Bulletin SAF 1901

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Le vieux Morlaix (maisons et églises)

Abbé Abgrall

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XVI.
LE VIEUX MORLAIX
MOULAIX est une vieille ville qui possède encore quelques
vieilles rues, dont les vieilles maisons ont de vieilles façades
ol'l1ées de vieilles scu l ptures. TùcllOns de les élud ier penda nl
CJu'il en est temps eIlCOI'e, ca l' les l'econsll'uctions et les
restaur'ations maI'chent lJOn ll'ain et aUI'ollt biE:ntôt tout
envahi, l'asanl tout ce qui est pittoresque, lout. ce qui esl
pOUl' nous un sou\'enil' du passé. Déjà depuis longtemps ont
disparu les cUI'ieuses constl'uctions qu'on appelait le Paré
et les Lances ; dans la Grande-l'Ile, je vois s'élever des mai­
sons nouvelles; qui peut dire ce qui l'estera dans cinquante
HilS de cesJaçadcs du XV· et du X Vie siècle, qui font main­
tenant lajoie des tourisles et SOllt ulle vraie alln1clion pour
notre ville restée si bretonne?
Le mieux est de commence r par la UI'ande-I'lIc, qui est la
plus l'iche et la plus intéressante; mais, avant d'y entre l',
remarquons le bonhomme Morlaix et le sonneu/' de binioll,
faisant car'iatides aux deux angles de la rue Notl'c-Dame; et
semblant supportel' tout le poids de l'édifice qui les surmonte .
Dans la GI'iHlcle-I'ue, arrivés aux numéros 5 et 8, nous
trouVOIlf> qne série presqlle ininterrompue de vieilles façades,
Les nOS 8 et 10 nous olTl'elit le I,\'pe à peu près unilol'me cie
tous les reJ':-cle-chaussée : ulle baie lal'ge et basse S'OUVl'[lI1t
SUI' une boutique ou magasill, une pOl'te plus étl'oite donnant
accès dans une entrée ou couloil', ces deux ouver lUl'es limitées
et sépa rées pal' cles piles moulul'ées en pierres de taille, la
clel'nière assise fOl'mant encorbellement· pOUl' supportel' une
fOl'te sab lièl'e ou poutre massive ornée de moulures, et qui
soutient les about.,,: des solives du pl'emiel' étage. Les bouls de
solives font saillie SUI' la l'ue de l,O ou 50 centimètl'es, et il en

est ainsi à chaque étage, de sorte que le tl'oisième at'rive à
avoil' une avancée de i m. 50, et que les deux pignons (lui se
regardent des deux côtés de la rue se sont sensiblement
rappl'ochés l'un de l'autre,
Le nO 10 li deux statues nichées contl'e les polelels d'angle
des ",xtl'émités: SAI~T AI\ToINE, et'mile, ct SAI;\T JEA~-
BAPTISTE. Saint Antoine cst vêlu d'une ,'obe avec camail. à
capuchon, il tient un livl'e et un b.,\ton à Cl'osse, S::lns T ou
potence, et il a à ses pieds le cochon tl'aditionnel. Saint Jean­
Baptiste est couvert d'ull ample manteau sous lequel on
distingue ulle peau de "btHe dont la tête pend entl'e ses pieds,
comme cela existe Itabitllellement dans les représentations
du Pl'écul'seur. AII -dcssus de ces deux saints SOllt dellx jolis
dais gothiqucs flamboynnts, ct les clds-de· lampes qui sont
sous lems pied!> sont portés pal' deux gl'êles colunneLtes
ornées' de 1.0I'sadp.s, d'écailles et d'enr'oulemenLs perlés.
Au nO Ill, maison Pouliquen, le pl'emicl' ct le deuxième
étages sont composés de pans de bois formés de mOlltants,
travet'ses, cl'oix de Saint-André, colonnettes à bases moulu­
rées, chapiteaux et bagues; les deux encol'bellemellts des
poteaux cOl'lIiel's olrl'anl un l'enflement ou cl'osselle terminée
en riche bouton ou !lel\l' épanouie, Cet OI'nemenL se l'enconl.t'e
cncore Sl\l' d'aull'es façades.
Dans'cette maison Pouliquen sc Ll'ouve un escaliel' mOIlIl­
mental qu'il faut étudiel' en délail. Pénétrons pnt' la porte
en chêne qui a consel'l'ée encore su colollnette sculptée, ses
vieilles ferl'ul'es et ses panneaux à godrons; nous sommes
dans un couloir séparé du magasin pal' une cloison de bois
;\ panneaux d'étoffes plissées ou godl'onnées, et plus loin
. dans un vestibule assez vasle, divisé maintenant en deux
pièces, mais rOl'mant nutl'erois une seule pièce montant de
fond depuis le sol jusqu'aux combles et éclnil'ée pal' un
lanternoll.
Une lal'ge cheminéc, sUl'monlée d'une hoUe porlée SUI' dès

colonnettes l'ond(s à chapiteaux feuillagés, était destinée à
chauffer ce vestibule et l'escalier qui monle dans un des
angles, du côlé de l'entrée.
Cet escalieI' dessert des chambl'es de deux côtés diffùrents:
d'une part au moyen de paliers correspondant à IG partie
tOUl'nante, de l'autre par des rampes accédant à des galeries
droites longeant le mur et bordées par une halustrade en
clôture pleine, formée de panneaux à boisel'ies plissées.
Quelques-uns des montants qui séparent ces panneaux sont
accostés de colonnettes et pinacles d'une extl'ètne finesse
et d'une l'ichesse éll'ange de sculpture: petites rosaces,
chevl'ons perlés, losanges, torsades, écailles, feuilles imhri­
quées. La mêm8 richesse et la même val'iété sc rell'ouvent
dans la boiserie du l'ez-de-chaussée dont les panneaux sont
ajoul'és d'admiI'ables découpures et fenestrations flam­
boyantes .
Une colonne ol'née, prise dans un magnifique tronc de
chêne, monte depuis le bas jusqu'en haut, formant, non pas
noyau, mais pllltôt poteall dt; jonction entre les volées tour­
nantes et les volées rampantes.
SUI' les quatre hauteurs qui fOI'ment fùt octogonal dans les
porlées dégagées, la décol'alion couranle consiste en écailles;
ail bas de chaque portée, une base feuillagée; aux trois
qual·ts de la hauteur, un dais flamboyant très riche, a quatre
faces; au sommet, un chapiteau sel'vant de support à trois
statues qui correspondent aux trois jonctions des l'ampes.
Ces statues sont celles de SAI:\'TE BARIlE portant sa palme
et sa tour; SAIXTE CATHERINE, couronne en tête, tenant son
épée et sa l'Olle fracturée.; la SAI.HE-VIERGE, portanll'Enfant­
Jésus. Tout à fait au haut de la colonne, dans une niche ù .
dossier et à dais, SAINT' PIEIIIlE-DE-VÉRONE, Pl'obablement
le patron du propriétaire du logis. .
Aux tl'ois étages, SUI' le haut de la rampe, à la jonction
de la pal,tie oblique el de la partie horizontale, sont tI'ois

nichetles abritant les statuettes de SAI"''' Pli"'''!>, SAI"''' PAUL .
et la SAI1\TE-VlIlIIGE, Au fond du petit l'éduit fel'mé au l'CZ­
de-chaussée pal' la hoiserie ajourée est une jolie niche il
accolade pI'atiquée dans le mur, avec bassin cl'eusé dans la
et formant cuvelle ou lavabo garni d'ùne tête à gar­
piel'I'e
gouille pour déversel' lcs eaux.
nO 9, est une façade encore plus
L'autl'e côté de la rue, au
riche: mêmes pans de bois, mêmes colonneltess et en outre,
six statuettes dans des niches: au premier étage, TA "'1\ON­
CIATlO"', la SAI~TE- VIEllf;!> ngellouillée SUI' un prie-Dieu,
rANGE GAIIIIIEL lui allnonçant le mystère divin; HU second,
SAI1\T JACQUIlS avec SOli bOlIl'don ct ses coquilles, SAI1\T
LAUIIENT et SOIl gril, SAI1\T NICOLAS et ses trois cnfants dalls
SAINTI! BAIIIIE podant sa tour.
le saloil',
Au IIUIIH!rO 15. - SAINT JIlAN montl'ant l'agllea.u qu'il
e~tollré d'un de ses bl'as ; et au deuxième étage UII
ticnt
peI'sonnage en cotte, fOl"mant cal'iatide ; sous les Nlcol'bel·
lemenls, boutons il neurs épanouies.
Numéro 17. Même ol'llemenlation de boutons fleul·is.
N umél'o 19. P l'em iet' élage,sA 1 ~T Cil Il 151'01'11 Il pOl'ta n L r E n-
l'ani-Jésus SUI' ses épaules; personnage assis,cal'ialide. Dell-
xième étage, SAI:-iTE CATIIEIlINE el SAI"'T GIWII(;ES. Au Il'oi-
sième,un SAI~T EVI~QUE IJénissanl et SAI1\T FnANçols O'ASSISE.
Numél'O 26. SAI1\TIl-VIIlIlGE donnant le sein il l'Enfnnt-
Jésus; SA 1 NT Ev ËQu E hén issa nL.
Numél'o 32. SAINT J EAi'i-BAPTISTE, NOTIIIl-SEIGl"EUII
ressllscité pOI'Lant la cl'oix de résul'l'eclion, ou bien l'apôtl'e
SAINT PIIILlPPE lenant lIllli\'I'e et lIne cl'oix triomphale. Au
deuxième étage esl ulle l'el)J'ésentaLion qui peul pal'nitre
à quelques-uns, c'est l'bDIACULÉE,C01\CEI'TION: ln
étl'ange
petite sainte Viel'ge elltourée d'une gloil'e dans le sein de sa
mél'e sainte Anne . Même figuration se trouve dam; un vitl'nil
il Bl'cnnilis, a\'ec celle inscription: Sainclc COnCcIJ1ion.
A l'autre angle, SAI~TE MAIl(;UEl111E foulant le dragon.

Aux numéros 30, 25 et 27, ol'nementalon de boulons épa-
nouls.
A l'angle du numéro 27 el de la place des Halles, IIO~HOml R
lirant la langue et formant cariatide.
;:\ de la place des Halles, est lin 1I0~­
Plus loin, au numéro
tlO~1 ~I E ass is, son na Il t d Il co/'n-boll(l; bo u to ns fe u i lia g~s, bea li x
encorbellements, pans de Lois et pignon aigus.

De là, monlons dans la l'llC dll n[w', ancienllement /'tIC des
Nobles, ct nous trouverons, au lIuméro 33, la maison dite de
la Beine-Anne, se détachant en saillie SUI' les aul.!'es aligne­
et dominant le marché couvert. La façade faisant
menls
SUI' rue a élé l'estaurée vers 1890 pal' les soins de la
pignon
Commission des Monuments historiques. Elle se compose,
au l'e7:-de-chaussée,de tl'ois lal'ges baies formant IIne porte
centrale et deux fénêtres : sous ces dernières. des ouve1'lnres
gdllées ou sonpil'aux éclail'ent les caves. Les piliers qui ell-
cadl'ent la pOI'te et les fenètl'es 'sont couvel'ts de colonnellcs
et de moulul'es pI'ismatiqucs qui forment des pénétrations
ct des intel'sections cUI'ieuses. Au-dessus de ce soubassement
en granit s'élèvent tl'ois étnges il pans de bois faisant encor­
bellement les uns sur les les poteallx corniers , montants, lI'avel'ses et croix de saint
Andl'é, avec remplissage ell torchis et fenestrage répandant
un jouI' abondant dans l'intél'ieur.
Au premier étage les niches d'angles abritent les statues
de SAI1iT JACQUES et de SAIH YVES, celui-ci représenté assis
dans un fauteuil, vêtu de la robe, surcot ou ~lIrplis, camail
à capuchon, bonnet carré. Les mains sont vel'moulues, mais
on peut deviner qu'elles tenaient un pal'chemin déployé.
A la hautelll' de l'imposte ues fenêtres, sous les abouts des
poutres de l'encorbellement, se tl'ouvent à moitié accl'oupis
sur des chapiteaux feuillagés: 1° 1tn saw;·age, nu el bal'bu,

s'appuyant sur une grosse bl'anche ; 2° 1tn {Oll- coiffé d'un
bonnet d' l'obe serrée pal' unc ceintul'e,
Au deuxième élage, SAD/TE BAli nE ct SA li'i'!'l! CA'!'IŒI1I i'i Il,
avec ll'ois auh'es cariatides cOI'/'cspondant à celles cie l'étage
inré/'ieur
A l'intéricuI' il y a à étudie!' le vcslibule ou hall. ct
l'escalie!', comme dans la maison Pouliquen,
Le vestibule ou COUI' couvel'te s'appelait autrefois salle tics
gardes ct pI'cnait toule la profondcu,' de lu maison Celle
pièce, montant jusqu'aux combles, ct éclairée pal' des joul's
pel'cés dans la toitul'e, possède égalemelll une grallde
cheminée à holte ornée de deux bandeaux l'ichement
fellillagés,
Da Il sun des angles mOllle l'escu 1 ier dessel'va ntl es deux côtés
de la maison pal' des l'ampes tOlll'nanto::s en sens cOIIll'ail'e
el pal' des galeries hOl'izonlales ou ponts-d 'allée,
La colonne qui pOl'le les angles I.l'inlen:ectioll eSI., comme
claus la maison Pouliquen, composée d'ull seul tl'OIlC
d'nrIJI'l', et a la même disposition génél'ale: bases moullll'l:ies
el. feuillagées, fûts ornés de losanges en cl'eux il côtés
al'l'ondis, inscl'ivalll une l'osace canée ; dais flamboyants;
tl'ès découpés ct évidés; chapiteaux sUl'monlés d'anges ct
d'un homme velll lenallt un blason ; niches abl'itant les
stalues de SAIX'!' NICOLAS ; SAIXT CIiIIISTOPIIIl. et I.out
en haut, en coul'onnemenl, se trouve SAIIoIT M lellll!. terras­
sant le dl'agoll.
U ne colonne secondai re soutient la portée des ponts-d'a liée j
son l'ùt est ol'llé de losanges ,1I'1'Ollclis el. l'osaCes, de tors'ldes
pel'Iées, feuilles imbl'iquées, pel'sonnages velus cl petits
alllours tenanl. des blasons,
L'aull'e extl'émité, au deuxième étage, est soutenue pHI'
un bonhomme qui fait lIne gymllilstique pl'odigieuse : il a
ln lèle en bas, les mains appuyées SUI' un lonneleL dont il

vient de sucer la bonde; il 11 les pieds en l'air et les jambes
c.roisées. avec esca"pins, hauts·de-chausse à crevés
et bouffantes, ,
Plus haut est un autre personnage coiffé d'un bonnet
pointu, et buyalll ù la bonde d'un tonnelet. A mêmehauteul':
contre la pa,'oi, un sauvage nu, bal'bu et chevelu ouvl'ant
de fOI'ce la gueule d'un lion, - Au haut des deux angles,
du côté de la ch eminée, sont deux aull'es petits pel'sonnages
faisant cal'iat,ides,
SOI'tant de la maison de la Heine-Anne, il faut aller
jusqu'au numéro 41 pour admirer deux belles lucarnes du
XVIIe sièc:e, surmontées de volutes el de petites niches
à fl'Onlons arrondis, Plus loin, jusque dans les environs de
l'église Saint-Mathieu, nous tl'ouvel'ons bien de nombl'euses
maisons ayant pignon SUI' une l'ue et encorbellements aux
étages, mais en somme rien de bien cal'actél'istique, Tous
les détails riches et intéressants semblent s'être concenlt'és
dans la Grande-me et dans la 1'ue Saint-lJIela'ine, où nous
allons continuer notre excursion,

Rue Saint -Mel aine .
Dès rentrée de celle ruc, aux numél'os 5, Û, 7, 9, 10, 11,
nous ll'ouvons des maisons pittol'esques, analogues à celles
que nous avons déjà étudiées,
A l'angle du nO 10, faisant retour sur la venelle au Son,
on voit deux statues: une VIIWGE-MliIlE et un ANGE tenant
une banderolle.
En l'emontant on remarque une dizaine de vieilles façades,
et plus haut encore, tout pl'ès de l'église, au coin de la
rampe et du cÔté opposé, tout un joli groupe de maisolls

à encorbellements, dont une, le na lli, a qualre staluelles
d'angles: SAIlliT JEA:\'-BAl'l'ISTE, SAI;"'iTE BAIIIIE, un SAI;"'iT
EVÈQUE bénissant, et SA II\T FIIASI,:OIS D'AsSISE rÎ1ontl'anl ses
stigmates ,
Descendolls mainlenant ,'el's l'escalier de Sainl,Melaille,
ellljH'ès avoil' salué en passanl la vénél'able église el SOli
pOl'che daté de 11189, nOlis ll'ouvons une maison fi pavillons
cl loul'elle ronde d'escaliel', pOl'le monumenlale ù cololllles
cannelées et fronton ll'iangulaire, lucal'lles de grand sLy le
dont le peintl'e Jules Noël a ti,'é grand parti dans son
tableau du 'Vie'lIx Alorlai; c, mainlenant au musée de Quimpe,',
Si l'on veut avoir une idée de ce qu'étaienl aulrefois, les
Lances, longs portiques eouvel'ls sUl'monLés de maisons, il
faul alle l' jusqu'au lIuméro 7 du quai de Tl'églliel', t.oul conLre
le pelit hôLel de la Caisse (.l'épal'gne, On y L,'ouvera l'uniqll e
ct del'Ilier lype vivalll de ces anciennes consl1'ucLions : ulle
muison faisalll avancée de 5 mèll'e" SUI' la rue, podée SUI'
deux cololllles de piclTe el un fOl'l poLeau de bois, etla issanl
UII large ll'olloil'libl'e pOUl' la cll'culaLion. AUll'el'ois, 100'squc
celte sorle de cloitl'e se pl'olollgeail SUI' une 10ngueuI' de
150 ou 200 mèll'es, on Ll'ouvaitlù un passage al)J'iLé, excellent
pOUl' le vu-el-vienl des a/Tail'es et pour les ll'ansacliolls
commerciales,
Plus loin elleo re, au nO 28, Ull vénérable hôtel du XVllo
siècle, ft la mille auslèl'e, nous montl'e ses pO l'les el ses
soupiraux de magasin, au l'cz-de-chaussée, sa porte cent l'alc
à pilasll'es el fl'onlon, son pavillon servallt de cage d'escalier',
IUl,;al'nes cos:;ues sUl'monlées d'un fl'ontoll à
el ses deux
lIiche accosté de deux lal'gcs volutes,
El c'est tout. Au-delà, plus l'ien du vieux Mol'laix, l'i'Hl
que des façades ennuyeusement alignées et désespél'ément
banales, HelouI'II0llS Jonc nos l'egal'd,, du côté que nous
venons de pal'coul'il' et adl'essons un dernier salut él ces vieux
témoins de la vic sociale el familiale de nos pèl'es.

LeH l~gIiHel!l.
SAINT-MELAINE.
DLI cùlé Est ùe la gr'anùe place, entl'e nIôtel de Ville et
le viaduc, au haut d'une rampe de tl'ente-neuf mar'ches se
lll'esse le porlail occideillal de l'église SAINT-~IBLAHiE.
C'était au lr'efois LIll pl'iemé de Saint-?\lelaine de Rennes,
fondé vers 1150 pal' Guyomal'c'Jr de Léon . L'église actuelle
datc de 1489. Dans le pignon ouest S'OLlVI'e une lar'gc por'le il
colonnettes et moulul'CS, encadr'ée de pinacles el d'une
coull'ecourbe feuillagée. Plus haut, une fenètr'e flamhoyante
à tl'ois baies. Sur la dl'oitc, au bas du collatér'al midi, s'élève
le clocher'. ayant ù l'un ùe ses angles la toul'elle ronde dc
l'escaliel', divisée dans sa hauteul' pal' huit bandeaux
lar'mier's et cOUl'onnée en pyr'amide octogonale. Au hauL de
la tour, un robuste enco l'bellernel.t de tl'ois assises feuillagées
porle une balustrade flamboyante au-dessus de laquelle règne
IIne flèche en charpellte revêtue de zinc peint en gr'anit, eL
qui a la pr'étenlion de simule!' une flèche en piel'r'e.
Sur' le côté sud de l'église s'avance un porche ounant par
une large al'cade au-dessus de laquelle deux anges tiennent
un cartouche por'lanl celle inscription en lellres gothiques:
L'an. mil. quatre. centz. qltall'l~. vingt:. 1/(!lln; l'III. comancJc
ceste. église. de. pa)'. Dicl/.
Au fond de ce por'c1re, deux jolies por'tes terminées en
accolade donnent accès dans l'église Dans le trumeau qui
les sépu l'e est incrusté lin bénitiel' sUI'monlé d'a r'catul'es
ajoul'ées, au-dessus desquelles une niche abr'ite unc stalue
d'une V IEIIGE-l\lrillE aux draperies gothiques: Notrc-Dame
de Bon Secours.
Au haut dcs deux portes en bois on a cOllser'vé les
impostes portant ccUe inscription en le:ll'es gothiques
compliquées et agrémentées d'al'abesques tl'ès fines;

"" ,a - fait ces deux - Imis - ys sei-
ho nes -gens p?'i es JJieu POU?' lui,
Il est bien dommage que le pl'emier mot ait disparu; il
devait doriner le nom du vieux hucher ou menuisier qui avait
confectionné et sculpté ces portes,
Le lambris en berceau, recoupé de nel'vur-es, est,porté SUI'
une sablièl'e ou corniche ornée de culots feuillagés, de
monstres et de personnages grotesques; les clefs pendantes
de la faîtière sont sculptées de feuillages et de sujets bizarres,
Avant de pénétrer à l'intél'ieur, il est bon de donnel' un
coup d'œil à une dalle encastrée dans le mur de soutènement
de l'escalier, en face du porche: et qui se trouvait autrefois
à l'entrée du cimf,ltiére, entourant l'église; elle pOI'te cette
inscription:
[Jones gents qui pa.,' icy passe~
P?'iez liien pott}' les trépassez,

INTEnlEUlI,
La nel est séparée des collatél'aux par des piliers cylin­
driques sans chapiteaux, portant des arcades qui forment
sept tl'avées de chaque côté. Les collatéraux sont irréguliers
et dessinent cinq chapelles du côté nord et troi's du côté midi.
La charpente de la nef est fort.ifiée pal' des tirants ell bois
dont les extl'émités SOllt saisies par des guenla1'ds ou gueules
monsl1'lleuses. Les sablières sO'?t UII peu sculptées, celles des
bas·côtés le sont plus richement .
Au bas de la nef est une belle tribune des orgues,
composée de riches panneaux flambloyants et de cordons
feuillagés, dans le genre de la tl'ibune et des 'stalles de Saint­
Pol·de-Léon. Le butTet du positif, faisant console, et celui
du grand orgue, sont du XVllc siècle, dans le style de ceux
de Guimiliau et de Lampaul.
BULLETIN ARCHÉOL, DU FINISTÈRE . - TOME XXVIII (Mémoires), 18

.... l'intérieur de la tribune, au-dessùs d'une at'cade, est
une inscription qu'il serait intél'essant de déchilTrel', mais à
laquelle il est difficile d'accédet'.
Dans la première chapelle, au bas du collatéral nOI'd,
au-dessus de la cuve des fonts baptismaux, est un joli
baldaquiB octogonal en chêne sculpté, pOt'té SU I' quatre
colonne- cori n tltien nes couvertes d'enroulements de feu illages
et pal' quatre culots intel'médiail'es. Les chapiteaux sont
\'eliés pal' des arcades dans lesquelles des g'l'ifTons ou
. des si l'ènes ailées pOl'lent Ull cat'touche occupé pal' IIlle t.?lte
de chérubin. Plus haut court une fl'ise avec t.ètes, feuillages
'et cartouches aux angles, Au-dessus de cet. entablement
s'élèvent huit colonneLLes à chapiteaux ioniques, formant
huit al'cades abritant des statues. Par-dessus est UB dôme
couro'Bllé d'un lanternoll, Cc joli ouvrage de sculptul'cs qu'on
set'ait tenté de dater de la fin du XVIe siècle, esl en réalité
de 1660, d'après Pol de Comcy.
Tout a côté est un tableau t'ep t'ésentant SA I~ 'I' A1\TOI1\E OE
PAOOUE et un aut t'e sainlfranciscain donnanl r1tabitdutiers­
QI'dre à une dame du monde_
Dans une sOt'le de g rOLLe ou niche, un groupe figurant la
DESCENTE nE CHOIX : la Sainle- Vierge: portant SUt' ses
genoux le corps inanimé de SOli fils, est accompagnée ùe
la Madeleine et Joseph d'Arimathie.
A côté, une autre statue de la Madeleine.
Autel et tableau du HOSAIHE. Statue de SAI1\T YVES vêtu
de la robe: surplis ou su t'col, cama il à cupuchon, barrette
large,il tienl UII pat'chemill clél'Oulé el son bréviail'e suspenclu.
Autel à t'étable el tableau de SA I1\T VtNCE~T-J)E-PAUL.
Au haut, statue du même saint .
. En face un tableau donnant une scène de mal't.yr décapité.
Un des asssistants tient celle légende: lllerilO omwlul'
COU(I'O, me omnis c'/'cal'UI'a : c'est fi bon dl'Oit que toute
créature s'al'tne contre moi.

Autel de SAINTE ANNE, surmonté de la statue de cette
sainte avec SAI"TE MARGUERITE et de SAINT AVERTI~. Celui­
ci est invoqué pour les maux de tête et d'oreilles, et l'on
voit qu'il est lui-même en proie ù de terl'ibles douleurs, car
il tient sa tête à deux mains,
Tableau de Valentin, l'eprésentant l'EHANT-JÉSUS posant
les pied~ SUI' le globe du monde et éCl'asant la mort ou le
démon. Il est entouré de têtes de chérubins et d'anges dont
plusieul's pOl'tent des instl'Umenls de la Passion. Au-dessus
est un paysage, et des deux côtés, saint Charles Borromée et
\HI roi de Fl'ance âgé et bal'hu, saint Louis ou Charlemagne?
Autre tableau: SAI"'l'E-TRI"'ll'H adorée pal' les dilTérentes
catégol'ies des sainls de la terre.
Au' maître-autel, SAINT MELAINE ct SAINT PI/WRE.
A rentrée du chœur, NOl'IlE-DAME-DES-ANGES el SAINT
JOSEPH .
A l'autel des Trépassés, beau lableau du PUIIC,ATOIRE par
Valentin. Slatues de SAI:-:T J EAN-Oll-LA-CIIOIX, SAI "'TE ROSE-
OE-LDIA, SAINT MATIIIIlU et SAINT JEAN L'EvANC,I~L1Sl'E,
Tableau de la SAINTE-FAMILLE.
A utel de L' E"'F.\"'T-J RSUS. Tableau de l'Enrant-Jésus. seul
SUI' le globe du monde.
Tableau de l'ADORATION DES BEIIGEIIS.
Autel et statue de NOTRE-DAMIHH;S-NRIGES.
Dans la maîtresse-vitre, qui a été retouchée, on ll'ouve
plusieurs fragment.s anciens Elle se compose des scènes
suivantes:
1. Promesse d'un l'édempleur fi 1I0S pl'emiel's parenls.
2. Sacl'illce d'Abraham.
:3. Passage de la Mel' rouge.
lt. La Cène.
5. Crucillement. .
6. ' Résurrection.
7. Sainte-TI'inité.

ÉGLISE DES JACOBJNS .

Le couvent des Dominicains ou Jacobins, h'ansformé
maintenant en caserne, fut étahli en 1233-1237. L'église doit
l'emonter l 'Il grande partie nu XIIIe siècle , Elle est actuel­
lement divisée en deux étages par un plancher établi il la '
hauteur des chapiteaux. Le rez-de-chaussee est devenu un
magasin ou dépôt du matél'iel de la ville; le haut a l'eçn une
destina tion pins noble et sert de musée et de bibl iothèque_
J)ans la nef, flccompagnée d'nn unique collatéral nOI'd, il
est bien dillicile, à tl'avers J'entassement des objet" hétél'o­
gènes qui y SOllt amoncelés, d'étudier l'enfilade des colonnes,
les sculplul'es des chapiteaux, ct surtout les enfeux avec.leul's
tombes historiques, lelll's inscl'iptiolls et leurs armoil'ies.
A J'extéricul', en remontant la rue des Vignes, on peut
voir l'architecture du collatéral dont la plupal't des fenêtrc;:;
du XIIIe siècle,ont été dénalul'ées pal'l'enlèvement de lelll's
meneaux.,l!ne petite avancée, formant comme un transept,
a été ajoulée au X Ve siècle. Le pignon c!'t percé de deux
(enêtl'es jumelles, slll'montées de l'écusson de Bl'etagne
entouré de la corde lièl'e.
L'abside dl'Oite, avec sa belle et grande l'ose, est aussi une
adjonction faite au XVe siècle,
. En entrant au musée on pent mieux se rendre compte du
développement de cette rose, comme aussi du dessin et des
moulul'es des al'cades qui SUl'montent les colonnes. On y
velTa également quelques bas-reliefs en albàtre, el tl'Ois
ou quatre statues religieuses ùe la période ogivale et
d 'excellent style.
NOTnE-DAi\1E-DES-FONTAIN ES.
Au haut de la rue des Fontaines, tout conll'e l'entt'ée du
couvent des Carmélites, se tl'ouvent deux fontaines mOllu-

l'mentales surmontées d'un mur orné de la fenestration la plus
.originale et la plus élégante qui se puisse imaginel' : d'abOl'd
une large arcade surbaissée, l'emplie pal' neuf haies de
hautelll's inégales, ayant un cordon do quatrefeuilles à leur
base et tel'minées à leur sommet par des trèfles subtr ilobés,
Plus haut est une jolie l'ose dont les compartiments ~ont
habilement agencés entl'o les branches et les pointes d'une
étoile à six rais. Tout cela éclairait autl'efois la chapelle de
NOTI1E-DAME DE LA FONTAINE, fondée en 11.24 et_ consacrée
en 1!.35, qui devint plus tard un bras de ll'ansept de la
chapelle tles Carmélites, IOI'squ'elles vinrent y fondel' leur
monaslèl'e, en 1G24.
La statue de NotI'e-Dame se trouve maintenant placée
dans la haie du milieu de la gl'ande fenêtre. Une petite porte
lalul'tlle est surmontée d'un écusson aux al'mes ùe Guicaznou.

SAINT-MATHIEU.
Nous no poul'l'ons ici étudier avec intérêt que la base du
clocher, commencée en 1548, d'apl'ès la helle inscription qui
court snr un.e large handerolle à deux ou trois mètres de
hauteu!' de terre:
LAN MIL CINQ GENTZ QVARANTE HOVICT LE OIXlESME
JOVR DE JVILLET l~VT COmrËNCÉ CESTE TOVR EN LHONEVR
DE DrEV DE NOSTRE DAME ET DE MONSEGNEVR SAINCT MAHÉ
Le pl'emier al'chilecte de cc clocher fut Yves Croa7.ec,
mentionné dans les comptes de la fabrique de Saint-Mathieu,
al'chives du Finistère, Les parties basses qu il conlruisit ont
du caractère et de l'amplelll', malheureusement il mourut
avant d'ayoir conduit son œUVl'e bien haut et ses continuateul's
furent loin d'avoir son talent.
Presque à la suite de la première inscription déjà citée,
s'en trouve une deuxième ainsi conçue:

. Mo/'s tua., mors Ch1'isti, {mus m1/"l~di, gloria celi,
Dolo'I' inferni sint memoranda ti/ri,
Votre mort, la mort uu Christ, la tl'omperie du monde, la
gloire du ciel. les peines de l'ellfel', voilà ce que vous devez
méditer.
Une troisième inscription se trouve dans le soubassement
du l'ôté nord de la tour, tout pl'ès de la porte principale Je
l'église:
P'/'op·/'ia.qltÏ se/'vit juste petit œqua labo/'i,
Et simul e prop'/'iis m'ltlUat et 1'epet:it.
Celui qui manœUVl'e son l)l'opl'e fonds en exige avec justice
un l'endemenL pl'oportionné à son travail, et à la fois il prète
et reçoit ce qui lui appal,tient en propre.
L'église paroissiale de Saint·Mathieu était au XIIe siècle
prieuré dépendant de l'abbaye de Saint-Mathie:.l-de-Fin­
de-Tel're, près du Conquet. Hebâtie pal' les fidèles vers 1480
et consacrée en 1491 pal' Jean Cùlloet, évêque de Tréguicl',
elle fut, sous raison ou prétexte de menace de l'uine, démolie
et, remplacée pal' J'église actuelle, qui n'offre pas
d'intérêt artistique.
Nous y lI'ouverons cependant quelques vieilles statues qui
sont en vénération: d'ahoru un beau et gl'and Christ en croix
entre la Sainte-Vierge et saint Jean, puis les statues de
saint Mathieu, saint Tuguual, Notre-Dame de Délivrance.
sainte Anne, saint Joachim , sainte Mal'guerite, saint Crépin.
Près de la porte du bas-côté Sud est un bas-relief en albâtre,
repl'ésentant la Sainte-TI'inité.
Dans le sanctuaire, devant l'autel, sont deux grands
chandeliers en bois doré, du XVIIe siècle, sculptés ll'ès
richement.

NOTHE-DAME-DU-MUH
011 dOlllle maintenant ce 11001 à une chapelle bien simple,
Mtie del'rièl'e le chevet de l'église de Saint-Mathieu, et dans
laquelle 011 vénère une statue ancienne qui est comme le
palladillm de la ville de Morlaix, et qui élait aull'eroi:;
consel'vée clans la vieille église de NOll'e-Damc-clu-Mul',
fondée le jour de l'Assomption, 1295, pal' le duc Jean If, et
ainsi appelée pal'ce qu'elle était coustl'uile contre le mUI' de
la ville, 0
Cétait un édifice d'une magnifique architectul'e, el son
clochel' sUI'lout, ll'ès élevé et très élégant, duminant toute
ln ville, élait le ph:s bel ornement Ode la cité_ Pendanl la
l'église, après avoir sel'vi de temple de la 'raison,
Hévolution,
fut vendue ct démolie, La lour seule fut conservée: mais
privée cie l'appui des murailles qui l'entouraient et minée
dans ses fondements, elle s'écroula le 28 mal'S 1806.
De la vieille collégiale il ne reste plus que quelques pans
de maçonnel'ie, quelques enfeux et appuis de fenêtres
englobés dans une maison particulière, au fond de la rue du
Mun, !\fais nous pouvons nous l'éjouir de posséder enCOI'e la
image de NOll'e-Dame,
vieille
C'est une statue en bois l'eprésentant la Vierge assise ct
portantl'Enfanl-Jésus SUl' son bl'as gauche. Les figures de
la Mèl'e et de l'Enfant sont gl'aciellses, les plis des vêtements
sont harmonieusement agencés. Chose cUI'iel1se et dont on ne
lI'ouve que quelques rares exemples ailleurs et un seul dans
ce diocèse: la stalue est ouvrante. Les drapel'ies du COI'pS
peuvent s'ouvril' comme deux battants d'al'moil'e, el alol's on
découvre à l'inlérieur une sculpture l'eprésentant la Sainte­
TI'inité, landis que sur les deux panneaux latéraux des pein­
tm'es d'une exlt'ême finesse et d-ull tl'ès bon style retl'acent
les six scènes suivantes: l'Allnonciation la Nativité la

Présentation au Temple la Flagellation la Descente aux
Limbes la Résurrecl ion.
terminer là notre étude, car l'église de Saint­
Nous devons
Martin, construite en 1773·1788, avec SOli cloche.· asse?
imposant, bâti en 1850, ne peut pas p.·étendre à figurer dans
le vieux JJlorla.ix.
J.-M. ABGRALL,
chanoine honoraire .