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Bulletin SAF 1899


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Musée de Kernuz. Tombe de Locamand

E. du Crest de Villeneuve

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MUSÉE DE KERNUZ
TOMBE DE LOCAMAND

Il Y avait dans l'ancien jardin du prieuré de Locamand un
tombeau qui', après la démolition de la chapelle, y avait été
pal' son propriétaire. 1\1. du Chatellier
incomplètement réédifié,
le fit transporter à Kernuz, il y a une quarantaine
l'obtint et
d'années. .
Sur la pierre tombale est couché un personnage à la figure
rasée et aux cheveux longs très bouclés. Sa tête repose sur un
voile ou coussin tenu par deux petils anges nus et à genoux.
Le torse esl. recouvert d'une cotte ou casaque comme celle
que portaient encore les mousquetaires sous Louis XIn et
Louis XIV. Sur le devant de cette cotte, au-dessous des
mains croisés sur la poitrine, on distingue un ornement fort
en relief qu'il ne nous a pa? été possible de caractériset. Les
manches de la cotte tombent jusqu'au coude, laissant à partir
de là le bras apparent. Celui-ci est couvert de brassards à
coudes articulés et les mains sont munies de gantelets garnis-
sant une partie de l'avant-bras comme on commença à les
porter au XVIe siècle. Les cuisses sont recouvertes de cuis­
sards, les jambes de genouillères articulées et de grèves. Les
pieds manquent, tout le bas de la statue ayant été brisé. Le
personnage porte une épée collée le long de la jambe gauche.
Tout le long du corps à droite, pris sous le bras, est un long
bâton qui fait aussitôt penser à une crosse, car il est exacte­
ment placé comme le sont les crosses des évêques et des abbés.
Ici ce ne pouvait être une crosse. Mais qu'était-ce alors? Le
motif qui le surmontait éLant brisé, il est difficile de s'en rendre
compte. De face, au point A du dessin ci-joint, on ne voit
. DULLETrN ARCllÉOL. DU FINlSTERE. TOl\1E XXVI (Mémoires). 26

qu'une brisure comme si c'était la naissance de la crosse
même. De profil au même point on croit voir le débris d'une
les bras auraient été perpendiculaires à la dalle
croix dont
du tombeau. Il est possible que ce soit tout simplement une
hallebarde que le personnage, dont nous voyons ici la figure ·
portail peut être dans un service spécial, comme celui
mutilée,
de la porte du roi, auquel il pouvait être att.aché étant donnée
la cotte qu'il porte.
Il faudrait retrouver quelle fut la vie d'Isaac do Plessis de
I\.el'gario, qualifié écuyer, (c cavalier faisa nt profession des
armes » dans les anciens titres du prieuré. Il fut pri.eur com-
mendataire de lolO à HH8, époque de sa mort. Etant mort
doute dans le pays, puisqu'il appartenait à la
prieur et sans
maison du Ple.3sis Nizon, il avait pu êLre enterré dans
sa chapelle de Locamand. C'est le seul personnage qui nous
paraisse convenir à cette tombe en raison de sa double qualité
de guerrier et de prieut. Il est très certain en effet que' nous
sommes en face d'un personnage ayant vécu au commence­
ment du XVIIe siècle Les cheveux en font foi. Or le prédéèes­

du Plessis comme prieur avait été Philippe de
seur d'Isaac
Rincquier, conseiller du Roi au Présidial de Quimper, qui .tut
titulaire de 1571 à '1(HO. Ce n'est pas lui qui aurait pu porter
ce harnois militaire. Le successeur d'Isaac du Piessis en , 1618

fut Messire Denis Simon de Marquemont, archevêque de Lyon,

sur la demande duquel le prieuré fut réuni au collège des
jésuites de Quimper. Ce n'est pas lui non plus qu'on aurait
figuré en pareil habit et il n'y a aucune possibilité à l'inhu­
que de Lyon au pr.ieuré de Locamand
mation d'un archevê
il se démit de son vivant.
dont
au bâton que porte sous son bras droit le person­
Revenons
nage. La hallebarde me laisse des doutes. Ne serait-il pas
possible que ce bâton fut un signe de sa dignité de prieur?
M. de la Rogerie a bien voulu nous dire qu'il savait qu'à une
certaine époque et dans certains pays les prieurs portèrent un

bâton plus ou moins analogue à ceux que nous avons vus
nous-mêmes autrefois portés par les grands chantres des
cathédrales comme marque de leur dignité?

Nous avons fait de ce côté quelques recherches qui nous ont
que certains prieurs portaient un bâton dit prioral
confirmé
les cérém9nies et le faisaient graver sur leurs sceaux.
dans
En résumé, nous croyons que ce tombeau est bien celui
d'Isaac du Plessis de Kergario qui fut tout à la fois guerrier
et prieur commendataire de Locamand. Mais nous serions
que quelqu'un de nos confrères ou un lecteur de cette
heureux
note puisse nous fournir de plus amples détails sur la
simple
vie, les titres et les fonctions du personnage ainsi que des
arguments pour établir la certitude du bâton prioral qui nous
paraît dores et déjà probable en raison de la forme même du
bâton.
E. DU . CREST DE VILLENEUVE •

.Pi~"I'e tont!»a!e cie Lot"alJuancl