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XXIII. .
NOTE
Sur l'église deLoctudy et la question des Templiers
. Ce n'est qu'aS-seh l'écemment, pal' suite d'une absence, que
j'ai lu une notice intitulée les enfeus de Loctudy insél'ée au
bu letin de la Société da mois de juin 1897 .
L'auteul' nous donne des renseignements tl'ès précis et fort
intéressants sur les enfeus existant.en c.ette église au siècfe
dernier. Mais il débute pal' quelques lign8s SUl' son histoire
et SUl' les modifications probables: d'après lui, de sa cons-
truction qui sont lellemellt en contl'adiction avec l'archéologie
et les documeut.s historiques qne, si \lons n'a\lons pas à nous
préoccuper de ce que ratiteUl; il pu écrire dans des publications
étrangèl'es à not l'e Soc.iét.é: il lIe nous parait pas devoil' en
êtl'e de même quand nons tl'ouYons ses allégations insérées
dans notre bulletin. Hâtons-nous de diee que l'auteur hésite
à affirmer et peétend n'avancel' qu'une hypothèse. NIais quand
l'histoil'e a parlé pal' des documents et qu'on n'en a pas de
contraires à pl'odllil'e, quand un monument a été autant
étudié par les La NIonnel'aye ct alltees archéologues dignes
de ce norn, il n'y a pas de place pOUl' les hypothèses de per-
sonnes mOInS ve['sees en ces mat18res.
Dans notre notice SUI' Loctudy, publiée par M. J. Robu
chon en 1.803, dans celle publié8 pal' llUUS dans le bulletin de
l'Association bl'eLonne de IR0iS, nous a vions, croyons-nous,
porté le dernier coup à la légende des Templiers à Loctudy,
suivant en cela . l'opinion d'hommes aussi indiscutés que
M. de la Borderie ct Ml\I. les chanoines. Peyron et. Guillotin
de Corson. Sur q Lloi appuyions·nous no tee aflil'mation '(
BULLETIN ARCHÉOL. DU FlNlSTÈRE. ,TO~Œ XXiV. (Mémoires). 26
Sur ce fait que rien au monde ne peut établir méme unè
présomption en faveur de l'établibsement des Templiers à
Loctudy. .
Les charles de Conan III et de Conan IV nous donnent
très exactement remplacement. des biens des chevaliers du
Teinple en Bretagne. Nous savons fort bien que ce.s. chal'tes
ont été rédigées ft lllie époque postérieure, mais elles le
furent SUl' des documents anciens, et les chevaliers de
Saint-Jean, héritiel's des Templiel's, avaient plus d'intél'êt
il grossir leul's biens qu'à les diminuer. Nous y trouvons
.que les seuls biens que possédaiLnt autour de Quimpel'
les Templiers à cette époque (1140, 1160, 1182), étaient
de fOl't peu d'importance et épars dans les paroisses
d'Edern, Ergué, Beiec, Cuzon, Saint-Thois, Plolléis, Pen
hars, Saint-Eval'zec, Plo7.évet, Plouhinec, Beuzec-Cap-
Sizun. Rien de Loctud v.
Il est vrai qu'on prétend que l'Evêque de Quimt>8e Ray-
naud, mis en possession de la collégiale de Loctudy par le
sÏI'e du Pont en 122b, aurait bien pu l'emettl'e lui-même cette
église aux chevaliers. Ceux-ci ne l'auraient reçue que
postérieurement aux chartes ci-dessus et ft la reCOll
naissance de leul's biens par les ducs Conan III et IV.
Quelle preuve en donne-t-o.n? Aucune. La preuve con
traire est qu'elle n'a jamais appartenu aux ~levaliers de
Saint-Jean, auquel elle aUI'ait été remise comme tous les
biens immeubles des Templiers lors de leut' suppression.
Nous savons en effet que ces biens fUl'ent intégralement
remis et que des commissaires fUI'ent chal'gés de ce soin. Le
roi Philippe Le Bel, apl'ès avole longtemps résisté au Pape,
finit pal' y consentie le 14 août 1312. Le duc de Breta
gne fit comme son suzel'aiu. Les commissaire3 pOUl' la . •
la BI'etagne furent, ceoit-on, les mêmos que ceux qui opérè
rent poal' la pl'ovince d'Aquitaine, dont la Bretagne faisait
partie. Ce furent le doyen d'Angel's, les chantl'es de Saint-
Mal'tîn et de la cathédrale de Tours, l'évêque d'Angoulême
Foulques de la Rochefoucauld, les doyens de Saintes et •
de Poitiers.
Nous avons recherché avidemment dans tous les ouvrages
pal'Us sur cette spoliation des Templiers, ainsi que dans '
les archives de Pal'is et de Poitiers, tous l'es documents du
prieuré d'Aquitallle pouvant nous éclaircI' sur la question
de Loctudy et celle du couvent des Cordeliel's de Quimper .
Nous n'avons rien trouvé.
A-t-on jamais Vil, du l'este, Iln Evêque t'emettl'e 'Une église
aux chevaliers du Temple? Ce Il'étaient pas des moines
desservant une église de monastèl'e on des chanoines de
n'étaient même pas des hospitaliel's comme
collégiale. Ce
les chevaliel's de Saint-J eRI1. Lem's églises étaient une .
simple annexe de leues commanJerics,. comme la chapelle
d\m château f8oJal , dcss81'vie pal' leurs chapelains. Ils
devaient, il est vrai, d'après la r'ègle que leur avait donnée
Saint Bernard, y réciter cel'tains offices, mais les exigences
de leur vie active et lenr médiocre ferveut' avaient peu à peu
fait négliger ce devoir religieux. D'autl'~ part les Evêques .
n'étaient pas si favorables à l'ordre du Temple trop riche,
trop indépendant, tl'Op peu clél'ical et quand celui-ci a
reçu des libéralités, c'était des souverains et des particuliers.
Les Evêques réservaient tout naturellement ce qui leur était
dont:lé pOUl' leut' clerg'é ou pour des ordres exclusivement
religieux. ' ,
Ces mêmes raisons nous paraissent démontrer également
qu'il n'y eut, quoi qu'en çlise le sieur Bougeant, jamais de
Templiers au château de Guy de Thouars avant les Corde-
liers . Nous ne croyons pas que jamais les Evêques, qui
n'avaient pas voulu y voir le duc de Bretagne et ses hommes
d'armes. y auraient admis les hautains et turbulents cheva-
liors du Temple. Du l'este, comme nous le disions plus haut,
aucun document né vient confirmel' ce dire de Bougeant qui
se borne à mentionner une tt'adition .
Avant de lajsser cette question des Templiers à Quimper,
rappelons que la commanderje des chevaliers de Saint-Jean
de Quimper, sise rue Vis, portait encore en 1617 le nom de
Temple de Saint-Jean, ce qui pl'ollve que primitivement l(~s
Templiers en avaient été possesseut's (1). C'était là, si on une
grosse commanderie, au moins leut' siège, leur centre dans
la l'égion. Ce qui prouveeneore une fois qu'ils n'eurent
jamais la possession du château de Guy de Thouars. Ils ne
pouvaient avoir deux établissements dans la même ville.
En résumé pou.r Loctudy aucune preuve ni commencement
de preuve, rien qui puisse établie seulement une pl'obalill~,
n'ont jamais pu être mis en avant. Quelques-uns ont affirmé,
comme Fréminville, d'autl'es plus moùestes ont fait des
hypothèses, c'est tout. .le crois qu'on peut considérer cette
discussion comme close .
Au point de vue al'chéologique, l'hypothèse de l'auteur
de la notice SUl' Loctudy ne nous pal'aît pas plus aec'eptable.
Nous ne pensons pas qu'aucun at'chéologue ait jamais trouvé
tt'ace dans cette charmante église romane de ce style judaii.que
que notre auteur dit propf'e aux constl'uctions des Templiers.
Pour tous c'est du plus put' -style l'Oman, ' comme Landéven
nec, Sainte-Cl'oix de Quimpel'lé, FOlleS!1ant, tou tes églises
construites à peu pl'ès il la même époque, et dont Landévennec
paraît être la mèee. C'est du bon roman, tel qu'on le rett'ou ve .
en Poitou particulièrcment, et l'église du Dorat a entre
autres de grands l'apPQds en son abside avec Loctudy. Les
Templiers ne sont point (l'auLI'e part les inventeurs de l'abside
en cul de foue t1anqu~e de c~l.lpelles absidales du même
(1) Il n'y avait à portel' le ' nom de Temple de, Saint-Jean parmi les
ûtabltssements des cheval iers hnspiL'lliel'" qne C~llX qu i venaient des che-
valiers du Temple. • ,
genee. Cette disposition est. peopl'e au rormm pur et sc
retrouve constamment dalls toutes les églises d'A<.juitaine.
J'en appelle à notre savant archéologue M. le chanoille
Ahgrall.
En ce qui concerne les chapiteaux que nocs avons tous
dessinés et publiés en lSDo rien enCûl'e ne peut flOUS donner
un commencement de pl'euve en faveur des Templiers, car
ceux-ci n'ont jamais eu le monopole des croix pattées et
quant aux personnages gl'o1esques où Fréminville a voulu
voie un chevalier ct llU chapelain du Temple, il faut en vérité
avoie une imagination fort riche pour les y reCOllllaÎtee. Ici
cncoee je ne crois p(1:-) qu'il puisse y avoir do doute.
Donc point de Templiers ni de remaniement de l'église
par leurs mains à Loc:luJy. Je crois que historiens et archéo
logues sont aujonrd'lltli ù'accol'd sur ce point. Mais il était.
nécessaire de le répéter après l'émission de Lhypothèse con-
traire dans le bulletin de la Société. -
E. DU CREST DE VILLENEUVE .