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Bulletin SAF 1898


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Le mobilier artistique des églises bretonnes (suite)

Chanoine Abgrall

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LE MOBILIER ARTIsrn DE DES ÉGLISES BRETONNES

(Suite)

Statues, groupes, bas-reliefs, niches à volets.
S'il est facile de compter les œuvres sculpturales absolu­
ment parfaites comme art et correction, on en trouve cepen­
dant un bon nombre qui sout d'un style excellent et offrent
Ull cal'actèl'e tout particulier digne de fixee l'attention de
l'archéologue. Parfois même il s'en rencontre que ne renie­
raient point les meilleurs maîtr'es de la Renaissance et du
XVll siècle; et au milieu de C8S productions on reqonnaît
des parentés, des analogies de facture indiquant des com­
munautés d'origine et maL'quant les tendances et les procédés
des différents ateliers. Il sera impossible de citer tout ce que
la statuaire a laissé de remarquable dans nos églises, on ne
peut que signaler les pièces les plus importantes en les
classant par époques. ..
Les cinq ou six statues d'apôtees des deux pOL'ches de la
cathédrale de Saint-Pol sont-elles du XIIL ou du XIVe siècle?
En tout cas, ce sont les plus anciennes du pays. Ensuite
viennent les treize statues du porche des apôtres au Folgoët,
vraiment belles dans leurs draperies aux plis abondants et
gracieux, vraiment nobles et imposantes avec leurs têtes
gravès et austères. Quelques-uns disent que le sculpteur
Mzchel Colom.b a travaillé à ces statues. Au Folgoët égale-
ment on doit remarquer la Vierge assise de la fontaine, les
q\,1atre ancien nés statues de l'intérieur de l'église: saint
.J ean-Ba ptiste, saint Jean l'éva ngéli.:lte, sainte Ca t.herine et
~ainteMarguerite; puis à l'extérieur la statue de duc Jean V,

le groupe de l'Adoration des Mages all porche ouest, et la
statue de saint Yves.
statuaire du Folgoët a été imitée dans bien des
Cette
porches et bien des églises, mais jamais égalée; il faut
cependant reconnaître quelques ressouvenirs heureux dans ,
la Vierge du fond du porche de Trémaouézan, au porche de
La Martyre, à Saint-Jean-Balanan, ,en Plouvien, à N.-D. de
Quilinen, en Landrévarzec, et à Saint-Laurent de Goulien,
près de Pont-Croix. . ,
On doit signaler dès maintenant la statue ouvrante de
N.-D. du Mur, vénérée à Morlaix, datant très probablement
du XIVe siècle. Les draperies du corps peuvent s'ouvrir à
deux battants, pour former triptyque, ' et à lïntérieur se
trouve une sculpture représentant la Sainte-Trinité, tandis
que sur les panneaux latéraux les six scènes suivantes sor~t
figurées en tableaux d'une extrême finesse: l'Annonciation,
la Nativité, la Présentation, la F'lagellation, la Descente aux
Limbes et la Résurrection.
A Bannalec existe une statue également ouvrante, mais
du XVIIe siècle et renfermant en bas-reliefs: le Baiser de
Judas, la' Flagellation, N.-S , condamné à mort, le Portement
de la Croix et le Crucifiement. Cette statue provient de la
chapelle de Saint-Martin, Loc-Marzin, mais se trouve
maintenant dans l'église paroissiale.
images curieuses on peut noter les Christs en
Comme

robe rouge, ou N.-S. en croix, vêtu d'une robe ·longue, à
plis serrés et sans ceinture. C'est une tradition provenant
. de la période romane, mais les 'exemplaires que nous possé­
dons maintenant ne datent que du XVIIe siècle. Il y en a un
assez beau, couronne en tête, à la chapelle Sainte-Anne, d •
. Lampaul-Guimiliau, un autre à la chapelle de Christ, en
Guimaëc, puis dans une ferme de la paroi~se de Plouégat-
Moysan et enfin à Sainte-Croix de Quimperlé. Les deux qui
se trouvent à Loü-Maria de Quimper et à la chapelle de

l'évêché ne sont que des copies mod8l'nes. Il y a quelque
dix ans, on pouvait en v6ir un fort intéressant à la chapelle
de Pont-Christ, dans la paroisse de La Roche, tout près de
Brézal; il est devenu maintenant la propriété de M. Le
Provost de Launay.
Comme statues isolées, on pourroit .citer spécialement
N.:-D. de Cléden-Poher, Saint-Michel et Saint-Jean-Baptiste
de Lampaul-Guimiliau, Saint-Hervé de Guimiliau, Saint­
Yves de Peumerit, Saint-Jacques de Pouldavid, un vieux
Saint-Pierre à Plougasnou, le Saint-jean-Baptiste du porche
de Saint-Jean-du-Doigt, et quantité d'ailtl"es. .
En parlant des groupes, nous devons mettre en premier
lieu ceux de la Sainte-Trinité, On eh trouve un en bois
au musée de Quimper, offrant tous les caractères
sculpté,

du XIll et du XIVe siècle et qui provient de la cathédrale .
Père et le Fils sont assis sur un même trône, vêtus de

manteaux ou chapes dont les draperies se confondent pour
COUVl'Îl' leurs genoux; le Pèl'e tient la boule du monde et le
Fils un livre ouvert; au-dessus d'eux plane le Saint-Esprit;
tout autour, dans un nimbe de nuages, un cercle de quatorz e
anges adorent, chantent ou jouent de différents instruments
de musique. .
retrouve la même représentation dans une
A Loqueffret se
à volets, mais avec plus de déploiement encore,
niche
puisque, outre les nomhreux anges musiciens, il y a douze
bas-l'eliefs.
panneau.X de
On peut admirer encore de beaux groupes de la Sainte­
Trinité à Plougasnou, à Dinéault, à l'église paroissiale et à
la chapelle de la Trinité de Lampaul-Guimiliau et au porche
de Clohars-Fouesnant.
Les groupes de sainte Anne instruisant la Sainte-Vierge

sont nombreux. dans nos églises, mais il y a un groupement
plus original qui se trouve aussi dans quelques-unes: c'est
sainte Anne instruisant ou portant la Sainte-Vierge qui à

son tour porte l'Enfant-Jésus. Nous pouvons signaler cet
exemplaire à Lanriec, N .-D. de Châleaulin, Lampaul­
Guimiliau, à Plouégat-Guérand, à la chapelle de saint

Diboan, en Tréméven, etc ...
Le sujet de la Descente de croix ou de Notre-Dame de
Pitié a donné lieu à de belles œuvres de sculpture. La plus
belle représentation de cette scène se trouve à l'église de
Pencran, encadrée dans une niche à feuillages et dessins
flamboyants; rien n'égale la beauté grave et la douleur des
neuf personnages entourant le corps inanimé du Sauvelfr
reposant sur les genoux de sa mère. La date de 1517 est
gravée au ba.s de la niche et l'on peut reporter approxima­
tivement à la même époque les groupes analogues et de
même caractère que l'on voit · dans les églises de Bodilis,
Lampaul, Pont-Croix, La Forêt-Fouesnant, Bénodet, Qui­
linen, Plonévez-Porzay et dans la chapelle des Ursulines de
Quimper.
La Piéta de l'église de Ploéven est en pierre et porte cette
inscri p lio n :
Maria. Mater. gratiœ. tu. nos. ab. haste. p1"otege. /JI v XL VH.
Un aulee groupe commun en Bretagne c'est celui de saint
Yves entre le riche et le pauvre. Indiquons-le spécialement
à la Roche-Maurice, à Gouézec, Pleyben, Quilinen, Saint­
Vennec de Briec, Lanmeur, Goueznou ; il écoute la supplique
du pauvre el repousse la pièce d'or que lui offre le riche.
Je ne puis résister au désir de citer encore le joli saint
Hubert en pierre , en costume Hp,nri II, qui se trouve sur le
mur d'enclos du presbytère de Cast, agenouillé et tête
découverte devant un cerf qui se montre à lui avec une croix
entre les deux cornes. Ses deux chiens mêmes sont en arrêt
et comme saisis de respect à la vue de ce prodige; et j'ajou-
terai encore l'admirable saint Sébastien de l'autel latéral de
. Guiclan, entre deux archers qui le percent de leurs flèches.
En abordant les bas-reliefs, ne convient-il pas d'examiner

avant tout les sculptures en albât.re que rious possédons
dans quelques-unes de .nos églises et dans nos musées? .
sept panneaux différents, réunis en
A Roscoff il existe
triptyque et retraçant les scènes de l'Annonciation: Nati­
vité, Flagellation, Crucifiement, Résurrection, -
et Descente du Saint-Esprit. Au l'étable de
Ascension
l'autel des Saints-Anges à la cathédrale de Quimper se
trouvent des statuettes de même matière et de même travail
provenant de Kerity-Penmarc'h. C'est de là que vient aussi
la grande statue en albâtre de saint .lean-Baptiste placée
dans la chapelle des fonts-baptismaux de la même cathédrale
et qui a son analogue, mais en plus petites dimensions, dans
la chapelle de Saint-They de Cléden-Cap-Sizun.
ouvrages en albâtre se retrouvent encore dans quel­
Ces
. ques églises du littoral, au couvent du Carmel de Morlaix,
aux musées de Morlaix, Quimper et Kernuz; et pour être
complet, je devrais en citer deux au musée de Vannes, cinq
à l'église de Sainte-Ave-du-Bas, près d'e Vannes, et cinq
autres au retable de l'autel de la Vierge à la basilique de
Sainte-Anne d'Auray. .
sortent ces sculpt.ures naïves, incor- ,
De quels ateliers
. rectes, mais d'un caractère si étrange ? On a beaucoup
discuté là-dessus. Quelques-uns leur attribuent une origine
. espagnole, d'autres les font venir d'Italie, d'autres du Tyrol.
A voir la facture des personnages, leurs draperies et surtout
quelques-unes des figures qui ont toute la: grâce et toute la
suavité des tableaux des primitifs et des peintres ombriens, .
seraitplus porté à croire que leur vraie provenance est

l'Italie avec laquelle nous avions des rapports commerciaux

au xv et au XVIe siècle. .
Dans les autels et retables, j'ai déjà mentionné quelques
bas-reliefs g'othiques, comme ceux de Goulven, Brennilis,
Bodilis. Les retables de la Renaissance et du xvu siècle en
contiennent aussi un bon nombre. Par exemple, à Bodilis,

au retable du maître-autel sont sculptés cinq tableaux de
Pâque
toute beauté ret.raçant le Sacrifice d'Abraham, la
ancienne, la Manne, les Pains de proposition donnés à David
Cène. A Lampaul-Guimiliau, on trouve la
et la Dernière
Nativité de la Sainte-Vierge, plusieurs scènes de la Passion,
le Martyre de saint Miliau, la Chute des Anges, l'Enfance,
Prédication et la Mort de saint Jean-Baptiste, saint Paril

terrassé sur le chemin de Damas, puis descendu dans une
corbeille des murs de cette ville, la Pénitence et le Cruci-
fiement de saint Pierre, les Vertus théologales, des Scènes
de la Passion sur le tref ou poutre de gloire du miliélu de la
et au revers l'Annonciation et les Douze sibylles.
nef,
la tribune des orgues de Guimiliau on a sculpté une

marche triomphale, puis David jouant de la harpe dans les
jardins de son palais, et sainte Cécile jouant de l'orgue,
sans compter les médaillons des évangélistes et les repré-
sentations des vertus théologales et cardinales dans la cuve
de la chaire à prêcher .

Au même article, il convient .de rattacher les scènes de la
Passion en haut-relief des retables de Cléden-Poher, Plourin-
Morlaix, Locquirec et des chapelles de Christ et des Joies,
en Guimaëc.

Les niches à volets forment comme des sortes d'armoit'es

contenant des statues en vénération, fermées par des vantaux

qui' ne s'ouvraient qu'aux grandes fêtes et dontles panneaux
étaient couverts de scènes sculptées ou peintes retraçant la
légende du saint.
On en voit deux très belles à l'église de Saint-Thégonnec,
et en face de la chaire, avec l'image et l'histoii'e
au-dessus
du saint pat.ron et de N.-D. de Bon-Secours. Deux autres
avec peintures fines p,ans l'abside du Juc'h, celle de la Trinité,
mentionnée déjà à Loqueffret, ' d'autres à Locquirec et aux

chapelles de Christ et des Joies, en Guimaëc, de Lannélec,
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXV. (Mémoires). 5

én Pleyben, de Saint-Claude, en Plougastel-Daoulas, et au
Saint-Jean-du-Doigt.
porche de
Nous devons classer dans la même catégorie le grand
retable des dix mille martyrs de l'église de Crozon, puisque
tr'ouvent des
à côté du corps principal de ce retable se
panneaux mobiles couverts des différentes scènes du supplice
martyrs dont on peut teouver l'histoire dans
de ces soldats
grands et les petits Bollandistes à la date du 22 Juin.
les
Sépulcres de Notre-Seigneur.
On s~est phi au moyen-âge et à la Renaissance à repré­
senter la Mise au tombeau. A la cathédrale de Quimper,
grand sépulcre de
nous possédons une copie moderne du
Bourg~s, qui est peut-être celui que fit exécuter dans son
monastère sainte Jeanne de Valois, fille de Louis XI.
est probablement celui de Sainte- '
Le plus ancien du pays
maintenant dans le jardin de la cure.
CroÏx de Quimperlé,
sont en pierre blanche, ayant sur l~s
Les personnages
bordures de leurs vêtements des feuillages brodés avec une
extrême finesse, ou leurs noms gravés en lettres fleuries ,:
Joseph ab Arimathea, . Nicodemus, Abibon, Gamaliel

meus dominus.
De la même époque, c'est-à-dire du commencement du
" XVIe siècle, doit être aussi le sépulcre de la chapelle de
Coadry, en Scaër; il est en grande vénération, et les pèle­
rins vont baiser les plaies du Sauveur: An A utrou Christ.
Les deux pIns beaux, comme importance et correction de
style, sont ceux de Saint-Thégonnec et de Lampaul-Guimi­
liau. Dans celui de Saint-Thégonnec, on remarque tout
particulièrement la V éroniqu~, la Madeleine et un ange
pleurant au bord du tombeau. A Lampaul, la tête et le torse
de Notre-Seigneur sont d'une noblesse sans égale, et l'on ne
peut se défendre d'admirer l'expressiondoulour.euse de tous
les personnages dont les yeux sont fixés sur la figure ina-

nimée du Sauveur. Ce monument est en pierre blanche, il
est signé et daté: ANTHOINE : FECIT : 1676. C'est un
rares ouvrages qui portent la signature du sculpteur. '
des
Après cela nous pouvons nommer les sépulcres de Plou­
guerneau, de Saint-Martin de Morlaix, celui de Beuzec­
maintenant au musée de Kériolet ; puis à Rosporden,
Conq,
la même scène en bas-relief, sous l'autel latéral nord.
Autrefois à la chapelle du Pénity de Quimper, au bord
des allées de Loc-Maria, un groupe de personnages en bois
représentait une scène de la passion: Notre-Seigneur au
milieu des bourreaux et des pharisiens. Un groupe semblable
encore dans la chapelle de Langroas, en Cléden-Cap­
existe
Sizun.
Cuves baptismales.
Il Y a dans la cour du presbytère de Saint-Pol-de-Léon '
grande cuve de granit qui se trouvait autrefois à l'inté­
une
rieur de la cathédrale et qui a, dit-on, servi/ à administrer le
baptême par immersion, lorsque ce rite était en usage. Je
assertion pour ce . qu' ~lle vaut, et elle ne manque.'
donne cette
pas de vraisemblance. La cuve ' a presque la forme d'un
demi-cercle et mesure 1 m. 57 sur le côté qui est droit, 1
1 m. 37 de largeur et 0 m. 50 de profondeur. .
Parmi les cuves qui servent encore maintenant, celles de
Saint-Jean-du-Doigt et de Penmarc'h sont des plus anciennes
et des plus importantes. Elles doivent dater du xv siècle ou
premières années du XVIe et présentent autour de leurs
des
vasques une frise formée de feuillages puissants, d'anges et
de lions tenant des écussons. . .
Au Faou il y a une décoration de phylactères portant des
relatiyesaux quatre fleuves du paradis terrestre:
inscriptions
Phison, c'est celui qui environne toute la terre de lIévila,

là où croist l'or. (Serpent avec dard).

Gehon, c'est celui qui circuit toute la terl'e d'Ethi·opie .
(Lion).
Tigris, c'est le troisième fleuve qui va vers l'Assyrie .
(Cerf) .
EuphTates, c'est le quatrième fleuve .
La cuve de Plougasnou est entourée d'une inscription
gothique qu'un couvel'cle en bois vient malheureusement
cacher en grande partie. . .
l'intérieur est une cuve en plomb ornée en guise d'anses

de quatre jolies carjatides féminines. On pourrait croire que
ce travail est de la Renaiss.ance, et d'a,près un compte de
remonte au commencement du xvn siècle .
fabrique il

Les fonts de Locmaria-Plciuzané sont ornés de petits bas-
reliefs gothiques retraçant des scènes de la vie de Notre­
Seigneur.
. A Lampaul-Guimiliau, la cuve octogonale est décorée de

modillo,ns,. de moulures, et porte cette inscription:

F : F. :. LA VRENS : ROPARTZ : E : L : ABGRALL:
LORS: FABRICQVES :LAN: 1651.

A GuicJan, même travail avec l'inscription:
F: F: P: YVdN: PICART: YVON: TAN~VY: FA-

BRIQVE : LAN: 1658.

Baldaquins de fonts-bapti~marix .

Pour donn'er plus de . valetir et . de noblesse aux fonts
baptismaux et peut-être aussi pour rappeler les anciens
baptistères circulaires ou octogonaux, on a élevé au-dessus
des cuves baptismales des baldaquins tantôt en pierre,
tantôt en bois, formant dômes portés sur des colonnes. Nous
baldaquins en pierre à Comanna, à Bodilis et
trouvons des
à La Martyre, le dernier portant la date de 1635. Le joli

petit· baldaquin en chêne de Saint-Melàine de Morlaix est
de 1660, quoique ses sculptures semblent accuser le style
Louis XIII ou même Henri II. Celui de Lampaul-Guimiliau

est daté" ùe 1650, et l'admirable baldaquin de Guimiliau, le
plus bel ouvrage en bois qui ait été fait au XVIIe siècle, est
de 1675, l'année de la révolte du papier timbré. La description
détaillée de cette œuvre eXIgerait plusieurs pages.
Tribunes et buffets d'orgue.

Une partie de la tribune de la cathédrale de Saint-Pol est
gothique flamboyant; la console qu'on y a ajoutée ensuite
est du XVIIe siècle. Les mêmes panneaux flamboyants et
d'une grande richesse se retrouvent dans la tribune de
Saint-Melaine de Morlaix et dans celle de Goulvcn ~ A
Pont-Croix nous avons des panneaux à godrons, séparés
par des contreforts ou pinacles très sculptés et variés, avec
frises de feuillages et de griffons en haut et en bas.
Toutes les autres tribunes remarquables ainsi que les .
buffets d'orgue sont du XVIIe siècle. Quelques-unes de ces

sont d'une grande richesse par leurs panneaux,
œuvres
leurs colonnettes, leurs bas-reliefs, leurs statuettes, leurs

consoles, leurs tourelles.
Citons Saint-Jean-du-Doigt avec tableau représentant le roi
David jouant de ]a harpe et sainte Cécile jouant de l'orgue;

Ergué-Gabéric, 1650, tableaux d'anges musiciens; cathé-
drale de Quimper; Pleyben, Sizun, Saint-Thégonnec,
Lampaul et Guimiliau dont on a déjà décrit lei trois beaux
bas-reliefs.

B~nitiers.
Quelques-uns des bénitiers de nos porches et de nos
églises sont de vraies œuvres d'art. A la période flamboyante
on en trouve quelques-uns de bien soignés, comme au .
porche de Saint-Jean-du-Doigt, où le dais de couronnement
sert de piédestal à la statue du Précurseur; mais c'est à la
Renaissance qu'on leur a donné le plus de richesse. On les
a ornés de moulures, de f~uillages, d'oves , de rais de cœur,

CROIX DE PLEYBER .... CHRIST

et les dais qui les surmontent sont accostés de petits coùtre-
forts entre lesquels viennent faire saillie de jolis bustes
crânement coiffés selon la mode du temps. Très souvent
aussi un petit . ange tient un goupillon comme pour inviter
à prendre de l'eau bénite. C'est ce que l'on trouve
les fidèles
à Saint-Thégonnec, Guimiliau, Landivisiau, La Roche­
Maurice, La Martyre, Landerneau. A Lampaul il y a· une
autre particularité: deux diables sont à moitié plongés dans
l'eau bénite et se débattent avec des contorsions que l'on
comprend aisément. .
pourrais ajouter à cette liste de bénitiers en pierre
quelques bénitiers portatifs, seaux benoistiers, en bronze,
portant en relief le
particulièrement celui de Loqueffret,
nom de la patronne de la paroisse: SANCTA GENOVEFA .

Tombeaux.
En consultant les monographies des cathédrales de
Quimper et de Saint-Pol, on peut se rendre compte des
tombeaux d'évêques et de chanoines que renferment ces
Comme tombeaux de saints nous devons
deux églises.

signaler ceux de saint Gurloës. dans la crypte de Sainte­
Croix de Quimperlé, de saint Herbot, dans sa chapelle de
saint Edern à Lannédern, saint Ronan à
Plonévez-du-Faou,
Locronan, saint Jaona dans sa chapelle de Plouvien, et
sainte Nonne dans la chapelle du cimetière de Dirinon . De
plus, dans l'église de Plouvien, la tombe de messire La~rent
Benoit Richard, recteur de Centré et chanoine de Nant.es .
Ce monument porte la date de 1535 et provient de la
Tariec dont Laurent Richard était un des fonda­
chapelle de
Outre la tombe de saint Gurloës, la crypte de Quim­
teurs.
perlé renferme encore celle de l'abbé Henry de Lespervez,
mort en 1434.
Puisqu'il s'agit de tombeaux, il n'est pas étranger à notre
sarcophages en pierre connu~
sujet d'indiquer .les quelques

dans le pays: d'abord celui de Landeleau, désigné sous le
Lit de Saint-Théleau, et dans lequel saint Yves
nom de
coucha. une nuit, à son passage en ce pays, par esprit de
Mahalon; un autre à
dévotion et de mortification; celui de
Lochrist-an-Izelvez, contre le mur nord à l'extérieur; puis
à Plougonven, près de l'ossuaire, et à la chapelle -de saint
Ronan, entre Plozévet et Landudec; le sarcophage de
à Plouvien, dont j'ai fait l'ouverture le 17 aoùt
saint Jaoua,
sarcophage sculpté, orné d'arcatures
1897, et enfin le beau
cintrées, fleurs, enroulements et croix ancrée, qui se trouve
dans le bas-côté midi de la cathédrale de Saint-Pol. D'après
le chanoine Toussaint de Saint~Luc, le couvercle aujour­
d'hui disparu portait en 1664 cette épitaphe : Hic jacet
Conanus Britonum Tex. Mais au lieu d'être le cercueil de
à croire que c'est le tombeau d'un
Conan-Mériadec, il est
dans le cours du XIIe siècle,
Conan qui fut évêque de Léon
d'après M. le chanoine Peyron.
Vitraux.
J'ai publié dans le Bulletin de notre Société archéologique
174, la liste approximative des
du Finistère, année 1892, p.
anciens vitraux que nous possédons encore et qui sont au
Pour ne pas faire double emploi,
nombre de 110 ou 120.
contentons-nous de rappelerles plus importants : 31 fenê-
tres hautes dans la cathédrale de Quimper, 2, à Saint-Pol­
de-Léon, 4 à Guengat, 6 à Plogonnec, f) à la chapelle de
Kergoat en Quéménéven, 7 à N.-D. du Cran en Spézet, les
deux maîtrl~sses-vitres de La Roche-Maurice et de Saint-
faites sur les mêmes cartons, ainsi
Mathieu de Quimper-,
que celle de Tourc'h.
Tableaux .

Il Y a encore dans nos églises bon nombre de vieux
tableaux; les plus remarquables en général sont ceux du

Rosaire, comme celui de Plougasnou, 1668, cet~x de La
Forêt-Fouesnant, Querrien, Locronan, Ploaré, Pont-Croix,
et le tableau votif de Penmarc'h .
Bannières et croix de procession.
Il faut des solennités exceptionnelles, comme le couron­
nement de N.-D. du Folgoët ou la translation des reliques
de saint Pol-de-Léon, pour voir réunies ensemble de nom­
breuses banniêres et croix anciennes; mais c'est un coup '
d'œil ravissant pour celui qui a la bonne fortune de jouir de
ce spectacle que de voir défiler gravement et lentement ces
chefs-d'œuvre de broderie et d'orfèvrerie, portés par les
jeunes gens et par les 11Qmmes marquants des paroisses qui
en sont fières à juste titre. Nos vieilles bannières sont toutes
brodées en fils d'or, d'argent et de soie, elles sont couvertes
,de semis de bouquets, fleurons et r.Qsaces se détachant sur
le fond et encadrant l'image du saint patron. Sur les côtés,
des arabesques et des enroulements. de fleurs fOl'ment des
orfrois ou bordures: le bas est découpé en lambrequins
d'où pendent des glands en franges dorées où sont cachées
des clochettes qui font entendre lel!-rs joyeux tintements.
Dix ou douze paroisses possèdent encore chacune deux
vieilles bannières, ' ce 80nt : Goulven, Guimiliau 1658,
Lampaul, Ploudiry, Plougonven, Plougourvest, Plouguer-
neau, Ploumoguer, Saint-Nic, Tréflez. . .
Les croix de procession sont en argent ou en vermeil. La
plus ancienne, celle de Saint-Jean-du-Doigt, est en style
François 1 ,. toute couverte de fins rinceaux de la Renais­
sance, avec des médaillotls à l'extrémité des croisillons. Les
autres, tout en olIrant des variétés, se rapportent au même
modèle; les tiges sont rondes ou octogonales; aux extré-
mités il y a de grosses boules à godrons ou à- rinceaux
repoussés. Le nœud au-dessous des pieds du Christ est
parfois monumel1taI , entouré de contreforts · ou. pinacle~

entre lesquels sont creusées des nichettes abrita st les sta-
apôtres. J..Ia plupart sont accostées de bras en
tuettes des
supportant les statues de la Sainte-Vierge et saint
console
Jeau'.
Voici par ordre alphabétique le nom des paroisses qui ont

encore de vieilles croix, avec l'indication de celles qui sont
datées:
Brennilis, 1650,' Carantec, 1652, Gouesnac'h, 1691,
Guengat, 1584, · Irvillac, chapelle de Coat-Nann, -
1638, .- Lannédern, 1620, Mespaul, 1675,
Kerfeunteun,
- ,. Pleuven, Pleyber-Christ, Plonévez-du-Faou, '
Plouénan, Plougasnou, Plougoulm, 1640, Ploui-
gneau, Ploumoguer, - Pont-Croix, Saint-Yvi,
Sa int-J ean-d u -Doigt, Sain t-Serva is, Sa int-Thégonnec,
Trégunc, 1610.
, Calices et ostensoirs

,En tête citons le grand calice de Saint-Jean-du-Doigt qui
mesure 0 m. 35 de hauteur et 0 m. 155 de diamètre à la
coupe. Il est tout ornementé d'arabesques, de feuillages, de
dauphins, de cornes d'abondùnce, et le nœud est composé
de pinacles et de niches comme ceux des croix procession-
nelles. La patène a 0 m. 24 de diamètre et porte en son
milieu un admirable émail représentant la Nativité. Il y a
encore à Saint-Jean un petit calice gothique, orné de petits
émaux sur son nœud.
autres principaux calices sont ceux de La Forêt­
Les
Fouesnant, Guengat, Locronan, Dirinon, La Roche, La
Martyre, Ploudiry, Plougasnou, N.-D. de la Victoire à
Cuburien, près Morlaix. .
ostensoirs Louis XIII existent à Plougasnou,
De jolis
Esquibien, Locronan et à l'Hôpital de Quimper.

L'église d'Ergué-Gabéric se réjouit de posséder de fort
belles pièces de rnême style; six chandeliers, une croix

d'autel, deux lampes et 'un encensoir avec sa navette.
Finissons par la jolie crosse en argent qui se trouve à
Trégunc et qui porte cette inscription: YVES. DE. ROCHE­
ROVSE. SIEVR. DE. PENANRVN. EN. LAN. 1611. A.
BAlLE. CETE. A. NOTRE. DAME. DE. KVEN.
Reliquaires et châsses.
Ce sont tantôt des bustes, des têtes ou des bras en argent
r.enfermant des membres entiers ou de simples fragments,
tantôt de petites châsses gothiques ou Renaissance; parfois
coffrets en bois d'ébène rehaussés de placages d'argent
des
repoussé, panneaux: cartouches, corniches, cariatides. Sans
donner d'autres détails, citons les paroisses qui sont en

possession de ces châsses et reliquaires: Saint-J ean-du-Doigt,
Lanhouarneau, Crozon, Saint-Nic, Locronan, Ploaré, Lan-
nédern, La Martyre, La Roche, Sizun, Locmélar, Locquénolé,
Landévennec, Saint-Evarzec, Retraite de Lesneven, Retraite
Saint-Maurice de Clohars-Carnoët:
de Quimperlé,
La nomenclature que j'ai voulu faire de nos richesses
est loin d'être complète, elle donne du moins une ,
artistiques
idée des objets précieux qui nous restent encore; pour les
décrire en détail il faudrait dresser un inventaire complet de
nos églises etde nos chapelles FaisOns un vœu-en terminant,
d'art qui sont un trésor pour
souhaitons que ces œuvres
notre pays ne disparaissent point, ne soient jamais aliénés
pour quelque raison que ce soit, et demeurent encore dans
nos églises pendant de longs siècles.
: J.-M. ABGRALL,

Chanoine honoraire .