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Bulletin SAF 1897


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Corrections et additions à la note intitulée Pèlerinage des Sept-Saints de Bretagne

J. Trévédy

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lIT .

CORRECTIONS ET ADDITIONS

A LA NOnCE L\'TITULlŒ

La lecture du PèlerinŒ]e des Sept-Saints de Bretagne m'a
lu d'obligeantes communications qui permettent quelques
rectifications rI. additions. C'est un grand plaisir que de faire
un Jla~ rrrs la vérilé. Aussi je m'empresse de rectifier et .de
compJéll'r Ics pages publiées dans le Bulletin de 1896.
Sos I('ctcllrs s'uniront à nous pour remercier Dom Plaine,
bénédiclin, et M, l'abbé Daniel, curé-arcbiprêtre de St-Sauveur
de Dinan, président. de la Société Archéologique des Côtes-du­
Tord. M'l'crivant clu monRslère dr. Si1os~ province de Burgos
(E. pagne)~ D. Plaine me signale 'une note (le terme est trop
modestc) .'illl' ft',\j S('pt-8aints de R1'et({gne publiée par lui dans
la UNite dt' l'.tr' c!tn!licl1, lirraison d'octobre-décembre '1881
(p, 1,:30-1:37). Je "ais lui faire plus d'un emprunt. M. l'abbé
Da'niel Ill'a roumi des renseignements qui rectifient une
Cl'I'pm' f'1lI1H'unll péll' moi à Ull livre plein de la plus aimable

él'udilionpLlblié à Saint-Brieuc (2). Plusieurs renseignements
fOl/rnis par J'abbé Daniel, (lui me permet d'en espérer d'au­
tres, figureront daos l'étude que nous avons entreprise
ensemble SUl' le culte des Sept-Saints de Bretagne. .
Aujourd'hui il s'agit surtout d'un Erratum au Pèlerinage
d/'s ,"'('J)'-,~({ ill ts.

Page .206, j'élÎ dit que les évêchés de Saint-Brieuc et Tréuuier
(1) roir Hllliclin '18%, p. 203-234 ..
(':!) .1 l/,lII'c/'!; le /liell, v Saint-B1'ieuc _
SO'lluenà's et .1lonwnents, par le
l'l'gl'l'lLl' A. de la Villl'l'alwl ( IRD'I).

la même indication en ajoutant Saint-Malo. En parlant ainsi
des créalions de Nominoë, je suis M. de la Borderie. Des
objections sont faites. Il ne m'appartient pas de décider, et la
décision n'importe pas au point de vue du pèlerinage des
Sept-Saints.
Ce à.quoi nous devons nous arrêter, c'est que les Sept- .
Saints ont été, à tort ou à raison, considérés comme fonda­
teurs des sept évêchés, que chacun d'eux a été, comme dit
D. Plainé, une des gloires primitives d'un des sept évAchés,

. et que, à ce double titre, les sept ont été associés à des hon-

neurs collectifs. Rappelons que ces sept évêchés SQnt l'évêché
de Dol et' les six suffraganls de Dol, archevêché. Nous re\'i~n-
cIrons sur ce dernier point. .

Page 207,208, j'ai cité la phrase de Lobineàu .... lee Sept-

Saints sont ( les premiers évêques des anciens sièges bretons

en y joignant celui de Vannes (Saint-Patern) )) ; et j'ai indiqué
« saint Patern né à Vannes élait passé en
dans une note que
Angleterre, puis revenu à Vannes ». •
Ces mots sont à retrancher .

Ce prétendu voyage en l'île de Bretagne est une fable que
n'a pas admise la tradition du diocèse de v.annes.
Cetle fable a été imaginée dans le pays de Galles. Au IXe
ou Xe siècle, des Bretons d'Armorique,. fuyant devant les
Normands, passèrent au pays de Galles: ils y rapportèrent
la fondation de J.'évêché de Vannes par saint Patern. Les
. Gallois avaient. euun évêque du même nom au VIe siècle. Ils
fondirent les deux Patern en un seul, qUi venu d'Armorique
y serait retourné; et, après le 'départ des Normands, les
Bretons rapportèrent en Bretagne ce lrait jusqu'alors inconnu
de la "Îe de saint-Palern. . Cf. M. de la Borderie. Histoire
de Bretagne.!. 308 .

III.

Page 21L J'ai fait remonter un peu hypothétiquement au
XIe siècle l'origine du pèlerinage des Sept-Saints. Toutefois,
je ne pouvais invoquer un document écrit antérieur au milieu
du XIIIe siècle (12!~8) ('1) ; et peu t-être même pouvait-il être '
. contesté? Sur le sujet qui nous occupe, la Hote de D. Plaine
fouri'dl jusqu'à cinq documents, dont deux antérieurs au
XIIIe siècle. Je vais les passer en revue: .

'10 DaIls une vie de saint Genulfe ou Genou, premier évêque
de Cahors ou plutôt de Bourges, écrite au Xe siècle (2), on
trouve réunis les noms de trois des Sept-Saints bretons.
en danger de mort au
L'hagiographe conte qu'un jeune breton
de Saint-Gildas dans le Berry (3), fut assisté contre
monaslère
assauts.du dé.mon pm' t.rois saints évêques de Bretagne,
les
Paul, Malo el. Samson qui lui apparuren t ensemble.
De cc rapprochement. fait au Xe siècle des noms de trois
Sept-Saints de Bret.agne, y a-t-il une conclusion cl tirer en
des
ce qui concerne le culte colll?ctir des Sept-Saints? « Faut-il
voir là, se demande n. Plaine, uile première ébauche de la
c1é\"otion aux Sept-Saints de Bretagne? La chose paraît. assez
e; mais le texte ne renferme ' rien clans sa teneur
probabl
qui puisse nous éclairer d'une manière positive sur .
litlél'ale
de la dévot.ion ... » (4) Je ferai seulement remar­
les origines
quer que les trois saints bretons apparaissant au breton •
mourant loin du p,ays, sonLIes fondateurs de l'évêché de Dol

(1) P. 211 el ~2(l et ci-dessous p. 7(i,
('~) Acta S~. Bollnnd. T. Il. Jnnviel'. Vic de S. Gcnulfe. Liv. II. n0 ' 17,
p. 4ri5. D. Plain<>, p. 4i!2 el 433. Sa inL Genulfe yivélÎl au Ille siècle.
~:J) ~LI I:Olll cie sainl Uilclfls de Hhuys, dont les reliques avaient été
e~~,pol'tees I~ pendnnl l'ill\'asioll normande. Alberl Le Grand. Vic de saint
f.,"t1as, !J. 1/, nole 1. . .
(.-1.) D. Plainf', p . • 1~1;!.

et dc deux évêchés à ce moment suffragants de l'archevêché
de Dol.
Mais voici d'autrcs documents .

';2n Au dernier folio- d'uJ manuscrit de la bibliothèque
nalionale, dit Codex p:trisiensis, on lit en caractères dl1
XIIe siècle:
Nomina seplem storuill (sanctorum) Britannie
Briocus Samson Machutus seu Maclovius PatcL'l1US
CorenLÎnus Paulus Tudualus.
Pas d'autre renseignement llVIais celte brèye indicalion n'est
pas sans ' intérêt. Voilà, dès le XIIe siècle, la liste de nos
Sept-Saints dressée; et la voilà close! Allelll1 d'eux ne cédera
sa place à un sai:ll nouvellement canonisé, et pour une raison
bie] simple: parce que aucun de ces saints n'aura le litre
de fondateur d'év~~chés bretons.
0 1', nous ne pouvons clouter que chacun des Sept-Saints
n'eùt, et: depuis longtemps, lI :l culte particulier dans son dio-
cèse, sinon dans plusieurs ou même en toute la Bretagne. Mais
cette .'}lfUTJgatio.'L loute d'honneur des Sept-Saints les a mis, si
l'expression m'est permise, hors de pairs. Est-il téméraire de
croire que dès ce temps, c'est-à-dire au XIIe siècle, la ségré-
gation a eu pou r conséq ueace le culte collectif: des aulels ou
des chapelles sous le vocable des Selit-Saints de Bretagne '?
Ce culte collectif ne s'est-il pas maoifeslé par la d.!votion en
usage à cette époque: la risiLe aux reliques et aux sanctuaires
des Sept-Saints, eu d'autres termes, le pèlerinage des SP]Jt-
Saints?
-Les acles qui suivent donneront peut-êtrp, la réponse à cetle
question. _.

3 Le 4 des ides d'avril ('10 avril) 1210, Guillaume Le Borgne .
sénéchal de Goëlo, fait son testam ent. 11 fait beaucoup de legs

drux pour (l le salut de son âme, de celles cie ses parents At
de ces legs, je relèYe celui-ci :(( Aux abbayes de Bretagi1e et
aux églises (pcclesiis) des Sept.-Saints cent livres (environ
10,000 francs monnaie actuelle) R partager entr'elles ('1) )).
Je traduis le mot ecclesin par r!gtise, selis dans lequel le mot
cs!. employé en (l'autres legs, où l'on ne pourrait subslituel' le
mot cllIJdla traduit par cikl}JL'lle (( petite église qui n'est
paroisse, catbédrale, ni prieuré)). Mais, ai-je bien traduit?
n. Plaine traduit par (C toutes les églises placées sous le
yocable des Sept-Saints df~ Bretagne ». Mais ceUe inlerpréta­
tion~ qui appellerait au bénéfice du legs les chaîJulles dites des
."·(JIIf-Saints, n'exclurait-elle pas les sept églises, stations
principales du pélerinage? En effet, si ces sept églises (sauf
cio Saint-Brieuc) ont. pOLIr patron un des Sept-Saints,
celle
110, po;'!.e le yocable r;olll'cti( des Sept Saints.
auculle
~lais chaculle L!ps cathédrales el l'église saint Patern de
rannes, n'onl-elles pas une ehapellp, un autel, un lIIemunto
qlll'iconque des Sept-Saints? N'est-ce pas à ces chapelles, à
(:ps ilulpls t!ps Sl'pt grandes églises que le testateur a pensé
pluttil qll'Hux rllnpnllcs r!lrales "ouées aux Sept.-Saints'? (2) .

(1) La dnle I~Lï cl. non 1~:2;, il son inl.érêl.
/). l'iaint! il imprimt"! J~~;" Je baron de Courcy de mème. (Armor ial l,
p. J::!O.) Le testamellt porte la date 1~15 (Moriee, pl'. l, H28) et il est plDCé
l'litre dCIiX nhhayes dc Brctagne. V. Beauport. 'Ilist. II, p. CXXXV.) Le (Jallia (;11I'is­
tifl/ut dit ()l1~:-;i I~tr), l'Il cit.ant le testament (XIV, col. '1 '1 lU ).
(j~lillilllnll' Le Borgne étaitlln important personnage. En mourant (1212j,
Alalll. ('omle fic Pl'nthihrr, le donna pOlll' tlltellr ;\ son fils Henri. Celui­
t'i h{'rita de son pt\re tOllt l'npnnage rie Penthièvre; mDis Pierre Mauclel'c
lui enlC\ël aussitôt le eomtt\ dl' Pen Lili i!\ï'e. A la daLe oü nous sommes
(I~I~), Yl'lIri ~,o.~St·'ililit ell(:(~re le cOIllLù de Tl't'guicr (Lannion, Gu ingamp,
~llnIIJl'l(1I" rL Col'lo, compost' des qllatre châtellenies de Quintin Châte-
L;~JlYo!lon. el Paimpol). En l~~:l, Pierre Mauclerc réduisit DU seul
1',"ldl'cn,
C,ol'lo lIenrl qUI pl'IL 1(' n01l1 d'AYilligour, nOI1l d'ulle seigneurie de Goëlo .
. (~! L.e tc::;tal~ICI~~ cO~1Lil'nt deux ~lUlt'es legs ainsi cunçus (ec sont les pre-'
IIIIt I~). (1 ,\fI ,,'rllflt'atlOlwlIl ce('lc~It' B. Brioe: (saint Gllillallme, nomméen

Nous allons voir deux aut.res testat.eurs léguant clans les mêmes
Le Borgne; mais avec une addition qui
termes que Guillaume
ne laissera aucun doute sur leur pensée.
DiJ reste, il ne s'agit pas aujourd'hui de l'attribution du
)rgs. Ce qu'il nous faut rele;lir du testament de Le Borgne,
c'est que, en 12Ui, i'ly avait sinon des églises ou des cha-

pelles - dédiées aux Sept-Sai:1ts, du moins dans certaines
églises des autels ou chapelles sous ce vocable; que le culle
collectif des Sept-Saints existait, et qu'il était en faveur
puisque des legs en assuraient l'exercice. De l'existence et de
la popularité clu culte colfecti/, est-il téméraire de conclure au
pèlerinage populaire?
2l'1-22G, j'exprimais, non sans quelque hésitation, la
Pages
pensée que le tl'one des ]ièlerins placé dans l'église Saint­
Corentin de Quimper recevait, dès 1248, les offrandes des
pèlerins des Sept Saint.s. Après le testament de '1215 le doute
ne m'est plus permis; et personne, je pense, -n'hésitera quand
il am3 lu les pièces qlli suivent.

~_o Voici un second testament, postérieur de -'tO ans ': il est
de l:2;)(, ('[). C'est le testament: de Geffroy dela Soraie, che­
Il demeure à La SOl'aie, paroisse de Quintenic (aujour­
valier.
de Lamballe). Mais il a des biens en plusieurs
d'hui canton
paroisses des environs notamment à Saint-Alban et à Saint­
Jacques d'Henansal, sur la roie que sùivent les pèlerins des
Sept-Saints ent.re Saint-Brieuc et Saint~Malo Ol! Dol. Il les a
YUS passer som'elH, peut-être rnême (qu'en savons-l)ous?) les

a-t-il accompagnés? Quoi d'étonnant que dans ses legs pieux
il songe aux Sept-Saints?
1'2'2U, ~lIait reconstruire l'église): L lib. Ecclesie S. TugduClli, XX lib. l)
Pour le testateur ecclesia B. Jl1'ioci est la cathédrale cie Saint-Brieuc,
bien qu'elle n'ait pas le vocahle de saint Brieqc,
( L) D. Plaine, p. - 134·.

Voici un extrait de so n testament: ('1) « A l'église lecclesia)
de Saint-Brieuc) XIrdeniers; à la chapelle (capella) de Saint­
Guillaume, XII deniers; à chacun d8s Sept-Saints de Bretagne, .
XII deniers; à chacun de leurs sept sacristains (servientium),
six deniers; à l'église de Henansal, XII deniers .... n
Il distribue ainsi XII deniers à neuf. égl.ises. N'est-il pas
clair que par les mots Il chacun des Sept-Saints il faut en-
à l'église cathédrale ou principale de chacun des Sept­
tendre
Saints; et le legs fait aux sept sacristains de chacun des
sept-Saints ne rend-il pas cette interprétation certaine? (2j
S'il Y a sept sacristains c'est qu'il y a sept églises; et ces
sept églises sont les sept stations du pèlerinage des Sept-
Saints ..

5° D. Plaine cile enfin le testament de Roland de Dinan (3).
Ce testament est du 1 mai '1303. II est écrit en latin: je
traduis mol à moL.: « Aux Sept-Saints de Bretagne, à chacun
t1'eux, deux sous, à chacun des sacristains d'eux douze
ueniers (II) )), c'est-à-dire au sacristain de chacun des SepL-
(1) Ill/ciel/s é/lêchés, III. p. '127. Dans uue note les savants auteurs
nOllllllent les Sept-Saints et ajoutent: « Ils avaient une église élevée en
. leur honneur de Dinan les ('estes d'un chemin pavé qui y condu isait. » Cette église
Imiqu.e aurait donc été élevée non loin de Dinan. Tout cela est el'l'oné, et
preuve de J'erreut' se trouve dans le nom populaire de Tt>o-B1>ei1. ou
1'ow' de lJ1'etayne donné au pèlet>inage, et dans le legs même fait aux
Sept-Saints : « Unieuique VII Sanctorum Bt'itannire XII denal'ios et
unicuique septem sel'vientium sex denarios » Sept sacristains des Sept­
Saints, uonc sept églises.
Il y uvait nécessité de relever celteetTem' Ù'UII savan t livre qui fait
j ustellien tau tori té,
(~) Les expressions de La SOl'aie l'approchées de celles de Le BOl'gne me
semblent un argument en faveur cie l'interprétation que j'ai donnée plus
llaut au legs Le Borgne .
. (J) D. Plaine, p. 435.
(1) Anciens ,évêchés, VI, p. 2 '1~, Le testament écrit en latin: (c Item'
Britannirc cuilibet eOt'UIl1 duos soliclos et cuilihet famulo
eptem sanclis

SaÎuls, on plùlàt de l'autel des Sept-Saiuls dans l'église de
chacun d'eux.
Le sens de ce legs est exactement le même que celui du legs
fait par Geffroy de la Soraie. .
"CommeLa Soraye,RolIandIIdeDinan était voL~in de la roule
que suivaient.les pèlerins des Sept-Saints. Il gardait le nom
patronymique de Dinan; mais il était seigneur de Montafi- "
lant, en la paroisse de Corseul; or les pèlerins traversaient
sa seigneurie et passaient même au pied du château de Mon-
tafllant ('1), quand ils allaient de Lamballe à Dol par Corseul,
ou quand ils venaient de Saint-Malo vers Vannes. "
Lorsqu'on voit ces legs faits presque dans les mêmes termes
des gentilshommes du même pays, on se demande si cette
par
« à chacun des Sept-Saints, à chacun de leurs sacris­
formule:
tains}) n'étai-t pas devenue de style. "" Du moins pouvons-nous
en conclure l'existence non cie sepl églises sous le vocable des
Sept-Saints; mais d'un autel ou une chapelle et un sacristain
cie son service dans chacune des églises pri nci pales du
chargé
diocèse ùe chacun des Sept-Saints, stations principales du pèle-

nnage.
Reslerait-il un doute sur l'existence du pèLerinage à celle
époque ?. Les acte.') de saint Yves vont le dissiper.

6° L'enquête faite pour la canonisation de saint Yves est
peut-être le plus ancien monument mentionnant eXiJr'ussément
le pèlerinage des Sept-Saints. Celte enquête se fit du 23 juin
eorUIn duoclecim .clenal'ios. » On a traduit: « Aux Sept-Saints de Bretagne,
il chacun cieux solidos, et à chacun cie leurs fam iliers douze den iers. "
.. Les Dinan, p. 75, pal' Mme la comtesse de la Molte-Bouge. Qu'cst-ce
le soliclos ? C'est le sou ((solùlus, dont solidos est l'accusatif plui"iel).
quc
Mais pellf-ol'l LriJuu il'e tamullis par /am-ilic",', comme (anâlia-ris? Assuré­
ment non Falllutus est pris ici uu sens de se1'lJ'iens clans le tcstalllenl de "
. la Soraye : se1'uilw" ,' ; 01', le SL'rv iLcllr de chacun des Sepl-Sa ints,oll pluLôt

de son auLel, c'est le sacl·istain.

(1) M. du Mottay. !lec/tel'chrls s/U'les lIoies ,·ol/w.ines, p. 1':!8.

'lU'" aoOt '1:3:)0; mais les témoignages se rapportent naturel­
Yoici trois dépositions que nous indique D. PI.aine, et que je
lis aux Bollandistes. .
'10 Hamon de Toul-EfIlam, en Pleslin, âgé de GO ans ('1).
Serviteur (famulus) de D. Yves pendant plus de quatre ans, il
Je quitla pour aller pendaut un jubilé au tombeau de saint
Pierre et saint Paul, puis cl saint Jacf[ues de Compostelle. Puis
il rcpril SOli service chez D. Yves. Pour un tel pèlerin, le
1'0111' dl' UI'f't!I:J)U~ n'était qu'une promenade; il le H .t plusieurs
roi~ pt, ù son dernier retour, il trouva D. Yves pris de sa der­
nii'l't) maladie. C'est-~l-dire que Hamon revint entre le 15 et
leW mai -1303, qui furent le temps de la maladie du saint
curé de Lohannec (2).
:2 Margile, femme de Thor fils, de la paroisse de Lanmeur,
~[ahaut, femme de Bivallon Leyzone, de la même paroisse,
le pi'lcriuage aux {wsiliqlll'S des Sept-Saints. Entre Tréguier
pt Lallllioll, elles rencontrèrent D. Yves et firent arec lui
prl's d'une demi-lieue jusqu'à sa maison de E-ermartin. Le
témoill rapporte ce fait au lundi de la Pei1tecôte trente ans
auparavallt, c'est-à-dire 1299 ou 1300.
a Ellliu un témoin (4) déposé que, parmi les pauvres rece­
yauL lIU jour l'hospitalité du saint, l'un se mit à dire qu'il
allaiLIaire le pèlerinage de Saint-Jacques en Galice ou celui des
Sept-Saints (le témoin ne peut dire lequel); et saint Yves
voulut lui ml'me « graisser les souliers » du pauvre pèlerin.

TOlls ccs faits sont antérieurs à 1304. •
D. Plaillc rcmarquc avec raison le mot basiUques employé
tIans lu secullcle déposition; ce mot ne s'emploie qu'au sens

(1) BollilllÙ. mtli, p. 5.18, 5.1.\), 11') ':21.
(:!) Albert Le Grand, p. 'no. Ed. de I{el'danet .
(3) Bolland. Mai. p. !lSS. 11° 4:J.

(4) Bolland. l\'lai. p. f);,i. n° !lI.

« d'église cathédrale où l'évêque siège en personne ll. Or, des
sept églises but et stations du pèlerinage, six élaient épisco-
pales. On ne peut donc dout.er que le témoin ne par:e de ces
églises .
Mais est-ce à dire que le pèlerinage aH commencé au temps
de saint Yves? Un savant jésuite brelon, le P. Champion, né
à Nantes, vivait en Bretagne, il y a plus de deux siècles. Il
fut consulté en 1683 par les Bollandistes sur le pèlerinage des
Sept-Saints. Il · donne leurs noms et les églises stations du
pèlerinage; il ajoute que « ce pèlerinage fut surtout fréquenté
et suivi au temps de .saint Yves (1). »
Ainsi la grande vogue du pèlerinage, vog,ue qui durait
la fin du XIVe siècle, aurait commencé dans la
encore à
seconde moitié du siècle précédent, au temps où La Soraye
faisait son testament ('1256): mais ce n'est pas en un jour
ni en quelques années que peut s'établir un h10uvement

populaire déplaçant chaque année des milliers d.'hommes .
Nous sommes donc induit à dire que le pèlerinage avait
commencé avant '1256, et sans doute avant 1215, dale du tes­
tament de GuillaumeLeBorgne, c'est-à-dire vers le XIIe siècle,
époque où le Codex pal'isiens.is donne, comme nous l'avons
YU, la liste des Sept-Saints de Bretagne .
De ce que nous yehons de dire, nous croyons pouvoir con-
clure: . . .
'10 La dévotion collective aux Sept-Saints de Bretagne el le
pèlerinage étaient en grande faveur au temps de saint Yves

2 ' La dévotion et le pèlerinage existaient certainement dès
les premières années du XIIIe siècle '1:215, et probablement
à la fin du XIIe, Cl'IXlnt la suppression de ['archevêché de Dol,

(f) 'Nole imprimée 11/ fine des Acles de Saint-Yves. Bollandistes Mai.
1': 4l\ l r:: .
p. il- u. no e il •

1199, c'est-à-dire avant la Hn ,« du procès de la métropole qui
du rait depuis plus de trois siècles (1) ».
, Ces résultats nous paraissent certains. Mais nous ne vou­
lons pas dire que le pèlerinage à Dol et aux six églises des
évêchés suffragants de Dol ait commencé seulement à cette
époque; et, pour les raisons que nous avons données dans
er mémoire, il nous semble que le pèlerinage était
notre premi
déjà ancien en H99.

Mais cette dernière déposition si instructive ne me rassure
pas contre la crainte d'avoir comm is une erreur.
Sur la foi d'un auteur érudit (2}, j'ai nommé saint Yves
parm i les pèlerins des Sept-Saints (3) .Les actesde saintYves ne
constalent pas ce fait. D. Plain em'apprenc1 que saint Yves a
de Sa int-Ronan (Locronan), en Cornouaille.
faille pèlerinage
M. l'abbé Daniel me le montre pèlerin à Saint-Corentin de
Qu imper et,surla route de Quimper: à Saint-Théliau (Lande­
leau), eniin à NoLre ,Dame de Qu intin. Il est difficile de croire
que les témoins de l'enquête, s'ils avaient su que saint Yves '
eû t accomp li le pèlerinage des SepL-Sa in ts, n 'eussen t pas
le fait. En tout cas, dans le silence gardé par eux
mentionné
à cet égard: nous devons nous garder de l'affirmer.
Page 2'19 . Sur la foi d\lI1 auleur qui connaissait bien et a
le vieu:]; Suint-Brieuc J"ai sio'nalé la
merveilleusement décrit
fontaine Notre-Dame comme alimentant le lavoir (ou selon
l'expression populaire) le rlOtwt des Arden ts. M. l'abbé Daniel
m'apprend que les renseignemen ts donnés par lui-même sur le
dOHet des AJ'Je/lts ontété mal à propos rapportés à la fontaine
('1) .J\'Iorice. Cat. des évêques, IIist. II, LX. . .
(2) M. de la Villcr~bel. A f1 'ave1'S le V'jEu X Saint-Ih'ieuc, p'. H4·.
(3) Page 79. .
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. -TOME XXIV.:Mémoires~. 6

Notre-Dame: ils se rapportaient à une autre source distante
cent mètres.
d'environ
A cet endroit, il ya deux sources, qui forment chacune une
fontaine, l'une à droite, l'autre à gauche du chemin. La fon-
taine de gauche, en descendant quand on vient de Notre-
Dame, coulaiL dans un lavoir. C'est la fontaine et. le douet des
A.rdents. La fontaine de droite est celle où, d'après la tradition·,
saint-Brieuc puisa le jour dè son arrivèe en Armorique: elle
garde le nom de fontaine de saint BrieLlc (1) .
A la phras.e ; (; 'Les ca ux limpid es sont reten lles dans un
bassin .... etc. », il faudra substiLuer celle-ci:
« Les pèlerins ne manqueront pas de déscendre quelques
deux cents pas plus loin pour visiter pieusement, sur la droite
du chemin, la fontaine de sain t Brieuc. C'est à cette fontai ne
que, le jour de son arrivée', le saint apôtre puisa avec ses com-
pagnons, Vis-à-vis. à gauche du chemin, ils verront une autre
fontaine alimentant un bassin entouré d'UD banc de pierre.
des pèlerins est de s'y baigner les pieds. S'il en est
L'usage
parmi eux qui soient atteints du m ~ll des Ardents, ils ne man­
pas l'occasion. Cette fontaine "et ce lavoir sont la fo n-
queront

taine et le clouet des A 1'dents. » .

Page 220. Dans le texte, j'ai écrit: « Dans la paroisse de
Morieux, nous trouvons une fontaine des Sept-Saints. » Je
n'ose, jusqu'à plus ample informé, garantir l'exactitude, de ce

renseignement.
('1) Ce nom se trouve dans l'ItinémÎ1'e de BI'eta[jne cie Nico las Baudot, sei­
du Buisson, que la Société des Bibliophiles bretons va impl'inler ;
gneut'
et la tradition a gardé le nom de Saint-B1 'ienc il la fontaine qui vient
. d'être « comblée yandaliquement ». (M. de la Borderie Hist. de B'I'elayne, .
, p. 30!), note 4.) Les tmces des cieux fontaine5 subsistent, et j'ai expr imé
le vœu qu'un signe (une croix) marquât la place de la fontaine de Sainl­
B1'ieuc. Ce sera la réparation insuffisante de cet acte de 1 andalisIJ'I;e.
On trouvera plus dedétllils clans mon opuscule Fontaine de Saint­
B1°'ieuc, Fontaine NotTe-Dame, Chapelle Not'/'e-Dame de la Fontaine,

~iê!1le page. Note sur l'hôpit.al des Ponts-neufs fondé en
EtIace!' cetle phrase : « M. Habasque prend ..... le comte
Jeh an cie Bretas'ne pou r un duc de Bretagne n. Non, M. Habas... .
que n'a pas commis eette erreur. Seulemen~ il ne dit pas qael
est ce com te Jean (le Bretagne. Pour les copIstes de M .. Habas-
que, c'est une énigme. C'est pourtant bien simple. Le comte '
Jean de Bretagne, en 1397, était le fils ainé de Charles de
B\ois el de Jeanne de Penthièvre, que la mort de sa mère ('138!j,)
avait fait comte de Penthièvre.

NOLIS l'avons vu plus haut, le plus ancien document donnant
la liste des Sept-Snints de Bretagne est du XIIe siècle. Est-ce
à dire que ce document est contemporain de la formation
de cette liste'? Assurement non. Il est donc permis
originaire
cI'essa~'er cie percer les ombres (lui couvrent les orig ines du
culLe coliecLif ùes Sept-Saiuts .... Essayons.

Des sept évêchés dont les Sept-Saints sont censésfondateut's,
le septième, Vannes, est d'ori-
six sont ù'origine bretonne, et
gine gallo-romaine.
Comment expliquer l'admission du gallo-romain PaLern
parmi les « é\'êques)} venus de l'île de Bretagne avec les
émigrés bretons? Serait-ce parce que Pateri1~ né en Armo­
rique, avait passé en Bretagne et 'en est revenu à l'appel de
ses compatrioles? Cette circonstance fabuleuse nous l'avons
YU (L), ne suffirait' pas à transformer le ga llo-romain en
brelon.
. Pour être admis sur la liste d'honneur cles saints cie Bre­
tagn~, il fallait à saint Patern un autre titre. Peut-être les
faits que je vais exposer nous le révè'~eront-ils ? '

(1) Ci-dessus, p. 72.

C'est au milieu du VIe siècle que saint Samson, évêque dans
• l'île de Bretagne, débarqua en Armorique ct fonda un monas-

. tére à Dol (~48 ) ('1). . .
Samson exerça l'autorité épiscopale sur touL le littoral de
la Manche, depuis le Couesnon, qui sépare la Normandie de la
Bretagne, jusqu'au Queffleut qui tombe à Morlaix. Ce diocèse
d'une cinquantaine de . lieues de long semblerait aujourd'hui
tl'Op vaste; qu'était-ce donc au VIe siècle?
Il Y eut nécessité de partager l'administration religieuse de
ce territoire où les apàtres hretons avaient encore tant de con-
quêtes à faire: de là l'institution de vicaires de l'évêque deDol ,
dits éDèq1U?S régionnaires, co-Jüéqaes, ab/JI!::; (!uéques, chefs cie

monastères ayan t les pouvoirs épiscopaux (2). Si ces co­
évêques n'eurent pas cI'abüt:d de résidences fixes, il semble
naturel qu'ils se soient tenus d'ordinaire dans les grands
de Saint-Malo, Saint-Brieuc, Tréguier. Quant aux
monastères

limites de leurs juridictions, elles ne fLll~ent pas fixées; mais
on ne peut douter que peu à peu elles durent aCCJuérir pal' la
coutume et l'usage une certaine fixité. .
du IXe 'siècle, trois siècles
Transportons-nous au milieu
après saiI)t Samson. Nominoé n'a pns encore étendu sa puis-
(1) Beaueollp des renseignements qui suivent sont empruntés à l'An­
nUai1"e historique de M. de la Bordt>rie (1862), p. '168 à 188.
(2) Évêques régionnaires, sans 'ln évêché limité. Il se passa alOl's ce qui
se passe de nos jours. Quand Rome enyo ie un missionnaire en pay's non
encore ouyerl au GllI'islianisme, elle lui clonne pouvoir épiscopal SUI' toules
les chréLienlés qu'il pourra fondel'. Quand on regarde la- carle des évèchés
brelons, on est lout cie suile frappé cie la configu ration singulière cie
deux diocèses notamment, ceux de COl'l1ouaille et de Saint-~'l(]lo. Le
diocèse de Cornouaille a une pointe jusqu'auprès de Qu intin (Côtes-du-Nol'e!)
et Pontivy. Le diocèse cie Saint-Ma lo côtoie la rivière d'Ousl cie Josselin
au S. O. de Ploërmel, et la Vilaine d'au-dessus de Bedon à trois lieues cie
Rennes. Ces limites marquent appl'ox imalÎ\'ernent les conquèles des' fon­
des évêchés et de leurs successeurs avant le milieu clu IX" siècle .
dateurs

sanie main SUl' les évêchés de Rei1l1eS et de Nantes: mais il
lirnll reste qe la Bretagne, les quatre évêchés de Vannes,
Léon et Dol. .
Cornouaille,
POUl' être maître che:: lui, Nominoé cloitdétruire l'influence
des Francs dl Bretagne; les évêques sufIragants de Tours lui
un obslacle; il obtient leur déposition; et il fait de
sont
sa Bretagne une province ecclésiastique dont la métropole est
Dol. Mais la province de Tours était l'ancienne troîsième Lyon­
l\aise comprenant la Touraine, le Maine, l'Anjou, la Bretagne
la Loire. Comparée à TOUfS, la nouvelle métropole
juslju'à
avec trois suiIragants seulemeilt fera mince figure. Nominoé
nl dédoubler ce nombre de trois. Il ne touchera pas aux évê­
de Vannes, Cornouaille et Léon; mais l'évêché trop·vaste •
chés
de Dol va être coupé en (luatre. Les évêques aux iliaires de~
viendront évêques, avec résidences fixes, de Saint':'Malo, Saint­
Brieuc, Tréguier; el ils auront pour diocèses avec limites désor­
mais fixes (pt (lui subsisleront pendanll1euf siècles et demi),
Il's Ll'rritoi\'(ls SUl' lesquels ils ont ex.ercé un pouvoir délégué
de 1'(. n\<] u() de Dol. La prorince ecclésiaslicjue de Bretagne
~I'ra aillsi de sept érèchés (1). ç •
Dalis CP pariage, l'é\'(lque de Dol devenu archevêque est Je
moins bien alluli, il n'a que 42 paroisses environ autour de
(1) El scpt c'c . .,L Ll'op pcu 'sclon l'aris (lu pupe Nicolas I. Lire sa qua­
tl'ii'nw IcUl'e Ù FcsLinicn, l!vèque de Dol (an 866) Moriee, P,'. I. 320. Voici
le sens tl'une phrase: « \'ous n'aycz (en vous comptant) que sept évêqu es
Pl \ïHIS prcncz Ic LiLl'c cie métropole ~ Mais pOli l' qu'une église soit dite
IH "trojJolc, il faul qu'ellc s:liL la mèl'c non dc sept mais cie douze éyêchés:
c'csL la l'l'glc tprceipialul'.) »
. C'(!sL pUUI'ql.lOi Nicolas Irr défcnd à FesLini en cie prendre, au moins jusque
a plus ample JI1[orll1aLIOn, le Litl'c dc môLropolitain.
A pl'OpOS de ce nomhl'c dO/{kC, lc pape se réfère sans doule il l'état de
~Ii().!"rs cX~5lilnL en lLalic cL dans le midi cie la France, (Ill les évêché!l
l'liIICI1.L IJlcn. pl,u Jl:ulLipliés que clans le nord. Ce qui est cUI'ieux c'est
qlle 1 iI.l'che\'eclle de foul's, pOUl' lcquel le Pdpe prend parti contre D~l nc
l:OlllpLill.L p;~s l,CS I/o/{<. ::, év(~chés ; mais seulcment neuf avant les créa tions
de ,NOJ~)JllOC :. f.ours, Le Mans, Angers et les six; évêc h és bretons. .
(Inlllèl ClmsLlana. XIV. . ..

sa ville, apparemment le territoire dont il 'avait gardé en
mains propre.s l'administr.ation. Mais son 1 i tre cIe métropoli­
tain est une compensation
Les trois nouveaux évêques de Saint-Malo, de Saint-Brieuc
et Tréguier, anciens auxiliaires de l'évêque, devinrent suffl'a-

gants dévoués de l'archevêque. Les évêques de Léon et de

.comouaille isolés de Tours suivirent leur exemple. Y eut-il
quelque hésHaLion de la part de l'éYêrIUe de Vannes, qU.e la
Vilaine jusqu'au dessus de Redon séparait seule de Nantes
étroitement att.Rché à Tours? On le croirait quand on lit le
Le Graild que nous ayons donné plus haut, et
récit d'Albert
.qu'on voit l'image de Alain Bouchard, que nous avons décrite .

Pourt.ant il n'y a guère d'apparence: l'évêque venait d'être
ou par Nominoë ou sous son influence par le chapitre
nommé
de Vannes, en rr.mplacement d'un simon- iar{ue déposé. Quoi­
qu'il en soit, l'accord se IH., et les successeurs de saint Patern
furent au nombre des six suflragants de Dol.
Mais l'imitaLion de Tours au profit de Dol -pourait ètre
poussée plus loin. Les érêques bretons se chargèrenL de ce
soin et la piété des fidèles leur vint en aide .

Les sept fondateurs des évêchés et des sièges épiscopaux
de Bretagne sont depuis lo ng temps en possession d'u n culte
particulier. Une des principales manifestations de ce culte

c'est en chaque diocèse la visite aux reliques du saint pieuse-
ment gardées dans son église. A ce LiLre, la cathédrale de Dol,
possédant les reliques de saint Samson derait recevoir les

pèlerins non seulement du diocèse rétréci de Dol, mais aussi

(1) Il est vrai que Dol avait danscl'nuLres diocôses des enclaves qui
dédoublaient son territoirc. Au diocèse cl&! Sa int-Malo, 22 paroisses; dans
Saint-Brieuc, 12; clans Tr-éguier, 7 ; dnns Léon, '1 (Evéchés de fl1'eÜtfj1lC,
1 p. LVII); dans Rennes, :3; enfin au diocèse de Houen, à l'enLrée de la
Seine, 4 (Annu(~iTe histm'iqne, '1862, p. '184-). En tout 49 paroisses encla,­
vées. Cet état clc choses Cl duré jusqu'à la Révolution,

des trois nom'eaux diocèses qui firent partie de l'ancien dio­
cèse. Mais, l'église de Dol deyenue métropole, ]e fondateur
de l'église n'a-t-il pas un nouveau titre à cet honneur?
A Tours, le tombeau glorieux de sain t Martin reçoit la
pieuse yisite de toute la province ecclé.siastique. N'est-il pas
naturel que tout.e la province bretonne visite les reliques de
saint Samson?
Or Dol est à une extl~émité de la Bretagne. Pour accomplir
le pèlerinage de Dol, beaucoup passeront par les autres
dioCl'SCS, non loin des églises où sont vénérées les reliques
des fondateurs de ces diocèses. Prenons par exemple le
pi1lel'in de Léori ; il traversera l.es diocèses de Tréguier, Saint­
Brieuc, Saint-Malo. Ne se détournera-t-il pas de. son chemin
pour aller saluer chacun de ces saints dans son église?
La yisite faite à Dol, les pèlerins reviendront-ils chez eux par
le mf'me chemin? Pourquoi, quand ils peuvent ]e taire sans

allonger de beaucoup la route, ne visiteraient-ils' pas les
('glises dps autres saints de Bretagne? Quelques lieues de plus
u'l!tTraieroIlL personnr à une éporjue où les pèlerins yont
à pied cl Rome, à Saint-Jacques en. Galice et même à
Jérusalem!
Xe peut-on pas expliquer ainsi l'origine du culte et du
p(llcrilHlgr des Sept-Sainls cie Brelagne,.fondateurs des sièges
rie Dol cl de ses sh: sufJl'agants au nombre desquels saint
Pa lem? .
Or, au temps où nous nous reportons, à la fin du IXe siècle,
la Cabl .. tiu yoyage de Patern en l'lle deBretagne était inconnue.
CP n'est donc pas son retour à Vannes qui l'a assimilé aux
éyt"lJlH'S yonus de l'l!r. Saint Patern n'est-il pas monté au
rang des sainls brrlons au litre de fondateur d'un éyêché suf­
fl'aga n 1 do Dol ?
Il. Y a bien apparence. Rennes et Nantes s~ront quelques
annees plus tard en la possession de Nominoé : or, les fonda­
teurs censés de ces deux éyèché~ ne seront pas associés aux

honneurs exceptionnels rendus aux Sept-Saints de Bret.agne.
Quel est le motif de cette exclusion? Est ce leur qualité de
gallo-romains? Non, elle n'a pas été un obstacle à l'admissio n
du gallo ·-romain Patern. La raison , c'est que les évêchés
fondés par eüx n'ont pas été co mpris dans IR province de Dol.
Pour nous, aucun douLe que si les évêchés cie Re nn es et de
Nantes étaient devenus suffragants de Dol, il y aurait eu ne 'i
. Saints de Bl'etag!~e. . .
On sait à quels débats donna lieu en tre Tours et Dolla créa­
tion de l'archevêché: ces discussio ilS qu'0;1 a nommées le
Procè;-; de la '/"rtélTOjlole bretonne ne finirent qu'en '1'199, par la
suppression de la pi'ovince ecclésiastique de Bretagile ; mais
ces débats commencés dès le temps de Nominoé furent SLlS-
pendus pou r un siècle. .
rmé les yeux (8;H) que les Nor­
A peine Nominoé a-t-il fe
envahissent la Bretagne. Ils yorlt la clé oler ju sq u'en
mands
936. Ces barbares détruisent les ég lises, les monastères et les
es sainLs. Emportés par des mains pieuses, les
reliqu es d
saints brelons troll ren t as ile bieJ loi l1 sur les terres c!(\' francs;
mais, les Normands parLis, nombre cle nos sa ints e\ il és ne
reviendront pas sur la L erre breLoi1ne: les dépositaires, par
un pieux abusde confia nce, s'obstineat à les ga rd er ,
C'est seulement dans 'la seconde moiLié du Xe siècle crue les
Bretons se reprenuent à la vie comll).e des .marins sa uvés du
naufrage. Ils J'éparent leurs l'ui nes : ils reviennent à leureulte
d'auLanL plus cher qu'il a éLé persécuté; et l\;urs pèlerLla ges
inLerromplls vont recommeJcer avec LIJ zèle ql1'anime la foi
anci enne et qu'aviveJt des motifs nOl1veaux.
L'Eglise célèbre la délivrance; eL , au jou r de la f(Jle de
es Saints, impl ore non se ul emen t. leur iJl. fen;P0sion
tous l
mais leur Î:'lfenp . 'I tirm pO Ul' éloigner (( 18 nali on pedide)
dont elle a é.té vicLime (1). Su ivant l'exemple de l'E~'lise

(1) Cf. l'hymn e des vêpres de la TOllssainL jJlaGa /'e, Chl'isir , st"/'oulis.
On a vu une allusion aux invasions normandes dans l'avant-dernière
Au/et'le uentcm Ilcr/ir/am. Il falll lire la s~rophe non dans le text e
'trophe

universelle, les Bretons, qui ont tant so uffert, ne vo nt-ils pas
mu ltiplier les vœux et les prières à leurs saints nationaux?

C'est ·à ces saints qu'ils ont ,attribué la délivrance: or
les reliques de ceux-ci n'ont pas repris leu rs places dans
leurs églises. Un hommage de reconnaissance et de répa­
ration n'est-il .pas dù aux saints libérateurs retenus dans un
lointain ex il ? . .
La guerrede Tours contre Dol va recommencer. Les Bre­
to ns doivent tenir et tiennent à leur métropole comme à une
garantie de plus de leur indépendance. Le pèlerinage à Dol et
aux suffragants de Dol est un acte de piété sa ns doute; mais
c'est aussi une protesta lion de dévoùment patriotique à la
métropole bretonne. .
Enfin, les ravages des terribles envahisseurs ont paru l'exé­
cut ion des menaces annoncées par les livres saints pour les
derniers jours du monde. De sinistres prédictions se répandent
résultant de la co rl'celÏon des hymnes faite sous Urbain VJlI (l(i31 ;, mais

dan s le texte primilil', gardé jusqu'aujourd'h ui pal' des ordres monastiques
CO llllllC bénédicti ns du i\1 '-Cassi n, chartreux, domin ica ins, pl'émon tré's, etc.
Voici les deux textes, que je traduis mot cl mo t ..

Texte chanté dans les ég lises:
1', ufel't e gen tem pel'ficléll11 Eloignez la DRtion perfide
Cl'eclenLiullI de finillu s, des frontières des croyants,
UL ll/lUS omnes un icum
et qu'un seul pasteur nous
Ovile nos pastor regat.
gouveme en un seul troupeau.
Texte prim itif:
Gentem auferte perflclall1 Eloignez la nation perfide
Cl'edenl iunl de fini bus, des frontières des croyants,
Ut. Christo laudes debi~as pour que les louanges clues au Christ
Persol va lllU S alacriter. ) ui soien trend ues joyeusemen t par nous.
le sens des deux textes diffère! La strophe primitive n'expIi­
Combien
pas la plainte el le vœu d'un religienx dont. « la nation
que-l-clle
perfide" il trop longtemps troublé la prière? .
II ne reste, :je crois, aucun cloute sur l'a llusion , quand on sait que
l'hymne est contemporaine cie la fin de l'invas ion . L'auteut' en est inconnu;
mais on place la date cie l'hymne entre les œuvres cie Saint-Odon cie Cluny
(l:l77-!)4~, et celles de Fulbert cie Chartres, évêq ue en 1007 : c'est-à-clire
X" siècle. .
Celte note est le résumé des renseignements foumis par un savant ecclé-
?Jastlqu e. . . .

annonç,ant que l'an 1000 sera le derni.er! Par toute la chré­
lienl.é les pèlel"inages de pénitence se multiplient. Comment
e;l serait-il Rutrement clans la Bretaglle qui a soutrert aytant
et plus qll'aucun autre pays?

De ce qui précède, il sort, je crois, une vl'aisernblance et .
une question:
Voici la vJ'Llisf.'1ublance: Les évêchés bretons de Saint-Malo,
5èli:l l-Bricuc, Tréguier, Léoi1, Cornouaille et l'évêché gallo­
romain de Vannes on tété 'suffragants de la métropole de Dol.
C'est de cette qualité des évêchés qu'est dérivé le titre de .
,':"'ellt-Suints de Brr!ta(/Iw d-onnés aux fondateui's ou censés
fondateurs des sept évêchés: .
. Voici la question: En conséquence, la liste des Sept-Saints
n'a-l-elle pas été arrêtée, et. leur CLllle collectif, manifesté
. notamment par le pèlerinage du TOH1" de Bretagne, u'a-t-il pas
commencé dès l'organisalio:l ecelésiastique cie la Bretagne
-pal' Nominoë, ou après le départ cles Normands et avant
l'an '1000 ?