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FINISTERE
EXPLORATION DES TUMULUS
tle li.eI"iquel, eu Tréguue
et .le ReI-loIse, UlobaI"S-UUI"lloët .
M. l'abbé Favé, notre secrétaire, m'ayant parlé d'un beau
tumulus dominant la plaine qui s'étend aU Sud de Keriquel
jusqu'àla mer, je résolus l'an dernier d'en faire l'exploration.
Au moment d'exécuter mon projet, ayant appris que M. l'abbé
Le Bris, professeur à Pont-Croix, avait manifesté la même
intention, je lui écrivis pour m'en assurer, prêt à me retirer
devant lui. Mais M. Le Bris me répondit, fort aimablement,
qu'il me verrait avec plaisir exécuter une fouille qu'il remet
tait tous les ans. Le 13 juin dernier je me mis donc en route
pour Trégunc.
Arrivé de bonne heure à destination, nous pûmes, grâce à
l'obligeance de M. Le Gall, vicaire à Trégunc, voir immédia
tement 'M. Glémarec, adjoint au nlaire, propriétaire du tu
mulus de Keriquel, qui, avec la plus parfaite complaisance
et le plus complet désintéressement, m'autorisa à faire la
heureux de lui en réitérer ici tous mes
fouille désirée. Je suis
remerciements, ainsi qu'à M. Le Gall qui voulut bien, en
sortant de chez M. Glémarec, m'accompagner à Keriquel,
Oil nous pûmes voir le tumulus et embaucher des travailleurs
pour la fouille que nous commençâmes le lendemain matill .
Le tumulus de Keriquel, à 150 mètres au Sud du village,
mètres de haut sur 40 mètres de diamètre. Du sommet
on a une vue splendide. Nous l'avons attaqué par le haut,
par une tranchée en forme de puits, de 9 mètres de côté. ,
Nous avons bientôt reconnu que le tumulus est fait d'argile
blanche des prairies, excessivement compacte, dans laquelle
remarquons des parcelles de charbon et quelques frag
nous
ments de silex sans caractère. A i m 50 sous le sommet de la
butte nous recueillons CJuelques fragments d'une poterie
l'ougeâll'e, onctueuse: se coupant au cou.teau, dans laquelle
on voit de nombreux morceaux de talc. Il::; proviennent de
grands vases ayant, ainsi que j'ai pu le déterminer par des
morceaux de bord, 411 centimètres de diamètre à l'orifice.
Un de ces fragments est décoré sur la panse, immédiatement
all·dessous du bord, d'empreintes du doigt et de l'ongle.
Un peu plus profondément dans le tumulus nous rencon
trons quelques pierres qui deviennent de . plus en plus nom- .
hreuses, au fur et à mesure que nous ,descendons, ce qui
nous fait penser que nous ne tarderons pas à atteindre la
sépulture intérieure qu'il recouvre. Mais le soir est venu et
il nous faut remettre au lendemain la continuation de la
fouille.
Le lendemain matin nous trouvons nos travailleurs exacts •
au rendez-vous. Leur curiosité excitée, ils espèrent qu'ils
auront 'bientôt mis la- main sur le trésor que cache, dans
leur pensée, une aussi grosse butte.
Le travail est devenu plus pénible que la veille. Pour reje
ter au dehors les terres de la tranchée, il nous fal1t établir
une terrasse sùr laquelle les travailleurs du fond jettent les
terres d'où d'autres les rejettent dehors. Dans ce maniement
un violent vent d'Est, les en1evant en tourbillons: aveugle
hommes .
nos
Nous continuons à . recueil,lir des fragments de la même
poterie onctueuse, pleine de morceaux de talc, et aussi
quelques pierres parmi lesquelles deux galets longs portant
des traces d~ percussion.
Enfin, à 2 III 80, sous le sommet du tumulus, nous rencon
. trons au centre de la tranch08 un muretin, allant du Nord
au Sud, formé par trois assises de grandes piel'l'cs, maçon
nées à sec, ayant 0 fi 86 de large sur 0 m'65 de bautenr et
6 mètres de longueur. Les pierres de ce muret portent les
traces d'un feu violent. Des deux côtés de cette construction.
c'est-à-dire à l'Est et à l'Ouest, adossées contre elle, étaient
un grand nombre de pierres, n'ayant pas été au feu, parais
sant jetées là sans ordre. Elle~ formaient, avec le muret,
comme une calotte circulaire en pierres de 6 mètres de dia-
mètre, dont l'épaisseur allait en diminuant du centre, où elle
avait 65 centimètres, au pourtour extérieur où elle se rédui
sait à 12 ou 15 centimètres.
Sous ces pierres, posées là, sans doute, pOUl' les protégE'l'
contre les terres amoncelées au-dessus. était une couche de
cendres et de restes incinérés, épaisse de ·10 centimèlres,
mélée de gros morceaux de charbon de bois, reposant sur
un fond d'argile blanche calcinée comme de la brique, sur
une épaisseur de 15 centimètres, témoin irrécm:able d'un feu
très intense. Nous nous trouvions, à n'en pas douter, en pré
sence d'une sépulture par incinération raite sur place, sur
laquelle on avait édifié, ensuite, le tumulus. .
Il est facile de reconstituer, comme il suit, les cérémonies
des funérailles de celui dont nous venons de retrouver la sé-
pulture, personnage considérable, sans doute, si l'on en juge
par les dimensions énormes du monument que Lili dressèrell t
ses contemporai ns.
Ils commencèrent la construction de la vasle butte, lui
donnant 40 mètres de base, et l'élevèrent -jusqu'à environ
1 111 30 de haut, en forme de cône 1 ronqué. · i\ l'l'ivés à ce
point ils construisirent, au centre de la plate-forme su pé-
rieure, suivant son diamètre Nord-Sud, le muret maçonné à
pierres sèches, q,ue nous avons constaté, lui donnant 6 mèt.l'es
de long sur 0 m 86 de large ct 0 m G5 de 11n\l1811[·. Ils dressèrent
. enfin par dessus un énorme hllcher, J'environ 6 mètres de
diamètre, sur le sommet duquel fUl'ent placés le cadavre du
sUlvre
les victimes qui devaient le
défunt et, peut-être,
dans la mort.
Pourquoi ce muret au centee du tumulus? Je ne me l'ex
plique que par la pensée d'appuyer sur ses arêtes Est et
Ouest une des extrémités des grandes pièces de bois formant
la base du bûcher. Par leur dis,position en chevron, et la sur
élévation d'une de leurs extrémités, on obtenait ainsi, de
chaque côté du muretin, un espace vide, sorte de couloir,
permettant à l'air de circuler par dessous le bûcher et d'en
acti ver l'embrasement.
Parmi les restes incinérés nous avons relevé un grattoir en
silex; la moitié d'une hache à bonton en diorite polie, extl'é
mité du bouton; un pelit objet en bl'onze, mal consel'vé,reste
d'une fibule de petite dimension; une pierre à aig'uiser; une
pierre à cuvette à concasser les graines, posée snI' la cuvette;
deux fusaïoles en terre cuite, onctueuse, mélée de morceaux
de talc; de nombreux fragments de plusieurs vases en terl'e
gl'ossière, onctueuse, parsemée de morceaux de talc, faits à
la main. Quelques-uns de ces vases étaient de grande dimen- .
sion, à fond large et plat, lal'gement ouverts à l'orifice et à
large bord plat, décoré d'un trait en zigzag, tracé à la pointe
l'argile encore molle; quelques fragments indiquent,
dans
cependant, un vase iJeaucoup plus petit, en forme d'écuelle
à fond rond un peu rétrécie à l'orifice; une tige de long
clou en fer; une petite boule en fer de 2 centimètres de dia
mètre, sans doute la tête d'une longue épingle à laquelle
tige; quatre pointes de lance en fer, de tailles
manque la
différentes, en très mauvais état de conservation; un objet en
fel', tige carrée de 1 centimètre de côté, recourbée: longue
de' 6 centimètrès, se terminant par une douille ronde creuse
de 5 cen'timètres de long et de 2 centimètl'es de diamètre in
tériour à son point d'emmanchement. Cet objet me paraît
avoir été un. engin de bateau: une gaffe analogue à celles dont
se servent encore nos marins à bord de leurs embarcations .
Le tumulus de Keriquel est, comme on le voit, un tumulus
de la plus ancienne époque du fer, et, comme toutes les sé
pultures de cette époque, celle de Keriqnel avait un mobilier
assez pauvre. Toutefois, il nous a permis de faire une cons
tatation intéressante, jusqu'ici inédite dans nos régions
armoricaines, faute de preuves précises, c'est que les pote
ries onctueuses, savonneuses, à grains de talc, sont des pote
ries de la première époque du fer.
Une autre curieuse constatation est la rencontre d'une
moitié de hache à bouton; en pierre polie, dans une sépulture
de cette époque. Il ne faut cependant pas, croyons-nous, y
attacher plus d'importance qu'elle mérite, et y voir autre
chose qu'un objet probablement recueilli à titre de curiosité,
ou peut-être à titre superstitieux, par l'indi vidu en l'honneul'
de qui a été élevé ce tumulus. .
La fouille du tumulus de Keriquel terminée, nous nous
dirigeons sur Clohars-Carnoët où M. le capitaine de frégate
Le Pontois m'a signalé un tumulus sur les terres de Kerloise.
Ce tumulus, fortement endommagé, est à 200 mètres à
l'Est du village. Au moment où nous en avons entrepris l'ox-
ploration il avait 2 mètres de haut sur [1:5 de diamètre à la
base. A 20 centimètres sous 10 sommet de la butte nous avons
rencontré une grande dalle de 60 centimèt.res d'épaisseur sur'
2 ID 85 de long et 1 ID 80 de large.
Cette dalle recouvre une sépulture orientée Nord-Est, Sud-
Ouest, dont la paroi Nord-Est n'existe plus. La paroi oppo-
sée, celle Sud.-Ouest, est faite de deux pierl'es juxtaposées,
placées de champ en teree. Les deux au tres pa l'ois sont des
murailles maçonnées à pierres sèche"'.
Dès que nous avons péné-ltré dans celte sépultUl'O, nous
nous ' sommes aperçu qu'elle était . violée; son exploratioll
l'a confirmé. Nous n'y avons rencontré qu'ull frag
nous
ment de poterie en terre grossière, ayant appartenu à un
vase fait à la main, qui fut de l'époque Ju monument; et,
quatre fragments de briques à rebord qui indiquent une
violation très ancienne, remoulant probablement à répoqne
romame,
Cette chambre funél'tlÎI'C llll'Slll'e illtél'icUl'eulcllt. l 111 SD il
SOIl ouverture Norù-E~l. 1 III 30 :\ SOIl ext.l'éll1ité Slld-Ouesl,
1 III 60 du Nord-Est au Sud-Ouesl, cl 1 1lI 35 du plal'oun cHl
fond, qui est dallé en galets blancs pI'is à ln gTève vuisille.
Cette sépultuI'e renfermait peobablùlllent Uil rllobilier de
l'époque du beonze avant sa violation .
.Je ne veux pas tel'mÎn8l' l(~ l'écit de celle CXplOl'Hliun satls
remercier monsieul' Labasqu8, recteur de Cloltnr:-;-CHI'Iloet.
de son aimable accueil ct cie l"hospilalitc' qnïl a bioll vonlll
me donnel' pendant mon séjour à Clohars.
P. DU CHATELLIEH.