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Bulletin SAF 1903


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Essais sur la seigneurie de Kerminihy en Rosporden

M. de Villiers du Terrage

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. XIII

EN ROSPORDEN

Le ' tel'l'itoire de . la commune de Rosporden, formée de
l'ancienne trève de Hosporden, paroisse d'Elliant (1), était
partagée entre plusieurs seigneuries qui avaient toutes leur
juridiction spéciale et leurs officiers. 11 faut dire que, dans
la plupart des cas, une seule pel'sonne remplissait les mêmes
pOUl' plusieurs jUl'idictions et que toutes les juri­
fonctions

dictions avaient leurs audiences le même jour, le .ieudi~ en
l'auditoire de la ville (sic) de Rosporden
Ces juridictions étaient au nombre de six.
La ville et quelques propriétés peu éloignées dépendaient
de la juridiction royale qui ressortissait à la cour de
Concarneau.
. La seigneurie de Loatcdnton, en Melgven, avait juridic­
tion sur Ulle partie des maisons situées au sud de la ville
et sur quelques propriétés rurales.
La seigneurie Je Goarlot, en Kernével, possédait le ma­
noir de ~ouriou (aujourd'hui ~riou ct I}huilet), dont partie
était du domainl..~ royal et partie dépendait de la seigneul'ie
de Coatcanton. Pour ce motif, les propriétaires de Goarlot,
qui étaient en dernier lieu de puissants seigneurs~ payaient
une chef-rente d'une obole au seigneur de .Coatcanton.
La seigneurie de Coeteloret, en Tourc'h.
La seigneurie de 'l'réarma, dont les propriétaires étaient
(1) La paroisse d'Elliant comprenait également les trèves de Sain t-Yvi
et de Locmaria-an-Hent.

prééminenciers dans r~glise paroissiale d'Elliant, et avaient
le droit de mettre leurs armes (d'argent à la macle d'azur)
(lU plus haut du clocher de l'église tréviale de Rospor­
den Cet écusson existe encore .sculpté en bosse sur la face
ouest du clocher. ' . '
Enfin, la seigneurie de Kminihy, qui possédait toutes les
situées au nord de la trève jusqu'à la paroisse de
terres
était la seule dont le manoir fût situé dans le ter­
Tourc'h,
ritoire de Rosporden. Ses propriétaires l'habitèrent presque
toujours, et j'ai pu trouver de nombreux renseignements sur
leurs familles à Rosporden et aux environs.
Le nom de ~minihy se rencontre pour la première fois
en 1379 sous la double forme Kaermenec'hy et Kermenehy.
Kaer, qui est l'ancienne orthographe de Ker, ne reparaît plus
dans les documents postérieurs. Menec'h est le pluriel de
et ce serait, dit-on, de Menec'h-ty (maison
Manac'h, moine,
des moines) que serait dérivé en . se modifiant successive-
ment les formes Menec'hy, Minic'hy" Minihy (1).
Plus tard, cette expression a été appliquée par extension
à un lieu d'asile ou de refuge, en souvenir des miracles ou
bonnes œuvres de quelque saint personnage, peut-être
des
à la fondation ou à la présence d'un ordre religieux. D'après
M. de Blois, ancien président de la Société archéologique du
Finistère, il a été question, des Hospitaliers ou même des
leurs prédécesseurs qui avaient de grands biens
Templiers,
toute la région voisine de ~minihy.
dans
Alair~ de Kerminihy. Le nom de cette terre paraît en 1379
porté par un propriétaire laïque, Alain de Kaermenec'hy,
écuyer. Voici à quelle occasion.
Jean de Montfort, malgré la défaite et la mort à Auray de
(1 ) Celle express ion se rencontre fréquemment dans la composition des
noms de lieu. On trouve aussi Keranmanac'h (village du moine), Kerme­
nec'h (village des moines) .

son concurrent Charles de Blois, n'avait pu se soutenir dans
son duché, malgré l'appui des Anglais, et s'était réfugié en
Angleterre. Les armées françaises, conduites par Du Gues.
clin \St Clisson, furent bientôt maîtresses du pays, le roy

Charles V voulùt profiter de l'occasion pour s'établir défi-
ement en Bretagne. Avec ' un empressement bien
nitiv

impolitique il fit prononcer, le 8 décembre 1378, par la Cour
tIl
des pairs, la déchéance du duc Jean, la confiscation de la
Bretagne et sa réunion à la couronne Je France Les formes
justice ne furent pas d'ailleurs observées.
de la
Les grands seigneurs de la Hautt-Bretagne, qui crai­
gnaient d'échanger leur faible ' suzerain contre le puissant
l'Qi de France, formèrent une ligue pour s'opposer à ses
prétentions. A leur suite, toute la Bretagne se souleva et
rappela le duc Jean. Du Guesclin et Clisson furent les

derniers à soutenir la cause royale, car, nous voyons encore

novembre 1379 Alain du Juch, capitaine et gal'de de la

ville et chastel de Concq lever une montre ou revue pour le
compte de Clisson; c'était seulement deux mois avant la
signature de la paix par le régent de France, Charles V
venait de mourir.

Il a été conservé un grand nombre de mont.l'es et revues
des chevaliers, écuyers et hommes d'armes faites au nom
du Roy pendant la durée de cette crise. \
Trois de ces montres nous donnent le nom de possesseurs

de ~minihy.
Le premier de ces documents est ainsi conçu: .
(( Monstl'e de Hervé de Lezongar. La reveue de Hervé
Lezongar escuier et do dix-neuf autres escuiers de la

Chambre . receue à Conq le premier jour de janvier l'an
1379. Premier ledit Hel'vé de Lezongar, Guillaume le
Brigant, Olivier Carreix,Pierre Moam, Guillaume Leogat,
Jeha~ Prevost, Jeh Agnès, Pierre Jehannin, Pierre Pal'-
sonne, Yvon du Fou, Henry de Saint-Guinolay, Alain

Guezenneuc, Jehan Moam, Guillaume Neiz, Couhan,
Alain ~flous, Geoffroy Berre, Alain de Kaermenec'hy,
Johan de Kergouriou (1). » .
Une autré monstre reçue à Concarneau par Henry du
Juch, le 1 févri er 1379, un mois plus tard, est signalée
par une pièce relative à la famille de I);minihy, contenant
tl'ois extl'aits de monstre: savoir: celle d'Henry de Lezon­
O'ar, déjà ,mentionnée, et deux autres reçues pal' Hervé du

J lIch, le 1 février et le 1 novembre 1379.
date aussi rapproché~ du 1 janvier, on doit Sllp-
A une

poser qu'il s'agit le 1 février d'une lé'vée supplémentaire,
J'autant plusque le nom d'Alain de I);minihy, qui figure dans
la première liste, disparaît dans la seconde, et est remplacé
par ceux de Guezenec, Jehan et Jacques de ~minihy, proba­
blernent ses trois fils. Gu~zenec, très-jeune en 1;)79, serait
alors le même qu'un autre Guezenec dont l'existence sera
constatée en :\426 comme seigneur de ~minihy.

La troisième monstre reçue pal' Jehan du J llch, le 1 er no-
vembre 1379, se trouve à la suite de celle d'Hervé de Le­
zongal'. Elle est beaucoup plus intéressante en raison des in­
dications qu'elle donne sur la disposition des tlspl"its dans Ja
Cornouaille .
On y voit encore figurer Guezenec, J ehan et Jacques de

I}:minihy; mais on remarquera: qu'à une ou deux exceptions
près, tous les autres noms qui se trouvaient sur la monstre
d'Hervé de Lezongar rie figurent plus dans celle-ci. La voici
texluellement reproduite:
« MOllstl'e de Jehan de Juch.
« La monslt'e de Monsieur Jehan du Juch, chevalier bache­
lier et de dix-neuf escuiers de sa chambl'e, reccüe à Conq
le 1 jour de novembt'e 1370.
(1) Chambre des Comptes de Paris .

« Premièrement: ledit Monsieur Jehan, Guezenec, de Kael' _
_ menehy, Jehan de Kaermenehy, Jacques de Kaermenehy
Pierre Le Loue, Gieffroy Bernard, Rolland Lucas, Yvon
Kaersefredour, Yvon Kaerdantec, Yvon 'l'régue,,, Arnaut Sau­
vaige, Pierre Lormennec: J ehan Le Gallo;s, Giraut de Le­
sargoet, Jehan de Baeligou~ Yvon Trefanna, Jehan Trefanna,
Daniel Tugdal, Alain Coetforne, Henri de Tregourret.
« H8rvé du Pérennou escuier commis de par le très noble
et puissant seigneur Monsieur Olivier sire de Cliçon, de
Belleville et de Porhoet, à' voir et recevoir pour et au nom
de luy les monstres et reveües de quarante hommes d'armes
que le Roya ordonné de nouvel à Monsieur J ehan du Juch
chevalier capitaine de garde de par luy de la ville et chastel
de Concq en Cornouaille, aux thresoriers des guerres du
Roy nostre Sire ou à son lieutenant, Salut:
(( Je vous envoie enclose sous mon scel, la Reveüe du dit
Monsieur Jehan du Juch chevalier bachelier et de dix-neuf
escuiers de la chambre receüe à Concq le 1er jour de feuvrier
montez et armez suffisamment pour servir le Roy
nostre dist Sire en ces présentes guerres et en la garde
seureté et défense de la dite ville de Concq, SO'JS le gouver­
nement de mon dit seigneur de Cliçon. Si li faite pour luy
. et. à ses dits compagnons prest payement de leurs gages en
la manière qu'il appartiendra. Donné audit lieu sous mon
dict scelle joür et l'an dessus dicts. )l
(Le sceau représente uue fasce ondée, le casque est garni
d'un mantelet et sommé d'un vol d'oiseau pour cimier). (1) ,
Guézenec de j(erminihy J'extrais de la Réformation
des fouages de 1426 les indications suivantes:
Elyant (2). Nobles: Guézennec :&minyhi.
Métayer de Guézennec au manoir de I}anleué (Kerlllé) .
(1) Chambre des Comptes de Paris.
(2) y compris ses trèves: Rosporden, Saint-Yvi et Locmaria-an-Rent.

Ville de Rosporden. - Guesguennec de ~minyhi, au ma-
ooir de ce nom, qui a un manoir exempt.
Tourc'h. Marguerite de Benérven (1), femme de' Gueze-
oec, de ~mynicliy, au manoir de I)::vinedel (exempt).
La monstre de 1444 ne fournit aucun renseignement pour
la chatellenie de Rosporden.
La monstre de l'Evêché de Cornouaille en 1481 nous
donne les deux noms suivants:
Jehan de Kerminihy. ,A Elliant., Jehan de I)::minihy, archer
en brigandine; à Mahalon, Yvon de I)cmillichy, archer en

brigandine (sa parenté avec le précédent n'est pas établie).
Raoul de Kerminihy. L'existence de ce seigneur de l~mi­

nihy, mort le 4 août 1488, n'est connue que par un aveu de
1498, mentionné ci-après.
Henri de Kerminihy L'aveu rendu au duc de Bretagne
le 14 novembre 1493 par Henry de :Kminihy, fl'ère puîné et
héritier de feu Raoul, donne quelques détails sur la terre de
~minihy, qui comprenait, outre le manoir ' et. ses dépen-
dances, vingt-six villages ou parties de villages, savoir.
Seize, en la paroisse d'Elliant et ses lrèves.
Sept de J'ourc'h.
Deux
de Kernével.
Un deScaër.

plus une vingtaine de redevances féodales sur divers villages.
Bien que les limites de la terre aient subi à plusieurs
reprises d'assez grandes modifications, on peut dire que son
assiette sur ces différentes paroisses est rest.ée la même
pendant 300 ans. Tous les villages étaient loués en conve-

(1) Cette famille, originaire de Benerven en Rédéné, maintenant en
Quimperlé, figure deux fois dans la Réformation de InG. Jean de Benerven
en 14'l3 procureur général du duc en Basse-Bretagne. Ses armes étaient
fut
au chêne de sinople englanté d'ol', un sanglier de ~inople passant
d'argent
au pied. '

nant, même le manoir de Penbeuzal( Penbuel), qui a été
beaucoup plus tard transfol'mé en ferme.
spP

Prançoise de [(erminihy. Fille ou sœur de Henry de
dan
~minihy, qui précède, elle fut son hèritière et épousa Alain
du Plessis, seigneur de Missirien. En elle s'éteignit la fa~
rest
~ille de ~minihy ~ dont les armes, celles de la terre dont

elle portait le nom, sont d'argent à trois molettes de gueules
avec la devise: Vive Dieu.
l'id:
Elles existent SUl' une clef de voùte du portail de l'ancien
les
château qui a été conservée. Elles se ['etrouvent encore sur
bra
le bénitier qui était placé à la petite porte sud de l'église de
don
Rospol'Jen, parti a yec les armes de la famille de Combout (1).
d'al
Ce ·bénit.ier a été replacé à la même porte lors des tra­
vaux faits à l'église de Rosporden en 1899 (2).
Elles existent encore en la maîtresse vitre de l'église pa­
roissiale de Tourc'h, pleines et associées à celles du Plessis.
Un aveu de 1679 nous apprend que ces mêmes armes exis­
!lit
taient autrefois à Hosporden, en la maîtresse vitl'e et à la
fils
ehapelle Saint-Jean. Elles se trouvaient également à I} nével
en la vitre de la chapelle du Rosaire, pleines et associées
fail
à celles du Combout. .,
cor
Alain du Plessis, s" de .Missil'ien, appal'tenait à une bran­
che de la famille dn Plessis, qui a ~té déclarée noble d'an­
hle
ciellne extraction en 1669.
hle
La hranche du PJ8ssis-Nizon s'est fondue en 1690 en
Feydeau et elle est aujoul'd'hui r eprésentée par les Hersart

(t) La f mille de Combout, originail'e cludit lieu, en Quel'rien, adrJlise à
la Réformation de 'IGGO, s'éteignit au 18 siècle. La date de son allia!lce
avec la famille de Kerminihy n'est pas connue. Ses armes sont de gueules
au lion d'argent aemé, lampassé et couronné d'Ol'.
(2) Un détail de l'appareil que le déplacement du bénitier a rendu visible
fait ceoire que ce bénitier a dù être primitivement isolé et probablement
placé SUI' une tomb€'. Il aueait été mis à l'emplacement où je l'ai connu,
tel
lors de la restauration de l'églisl', brùlée par les Espagnols, en 1594.

de la Villemarqué, du Plessis-Nizon. A la même famille
appartenait PielTe du Quenquis ou du Plessis qui, chanoine
en 1415, de la cathédrale de Quimper, fonda une chapellenie
dans la chapelle actuellement de Saint-Paul et mourut en
1459. Son tombeau,qui existait dans cette chapelle, a été
restauré il y a quelques années pal' les soins de M. le cha­
noine de la Lande de Calan, un de ses successeurs .
Il ne m'a pas été possible d'établir, autrement que par
l'identité des armes, la parenté de Pierre du Quenquis avec
les deux branches de la famille du Plessis, ni de ces deux
branches entre elles; leur origine commune remonterait
donc au 15 siècle. Leurs · armes sont assez compliquées:
d'argent au chêne de sinople englanté d'or au fl'anc-canton
de gueules chargé de deux haches d'armes adossées d'argent,
en paL
La bl'anche de Missirien est connue à l}feunteun, à partir
de Piene du Plessis demeurant à Missirien en 1'*44. En
:L481 , Jehan du Plessis est représenté par Guillaume, son
ms, dans la montre de cette même paroisse.
Alain du Plessis, sr de Missirien, n'est c:onnu que par le
fait de son mariage avec Francoise, héritière de I}:minihy,
consta té par une généalogie manuscrite conservée à la Bi­
bliothèque nationale. Cette pièce a été dressée très proba­
blement par d'Hozier, en vue d'établir les quartiers de no­
blesse de son ami et correspondant Guy Autret.
Laurent du Plessis. Laurent, fils des précédents, sr de
Missirien et de I}:minihy,épousa Blaisine Richard. Ils eurent
plusieurs fils, dont Henri qui continua la descendance, mais
qui semble comme cadet n'avoil' possédé aucune des terres
de son père. .'
Rolland du Plessis. La Réformation des monstres de
l'évêché de Cornouaille, faite en 1536, nous donne les tl'ois
nom s suivants: Lorans du Plessis sI" de Missylien, en I}:feun­
teun , Rolland du Plessis, sr de Lantron (?) de ~minihy, de

penbua (Penbuel), en Rosporden et du manoir de 1}vyriedel
en Tourc'h et Louis du Plessi~, sr de 1}fors, en
(l)vidal), lat;
Ergué-Gabéric,

Laurent du Plessis. Quatre ans plus tard, un aveu de
1540 indique Laurent du Plessis comme sgr de la terre de
I);:minihy. Il avait donc hérité de son frère Bolland, mort

sans laisser d'héritiers directs. fuI
D'après cet aveu, la superficie de la terre n'aurait pas été
sensiblement modifiée depuis 50 ans; il Y a seulement une
thl
nouvellA acquisition, Scoulintin (?), en Erguel-Arffel (Armel).
Jehan du Plessis. Jehan, fils ou neveu des deu~ précé~
dents, mais en tous cas petit-fils de Laurent du Plessis et de

Blaisine Richard, figure dans les termes suivants dans la
monstre générale de l'évêché de Cornouaille, de mai 1562 :
« Jehan de I)minihy dit faire arquebusier à cheval > : . Il
mourut vers 1568, d'après un aveu de son cousin ge'l'main,
Pierre du Plessis, qui suit.
Pierre du Plessis. Cet aveu du 15 janvier 1576 nous
apprend que Pierre du Plessis, fils d'Henry du Plessis et de
Marie de CoetaneZl'e ~1 ) également petit-fils de Laurent du
Plessis et de Blaisine Richard, avait hérité de son cousin­

germain, Jehan du Plessis, mort depuis environ huit ans.
De son premier mariage avec Barbe de Toulanlan \2), il

eut deux filles. Françoi;:;è, l'aînée, qui devait hériter de
I);minihy, épousa H.ené de la Marche (3), fils aîné de Guil-

(1) Coetanezre, ancienne famille de COf'l1ouaille, dont la branche de Le­
zergué s'est fondue au 16" siècle dans Autret (armes de gueules aux trois
épées d'argent la pointe en bas, placées en bande).

(~) Toulanlan, ancienne famille de Cornouaille, éteinLe au 16 siècle.
Yves de Toulanlan. était grand chantre' et chanoine de la cathédrale en
1579.Armes: d'azur au sautoir d'or cantonné de quatre croiset tes du même.
(3) La famille de la Marche, déclarée noble d'ancienne extraction, re­
monte à Anceau, Sgr de la Marche 'lt de Bodriec, en Brasparts, qui figurc
à la Héformation des fouages de 'lî2G. A celte famille appartient Charlcs

de la Marche, qui fit en 1543 cadeau d'un vitrail à l'église de Brasparts.

la de la Marche, sr de Bodriec et de. Jeanne de ~lec'h ;
ume
Gillette, la cadette, hérita de Missil'ien et épousa en 1596
Claude Autret (1), sr de Lezergué. Elle fut la mèl'e du
célèbre Guy Autret.
La seconde femme de Pjel're du Plessis, Jeanne t;effroy (21,
fut enterrée dans la chapelle de Saint-Paul, en la cathédl'aie
de Qnimper, où se trouvait depuis plus d'un siècle Je tom-
beau et la staLue de Pierre du Plessis, chanoine de . la ca-
tllédrale. .
L'aveu de 1576 est beaucoup plus détaillé que les précé­
dents, car il fait l'Gnumération de tous les champs qui com-
posent les tenues. La terre de I>:minihy comprenait aloes
en tout 26 tenues: savoir:
6 dans la trève de Rosporden " dont quatre~ Penbual,
I>:danner, l):anbroc'h et I>:eloret (aujourd'hui I>:angoc1,
complètant autour du manoir un territoire sans enclaves

de 600 journaux

11 daus la l)aroisse d'Elliant.

Les armes de cette famille (de gueules au chef d'argent) sont altl'ibuées,
sans pl'euve cel'taine, à Guillaume de la Mal'che, un des héros du combat
des Trente. Elle habita successivement Bodriec, Kedol's, en Ergué-Gabél'ic,
puis Lézel'gué, où François-Louis de la Marche fit, dans celte dernière pa­
roisse. à la fin du 18- siècle, rem placer l'ancien manoir par une construc­
Lion beaucoup plus importante, qui n'a jamais été achevée,
(1) La famille Autret, originaire de Lezoualc'h, en Goulien, remonte à
Jacques Autret. Sgr de Lesoualc'h. Elle devint possesseur de Lézel'gué
par le mariage dE; Jean Alltret avec Marie d~ Coatanezl'e, et plus tard de
Missirien par le mariage de Claude Autret avec Gillette du Plessis. Ces
demiel s eurent pour fils Guy Autret, né vers 1599, chevalier des ordres
du Roy, connu par ses travaux littéraires et généalogiques. Il était en cor­
respondance suivie avec Pierre d'Hozier et publia, entre autres ouvrages,
une édition estimée de la vie des Saints de Bretagne. Il est mort 'en 1660.
Les armes de cette famille sont d'or à cinq trangles ondées d'azur .
('2) La famille Geffroy, originaire de Kerisper, en Arzano, avait entre
autres la seigneurie du Rosiou. Elle a été maintenue à la Réformation de
1669 et a fourni quatre conseillers au Parlement : Armes d'argen t à l'aigle
du sable armée et becquée de gueules, chargée sur l'estomac d'une croix
pattée d'azur à enquerre. .

der
8 dans la paroi.sse de Tourc'h. .
sée
1 de Scaezl'e (Scaër) .

par
En plus, 25 chefs-rentes ou redevances féodales dues quel ...

quefois par des manoirs importants: ~vernio\). et ~erfol'n,

en Elliant. .
Cac
Cet aveu mentionne pour la première fois une tenue de
24 journaux: qui se présente avec un caractère particulier
des
ainsi défini: « héritage non hébergé, appelé le Merdy Ou
« Garzhalec, à présent séparé et mis en plusieurs parcs de

« clôture par fossés, mais seulement la moitié et non divis
« ô (avec) le sieur de Tréanna. » (1 )
dis~
Cette situation ne s'est pas modifiée pendant trois

. siècles et en 1789, le Merdy, toujours sous la doüble sei.
les
gneurie de Tréanna et de ~minihy, était profitée à titre de
COI
convenant par le domanier de Penfoënnec-Huellafi. La loi

de 1791 en a fait un propriétaire. En 1900, le Merdy a été
la j
réuni par acquisition à la terre de &minihy.
nol
Le nom de Pierre du Plessis est inscrit pour une somme

de 25 livres sur les registres de l'Aumosnerie de Quimper,
établis en 1580 par Pierre l'Honoré, aumosnier en fonclions
pour cette année, et publiés en 1880-1881 dans le Bulletin
sur
de la Société archéologique du Finistère.
Le 9 août 1583, Pierre du Plessis, en verlu des droits qu'il '
sul
possèdait comme seigneur de :E>minîhy et de ~vinedel (~vi-
dat
dal en Tourc'h), assigna devant le Présidial de Quimper
noble homme Loys de la Ripvière (ou Ster) en Tourc'h et
PIE

drE
UnI
(1) Le Merdy, situé en Elliant, à l'extrémité; N.-O de la trève de Ros­
eta
pOl'den, figure, en l'aveu rendu en 1447 par Jehan de Kermoisan, Sgr de
la Villeneùve, dans les termes suivants: " Un vieux tenement non hébergé,
appelé le M'erdy, cel'l1é d'un endro it entre le grand chemin du chastea u
de Concq à la ville de Caerhaes (chemin des Poissonnières), d'autre endroit
sur 1 \ ruisseau qui de!:cend de la fontaine Saint-Guenel, (Stang al'·
Treitourez) au pont du Bastard (chemin de Rosporden à Coray), d'au tre
espc
partie SUI' les terres du Sgr de Kerminihy ».

demanda qu'il soit condamné « à racler lesdites armes appo­
sées en b:m au-dessus le gl'and portal de la dite église
pafQissiale de Tourc'h, et aussy de remettre la dite thllmbe
à fleur de terre )). Cette tomhe avait été haussée de terre
d'un demi-pied. Pierre du Plessis paraît avoil' obtenu satis- ,
faction; mais, si ses armes existent toujours au gl'and vitrail
du chœur de l'église de Tourc'h (côté de l'Evangilè), celles
des Ripvière, d'argent au gl'eslier d'azur lié de même (les
mêmes que 1);fors), subsistent encore (côté de l'EpUre), ainsi
qu'à deux petites fenêtres du chœul'.
La famillA de la Rivièl'e semble du reste avoir été assez
disposée à empiétel' SUl' les droits de ses voisins, car au
17 siècle elle fut, pour des motifs analogues, attaquée par
les Canaber de I}:louet, devenus possesseurs de la tel'l'e de
Coetelol'et.
Piel're du Plessis s'est probablement l'éfugié à Quimper à

la fin du 16 siècle, ainsi que presque toutes les familles
nobles du pays qui ne se trouvaient pas en sù~eté dans leurs
manoirs, penùant la guerre de la Ligue et l'occupation de
Concarneau par les Espagnols. Quand cette armée étrangAre
se retira vers Quimpedé, en 1594, l'arrière-garde, attaquée
sur le territoire d'Elliant, vers Locmaria-an-Hent, se vengea
en incendiant la ville et l'église de Rosporden (1). Aussi, ne
subsiste-t-il aucun registre paroissial antérieur à cette
date.
Un acte du 8 mars 1599 nous apprend que François du
Plessis habitait de nouveau I}:minihy. A cette date, son gen­
dre, René de la Mal'che, était mort, ne laissant qu'une fille
unique, Renée de la Mal'che, dont la mère Françoise du Plessis
était remariée à Claude de·Pal'cevaux, seigneur de Coatdrez,

monnaie en argent de Ferdinand et d'Isabelle
(1) II m'a été remis une
terre à Rosporden, souvenir de l'occupation
la Catholiqu(, trouvée en
espagnole

lui fut ôtée et donnée à Yves de la Marche, seigneur de
~fors, fils d'un second mariage de Guillaume de la Marche
avec Isabelle de &fors, et par conséquent oncle de l'enfant.
la curatelle restait confiée à Piel'l'e du Plessis, aïeul mater_

nel. A cet acte ayant pour but de faire le partage des biens
pli
de la succession de Guillaume, interviennent, d'une part.
lai
« Pierre du Plessis, écuyer, seigneur' Je &minihy, demeuran~
audit lieu, paroisse d'Elliant, au nom et comme CUI'ateur de
demoiselle Renée de la Marche, dame de Bodriec, héritière
principale et noble de feu Hené de la Marche et de demoi_
selle Françoise du Plessis, sa veuve; ladite dame de Bodl'iec

repl'ésentant ledit René de la Marche, écuyer, son père héri.
tier principal et noble de feu Guillaume de la Marche et de
feue dame Jeanne de ~lech, sa première femme; d'autre
oil
part, N. h. Yves de la Marche, demeurant au manoir de
lia
~fors, en Ergué-Cabéric ;
tel
« N. h. Henry Couezre et damoiselle Marie de la Marche,
fille aînée de Bodriec, seigneur, et dame de Brennanec, en
Plonéour, y demeurant;
« N. h. Alain le Guiriec, écuyel', et damoiselle Louise de la

Marche, deuxième fille de Bodriec, seigneur et dame de
&mabeuzen, en Penhars, y demeurant;

« Damoiselle Jeanne de la Marche, dernière fille de
Bodriec.
« Tous issus dudit Guillaume de la Marche et de Thibaulde

de la Boissière, sa seconde femme, ainsi que N. et vénérable
personne Parcevaux de la Marche et damoiselle Jeanne de
la Marche, tous deux décédés ». .
Une action, intentée par Yves de la Marche à Françoise
du Plessis, alors qu'elle était encore tutrice de sa fille, sou-

(1) De ce second mariage elle avait eu une fille Jeanne baptisée à Rospor-
den le 1:2 mars 1 GOO.
tri

leva de nombreuses difficultés, plusieurs procès s'ensuivirent
et c'est seulement en 1647 quïutervint uue tt'ansaction défi­
oitiue eritre L~s deux cousins, Henée et Yves de la Marche,
Pierre du Plessis mourut en 1608, laissant comme hél'i­
sa petit'e fille, Henée de la Marche. La branche des du
tièec
Plessis) seigneues de I}.minihy, se t.eouvait donc éteinte,
laissant comme souvenie ses armes en plusieurs endroits.
A l'église tréviale de Hosporden, elles figuraient en la
maîtresse vitre du grand autel; celles de I);minihy au plus
haut soufflet du côté de l'Evangile. Elles se trouvaient éga-
lement dans la chapelle de Saint-Jean, prohibitive aux sei­
gneurs de I}minihy, dont les armes étaient placées au plus
haut soufflet; au-dessous se trouvaient deux autt'es écusson's
armes écartelées de ses alliances, à gap.che de I);mi­
avec les
nihy et du Plessis, à dt'oite de I);minihy et de I);flous. L'al­
liance avec cette dernière Jamillc est confirmée par les
teernes de l'aveu, mais je n'ai pu l'établir directement (1).
Ces mêmes aemes étaient reproduites à plusieurs repr'i­
ses à la chapelle de Saint-Guenaël, en Elliant, qui était
prohibitive aux seigneurs de I);minihy. Cette chap.clle a été
abandonnée depuis la grande Hévolution. Ce qui restait
des mllrs a été démoli par la fabrique d'Elliant et les
matériaux ont servi pour des travaux de réparation à faire
dans l'église paroissiale. C'est à cette occasion qu'un petit
chapiteau de colonne en Kersanton, portant l'écusson des du
Plessis a été transporté dans le cimetière d'Elliant En le
retournant, . on l'a utilisé récemment comme bénitier à la
porte intérieure de la sacristie de l'église.
A Tourc'h, la maîtresse vitre devait porter « du côté de .
l'Evangile les armes pleines et contre écartelées du Plessis
(1) Cette famille, originaire de Kerflous, en Scaër, était un ramage de
Tremillec, qui s'est fondu dans Billouart. Ses armes sont de gueules aux
trois croissants d'argent.
BULLETIN ARCHÉOL, DU FINISTÈRE. - TOME XXX (Mémoires) 19

et de ~flous, qui sont maisons alliées du Kminihy» (.
vitrail existe encore. mais les armoiries ne sont pas exacte_
ment conformes aux indications de l'aveu. Les voici: écar_
telé, au premier, d'argent à trois molettes de gueules
f~minihy);au deuxième, d'argent au chêne englanté d'or, au
franc-carton de gueules chargé de deux haches d'armes d'argent
adossées enpal (Plessis) ; au troisième, parti de Plessis et de
. gueules aux troie; croissants d'argent (I}flous) ; au quatrième .

d'argent à la croix de sable (ou de sinople (7). Sur ce vitra il,
onpouvait avant la restaurationqùienaété faite en 1897, voir
la date 155 ... (1 )
Renée de la Marche et Auffray du Chastel. L'aveu de 1619
_ établit que Renée de la Marche succéda vers 1608 à &On
grand-père comme propriétaire de la terre de ~minihy. On
ne connaît pas la date de sa naissance, mais elle était la fille
aînée de _ Pierre du Plessis et ùe Barbe de Toulanlan; et
devait donc être née au plus-tard vers 1580, puisque Jeanne
Gtlffroy, deuxième femme de son père, a été enterrée à Saint­
Curentin en 1585.
En 16~0, elle épousa Auffray du Chastel, de l'illustre fa­
mine des Tanneguy du Chastel, fils de François du
Chastel, marquis de Mesle, seigneur de Chateaugal et de
Landele:m. Ce personnage, qui fut gouverneur de Concar­
neau pour la Ligue, se laissa surprendre à Quimperlé par
l'armée royale en 1592, et se retira ensuite dans son château
de Chateaugal; il mourut en 1595 et fut inhumé dans l'église
de Landeleau. La très remarquable statue qui surmontait
son tombeau a été transportée au musée de Quimper. Les
armes de la famille du Chastel sont fascé de gueules et
d'argent de six pièces.
Il s'était marié trois fois.

(1) Il a été reproduit dans la notice sur III paroisse de Tourc'h (Bulletin
de la Soc. Arch. du Fin. 1\:l03).

femme, Ma!'ie de I~oulas (1), il eut deux
De sa premlel'e
fils et une fille .

Vincent, seigneur de Mesle, Chateaugal et. ~oulas,
~goat, marié à Jeanne de Gue!', sans posté!'ité;
Tanneguy, tué en 1602 au siège d'Ostende, sans postél'ité;
Mauricette, hé!'itière d::! ~c>ulas, muiée successivement à
Maurice du Rusquec et à Jacques Visdelou.
De sa seconde femme, Catherine de Quélen, François du •
Chastel eut deux fils et trois filles.

Auffray" dont il sera plus loin question;

Jean, seigneur de ~goat ;
Marie, qui épousa François de Penmarc'h,
. seigneur de

Coa télès ; .
Claude et Louise, non mariées.
De son troisième mariage avec Anne de ~ouzéré, il n'eut
pas d'enfants, Ce mariage eut lieu en 1617, le même jour
que celui de son fils aîné, Vincent. avec Jeanne de Guer, fille
d'autre Catherine de ll.uélen.
Auffray du Chastel, né vers 1580, hérita de son père, après
la mort de son frère ainé, Vincent, et épousa en 1610 Henée
de la Marche,' hél'itière de .Kminihy. Ils eurent deux enfants.
Thérèse, morte à 6 ans et Claude, héritier de leur fortune
qui était considérable.
Voici le préambule d \m aveu qu'ils rendirent au 'Hoy, en
1619: « Le 23 février 1619, Messire Auffray du Chastel,
chevalier, et dame Henée de la Marche, seigneur et dame
de Mesle, Chateaugall, la Marche, ~minihy, font la décla-
ration des biens qu'ils possèdent dans la COUt' et juridic-
tion de Concq, Fouesnant et Rosporden., .. »)

(1) Marie de Ktroulas est l'héroïne d'une légende que M. de la Ville­
marqué a rendue populaire. Si elle fut mariée de force à François du
Chastel, elle ne mourut pas de douleur, mais vécut assez longtemps pour
avoir trois ehfants.

Cet aveu reproduit! sans grandes modifications, les indi_
cations portées sur l'aveu de 1575, tant sur les terres dépen_
dant de la seigneurie que sur les prééminences à l'église de
Rosporden, à la chapelle de Saint Guénaël, en Elliant, et à
l'église de Tourc'h.
L'ensemble des prétentions des seigneurs de J:S;minihy
était probablement discutable, car, sur une autre copie de
l'aveu de · 1619, qui existe aux archives du Finistère, j'ai

trouvé en marge de la première page la note suivante:
CI. Du quel cy aveu a été rendu par arrest de la chHmbre
des comptes du 21 juin 1629, à la charge d'une rente de
20 s. 8 d. monnoye, recogneut et ad voué par l'antien aveu
de la dite lerre (1565) estant deubt sur certains héri-

tages cy mentionnés qui ne sont employés à présent ou
baillés' par le dit seigneur lavouant, le nOrn de ceux qui
possèdent les dits héritages et (voir?) approuver lenrs
prééminences et leurs prérogatives et intersignes pré­
tendus par les avouants dans l'église paroissiale de Ros­
porden aussy non employés aux anciens aveux lesquels
seront raiés et ostés et icelluy, rendu conformément à
icelluy de l'an 1565 » •
La date de 1565 est pour moi le résultat d'une erreur. II
n'y a pas d'aveu de 1565. C'est à l'aven de 1575 que s'ap­
plique l'arrêt mentionné ci-dessus.
Il y est ajouté le paragraphe suivant:
« Davantage, sont les dits seigneur et dame fondateur en
la chapelle de Sainte-Vengu à Locunguff (1), en la paroisse
de Tourc'h. J)

(1) Ces noms ne sont en réalité que les noms primitifs, Guenguff et Loc­
Guenguff qui signifie
guenguff, transformés successivement par l'usage.
blanche et douce, est la traduction de Candide, nom de la patronne de
Scaër. Au commencement du 18° siècle, une femme, originaire de cette
paroi!se, portait alternativement les noms de Candide et de Guencu SUl' les
registres de la paroisse de Rospordlln.

Mais cette mention disparaît dans les aveux suivants, car
elle n'était probablement pas fondée. Jusqu'alors, les hauts
et puissants seigneurs appartenant aux familles de Poulmic,
pont-l'Abbé, Quélennec s'intéressaient probablement peu à
leur petite seigneurie de Coateloret, en Tourc'h, bien qu'elle
eut les droits de haute, basse et moyenne justice. C'est
seulement au 17 siècle que les Canaber de ~louet en de­
vinrent possesseurs et revendiquèrent les prééminences
usurpées par leurs voisins (1).
Benée de la Marche, dame du Chastel-Mesle. . Je n'ai
tl'ouvé aucune mention d'Auffray du Chastel qui permit de
savoir s'il vécût longtemps après la naissance de son fils
Claude (6 juin 1,621). 11 n'en est pas de même de sa femme,
plusieurs fois sur les registres de la ville
dont le nom figure
de Quimper, à côté des .personnages les plus considérables
du pays.
Un épisode de la vie du vénérable P. Pierre Quintin (2)
nous apprend qu'à une date certainement antérieure à 1629,
elle habitait le manoir de Chateaugal. Voici le passage où
est citée: .
elle
(l Estant un jour chez Madame de Mesle, en sa maison de
Chateaugal, evesché de Quimper, cette vertueuse dame,
qui l'hollorait singulièrement comme un saint, l'ayant
(1) Cf. l'assignation donnée en 16'23 par Jean Canaber à François Oéréat
seigneur du Ster (la rivière ), en Tourc'h, pour usurpation de droits et préé­
en l'église paroissiale.
minences
('2) Le vénérable P. Pierre Quintin, de l'ordre des Frères prêcheurs, mort en
1029 appartenait à une famille noble de Kerozar, en Tréguier. Il était né en
1569 et fut d'abord lieutenant d'une compagnir. de gendarmes pendant les
guerres de religion, puis il entra au noviciat des Jésuites à Toulouse; mais, au
bout de quelques moi~, il fut forcé, pour raison de santé, de retourner en
Brélagne_ Comme les Jésuites n'y avaient pas de maison, il prit l'habit
clesFrères prêcheurs, en 160'2, et s'adonna à la prédicatton dans la Cor­
nouaille avec un zèle vraiment aposlolique. JI mourut au mois de juin IG'29.
La vie du P. Quintin a été écrite par Guy Aulret, cousin-germain de
Renée de la Marche . .

obligé par importunité de souffrir qu'elle luy ostat le poi­

gnet d'une des manches de sa robbe , sous couleur qu'il
triE
estoit trop usé et déchiré, pour y en mettre un autre plus
honneste, elle garda chèrement ce mor ceau de vieux drap.
Quelque temps après, un sien petit enfant tomba malade
jusqu'au point qu'on en espérait plus de vie, ayant déjà
perdu la veüe et souffert deux convulsions: la mère dé-
IDI
solée se souvint tout à coup du p , Quintin, qui ~stoit en-
core vivant et du morceau qu'elle avoit de sa robbe ; elle
court promptement à son cabinet. pour le prendre et, re-
tournant à son petit agonisant, elle l'applique sur ses yeux

offusquez et sur d'autres parties de son corps, disant avec
une grande confiance: Mon Dieu, mnnifestez maint.enant
la sainteté du P. Pierre Quintin, vostre bon serviteur, pal'
les mérites duquel j'implore votre miséricorde et vous
demande qu'il vous plaise rendre la vie et la santé à mon
mème jnstant qu'elle proféroit ces paroles, on
enfant. Au
apperceut en luy un changement extl'aordinaire; ses yeux
reprirent aussitôt leur aspect naturel, le sentiment luy
revint, il prist à l'heure même de la nourriture et se trouva
guéry. Ce cas merveilleux et plusieul's autres selIlblables
avoient ' donné uri si beau lustre à sa vertu et à ses mérites.
qùe l'on s'esti~ait heureux dans une maison qnand il y

entrait.: ... 1)

Renée de la Marche avait toujours à régler avec son
coùsin-germain Yves de la Marche les questions en litige

depuis l'action engagée par ce dernier, deuxième tuteur
de Renée contre Françoibe, sa mère, prem ière tutrice.
compte de tutelle qu'il avait présenté fut contesté,

et de nouvelles difficultés se produisirent au sujet des hé­

ritages du grand-père Guillaume de la Mal'che et d'une
tante, 'Jeaime de la Marche, dame de Botperen. Grâce aux
ressources de la procédure, règlement de juges, évocation
au grand Conseil, etc., la question était encore pendante

en 1637. C'est alors que les plaideurs se décidèrent à charger
trois avocats de préparer une transaction impliquant règle­
ment de compte définitif, et c'est dix ans plus tard que
(( Messire Yves de la Marche. seigneur de ~fors, Lesquiffiou
et . Penquelec, conseiller du Roy, son lieutenant au siège
présidial de Quimper, y demeurant; et dame Renée de la
Marche, dame douairière de Mesle, demeurant ordinaire­
ment en son manoir de Chateaugal, en Landeleau, s'étant
transportés tous deux à Rennes signèrent, le 22 janvier
1647, la transar.tion définitive, en présence de :
« Messire Louis-Joseph de la Marche, oncle, recteur d'Es­
quibien;
. « Le procureur de Messire Joseph Le Gouvello:
« Yves-René de Trémie, cousin né de germain;
« Alexandre Geslin, seigueur de Penanrun ;
« Dame Corentine de Trémic~cousine renouée de germain;
« Joseph-Marie-Le Livec de Toulgoat ;
« Ecuyer de ~sauson, seigneur de Goazme]guen ;
« Messire François de la Marche, oncle;
« François de la Roche, mari de Madeleine de Botmeur, en .
Berrien;
« Nicolas de ~mellec, seigneur de ~ret, en Loqueffret;
« Messire Paul-Vincent de Coatanscour, chevalier, mar- .
quis dudit lieu et de ~jan, demeurant en son château de

~jan, paroisse de Saint-Vougay, évêché de Léon;
« N. de Calan: le fils, mari de dame Anne-Suzanne Mahé
de I~morvan ;
« Jean-René Huon, chevalier, seign eur de Lesguern ; .
« Alain du Parc, seigneur de Lesgouet. «
Voici, entre autres, trois actes qui font mention de Renée
de la Marche et que j'ai pensé int,éressant de reproduire:
Le 13 juillet 1631. Les registres de la pal'oisse de Saillt­
MaLhieu contiennent l'acte de baptême ue Claude, fils de
de ~guen et de dame de Rosily, seigneur et dame
Jacques

de I);nisy, Silguy, etc. Le parrain est « noble et puissant
Messire Claude Visdelou, seigneur de Boenassis~ la Go .

belaye, Pratanrous, etc ., conseiller du Hoy et président au
présidial de Quimper; la marraine~ noblé et puissante dame
Renée de la Marche, dame du Mesle, I);angal et propriétaire
de la Rospordenie (sic ), :&minihy, la Marche, ete. L'acte
n'est signé que par Cl. de Visdelou et Renée de la Marche. 1)

Le 18 novembre 16.58 sur les registres de la paroisse de
Saint-Mathieu se trouve un acte de baptême fait par monsei.
gneur François Visdelou. Il s'agissait de la fille de Messire
François l'Honoré et de dame Pegasse, seigneur et dame de
:&anbiquet, Les parrain et marraine, étai,'nt « Marc-Anthoine

Le Pape, seigneur du Bois dela Haye et damoiselle Françoise
Lecanau, dame du Plessis-Pegasse. Cet acte est signé: Marc­
Anthoine Le Pape, Françoise Lecanau, Olivier Salou, Fran­
çois-Marie du Boisguehenneuc, Ursule l'Honoré, Renée de
la Marche, N. l'Honoré, Jean Leflo, de Tremie, Jean Stangier,
Hervé, Moreau, René Salou, François Visdelou, évêque de
Madaure, coadjuteur de Cornouaille -}- Germain l'Honoré,
Jacques l'Honoré, prêtre.
Le 6 juillet 1659, dame Renée de la Marche, marquise
douairière de Mesle, figure sur le registre de Saint-Julien
de Quimper comme marraine de Louis-René de la Marche,
Messire Yves de la Marche, chef de nom et d'armes,
fils de
seigneur de I~fors, de Lesquiffiou, conseiller du Hoy, son
lieut"nant p~rticulicr civil et criminel au siège de Quimper (et
de Jeanne Frollo). «( Le baptême fut administré dans l'église
eathédrale de Cornouaille par Messire Eusèbe de Coniac,
seigneur prieur de Gahard, grand archidiacre et chanoine de
l'église cathédrale de Quimper, en présence du parrain,

Louis Frollo, écuyer conseiller du Roy, son garde scel:fu
présidial; de Marie BilIoart, de Marie Bougeaut, d'Hervé
Moreau de ~gazen, de François de :&sulgar, de Guy Frollo,
d'Yves-René de la Marche et L Dareaut, recteut'.

A cette dernière date, Renée de la Marche devait avoir
près de 80 ans Elle avait fait l'abandon de ses biens à son
fils Claude du Chastel, et vivait à Quimper très considérée,
sous le nom de marquise douairière de Mesle.
La date de sa mort n'est pas connue.
Cla~tde du Chastel, ma?'quis de A'lesle (1). Claudedu Chas-
tel Mesle, dit le marquis du Chastel, né le 6 juin 1621, eut une
existence très orageuse, et ce qui en est connu fel'ait désirer
d'en connaître plus complètement les détails.
L'ancienneté de sa famille et une très grande fortune per-"
mettait d'espél'er pour lui un avenir bl'illant; en effet, deux
fois il put s'allier aux plus nobles familles de Bretagne .
était très jeune encore quand un mariage avait été pro­
jeté pour lui avec Mauricette de Plœuc (Mlle de Tymeur),
dont les parents étaient Messire Sébastien de Plœuc, sei­
gneur de Tymeur, et Marie de Hieux. La non-exécution de
ce projet, dont nous ignorons la cause, laissa subsister
entre les deux familles un levain .d'hostilité qui eut des suites

funestes.
Les jeunes gens se marièrent chacun de son côté Claude
du Chastel épousa, le 10 octobre 1639 Cà 1H ans), Sainte
Budes (2), dame de .I);moguer et du Hestmeur, Bièce du
maréchal de Guébriant. De son côté, Mlle de Tymeur épousa,
en 1644, Donatien de Maillé, marquis de Carman.
Le mariage de Claude du Chastel ne fut pas heureux. Guy
Autret, cousin-germain de sa mère, recevant une lettre de .

(1) Il étnit qualifié « marquis du Chastel et de Mesle, de la Garnache
et de Goulaine, comte de Beauvoir-sm-Mer. vicomte de St-Nazaire, baron
de Gouarlot, seigneur de Cha lea ugal, Rosq uijeau, Landreverzec, ct u
Quelennec, du . Kergoat, de Glomel, du Granec, de l{erminihy, de la
Marche, de Bodriec etc.
(2) Les armes de la famille Budes sont d'argent au pin de sinople fruité
de même, accosté de deux fleul's de lys de
d'or, chargé d'un épervier
gueules. .

son neveu qui lui annonçait que sa femme était grosse, écrit
« qu'il en éprouve une joie indicible, tenant à grand honneUr
d'avoir par ce moyen un neveu qui est au même degré
taO
parent de Monsieul' le maréchal de Guébriant ». La vanité

si naïvement exprimée par Guy Autret ne fut pas satisfaite

car la nouvelle était fausse (1 ).
sen
Le ménage fut bientôt complètement désuni et la maré,
ChE
chale de Guébriant ne réussit pas à rapprocher les époux
cel

Guy Autret reconnaît qu'il n'y a rieR à faire qu'à dissoudre

le mariage, en présence de la haine que la femme éprouve
pet
pour. son mari que, dit-il, « elle accuse, à mon avis, sans

« sujet, de n'être pas assez mauvais jousteu,r (2). » Le ma,
riage fut annulé au mois de mars 1646, par sentence contra,
dictoire de l'Official de Cornouaille, et confirmée par arrêt.

Deux ans plus tard, Sainte Budes était remariée à Anzeré,
taU
seigneur de Courvaudon, conseiller au Parlement de Rouen,

et Guy Autret partait de Lezergué avec son . neveu Claude
du Chastel, pour prendre des renseignements sur place au
sujet d'un projet de mariage de ce derniel' avec Yolande de
ter
Goulaine (3). '

Dans une lettre du 21 octobre 1647, le pauvre Guy Autret

raconte ses tribulations: .
« Messire Claude, marquis du Chastel et de Mesle, me
vint enlever de Lezergué -et me mena à Rennes, à Nantes
et à Goulaine tretter de son mariage avecque dame

(1) Dans cette même lettre, il félicite à l'avance Messire de Guébriant
de sa nomination au rang de Maréchal, qui n'eut lieu que quelques jours
1 a très intéressante publication de M. le comte de Rosmorduc
plus tard.
connaître plusieurs lettres ete Guy Autret q li avaient échappé à
m'a fait
mes recherches.
(-2) O'après une note trouvée à la Bibliothèque nationale, il résulterait
sa femme l'avait fait déclarer impuissant.
que
(3) La famille de Goulaine, de Goulaine, diocèse ete Nantes est une des
plus ' anciennes et des plus illustres de Bretagne. Ses armes sont partie
d'Angleterre et de France.

yolande de Goulaine, fille aisnée de Gabriel, marquis ',
de Goulaine et de Claude Lecornulier. Nous avons trouvé
tant de longueur et d'obstacle à ce mariage,-< que nous y
avons ' employé près de deux mois de temps, le premier
mariage du dit du Chastel avec dame Sainte Budes à pré­
sent dame de Courvaudon ayant obligé les parties à re­
chercher une infinité de précautions pour la sureté de
celui cy. P~ndant ce tèmps, il a fallu visiter les parents
de la maîtresse dans le Poëto.u et rAniou~ où j'ai voyagé
pendant trois sepmaines ».
Le mariage eut lieu le 29 septembre 1647. Yolande de
Goulaine prit rapidement un grand empit'e sur son mari,
beaucoup trop faible vis-à-\ is d'elle, et le pauv.re Guy Autret
put voir, avant de mourir, combien avaient été insuffisantes
toutes les précautions prises par lui pour assurer le bonheur

de son , neveu.
Avant d'entreprendre le récit des mésaventures survenues
à Claude du Chastel ·dans son intérieur, il y a lieu de )'8tOn-
ter son duel avec Donatien de Maillé, marquis de Carman , .
dont l'issue fut singulièrement tragique. La querelle se pro-
duisit au sujet d'une mo~vance de fieff eur Ull village dépen­
dant du marquisat de Tymeur et voisin des terres du marquis '
du Chastel. Cette querelle fut peut-être bien envenimée pal'
une sorte de rivalité rétrospective, car le mal'quis de Carman .
était le mari de Mauricette de Plœuc, qui avait été pour'
ainsi dire fiancée à Claude du Chastel. Ce dernier appuyait
sa réclamation sur de « bons papiers)), Maillé lui répondit
grossièrement « de s'en t ... le c ... )l. Ils s'injur.ièt'ent; du
Chastel défia son advel'sail'e et un duel s'ensuivît. Les deux
adversaires, accompagnés chacuIl de deux témoins, se ren­
contrèrent le 22 mars 1652: aupl'ès du bourg de Berrien (1),

(1 ) 4 6 ldlomètres au nord du Huelgoat.

Claude du Chastel avait avec lui Gabriel de Bouvans (1) et
Jan de Mescam (2). Les témoins de Maillé étaient Jean Le
Borgne (3) et 1~ seigneur de Kerincu.
Suivant une ancienne coutume, dont je ne connais pas
d'exemple plus récent, les quatre témoins prirent part au
combat, et il s'engagea un triple duel entre ces six gentils_
hommes. .'
Dès le premier moment, Boùvans désarme Kerincu et lui
fait d~mander la vie. Kerincu refuse, et pendant la discussion

trouve moyen de ramasser son épée et de fondre par derrière
sur Bouvans, qui allait au secours de Mescam . Mais il
manque son coup et Bouvans: se retournant, le met en fuite,
le poursuit et le tue d'un grand coup d'épée dans le dos.
Mescarn était blessé par Le Borgne, il riposte et blesse à

son tour son adversaire si grièvement que c8dernier mourut
au bout de deux jours.
Cependant les deux marquis continuaient le ·. combat;
mais Maillé, qui avait reçu un grand coup d'épée au côté et '
beaucoup de sang, fut bientôt forcé de rendre son
pel'dait
épée. Bien qu'il eut été immédiatement soigné par le valet
de chambre de Claude du Chastel, qui était chirurgien, il
ne tarda pas à succomber aux suites de sa blessure.
Ainsi. par la mOl't des trois adversaires de Claude du
Chastel, finit ce duel qui eut un grand retentissement en
Bretagne.
Les parents des tl'ois victimes pl'otestèrent énergiquement,

disant que Bouvans avait agi contrairement à toute:: les
règles du chI el , qu'il était un véritable assasin et devait êtl'e

fus illé et qu'on pouvait. tombel' sur lu i « en r..rmée Il.
J'ignore quelle suite a pu êll'8 donnée à ees plaintes;

(1) Bouvdns, se igneur du Bois de la H.oche, en Commana, de Keraclenee.
('2) Mescam, seigneur cie Mescam en Lannilis, du Stangier
(3) Le Borgne de Kermorvan, en Plougasnou, seigneur des Salles.

. l'affaire a dû être étouffée probablement 'par le crédit du dùc
de Rohan, dont Claude du Chastel avait suivi le parti. En
toUS cas, il ne fut pas sérieusement inquiété. .
Richelieu ~tait mort, et dans la période des troubles de la
gouvernement royal avait peu de loisirs pour
Fronde le
s'occup~r des duels entre particuliers. Moins heureux que
François de Rosmadèc, comte des Chapelles,
lui, son cousin
avait été exécuté le 21 juin 1627, en place de Grève, pour
s'être battu en duel à Pal'is, place Hoyale, en plein jour, le
12 mai 1627. Il était le second de François de Montmorency,
comte de Boutteville, qui fut exécuté également .
. Le second mariage de Claude du Chast~l ne fut pas heu­
reux, bien qu'il fût de sa part un mariage d'inclination. Il
biens en fonds de terre et prit pour
avait un million de
ainsi dire sa femme ( toute nue »). Les parents de la mariée
avaient bien promis une dot de 20,000 écus, mais ils ne la
payèrent jamais, car leur fortune était grevée de plus de
300,000 livres de dettes qüe leur gendre paya par la suite.
Claude fut assez longtemps sous le charme de sa femme,
et plus tard. quand on l'accusa de magie, il disait d'elle
u qu'elle était la ma gicienne qui l'avait ensorcelé »). Le fait
jugement il se désintéressa complètement
est qu'avec peu de
de ses affaires. eri donnant à sa. femme une procuration gé-
nérale pour les gérer. .
Cela ne suffit pas à Yolande de Goulaine, qui avait entre­
pris d'éloigner Claude de sa famille, en lui faisan-t vendre
successivement t.ous ses biens de Basse-Bretagne et trans­
porter sa fortune dans le pays dont elle était originaire. .
ces négociations se faisaient sans qu'il intervint lui­
Toutes
même autrement que pour donner sa procuration à sa femme
ou à quelqu'un de ses parents ' qu'elle désignait.
En décembre 1652, Guy Autret dut se transporter à R08-
porden où « dame Yolande de Goulaine, munie des }Jrocu­
rations de son mari et de sa belle-mère, dame Renée:

douairière de Mesle, vendit les tenues de Chateau gal 1
" seigneur de Coatengarz, chef de nom et d'armes d

« Chastel », -
La vente des biens ~e Bretagne avait produit, en 1652
450,000 livres, qui furent employés jusqu'à coucurrence d~
350,000 livres à l'achat de la baronnie d'Ancenis, apparte_
nant à César de Vendôme, duc de Mercœur et de Penthiè.;.
use
vre et à Françoise de Lor-raine, son ép9 . Yolande se
réservait lé surplus pour payer quelques 'dettes de famille
mais la baronnie d'Ancenis fut reprise par le vendeur, en
vertu d'une clause de réméré, et la marquise du Chastel fit
alors, en 1653, acheter, toujours avec une procuration de son
mari, les terres de la Garnache et de Beauvoir-sur-Mer,
pour la somme de 393,000 livres. Comme les 350,000Iiv.
provenant de la vente d'Ancenis avaient été en partie
encore employés au payement de dettes de la famille de
Goulaine, elle fut obligée, pour payer cette acquisition,
de faire contracter à son mari, en 1654, un emprunt de
130,000Iiv.
En août 1656, eut lieu la vente de la terre de ~minihy,
qui était une propriété de Renée de la Marche, ' abandonnée
par elle pl'écédemment à son fils.
En 1658, nouvelle vente de Mesle, Glomel et Moëllien, à
Messire Gille-Jacques de ~villio. L" a ' même année, la mar­
quise, au moyen d'une procuration donnée à un de ses oncles
par du Chastel, . fait acheter à son mari, pal' démission, tous
les biens dépendant de la terre de Goulaine, à la condition
qu'il en paye les dettes, dont le chiffre était fort élevé, et
qu'il accepte différentes clanses contl~e lesquelles du Chastel
protesta plus tard, comme trop onéreuses, savoir:

1 Le paiement d'une somme de 12,000 livres comptant:
2 L'engagement de bailier, pour la dot de la cadette de la

maison de Goulaine, une somme de 100,000 livres, dont il .
paya effectivement 60,000 livres; (1) .
30 Le paiement de toutes les dettes de la maison de (;ou- .
laine, montant à 300,000 livres;
4° Une pension de 12,000 livres au seigneur et dame de
Goulaine,' ses père et mère. .
En 1660, eut lieu la vente de la vicomté de Saint-~azàire,
à Messire Jean-Urbain de Carné; enfin, en 1664, Mme '-du
Chastel, non contente des avantages que lui avait faits précé­
demment sop. mari (d'après lui 500,000 livres ènvirl)n)", cher­
cha à obtenir la démission générale de tous ses biens 1 mais
Claude, qui jusqu'alors avait toujours fini par céder aux
exigences de sa femme, en présence de cette nouvelle
pour la première fois de sa vie, ne voulut pas y
exigence,
consentir. Aussi, à partir de ce refus l'inimitié de Mme du
Chastel se déclara ouvertement. Elle quitta son mari, et, tOqt
en continuant de toucher les revenus de ses biens, refusa de
revenir avec lui.
Toutefois, en 1666, dissimulant son ressentiment, elle se
rapproche de lui et se fait donner une procuration encore
plus étendue pour l'administration de ses biens. pendant son
absence (2), procuration qu'elle fît proroger en 1668 par la
cour de Rennes et dont elle se servit abusivement, d'après
son mari, pour faire toute sorte de dégradations et notam-
ment pour vendre les bois de la forêt de Bodriec.
Enfin, alléguant probablement de très graves reproches
(l) Anne de Goulaine épousa en premières noces Sébastien de Rosmadec,
en secondes noces N. de Francheville et mourut jeune, laissant une
fille, Jeanne-Genèviève de Rosmadec qui hérita de Goulaine après la mort
de sa tante Yolande. Anne avait encore un frère Louis jésuite et deux
sœurs Marie et Charlotte religieuses, dont il n'est pas fait mention dans
cet arrangement de famille.
('2) Claude du Chastel habitait en ce moment à Paris, ne voulant pas, ou
. ne pouvant pas, revenir à Goulaine.

contre son mari absent, elle obtient, le 30 mai 1670, du
Chastelet de Paris un jugement par forclusion, prononçant
la séparation de biens. Les termes n'en sont pas connus
mais ils devaient être complètement à s,on avantage, d'après
une pièce retrouvée à la Bibliothèque nationale, seul débris
de la procédure par laquelle le marquis du Chastel, revenu
en France, en appelait de ce jugement pris par défaut Contre
lui pendant une absence qu'il déClarait avoir fait pOur le
service du Roy. Il s'en expliquera, dit-il, en temps et lieux
en pleine chambre. .
Dans cette pièce, mémoire fort détaillé, du Chastel, par
la bouche de son procureur, proteste contre les accusations
de toutes natures portées contre lui: dissipation de biens,
bigamie, polygamie, magie, etc., et il reproche à sa femme
de n'être pas venu le voir pendant qu'il était à la Baslille .
Au lieu de solliciter sa liberté,elle a préféré les délices de la
province et faisait des railleries publiques de sa détAntion.
Elle eut la dureté de le réduire à la plus grande misère, l'aban­
donnant sans ressources et, bien qu'il n'y eut pas séparation
de corps, lui refusant l'accès du château de Goulaine, dans
lequel elle s'était fortifiée, bien plus, détournant même de
le faire, ceux qui pourraient l'assister. N'a-t-elle·'même pas
été jusqu'à chercher à le faire assassiner par son écuyer (1).
L'accusation de magie dit-il- repose s~r ce qu'il aurait fait la
quelques formules magiques; mais il ne l'a fait
copie de
que par simple curiosité, sans avoir aucune connaissance
de ces choses, et il n'a ja mais été inquiété à ce sujet. La
dot de 20,000 livres de Mme du Chastel est intacte et,
d'après la coutume de Bretagne, elle n'a pas deoit au demi­
douaiee, par le fait qu'elle a quitté son mari, '
Après avoir repoussé toutes les accusations de sa femme,
(1) Le procureur fait à celle occasion une citation: Dalalac mactant et
mala et damna viras.

du Chastel demande à la cour d'autoriser une information
sur place pour lui permettre d'établir les faits qu'il allègue
et de prescrire à la marquise du Chastel de rendre à son
mari tous les titres de propriété qu'elle détient, titres sans
lesquels-il lui est impossible d'établir le chiffre de sa de­
mande.
Dans cet abrégé de la requête, j'ai atténué les accusations
portées contre Yolande de Goulaine, tentative d'assassinat,
d'empoisonnement, etc. Il aurait été intéressant de savoir ce
que la marquise répondit à son mari; mais je n'ai rien pu
trouver à ce sujet dans les archives de Paris et de Nantes
que j'ai consultées, et M. le marquis de Goulaine m'a ré-
pondu que toutes les arch.ives particulières de sa famille
avaient disparu pendant la Révolution .
Je n'ai pu davantage trouver dans les archives du Chastelet
la trace du jugement qui a dû intervenir, car la séparation
de biens a été certainement prononcée. La -liquidation dut
être longue et difficile, par suite des procès qui se multi­
plièrent et dont quelques incidents sont seuls connus .
La vicomté de Saint-Nazaire avait été prédédemment ven-
due à Urbain de Carné.
La terre de la Garnache fut adjugée, en 1675, à Pierre de
Gondi, duc de Retz, moyennant 220,000 livres, chiffre contre
lequel les créanciers du marquis du Chastel protestèrent,
prétendant que cette terre valait plus de 400,000 livres; elle
avait été achetée 393;000 livres en 1653 .

Claude du Chastel rentra en possession d'une partie de ses
biens de Basse-Bretagne, possession bien précaire, car ses
créanciers avaient obtenu la mise en vente de Missirien,
Bodriec, La Marche, Rosquijeau et Quillymilin. Claude fit
appel; d'autre part, sa femme av:}it fait opposition sur les
sommes à provenir de cette vente qui produisit 46,000 livres
sur une mise à prix de 38,000. Il vécut encore quelques
années, ruiné et probablement h-arcelé par ses créanciers
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXX (Mémoires) 20

qui n'avaient pas encore complètement désarmé plusieurs
années plus lard (1 ).
D'après la Biogr'aphie générale, le marquis serait mort il
Port-Louis en 1668. Cette date doit être rectifiée. Voici la
copie de son acte de décès:
(c Le vingt-deuxième jour d'octobre mil six cent quatl'e_
vingt huit a été enterré dans le chœur de l'église Notre_
Dame (de Port-Louis), le corps de Messire Claude du
Châtel, chevalier marquis du Châtel, de la Garnache, etc
âgé d'environ soixante-huit ans » •
La marquise du Chastel, cumme femme séparée de biens
de Claude, marquis du Chastel, fournit en 16HO-1681, la
déclaration exigée pour la Héformation du domaine royal
pour le marquisat de Goulaine, paroisses de haute et basse
Goulaine, dont elle était devenue propriétaire com:me fille
unique et héritière de son père Gabriel de Goulaine, sei-
gneur du Faouët, etc., et de Claude Le Cornulier.
Elle mourut le 1 juillet 1696, à l'âge de 70 ans: après avoir
le 25 mai précéden t fait une fondation en fa veur de la paroisse
de haute Goulaine, consistant en une somme en principal de
7,182 livres 1J1acée sur les Etats de Bretag~e (2) .
. J'aurais ' maintenant pu terminer l'histoire du marquis
et de. la marquise du Chastel, si je n'avais voulu savoir
quelle était cette mission dont Claude s'était prévalu pour
justifier son absence. Il avait été réellement incarcéré à la
Bastille, le 16 août 1670, pour intrigues diplomatiques;
les aventures qui l'y ont conduit sont réellement bien
extraordinaires.

(1) Un arrêt du Parlement de Paris, du 16 janvier 1677, avait homologué
la convention intervenue entre les créanciers du marquis du Chastel, et le
directeur desdits créanciers poursuivant contre lesdits.
(2) Elle fut. enterrée à Paris en l'église Saint· Germain l'Auxerrois. Son
épitaphe, qui a disparu, était placée au 2. pilier du milieu des bas côtés du
chœur, à droite.

Claude du Chastel (m Italie et à la Bastille. Depuis
que deux princesses de la famille de Médicis étaient montées
sur le trône de France, on rencontrait à Paris, dans tous'
les rangs de la société, de nombreux Italiens venus pour
y chercher fortune, et souvent peu scrupuleux sur le choix
des moyens à employer.
Un abbé Cermelly, né à Alexandrie, dans le Milanais, vers
1630, vint à Paris en 1664 ou 1655, à un moment où la reine-
mère, Aune d'Autriche, était gravement malade, d'un cancer
disait-on. Cernelly se présenta comme portour d'un remède
qui devait assurer la guérison de la reine, et parvint à se
fail'e admettre auprès d'elle; il lui donna ses soins, elle n'en
mourût pas moins le 20 janvier 1666. Malgré tout, Cermelly,
qui devait avoit' de puissants protecteurs, trouva le moyen
de se fail'e nommer secrétaire et gentilhomme ordinaire de
la chambre du Roy. Plus tard, ce qui est encore plus étonnant,
il fut pourvu de l'abbaye de Saint-Victor de Marseille, qui
était une des plus considérables de France.
Sans occupation précise à Paris, Cermelly s'occupait, en
1666-1667, d'intrigues aya nt pour but, de procurer Je
grands avantages à la France en lui assurant la place
d'Alexandrie. Les habitants étaient, d'après lui, prêts à se .
soulever contre la domination du roy d'Espagne, duc de
Milan, avec qui Louis XlV était alors en rivalité. Cel'melly
était en même temps l'agent du marquis de Carretto, qui
voulait mettl'e sous la protection de la France ses domaines
qui, situés dans le sud de Montferrat, étaient conLinuel­
lement menacés par ses voisins, le roi d'Espagne duc de
de Savoie et la République de Gênes.
Milan, le duc
Ces iritrigues n'avaient pu aboutir, quand il rencontra à
Paris à l'hostellerie de Béthune, où ils habitaient tous deux,
du Chastel qui, « malade de la goutte, faisait toujours bon
feu dans sa chambre, ce qui lui attirait la société de toutes
sortes de personnes. « Cermelly, qui était un de ses habitués,

guérit du Chastel, et c'est ainsi qu'ils se lièrent ensembl
Après la mort de la reine, ils étaient allés tous deux jetel'
de l'eau bénite sur le cercueil, quand Cermelly~ reconnu par
un huissier, fut dénoncé par lui au peuple comme ayant tué
la reine et eut été infailliblement jeté par la ' fenêtre sans
l'intervention de du Chastel. Leurs relations devinrent alors
plus intimes, et Cermelly, jugeant que le marquis était
l'homme dont il avait besoin pour faire réussir ses intri_
gues, lui fit part de ses projets, protestant « qu'il n'avait
d'autre but que d'assurer au roi de grands avantages,
entre autres la possession de la ville d'Alexandrie.»
En invoquant cette considération, Service du Roy, il. obtint
cette fois et put toujours obtenir le concours de du Chastel.
même pour les démarches les plus inconsidérées.
une première ouverture, ce dernier avait seulement ré­
pondu que c'était :( une affaire qu'il ne fallait pas négliger ».
Sur de nouvelles instances, il se rend à Turin, pendant que
après avoir poussé jusqu'à Alexandrie, vient lui
Cermelly,

'rendre compte de ses démarches et rapporte une députation
signée des intéresses (1). Ils reviennent ensemble à Paris, la
députation fut remise au Hoy qui répondit « en ajournant à
un autre temps e~ remerciant les intéressés».
Cermelly ne se tient pas pOUl' battu et, insistant alors
surtout sur les avantages pour le Roy de prendre pied dans
marquisat de Carretto, il s'abouche avec un nommé
Duprat, valet de chambre du Roy, qui sert d'intermédiail'e
pour introduire du Chastel en présence de Louis XIV. A une
première demande d'audience, on lui répond simplement de
faire ses propositions par écrit; mais du Chastel déclare
qu'il ne peut et ne veut parler qu'à Sa Majesté elle-même,
et il insiste tellement qu'une audience lui est enfin accor-
{il Le mol « députation» est évidemment rn.,is ici dans le sens « décla­
ration »).

dée à Vincennes. « Il est reçu pal' le Roy dans la
chambre du Conseil, où il n'y avait que Monsieur (1), et
MM. Letellier, de Lyonne et Colbert. Le Roy lui fait l'hon-
neur de lui dire que c'était une mission bien périlleuse et
qu'il prit bien garde à sa personne; qu'il ne croyait pas
nécessaire qu'il y allât, mais que cela pouvait se négocier
pal' lettres ».
Du Chastel répondit que les intéressés ne le désiraient
pas, et Hnit par obtenir une lettre de cachet, en date du
22 janvier 1668, servant à l'accréditer pour cette mission,
avec la recommandation « pourvu quecela soit sans éclat (2) ».
Il est nécessaire de connaître les termes exacts de cette
lettre de cachet. En voici la teneur:
« Le Hoy donne pouvoir par la présente signée de sa
main au seigneur marquis du Chastel d'écouter toutes les ·
propositions qui lui pourront être faites, soit par les com­
munautés entières ou par les particuliers de la noblesse ou
du peuple des villes et places du. duché de Milan, dans la
vue de se tirer' de l'oppression insupportable de la domina­
tion espagnole, sons laquelle ils gémissent depuis si long-
temps, et, sur le compte que ledit mar:quis du Chastel rendra
à Sa Majesté desdites propositions, elle luy fera savoir ses
intentions sur les traités que pourra conclure avec lesdites
communautés ou particuliers dudit duché de Milan, en foy
de quoy Sa Majesté a signé la présente de sa main et y a
fait a pposer le scel de son secret.
( Fait à Pa ris, le 22 janvier 1668
« Signé : LO VIS.
« Contresigné: DE LYONNE. J)
(1) Le duc d'Orléans.
(2) Malgré les succès que le Roy venait d'obtenir dans la guerre qu'il
la Suède et l' Angletel're,il était tenu à beaucoup
soutenait contre la Hollande,
de réserve vis-à-vis de l'Espagne, qui occupait les Pays-Bas et le Milanais.

On voit que la mission consistait seulement à prendre des
renseignements et à rendre compte au Boy des propositions
qui seraient faites. Il n'est qUt..stion que du duché de Mila n
et point du marquisat de Caretto, bien que plus tard Cel'melly
ait cherché à équivoquer sur les termes de la lettre de cachet.
Cermelly part presqu'immédiatement pour l'Ltalie~ laissant
à Paris du Chastel, qu'il presse vainement de venil' le re­
joindre et qui pendant trois ou quatre mois, invoque pour
ne pas partir son état de santé, suite d'une attaque d'apo­
plexie ' et de plus son manque d'argent. Tl se décide enfin,
. raconte Cermelly, à envoyer à Lyon, en avant, avec ses ehe­
vaux son écuyer de cuisine Dumas et un e demoiselle cc qu'il
('( disait être sa fille et qu'il fit habiller en homme ,). Mais il
n'arrive toujours pas et il écrit même à Cermelly en lui Con-
. seillant « de prendre un logis plutôt que de demeurer Jans
« une hôtellerie où]a dépense est trop g rande. »
Là-dessus Cermelly, craignant de laisser échapper quelque
occasion favorable, part pour Venise, proposant à la demoi­
selle de le suivre. Elle refuse, et on n'entend plus parler
d'elle. Au contraire Dnmas consent à pal'tir sur la vue d'u ne
fausse lettre que Cerm~lly disait avoir reçue de du Chastel,
pour obliger Dumas ' à le suivre; mais bientôt Cermelly
s'aperçoit que c'est un témoin gênant qui déjà le sou p­
çonne de s'être emparé des effets de son maître, et dès lors,
il cherche à s'en débarrasser par n'importe quel moyen .
rls étaient descendus à l'auberge de Notre-Dame à Sai nt­
Pierre d 'Arena, près Gênes, quand un .liégeois, nommé du
Buisson, valet aJu service de Cermelly, vint cc soupirant et.
tremblant » prévenir Dumas qu'une mort inévitable l'atten­
dait, et il raconte la scène suiVante. Cermelly se chargea it de
tout et dans ce but avait fait prendre les pistolbts et le mo us­
queton qui étaient dans la chambre de Dumas, il avait fait
sur ces armes plusieurs signes de croix et continué c( pal' des
paroles à charmer ». Il mit alors les armes· aux mains de

Dujardin et le fit tirer trois fois sans qu'elles prissent feu. Un
nouvel essai répété trois fois donna le même résultat cc .ce
qui se passa très bien suivant l'intention de Cermelly ».
Dumas, lui-même~ qui avait retrouvé ses pistolets, les
tira trois fois sans leur faire prendre feu. Il fallut qu'il les
déchargeât et les rechargeât pour rompre le cha l'me ... .
Ils partirent tous ensemble. mais au bout de quelques jours,
à la traversée des Apennins, Cermelly fit brusquement atta­
quer Dumas .par ses serviteurs, Ce dernie', qui était sur ses
gardes commence, par charger les deux valets qui se
sauvent, puis, se retourne contre Cermelly, qui avait son
pistolet à la main, mais qui, en présence de l'attitude
résolue de SOrt adversail'e, s'enfuit ( à course de chevaux ».
Dumas le poul'suit, l'atteint et le force à demande!' grâce,
en tournant la tête et en metta nL son pistolet dans le four­
reau. Cermelly, furieux, s'en prend aux deux laquais, et
il veut les tuer; mais l'instinct de la conservation l'emporte,

il se calme et par la cl'ainte des bandits, ces quatre person-
nes continuellt ensemble leur ' r'oute, prennent à Bologne
une trompette (?) et al'rivés à Venise s'installent dans un
hôtel voisin de l'a place Saint-Marc
Dumas, étant entré dans la chambl'e de Ce"rmelly, avait
acquis la certitude du pillage de la cassette de son maître,
et apprenant que Cermelly avait un jour de füil'e à Padoùe
vendu 18 pistoles' le cheval d'Espagne de du Chastel, il se
décide, accompagné par plusieul's officiers de l'armée de
Candie, à appeler Cermelly devant (c le juge des voIleries
où on conduit les voleurs». Mais le jnge G iustiniani était le
frère de l'ambassadeur de la Sérénissime République près
le Roy de France, et Cermelly put facil ement lui faire croire
que lui séul avait les ordres du Roy, et que tout ce qui
venait de du Chastel ou des Français était faux. Il n'y eut
pas de jugement: mais le juge vînt retrouver Dumas au
palais de ~aint-Marc, le réprimanda et, malgré ses protes-

tations, l'invita à cesser ses attaques contre un homme qui
était porteur des ordres du Hoy. Puis, Giustiniani lui rap_
est
porta le propos suivant de Cermelly, « qu'il mangerait Son
l'he
déc
cœur, qu'il ne fit assassiner Dumas l), et il crut devoir le
conduire dans sa propre gondole jusqu'à son domicile chez
la signora Camilla Muscal'dina. Au lieu d'y restel' un mois, ne

comme Guistiniani le lui demandait, Dumas jugea prudent

d'accepter les offres de Juste Vaneys, marchand flamand,

et le garda dans 0 sa maison de cam­
qui le fit sauver de nuit
pagne; au bout de quatre jours Dumas put repartir pOur
SOI
Rome où il comptait retl'ouver son maître. A Venise, tout
le monde le croyait mort.
fan
Pendant ces retards, les événements avaient marché, et
COI
les pourparlers engagés entre les puissances belligérantes
avaierït abouti au traité de paix d' Aix-la-Chapelle (2 mai 1668).
étE
Toute entreprise des Français SUl' Alexandrie devait donc
sel
êtl~e forcément ahandonnée, et Lyonne écrit à un de ses
secrétaires, le sr Berthemet, d'aviser du Chastel que IH paix
JOl
est faite et de cesser les négociations. Du Chastel, encore
convalescent, reçoit froidement cet avis, et demande que la
foi
lettre de Lyonne lui soit remise, ce que Berthemet l'efuse.
Plus tard il profitera de ce refus pour dire qu'il ne lui était

pas défendu expressément d'aller eu 1 talie, et que, du reste,
il n'~vait pas pris d'engagement à cet effet. Il répond enCOl e
à Berthemet « qu'il faut écrire directemellt à Cennelly parce
que lui, on ne le croirait pas n.
Lyonne n'y avait pa~ manqué, el Cermelly ne put le nier,
mais, s'il n'avait plus à intriguer au sujet de la ville d'A­
lexandrie, il lui restait la question du marquisat de Caretto.
Aussi, ayant bien vu le parti qu'il pouvait tirer du marquis
du Çhastel, il s'était empressé de lui écrire de ne pas renon­
cer à son voyage en Italie, de venir quand même, qu'il y
tit
avait enCOI'e beaucoup de nAgociations à faire dans l'intérêt
du Roy. Cette lettre très pressante, confiée aux soins du

marquis Giustiniani, ambassadeur ~e Venise près du Roy,
est remise par un valet de l'ambassade à du Chastel dans
l'hôtel où il se trouvait, rue de la Verrerie. Du Chastel se
décide enfin à partir; plus tard il donnera pOUl' excuse que,
en agi.ssant contrairement anx ordres de M. de Lyonne, il
ne croyait pas méconnaîtl'e les ordres de la cour. « parce
qu'il n'y a pas été élevé, n'ayant pas bougé de la province. ,
S'il a failli, c'est par excès de zèle pour le service de Sa
Majesté »).
Quelques explications au sujet de ce marquis dt de Caretto
sont maintenant nécessaiJ'es.
Les CareUo étaient les représentants d'une tl'ès ancienne
famille, qui possédaient dans le sud du Montferrat des fiefs
considérables, relevant de l'Empire directement et émettant
des prétentions sur plusieurs villes du littoral qui leur avaient
été enlevées, disa ient-ils, par la République de Gênes. Res­
serrés entre les Etats de cette République, du duché de
Milan et des ducs de Savoie, leur indépendance était tou­
jours menacée et, suivant les circonstances, ils s'alliaient
successivement à l'un ou à l'autre de leurs \70isins, Quelque­
fois, ils cherchaient un-appui auprès des rois de France; un
CareHo, dit le cardinal de Final, fut archevêque, duc de
Reims, sous Louis XII. Alphonse, qui suivait le parti de
l'emperelll' Ferdinand 1 , fut rétabli, par lui dans ses Etats
et confirmé dans ses anciens titres de marquis de Savone,
Clavezana et Final, prince du Saint-Empire et son vicaire
perpétuel en Italie. Au commencement du XVIIe siècle, le
dernier représentant de cette illustre famille vît ses Etats
envahis par les Espagnols et mOl;lrut en exil. Cinquante ans
plus tard, il y avait encore un marquis de CareHo : c'était
un aventurier, François Cevoli, fils naturel d'un carme, qui
était parvenu, je ne sais comment, à épouser en 1627 l'héri-
tière de Frédél'ic de Caretto et à entrer 011 possession du
marquisat.

En 1666, Cermelly était aupeès de Louis XIV, l'agent de
ce vieux marquis de Caretto qui , tout en recherchant pen_
Jant la guerl'e la protection de la France contee les ma-
nœuvres du duc de Savoie, éceivait en même temps à l'Ell1_

pereur qu'il n'avait le dessein: ni de vendre ses terres, ni de
secouer le joug de r Empire. Cependant ~ il laissait faire
Cermelly, J'accord avéc trois de ses fils (1) que nous r etl'OU _
verons plus tard sous les noms de marquis de Gorzegno .
marquis de Spil1i et d'abhé de Gorzegno, agissant de concert
sur l'esprit faible du maequis du Chastel.
Après avoir reçu la lettl'e qui l'appelait avec instance, M,
en l'Italie, du Chastel se décide à partir accompagné
de son aumônier; il quitte Pal'is et, en arrivant à Lyon,
découvre qu'au moyen d'une fausse déelaration Cerrnelly
s'est fait remett.re son coffee par le banquier chez qui il éta it.

déposé, l'a fait poeter à son domicile, ouvrirde force et qu'il
beaucoup de documents et Je (~hoses précieuses. Du
a enlevé
Chastel en donne l'énumération suivante:
« Dans ce coffre, il y avait quantit.é de leUees seerètes et
importantes, dont Cermelly se sert comme écrites de sa main
[l a enlevé la toilette, qui était fort riche et de geand peix,
comme linge il bal'l)e, toilette de point. de Paris du plus
beau, einq collets de point de Venise avec les manchettes,
chemiSAS d'ollande, dentelles, mouchoirs, leinceuils, peig-

t.ons (?). hOllssets (?) et toutes sortes cl'autres linges néces-
saires lïnventaire. une cravate de taffetas noir avec dentelle do

Milan il double rang, un mancbon delolltl'e avec son anneau
d'argent qui avait eoùté trois livl'es, un baudrier coulen!' de
musc garni de boucles en filigeamme de vel'm eil1 e, deux
écharpes de taffetas blani~ avec ft'anges d'ol', line autee CO Il-

leur cerise, 2:·)0 pistoles d'Espagne, une boîte avec le podrait

(1) Il avait eu dix-sept enfants.

de la marquise du Chastel, sa femme, avec des médailles
DntiquGs et des monnaies d'or et d'argent des anciens sou-
verains rois d'Espagne de l'an de Christ 733, tous de la tige
ancienne des anciens seigneurs marquis du Chastel de
Termy (?), sortis de la royale maison des anciens roys de

Bourgogn@ environ l'an l .l: de Séllut (?) avec les monnaies or
et argent fabriquées de ce temps-là, de plus une mont.re
d'or de quarante pistoles sonnantes, une quantité de bijoux
de grande valeur et entre autres des raretés que le dit
seigneur marquis conservait pour faire présent à Sa
Majesté ». _
Du Chastel ayant 0 reconnu que CeI'melly, avait mis
consciencieusement sa garde-robe au pillage, voyant dès lors
qu'il n'avait plus rien à faire il Lyon~ continue son voyage

et part avec ses domostiques et ses quatre chevaux. Il
s'embarque à Marseille sur la galère ThéTèse, commandée
par M. de la Brossardière, relâche à Gênes, où M. de Sévé­
rae; lieutenant de la galère, est insulté par la populace.
débarque à Civita-Vecchia et arrive à Rome. Il y trouve
Cermelly, déjà installé, et il le presse tellement de questions
que Cermelly est fOl'cé d',wouer son vol d'argent et de hardes,
en donnant d'ailleurs pOUl' excuses que « s'il l'a fait c'est

pour affaires secrètes que le marquis ne doit pas ignorer, et
il les a mis en gage )~. Du Chastel, bien que soupçon­
nant la vérité, dissimule pourtant son ressentiment, et
c'est seuiement beaucoup plus tard que, complètement
désabusé, il fait par écrit le récit. de ses griefs conll'e
Cermelly .
Pendant son séjour à Rome, du Chastel eut plusieurs fois
« l'honneur de saluer le Pape )), et lOI'squ'il alla prendrA
congé, il était accompagné de l'abbé, qui portait une déco­
ration de l'ordre de Saint-Lazare. Le Pape, qui ne connais­
sait pas cette décoration, demanda quel était cet ordl'e
étranger.

Ils répondirent que cet oedre (1) avait été rétabli par
Bemoi IV dans l'église des Car'mes-Billettes de la ville de

Paris. Du Chastel s'empressa d'ajouter que l'ordre militaire
de Saint-Lazare pouerait certainement suivre l'exemple de
l'ordre de Malte pour donn er son concours à la religion (2),

et qu'il pl'éparait un va isseau armé de canons pou r aller au
secours de l'île de Candie. Lui-même proposerait aux États
de Bretagne d'accorder quelques secours pour la subsistance
des forces de cet ordre. Cermelly ajouta beaucoup de déve­
loppements en italien que du Chastel déclare n'avoir pas pu
hien comprendre. En définitive , le Pape remit à Cermelly un
bref donnant son appl'obation au projet qui lui était soumis :'
puis il fit adresser au roi de Frauce, par le cardinal Azzolini,
une lettee de r0merciemE'nt pour les assurances qui lui
avaient été données par du Chastel.
Le Hoy fut fort étonné d'appl'Emdre cette négociation. dont
il nt' connaissRi t pas le Pl'emirr mot. Il faut dire qu e depuis
leul' départ de France, du Chastel et Cermelly avaient cessé
de donner de leurs nouvelles. Le Roy protesta immédiate­

ment et le. Nonce fut forcé de reconnaître que la bonne foi de

Sa Sainteté s'est laissé surprendre.Cermelly cheechera plus

(1 ) L'ordre hospitalier de Saint-Lazare, fondé en 1119 pour recevoir les
pèlerins en Terre-Sainte, s'était transporté en France et s'occupa des
soins à donner aux malades et aux lépreux; A la fin du 16" siècl'e, une
scission s'était produite. Le duc de Savoie institua dans ses Etats l'ordre
des Saints Maurice et Lazare. En France, l'ordre avait été rétabli pal'
Henri IV et l'éuùi à l'ordre du Mont-Carmel en 'lG08, en vertu d'une bulle
du Pape du 4 aYril 1608. Les privilèges de l'ordre français venaient d'être
Louis XIV en 16G4,
confirmés par
('2) Cette transformation de l'ordre de Saint-Lazare avait été déjà mise en
avant par quelques personnages, Un religieux des Carmes-Billettes, le
Père Toussaint, avait même conseillé à du Chastel de s'emparer de l'île de
Ré avec l'aide de cinq vaisseaux de l'Ol'dl'e (l'Ol'dl'e ne pouvait pas seule­
mettl'e une barque à la mel') et de s'y fOI'Lifier en y mettant quelques
ménl
canuns qu'il ava it (tans son château de Bretagne, Il l'assul'ait qu'il pounait
être ainsi considéré comme bienfaiteur de l'Ordl'e, bien qu'il n'en fut pas
membre. .

tard à se justifier en prétendant que deux lettres de lui ont
été retenues à Rome, parce que le Pape avait défendu de
transmettre toute lettre fermée.
Cermelly ayant terminé à Rome ses opérations partit avec
Chastel pour Venise, où ils recommencèrent à exposel'
projet de reconstitution de l'ordre de Saint-Lazare, eL
leur
ils réussirent si bien que le gouvernement de la République
adressa lui aussi ses remercîments au Roy ~ également fort
étonné de cette communication, car il venait seulement d'ap-
prendre par les gazettes que du Chastel était en Italie,
tanJis qu'on le croyait toujours à Paris et malade.
C'est pendant ce séjour à Venise que les serviteuI's de du
Chastel acquirent de nouvelles preuves des vols de Cermelly,
car ce dernier eut même l'effronterie de paraître en public
porter dé'vant du Chastel une de ses vestes, sur laquelle
et de
il avait fait ajuster une dentelle d'or provenant de son vol.
put nier, et le marquis exigea qu'illlli fasse renvoyer
Il ne
de Lyon à Venise sa C9.ssette, Quand dIe arriva on reconnut
que la serrur'e avait été forcée et du Chastel n'y trouva
qu'une main de papier « et quelques l~ttres de peu de consi­
dération », mais il eut à payer le pott de la cassette, qui lui
d'or (1),
coûta onze louis
Cermelly, très irrité contre les serviteurs qui l'avaient dé-
noncé, les menace et cherche à les éloigner de leur maître,
mais ils résistèrent et vécurent plus que jamais dans la
crainte d'être assassinés ou empoisonnés.
Du Chastel, de son côté, commence à se sentir peu en
sûreté dans le commerce de l'abbé, qui lui parle toujours
la menace à la bouche. Il tl'Ouve un paquet de lettres écrites
par ' Cermelly, à l'ambassadeur d'Espagne et il s'étonne de
leurs longs pourparlers, ce qui lui fait craindre quelque
(1) Soit 264 livres, le Louis d'or valant 24 livres, c'est-à-dire, aujour­
d'hui près de GOO francs .

trahison contee le service du Roy. Il se décide donc ft

rentrer en FI'ance et part seul pour Gênes, où ses coffres
étaient l'estés sous la garde de son aumônier et du Sr de
- la Motte, l:n de ses gentilshommes. Il descend à l'hôtel_
lerie du Lion·d·Or~ où Cermelly Ile tarde pas à le rejoindrt~
et où, par un hasard évidemment prémédité,' tous les Caretto

se tt'ouvent réunis; tous: dit le valet de chambre de du
Chastel, habillés avec les hardes de son maître.
Du Chastel, .de plus en plus inquiet, recommande à ses
serviteurs de surveiller les personnages qui l'entourent et
qu'il sait avoir « une adresse assez ordinaire aux Italiens de
couvrir leurs sentiments », Cermelly, que cette surveillance
gêne, cherche plus que jamais à sépal'er, par tous les moyens

possibles, ùu Chastel de ses serviteurs. Tantôt il les effraye
par des menaces quelquefois suivies de tentatives d'exécution,
tantôt il cherche à agir sur du Chastel en jurant qu'il a failli
être empoisonné par eux. Du Chastel l'écoute, promet d'exa­
miner la question et conserve ses sérviteurs. Il avait pu, du
reste, être bien renseigné par Dujardin, l'ancien valet de
Cermelly, en ce moment à Rome, engagé au régiment des
gardes à pied de Sa Sainteté. De leur côté, les marquis de
Gorzegno et de Spini et l'abbé de Gorzegno, ne perdant pas

de vue le but qu'ils veulent atteindre, s'empressent à l'envi
autour de du Chastel, rassurant qu'il dépendait de lui de
rendre un grand service. au royde France .. ll s'agissait tou­

jours de ll}.i faire acquérir les fiefs impériaux des Caretto.
Les Gênois, disait Cermelly~ avaient offert cinq cent mille

écus des droits sur Finale, Savone: Vayes, Vintimille et
o11i, et le vieux Carotto était disposé à les vendre au duc

de Savoie. Cermelly ajoutait, en jurant comme toujours
l( (1u'il avait l'ordr'e verbal du roy et que c'étaient des affaires
de la plus gl'ande Îluportance et d'une extrême urgence ».
Du Chastel résiste pel1'ümt quelque temps, mais les Caretto
et Cermelly insistent toujours, il finit par céder, et avec une

confiance bien extl'ao'rdinaire dans leurs paroles, il consent
à signer les deux expéditions, en ft'ançais et en italien, d'un
acte préparé par eux à l'avance qui devait consacrer cette
acquisition. Cependant, du Chastel refuse d'y insérer le chiffre
de 100,000 pistoles qui était stipulé, comme indemnité, afin
de laisser le roy libre d'accepter ou de fixer lui-même le
chiffre qui lui conviendrait (1). Dans ces pOUl'parlel's, les
Caretto avaient fait allusion à la possibilité d'un échange
entre les terres du marquis de Caretto et le marquisat de la
Garnache. Cermelly raconte que cette combinaison paraissait
sourire au marquis du Chastel qui, invoquant l'illustre
origine de sa famille remontant aux rois de Bourgogne,

caressait ridée de recueillir le duché de Milan, que les
gl'<:\lldes puissances se disputaient depuis la mort du dernier
des Sforza (2).
La décision prise par du Chastel de signer au nom du roy
cet acte, véritable traité de puissance à puissance, est véri­
tablement si extraordinaire, qu'il convient de reproduire ce
document textuellement:
(( A tous, PrÎnces,Potentats, Estats, Ducs, Souverains,
Puissances et à toutes autres personnes de quelque état et
condition qu'ils puissent être, Salut En vertu du pouvoir
dont S. M. m'a honoré, signé de sa main en sa ville de Paris,
(l) Le marquis de Caretto demandait pr,mitivement, en plus des 100,000
pistoles que, disait-il, les Gênois lui avaient offert, l'ontre du Saint-Esprit
des charges pour ses enfants et l'achat par le Roy de son palais
pour lui,
de Turin.
(2) Pressé d'indiquer l'origine de ses prétentions, du Chatel invoque sa
parenté avec le marquis d'Ivrée, qui fut roi d'Italie et adopté à l'Empire,
ainsi qu'avec Gondreehaire, premier roi de Bourgogne, dont sa famille
descend. Cermelly préLend qu'il a fallu "on intervention pour empêcher du
Chatel de prendre dans le traité le titre de descendant des rois de Bourgogne,
L'illustration de la famille dn Chastel, due à son anc iennetê et à ses
services, n'avait pas IJesuin d'être l'eh<1ussée pOl' une origine aussi plO­
blématique.

le 22 ja nvier 1668, et contresigné par le seigneur marquis
de Lyonne, l'un de ses secrétail'es d'Estat avec le cachet
rouge ,
«( Nous Clande, marquis du Cilastel, de la Garnache et de
Goula yne,

(1 Come dépnté vers toutes et telles personnes qu'il appar~ c,
tiendra pOUl' le bien de son service, nous avons aCCOt'dé et
accordons confurmément au blanc signé par nous apparu
par les personnes cy-après nommées. Sçavoir: le seigneur
marquis Pol Matthiey, les marquis ses enfants, le seigneur

marquis Michel A nthoine, le seigneur marquis Dominique,
, le seigneur marquis François, le seigneur marquis Michel
Anthoine de Clavezana, tous de la noble et illustre maison
et famille des anciens seigneurs de Caretti, descendans de

l'empereur Othon 3 seigneurs et maistres. souverains
impériaux dé Gourzain (Gorzegno) et .autres lieux, terres et
chasteaux, fait et signe au chasleau de Gourzain le ... du
mois de septembre 1668, cacheté en cire rouge du cachet
des armes des seigneurs de Caretti et contresigné par Octta­
viano Multedo, no taro publico, à nous présenté en nostre
main par le seigneur Antonio Amédéo deI Caretto, abbé de
Gourzaill, fils du dit seigneur marquis Pol Matthey, comme
député général des dits susnommés seigneurs marquis,
ayant l'eceu une copie de l'original signé de leur dit député

général, lequel original e'st réservé pour estl'e mis ès-mains
royales du Roy mon souverain seigneur et pour ce ,
«( Nous acceptons et recepvons sous la protection royale de

Sa Majesté très cllrestienne les sus dicts seigneurs marquis
de Gonrzain, tous les lieux, terres, forteresses, chasteaux,
sujets appartenances et dépendances.
«( Et en vertu de nostre dict pouvoir, comme député gé­
néral, Prions tous Potentats, Princes, Estats, Puissances,
Ducs, Souverains, Alliés, Confédérés et bons amis de S. M.
de reconnaître les dicts susnommés marquis, leurs fiefs,

terres, chasteaux, forteresses, vassaux et sujets, leur donner
toute la faveur et assistance dont ils auront. besoing, et prin,­
ci paIement Gourzain, Gravellzane, Caretto et Arguillo comme
mbres. lesquels dès à présent sont à couvert et appuyés
de la toute Royalle et Auguste protection de S. M. très
chrestienne et de ne permettre pas que, sur quelques pré­
textes que ce soit, l'on donne aucun trouble facheux ou em­
peschement en la moindre particularité et permettre sur
quelques sujets et causes, soit directs ' ou indirects, l'on
puisse déroger à leur.:; anciens et nouveaux privilèges. Mais,
ue les laisser jouïr paisiblement en paix avec
au cont.raire,
liberté et toute assurance, l'exercice de tous leurs dicts
toute
privilèges.
« Déclarons en oultre à tous ceux qui apporteront quel­
ques troubles ou empêchemens aux susdicts seigneurs à
leurs sujets, terres, forteresses, chasteaux, lieux, apparte­
nances et dépendances, comme dit est, nous leur protestons
d'abondance l'infaillible indignation, disgrace et ressenti­
ment du Roy mon souverain seigneur, les intentions duquel
estant que tous ses adhérents, alliés, amis, confédérés et
serviteurs et principalement les susdicts seigneurs marquis
cy devant nommés soyent considérés, respectés et honorés
en tous honneurs, qualités, privilèges, comme nons l'avons
cy dessus expliqué. En foy de quoy nous escrit de nostre
main la présente. et soubscrit de nostre signe et y ai fait
apposer le cachet de nos armes. En présence du seigneur
Lorenz de Cermelly, abbé de Saint-Victor, secrétaire et gen­
tihom'me ordinaire de la chambre du Roy, principalement
COllnu (?) des intentions et commissions de S. M. sur ce sujet,
aussi soubscrit la présente de sa propre main et
lequel a
avons fait contresigner par .......... secrétaire ordinaire.
Fait et dressé en la ville de Gênes, ce jour 24 du
mois de mars 1669 ».
Il ne suffisait aux Caretto d'avoir obtenu la signature de
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXX (Mémoires) 21

ce traité ou « sauvegarde». Il fallait encore le faire consa_
'crer par des actes, car ils n'ignoraient pas que ce traité avait
ëtérédigépar Cermelly, qui connaissait l'étendue réelle de la
mission de du Chastel et savait pertinemment que le roy
yavait mis fin. La vérité pouvait ètre connue; il était donc
nécessaire d'agir sans retard, et de faire prendre possession
au nom du roy de F'rance du marquisat de Caretto .

o Cermelly renouvelle ses instances les plus pressantes
auprès de du Chastel, lui faisant valoir l'intérêt du roy et
l'urgence des mesures à prendre. Les Espagnols, dit-il,

sont prèts à s'emparer de vive force des châteaux du

marquis, qui d'ailleurs avait reçu des offres très avanta_
geuses du duc de Savoie. Pour favoriser cette combinaison,
l'archevêque de Turin, hostile aux Français, aurait même

permis au notaire qui préparait l'acte d'instrumenter le

dimanche.
Enfin, sur l'affirmation de Cermelly que c'était une affaire
de la plus grande importance, du Chastel se décide, et
n'hésite pas à faire occuper les châteaux de Cal'etto et de
Gravesana par des détachements de trente hommes com­
mandés par des Français, Dupont « son home de chambl'e (1)

et Nodo, » égal.ement à son service.

Plus tard, Cermelly essaya de faire remonter au marquis
la responsabilité de cette entreprise insensée) prétendant
n'avoir pas eu connaissance des instructions données à du
Chastel et s'en être rapporté à lui; mais le magistrat qui
l'interrogeait, quand il fut mis à la Bastille, put facilement
le convaincre de mensonge, ajoutant que « par cette con­
fiance il se serait montré plus naïf qu'un enfant de dix ans ».
Il ne l'était pas, et le magistrat put facilement discerner
quel avait été dans toute cette affaire le rôle de Cermelly et
(1) Précédemment, nous l'avons vu qualifier écuyer de euisine.

celui de du Chastel, qui croyait toujours « avoir rendu un
grand service au roy en tirant à son service le marquis de
Caretto 1).
Dès que le roy eut connaissance de toutes ces intri­
gues, il intima l'ordre de retirer les deux Français d6s châ­
teaux dont ils avaient le commandement. et il fallut bien
Chastel, qui commençait à sentir peser lourdement
obéir. Du
sur lui l'influence de Cermelly, désirait quitter Gènes encou­
ragé à le faire par son cousin le marquis Spinola, mais il
était retenu par la nécessité de se procurer l'argent dont
il avait besoin: le banquier Ferrari s'empressa de lever
cette difficulté.
leur côté, les serviteurs de du Chastel le pressaient de

partir, alarmés par les bruits de tentatives d'empoison-
nement contre leur maître et contre eux mêmes, « car
Cermelly avait toujours dans son coffre quantité de méchantes
drogues mortelles )). Ce dernier, tantôt cherchait à du Chastel
des quel'elles d'allemand, avec force menaces proférées en
d'étrangers, tantôt se l'lldoucissant, il lui proposait
présence
de faire avec lui une promenade en carrosse aux environs
de Gênes. Du Chastel, devenu méfiant, refusa. Les Caretto
cherchaient également par tous les moyens à le retenir ou à
le séparer de ses serviteurs. Ils font jeter dans les prisons de
l'Inquisition comme « homme de mauvaises vie et mœurs,
Cariel, aumônier de du Chast.el ». L'inquisiteur: que Cer­
melly avait été voir à l'avance, réputé i le plus méchant
homme de toute l'Italie et naturellement haïssant tous les
Français», refuse au marquis de lui rendre Garie!. Après
bien des démarches: du Chastel revient accompagné de son
parent, le marquis de Spinola, de M. de Compans, consul de
France, et du banquier Ferrari. Cette fois on lui déclare que
l'aumônier ne lui sera rendu que s'il consent à pardonner et
à oublier Je passé, ce qu'il fait généreusement. La vie n'était
plus possible à Gênes pour du Chastel. Son écuyer Dumas,

. poursuivi par des hommes armés, fut un jour forcé de se
réfugier dans l'hôtel du marquis de Chauvelin. Lui-mème
qlJ.and irrévocablement décidé à partir il va prendre congé
des Ferrari, est suivi par des hommes armés et, la nuit étant
venue. on ne le laisse partir qu'accompagné de deux gen­
'~]shommes qui l'escortent jusqu'à son hôtellerie.
Du Chastel s'éta it procuré un bateau de Cannes, dont le
patron s'était engagé à le conduire à Cannes et à St-Tropez.
Avant de partir, il paya toute la dépense faite à l'hôtellerie,
non seulement par lui, mais encore par les abbés Gorzegno
et Cermelly pendant tout le temps qu'ils avaient passé dans
la ville de Gênes. Puis de nuit, presqu'en cachette, il se rend
au bateau, escorté jusqu'au môle par son cousin Ferrari et
leurs amis. .
aussi; il l'appelle et lui
Cermelly arrive: accompagné lui
demande de venir causer avec lui d'une affaire très impor­
tante. Les amis de du Chastel le retiennent, mais ce n'est pas
fini . Il était déjà dans le bateau que l'abbé de Gorzegno

arrive à son tour et cher.che à prendre du Chastel par les

sentiments « le priant au nom de Dieu de vouloir bien rester
en Italie, qu'il était l'âme de toute cette affaire, et s'il s'en
allait elle se dissiperait entièrement ». Du Chastel se serait
peut-être encore laissé aller à descendre à terre, si le patron

et les matelots ne s'y étaient opposés, lui disant qu'il allait

se faire assassiner. •
Le bateau mit enfin à la voile le 9 avril, par un beau temps;
mais le voyage fut très accidenté: une forte tempête ne tarda

pas à s'élever qui les força à se réfugier dans le port de
Savone. Là, le commandant du château manda à terre du
Chastel et le ' retint pendant une journée toute entière. Le
lendemain la chaloupe pût mettre à la voile, mais le temps
fut si mauvais, qu'après avoir parcouru un mille, elle fut
forcée de rentrer au port. Cette fois le ' commandant refusa
l'entrée de la ville à du Chastel, qui dût passer la nuit dans ,

une cabane de jardinier ouverte à tous les vents. Il y attrapa
. un gros rhumè qu'il ne put soigner avant d'arriver à Saint-
Tropez. Aussitôt débarqué, il se rendit chez son cousin, le
marquis de Saint-Jeurs, au château de Grimaud (1), où une '
maladie dont il pensa mourir le força de garder le lit pendant
tout le mois d'avril.
C'est pendant ce séjour à Grimaud que du Chastel, enfin
sur la moralité de Cermelly, se décida à Jai re
bien éclairé
par devant notaire le récit de ses griefs contre son compa­
gnon de voyage et ami de plusieurs années. Il rappelle no­
tamment l'effraction de sa cassette à Lyon, où Cermelly aurait
pris et se serait approprié, indépendamment des effets et
documents que du Chastel analyse et dont quel­
bijoux, des
ques-uns nous le montrent sous un nouvel aspect. « Cermelly,
dit il. aurait pris quantité de lettres secrètes et importantes
pour le service de Sa Majesté, dont il se serait servi comme
crites de sa main. Il s'était saisi d'un moyen et invention d'un
projet de banque viagère et de survivance lequel ledit sei­
gneur et marquis avait conservé fort secrètement pour en
présent an Roy, son maître et son patron, par lequel le
faire
par rétablissement qu'il en pourrait faire dans son
Roy,
remplir les coffres de plusieurs mil­
royaume, en pouvait
lions et accorder au dit seigneur marquis du Chastel la
grâce et privilège qu'il y fust, que le dit seigneur marquis
du Chastel avait retiré d'une tierce personne qui voulait
faire établir dans le royaume d'Angleterre, ce qu'il offre
lorsqu'il sera besoin :t.
vérifier
Cermelly, d'après du Chastel, porta ce projet à la « Répu­
blique de Venise, où il en fit l'établissement. On lui accorda
tl'Ois pour cent des profits qui reviendraient à la République.
Il devait laisser la moitié pour la part du marquis du Chastel
qui n'ajamais rien touché )).
(1) Le château de Grimaud (ou firimaldi) ést situé à ·6 kilomètres au
nord de Saint-Tropez.

Plus tard, Cermelly et l'abbé Gorzegno avaient fait une
association pour la fabrication des louis de cinq ' sols et autres
monnaies, dans laquelle ils avaient mis du Chastel, qui
croyait n'avoir rien signé de semblable et prétendait que le
notaire avait mal compris sa pensée.
C'était, d'après Cermelly, « un simple projet d'association
par tiers entre le marquis du ClTastel, qui n'avait rien, parce
qu'il avait fait cession de tous ses biens à sa femme, Cermelly
qui n'avait rien pareillement, non plus que l'abbé de l;orze-

gno )). Il était dit aussi dans l'acte i< qu'on accepterait un
quatrième associé, pourvu qu'il ait de l'argeut comptant (1) )).
Une autre partie des papiers contenus dans la cas8ette de
du Chastel se rapportaient à des questions de magie et
auraient pu, en ce temps-là, lui fai['e courir de véritables
dangers.
Dans ses interrogatoires à la BastijJe, il dut s'expliquer
et reconnaître avoir copié un écrit en latin qui lui avait été
présenté par son aumônier. C'était, dit il, « un serment fait
pour être associé dans la compagnie de ceux qui cherchent
un dissolvant, et pour la médecine. En bas de l'écrit se
trouvent les noms de ceux qui dans les Gaultes (sic) ont le
secret. Il déclare n'avoir jamais travaillé à la recherche de la
pierre philosophale de quelque manière que ce soit, mais il
a eu curiosité tout8 sa vie d'entendre parler de belles choses .
Quand son aumônier fut emprisonné à Gênes, il sauva les
papiers dans lesquels étaient des secrets de la pierr8
philosopha le, dont il avait l'intention de faire présent au Roy.
« Il n'avait aucune connaissance des secrets de magie, ni
des moyens qui se trouvaient dans ses papiers d'invoquerles
génies. Ces invocations sont des essais de parace]ses dont
ils sont tirés et d'autres livres qui y sont encore. Quant à

(1) Les spéculateurs qui, de nos jours, praliquent pareille combinaison
n'ont donc pas le mérite de l'invention.

lui, il n'a aucune connaissance de ces choses ». '
Le magistrat qui l'interrogeait se trouva suffisamment
édifié et n'insista pas. . ', '
Pendant que du Chastel achevait de se rétablir à Grimaud,
Cermelly avait pris les devants, précédé d'une lettre éCI·ite
le 27 mai, dans laquelle il exposait au Roy tous les avan- '
tages du trait.é Caretto. Arrivé à Paris, il sé présente à la
cour en triomphateul', se faisant honneur de tout ce qui
avait été fait. Malgré son insistance et ses efforts, il né
reçoit que blâme et reproche. L'abbé de Caretto, que Cer­
melly avait appelé de confiance, s'aperçoit qu'il a été trompé
et que le Roy, refusant d'approuver la négociation, a donné
l'ordre de faire immédiatement sortir les deux Français des

châteaux qu'ils occupaient comme commandants. Alors, pour
masquer sa déconvenue, il écrit au Boy, donnant un désaveu
complet à ce qui a été fait. au nom de son père, et mettant
tous les torts sur le compte de C8l'melly. Ce dernier, voyant ·

tous ses projets avortés, challge de ton et adresse au Boy, '

le 29 aoùt 1669, une supplique très humble, s'excusant et na­
turellement charge9.nt du Chastel le plus qu'il peut. Il t.er­
mine en annonçant piteusement qu'il n'a pas de quoi vivre
et sollicite un secours en raisoll de sa triste position.
Cependant le marquis arrivait à petites journées, et de
Lyon écrivait au Roy, le 1 juillet, une longue lettre, où il
a encore, la faiblesse de laisser à Cermelly ' une part de
mérite dans la négociation qu'il estime toujours merveilleuse,
il annonce au Roy « què les affaires qu'il a ' plu à Sa Ma-
jesté de lui confier sont heureusement achevées par les
grands soins et vigilance que M. ·l'abbé de Cermelly s'est
donné .... 1). Il pade des persécutions. et des menaces qui.lu i
ont été faites, ajoutant qu'il était forcé 'de se cacher de ses .
domestiques. Il termine enfin en assurant « Sa Majesté qu'il
n'y a point de gentilhomme dans son royaume qui soit atta­
ché à VoLee Majesté avec des chaînes plus glorieuses (sic),

plus volontaîres et avec plus de soubmission et de respect
que moi qui suis, Sire, de Votre Majesté le h'ès humble,
très obéissant et très fidèle serviteur et sujet. .
« Le marquis du Chastel »

Il arrive à Paris. Ne recevant aucune réponse, il se" pré-
sente à la cour, se rend à Saint-Germain le jour de Saint-
. Roch (16 août) et, à quatre heures de l'après-midi, il est

arrêté dans la cour du Vieux-Château. Le même jour, il est
mis à la Bastille, dont les registres portent la mention:
(( U rdre de Lyonne, intrigues diplomatiq"'ws (1) )).
l\Ioins de huit jours après son incarcération un rapport,
non signé, très détaillé et fort exact était, le 24 août, adressé
à M. de Grémonville pour être présenté au Roy. Le rédac­

teur a bien S~l discerner les rôles respectifs de du Chast81 et
de Cermelly. Il s'étonne de l'incroyable inconséquence de
toutes les personnes qui ont signé le traité. La terre de

Caretto, dit-il, ne vaut pas le quart de 100,000 pistoles. Dans
ce rapport du Chastel est qualifié d'homme de peu de pru­
dence et moins encore de fidélité.
L'arrestation de Cermelly fut décidée. On le chercha, mais
il avait disparu et se cachait, ayant appris l'arrestation de
du Chastel. ' C'est seulement le 15 septembre qu'il fut mis à
la Bastille à son tour, Ordre Letelli,er.
Ces incidents sont l'objet d'une conespondance d'un agent
secrét du gouvernement anglais, saisie par la police fran­

çaise et conservée par le plus grand des hasards.
« M. Petit à M. Williamson (2) à Paris, 7 septembre-
28 août 1669 :

(1) La page du registre où se trouve consignée l'enlt'ée de du Chastel à
la BastlIIe a été lacérée le 14 juillet 1789, mais son contenll n'est pas
dou teux. .

('2) Petit, petit gazetiel' de l'ambassade d'Angleterre.
Williamson, am bassadeu l' ct' Angletel're, à Bru xelles.

:( La friponnerie de l'intrigue de l'achat du marquisat deI
Caretto a avorté. L'abbé Cermelly, qui est ce fameux furfanti
entre les mains duquel mourut la reine-mère, n'avait ordre
du marquis de Caretto, duquel il était en effet envoyé, que
de négocier, de mettre le marquis sous la protection de la
France. Comme l'affaire était avancée et même conclue pour
l'achat, l'abbé Caretto est arrivé en France et a renversé la
négociation par un désaveu formel de tout ce qu'a fait
rmelly contre les ordres de son frère. Cermelly, se voyant
en état d'être maltraité, s'est retiré sans dire gare .. M. de
s'était toujours opposé à cet achat. J'ai ouhlié de
Lionnè
sur le sujet dé l'abbé CermeIly, qu'un certain marquis
dire
du Chastel de Bretagne, son complice, on son coadjuteUl'
dans sa fausse intrigqe, a été mis à la Bastille. Le marquis
s'est encore mêlé de quelques négociations plus considé­
rables qu'il disait avoir dans le duché de Milan, où en effet
on l'avait envoyé pour agir en secret; mais on a remarqué
qu'au lieu de faire les affaÏl'es du Hoy, il faisait les siennes.
Avec le temps nous en saurons le détail »).
Les 3, 4 et 5 septembre, du Chastel fut interrogé par
Henry Pussort, conseiller ordinaire du Royen ses conseils,
en présence, le Pl'emier jour, d'Hersent, son secrétaire, et
ensuite de M. de Besmaud, gouverneur de la Bastille. Dans
ces interrogatoires, où du Chastel serré de tl'ès près expose
les faits tels qu'ils viennent d'être racontés. Dans ses ré­
ponses aux objections du magistl'at, on voit à chaque
instant reparaître la même préoccupation. Il Je l'ai fait,
pal'ce que Cermelly m'avait dit que c'était une affaÏl'e -de IR
plus grande importance et qu'il avait l'ordre verbal du Roy.
S'il a fa-illi, c'est par excès de zèle pour le service de Sa Ma­
jesté D.
Quand du Chastel fut interrogé sur les profits qu'il avait
pu trouver de toutes ces négociations, il montre pour la
première fois quelque énergie pour répondre qu'ayant de-

puis quatre ans compromis sa fortune, il n'a jamais voulu
compromettre son honneur, qu'il Cl. toujours payé toutes les

dépenses, les siennes et celles des autres, à Paris, à Saint_
Germain: à ]a suite du Roy, et en Italie Il n'en a tiré aucun
pel
avantage et. a les mains nettes. « Du moment qu'il s'agit de

son honneur, il met de côté toute autre considération ».
A son tour, Cermelly subit, le 21 septembre et jours sui­
vants, tl'ois intel'l'ogatoires qui portent sur les mêmes points
fen
que les interrogatoit'es de du Chastel. Il commence par pré­
rUI:
tendre qu'il ne comprenait pas bien le fl'ançais (1) et de­
mande à répondre en italien. Ses réponses peuvent se résu­
mer en ceci: Je n'ai rien fait que d'après' les instructions de
il r
du Chastel, qui avait. un pouvoir signé du Roy. Il affirma
d'abord n'avoir jamais vu ce pouvoir, ensuite n'en avoir vu
dar
que la signature; puis, quand Pussort lui prouva que, dans

une lettre précédente, il avait reconnu savoir tout ce que
cette pièce contenait, il ne sût que répondre. Il ajoutait alors
qu'il s'agissait d'une afIaire très urgente, car on lui avait
dar
même dit qne le vieux marquis de Carétto avait pdssé « un
acte de vente de ses biens au duc de Savoie, acte expédié Ull
jour de fête, par permission de l'archevêque de Turin, et
foiE
que le président Chaise, ministre du duc de Savoie, avait
Ital
donné pour ce la de l'argent». Il n'en était rien.
miE
Cermelly maintient son droit de s'appeler abbé de Saint­
élal
Victor, sans dire ponrtant par quel moyen il a obtenu cette
Clel
faveur , et son interrogatoire se termine par cette assertion
tréE
malveillante, comme toùte sa déposition, que du Chastel

_ambitionnait]e duché de Milan pour son propre compte et
lui
qu'il lui aurait promis de le prendre, lui Cermelly, pour pre­
. mier ministre.
pon
Le marquis du Chastel ne resta pas longtemps à la Bas-
rab
tille: il en sortit sur un ordre signé par Lyonne, le 22 mal

(1) Personne ne s'en él;:dt aperçu jusqu'alors .

i670.Dès le 24 du Chastel ayant sn par M. B'erthemet que le
Roy lui avait donné la grâce de la liberté, écrivait à un grand
personnage, qui n'est pas désigné, en le priant « d'obtenir de
Sa Majesté qu'avant, de se retirer dans ses terres, il lui soit
permis de faire sa révérence».
Je ,ne sais si cette faveur lui fut accordée; mais j'ai dit
plus haut quelle f.âcheuse réception il eut au l:hâteau de
Goulaine et la nécessité où il se trouva de plaider contre sa
eXIstence s 'etaIt termmee
femme; enfin, nomment son
misérablement à Port-Louis.
Cermelly'fut garçlé à la Bastille plus longtemps que du
Chastel. Le 20 juillet 1671 il oblint la liberté de la cour, et

il ne lût mis en liberté définitive qu'au mois de janvier 1672,
à la condition de prendre rengagement de sortir du royaum0.
dans un délai d'un mois, menacé s'il rentrait en Feance d'Mee
mis au cachot. L'engagement demandé fut signé par Cer­
melly le 28 janvier 1672.
Il continua sa vie d'intrigue, et on reteouve son nom
dans une lettre adressée par Letellier à M,le Prince de Condé,
le 10 mars 1678: l( l'ab bé Cermelly, de la part duquel on a mis
un papier à V. A., a été vu à la cour et a été entendu plusieurs
fois sur des propositions, de gra ndes conq uêtes à faire en
Italie, et, comme on a reconnu qu'il était un affeonteur, a été
mis à la Bastille, Y a demeuré longtemps et n'en 'a été
élaegi qu'à la condition de sortir du royaume. Il est si artifi­
cieux que, s'étant rendu à Home auprès de M. le duc d'Es­
trées et du cardinal son frère, ils le gardèrent longtemps
au palais Farnèse et dépêchèrent un counier au Hoy pour
lui faire part de ces mêmes propositions (1); n'ayant pas
de réponse, il s'est avisé de s'adresser à V. A. On leur ré­
pondit que cet abbé ne peut rien mander qui mérite consiJé-
ration lJ
(1) Du Chastel ne fut donc pas la seule dupe de Cermelly.

Il me reste à dire quelques mots des autres person~
nages qui ont joué un rôle dans cet épisode de la vie de du

Chastel. .
Quelques années plus tal'd, on retrouve plusieurs individus
portant le nom de Caretto et même le titre de marquis de
Caretto. Tous se prétendaient issus de cette illustre famille

très probablement parents et peut-être même frères, comme
fils du vieux marquis deI ' Caretto, autrement dit François
Cevoli, ' qui avait eu dix-neuf enfants.
Un de ces Caretto, qui avait été déjà mêlé à des intrig ues
diplomatiques dans plusieurs cours, fut forcé de quitter les

Pays-Bas à lïnstigatiJll d'un tout-puissant Caretto, marquis
de Grana, son homonyme, sinon frère. Arrêté à Str'as­
bourg, il fut mis à la Bastille le 27 août (1) et renvoyé au
Fort-l'Evêque le 5 septembre; mais il fut reconnu qu'il
n'avnit rien entrepris contre les intérêts du Roy de France
sujets. il fut donc mis en liherté et accompagné pal'
et de ses
un exempt jusqu'à la fl'ontièl'e.
A la même époque, un autl'e Caretto, né en 1649, certai­
nement fils de François Cevoli, tout en prétendant aussi
avoil' des dl'oits sur ]'hél'itage des Caretto, chercha d'abol'd
à se faire reconnaître comme l'héritiel' des Cevoli. Puis
ayant fait, Dieu sait où , les études nécessaires, ou plutôt
sans les avoir' faites, se mit à exercer la médecine à Bruxelles
vel'S 1682. Au bout de peu de temps, il vint s'installer à
Pal'is, où on le tl'ouve appelé indifféremment Carret, Caretti,
Caretto. Possesse'..ll' qe remèdes secrets,qui avaie nt quelque-

fois réussi, il se fait connaître si bien qu'il est appelé aupl'ès

du maréchal de Luxembourg, qui avait été condamné pal'

(I) Caretto avait obtenu d'être accompagné de son page à la Bastille. ce
qui vient à l'appui de l'opinion de M. Franck Brentano que le régime
n'était pas bien sévère; mais il y eut scandale, et en " raison de ses mœurs
abominables 1), il fut transféré au Fort-l'Evêque, prison dépendant du
lieutenant criminel de police,

Fagon (1), et qui mourut néanmoins entre ses mains le 4 jan­
vier 1695. C'était un charlatan empirique; mais il était devenu
à la mode. Sa vogue extraordinaire tenait autant
médecin
à la bizarrerie de ses remèdes formulés en gouttes, qu'au
prix élevé auquel il estimait ses s~rvices et leur rémunération
qu'il fixait lui-même. Il soignait les plus grands personnages
de la cour, entre autres Mme de Coulanges; aussi son TlOm
est-il souvent cité par Mme de Sévigné dans sa corrèspon­
dance. « C'est une cruelle chose, dit-elle, de mettre sa vie
entre les mains d'un médecin qui croit fermement qu'il va
prendre possession d'une souveraineté en Italie (2) ».
Marc Antoine Le Pappe et dame Ursule ['Honoré. Deve-
nus propriétaires de la terre de :&minihy, par la vente qui
leur en avait été faite par le marquis et la marquise de
tardèrent pas à s'y installer. Renée dA ]a
Mesle, ils ne
qni en avait hérité vers 1608, ne dût pas habi­
Marche:
ter cette grande habitation isolée. A près son mariage, eUe
suivit son mari dans les châteaux beaucoup plus importants
de la famille du Chastel, et il ne reste pas de trace de
séjour à Rosporden.
leur
Il n'en est pas de même des Le Pappe. Cette famille, ori-
ginaire de :&veny, en Plougaznou, forma plusieurs branches
qui se retl'Ouvent en Lanarvily (au Liscoat), en Lanmeur,
Landerneau et Dirinon. Ses armes sont d'argent à la cor-
neille de sable becquée et membrée de gueules, traversée
d'une lance de sable en bar re la pointe en haut. J,a
branche du Léon s'est éteinte en la personne de Monsei­
gneur Le Pappe de Trévern, mort en 1842, évêque de
Strasbourg.
Marc-Anthoine Le Pappe, seigneur du Bois-de-la-Haye,
(l) 1\1 édecin de Louis XIV.
(2) On croit que Caretto gagna un grand procès et mourut à Rome, riche
de la fortune des Cevoli.

appartenait à la branche des seigneurs de Liscoat. II se fixa

dans la COI'llOl"iaille au 17 siècle, à la suite de son mariage,
avec Ursule l'Honoré (1), ou Enoret qui appartenait à une
ancienne famille très considérée il Quimpel'. Plusieurs de ses
membres y a~é1 ient occupé .des charges importantes et possé_
daient des manoirs aux environs, entre autres I}:radenec.

en Ergué-Arm~l, dont le propriétail'e , Guillaume l'Honol'é,
était en 1586 lieutenant de la capitainerie de la place et
chasteau de Concq (2). La famille l'Honoré fut' déclarée d'ex-
traction noble lors de la Réformation de 1669. Ses armes Sont
lozangé d'argent et de sable, qui sont Leslem, à la cotice
de gueules brochante, au franc canton de pourp.re chargé
d'un destrochère d'argent soutenant un épervier du
même.
Les Le Pappe, bien que prenant sur leurs actes le 'titl'e d'é­
cuyer, ne se présentèrent pas à la réformation de 1669;
leurs armes furent seulement inscrites à l'Armorial général

Quand Marc-Anthoine Le Pappe eut acheté I}:minihy , le
17 août 1656, il s'y installa avec toute sa famille Déjà le 17
mars précédent, il avait été appelé à donner sur un acte de

baptême sa signature à côté de celles des représentant.s des

familles notables de Hosporden
Quelques actes relevés sur les registres de cette paroisse
nous donnent des renseig'nements sur lui et sur sa

famille. '
sel
ral
Le 2 mars 1657, Ursule l'Honoré, dame du Bois-de-la-Haye
et de Querminy, est manaine d'un fils de Jean Lemeur de
Penboal (Penbuel).

(1) Sa tante, Renée l'Honoré, avait épousé Alain de la Marche, seigneur
de Kerfors, cousin-germain de Renée de la Marche, alors dame de Kel'mi-
lot,
nihy. .
(2) Bulletin de la Société archéologique du Finistère, 1901, p: 293 .

Le 18 mai 1656, Marc-Anthoine Le Pappe, signe l'acte de
baptême du fi ls de noble homme Guillaume Changeon (1) et
damoiselle Renée Roussin. Le parrain était Messire Jean­
Charles-Claude le Jacobin, seigneur de l}anprat, conseiller
du Roy et son garde des sceaux au Parlement de Bretagne;
la marraine. dame Renée Forget, épouse de Messire Fran­
çois Le Borgnp, seigneur de Lesquiffiou, ~vegan, Trévalot,
etc. Ce baptême est fait pal' le recteur d'Elliant en l'église
N.-D. de Rosporden.
Le 22 novembre 1660, Corentin, né le 18 octobre, fils lé­
gitime et naturel d'escuier Marc-Anthoine Le Pappe et dame
Ursule l'Honoré, seigneur et dame du Bois-de-la-He.ye,
I~minihy, Launay, Liscoet et autres lieux, a été baptisé par
Guillaume Rouzault, curé de R. (Rosporden). L,e parl'ain
escuier Joseph-Corentin Le Pappe, sieur de I);morvan, et
la marraine damoiselle Corentine de Trémie, dame de
I);anizan.
Le 30 mars 1661, Jeanne-Antoinette,fille de René Le Floch,
seigneur de Lisle, advocat en la cour, et de damoiselle
Jeanne Le H.oy, a pour parrain Marc-Anthoine Le Pappe,
seigneur du Bois-de-la-Haye, du Querminihy, du Liscoat, etc.
et pour marraine dame de Jaureguy, compagne de Mes~ire
François de Guergadalen, chevalier, seigneur du Drevers;

baron de Goarlot.
Le 23 février 1665, baptême de Renée Durant, qui a pour
parrain Messire Guillaume du Fresnay, baron de Baregan,
seigneur du Plessis, K ......... et llutres lieux, et pour mar-
raine damoiselle Renée Le Pappe, damoiselle de ~minihy
(elle ne sait pas signer).
Le 4 aoùt 1666, baptême de Jeanne Durand, qui a pour
parrain escuier Joseph-Corentin Le Pappe, seigneur de

('1) Seigneur d'3 Nevars (en Kernével), sénéchal des seigneurifs de Goal'­
lot, Kerminihy, Coatcanton, etc .

~morvan, ~ezecq, et pour marraine dame Jeanne Le Pappe,
dame de Mesl'os, Rosily, Mouster', Pratanl'OllS, etc. Ursule
l'Honoré presente signe ' cet acte.
Le 7 septembre 1667, Corentine, fille du fermier de Penbuel
a pour « panain sieur Corentin Le Pappe, sieur dict, du
manoir de .Penbuel, assisté de SOIl précepteur et pédago_
gue (1) Y soubsignant et l'affirmant capable », et pour mar­
raine damoiselle Renée Goupil, damoiselle des Landes.
Par suite d'une lacune de quatre années (1669 à 1674) dans
registres de la paroisse de Rosporden (2), J'ignore la
les
date exacte de la mort de Marc-A nthoine Le Pappe, mais

sa femme déclarée veuve en 1674 n'existait plus en 1679 . .
Antoine-René Le Pappe. Al.ltoine-René, fils aîné de Marc­
Anthoine, était déjà marié à Marie-Elisabeth Le Livec,
d'une famille originaire de 'l'ouUan, en PJumergat, dont
les armes sont d'azur à trois croissants d'or, deux et un, à
la fasce d'argent chargée d'une étoiles de gueules. Par la
mort de son père, il était devenu propriétaire de la terre de

~minihy et en cette qualité il fournit, le 1 octobre 1679, ]a
déclaration prescrite par les arrêts pour la Réformation des
domaines. Cette déclaration, dans laquelle il est qualifié
gendarme de la garde du Roy, est fort détaillée; elle donne
exactement la description du manoir et la désignation des

métairies, domaines et fiefs qui constituaient]a seigneurie.
C'està ce moment que son importance fut la plus considérable .

(1) Corentin, fils cadet de Marc-Anthoine Le Pappe, né le 22 novembr'e
1660, n'avait pas encore 7 ans. Son précepteur, Denis Le Flohic, qui signe
à sa place, était plus tard recteur de Tourc'h.
(2) Ces années manquent également sur les registres de la paroisse de
TOUl'c'h. On peut expliquer ces lacunes par le trouble qu'apporta dans cette
région la Révolte du papier timbré. Il y eut des cloehcrs démolis, des
cloches enlevées des clochers. Celles de Tourc'h ne furent rendues à
la paroisse qu'en 1680.
Le registre de 1674 est le premier dont les · feuilles sont tinlbrée3 .

Le manoir ' comprenait une cour close carrée ayant 40
mètrés de côté sur 35. Au fond de la cour se trouvait le
et le corps de logis principal,. faisant. face au midi.
donjon
A l'est et à l'ouest il y avait des bâtiments. de moindre im­
portance. Au sud, la chapelle était adossée à un mur de
dans lequel une grande et une petite porte
clôture' fort élevé,
étaient ouvert.es. .

II dépe,ndait directement du manoir comme réserve et
ferme une surface de 160 journaux (77 hect.ares), dont 74
de haute futaye, terres chaudes, etc., plus
en bois
« 86 journaux en garennes et pièces de terre dans lesquels
il y a toujours retraite et refuges à lapins (1) ». Il Y avait en
outre une surface de 56 journaux, formant autrefois le do­
maine du manoir de Penbohal (penbuel), récemment trans-
formé en ferme. .

domaines dépendant de la seigneurie étaient nom­
Les
breux, leur surface totale était d'environ 900 journaux.
En RospoTden. I>:eIoret (I);angoc), I);anbroc, I);daner
Ty-an-Palmer, I);anleué-Bihan, bien noble (2).
(I);zaner),
cette liste on pourrait ajouter le manoir de I);ouriou

(I);riou), qu'Antoine-Hené Le Pappe acheta, vers 1685, de
François de I);meno. baron de Goarlot. Les terres de ce ma­
noir comprenaient le lieu de I);huilet en fief de Roy. Pour le
surplus, ainsi que pour le moulin de I);ouriou, elles dépen­
daient de la seigneurie de Coatcanton, à laquelle le. baron de
Goarlot était tenu de payer une redevance d'une obole (3, .
En Elliant. Ty-an-Caroff (bien noble) et son moulin,
I);anbrinquen, I);nevez-Lagadec, Hun-Huellaff, I);audl'en,
Lal'lan, Le Merdy, lieu non bébergé, en commun avec le

(1) En 1840, ces garennes existaient encore et formaient40 hectares de
landes incultes. Elles sont aujourd'hui complètement défrichées.
(n Le manoir de Kerédel'll (Quélédel'll), avait été récemment aliéné .
(J) BuLletin de la Société archéologique du Finistère, année 1898.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXX (Mémoires) 22

seigneur de 'Tréanna, " et une lande contenant cinq journatlx,

aùtour de la chapelle de Saint-Guénel.
" En TOUTC'h. Le manoir, le domaine et le moulin dè
J}vinidel (J}vidal), :&daniou, J}latous, J}anhéré, J}icuff, Roch­
jourden, J}livic,J}lohiou. ,
En Scaër. . J}rouez et le moulin de Roudouglaz.
En Kernével. . Nevars-Huellaff.
Il Y avait en outre de nombreux fiefs; ils portaient sur
beaucoup de pièces de terre détachées et sur une trentaine
de villages . situés principalement en Elliant, quelques-uns
en Saint-Yvi et Tourc'h et un en Scaër. Deux çle ees villages,
situés en Elliant, J}verniou et J}anmoalic, étaient des ma-­
noirs d'une certaine importance.
En résumé, l'ensemble de la propriété représentait une sur­
face d'environ 1,200 j.ournaux (580 hectares), soit un sixième
en réserve ou ferme et le l'este en domaines.
Il est bien difficile de se rendre compte des revenus que
la terre de J}minihy pouvait procurer - à son propriétaire.
Pour la réserve les éléments font défaut: je n'ai pu retrouver
le prix de location de la ferme de Penbue!. Voici, en résumé,
quel était le produit des domaines:
Argent 242 livres.
En nature: Froment 41 quarterons et 2 rennées.
Avoine 70 minots et 2 rennées.

Seigle 13 minots .
Huit moutons, cent chapons et quatre poulets.
Les chefs-rentes, non compris les droits de champart,
suite au moulin, etc., que l'on ne peut évaluer, rapportaient
au Seigneur: en argent 25 livres, et en froment 20 quar­
terons et 5 écuellées .

Les prééminences d'églises et droits honorifiques attachés
à la seigneurie étaient considérables. C'est en 1619 qu'il en
est question pour la première fois et d'une manière som-

maire. Les :voici tels qu'ils sont formulés plus complètemen:t
dans la déclaration de 1679; à partir de .ce moment, ils se
reproduisent presque sans modification . .
Cl En l'église trefviale de N.-D. de Rosporden, le seigneur
déclarant est fondé aux mêmes droits, prérogatives et inter­
signes de noblesse comme ses auteurs, à cause de la dite
terre et seigneurie de :&minihy et d'avoir en la dite esglise

les armes des anciens seigneurs de :&minihy qui y sont en
bosse et plate peinture, lesquelles sont d'argent à trois mol~
lettes de gueules, les dites armes timbrées et pour devise:
Vive Dieu! »
« En la maîtresse vître du grand autel sont deux écussons
aux deux hauts soufflets du côté de l'Epistre. Au premier
sont celles de :&minihy, au second sont les mêmes, écarte-
lées de celles du Plessis, qui sont d'argent au chaine de si­
nople englanté d'or, chargé au canton dextre de deux haches
d'armes de gueules adossées; au bas de la dite vître sont
deux priants à genoux, soubs les auspices de saint Pierre,
ayant pour leurs armes celleS des seigneurs de :&minihy » .
CI En la chapelle de Saint-Jean, en la mesme esglisp-, du
côté de l'Evangile, laquelle est prohibitive aux seigneurs du
:&minihy, sont aux plus hauts soufflets les armes de :&mi­
nihy, plus au soufflet du côté de l'Evangile; elles sont écar­
telées de celles du Plessis, et au soufflet vis-à-vis, celles du
Plessis sont écartelées de Querfloux, quy sont de gueules
à trois croissants d'.argent, et encore plus bas un pareil
écusson que le précédent, et au bas de la dite vître sont deux
priants à genoux sous les auspices de saint Laurent, lesquels
ont pour leurs armes celles du Plessis.
« De plus, deux escabaux ou accoudoirs~ l'un joignant la
muraille costière de la dite chapelle, l'autre directement
sous l'arcade au pied d'une tombe éminemment élevée enfeu
ordinaire des seigneurs de :&minihy, le . dessus de la dite
tombe et les .côtés armoyés en bosse des armes. de Quermi-

nihy et de ses aliances, lesdits écussons avec leurs supports;
de plus, trois tombes basses au côté de celle qui est eslevée,

la dernière estante sons le marche-pied du grand autel.
« Plus le sieur déclarant, à cause de la dite seigneurie

du Querminihy est fondateur, premier et seul prééminencier
après le Royen la chapell~ de Saint· Guénel, scittuée en la
paroisse d'Elliant, où les armes des ~minihy sont seules en
toutes les vîtres party de leurs aliances et en bosse dedans
hors l'esglise et au clocher, de plus a droit de litre et
-ceinture funèbre.
« Plus le dict sieur à cause de la dite seigneurie, en posses­
sion immémoriale d'une tombe basse au milieu de l'esglise
paroissiale de Tourcll et d'avoir un écusson en la maîtresse
vître du côté de l'Evangile, qui est d'argeant à trois molettes

de gueules écartelées et contre-écartelées des armes du
Plessis et de ~floux, qui sont maisons alliées du ~minihy.
. <1: En la paroisse de ~nével, en la chapelle du Rosaire, le
sieur · déclarant a un banc à deux accoudoirs armoyés en
bosse des armes du ~minihy et deux. escussbns en la vître
de la dite chapelle: l'un d'argeant à trois molettes de gueules,
l'autre ,de mesme, parti de gueules au lion d'argeant quy est
le Combout.
c Réserve expressément le dict sieur de faire mettre ses
armes aux viltres ci devant déclarées.
« A cause de laquelle terre et seigneurie de ~minihy le
dict sieur déclarant a droi t de moyenne et basse juridiction
et en possession immémoriale par lui et ses antheurs de
l'avoir faict tenir et la faire exercer sur ses hommes vassaux
et domaniers, par séneschal, procureur fiscal et greffier et
de la faire servir par sergeant qu'il peut instituer à la dicte
fin, laquelle juridiction se tient en /l'auditoire du Roy, en la
ville de Rosporden, au jour de jeudy, qui se transfère au
lendemain, lors et quand il eschoit feste au dict jour, comme'

aussy a droit de faire faire par ses diets officiers inventaire

et provisions de mineurs dans les lieux et villages cy après
mentionnés, et aussy de faire la cueillette des revenus de la
seigneurie de Querminihy par les vassaux d'icelle,
dicte
pour leurs bleds comble mesure de Ros-
lesquels doivent

porden (1). .
Les registres de la paroisse de Hosporden n'existent plus
à 1673 ainsi qu'il a été dit précédem­
. pour les années 1669
ment. Mais à partir de l'année 1674, on y trouve de nouveau
renseignements sur la famille Le Pappe. Voici
beaucoup de
quelques-uns des actes que j.' ai relevés:
({ Le 5 janvier 1674, 'à dix heures du matin, en la chapelle
manoir du Querminihy, du consentement et adveu du

Mr illustrissime seigneur évêque de Cornouaille, fut célébré
par Olivier du Louet, seigneur de la Rive, archidiacre de
Poher, chanoine de Cornouaille, le mariage de messire
François de Bois-Baudry, chevalier seigneur de Trans, do­
micilié au château de Trans, paroisse de Saint-Pierre-de-
Trans, diocèse de Rennes, mineur autorisé, d'une part:
« Et de damoiselle Renée Le Pappe, fille mineure de
deffunct Marc Anthoine Le Pappe, escuier et dame Ursule •
L'Honoré, seigneur et dame de Bois-de-Ia-Haye, âgée de
16 ans, demeurant avec sa mère et tutrice au manoir de
Querminihy, paroisse d'Elliant: diocèse de Quimper en
Cornouaille, d'autre part, etc. »
De nombreuses signatures suivent celles des. mariés:
Renée Le Pappe, François de Bois-Baudry, Ursule l'Honoré,
Jeanne Le Pappe, Geneviève de Rosily, Catherine Pegasse,
Marianne de Coëtlogon, Marie de Tremic, Françoise Leflo,

(1) Le droit de ju ridiction, sans limitation, figurE, pour la première fois
dans l'aveu de Pierre du Plessis (15 janvier 1575). La mention est reproduite
da ns. les mèmes termes dans l'aveu d'A uffray du Chastel et de Renée de la
Marche. Antoine-René Le Pappe ne réclamait que le droit de moyenne et
basse justice j il n'en jouit pas longtemps, ainsi qu'on le verra plus loin.

Guillemette-Anne de J>;suJgar, Marie-Elisabet}:l Le Livee,
Constance Morice, Yolande-Françoise de la Marche, Margue_
rite GuiIlëmin, Françoise Taniou, Jeanne-Anne de Tremie.

Mené Guéguen, Mathurin de Rosily, François de Tremie,
Guy de I}sulgar~ Jean de Tremie, Joseph-Corentin Le Pappe,
Marc-Anthoine Le Pappe, Antoine-Hené Le Pappe, Germain_
Claude Le Pappe, Guillaume de I}guélen, Gabriely Corran
de Cleguennec, Charles-François de Bois-Baudry, du I}goet
de la Jumellays, Charles Dondel sénéchal, G. Changeon;
Rodolphe Guillou Prêtre, Changeon, Guillemin, -Denis Le

Flohic, recteur de Tourc'h, Olivier du Louet.
20 mars 1674, Esc. Germain-Glaude Le Pappe, sei-

gneur de Coatlespel, est par ra in de Germain Calloch, fils du
métayer de I}minihy. -

Le lB août, à l'enterrement de Thomas Cantin, âgé de
72 ans, du manoir de I}minihy, furent présents, sa veuve
Mélanie Floch et damoiselle Françoise Le Pape qui, inter­
pellées, ont déclaré ne savoir signer.
Le 4 novembre 1676, baptême dans la chapelle de I}minihy
par Deni.; Leflohic, prêtre, recteur de Tourc'h, de François,

fils naturel et , légitime d'escuier Anthoine-René Le Pappe
et dame Marie-Elisabeth Le Livec, seigneur et dame de I}mi­
nihy. Les parrain et marraine ont été Illustrissime et Révé­

dissime Messire François de Coetlogon, évêque de Quimper
et comte de Cornouaille, et dame Ursule del'Honoré, damedu
Bois-de-la-Haye.
A la suite des signatures du parrain et de la marraine se

trouvent celles de personnes ayant, pour la plupart, signé
au mariage -du 5 février 1674
far
Jean-Baptiste, enfant d'Antoine-René Le Pappe, né le 31
juillet 1677 et baptisé à la maison à cause de son infirmité,
ira
est présenté à l'église le 24 octobre suivant, par deux pauvres
gens.
lra
Le 4janvier 1678, un enfant né à la métairie de I}y a pour

marraine Marie-Elisabeth Le Livec, dame du ~minihy et pour
parrain Messire Denis Leflohic, prêtre, recteur', de Tourc'h.
. Le 29 septembre 1678 mourut Ursule l'Honoré, dame du
Bois de la Haye et du ~minihy.. .
Le 20 août 1679, Renée Le Pàppe et Joseph Le Pappe, nés
les · 3.1, mai 1677 et 4 août 1678, baptisés à la maison par le
recteur de Tourc'h, ont reçu à l'ég-lise de .Rosporden, avec
permission de l'évêque, la cérémonie du baptême, par noble
et disCl'et Missire Jean Le Livec, prêtre, chanoine et théo­
log-al de Quimper et docteur en théologie, à la prière de
noble et discret Missire Nicolas du Gour-vinec, seigneur du
Buzit, prêtre et recteur d'Elliant. Les parrains et marraines
ont été: 1 pour Renée, escuier Bernard Crouézé, seigneur
de ~vily et de Coetaven et dame Henée Le Pappe, dame mar-

quise de Trans (1l; 2 pour Joseptl, escuier Joseph Le Pappe,
seigneur de ~mor.van, et dame Jeanne Pegasse: dame de
:&vily.
Le 13 novembre 1679: baptême de Marie-Anne Le Pappe,
née le 6 novembre, présentée à l'église par deux pauvres
gens. Le père et la mère signent SUl' le registre. '.
Le 29 octobre 1680, Bonaventure-Olivier Le Pappe, né le
27 mai, après ondoiement à la maison, a été baptisé par noble
et discret Missire François Amice, cbanoine de Cornouaille,
a été recteur' de ~erfeunteun (sic). Le parrain noble et discret
Missire Jean Le Livec, docteur en Sorbonne et théologue
de Cornouaille, et la marraine dame Olive de Coetnours,
dame de Coetlespel ~2).
Parmi les signatures figurent quelques nouveaux noms de
famille: Jean de Landanet, seigneur de Coetglevarec, Joseph.
Co.rentin Cléguennec, René-François Geffroy, Joseph Gef­
froy. Cinq ecclésiastiques signent: René Guéguen, pr,être,

(1) Je remarque parmi les signatures celle de Renée Le Pappe, qui s;esl

transformée en atteignant les dimensions les plus aristocratiques.
(2) Femme de Germain-Claude Le Pappe.

Rodolphe le Branquet, prêtre, Rodolphè Guilloùx, prêtre

François Amice, Nicolas de Gourvennec, recteur d'Ellyant.
En 1680, la révolte du papier timbl'é avait été étouffée, et

, les cloches de Tourc'h,furent rendues à la paroisse. A cette
occasion , un acte a été dressé; je le reproduis:
{( Décembre 1680. Et'a été nommé par nobles gents, Guiî~

laume Changeon seignenr de Névars, sénéchal de la juri~
diction de Coetheloret et autres juridictions, Goarlot, Coet~
canton, ~minihy et juridiction royale, cappitaine de la ville

de Rosp.orden, et par dame Elisabeth du Livec, dame du
~minihy 1 la maraine et aultres lieux, qui ont signé par leurs
respects, et les soussignants présents. Et ce même jour ont

été les cloches rendues de cette église paroissiale, après
avoir été enlevé" es d'icelle, et rendues au château de Conqau
par cause des tro\,lbles de la paroisse. et battement du tocsin
de son. Signé Marie-Elisabeth du Livec, Changeon, Callo~
mant (?), ~guennec, Yves Lebail, prêtre, Henry Pomponl,
prêtre et recteur. »Cette cloche n'existe plus.
Pierre Le Pappe, né le 16 août, ondoyé le 25, a été baptisé
en 1685 seulement.
Le 27 août 1682, René-Antoine Le Pappe, seigneur de
~minihy, et Claude Legall, femme de Maurice Glémarec,
notaire royal, sont parrain et marraine de Maurice Morve­

Quélédern.
zen, du village de
Le 25 décembre 1682, baptême d'un fils de Pierre Hily,
du manoir de Penbual ; les parrain et marraine ont été véné­

rable et discret Messire François Huet, prêtre et chapelain
de Mr du Kerminihy et dame Elisabeth-Marie du Livec,
,dame dudit~minihy.
Ursule Le Pappe, née le 29 avril 1684, baptisée le 26, a
pour parrain et marraine ses frère et sœur ~ escuier François

et damoiselle Renée les Pappes (sic), qui ne saVènt. signer
as'sistés de Messire François Pérès, prêtre chapelain du dit
~minihyet de damoiselle Claude Hernous. Elle meurt le 21

juillet suivant et est inhumée en (( une tombe appartenant
«( audit seigneur de ~minihy, dans le grand chœur de
(( l'église trefviale du dit Rosporden, en présence des mêmes
«( ~em01l1S qu a sa naIssance. »
Le 12 février 1685, Messire Nicolas du Gourvinec, sei-
gneur du Buzit, prêtre et recteur de la paroisse d'Eslian,
avec permission de Messil'e l'abbé de Coetlogon, grand vi­
caire et official de Quimper, après proclam'ation des bancs
en les paroisses de Saint-Colomban et Saint-Michel de
Quimperlé, marie dans la chapelle du manoir de ~minihy
Messire ,Joseph-Corenlin de Cleguennec, chevalier, seigneur
de Kmadehoy et dame Jeanne-Marie Pegasse, dame de
I}:nabat, Signent avec les mariés: Françoise de Loenan,
Jeanne Pegasse, Marie-Elisabeth Le Livec, Louise Le Livec,
René-François de la Jume]aye, Joseph Geffroy, Antoine-
Hené Le Pappe, ,M. Legac, Puymoret, prêtre, Mathurin Ca­
doret, prêtre, Nicolas du Gourvinec, seigneur du Buzit, rec­
teur d'Elliant.
Le 30 juillet 1685, vénérable et discret Mèssire Jean Le
Livec, docteur en théologie de la maison de Navarre et théo­
logue de la cathédrale de Quimper, baptise dans la chapelle
de la maison du I);minihy deux enfants Le Pappe, savoir:
Pierre, né le 16 août 1682 et o~doyé le 25 du même mois,
ayant pour parrain et mal'l'aine Joseph Geffroy, seigneur du
Rosiou, et dame Perrine Pegasse, épouse et compagne d'es­
cuiel' René le Flo, seigneur de Branho, conseiller du Hoy 'et
son sénéchal et premier magistrat au siège royal de Quim­
perlay.
Louise-Marthe, née le 19 et ondoyée le 22 avril 1685, ayant

pour' parrain Messire Germain-Claude Le Pappe, seigneur
Je Coatl espeJ, et pour marraine dame Louise Le Livec,
épouse du dit seigneur du Rosiou , Suivent les signatures:
Pel'l'i lle Pegasse, Joseph Ccffruy, Louise LE) Livec, Germaiu­
Claude Le Pappe, Anr~e Pegasse, Marie-Elisabeth Le Livec,
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXX (Mémoires) 23

Olive de Coetnours, Joseph-Corentin de Cleguennec, Anne
de Coetnours, Cathel'ine de la Houlle, Jean de Landanet, }
René-François de la J umellaye, Me Le Gac, François Blot
Changeon, Antoine-René Le Pappe, Rodolphe Guillo ,
prêtre, René Guéguen, prêtre, ftené Lemaguet, prêtre, Ma­
thurin Cadoret, prêtre, Jean Le Livec, chanoine Nicolas du
Gourvinec, rectèur d'Ellyant.
Le 12 janvier 1687, Marc-Antoine Le Pappe a pour par­
rain et marraine Louis Thibaut, de Huvey, trève de Cadol,
paroisse de Melgven, et Catherine Dornic, de Rosporden,
qui ne savent signer. La seule signature est celle de Claude
Hernou.
juillet 1687, inhumation de Louise Le Pappe, décédée

le 12, à l'âge de 2 ans et 3 mois, en présence de Louise Paté,
gouvernante du dit ~minihy et plusieurs autres.
22 août 1687, noble François, fils d'Antoine-René Le
Pappe, signe comme paerain l'acte de baptême du fils d'un
la métairie de ~ininihy.
fermier de (
L'acte de baptême de Bernard Le Pappe, ilé le 5 avril 1688,
est signé par Claude Hernou, à défaut des parrain et mar­
raine qüi ne savent signer. .
31 mars 1689, Antoine-René Le Pappe signe comme par­
rain l'acte de baptême d'un fils de son métayer de ~minihy.
Angélique Le Pappe, née le 13 avril 1689, a pour parrain
Joseph...:Corentin Le Pappe et pour marraine Marie· Anne

Le Pappe, qui a déclaré ne savoir signer (elle a 10 ans) . .
L'acte est signé par trois prêtres, dont Alain Guillou, pré­
dicateur esté (sic) d'Elliant.
Le 9 octobre 1689, demoiselle Renée Le Pappe signe
comme marraine au baptême de Henée Quéré, de Rosporden.
Le parrain honorable homme Hené Le Broyer, marchand à
Rosporden.
Le 14 décembre suivant, Guillaume-Marie, fils de Jean
pour marraine Marie-
Lemeur, du manoir de ~rouriou, a

Elisebeth Le Livec, dame du ~minihy, et pour parrain noble
homme Guillaume Changeon, seigneur de Ménébris, advocat
en la cour et capitaine pour la milice de Rosporden.
Le 22 décembre suivant, Marie-Anne, fille de noble homme
François Ollivier, seigneur du Poulduff, et de Jeanne Tq,niou,
est baptisée par Missire Jean-Louis de ~venozaël, recteur
d'Elyant L'acte est signé p:ir le parrain noble homme Guil­
laume Changeon et. ... par la marraine Marie-Anne de Bois­
guennech (Boisguéhenneuc ), dame de Landanet, et par
plusi0urs personnes, entre autres par Antoine- René Le
Pappe, de ~minihy.
Anne-Hyaci nllle Le Pappe: baptisée lé 27 juillet 1690., a
pour parrain et marraine deux personnages inconnus qui ne
savent signer,
Le 29 juin 1691, Missire Guillaume le Cotten, prêtre de la
paroisse d'Elyant, et dame Marie-Anne Le Pappe sont par­
rain et marraine d'Anne Perrine, fille de Jacques Lemasson,
de la métairie du manoir de ~minihy,
Le 6 mars 1692: la même est marraine avec Louis 'l'anion,
advocat en la cour, d'un fils de Pierre I-lily, du manoir de
Penbual. Le baptême est fait par noble et discret Missire
Jean-Louis de I~venozael, recteur d'Elyant,
Hyacinthe Le Pappe, né le 1 juillet 1692 au manoir de
I>:mininie, est baptisé le 6 par le recteur d'Elliant, Le parrain
est escuier Le Gac, seigneur de Mesguen, faisant pour escuier
Yves-Bonaventure Geffroy, seigneur du Pencleu; la mar­
raine dame Françoise Le Pappe, damoiselle de Coatlespel.
Le 17 mars 1693, décès d'Angélique, âgée d'environ 4 ans ·
( aucune signature). ,
t\ Elliant, le 8 octobre 169R, Antoine-René Le Pappe est
}Jal'rain de Maec-Antoine, fils de lYIessireSebert de Landa­
net et de Marie-Anne du Boisguehenneuc, seigneur et dame
de Landanet. La marraine est dame Marguerite de la Roche-
HOl1sse, dame de Coetaudon, .

Gertrude, le 15 et dernier enfant d'Antoine-René Le
Pappe et d'Elisabeth Le Livec, est baptisée le 5 novembre

1693. Les parrain et marraine ne savent pas signer
A la date du 7 mars 1694 se trouve encore, et pour la der­
nière fois, sur les registres de la paroisse de Rosporden, Un
mariage mentionné comme décrété de justice par la juridic'­
tion de Kerminihy, qlli ne tarda pas à ètre supprimée.
Le 13 avril 1695, « noble enfant Marc-Antoine Le Pappe
et damoiselle Anne Poullain. du 1):minihy » sont parrain et
marraine d'un fils de Jacques' Lemasson, de la métairie du
1):minihy. Le parrain, âge de 8 ans, ne sait pas signer.
Le 27 mai 1696, décès de damoiselle Gertrude Le Pappe,
âgée d'environ 2 ans, fille de deffunct Anthoine-René Le
Pappe. Cet acte, qui porte entre autres les signatures de
deux métayers Lemasson~ Hily, etc., nous apprend la mort
d'Antoine-René, mort que d'autres documents provenant des
dossiers Coetlosquet (1) aux A l'chives du Finistère, doivent
faire reporter à 1694. Il en résulte en effet, qu'Elisabeth
Le Livec était veuve le 23 juillet 1694, mais ne pouvait l'être
que depuis fort peu de temps .
Une flotte anglaise avait menacé Brest d'un débar­
quement, qui eut lieu en effet à Camaret. le 17 juin 1694,
mais qui échoua piteusement. .
Le ban et l'arrière-ban de la noblesse avaient été convo­
qués, et le « Rôle des Cies de l'évêché de Cornouaille, qui
ont paru à la Revue du lundi 7 juin, passée par M. le
maréchal de Vauban (2), constate la "présence de onze
compagnies, comprenant 11 ' capitaines, 32 officÎf~rs, 30
brigadiers et 191 cavaliers. L'état-maÏor se composait du
colonel et de 6 officiers.
(1) Je dois la connaissance de ces dossiers à· M. de la Rogerie, le très
obligeant arl'hiviste du Finistère.
(2) M. de Fréminville. Antiquitéa du Finistère, vol. II.

Antoine-René Le Pappe, qui était en 1679 gendarme de la
garde du Hoy n'était plus compris dans les cadres de l'armée

régulière, 'd'après les nombreuses mentions de sa présence
à Rosporden que l'on trouve dans les registres paroissiaux et
il figuré sur le rôle de la g compagnie, commandée par M.
du Couédic de ~g·oualer . Il mourut donc entre le 7 juin et
23 juillet.
Le lieutenant du Rois-de-la-Haye, Un des fils d'Antoine
René, certainement l'aîné de François qui n'avait que -19 ans,
est connu seulement par les trois pièces suivantes pro­
nous
venant des dossiers Coetlosquet, qui se rapportent à de
fréquents passages à Quimper de détachements allant, les
Sb concen trer à Brest, en vue d'un débarquement en
uns
Irlande; les autres, renforcer l'armée royale en Flandre (1),
La première est la copie d'une feuille de route portant:

« Fait à Versailles, le 18 novembre 1695. Signé Louis et
plus bas Letellier. Nous, syndics de la ville de Quimper,
certifions la copie de route cy dessus véritable ayant été levée
snr le registre de la communauté en la dite ville (1), et qu'en
conséquence de la dite route, nous aurions fait donner le
logement et l'étape à M, du Bois-de-la-Haye, lieutenant au
régiment d'infünterie de Bourbon et à sa Reveüe, le cin­
quiesme jour de febvrier dernier et partit le sixiesme du
même mois pour continuer sa route, et que le seigneur du
Bois-de-la-Haye n'est point marié, et est fils de Mme du
Querminihy. Fait à Quimper, ce 26 mai 1696. Signé
Malherbe, syndic ».
La feuille de route .spécifie que' les hommes de recrues
seront conduits par le lieutenant et un sergent, de Quimper
à Maûbeuge, où ils rejoindront la compagnie de Chateauneuf
(1) A cette même date, on constat ~ sur le registre le passage d'un déta­
de Hi hommes venant de Blesle (Auvergne), ayant à faire un
chement
voyage de 53 jours pour rejoindre, au château d2 Brest, la campagnie du
chevalier du Terrage_au régiment de Navarre.

du régiment de Bourbon, et elle indique avec les étapes les
villes où il y aura séjour. Cette pièce m'a paru intéressante
à reproduire:
Gouvernement de Bretagne.· Quimper-Corentin~ Rospor­
den, Quimperlé (séjour), Hennebont, AUI'ay, Vannes (séjour),
Ambon, Muzillac-Herbignac (séjour), Savenay, Couëron.
Nantes (séjour), Ancenis.
Gouvernement de Tours. .. Ingrandes, Angers séjour),
Saint-Mathurin, Saumur (sejour), la Chapelle-Blanche, Lan­
geais, Tours (séjour), Amboise.
Gouvernement d'Orléans. -- Blois, Beaugency, Orléans
(séjour), Artenay, Angerville-la-garce .
Gouvernement de Paris. · Etampes (séjour), Chartres (1),
Corbeil, Chaulne, Meaux (séjour).
Gouvernement de Soissons. La Ferté-Milon, Soissons,
Laon (séjour), Marle, Guise .
Landrecies, Maubeug'e, où
Gouvernement du Hainault. -
ils joindront la dite compagnie.
On remarquera avec quel . soin cet itinéraire évite la tra­
versée de Paris. Sa longueur est de 750 kilomètres, compre-
nant 37 étapes d'environ 20 kilomètres, mais très inégales,
et onze séjours. C'est en somme un voyage à pied d'une
durée de 48 jours en: hiver, imposé aux hommes et à leurs
chefs pour fournir quinze recrues à l'armée de Flandre. Dieu
sait en quel état étaient alors les routes, et dans lequel étal
étaient les malheureuses recrues à leur arrivée à Maubeuge!
Le lieutenant du Bois-de-Ia-Haye remplit la mission dont
il était chargé, et servait à la compagnie de Rasle'au. du ré­
giment de Bourbon-Infantéie, le 12 novembre 1696, d'après
la troisième pièce délivrée par le marquis de Vieux pont, .
colonel de son régiment, « certificat pour lui · servir en
cas de besoin ».
(1) Maintenant Arpajon.

. Ce fils de cc la dame du Querminihy »), dont il n'est plus
trace ne figure dans aucun des actes de partage
trouvé aucune
de la succession d'Antoine-René Le Pappe. Il est donc
peu après 1696, et on peut supposer que les fatigues
décédé
ont pu contribuer à sa mort prématurée.
du voyage
Elisaheth Le Livec. Antoine-René Le Pappe laissait sa
veuve dans une situation de fortune fort embarrassée. Des
issus de leur maeiage,il en restait une dizaine
seize enfants
à la charge de leur mère: et aucun n'était en mesure de
(1). Le ser'vice à l'armée était très oné­
lui venir en aide
reux pour lr:s gentilshommes; en outre, la situation finan­
n'avait pu que s'aggravee par l'achat du manoir de
cière
~ouriou (aujourd'hui I}riou) (2) qui lui avait été vendu par
le baron de ~veno . Le Pappe avait également fait des
dépenses considérables à son habitation et, tout en

conservant le bâtiment principal, le donjon et la chapelle,
il avait reconstruit, un autre corps de logis fermant ·
la cour au couchant. Ce bâtiment, qui a 42 mètres de
longueur, est tout en pierre de taille d'un appareil soigné,
mais très simple d'ornementation en raison de sa destina­
tion . Les mansardes également en geanit avec frontons alter­
nativement tl'iangulaires et circulaires, rappellent celles de la
Gendarmerie et de la Préfecture de Quimper. Au 18 siècle~
il est appelé le bâtiment neuf; . actuellement il est toujours

en bon état, seul reste intact de l'ancien château.
Marie-Elisabeth Le Livec avait encore d'autres sujets de
Ses armes . avaient bien été enregistrées à
préoccupation.
l'Armorial général, le 20 novembre 1696; six membres
de la famille Le Pappe y figuraient également, por-
(1) Antoine-René Le Pappe avait eu treize fils el trois filles, et il n'eut
aucun petit-fils de son nom.
(2) La sur.face totale de cette terre, qui compt'enait Kereven, maintenant
Kerhuilet, était de 220 journaux, plus de 100 hectares .

tant tous les mêmes armes, la corneille percée d'une

flèche (1); mais cette inscription n'était pas une présomption
de noblesse, et la famille Le Pappe fut poursuivie pOUl' USlII'­
pation Les droits de fief et de juridiction invoqués par An­

toine -René Le Pappe dans sa déclaration du 1 r octobre
1679 . avaient été contestés par les commissaires du Roy,
renouvelant les argumenfs de l'arrêt rendu sur l'aveu

d'A uffray du Chastel de 1619.
En 1685, par une · sentence du 20 janvier. Le Pappe avait
été débouté de ses droits de fief, diligence et mouvance S\\ r
les villages de Penvern. Larlan et Botdaniel; mais SUI' appel,
il fut maintenu dans ses dl'Oits ~ur ces villages et dans le
droit de percevoir les,rentes d'iceI1es.
Un autre arrêt de lG84 le d_ ébo:Jta é ~alement pOlir le vil­
lage de ~livinen, mais le maintint pOUl' Mengleuz, à charge
de bornement dans les deux mois.
Huit ans plus tard, par un al'rêt de la cour du l() janviel'
1692, le Roy est maintenu dans la mou vance de ~anmoalic,
Tyancaroff, etc .
Par un autre arr'êt du même jour, .Le Pappe est d,ébouté
de son droit de moyenne et basse jllstice, faute d'acte justi­
fiant sa possession depuis 1575, et ne pouvant l'eprésenter
les actes d'accord passés à cet . effet le 23 tévl'iel' L619

« L'exercice continu de cette' juI'idiction qu'il invoque n'est
pas reconnu suffisant pour en justifier le maintien l).
Enfin, le 15 juillet 1693, SUl' appel il fut définitivement dé­

bOlllé du droit de moyenne jnstice pour le fief de QU81'mi­
nihy et de la mouvance du . lieu et terre de I~anguen. En
(1) Renée Le Pappe veuve François de BoisbJudry, écuyer; Mélthur-in­
René Le Pappe, seigneul' de Kerffiorvan ; Olive de Coetnoul's, veuve Gel'­
main ·Claude Le Pappe, seigneur de Kerespel's; Polycarpe Le Pappe, seigneur
du Liscoet et Claud.e du Poulpry, sa femme; Jean-Baptiste Le Pappe, escuyel'
seigneur du Querminihy; Noël Le Pappe, seigneur de la Villel'abel.

même temps, il fut condamné pour usurpation de noblesse
à 500 livres d'amende.
La juridiction cessa donc de fonctionner: sa dernière mani­
festation sur les registres de la trève de Rosporden està la date
du 7 février 1694, pour le mariage d'Alain Legall et d'Hélèlle
G ourme1en, « décr~té dej llstice par laj uridictioll de ~m i uihy )) .
Mais, sans attendre la solution déflnitive de ces longs
débats, Le Pappe, pour obéir aux injonctions des intendants,
tout en protestant qu'il avait toujours joui de la qualité de
noble et en faisant réserve de ses droits , avait été obligé de
payer, le 1er juillet 1693', les sommes qui lui étaient réclamées
comme héritier non noble de sa mère, Ursule l'Honoré.
Ces sommes s'élevaient à un chiffre élevé:
Manoir de ~minihy, pour la métairie louéc· ...
La censive du moulin de Boudouglas, en ~Ileve],

~juridiction de Goarlot). . . , . . . . . . . ....

Lieu noble de Penbohal (Penbuel (1). . . . . . .
Lieu noble de ~vinedel. ......... . 30 )

Son moulin ............. . 60 )

Lieu noble de ~oué, en Scaër (juridict. de Concq).
Deux fiefs SUl' terres nobles en Elliant .....
Après la mort de son mari, Elisabeth Le Livec eut à payer
des sommes considérables, d'abord pour ~oriou, son
moulin et dépendances; ensuite les droits de fief dus par
son mari, puis par la succession de son mari pour l);miuihy,
Penbohal, l);vinede1, ~roué, moulin de Mao, dans les paroisses
d'Elliant, Tourc'h et Scaër; enfin, en 1704, pour le moulin
de Roudouglas et le lieu de Nevars-HuellafI, sous la foy et
juridiction de Goarlot .
(1) Sur le registre de la paroisse de Rosporden est mention né, à la date
t 697. le décès à la métairie noble de Pen buel, de Buq uel d'A r ·
du 7 juin
nouville, direcleur général des domaines du Royen l'évêché de Corn uaille.
y était-il appelé pal' ses fonclions à l'occasion du règlement de la succes­
Le Pape?
sion d'Antoine-René

. Je ne saurais affirmer que cette énumération soit complète,
mais la veuve avait encore de graves sujets de pl'éoccupation
qui lui étaient communs avec)es autres membres de sa famille.
Les Le Pappe ne pouvaient accepter sans protester les
privaient des honneurs et des privilèges de
décisions qui les

la noblesse, et j'ai retrouvé la trace de plusieurs réclamations

qu'ils firent et renouvelèrent.
. Requête de Polycarpe Le Pappe, seigneur de Liscouet,

en Lanarvilly, demandant le rétablissement dans la qualité
de noble, pour lui et pour Geneviève de Rosily, veuve de
Joseph-Corentin Lè Pappe, sieur de I}morvan, au nom et
comme fondée de pouvoirs de Mathurin-René Le Pappe, son
fils, requête à laquelle s'associent Marie-Elisabeth Le Livec:
veuve d'Antoine-René Le Pappe et Jean-Baptiste: Le Pappe,
seigneur de ~minihy, son fils.
Protestation signée par Jean-Baptiste Le Pappe: seigneul'

de ~minihy, procurour du Roy de la .sénéchaussée et
siège présidial de Quimper, tant en son nom personnel que
comme représentant Mathurin Le Pappe, seigneur de
~morvan, Marie de Poulpry, veuve de Polycarpe Le Pappel
tutrice de ses enfants mineurs et lVlarie Elisabeth Le Livec,
aussi tutrice de ses enfants.
Ces démarches et celles faites par d'autres Le Pappe n'eu-

rent aucun résultat, et Jean-Baptiste fut chargé par ses pa-

rents de delllander la décharge dè l'amende de 4,000 livres à la­
quelle ils avaient été condamnés séparément. Cette décharge
ne fut pas obtenue, et ils durent se borner à demander la resti-
tution des papiers qu'ils avaient déposés. Cette fois ils eurent
satisfaction, SHllf pour trois pièces reconnues fausses. Un
sieur Audigier reconnut les avoir fabriquées (1).

(1) Transaction entre Jean Le Pappe et Christophe Toulgoët, le 3 août
15~'2 ; transflCtion entre Jean Le Pappe et François Le Pappe, 2fl oct.1554;
contrat de mariage de Françoi~ Le Pappe et Catherine Le Gat, 18 janv.! ~98 ,
Ce dernier était père de Marc-Antoine Le Pappe, acquéreur de Kerminlhy .

Olive de Coetnours veuve de Germ'ain Claude Le Pappe
seigneur de Coetlespel fnt l'objet do pou l'suites analogues.
Jean-Baptiste Le Pappe, qui était depuis entré dans IR
magistratul'e, paraît avoir été l'agent le plus actif de ces
réclamations faites dans l'intérêt de toute la famille. Dans
plusieurs lettr'es, qui ont été conservées, le sl' de Lescoat
s'adresse toujours à' lui « mon eher et honoré neveu». Ces
lettres portent un cachet aux armes des Le Pappe et des Coet­
nours (massacre de cerf).
Pendant les années qui suivirent la mOl't d'Anthoine
René les registres de la paroisse de H.osporden ne fournissent
que peu de renseignements. ,

Le 1 septembre 1700, Esc. Pierre Le Pappe et Anne
Poullain dame de Villeroy sont parrain et marraine de
Jeanne, fille de Pierre Hily du manoir de Penbual.
,Marie-Anne Le P~ppe est marraine en 1701 ,de la fille
d'un charbonnier «( à présent au bois du ~minihy )) et un peu
tard de Toussaint. fils Je Louis Guénézet. Le parr'ain
plus
, est Guillaume Changeon advoGat en la cour, sI' de Menebriz.
Le 1 septembl'e 1710 eut lieu à Elliant un baptême de
cloches dont je reproduis l'acte textuellement: ,
(( Ce jour premier de septembre, mil sept cent dix ont été

bénittes et nommé deux cloches, l'une paissante de six cent
quinze livres nommé par Messire Sébastien Mahé, chevalier,
seigneur de I~morvan et dame Anne de la Roche dame de
~strat, parrain et marraine, et l'autre 'paise deux cènt
soixante douze livres nommé par Mes,sire Louis-René de la
Mal'che, chef de nom et d'armes et dame Anne-Mal'ie Le ,~jvec
dame du ~minihy , La première pour servir à la chapelle du
Rosaire (1) nommé Marie-Anne Sébastienne et la seconde
pour servir à la chapelle de Saint Gnennel (2) nommé Anne-

(1) Au bourg d'Elliant.

('2) Chapelle prohibitive aux seigneurs de Kminihy.

Louise Guenelle, La bénédiction faite par Missil'e Ger-

main Floch, prêtre, par permission de l'Evêque en présenC E:
de noble et V. 1Vlissire Jean-Louis de :&venozaël sr recteur
d'Esliant et des SOllbz , Anne de la Roche, Anne-~1arie t e
Livec du ~minihy, LOllis-l{ené de la Marche, Sébastien_
Maurice Mahé de l}morva n) de :&gllern ~mor-van, Anne­
Josephe de Trearma, -Suzanne Mahé, Joseph Treouret, ~mor­

van Mahé le vieux, de Landanet, du Lezlo Le Pappe ,
Guillaume Cutllillic recteur de Tourc'h, René Le Flao ,
prêtre, curé d'Elyant, Barbé, Philippe, curé de Hosporden,
Leroux, Frances, Kervenozaël recteur d'Ellyan, Cer'main
Floch, prêtre».
Ces cloches n'existent plus.
Deux mois plus tard eut lieu le baptême de la grande
cloche de l'Eglise de Rosporden; voici l'acte qui a été dressé
de cette cérémonie: -
« Le septième de décembre mil sept cent dix a reçu les
cérémonies de l'Eglise la grande cloche de l'Eglise de Ros­
porden, pesante quatorze cent livres fondue par délibéra tion
du général de la dite ville a été nommée Anne-Jan-Baptiste

par Maistre (1) Jan·Baptiste Le Pappe, seigneur de I~minihy
procureur du Hoy an présidial de la ville de Quimper, et par
dame Anne Riou. dame du Guillv Sénéchale de Concarnea u.

Ladite administration faite et célébrée par .Messire Louis
Philippe, curé de Rosporden J par permission de Monseigneur
de Quimper.
Ont assisté à cette célébration les soussignants et aut res :
Anne Hi relll' au présidial de Quimper, ~goat Legl1illou~ capita ine

(1) Le mot Maistre surcharge Messire rayé. Pol de Courcy suppose que
Jean Baptiste a été anobli en 1700. ce que contredisent les démarches
faites par lui après cette date. Cet anoblissement a du être une consé­
quence des charges qu'il a occupées au présidial de Quimper vers ' 710

de Rosporden, Villeroy Marchand, lieutenant de la co'mpa­
gnie de Rosporden, Halnay, Louise Charlot du Guilly, La
Kergoat Leguillou, Callando, La Poulbran, Jeanne-Fran­
çoise Haillay, Jeanne Callando, Lenaour prêtl'e, Philippe

cure.
Cette cloche n'existe plus.
La liquidation de la succession d'Antho ine René devait
être longue et laborieuse, d'autant plus que le dernier des
enfants n'était pas encore -majeur. Aussi longtemps que sa
veuve vécut, la fortune paraît être restée indivise entl'e ses
mains, mais elle avait confié à son fils aîné Jean Baptiste, la
gestion de ses affaires, « attendu son infirmité et impos­
d'agir. ))
sibilité
Le 10 janvier 1714, Dame Elisabeth Le Livec, dame

douairière de ~minihy, veuve d'Escuyer Anthoine René Le
seigneur du ~minihy mourut et le 18 janviel'
Pape, vivant
suivant eut lieu la levée des scellés. Des 16 enfants qu'elle
avait eus, furent présents seulement, 5 fils et 2 filles,
savoir: Jean Baptiste Le Pappe, Bonaventure Le Pappe,
bachelier de Sorbonne, promoteur ùe Cornouaille, Hya­
cinthe Le Pappe, Pierre Sr de Lestauh, Marc Antoine Le .
Pappe SI' du Bois de la Haye, DamoiselleMarie Anne Le
Pappe du ~erminihy, Anne Hyacinthe Le Pappe émancipée
de Justiee.
Jean Raptiste Le Pappe né le 24 octobre 1677, avait peut­
être commencé, mais . certainement terminé ses études à
Paris. Il y obtint le 21 juillet 1695 le grade de bacheliel' et en
utriusque juris. En 1704 il fut nommé
1697 le certificat
substitut du procureur du Roy au siège présidial de Quimper
en remplacement de maistre Jan de Livec sr de ~livain
Conseiller du Roy et président à ~e même présidial. A cette
occasion il dut présenter un certificat de non-pal'enté avec
autres membres du siège. lJ devint par la suite en 1710
les

Conseiller du Roy et procureur général en la sénéchaussée
et siège présidial .de Quimper. Peu après il épousa Anne
Marie Le Livec fille de son prédécesseur et sa cousine ger-

mame;
En raison de ses fonctions, il eut, le 20 février 1730, à

notifier à Monsieur de Plceuc. Evêque de Quîmper d'avoir à
présenter sans délai (( le dénombrement de son évêché faute

de quoy toutes les suites requises et saisie de son temporal
seraient immédiatement faites ». Sixjours seulement s'étaient

écoulés depuis que Hilarion de Bec-de-lièvre procureur de

l'Evêque avait prêté au Royen la c.hambre des comptes de

Nantes le serment demandé pour le temporal de son Evêché,

et que l'arrêt avait été rendu par la Cour.
Cette signification si hâtive n'est qu'un épisode de la lutte

engagée à Quimper entre les Juridictions Royale et Epis-
copale (Reguaires) Tl).

Un procès,qui lui avait été intenté à raison de ses fonc-
tions, lui donna pendant de longues années de grandes préoc
cupations. Un sr Auvrillieutenant général de police à Brest
avait à plusieurs reprises reçu des reproches de ses chefs,
reproches qui lui étaient transmis par l'intermédiaire de Le
Pappe. C'est- à ce dernier qu'il s'en prit en l'assignant et Je
prenant à partie (( à raison de l'indigne vexation que le dit
Pappe éI. personnellement fait souffrir au dit A., que faute

par le dit Le Pappe d'avoir nommé le prétendu dénonciateur,

condamner le dit Le Pappe à 120.000 livres de dommages-

mterets »).
Un premier arrêt du 17 septembre 1726, tout en écartant
la demande, n'avait pas donné complète satisfaction à Le
Pappe. Le SI' A., non découragé, engagea une nouvelle
action, et c'est seulement le 8 octobre 1735 qu'un arrêt mit

(1) Registre des Requêtes ordinaires de l'hôtel du Roy .

définitivement Le Pappe à l'abri de toutes les poursuites
faites contre lui. Sans contester au demandeur le droit de
prise à partie, cet arrêt déclare que, si cette action n'est pas
impossible, elle ne peut être exercée contre Le Pappe qui
est toujours conformé aux ordres des magistrats ses su-
périeurs et aux arrêts du Parlement de Bretagne. .
correspondanèe de Le Pappe fait voir qu'il n'était pas

absolument tranquille, il se demandait s'il n'y aurait pas
encore quelque formalité à accomplir. Une lettre de son
procureur à Paris le l'assura complètement.
J .-B. Le Pappe survécut peu à cette satisfaction, car il
mourut à son domicile de Quimper place Terre au Duc, le
14 novembre 1735 et fut enterré le lendemain dans la
chapelle du Paradis.en l'église Saint-Mathieu. (1 Ont assisté
à cet enterrement les MM. du Présidial et autl'es )). '
laissait qu'une fille Elisabeth Renée qualifiée
Il ne
« riche héritière )) qui avait épousé à Sai ut-Mathieu de
Quimper le 22 août 1731 Messire Michel Y ~es Marie de
seigneur de ~anot l1), ,du Hély, etc.
Coetlosket, chevalier
Voici les signatures qui suivent l'acte de ce mariage cé- '
lébré par Alain de Coetlosket, chanoine de l'Eglise Royale
Morlaix:
s. H.enée Le Pappe, Michel du Coetlosket, Anne- Marie
Jean Baptiste Le p,appe du ~minihy,
Monot du Coetlosket,
procureur du Roy de Quimper, Anne Marie Le Livec du
~minihy, Du Coetlosquet de Gouendour, de Quelen de ~aret,
Marie Anne Le Pappe de Rosily, Mauricette Cabon du Ty­
meauter, Anne Hyacinthe Le Pappe de ~fort, Anne de ~gue­
len de ~livain, Marie Ursule Goueznou de Tresurin, Tho­
mas Richer, de Hosily de la Tour, De Mathezon de ~peoch,
Bois de la Haye Le Pappe, de la Marche de ~fort, de Moelieu

(1) Michel de Coetlosquet était veuf.

Goalldonr, Anne Mahé, Anne Richer, Piriou Hecteur

dn Coetlosquet chanoine de Morlaix.

Après la mort de son mari, Anne Le Livec renonça par
acte du 27 février 1736 au bénéfice de la communauté qui
avait existé entre elle et son mari et demanda seulement SOn
tl'Oussean. Sa fille n'y faisant pas d'objections il lui fut

adjugé 500 livres pour habits de deuil et 1484 livres pOUl'
trousseau, en effets ou en al'gent. Les seules difficultés
vinrent du côté de M. de Coetlosket, qui refusa à sa femme
héritière bénéficiaire, de suivre à la succession de son p8re.
Elle fut obligée de se faire autoriser de justice.
Le 24 janvier 1757 elle était veuve et procéda à la liquida.
tion de la succession de son mari comme tutrice de son fils '

et de ses deux filles.
L'acte de partage des biens de la succession d'Antoine-René

Le Pappe et de sa femme n'a pas été retro:.lVé, mais un acte du
13 janvier 1714, donne l'énumération des personnes inté­
ressées à cette succession, c'est-à-dire de leur sept enfants:
Jean- Baptiste, BonaveIlture, Pieree, Marc -Antoine,
Hyacinthe, damoiselle Marie- Anne, damoiselle A nn e­
Hyacinthe. mineure émancipée de justice.
C'est entre deux de ses enfants Pierre et Anne-Hyacinthe
que fu-t partagée la terre de Kerminihy, les cinq autres
reçurent leur part héréditaire en vertu d'arrangements qui
ne sont pas connus.
Jean-Baptiste, dont il a été question précédemment ne
posséda personnellement aucune ierre et il n'ajouta g éné­
ralement à son nom que celui de ~minihy. Il est appelé
quelquefois sr de ~iner.
Bonaventure, Bachelier de Sorbonne fût promoteur de
Cornouaille,
Marc Antoine porta comme son gr.and-père et son père le
nom de s~ du Bois de la Haye, terre dont l'emplacement m'est

inconnu. Il étàit propriétaire de Lesuzan en Dirinon, mais il
se trouvait souvent à l):minihy. C'est là qu'il est mort en 1760
sans laisser d'enfants et probablement sans avoir été mariA.
Hyacinthe. On ne sait rien de ce fils mort jeune. .
Marie-A nne mariée à N. de Hosily-la-Tour .
A défaut d'un acte de part8;ge deux aveux de 1731 et de
1752 font connaître comment la terre de ~minihy fut divisée
entre les deux autres enfants Pierre et Anne-Hyacinthe .
. Pierre de Leslau, le second fils devint possesseur d'une
partie de la terre de I)minihy comprenant tous les domaines
situés dans les paroi~ses d'Elliant, Tourc'h et Scaër, ainsi
que Ty-an-pa lmer et I)eloret (I)angoc) dans la trève de
Hosporden Ces domaines, ,réprésentant une surface de 815
journaux, continuaient néammoins à faire partie du fief de
I)minihy. Il eut en outre au manoir le corps de bâtiment neuf
qui se trouve au couchant de la cour, la jouissance par
indivis de la moitié de cette cour à la charge de laisser
la liberté du four, la possibil ité de faire . un petit jardin au
nord du grand corps de logis et a'llevant de l'aire à battre
de la métairie; de plus quatre charretées de paille de seigle,
deux charretées de foin données en temps de saison et le
laissé aller de deux vaches pâturer avec celles du métayer.
Cette installation commune ne devait pas être durable;
aussi, dès 1731, nous' trouvons Pierre installé an manoir
de I)blin (Québlin), paroisse de Lothéa, près Quimperlé.
Il avait épousé Jeanne Le Floch et n'eut qu'une fille unique,
Thérèse - Antoinette, mariée à escuier Antoine de Bou­
touillic, seigneur de Prenassy, ancien capitaine comman­
dant du 2e bataillon du régiment de Navarre-infanterie,
chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis.
La trace de sa présence ne se trouve à I)minihy qu'au
moment, où il vient régulièrement toucher ses rentes. Il
existe une série de, quittances du domaine de I)ambriquen,
signées par lui jusqu'au 11 février 1760, ensuite par son
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXX (Mémoires) 24

gendre Boutouillic, jusqu'au 18 mars 1780; enfin, par la
dame Le Pappe de Prenassy, sa fille, qui, elle-même, ne tarda
pas à succomber.
, Elle ne laissait pas d'enfant, et sa fortune passa à la
sa cousine-germaine, Anne Le Pappe. Cette nièce
fille de
à la mode de Bretagne, dame Marie-Louise de la Marche_
~jan, dame de ~minihy, ne fut pas mise en possession
, avant 1783. Elle hérita en même temps d'un procès dont il
sera question plus loin.
, Anne-Hyacinthe Le Pappe. Le plus jeune enfant reçut
pour sa part le manoir de I}minihy (logis principal et don­
jon), la réserve et les bois, les fermes du manoir et de
Penbuel, les domaines de .f5:aubroc, .f5:zanner, ~anleué-bihan
et les landes entourant la chapelle de Saint-Guenaël, soit
215 journaux en fermes et 175 journaux en domainès, le tout
'en Rosporden. En outre, elle conservait les droits de fief et
'les nombreuses redevances que la seigneurie possédait sur
différentes terres situées en Elliant et Tourc'h, y compris
les domaines attribués à son frère Pierre Le Pappe. Elle
conservait également les honneurs et pl ééminences apparte­
nant à la seigneurie de ~minihy, dont elle était devenue
propriétaire.
Le ... août 1718, Anne-Hyacinthe, âgée de 28 ans, épousa
Joseph-François de la Marche, seigneur de ~fors,
Messire
chevalier, dont le grand-père, Yves de la Marche, était
cousin-g'ermain de Renée de la Marche, marquise du Chastel.
avait 25 ans, et d'après le contrat de mariage,
Le futur
passé chez Me Leprédour, notaire à Quimper, M'essire Fran­
çois-Louis de la 'Marche, son frère aîné, demeurant au ma­
noir de ~fors, en Ergué-Gabéric, lui donna la somme de
600 livres de rente, « et en outre, ce pour toute fin et perfec­
partage noble, 1 ,250 livres en argent comptant, pro­
tion de
mettant lui tenir compte des éligements qu'il pourrait faire
des prétentions' que leur deffunct père avait contre M. le

président de Lattay de Saint-Pern: et des prétentions de la
succession de feu Messire le marquis du Chastel et de la Gar-
nache. )

Joseph François de la Marche et Anne-Hyacinthe Le
Pappe vinrent se fixer à I}:minihy, dont le manoir était inha­
bité depuis quelques :mnées.
Des difficultés s'élevèrent entre les enfants la Marche, à
la suite de la mort de leur père. Cela résulte d'une assigna-
tion donnée par huissier en 1720, «( à la requête de noble et
. discret Missire Louis-Joseph de la Marche, recteur de la
paroisse d'Esquibien, y demeurant; de Messire Joseph­
François de la ;\larche, seigneur de :&fors, demeurant au
manoit' de :&minihy, paroisse d'Elliant; de demoiselle Barbe­
Hose-Martine de la Marche, demeurant au prèsbytère d'Es-
quibien, et de demoiselle Marie-Thérèse de la Marche, de-
meurant à Quimper (1) ..... à Messire-François-Louis, chef
de nom et d'armes, de la Marche, seigneur dudit lieu che­
l'Ordre militaire du Mont-Carmel, demeurant à
valier de
Quimper, paroisse de Saint-Julien, pour compara~tre à la
première audience de la juridiction des Reguaires pour ,,"oir
juger entre les parties le partàge des biens de la succession •
Louis-René de la :Marche, seigneur dudit lieu,
de feu Messire
et celle de feue dame Marie-Rose de Tréouret, leur père et
mere 'fi.
Joseph-François de la Marche et Anne-Elisabeth Le Pappe
eurent six enfants, tous bapt.isés à Rosporden.
Joseph-Hyacinthe, né le 20 novembre 1720, baptisé pa.r
docteur de Sorbonne, oflicial de
Messire Yves Le Boult,
Cornouaille et recteur de Saint-Mathieu. Les parrain et mar-
raine sont deux mendiants de la trève de Rosporden. Cet
acte est signé par Anne Poullain de Villeroy, Joseph-Louis
(l) Sur cette liste, le nom de Jean-François de la Marche, jésuite, frère
des demandeurs, ne figure pas. Il n'est mort qu'en 1762.

de Tréouret, Bois - de-la-Haye ;Le Pappe, Le Boult, Joseph_
François de ~fort de la Marche, Philippe curé. Cet enfant
est mort le 8 mai 1722.
Marie-Louise, née le 7 novembre 1721. Les parrain et mar­
raine sont Messire Francois-Louis de la Marche, chevalier
seigneur de ~fort, grand-père, et demoiselle Marie-A nne
Le Pappe, dame de la Tour et de Rosily. A leurs signatures
s'ajoutent celles du pèee et d'un oncle, Messire Lo~is-Joseph
de la Marche, recteur d'Esquibien et de 'Lenaour, prêtre . .
Elisabeth-Rose, née le 25 février 1723. Les parrain et mar­
raine sont Messire Marc-Antoine Le Pappe, seigneur du
Bois-de-la-Haye et damoiselle Barbe-Rose-Martine, dame
la Marche, oncle et tante de l'enfant. Après les signa­
tures du parrain et de la marraine, je trouve seulement les ,­
suivantes: Père Augustin de Lanniou, capucin, F. Augustin
~e Lanniou, capucin, Philippe, curé.
Pierre-Joseph, né le 2 août 1724. Les parrain et marraine
sont Pierre Le Pappe, seigneur de Le$lauz et Marie-Thérèse
de la Marche.
Marie-Josèphe, née le 3 jùin 1726 a pour parrain et mar-
raine deux pauvres gens de la trève. .
Elisabeth-Louise, née le ·5 décembre 1728. Les parrain ét
marraine sont Messire LoUis-Joseph de Tréouret, chevalier,
seigneur de ~strat, Coeteloret, Trohanet, et dame Eli­
sabeth-Renée Le Pappe, dame de ~minihy, fille de Jean-
Baptiste.
Je ne retrouve aucune mention du père de ces enfants
jusqu'à son acte de décès inscrit sur les registres de la pa-
roisse de Rosporden .
« Le 31. jour d'octobre 1734 a été inhumé dans l'église de
Rosporden le corps de Messire Joseph-François
N.-D. de

de la Marche, chevalier, seigneur de ~fort et de ~min ihy,
âgé de /d ans, et ont assisté au convoi les soussignés avec
plusieurs autres. Philippe, curé ». Les signatures manquent.

Des six enfants qu'il avait eus de son mariage avec Anne­
Hyacinthe Le Pappe trois filles âgées de 13, 8 et de 6 ans
avaient survécu.
En raison de l'existence de ces enfants, Chapon,. greffier
de la Cour royale de Concarneau, se présenta dès le sur­
lendemain, 2 novembre, au n1anoir de I~minihy et, après
avoir fait un inventaire sommaire du mobilier, se borna à ap-
poser les scellés sur li une armoire située dans la pièce ou le
seigneul' de ~fort faisait son cabin et armoire qui contenait
beaucoup de papiers. « Le procès-verbal est signé par la
veuve Le Pappe de ~fort et par son fl'ère du Bois de la Haye.
même huissier se présenta de nouveau les 11, 12 et
13 janvier 1735, accompagné cette fois de quatre personnes
appe lées pour donner estimation aux meubles, savoir: pour
la batterie de cuisine, Antoine Cébeau ; poUl' les meubles,
François Le Bihan; pour la lingerie demoiselle Michelle
Pouchard veuve Delanoë; pour .les bes.tiaux et autres
meubles ainsi que pour les ouvrages de campagne, Jullien
N erzic, de ~daner.
Cet inventaire est fort détaillé et je ne puis en reproduire
que quelques extraits.
Mobilier.
Dans la cuisine, l'arrière-cuisine, la boulan­
ge1"ie et la cave, il est énuméré dix objets en
cuivre rouge, quatorze en cuivre jaune, onze en
fer et fonte, quatre armoires, huit chaises, etc.,
le tout estimé ............................ . '1441. '11
Dans la salle:
Une armoire à deux battants de chataigné

avec sa clef et serrure ............. ........ .
Une autre armoire à deux battants de chatai-

gné, sans garniture ....................... .

Une armoire à buffet à trois battants avec ses
clefs et clavure en bois chataigné ...... ~ ..... . 10 l)
Deux petites tables et une table pliante bois
de sapin .......... ....................... .

Huit chaises et quatre fauteuils de paille ... .

Deux plants bourés ..................... .

Deux ronds de table bois de chataigné ...... .

Deux chenets avec les pelles et pinces ...... .

Dans l'antichambre (au 1 étage) :
Un lit carré avec sa paillasse, coëtte et mau.:.
vaise couverture de laine ................... .
Deux chaises de paille avec une vi.eille tabl.e
bois de chêne ............................. .

Dans la seconde chambre (la grande) :
Un lit à l'impériale avec sa garniture de l'i­
deaux gris, coëtte et traversin de pl u me et deux
oreillers, matelas, la courte pointe d'indienne
et couverture de laine. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100 »
Un autre lit à tombeau avec coëtte, matelas,
traversin, oreiller et rideaux de laine. . . . . . . . . 30 ))
Une table carrée bois de chêne. . . . . . . . . . . . . 1 10
Six chaises et quatre fauteuils de clisse .....
Un autre fauteuil garni d'ouvrage à point
d'Hongrie ............. ................... . 4 »
Un miroir à l'ancienne mode garni de

CUIvre ..... .............................. .
Une paire de chenets avec pelle et pince .....

Dans la chambre à l'approche du feu sCtgneur
de Ker/ors:
Un lit à tombeau avec sa paillasse, coëtte, tra­
versin, oreiller de plume et couverture d'in-
dienne .............................. 1 ••••
Un autre lit garni de la même façon que le
précédent .... . " ........... o •••••••••••••••• 24 ))

Une table à pied tourné bois de noyer ...... .
Cinq chaises de clisse ................... .
Quatre chaises à perroquet couverts de cuir
rOtlge ............ .......... " ............. .

Dans le cabinet de il!. de Kerfors :
Une armoire à deux battants, bois de chatai-
gner, fermée à clef, sur laquelle sont posés les
scellés ..... ' .............................. .

Une chaise et un petit tabouret de bois ..... .
Une petite scie estimée .................. .

Une épée d'argent doré avec son ceinturon ..
Une paire de pistolets, avec leurs fourreaux

garnis d'un vieux galon d'argent ...... '.' .... .
Une housse garni d'un vieux galon d'argent. 2 »
Un fusil garni de cuivre .................. .
Un autre fusil garni de fer ............... . 7 »
Un bas, deux ménequins, un voIlant et deux

crochets de fer ....................... ; ... .

Dans la chambre au-dessus de la salle :

Une armoire à buffet à deux battants bois de
fustets avec sa clef et serrure .............. ' ..

Dans la chambre du pavillon:
Un lit quarré garni de rideaux de cherge verte
avec sa paillasse, coëtte de plume, matelas et

traverSIn .. ................... , ........... .
Une petite couchette avec sa paillasse et coëtte
de balle et une mauvaise couverture de laine
blanche .. ............................... .
Une table carrée avec son tiroir avec une
autre petite à couverture brisée ............. .
Trois chaises de pa ille et trois chaises de bois.
Deux chenets de fer sans pelle ni pince ...... .

Dans l'antichamb1'e :
Une armoire à deux battants bois de chêne et
de chataigné avec sa clef et serrure .......... .
Un vieux coffre en bois de chêne ayec sa clef

et cla vure ................ ............... .
Une chaise percée bois de guignier ........ .
Une vieIlle table à pieds tournés .......... .

Dans la chambre, alt-dessus de la cuisine:
Deux vieilles couchettes avec leurs coëtte de
balle, paillasse et couverture sans rideaux .....

Dans la chambre au-dessus "le la b01ûangerie :
de membrures et planches tant
Huit douzaines

de chêne que de châtaignier ................ .
Dans le grenier au-dessus des chambres :
Deux douzaines et demye de vieilles planches
ayant déjà servi de cloison ................. .

Linge.
Je résumerai cette partie de l'inventaire qui est très détail­
lée, Il y est constaté:
3D douzaines de serviettes chacune de. . . .. 21. D s. à 31.
Quelques-unes plus grandes. . . . . . . . . . . . . . . 8 et 9 1.
82 nappes de 2 et 3 1. les plus grandes .... : .

72 draps .de toutes dimensions ............ .
33 houilles d'oreiller ..................... .

pièce de quarante aulnes d'étoupe de chanvre

1 pièce d'étaminA blanche de 50 aulnes ..... .

1 pièce de berlinge de 40 aulnes ............ .

1 pièce de berlinga gros roux de '18 aulnes ..
Hardes et habits du seigneur de Kerfors
Une douzaine et demie de chemises garnies
de mousseline ............................ .

Une douzaine de vieilles chemises de nuit ...

Une douzaine de tour de col de mousseline ...

Quatre paires de bas de laine ............. .
Un surtout de bouracan gris .............. . 12 ' »
Trois vieux habits, l'un de drap couleur de
canelle, l'autre d'étaminè vieille couleur de feu et
le troisième d'une étamine brune .......... ' .. .
Trois vieilles culottes 3 10
Une douzai ne de mouchoirs de couleur ... ' . . . 6»

Deux paires ùe souliers .................. .

Une pièce de toile de gros lin étante au métier

estimée le fil, sans comprendre la façon (1) ....
(1) On peut rapprocher Joseph-Franço :s de la Marche, tisseur (le lin,
du gentilhomme b1"oyeur de lin par nécessité dont parle Renan dans ses
memoIres.
Sa garde robe est bien modeste à coté de celle de Claude du Chastel.

Argenterie.
Deux flambeaux avec mouchette et porte-mou­
chette, dix cuilIières, neuf fourchettes, huit
cuillières à café, six couteaux à manche d'argent,
deux salières, une écuelle, une grande cuillière
potager, deux gobelets, une petite gondolle (1 J,
un petit poivrier, un pot d'argent, le tout pesant
23 livres, à 48 1. 18 s. le marc, soit. . . . . . . . . . . 9841. '18
Un cachet d'argen t. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 ·10

Six plats et trois douzaines et demie d'as'siettes .

d'étain estimé à raison de 10 sols la livre. . . . . . 291. 12 ,

L'inventaire mentionne ensuite:

Une bride et une selle .................... .

Un pressoir à une seule vice .............. .

Vingt barriques de cidre à cent sols la barrique

Une pendule sonnante ................... .

Des bouteilles, etc., etc .................. .

Sept échelles dont trois pour les couvreurs .. .

Tout le matériel nécessaire pour la culture, etc. » »
Les prix auxquels ont été estimés les animaux et les pro·
duits de la ferme fournissent les éléments d'une comparaison

intéressante avec les prix à d'autres époques.

Une vieille jument et deux poulains ........ .
Un jeune cheval ......................... . 70 »
Un vieux petit cheval .................. : . . 24 » s
Un cheval .............................. . 40 »
De ux grands bœufs, à 07 1. l'u n ........... . 114 »

Deux torillons, à 20 1. l'un . ............... .
Quatre veaux d'un an, à 61. l'un .......... .

(1) Vase en forme de gondole. Aujourd'hui les hors d'œuvre sont servis
sur la table dans des bateaux.

Douze vaches, à 12 l. l'une dans l'autre .... .
Urie graride truye (1) .................... .
Une petitè truye ........................ .
45 milliers de foin ,à 4 1. 10 l'un estimé ..... '.
9 minots (2) de froment à 9 1. l'un ......... . 81 ))
42 minots' de seIgle à 3 1. l'un ............. .

30 minots d'avoine à 1 l. 9 s. l'un ......... .

2 minots de pois à 5 1. l'un ............... .

L'inventaire contient ensuite la désignation des titres,
pièces isolées et liasses, renfermés au nombre de plus de
cent cinquante ,dans l'armoire sur laquelle les scellés avaient
été apposés.
Tous ces documents sont postérieurs à 1656~ date ùe
l'achat de)a terre de ~minihy par Marc-Antoine Le Pappe, et
n'auraient probablement fourni aucun renseignement SUl' les
origines de la propriété. Ce sont des aveux présentés par les
fermiers, des pièces de procédure et des quittances sans
intérêt. J'y trouve la trace d'un procès entre le sI' de ~fors
et le sr de Musuillac, propriétaire de Tréanna. Deux aveux
sont fournis à la seigneurie de ~minihy pour les lieux de
Penvern-~'1eingleuz et Cosquer, l'un du 25 juillet 1665 par
ùame Louise Furie, dame de 'l'oulgoat, veuve du feu sei­
gneur de 'l'oulgoat (comte de Bienassis), l'autre du 25
février 1717 par le tuteur des demoiselles de Biena~sis.
Vient ensuite la continuation de l'inventaire pour' la métai­
rie du manoir. Jerne borme à en extraire les chiffres
suivants de l'estimation:
Un taureau noir ................... . 24 l.
Six bœufs de ......... . .......... . . .
Douze torillons de ................. . 121. à 7 l. 10 s.
(1) On voit quel intérêt on attachait dès lors à l'élevage du cochon d'après
le prix auquel la truie est estimée comparativement aux vaches.
(2) Le minot valait 88,6 litres à la fin du XV Ille siècle, soit neu f
minots pour huit hectolitres.

Onze vaches dè. : ................ ~ . '. 2Q l. 10 s. à 19 1.10 s
de : ..... ~ ..... ' ......... ' ,10,1. 10 s. à 9 1.
Trois génissès
Une jument blanche ................. ' 30 1. '
Deux pouliches. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 1. et 'lQ 1

De la lecture .de cet inventait'e on retire l'impression que,
. si les propriétaires de ~rninihy jouissaient d'une assez large
aisance, l'intérieur ,du manoir étüit loin de contenil'des
objets précieux comme le cOllstatent pour beaucou!', de
châteaux les inventaires qui ont été conservés (1). Il n'y a
rien d'étonnant, Joseph-François de la Marçhe avait trois
fl'ères plus âgés que lui, et plusieurs sœurs~ de son côté;
Anne-Elisabeth Le Pappe avait dû partager l'héritage
paternel avec quatre frères et une sœur. . '
Madame de la Marche survécût pius de trente ans à son
mari. Le 27 juillet 1752 elle dut fournir au Roy l'aveu e t.
dénombrement des b-Ïens dont elle avait hérité. A la fin se

trouve la formule suivante: '
( ' ... Déclarant la dite dame de I>:fors que les biens et
« rentes cy-devant employés se payent par les vassaux et
« ùomainiers de la dite seigneurie de I~minihy, les froments
« et seigles à la me sure comble de la terre et seigneuTie de KeT­
minihy et les (( avoines à la même mesure comble et foulée. »
Précédemment les déclarations fournies par les domainiers
aux seigneurs de I>:minihy portaient que les redevances en
gmins doivent être fournies « à la me5'ure » de Hosporden
La mesul e de I~minihy était-elle la même que celle de Ros-
pOI'den? et la mesure de Rosporden était-elle la même que
celle de Concarneau? C'est probable~ mais la question des
mesul'es seigneuriales est bien difficile à élucider.
Les registl'es de la pal'Oisse de Rosporden renseignent Slll'
quelques personnes de la famille de la Mùche.

(1) Il est à remarquer qu'il n'est fait nullp. part mention de bibliothèque
ou de livres.

Le 1 janvier 1744 damoiselle Marie-Josèphe de la
&fors est marraine de Joseph, fils du métayer de
Marche de
&minihy.
Le 30 janvier suivant damoiselle Elisabeth-Louise de la
Marche, dame du Boys de la Haye est marraine diElisabeth
Sancéau. ','
Le 13 janvier 1749 l'àcte de mariage d'une orpheline
habitantauchâteauue &minihy porte la signature d'Elisa~elh
de &fors de la Marche.
L'importance de la personnalité du recteur d'Elliant,
Louis-Joseph de la Marche, beau-frère d'Anne Le Pappe,
a conduit le curé de Rosporden à porter sur son registre
la mention suivante : " ,
« L'an 1754 le 24 septembre vers les 3 ou 4 heures de
« l'après-midi a été inhumé dans le cimetière d'Elliant le
« corps de noble et ' discret missire L'ouis-Joseph de la
« Marche licentié en Sorbonne et recteur d'Elliant depuis
« environ 15 ans, décédé le jour précédent environ 2 heures
(J. après-midi, dans son presbytère d'une révolution de
« goutte après quatre jours de maladie, environ la soixan­
« tième année de son âge. Les funérailles ont été célébrées
' u par noble et discret missire Dugua recteur du Grand
« Ergué, Conannou curé de Cadal, Le Roy curé et Rigallou
« prêtre de Rosporden, Coquil curé de Saint-Yvi, Créofl
(\ curé de Locmaria, Jaouen curé, Legal, Quéré, Garee et
« T~ssier prêtres d'Elliant. S. Le Roy cur.é. »
Nolis avons dit précédemment que la position de fortune
n'était pas très brillante, aussi
de la famille de la Marche
les deux filles ne trouvèl'ent pas facilement à se marier. La
Marie-Josèphe, n'avait pas à compter sur l'héritage
cadette,
de &minihy destiné à sa sœur aînée et. à 32 a11S, elle se
décida à un mariage, qui était peut-être avantageux :m point
de vue de la fortune, mais le mari qu'elle acceptait n'était
pas jeune, sa noblesse personnelle était bien récente, et il

avait un fils de 27 ans d'un premier mariage avec Marie_
A nnè Cossoul, d'ùne famille de très honorables marcha nds
de Quimper. .
Voici l'acte de mariage:
l( Aprè3 fiançailles faites, etc.
« Le 29 aoùt 1758 dans la chapelle du château du I);minihy,
« uue seule pub~ication de ban à l'église tréviale de Rospor .
« den et à Saint-Mathieu de Quimper fut célébré le 11 sep-
II tembre 1758 par moi recteur d'Elliant licentié en droit, par
l( permission à la chapelle du château du I);minihy, le ma­

« riage de messire Gabriel-Louis Goûesnou de I);dour, sr de
« ~lagatu, I);vastal et autres lieux, veuf de dame Marie-A nne

.« Cossoul de Saint-Mathieu de Quimper et damoiselle
« Marie-Josèphe de la Marche dame de I):fort, fille majeure
« de feu messire Joseph-François de la Marche, chevalier,
(1 sr de I);fort et de dame Anne-Hyacinthe Le Pappe, dame de
« I);fort.
« S. Marie-Josèphe de la Marche de I);dour, Gabriel­

« Louis Goueznou de I);dour, Le Pappe de I);fort, Barbe
« de la Marche, Marie-Louise de Id Marche du I);minihy,
« Marguerite-Louise Le Borgne de Laxalde, François-Louis

(1 de la Marche, Marie-Rose Blanchard M. a. Le Pappe du

« Bois de la Haye.

« P. a. de Suasse recteur d'Elliant. »

Le 22 mars 1759, la ·sœur aînée, damoiselle Marie-Louise
Marche dame de I);minihy est marraine du fils de n. h.
de la
ean-J ullien Trobért, sr de la Garenne. Le parrain est haut et

puissant seigneur Joseph-Christophe de Tréouret com t€; de
I);stra t, etc. .

QuelqlJes mois plus tard, madame. de la Marche perda it

son frère, Marc-Antoine, plus "âgé qu'elle seulement de trois
ans, et qui paraît être toujours resté son conseiller après la .
mort de son mari. Voici son acte de décès :

« Le 7 mai 1760 fut inhumé dans la tombe du château et

(1 seigneurie de ~minihy en l'église de Rosporden le corps
6 de Marc-Anthoine Le Pappe, sI' du Bois " de la Haye et
« autres lieux âgé d'environ 70 ans décédé d'hyer au dit
« château du ~minihy, muni des sacrements de l'église.
« S. Lenir avocat, Krieger (1), Coatpont Lebescond (2).
« Villenneuve, Billette, Le Bars (3), Desnos, Bosredon
« pi'être, Conannou curé de Cadol, Coquil curé . de Rospor­
« den, P. a. de "Suasse prêtre recteur d'Elliant. »
Quelques semaines plus tard, Marie-Louise se mariait à
son tour à l'âge de 38 ans. Elle épousait François de I>:jan, "
lieutenant des vaisseaux du Roy, appartenant à une famille
d'a'ncieune noblesse des environs de Saint- Ronan dont les
Hrmes sont d'argent à la tour couverte de sable. Il devint
capitaine de vaisseau et ne mourut qu'en 1812" , âgé de 97 ans.
31 mai 1760 par messire
Les fiançailles furent célébrées le
P. a. de Suasse, recteur d'Elliant, dans la chapelle domes-
tique du château de l}minihy, par pel'mission de Mr l'abbé
d~s Cognetz, vicaire général et official de l'Evêque de
Quimper. Les fiancés furent mariés dans l'église tréviale de
juin 1760 par messire Jean-François de la
Hosporden, le 9
Marche, chanoine et vicaire général de l'évêché de Tré-
gnier (4). Ils sont désignés ainsi qu'il suit dans l'acte de
mariage: Messire P"rançois deI>:jean chevalier seigneur de
~jean, fils majeur de feu messire Maudé Christophe de
~jean, chevalier seigneur de .l):jean et de dame Julienne
Gonrio, dame de I>:jean, lieutenant des vaisseaux du Roy
au département de Brest, originaire de Lokornan (Saint-

(1) Procureur et notaire dans la Cour royale de Concq, fabrique de
l'église N.-D. de Rosporden.
('l) Avocat à la Cour. Sénéchal de la Juridiction de la chatellenie de
Tréanna.
(3) Notaire et procureur au siège royal de Concq, syndic de Rosporden.
(4) Le futur évêque de Saint-Pol·de-Léon.

Ronan\. domicnié à Brest, paroisse Saint-Louis, et damoi~
sell'e Marie-Louise de la Marche, dame de ~minihy, fille
majeure de feu messire Joseph-François de la Marche, che­
valier seigneur de ~fors et dp, damoiselle Anne-Hyacinthe
Le Parpe, dame de ~fors, de cette trève de Rosporden.
est signé Marie-Louise de la Marche de ~jan, Le
L'acte
Pappe de ~fors de la Marche, Le Borgne de Laxalde, de
~morvan Le Borgne, Marie-Rose Blanchar, François-Louis
de la Marche, de Querdour, le chevalier de Penfeuntenyo,
Michel prêtre, N. Coquil curé de Rosporden, de la Marche
chanoine et vicaire -général de Tréguier.
Ils eurent Ciuatre enfants.
L'aînée Marie·Hyacinthe-Françoise baptisée par P. a. de
Suasse recteur d'Elliant, née le 3 novembre 1762. La
marra ine est Anne-Hyacinthe Le Pappe grand-mère et le
parrain écuyer, François-Marie de Penfeuntenyo .
Marie-Josèphe-Renée, née le 29 avril 1764 et baptisée par
N. Coquil recteur de Plonivel. Les parrain et marraine sont
deux pauvres gens. L'acte porte les signatures suivantes: Le
Pappe de ~fors de la Marche, Barbe de la Marche, Marie­
Jeanne Le Borgne de ~morvan, Michel prêtre, N. eoquil
recteur de Plonivel. Cet enfant mourut le 12 janvier 1768.
Le 22 octobre 1765 par permission de Messire René des
Cognets, vicaire général et official en date du 16, Marie­
Françoise-Renée-Armande fut baptisée dans la chapelle du
.château de ~minihy. L'acte est signé par esc. François-
Louis-Armand-Marie de la Marche parrain, Julienne-Renée
du Gourio de ~jan marraine, Antoine. Boutouillic de
Prenassy, Decamp, Marie-Josèphe de la Marche de ~dour,
Barbe. de la Marche, Loëdon prêtre, N. g. Loëdon curé de
Rosporden (1). Cet enfant mourut en octobre 1768.
(1) Loëdon devint plus tard recteur de Gourin et ·fut nommé député aux
Etats-Généraux, représentant le clergé .

Le 16 ' févrÏer "1768 par permisslon ' (Je ' MM.' les
gl'ands vicaires du diocèse, Marie-Thérèse-Antoinette fut
baptisée dans la chapelle du château de ~minihy. Les parrain
et marraine sont deux pauvres gens, qui ne savent signer .
L'acte porte les signatures suivantes: ~jean, N. g. Loëdon

prêtre curé, Loëdon prêtre, Michel Quéré prêtre curé d'El-
liant, Messager prêtre CLll'é d'Elliant.
Ce dernier enfant mourut jeune et l'aînée de ces quatre
filles survécut seule.
Remontant de quelques années en arrière nous trouvons
mentionnée, le 10 novembre 1764, l'inhumation de ' dame
Anne-Hyacinthe Le Pappe, dame veuve de Messire Joseph­
François de la Marche chevalier, dame propriétaire de la
tene et seigneurie de ~minihy, décédée le 9 de ce mois
âgée d'environ 78 ans (74 en réalité).
Etaient présents: Mes Rollémd Michel de la Noë, J. J. du
Laurens sr de la Barre advocat, Corentin-Pierre Kriéger,
Delanoé et autres, N. g. Loëdon prêtre curé de Rosporden,
Loëdon prêtre, Ledu prêtre cUl'éd'Elliant, P. a de Suasse
recteur d'Elliant.
Anne Le Pappe avait été dame de ~minihy pend.ant près
de 50 ans, et a laissé trace Je son passage dans une
première restauration de la chapelle du manoir.
Cette chapelle est certainement fort ancienne, bien que les
aveux de la seigneurie n'en fassent pas mention avant 1619.
Au XVIIe et au XVIIle siècles son existence s'est affirmée
par la célébration de baptêmes et de mariages, mais, d'après
l'examen dés parties qui en ont été conservées, elle remonte
à des temps plus éloignés.
La porte ogivale, par le profil de ses moulures, par les
aigrettes et le plumet qui .l'accompagnent, indique le XVi
siècle. Elle est surmontée d'un écusson aux armes de
l};minihy. A l'intérieur de la porte une pierre d'angle est
refouillée pour former bénitier.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. " TOME XXX (Mémoires) 25

La table de l'autel consiste en une seule pierre de granit
ayant 2 26 de longueur sur om22 d'épaisseur, et présentant
sur le côté une moulure très simple, un demi-cercle et une
gorge. Le corps de l'autel est un massif cubique de om55 de
hauteur, formé de cinq blocs de granit: la base moulurée '
a Om28 de hauteur.
Le retable en bois encadrait un tableau qui a disparu. De
chaque côté deux colonnes ioniques accouplées supportent
un fronton triangulaire interrompu au milieu pour faire
à un petit édicule avec niche. J 'ai pu constater, avant
place
qu'il ait été remis en place, qu'il avait été autrefois en­

tièrement peint en blanc. Les moulures et spécialement quel­
ques champs portaient encore des traces de peinture rouge,
bleue et or. On voyait au milieu de la frise, entouré
d'arabesques, un écusson avec les trois molettes de
I}:minihy; Sur le soubassement les trois monogrammes lVl. A,
1. H. S, et 1. O. S., également entourés d'arabesques, rappe- "
laient la Sainte famille à laquelle cette chapelle était dédiée.

Au commencement du XVIIie siècle la chapelle a dû être
l'objet d'une reconstruction partielle comprenant le haut de
clocher et une partie des murs l.atéraux. Une
la façade, le
fenêtre très simple en œil de bœuf et quelques ornements
sont caractéristiques de cette époque, ce que confirme une
inscription sculptée avec caractères en relief sur une pierre
des murs latéraux fi'. ANNO ", i 724. "
La reconstruct,ion du clocher doit remonter à peu près à

la même époque. Elle est datée par la présence d'un cadran
solaire en ardoise accompagné d'un écusson avec les armes,
parti de Le Pappe et de la Marche. Au dessous, on lit l'ins­
cription MORVAN. F. ANNO .....
Deux tableaux dans le style du XVIIIe siècle, qui repré­
sentent en buste saint Pierre et sainte Madeleine, ont été

conserves.
Lors d'une visite des églises et chapelles du diocèse,

prescrite par l'Evêque de Quimper en 1782 (1), la chapelle de
I~minihy est mentionnée dans les termes suivants : « La
Sainte Famille, décemment pourvue )).
Quelques années plus tard l'office divin cessa d'y être
célébl'é. La chapelle fut abandonnée et finit par être trans­
fOl'mée en magasin jusqu'au moment où la nouverture
s'effondra: il fallut alors abattre une partie des murailles
qui menaçaient ruine. ' ' .
Au milieu du XIXe siècle les propriétaires du château, qui
avaient depuis longtemps le .désir de rendre la chapelle à
son ancienne destination, pueent enfin le réaliser. La façade
reconstruite en consen'-ant la porte et en utilisant dans
fut
le clochee et dans les mues tout ce qui subsistait de l'an-
cienne cl~apel1e. L'autel fut remis en place et la messe put
enfin y être célébrée le 21 octobre 1870 (2).
Quelques mois après la mort de madame de la Marche de
furent mises en place dans l'église de
nouvelles cloches
Rosporden.
Voici l'acte rappelant cette cérémonie:
Œ Le douze août 1765 ont été bénites par le soussigné la
grande cloche de l'église de Rosporden et le timbre de la
trève. La grande cloche a été nommée Marie-Louise­
dite
Ant.oinette, par écuyer Antoine du Laurens de la Barre,
sénéchal et premier magistrat de Concarneau et par dame
Marie-Louise de la Marche darne du ~minihy épouse
d'écuyer François de ~jan, chevalier de l'ordre royal et
militaire de Saint-Louis et lieutenant des vaisseaux du Roy.
timbre a été nommé par Me Pierre-Corentin Krieger,
procureur au siège royal de Concarneau, fabrique de Ros-
(1) Le procès-verbal de cette visite m'a été signalé par M. le chanoine
Peyron. '
("2) Le château renfermait alors la nombreuse famille du propriétaire qui
s'y était réfugiée .

porden et par dame Marguerite-Céleste Leguillou, éPOUse
d'écuyer Jean-Jacques du Laurens, sieur de la Barre, advocat
parlement et a été nommée Céleste Perrine. »
S. de la Marche de ~jan, Leguillou de la Barre, Krieg ,
du Laurens, Gougeard, Desnos, de la Barre, N. g. Loëdo
prêtr'e curé de Rosporden, Loëdon prêtre, G. h. Le Guillou
prêtre, P. a. de Suasse recteur d'Elliant.
Cette cloche existe encore. Elle porte d'nn côté le double
écusson des ~jan et des la Marche, de l'autre côté un éCusson
les armes des du Laurens (d'azur au sautoir d'or), avec
avec
l'inscription suivante:
« Nommé par écuyer Antoine du Laurens de la Barre
Sénéchal de Concarneau et par dame Marie de la Marche
dame de ~jan et du ~minihy, Messire N. g. Loëdon curé,
Kriéger fabrique. M. Guillaume fondu en 1765 YI.
Messire
Les années suivantes je ne trouve rien à mentionner que le
décès survenu à ~minie (sic) (1) le 7 février 1778 de dame
Julienne-Renée de Gourio veuve J'Escuier Maudé Christophe
de ~jan. Elle fut immédiatement inhumée dans l'église de
Rosporden.
Mademoi8elle de I}jan se maria jeune avec M. de ~morial,
dont la famille d'ancienne extraction est originaire de
Baye, près Quimpedé, et a pour armes d'azur au greslier
d'argent accompagné de trois fleurs de lys du même.
Mr de ~morial (2), né à Cuzon le 12 juillet 1748, était fils
IMre Léonard de ~morial-~morvan eL de dame Marie­
Jeanne de Boutouillic. A 16 ans il s'engagea comme volon­
tàire dans la marine, devint garde-marine en 1767, lieute-
nant de vaisseau en 1779 et quitta le service en 1785, après
son marIage.

(1) Cette orthographe correspond à la prononciation actuelle.
. (2) Paroisse supprimée par le Concordat et réunie à la paroisse de Ker·
feunteun.

En 1769 il était embarqué sur la gabarre La DOTothée qui
·fit naufrage le 17 décembre à quelques milles de Brest.
L'équipage put se réfugier sur un rocher où il resta sans
abri pendant 52 heures, sans que la tempête permit de lui
portf'r secours. Comme indemnité pour la perte de tous leurs
effets le commandant La Martelière reçut 1200 livres et les
marins 40 livres. :&morial: qui après le débarquement avait
mis trois mois en prison pour uue cause non spécifiée,
été
reçut pour toute indemnité son traitement de 30 livres par
mois pendant ces trois mois.
Plus tard il prit part aux opérations militaires pendant
la guerre de l'Indépendance américaine et reçut à cette
l'ordre de Cincinnatus, fondé par
occasion la décoration de
les officiers de l'armée de Washington (1). En 1785 il quitta
le service, peu après son mariage.
Voici l'acte de ses fiançailles du 10 juin 1783 :
:.. Fiançailles dans la chapelle domestique du château de
:&minihy en cette trève par délégation du recteur d'Elliant
et par permission de l'Evêque, par Messire Charles Guy Le
Borgne de :&morvan prêtre chanoine de l'Eglise cathédrale
de Quimper, avec permission de la Cour adressée à M. le
d'Hector commandant la marine à Brest: de Messire
comte
François-Pierre-Jean de :&morial seigneur de :&morvan et
autres lieux, lieutenant des vaisseaux du Roy, chevalier de

Saint-Louis, fils de feu Jean-Marie Léonard de ~morial
seigneur de I}morvan et de feu Marie-Jeanne Boutouillic,
originaire de la paroisse de Cuzon et domiciliée en la
paroisse de Saint-Louis de Brest et damoiselle Marie­
Hyacinthe-Françoise de :&jan fille de Messire François­
Christophe de :&jan, seigneur de I}minihy et autres lieux,

(1) Cet ordre devait d'abord être héréditaire, mais cette disposition fût
bientôt supprimée comme entaehée de tendances aristocratiques. La déco­
ration représentait d'un côté Cincinnatus abandonnant la charrue, et de
l'autre l'aigle des Etats-Unis. Le dernier membre de l'ordre est mort en 1865.

ancien capitaine de vaisseau et chevalier de Saint-Louis et
de dame Marie-Louise de la Marche dame de ~jan, originail'e
et domiciliée de droit en cette trève et de fait en la paroisse
Saint-Ronan en ville close de Quimper. En présence des
père et mère de la fiancée, de M8ssire Henri-Joseph de
~guern sr du dit lieu et autres, lieutenant des vaisseaux du
germain du nouveau marié, chevalier de l'ordl'e
Roy, cousin
royal et militaire de Saint-Louis, Messire Charles de
. Penfeuntenyo seign8ur de son nom, Messire Michel-Jcan_
Alexandre Laënnec prêtre docteur de la facultë de Théologie
de Paris, de la maison et Société de Sorbonne et recieul'
d'Elliant. Signé J. de ~rmorial, M. h. 1'. de ~jan, ~jan, de
la Marche de ~jan, de la Marche de ~dour, de la March e,

Armande de ~jan, Pépin de Calan, Armande de I~er~nevel ,
Anne de Pcnfeuntenyo, la Lande de Calan, Louis de la Land e,
le chevalier de Penfeuntenyo de ~guern, Le Borgne de
~morvan chanoine, Laënnec prêtre docteut' de la maison et
Société de Sorbonne, recteur d'Elliant. ))
Le même jour, immédiatement après les fiançailles , eut
lieu le mariage dont l'acte contient encore plus de détails

que le précédent. -
M. et Mme de I{morial eurent plusieurs fils.
Joseph-François-Marie, né à Cuzon le 9 mars, ondoyé
par permission le 10 mars et baptisé le 9 juin 178lJ: par per­
dans la chapelle domestique du château de ~minihy.
mission
Le parrain est Messire Joseph-René de ~guern, seigneur dn
Mur et autres lieux, lieutenant des vaÎsseaux du Roy, cheva­
lier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis; la marraine
est dame Marie-Louise de ]a Màrche, dame de ~jan.
L'acte est signé: de la Marche de I)dan, de I~jan, Anne-
Françoise-Marie de Penfeuntenyo, I~gueJen de ~guern , de
~morial, de ~guern, ~jan de ~mol'ial. Dupal'c Locmaria,
Legoff, prêtre, ~gourlay, curé, Laënnec, rect,eur d'Elli ant.
docteur de la maison et société de Sorbonne.. .

Le second fils, François-Marie, né à Cuzon le 26 juillet 1785,
fut, par permission du même jour, baptisé dans la chapelle du
château de ~minihy, le 23 juillet. Le parrain fut Messire
François - Christophe de ~jan, seigneur de ~minihy,
et la marraine damoiselle Anne-Francoise Le Baillif de
~beuzec.
Les signataires de l'acte sont: Anne-Françoise Le Baillif
de ~beuzec, de la Marche de I}jan, Armande de ~jan, Le
Goarant de Tromelin, de ~morial; Tassy Le Goff, ~gour-
lay et Laënnec, comme ci-dessus.
Cet enfant mourut jeune.
Un troisième fils, Amédée, né à Quimper le 3 janviE;lr 1787,
. baptise le même jour à Saint-Mathieu a pour parrnin son
frère qui ne sait pas signer et pour marraine Agathe-Gene-
viève-Françoise du Parc. .
J usqll'à la suppression des registres paroissiaux, je ne
trouve plus à mentionner que l'acte suivant de l'inhumation
de la sœur de Mme de I}jan :
G juillet 1784, dame Marie-Josèphe de la Marehe, veuve
de Messire Gabriel-Louis Gouénou, seigneur de I}dour et
autres lieux, âgée d'environ 57 ans, décédée en son hôt~l à
Quimper, le 8 juillet 178~, a été le jour suivant transporté
en- cette ég'lise. Le corps a été présenté par vénérable et
discret Messire René-J ean Bourbris, recteur de Saint-Ronan,
en la dite ville de Quimper, et à la réquisition de M. et de
Mme de I}jan, seigneurs du ~minihy, a été ouvert l'enfeu de
la dite terre de ~minihy, dans lequel a été inhumé le cadavre
de la défunte. Ont assisté MM. du Laurens de la Barre, Le
Goarant de Tromelin, du Laurens de la Barre et autres;
S. Laënnec, recteur d'Elliant, R. Bourbris, recteur de Saint­
Ronan de Quimper.
tard, M. et Mme de ~jan furent inquiétés,
Deux années plus
ainsi qu'il a été dit précédemment, au sujet du village de

Keranbriquen, dont Mme de ~.ian avait hérité à la mort de sa .
cousine-germaine Elisabeth Le Pappe, dame veuve de Bol.l_
touillic. Voici à quelle occasion:
Le 5 juillet 1751, noble homme Pierre Le Pappe, sieur
de Leslau, et dame Jeanne Lefloch, son épouse, avaient vendu

à Alain Costiou, de ~anbl'Ïquen, le fonds perpétuel de ce
moyennant le paiement d'une somme de 1,000 livres
village,
comptant et, en outre, à chaque tèrme de Saint-Michel, d'une
!5omme de 50 livres égale à la redevance payée pr'écédem­
ment par Costiou.
L'acquéreur fut régulièrement mis en possession le 13 sep­
tembre 10754, après trois publieations faites trois dimanches
consécutifs, à la sortie de la grand'messe : le 15 septembre,
à la chapelle de Saint-Adrien; le 22, à l'église paroissiale

d'Elliant, et le 29, à la chapelle Sainte.Marguerite .
Ce village, jadis tenu à titre de domaine congéable, était
un bien noble dépendant du fief de ~minihy, dont il avait
démembré par suite du partage de cadets, à la mort
été
d.'Antoine-René Le Pappe. La vente du 5 juillet 1751, sans
tenir compte de cette situation, le désigna comme devant
relever roturièrement de Sa Majesté en son domaine de
Concarneau, et le soumit seulement au pro:lt du vendeur au
paiement d'une rente viagère de 50 livres.
Aucune difficulté ne se produisit pendant plus de trente
ans (1), et le 22 juillet 1786, après la mort d'Alain Costiou,
son fils, Alain Costiou, en son nom personnel et pour ses
cohéritiers, fournit pour le lieu de ~anbriquen aveu et dé­
claration au seigneur et dame de ~jean. Les uns et les aut.res
avaient perdu de vue les ternies de l'acte de vente du 5
juillet 1751 et considéraient toujours ~anbriquen comme

(1) D'après l'article 28'2 de la coutume de Bretagne, la prescriplion ne
s'exerçait en cette matière qu'au bout cie quarante ans .

soumis au fief de I);minihy. Mais le domaine royal, ayant à
déterminer les droits à percevoir au sujet de la succession
d'Alain Costiou, reconnut l'erreur et fit sommation à ses
héritiers de payer les droits de franc-fief, fort élevés, qu'ils
se trollvaient devoir comme roturiers propriétaires de biens
nobles. La famill e Cosliou, qui ne s'attendait pas à pareille
réclamation, se r etourna contre les héritiers de son vendeur.
La question fut soumise à plusieurs juristes et, en dernier
lieu, il fut établi qu'il n'était pas au pouvoir de Pierre Le
Pappe de changer la nature du fief de I);anbriguen. Ce
domaine était donc resté bien noble, malgré l'énonciation
contraire de l'acte de vente. Le Pappe avait ainsi commis
une faute dont ses héritiers étaient responsables, et par
suite les Costiou avaient droit à une indemnité, M. de Kjan,
. sans contester ce droit, chercha, à en régler le ch!ffre à
l'amiable, mais il ne put réussir
Alain Costiou, après avoir préalablement révoqué l'aveu
du 22 juillet 1786, assigna donc M. de K.ian, le 25 octobre 1. 788,
devant la cour royale de Concarneau et obtint, le 26 janvIer
1789, ' un jugement favorable à sa demande. M. de I);jan fut

condamné à rembourser à Colliou: 1 la somme de mille
livres, payée en 1751 ; 2° une autre somme de 1. ,028 livres,
pour les droits de transfert réclamés par le domaine royal;
3 une troisième somme de 378 livres pour le rachat à Ja mort
d'Alain Costiou. Enfin, M. de I);jan était condamné ' à
garantir les Costiou contre ce qu'ils auraient à payer pour
les franc-fiefs à venir, à qui il était pour ce motif alloué
une dernière somme de 934 livres (1).

(1) Cette somme était calculée de la manière suivante : on estimait le
nombre de franc-fiefs à payer pendant quarante ans à 3, (1 par décès, 2 par
échéance, chiffre inférieur à la réalité), soit pour vingt ans, 1 1/2. Le
revenu pour Keranbriguen était estimé 495 et en le diminuant cie la rente
de 501., puis, ajoutant la taxe cie 8 sous par liHe, on arrivnit au chiITre de
e23 1., pour un droit de franc· fief soit 934 1. 50 pour la période de 20 ans·

Le chiffre total de l'indemnité, 3,340 livres, augmenté des
intérêts et des frais, s'élevait en définitive à plus de 5,000
livres, somme énorme dans ces temps agités.
A la suite du jugement, il y eut transaction sur le chiffre
frais; l'afféagement de 1751 fut annulé et M. de J>:jan
des
consentit~ le 2 avril, pour ~anbriguen, une baillée de 9 ans
à titre de domaine congéable, transformée le 29 décembre
suivant (1789) en baillée à titre de féage roturier.
Le rôle de la capitation de la noblesse pour l'année 1789,
dernier qui ait été dressé, fournit quelques renseignements
intéressants (1). Je trouve dans la paroisse d'Elliant la men­
tion « M. de I)jan et dom: » figurant pour la somme de
24 livres(36 en 1788). Cette réduction paraît avoir été faite
par mesure gènérale .
. Ce rôle a été dressé pour l'évêché de Cornouaille,qui s'éten­
dait alol's sur partie des départements actuels des Côtes-du­
Nord et du Morbihan, (:1t comprenait Rostrenen, Gourin et le
Faouët. Comme terme de comparaison j'en extrais quelques
chiffres. '
Il v avait 359 cotes mentionnées, dont 264 étaient infé-
rienres à 25 livres; 72 comprises 101 à 180 livres; six
supérieures à ce chiffre, savoir: Cheffontaine, 338 1.; Plœuc,
350 liv.; Tinténiac, 451 liv.; marquis du Gage, 487 liv.; Ro-
sily, 577 liv., et}toquefeuille, 688 livres.
Les villes de Quimper et de Quimpedé figuraient pour
70 et 28 cotes .
Quatre membres de la famille de la Marche étaient inscrits
à Ergué-Gabéric pour 142 liv. 10 s., savoir:

(1) Archives de Kerminihy; semblables rôles existent aux archives du
Finistére pour d'autres années.

M' de la Marche père et dom .................... .
Mr de la Marche ainé, etc .•......................
Le Chevalier de la Marcbe, etc .................. .
Mademoiselle de la Marche, etc .................. .

Deux cotes ~morial figuraient, l'une à Cuzon, près
Quimper, pour 35 1 , et l'autre à Quimperlé pour une livre.
L'ancien régime n'avait plus devant lui que quelques mois
d'existenee, et les Etats-Généraux du royaume étaient réunis
à Versailles; mais la noblesse bretonne, invoquant ses
anciens privilèges et les clauses du traité de réunion, avait
refusé de nommer des députés à l'Assemblée nationale, se
séparant ainsi du Tiers-Etat et de la majorité du clergé .
Il Y eut cependant quelques hésitations. Ainsi, le journal de
Théophile-Marie Laënnec, père du célèbre médecin, publié
par M. Arm. du Chatellier, contient l'anecdote suivante, à la
date du 2 aoùt 1789 :

(( MM. du Ct~âtel et de ~i:norial ont reçu une lettre-circu-
laire de M. le vicomte de Pontual, gentilhomme de Rennes,
membre de la commission intermédiaire, qui les invite à se
réunir à Rennes pour révoquer le serment fameux et députer
à l'Assemblée nationale. M. de I~morial a envoyé sa lettre à
M. de la Marche (son oncle), et M. du Châtel a envoyé la
sienne à M. de Penfeuntenio. J'ignore ce qu'a répondu
celui-ci; c'était le plus fort des ligueul's. M. de la Marche
est le plus vieux; vous allez voir s'il est le plus sage. Voici

sa reponse :
(( Je reçois, dit-il, votre lettre et celle que vous me faites
l'honneur de me communiquer. Si, en répondant à M. de
Pontual, vous pensez devoir lui parler de moi, vous lui
direz que sa façon de penser n'est pas la mienne 'fi.

« Traduction de cette correspondance:

a LES DEUX NOBLES
(air de Joconde)

Gentilhomme sage et loyal,
Au feudiste la Marche
Le plebéyen Kermorial
Disait, mon patriarche,
la nation
Souffrez ,que
nos conseils passe outre,
Sans
Le Roy nous prêche l'union
Je veux mourir J ... f... (1) »
Les opinions de ~morial avaient pu, pour lui et pOur
beaucoup de Fr~nçais ayant combattu dans la guerre de
l'Indépendance, être influencées par leur contact avec les
N'était-il pas lui-même membre de l'OI'dre des
Américains.
~( Cincinnati? »
Deux jours plus tard, dans la nuit mémorable du 4 août
suppression du ré­
1789, l'Assemblée nationale prononça la
gime féodal, avec toutes ses conséquences: La noblesse,
déchue de tous ses privilèges, fut privée de plusieurs sources
raison de leur origine.
de revenus abolis en
La seigneurie de ~minihy avait cessé d'exister. Les der­
niers seigneurs, Marie-Louise de la Marche, dame de ~jan,
et M de ~jan, son mari, n'étaient plus que de simples pro­
priétaires. La terre de ~minihy, déjà divisée lors du partage
au 18 siècle entre Pierre et Anne Le Pappe, voyait ses

(1) Cetle chanson composée par Laënnec fait allusion à la luUe engagée
en [765 entre la Royauté et le Parlement, à la suite d'un arrêt du Conseil
du Roy, jugé atlentoire aux droits de la Bretagne. Tous les conseillers
à l'exception de douze, qui reçurent des démis·
donnèrent leur démission
sionnaires le surnom injurieux de j ... L., dont la malignité publique s'em­
les douze non-démissionnaires .
para pour qualifier d'Ifs pendant longtemps

revenus amoindris par la suppression des chef-rentes et
autres redevances féodales: elle était enfin sérieusement
menacée par les demandes de suppression des droits du pro­
priétaire foncier sur les tenues exploitées au titre de domaine
congéahle (1). ,
M. de ~ian, ancien capitaine de vaisseau, était, qnelques
'années avant 1789, membre de la Loge de la Parfaite Union
de Quimper. Son nom figure sur une liste publiée récem­
ment, à côté de ceux des du Bot de Grégo, marquis du
Grégo, du Haffont, de ~atry, de ~biquet, de ~guelen, de
~namen,etc. Il ne faut pas oublier qu'à cette époque 'la Franc- '
Maçonnerie n'était pas ce qu'elle est devenue au 1g siècle.
Au nombre des affiliés, on voyait figurer des personnes
appartenant à la magistrature, à la noblesse, au clergé, voire
même des princes de sang. .
Fort âgé au moment de 'la Terreur, M. de ~jan qui avait
77 ans, dut à cette circonstance d'échapper à la proscription.
Il fut pourtant arrêté le 15 octobre 1793, mais relâché au
bout de quelques jours (2), le 26 octobre, et ne fut plus
inquiété, Il survécut à sa femme, et ne mourut que le 16
octobre 1812, âgé de 96 ans. Son souvenir est resté longtemps
vivant dans le pays, associé à 'la crainte qu'inspirait l'appa­
rition de son esprit qui, disait-on, revenait la nuit dans la
chambre ,qu'il avait habité au vieux manoir.
Mme de ~jan n'avait conservé des quatre enfants issus de son
mariage, qu'une fille, Mme de ~morial, décédée à Quimper,
(1) Ces droits, successivement restreints par les lois des 6 aoùt 1791,
27 août t 792 et 17 juillet 1793, furent supprimés le 29 floréal an II
(18 avril 1796).
(2) V. appendice à l'histoire du Comité révolutionnaire de Quimper par M.
Trévédy. Le mari de Marguerite Mahieuc, dont il est question à cette
fils de François de
occasion, 'était peut-être parent, mais certainement pas
Kerjan el de Marie-Louise de la Marche.

le 8 avril 1790; et i nhumé~ dans un enfeu dépendant de la terre
de ~daniel, appartenant à son mari. Mme de ~jan SUl'vécut
peu à sa fille,. mais la- date de sa mort n'est pas connue. Elle
laissa pour uniques héritiers ses petits-fils Joseph, François
et AméJée de ~mor·ial~ dont les biens furent administt'6s
par leur . père et gal'de naturel, François-Pierre-Jean de
~morial.
L'un de cès trois dnfants mourut jeune; les deux au tees
servirent leur pays dans les armées de teere et de mer, et
devinrent, l'un lieutenant-colonel, l'autre capitaine de cor­
vette. A la génération suivante, le nom de ~morial ' n'était
plus porté que par un fils du colonel, commis de la maeine
à Lorient, qui est mort sans avoir été mal'ié. Avec lui s'é­
teignit la famille de ~morial, qui n'est plus représentée en
Cornouaille que par sa petite-fille, Mme Billelte de Ville­
roche, de Concarneau. C'est ainsi que, dA toutes les familles
qui ont possédé la seigneurie de ~minihy pendant les cinq
siècles où son histoire est connue, aucune n'a de représentant
de son nom au comm,encement du vingtième siècle. .

Kerminihy, en Rosporden, octobre 190::1.
fil

fil
VILLIERS DU TERRAGE .