire de
la montre de Cornouaille en 1458, vaillant guerrier mort à
Werwick, en Flandre. Jean Mériadec, sieur de Crechronvel,'
comparut à la montre de '148' 1, en archer en brigandine et
page; sa fille et héritière Jeanne Mériadec épousa vers 1490

Bertrand de Kerret, sieur dudit lieu et du Val, E.t des Kerret .
la terre de Crechrollvel passa par alliance en '1546 aux Kerlec'h
qui la vendirent aux Kersulguen de la Boissière, fondus
plus tard dans Lannion, puis Stapleton. Le fief de Crechronvel
avait moyenne et basse justice, et les seigneurs du lieu
possédaient la première chapelle du côté de l'épître de l'église
de Ploujean, dite en 1679 de saint Germain, aujourd'hui de
Notre-Dame, avec vitres aux armesdes Mériadec, Kersulguen

et alliances, arcade et enfeu, tombe plate, et, au pied du
second piiier du chœur, « une chaise de pierre armoyé d'un
escusson d~s armes de Crechronvel » (A-19j.

De l'autre côté de la route de Garlan s'étendent les bois de

Kerozac'h, belle propriété entourant un élégant castel
moderne. Jean Quintin, sieur de Kerozac'h, fournit aveu au
fief de Boiséon le 10 octobre t540 et fut père d'Alain Quintin,

sieur de Kerozac'h, époux de Périne de Kermerc'hOl1. De ce
mariage naquit en '1569 le p, Pierre Quintin, l'ami et
l'auxiliaire du P. Le Nobletz, mort en 1629 au couvent des
Dominicains de Vitré. Sa nièce, Jeanne Quintin, fille de N ...

et de Marie le Jacobin, apporta Kerozac'h aux Le Sparler, en
épousant à Ploujean le 7 janvier 1610, noble homme Pierre
Le Sparler, sieur de Coatcaric ; leur petit-fils René Le Sparler,
sieur de la Buissière, et sa femme Thérèse Le Bigot
résidaient vers 1670 au manoir de Kerozac'h qui passa ensuite
pal' acquêt à Jean Guillotou, sieur de Saint Germain, gentil- '
homme de la vénerie en 17.22, puis à son neveu François
Joseph, Guillotou, sieu r de Kéréver, secrétaire du Roi à la
chancellerie en 173~ , maire de Morlaix en 172 L et 1738. Il
décéda le 14 avril 'l7ü9 à Kerozac'h, laissant de son mariage
avec Thérèse de Kergroas,dame de Kervézec,un seul fils, Jean
François Guillotou de Keréver, capitaine au régiment de
Provence-Infanterie et chevalier de Saint Louis, émigré sous
la Révolution et tué à la descente de Quiberon, où il servait
comme lieuteQant dans Hector. Saisie nationalement, la terre
de Kerozac'h a depuis appartenu aux de Villiers, qui l'ont
vendue à la famille Le Briz. Elle avait jadis une chapelle
prohibitive dans l'église de Saint-Mathieu de Morlaix, la pre­
mière du côté de l'évangile, dédiée à saint Sébastien et saint

Roch, dont le vitrail contenait en I6iD les armes des Quintin
alliés à celles des Fleuriot et le Jacobin, et les armes des
Le Sparler écartelées de Quintin; il s'y trouvait deux bancs
et deux tombes, dans l'une desquelles avait été inhumée, Je
. 9 avril 'Hi9:2,Périne de KArmerc'hou, dame de Kerozac'h,'mère
du bienheureux P. Quintin.
Citons encore, dans les mêmes parages, les vieilles maisons
nobles du Mousterou et de Coalmenguy. Le village de
Mousterou (lcs Jlo ÎLtiers), de temps immémorial le Ch8f-lieu

de la plus importante frairie ou section de la paroisse, doit
sans doute son origine et son n' om à ['un de ces ' monastères
formés de logettes en bois, en gazon ou en pierres sèches qu'à
peine débarqués dans l'Armorique édifiaient hâtivement les
moines ehassés de 'Grande Bretagne pai' les pirates du Nord"
Jean le MOllsterou est citÉ' parmi les nobles de Ploujeall à la

réformation de 1427. Guillaume Moricquin, sieur de
Mousterou, maire de Morlaix en 1566, eut pour fils Nicolas ,
Moricquin, époux de Marie Le Gafrec, mort à Saint-Melaine le
31 mars '1616, laissant Jean Moricquin, sieur de Mousterou
et de ' Buorz, marié le Hi mars t619 . à demoiselle Marie
Concer. Le manoir du Mousterou, transmis par acquêt aux
Blanchard, puis par alliance aux Héliès de Boiséon, Bouin de
Cacé et de la Roche-Macé, était un assez vaste " édifice du
seizième siècle, garni de fenêtres à meneaux et d'une tour
ronde, aujourd'hui ruiné, démoli en partie et converti en
ferme.
Coatmenguy appartenait en 146~ à Chrestien Le Garrec,
procureur syndic de Morlaix et député de cette ville aux États "
de Bretagne, dont la petite-fille Jeanne Le Garrec, héritière
du lieu épousa vers 1490 Louis de Trogoff, sieur de Guernan-
hir. Il a passé plus tard aux Kermabon. L'ancienne demeure
n'existe plus, et l'on a récemment détruit le vieil " hôtel des
Le Garrec, une des plus curieuses m: iisons gothiques de cette
noble Grand'Rue morlaisienne qUI s'embellit, a u dire de· ses
habitants, à mesure que ses pignons sculptés font place à de

correctes façades bien crépies; les armoiries de cette famille,
de sable f1'etté d'or de six pièces; au (rane canton de même
chargé d'un lion de sable armé et lampassé de gueules, un
trèfle de sinople en brisure, arrachées au manteau d'une che-
" minée, se sont vues longtemps gisant SUL' le cours Beaumont,
près de la Fontaine des Anglais. De Coatmenguy dépendait
une chapelle de l'église de saint Mathieu, ' éclairée d'une
vitre aux armes des Le Garrec pleine et parti de Calloët et de
Lézormel, avec des tombes plates et un banc, le tout prétendu

en ' lG79 par le sieur de Kerprigent de 'Kermabon (A-t9).
A l'extrémité sud du parc de Kerozac'h existe la villade
Coatcongar, autre terre seigneuriale qui a donné son nom à
une fami lle connue dès 1380. Jean de Coatcongar, cité dans
la réformation de '1443 à Ploujean) était père d'Yvon de

Coatcongar, archer en brigandine el page à la montre de
1481, qui prit part au complot ang10-breton de 1492 el fut
enfermé à la Bastille d'où il sortit -quatre ou cinq mois plus
tard, ayaôl obtenu des lettres de rémission. Au seizième siècle
les Coatcongar se fondiren: dans les le Chevoir de Coatélanl,
éteints eux-mêmes en la personne de 1\larie le Chevoir,dame
de Coatélant, Trébriant l Coatcongar, femme du fameux
ligueur Guy Eder, sieur de la Fontenelle et dont, après sa
mort survenue en 1602 ou 1603, la succession fit retour à son

oncle Tanguy le Chevoir. Ce dernier vendit aux Lesquélen le
manoir de Coatcongar, où mourut le 9 février 1644 écuyer

Martin de Lesquélen,sieur de Kei'dannot,maire de Morlaix en
1625, qui fut enterré à Saint-Melaine . ·Sa fille aînée et héritière
Marie de Lesquélen, qu'il avait eue de Françoise Le Blonsart,

épousa le 2t novembre H339 écuyer Yves N ouël, sieur de

Trohoat. Coatcongar était possédé, au siècle suivant, par
Gabriel Calloët, sieur de Villeblanche, capitaine de la paroisse .
de Ploujean, décédé en 1744, Ù l'âge de 90 ans; son neveu,
M. de Kergadiou de Tromobian, hérita de ce manoir, qui a
depuis appartenu par alliance aux Bois des Cours de la
Maisonfort, originaires de Bourgogne. Il ne subsiste que l'ave­
nue, à l'entrée de laquelle éLait la chapelle, un jardin muré et
un vieux puits surmonté d'un dôme de pierre reposant sur
trois colonnes. En 1679, la dame du Trohoat prétendait,
comme prééminence du lieu cie Coatcongar, la seconde volile
et arcade du côté de l'épîlre dans l'église des Dominicains de
Morlaix, armoriée des armes alliées de~ Le Chevoir et des
. Coatcongar, avec un banc aux mêmes armes, ainsi que l'auLel
de sainte Anne, appuyé au troisième pilier du côté de
l'évangile et pareillement armorié du blason des Le Chevoir
et des Coatcongar {A-19-.
En suivant vers Morlaix la route de G:arlan, on trouve sur
la droite le manoir du Vieux-Launay, édifice sans caractère
mais groupantpittoresquement ses bâtiments irréguliers et ses

pavillons sous l'ombre d'un massif de hêtres et de châtaigniers
centenaires. La famille de Launay, qui le possédait dès avant
J350, le transmit aux Marzin, puis aux Thorel, Perrot,
le Garfec, Estienne de Kervéguen et Goezbriand du Roslan.
Ceux-ci le vendirent à Guillaume Blanchard, sieur du Launay
mort le , 19 mars '1652, père de Bernard Blanchard, sieur de
Mousterou et du Launay, maire de Morlaix en '1668, des
héritiers duquel l'acquit Jacques Boudin, sieur de Longpré,
secrétaire du Roi en '1701. Sa petite fille, Marguerite-Périne­
Jacquette Boudin apporta la terre du Launay aux Provost en
épousant en '1722 Messire Laurent-François Provost Douglas
de la Bouexière, chevalier seigneur de Boisbilly, conseiller
du Roi en ses conseils~ président à la Chambre des Comptes
de Bretqgne et procureur général syndic aux Etats de '1730,
dont postérité éteinte dans Jacquelot de Boisrouvray et de
Blois de la Calande. C'est dans cette paisible retraite du
Launay, en ce paysage de prairies et de bois empreint d'une

si reposante quiétude, que vint s'abritpr la belle, verte
et encore active vieillesse du patriarche de l'archéologie
finistérienne, M. Aymar-Joseph-Emmanuel de Blois, et qu'il
s'éteignit en 1852, âgé de près de 92 ans; le manoir appartient
actuellement à Madame Bobierre de Vallières, née de Blois,
sa petite-fille. . .
Au hameau voisin du Petit-Launay se détache à gauche un

chemin qui nous permettra d'achever notre excursion en visitant
les deux autres anciens manoirs de la commune, Penlan et Coat­
amour. Penlan. situé au bord de la route de Paris a tiré son

nom de sa position aux confins de l'immense lande de Langoz­
face, qui s'étendait sur les trois paroisses de Ploujean,Ploui­
gneau et Garlan, et sur laquelle ses possesseurs levaient le
droit de champart et d'tscobuage. Il fut vendu par Jean Kerga­
riou, époux de Mabille Cazin, à demoiselle Marie Quétyer,
veuve de Guillaume Nouël, sieur de Keryvon et tutrice de ses
enfants, par contrat du 20 mai '1559. Martin Nouël,

écuyer, sieur de Keryvon, Penlan, Kerbasquiou,' était
en ' 1625 capitaine de la paroisse Saint-Melaine et mourut
le 5 janvier 1637, ne laissant de son mariage avec
Marie 'de Tavignon, célébré le 31 janvier 1628, que des filles,
dont l'aînée, Catherine Nouël, héritière de Penlan, l'apporta
par alliance aux Moysan du Leslec'h, puis aux Haison de la
Villebasse,le Demoul's de Kernilien par acquêt vers 1753, Vil­
Jarl et actuellement Audren de Kerdrel. Ce manoir, récemment .
restauré et agrandi, ne remonte pas au-delà du dix-huitième
; siècle, Il avait sa chapelle particulière dans J'église de saint
~Jathieu, la cinquième du côté de l'évangile, dédiée à sainte
Anne et saint Laurent,-avec vitre blasonnée de sable à ttn serff
d'al' passant accompagné de trois besans d'or à la bordure de
(/'/,/('11 1/(', armes des Nouël, parti avec celles des Tavignon, ainsi
que deux bancs armoriés et une tombe dans l'église des Domi­
nicains (A.-19).
A l'extrême limite sud de Ploujean se trouve enfin le do­
maine de Coatamour, berceau primitif de la famille Quintin,
.l'une des plus vieilles et des plus marquantes parmi ces lignées
de II nobles bourgeois)} morlaisiens qui, sans croire déroger,
se faisaient négociants ou armateurs. Richard Quintin, sieur

de Coatamour, miseur à Morlaix en 1480, fut avec son fils
François, archer . en brigandine parmi les nobles . de la
ville close de Morlaix, à la montre de 1/1:81, anobli en 1492 par
la duchesse Anne. Christophe Quintin, sieur de Coatamour,

épouse en '1529 Catherine de Kermerc'hou ; son petit-fils Pierre
Quintin mariéà Marie Toulgoët, en eut: 1° Henaud, sieui' de
Coa tamour, mort sans hoirs le 5 octobre Hi94; 2° Antoine Quin­
tin, sieur de Coatamour, sénéchal de Morlaix en / 1608, inhumé

aux Dominicains le 1

juin 1613, laissant de sa femme Marie

Le Gualès une fille, Marie Quintin, héritière de Coatamour,
qui épousa Yves Lollivier, sieur de Lochrist. Leurs enfants
vendirent cette terre à un riche .bourgeois de Morlaix, . Jean
Oriot, sieur du Runiou, époux en ' 1643 de Guillemette Le

Borgne, père de René Oriot, sieur de Kergoët, bailli de
M orlaix en 16/Q, dont la petite-fille Marie-Pauline Oriot, dame
de Coatamour, fut mariée le 9 mai 1712, à Sàint-Mathieu, à
Charles Joseph Haudeneau, seigneur de Breugnon, Gourdon,
capitaine des vaisseaux du' Roi, fils d'autre Charles-Joseph,
ca pitaine de vaisseau, et de Marie de Rospiec. De cette alliance
est issu Pierre Claude Haudeneau, comle de Breugnon, seigneur
de Coatamour, Keroc'hiou, chef d'escadre, ambassadeur extra­ ordinaire de Sa Majesté très chrétienne près l'empereur du

M aroc p.n ' 1767, puis lieutenant-général des armées navales en ,
1779 et commandeur de l'ordre de Saint·Louis.Il n'eut pas
'd'enfantsde sa femtr: e, Mlle de Saint-Sauveur, et son héritage
revint collatéralement aux Le Bihan de Tréouret et à la pré- .
sidente de Chefdubois-Saliou, née Oriol.
Coatamour est aujourd'hui possédé par M. H. Dulollg de
Rosnay, ancien capitaine des mobiles du Finislère, ancien
maire. de Ploujean, petit-fils de Louis-Etienne Dulong, comt~
dé Rosnay, lieutenant- général, grand'croix de la Légion
d'honneur et gouverneur militaire de la Corse, mort en l~28,
à l'âge de 48 ans. De ce manoir dépendait la troisième voûte
et enfeu du côté de l'évangile dans l'église des Dominicains de
M orlaix, avec banc y étant armorié en 1679 du blason mi-parti
des Oriot et des Le Borgne ( A. ' 18).

En terminant ce travail, un scrupule nous prend. Peut-être
malgré tous nos efforts pour être concis, l'avons-nous fait trop

long, dans notre souci de n'oublier aucune des maisons
seigneuriales, grandes ou petites, de la paroisse. Mais est-ce
notre faute si elles s'y trouvaient tellement nombreuses, et
faut-il se plaindre de ce que, dans notre ponne vieille Basse­
Bretagne, si différente en cela de tant de régions françaises,
on ne puisse pourainsi dire faire un pas sans rencontrer quelque
souvenir d'autrefois, quelque édifice, quelque ruine évoquant
le temps passé et parlant des ancêtres? Assurément non;
chaque jour d'ailleurs diminue l'héritage des siècles révolus el

rend plus difficile la tâche de ceux qui veulent en inventorier
les f.récieux débris. La nôtre, grâce à d'obligeants concours,

n'a rien eu de pénible. Que cette très modeste contribution à
l'histoire d'un coin du Tréguier puisse plus tard fournir
quelques utilés indicdtions à un chercheur plus érudit et
mieux documenté, et nous n'ambitionnerons pas d'aùtre

recompense.

Louis LE GUENNEC .

J an vier 1905.

357 ' -

DE'UXIEME PARTIE

Table des mémoires et documents publiés en 1905

III

VII
VII bis

VIIl

l'AGES
Excursion dans la commune de Ploujean par
M. LOUIS LE GUENNEC ........ ; . . . . . .. . ... . 3

Vagabonds de Basse-Bretagne au XVIII" Siècle
. par M. l'abbé ANTOINE F AVÉ . .............. . '. M5
Le Prieuré de Saint-Tutuarn ou de l'Ile Tristan
près de Douarnenez, par M. BOURDÈ DE LA
ROG ERIE ......... " ... ............... ; i8,148, 206

Nou velle décou verte (dé substructions et d'objets
de l'époque romaine) faite à Carhaix par M. P. DU
CHATELLIER . . . ............................ .
Campagne d'Islande sur le Château-Renaud
(1890), extrait du livre de bord de M. le Com-
mandant MARTIN (planche) ................. .
Toponymie de la Montagne d'Arrée par
M. CAMILLE V ALLAUX (carte) ............... .
Note sur l'occupation militaire de l'Armorique
par les Romains (suite) : IS par M. JOURDAN
DE LA P ASSARDlÈRE /3 cartes} ..... , ........ .

Une campagne de huit jours, récit d'un général
et d'armes de la Sénéchaussée de Lesneven en
1766, par M. J'abbt'> ANTOINE FAvÉ ......... ' .
Trois vases en argent découverts à Plovan (Fi-

nistère), par M. P. DU CHATELLIER (planche).
Les chapelles du Cap-Sizun (suite) : La cloche de
Monsieur SaincVrhey, par M. H. LE CARGUET.
Les Eglises et Chapelles du diocèse de Quimper
(suite) ; doyennés de Lesneven et de Plabennec,
par M. le chanoine PEYRON .................
Les peintures de la chapelle de la Madeleine à
Pont-}, Abbé, par 1\1. le chanoine'AsGRALL.. . .. ,

114

124
135

164
169
183
201

XII

XIlI
XIV

Le prieuré de Saint-Tutuarn ou de l'île Tristan
(suite: voirN°I), par M. BOURDE DE LA ROGERIE.
Les combattants bretons de la guerre améri-
caine, pa~' M. H. DE KERGUlFFINAN-FuRIc .....
Monument.mégalithique et "Coffret à Penfoënnec
en Elliant, par M. DE VILLIERS DU TERRAGE
PAGES
206

(planche) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273
XV La famille de La Tour d'Auvergne-Corret, par
M. J. TRÉVÉDY. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 280; 346

XVI La misère et les miséreux au Minihy de Léon:
San tee, par M. l'Abbé A. FA vÉ ............ 304

XVII Le prieuré de Saint-Tutuarn ou de. l'île Tristan
(suite: voir N° 1 et XII), par M. BOURDE DE
LA ROGERIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ... 330

XVIII La famille de La Tour d'Auvergne-Corret, (suite,
voir N° XV), par M. J TRÉVÉDY............ .346

FIN

Quimper. ' Imprimerie A. Leprince