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Bulletin SAF 1896


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Le pèlerinage des Sept-Saints de Bretagne

M. Trévédy

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XVI.

LE PELERINAGE DES SEPT-SAINTS DE BRETAGNE
(( Le pèleri nage des Sept-Saints de Bretagne appelé aussi
et plus simplement Tro Breiz (tour de la Bretagne) fut
extrêmement populaire pendant tout le moyen âge. Cepen-
dant les documents qui le mentionnent sont très rares et
. contiennent peu de détails sur ces pieuses pérégrinations.» (1)
Ce n'est pas assez dire : il s'emble que les historiens et
même les agiographes se soient promis de n'en pas parler.
Lobineau le premier a mentionné d'un mot le pèlerinage et
.essayé de dresser une liste des S~pt-Saints ; mais vous allez
l'exact et savant historien faisant erreur, 'une première
voir
fois, sur .leurs noms.
Nos deux premiers historiens, Pierre Le Baud, mort en
1505, Alain Bouchard mort après 1513, ont été contempo­
peut-être témoins du . pèlerinage des Sept-Saints. Or,
rains,
j'ai vainement cherché dans leurs ouvrages une simple men-
tion uu pèlerinage. .
Pierre Le Baud a écrit le premier. Par deux fois il men­
tionne cs. les neuf saints, patrons de la Bretagne, fondateurs
(1) Le Men . . 11onogl'alilûe de la cathédrale de Quimper. p. 190. Je
ferai plusieurs l'envois à cette étude. J'avertis seulement que le texte
cOl1tient plusieurs erreurs de chllIres dans les cilations et même dans deux
dales. Je les rectifierai, non pour le puél'il plaisir de l'edresser des fautes
typographiques, mais pour épargner à d'au tres les recher'ches qu'a bien voulu
faÎl'e pour moi M. le chanoine P archéologique du Fin istère .
. M. Le Men a beaucoup emprunté à un travail publié pal' l'abbé Luco
dans le bulletin de la Société Polymathique du Morbihan pour l'année 1874
(p. "1.7 à 3l :, sous le titre ~Votice SUI' le pèlerinage des Sept-Saints. Le
titre est un peu trop général. La notice, très intéressante et que je vais
mettre à tonlribution, COllceme surtout le pèlerinage de saint Patern à
Vannes.
Notre regretté Yice-président Luzel nous a donné, en 1886, une Note sur
le pèlerinage des Sept-Saints, à la suite d'un document dont nous parIe-
rons plus loin. (VOil' bulletin XIII, p. 'l9G-JOO.) .

des neuf évêchés)l. Il ne fait pas entre les évêchés la distinction
d'origine bretonne ou gallo-roJllaine (1). _
Les Chroniq1.tes , de Bretagne d'Alain Bouchard ont paru
en 1514. Dans son texte, l'auteur ne donne pas une liste des
Sept-Saints; mais, en deux endl'oits, une gravure sur bois
représente treize saints bretons en trois rangs superposés.
A"u , rang inférieur sont figurés sous ce titre: Les Sept-Saints
de Bretaig-ne, les saints Samson, Malo, Brieuc, Patern
Corentin; Tugdua,l et Paul (Pol de Léon). Saint Samson,
évêque de Dol, est figuré tenant la croix archiépiscopale ·
les autres sont tournés vers lui « le reconnaissant pOUr
métropolitain»,. sauf pourtant saint Patern (2 ).
La croix archiépiscopale portée par saint Samson est Un
souvenir historique; mais le dessin contient un allachro~
nisme analogue à celui commis par l'historien lui-même
quand il écrit, en 1514 : ( En cette province, il y a neuf
sièges cathédraux dont l'un, Dol, est de long , et anci'en
'temps archevêché, et les autres sont évêchés il (3).
_ A la fin du XVIe siècle, d'Argentré, parlant de saint Paul
, de Léon, dit «( qu'il fut un des sept évêques qui p.assèrellt en
(1) On sait que l'histoire de Le Baud, imprimée seulement en 1638, était
en 1480. Le Baud tient aux neuf évêchés, dont « trois parlent la
écrite-
langue gallique, trois la langue britannique, trois ont mixtement l'une et
l'autre langue ", parce que', ces neuf églises Œ trois dilIérences » donnent
à la Bretagne Il semblance de la céleste église triomphante laquelle a neuf
ordres trois fois ternés par hiérarchies a vçc diversité de locutions Il , etc.
- V. la suite p. 5, et plus loin 19. .
(2) Voir dans l'édition originale, fo 45 et 1'0 du dernier feuillet, et
dans l'édition des bibliophiles bretons, {os 37 et 275. Voir aussi expli-
cation dans appendice,
Pourquoi saint Patern, placé au milieu, n'est-il pas tourné comme les
autres, pui8que Vannes fut aussi suHragant de Dol? Peut-être en 'Ter-
rons-nous la ,raison pl us loin. '
(3) Fo 36, vo. On sait que, en mai 1199, le pape Innocent III suppri­
ma enfin l'archevêché de Dol. Mais plusieurs en Bretagne ne tenaient
pas compte de la sentence, notamment Alain Bouchard. Ce renseignement
a. été copié et réédité pal' le célébre cosmographe Mercator, 1(jll-1G28,
c'est-à-dire plus de quatre siècles après la suppression de l'archevèché.

Bretagne du temps .des SaXons» (1); c'est-à:..dire qui, au
temps où les Saxons envahissaient la Grande-Bretagne"
[lccompagnèrent les Bretons en 1\rmorique. '
L'auteur veut-il dire .que ces sept évêques venus de la
Grande-Bretagne sont çeux auxquels la piété .populaire
donna le nom des Sept-Saints? Il n'indique pas leurs noms
à cette place; mais plus loin il publie une liste d'évêques ou
abbés passés de Bretagne en Armorique. Voici cette liste
sur laquelle nous soulignons les noms des saints figurés s~r

la planche de Bouchard (2) : : "
« Saint Samson, qui était archevêque. d'Eborac (Yorck),
qui fut évêque . de Dol, saint Paul, évêque , de Léon, saint

Tugdual, de Tréguier, saint Magloire, ;saint Pa ter n, de
Vannes, saint Malo d'Aleth, saint Brieuc de SaiI1t-Brieuc,

saint Méen, saint Gildas, saint Golven, saint Colu~ban,
saint Armel, etc ... » •
Voilà nommés six des sept évêques que l'image de Bqu­
chard appelle les Sept-Saints. Le septième, sajnt .corentin
de Quimper, ne figure pas sur cette liste, et avec raison.
En effet d'Argentré dat.e les passages en Armorique de 4,84 '
à 560; et en un autre endroit, il signale saint Corentin comme "
venu en Al'morique dès le IVe siècle.
En 1636, Albert le Grand a publié la 'vie de chacun des
Sept-Saints figurés dans Bouchard; dans aucunp, de ces :
'vies, je n'ai trouvé une liste des Sept-Sé;lints.
Toute'fois dans la vie de saint Patern, on peut l'elever un ,
curieux passage. L'agiographe conte un synode te,nu auprès
de Vannes par saint Samson, archevêque de Dol, entouré
(1) msl. p. 61. Éd. de 1618. Cette phrase est supprimée dans l'édi- '
tion de
('2) J'emprunte la liste donnée p. 85 de l'édition de 1668, parce qu'elle .
est plus complète que celle donnée p. 140-11 de l'édition de 1618. Je
restitue dans cette liste le nom de saint Paul figurant ,dans l'éd. de 16·18
et omis p. 85 de celle de IG(j8. V. p. {i1, 140~141, éd. de 1618, et 50, éd. de
1668. Remarquons que l'édition de 1668 est très fautive. . ..

de ses suffragants, saint Mal~, d'Alet, saint Brieuc, de
Saint-Brieuc, saint Pol, de Saint-Pol, saint Tugdual, de Tl'é ..
guier, saint Patern, de Vannes, et l'évêque de Quimper, qu'il
ne nomme pas (p. 248.) Il n'a pas osé éàire saint Co ren Un.
Il a eu peur de commettre un anaduonisme. Après tou~
ceux dont la phrase est boul'rée, un de plus ne tirait pas ft
consequence.
L'archevêché de Dol, les évêchés de Saint-Brieuc et Tré ..
guier ont été créés par Nominoé seulement en 848; et Ce
synode qui daterait du VIe siècle est une fable; mais ce qui
nous importe et ce qu'il fant retenir du récit, c'est ]a liste
transmise par une ancienne tradition des évêques réunis
auprès de saint Samson. Ce sont justement (sauf saint
Corentin) les Sept-Saints figurés par Alain Bouchard.
Mais comment · comprendre qu'Albert Le Grand n'ait
pas fait allusion au pèlerinage ? Que cette dévotion eût .
cessé au temps où il écrivait, 6'est très probable, comme
nous le verrons; mais le souvenir ne pouvait en être perdu;
il valait bien l'honn'eur d'une mention; et combien, il y a
deux siècles et demi, il était plus facile à l'agiographe qu'à
nous aujourd'hui de recueillir des. renseignements!
. Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, le P. Maunoir
célébrant les Sept-Saints répétait les noms inscrits sur ]a
planche de Bouchal'd. Il achevait son humble et. glol'ieuse
carrière en 1683; et, vingt-quatre ans après, Lobineau

publiait son Histoire de Bretagne.
. Le premier de . nos historiens, Lobineau a mentionné le
pèlerinage des Sept-Saints; mais sans paraître y attacher
beaucoup d'intérêt.
Dans son Histoire, Lobineau a donné en deux fois le

ou, comme il dit, a fait « le portrait abrégé de ce
preCIS,
de particulier dans les mœurs de la Bretagne ».
qu'il y

ces <(, portraits » est placé à la fin du xu siècle
Un de

(p. 199-206) ; l'autre au commencement du XVIe siècle, 'à
la fin de l'ouvrage (p. 843-854).

Mais ne cherchez pas dans ces pages si instructives la
mention du pèlerinage des Sept-Saints. C'est à l'année 1419
que l'historien en dit seulement un mot et comme accideri­
tellement. (1).
Chose qui paraîtra surprenante ! Le savant historien ne
. sait pas , et n'ose affirmer les noms des Sept-Saints. Il avait
pourtant vu l'image publiée par Bouchard et sans doute lu
10 P. Maunoir. Trop sévère pour Bouchard, Lobineau n'aura
pas eu foi dans ses indications, il n'aura pas pris garde aux
affirmations du P. Maunoir; et, ne trouvant rien de certain
dans d'Argentré, il écrit: « Ces Sept-Saints ét.aient apparom-
ment saint Corentin, saint Paul de Léon, saint Tugdual, saint

Samson, saint Malo, saint Meen, saint Judicaël,ou bien
c'étaient les frères et les neveux de Judicaël (2). 1)
Ces derniers !ll0ts indiquent que Lobineau ne savait pas
que les Sept-Saints fussent les fondateurs ou titulaires ou
prétendus titulaires des sept évêchés bretons. En effet, il
remplace 'saint Brieuc et saint Patern par saint Meen et
saint Judicaël, qui n'ont pas été ni réputés évêquès: voilà
donc Lobirieau en contradiction avec Bouchard et le P. Mau-
l1?ir sinon avec d'Argentré lui-même.
Par bonheur, entre l'impression et la publication de son
histoire, lè savant bénédictin fut détrompé et il ne manqua

pas de se rectifier dans sa préface : « J'ai pu hésiter sur
ces saints, et n'ai osé assurer positivement si c'étaient
les premiers évêques des anciens sièges bretons',- en y
(t) P. 5:18. Il est question du pèlerinage d'un duc que nous mention­
nerons. D. Morice, ayant omis ce fait, ne mentionne pas, si je ne me
tI'ompe, Je pèlerinage des Sept-Saints.
(2) Lobineau range les noms un peu au hasard; je rétablis, comme je
ferai plus loin, les noms dans l'ordre géographique des lieux où chacun
des sain ts est. honoré. .
Sainl Judicaël ou Giquel est dessiné par Alain Bouchard mais non parmi
les Sept-Saints, fG 38 ro. .

joignant celui de Vannes » (1) mais depuis peu Un
homme, qui joint beaucoup de littératnre à nne vie tI'ès
. mortifiêe et édifiante, a écr;t \1De lettre où j'ai trouvé que .le
pouvais prononc~r avec assurance que les Sept-Saints n'e5-
toient autres que ceux-là (les é"êques dont il vient de
parler), et qu'on voit" encore dans ln cathédrale de Quimper,
au côté méridional de la porte du chœur, un ancien autel
dédié aux Sept-Saints, où ces sept évêques sont dépeints
avec leurs attributs tirés de leurs principaux miracles, et
leurs. noms au bas . qui . sont s,aint Corentin, saint Panl,
saint Tugdual, . saint Brieuc, saint Samson, saint Malo,
saint .Patern ». .
Comment Lobineau, sachant enfin et d'une manière cer-
taine les noms des Sept-Saints, n'a-t-il pas dit un mot de leur
pèlerinage dans son Histozre des Saints de Bretagne, publiée
vingt ans plus tard? (2). .' . .

Voilà en effet les Sept-Saints dont les pèlerins visitaient
les églises 'et honoraient les ··reliques. A ' Quimper, saint
Corentin; à Saint-Pol, saint Paul Aurélien; à Tréguier,
saint Tugdual; à Saint...;Brieuc: saint Brieuc; à Saint-Malo,
saint Malo; à Dol, saint Samson; à Vannes, saint Patern.
Mais, dira-t-on, la liste n'est pas complète; et les évêques
fondateurs des évêchés de Rennes et de Nantes ! Ils ne sont

pas admis sur la liste pour deux motifs. Le premier c'est
que les fondàteurs de ces deux évêchés ne sont pas d'origine

(1) Préface. E. 1. V". Ce 1neâ culpâ de l'historien n'est pas absolument
dépouillé d'artifice : • non seulement il n'a pas 7)ositiv(~ment assuré.
mais il ne semblait pas soupçonnér que les Sept-Saints étaient les évêques
bretons». -- La ·remarque est de' l'abbé .Luco.
L'exact historien met à part saint Patern de Vannes. C'est rappeler
que le siège de Vannes était d'origine gallo-romaine, en ce sens qu'il ' n'a
pas eu pour premier pasteur On Breton émigré; et que saint Patern, né
à Vannes, était passé en Angleterre, puis reyenu à Vannes.
(2) C'est la remarque très judicieuse faite par l'abbé Luco.

bretonne. L~ second c'est que ces deux diocèses ne faisaient .
pas encore partie de la Bretagne de Nominoé, lorsque, en
848, il créa l'archevêché de Dol et les . évêchés de Saint­
Brieuc, Tréguier et Saint-Malo; ils n'ont jamais été
compris dans la province ecclésiastique de Dol ; et les arche­
vêques de .Dol ne les. ont pas disputés au siège de Tours .

Est-ce à dire que la liste des Sept-Saints a été arrêtée au
temps de la création de l'archevêché de Dol et qu e le pèle- ,
rinage date de cette époque? Je n'oserais le dire.
Toutefois M. l'abbé Luco a proposé une date presque.
contemporaine : les premières années . du :x siècle. Voici
son ,raisonnement: dans le. premier quart de ce siècle (avant
925), les reliques de saint Patern furent enlevées de son
tombeau et son église fut détruite. Après la reconstruction,
la place du tombeau était inconnue : il faut donc que le .
pèlerinage soit antérieur à la perte du tombeau .
. Cette argumentation produira-t-elle la conviction? . J'en
doute. En effet, ce n'est pas le tombeau vide, mais les reli­
ques de saint 'patern que les pèlerins allaient . visiter; et ils
ont pu commencel~ à visiter ('es reliques après ({ la perte du .
tomheau » laissé vide.
Mais, dit-on, personne rie doutera que les reliques aient
attiré les pèlerins pendant qu'elles étaient au tombeau dans la
première église! D'accord ; ... mais distinguons deux choses
que l'abbé Luco a confondues: le pèlerinage à saint Patern
et le pèlerinage des Sept-Saints.
Nous ne pouvons en douter, les Bretons de chaque dio­
cèse n'ont pas même attendu le xe siècle pour honorer d'une
manière spéciale les reliques de leurs premiers évêques (1).
Ces hommages rendus par chaque diocèse à son fondateur
(1) Il paraît · certain que dès· le VI" .siècle, une chapelle fut construite
au-dessus de l'oratoire de Saint-Brieuc. .

~nt pu donner l'idée de consacrer aux sept fondateurs Une
« dévotion» collective.
Mais des honneurs que dès le xe siècle et même aupara_
vant · la piété populaire rendit aux reliques de saint Patern,
pouvons-nous conclure, comme semble le faire l'abbé Luco,
à l'existence du pèlerinage des Sept-Saints, dès cette époque?
Je ne le crois pas.
U ne autre raison . et d'un autre ordre permet peut­
être d'assigner au pèlerinage des Sept-Saints une date pres_
que contemporaine de celle proposée par l'abbé Luco.
Dans la seconde moitié du xe siècle, lors de l'expulsion
définitive des Normands (936), la Bretagne, après cent ans
de massaCl'es et de maux de toute sorte, se r.eprit à la vie.
La fable de la conquête armée de l'Armorique et de la
fondation du royaumc de Bretagne, en R83, était née en
Angleterre; elle venait d'être importée en Bretagne par des
compagnons d'Alain Barbe-Torte. C'est à ce moment que
fut pour la première fois révélé aux Bretons le nom du
fondateur et premier roi de Bretagne, Conan Mériadec (1).
Mais cette fable, à la supposer admise dans l'entourage
d'Alain, ne pouvait être populaire; et, au milieu du xe siècle,
Conan Mériadec avait peut-être moins de fidèles que ne lui
en ont donnés D. Morice et ses copistes quand ils l'ont
encore une fois hissé sur le payois.
Au contraire, les anciennes traditions étaient encore rela­
tivement jeunes; elles . représentaient les premiers apôtres
de la Bretagne, les saints bretons, comme les fondateurs des
sept évêchés entre lesquels les Bretons se voyaient partagés;
ceux-ci les avaient invoqués dans la détresse, comme leurs
protecteurs et leurs pères; quoi de plus naturel, après la .
·. victoire, que d'attribuer la délivrance à leur intervention, et
. (1) Sur ce point .M. de la Border.ie. - Conan Mériadec, dans la Bio­
graphie Bretonne, 1. 416 et suiv.

que de leur payer à tous collectivement une dette de
reconnaissance?
Serait-il téméraire de conjecturer que le pèlerinage des
Sept-Saints bretons est né vers cette époque?
Or ces Sept-Saints étaient Samson,le fondateur de l'évêché
de Dol, et les premiers titulaires des ' six sièges devenus
suffragants de Dol; cette circonstance n'aurait-elle pas
ajouté à la popularité du pèlerinage pendant les luttes sou­
tenues par les archevêques de Dol contre l'archevêque de
Tours? '
Après la sentence papale de 1199, pendant plusieurs
siècles (nous le voyons par l'exemple de Bouchard) des
Bretons séparatistes s'obstinaient à voir en Dolla métropole
de la Bretagne. A cette époque, le pèlerinage des Sept-Saints
ne fut-il pas une protestation en faveur de la métropole
bretonne, et en même temps qu'une œuvre de dévotion un
acte de patriotisme breton?
Quoiqu'il soit de cette hypothèse, on a pu dire sans

exagération que le pèlerinage des Sept-Saints remontait à la

plus haute antiquité (1). Des actes authentiques nous dé-
montrent qu'il était populaire d_ ès l~ ~nle siècle. Les actes
de saint Yves né en 1253 mort en 1303 nous apprennent que
le pèlerinage fait plus d'une fois par lui était alors en

grande faveur. Un actê de 1248, nous mo'ntre dans la cathé-
drale de Quimper un tronc existant peut-être depuis long­
temps dit « tronc des pèlerins », parce qu'il recevait leurs
offrandes (2). Peut-être un acte de 1424, sur lequel nous
reviendrons, autorise-t-il à comprendre, dès 1248, dans ce
terme général de pèlerins, les pèlerins des Sept-Saints (3).
Quoiqu'il en soit, un acte de 1346 nous montre aux environs

(1) Le Men, p. 191.

('2) Le Men, p. 193-19L Il cite cart. n° 56 fo 53, ''0. lire t D.
(3) Le ,Men, p. 194. Il cite cart. 56 fe 1. , lire [0 21 ro.

de Trédias, non loin de Dinan, une fontaine ou chapelle dite
Sept-Saints (1). .
des
Ces dates déjà si lointaines ne marquent pas le début du
pèlerinage; mais au contraire elles nous révèlent ' qu.'au
milieu du XIIIe et du XIVe siècle, il était très suivi. .

Dans sa préface et dans son histoire, Lobineau dit que
« le voyage ou pèlerinage des Sept-Saints était anc~enne.:..
ment une dévotion si usitée qu'il y avait un chemin pavé
. destiné tout exprès au travers (autour) de la Bretagne appelé
pour cela le chenûn des Sept-Saints, dont on voit encore des
restes ~u prieuré de Saint-Georges, près dé Dinan (2) " en
la commune actuelle' de Trédias.
Presque deux siècles après Lobineau, no'us voyons bien
d'autres restes de ce « chemin pavé qui faisait le tour de la
Bretagne»; et on a pu le relever et le dessiner sur la carte
de Bretagne, pl'esque sans interruption. '
L'a vérité est que ce chemin n'avait pas été construit et
pavé pour les pèlerins et qu'il était vieux de plusieurs siècles
quand commeriça' le pèlerinage. Il n'était autre qu'une suite
de voies romaines contournant la Bretagne de Quimper
(pour prendre un point de départ), à Saint-Pol, Tréguier,
Sairit~Brieuc, Saint-Malo, . Dol, et revenant ensuite vers
Vannes.
Au moyen âge,nos pères ne construisaient guère de routes:
ils ne surelÙ même pas entretenir celles que les Romains
leur avaient léguées; mais ils les marquèrent de l'empreint~

0 ') Lettres de Charles de Blois du 1:1 décembre 13I6. Communicatton du
Mis de l'Estourbeillon au congrès de Saint-Brieuc. Juin 1896. Nous revien­
ce point.
drons sur
('2) L'aflrmation de Lobineau est répétée par plusieurs: l'abbé Luco,
Le Men, l'abbé Thomas (flislo';l'e de la vie ft du culte de samt Coren lin.
p. 29~;, cile Le Men sans observation; de la Villerabel, A travel'S le
vieux Saint· Brieuc, p. 30 ; etc. M. Luzel rectifie cette erreur .

religieuse qu'ils mi.rent sur tout. LéS bornes mi-lliai'l'es
furent souvent remplacées par des croix marquant nos lieues
de Bretagne (1) ;et le long des routes, s'élevèrent des cha­
pelles qui invitaient le voyageur à la prière; et des fontaines
monumentales souvent entourées d'arbres où le passant
étanchait sa soif et goûtait le repos et 'l'ombre aux heures
chaudes du jour, sous la garde du saint auquel la fontaine
était consacrée. La charité de nos pères fit encore plus:
c'est le long des routes qu'elle éleva les aumôneries où le

voyageur necesslteux pouvaIt trouver un gIte et recevaIt un
secours pour continuer son voyage (2).
Comment les voies anciennes suivies par les pèlerins des
Sept-Saints, et, à ce titre, les plus fréquentées des routes de
Bretagne, n'auraient-elles pas été, plus que les autres,
l'objet de ces soins religieux et charitables? Plus ~e trois
siècles après que le pèlerinage a cessé, lorsque le temps et
surtout les homme's ont durant tant d'années accompli léur
œuvre de destruction, il existe encore des chapelles et dçs
fontaines dédiées aux Sept-Saints le long d'anciennes voies
romaines (3). Nous en avons retrouvé quatre seulement dont
nous allons marquer la place. ' Nous ne doutons pas , qu'il
(1) « La corde et mesure de la lieue» avait été ({. baillée » par Pierre
de l'Hospital, sénéchal de Rennes et président de Bretagne ('21 jaBvier 1419
- 13 ' août H41), La mesure était « une corde contenant six vingt pieds
fois» Const. de 1451, art. :29. Vannes, mai. San­
assise par six vingt
vageau, II. p. 39. ' Celte mesure est rappelée dans l'art. 383 de la N. C.
120 'pieds X 1'20 14.400 4.800 mètres, 4 kil. 800, en nombres ronds
cinq kilomètres. C'est la mesure que dans ,mon enfance j'entendais attri-
buer à la lieue de pays.
('2) Les aumôneries dont nous allons parler sont nommées' dans une
de Conan IV, de 1160 (D. Moriee, pl'. I. 638) avec beaucoup d'au­
charte
tres dont 'je ne retrouve pas les noms actuels.
(3) Nous ne parlons que de celles-là. Nous , de nommons que pour
mémoire la chapelle des Sept-Saints à Brest, et une autre commune d'El'­
deven (canton de Beltz, Morbihan), qüi n'étaient pas sur la route des
pè.lerins, comme nous ven'ons. ,

nI en reste d'autres (1) ; et surtout personne ne doutera qulau
temps du pèlerinage elles ne fussent bien plus nombreu ..
ses (2); nul doute aussi que des chapelles et surtout des
ont été originairement consacrées aux Sept-Saints,
fontaines
qui existent aujourd'hui sous up. autre vocable, quelquefois

de pure fantaisie

Vers la fin du XIVe . . siècle " l'usage avait fixé quatre
époques de l'année pour le pieux voyage: Pâques,.la Pen- .
tecôte, la Saint-Michel et qui le croira? Noël, la saison
des longues nuits, des pluies froides, des neiges et des
quatre époques étaient dites les quatre tempo­
glaces. Ces
raux (4).
Disons pourtant que, dès le XIVe .siècle, au temps de la
grande vogue du pèlerinage, le temporal de Noël comptait
peu de pèlerins : le temporal qui en comptait le plus et
de beaucoup était celui de Saint-Michel (5). · D'après un
tout à l'heure, les deux cinquièmes
calcul que nous dirons
passaient au temporal de Saint-Michel. .
des pèlerins
. Un acte daté de cent ans plus tard (1424) nous apprend que
plus qu'à deux époques princi-
le pieux voyage ne se faisait
pales; mais il ne-dit pas à quelles saisons (6). D'après ce

(1) Nous supplions qu'on veuille bien nous en indiquer d'autres.
('2) Faut-il supposer que chapelles ou fontaines jalonnaient la route
marquant presque les lieues (de:) kil., comme les ol'aloires sous le nom
de Saint-Méen marquaicnt la route conduisant à l'abbaye cie Sninl-Méen
(pt'ès de Montfort, Ille-et-Vilaine), ceux qui allaient y cherchel' la guérison
de ln gnle. On peut voit' deux de ces oratoires au bord du chemin dc fer
de l'Oue!?t, auprès dc Vitré; partant de Rennes on voit l'un d'eu~ il quatl'c
kil. envit'on de Vitré, à droite; le second est à gauche de la voie, entre
Saint-Piene-La-Cour et Port-Brillet. Enlre les cieux, il y en a un autre,
à un kil. au-delà de Vitré, à quelque distance de la t'oule nationale, SUl'
la droite. Voilà donc trois chapelles Saint-Méeri dans l'espace d'environ
tG kil.
(:» Nous en donnerons la preuve quelque jour.
0) Abbé Luco. Le Men., p. 1l)!.
(5) L'abbé Luco ne parle que de Vannes; mais ce qu'il en dit est vrai
des six autres évèchés.
(6) Le Men, p. 191. JI renvoie au· Cat'lu)ait'e, 5ô, fa A, lit'e f-l D .

que nous venons de dire, on ne peut douter que le temporal
de Noël ne fût un des deux supprimés, et que le temporal
de Saint-Michel ne fût conservé.
Pendant les temporaux, les reliques de chacun des saints
étaient exposées dans son église. A Vannes, les reliques de
saint Patern étaient posées sur un autel contigu à la grille
du chœur (i). A Quimper, les reliques de saint Cor~ntin
étaient posées sur un piédestal surmonté d'un dais incrusté
dans le pilier formant l'entrée du chœur à droite, pilier
contre lequel était appuyé l'autel des Sept-Saints dont nous
avons donné la description . plus haut (2). A Saint-Bl'ieuc,
les reliques de saint Brieuc, revenues de l'abbaye de Saint-
Serge d'Angers (aux premières années ' du XIIIe siècle),
étaient exposées avec celles de saint Guillaume (depuis

1247) (3) dans la cathédrale.
Pas de doute que le même usage ne fût suivi dans les quatre
autres églises successivement visitées par les pèlerins.
Chaque temporal durait un mois, quinze jours avant et
quinze jours après la fête dont il prenait le nom.
Le voyage se faisait à pied.
Le tour de Bretagne était, à vol d'oiseau, dè 548 kilomètres
environ, soit 109 lieues de Bretagne (4). Ainsi les pèlerins
(1) Abbé Luco. ' .
Cl) Le Men, p. 191. Le piliee contee lequel a été dressé l'autel n'a été
consti'uit qu'au xv· siècle.
(3) 1247 est la date de la canonisation et non 1147. (Le Men. p. 193.)
(4) Les voies romaines étant moins longues que nos routes rnoctel'lles,
les distances ci-dessous sont comptées à peu près en ligne droite.
De Van,nes à Quimper.... .. ......... 110 k.
Quimper à Morlaix .......... " ., 70
Morlaix à Saint-Pol............. 25
Saint-Pol à Morlaix (retour).. . . . . 2;,
Morlaix à Tréguier. . . . . . . . . . . . . . 50
Tréguier à Saint-Brieuc.... . . . . . . 45
Saint-Brieuc à yffiniac....... . . • 10
Yffiniac .à Alet .(Saint-Malo).. . . . . bU
Saint-Malo à Dol.... .. .. . .. . .. . . 23
Dol à Vannes à vol d'oiseau.. . •. . 130

137 lieues ùe quat~ê kilomètres. 109 lieues 3/5 de Bretagne ' (5 kil.) •

n'~vaient à faire en moyenne que trois lieues et demi-e pal'
Journee. '
Le tour se faisait indifféremment dans un sens ou dans
l'autre. Je veux dire qu'un pèlerin partant par exemple de
Quimper pouvait, à son gré, commencer par VIsIter Saint_
Patern de Vannes ou la cathédrale de Saint-Pol-de-Léon.
De même, s'il y avait commodité, il n'y avait pas obligation
de sUIvre le' chemin fréquenté le plus ordinairement.
On pouvàit s'en' écarter pour prendre gîte chez un ami On
pour vàquer ' â ses afl'aires. C'est ce que démontrera bientôt
l'exemple 'd'un illustre pèlerin. '
Si les pèlerins bretons ne redoutaient ni la fatigue ni la
rigueur du temps, du moins devaient-ils se prémunir contre
les dangers de la route. Ils se réunissaient en petites troupes
1 marchant souvent avec un prêtre de leurs paroisses ou quel-
se les figurer allant chantant des cantiques. Ainsi font de
nos jours encore les Cornouaillais et les Trécorrois se
rendant à Saint-Anne-d'Auray, et rentrant joyeusement chez
eux après avoir fait quarante ou ' cinquante lieues sans
dormir dans un lit, et, en preuve de leur voyage au pays de
Vannes, couronnant. leurs chapeaux d'une tige de mil que
ne cultivent pas les cantons de Tréguier et de Quimper.
Sept-SaiiIts. Vous
Voilà les conditions du pèlerinage des
plairait-il de le fail'e à votre tour ? ... Rien de plus facile.
Nous sommes, je suppose, en 1396, à la fin du XIVe siècle,
à Quimper, au temps de la graride vogue du pèlerinage et
au temporal de Saint-Michel, le plus suivi des qüatre tem-
poraux. Voilà justement une troupe de pèlerins sortant. de
l'église Saint-Corentin. Ils viennent de visiter les reliques
du saint évêque: ils marcherrt, ,comme il se fait aujourd'hui,
(1) Preuve dans abbé Luco.

sOUS la conduite d'un chef que la troupe s'est choisi; qui a
déjà fait le tour de Bretagne. .
sont de pauvres gens: plusieurs, comme les p~lerins

de nos jours, ont leurs sabots pendants à l'épaule. Ils n'ont
pas d'amis à visiter, pas d'affaires à traiter; ils ne s'écarte­
ront pas de la route. Joignons·nous à eux (1). . .
Tournant le dos à la rue Rachaer (des Regaires) qui con­
duit à la route . de Vannes par le pont Fe rm in, nQUS
prenons par la rue DemeT' (.depuis rue Obscure en français
et aujourd'hui rile Royale) (2). C'est dire que nous commen­
çons le pèlerinage par Saint-Pol-de-Léon (3).Nous traversons
KCl'feunteun sur cette voie romaine de 16 mètres de lal'ge qui

a l'aspect d'une voie triomphale. Par le Pénity, le Guélen (où
trouvé le premier anguipède signalé en Bretagne),
a été
Pleyben, Brasparts et Pleyber-Christ, elle nous conduit à
Morlaix~ et de là à Saint-Pol (4) . .
Pour aller de Saint-Pol à Tréguier, il nous faut revenir à

Morlaix.
Là notre chef peut choisir ent.re deux voies: la voie de
Morlaix à Lannion par Plestin et Saint-Michel-en-.Grève.(5),

(1) J'empmnle les indications des voies romaines qui suivent à M. Ret'-
viler, Reseau des voies Rnmaines dans la péninsulea1'1noricaine, T. i.
Armol'ique et Bretagne, p. '23't-!86; et à M. Gaultier du Mottay.
Recherches sur tes voies J'omaines du département des Câtes-du-Nord.
Je citerai par les mols Arnwriql.te .... et Recherches.
('2) Rachaël', Racha!' ou Racket' ,en fl'ançais faubourg), nom ancien (XIV·
siècle) de la t'ue actuelle des Regaires. Pont Fermin (XIV· siècle). '"
lJemer, synonirne de Obscure. M. Le Men, p. 49-'t8. .
(.J) Il Y avait à Bl'est une églLse ou chapelle des Sept-Saints (nous en par-
Ierons un jour); mais Bl'est était en dehors du chemin suivi pal' les pèlel'ins
des Sept-Sainls Un aveu de l'abbaye de Daoulas, du 7 mai '1 n8 (at'ch.
Finisl. H. '2 , signale près du passage de l'Elorn, en Plougastel-Daou-las, le
chemin des pèle/·ins. Mais ces expressions doivent s'entendre des pèlerins
de quelque .lieu du voisinage, pat' exemple des pèlerins des cantons voi­
sins de Brest Cl Il a tll à Ru rnengol. (Renseig. de M. l'abbé Peyron.)
(4) Armoriqlle et IIretagne. 1. '238. .
(:» /lecherc/ws. p, 147. Voie de Mol'laix à Coz-Yaudet pat' Lannion. Les
pèlerins, at'rivés à Lannion, tournaient le dos à Coz-Yaudet pour ~ller à
Tl'éguier. . .. .' " . .
:dULLE1'IN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. TOME XXIII. (Mémoires)'. 15

ou ,la voie de MOI'laix à Guingamp jusqu'auprès de Plouné~
vez-Moëdec, où nous tl'ouvel'OI1S une autee voie nous l'am
nant,sul' Lannion (1). . .
. Cette -seconde l'oute est l~n peu plus longue; mais notl'e
guidela -choisrt. Il sait qu'avant d'al'rivel' à Plounévez, 'nous
passel'ons devant l'aumônerie de Keramanaoh, où les pèle _ _
I!Îns -pauvre's trouvel'ont bon accueiL Apeès un peu de repos
à K~raJ.Tlanach, nous escaladons la colline Croas-J an (2), et au
sQmmet, nous' prenons la voie de Carhaix à Lannion. SUI'
110tne .route, dans la paroisse de Plouaret (atijourd'hui Com~
mune de' Vieu~-Marcllé ) , nous entrons dans une ehap~lle
dédiée ·aux 'Sept-Saints (.3). .
. De Lannion, ·une autI'e voie nous conduit à La Roche_
Del~rien Où passe la yoie descendant de Carhaix à Tréguiel\
Nos dévotions accomplies à Tl'~guièr devant l~s reliques
saint Tugdual et de saint Yves qui vient d'être ca'nonisé
('19 mai 1347), nous revenons à La Hoche-Derrien.
Là nous reprenons la voie qui nous a amenés de Lannion
et· qui va nous conduire à Saint-Brieuc. Presque aü sortir de
La 'Roche: nOtl:S trouvon-5 l'aumônel'ie de Pumurut., paroisse
de 'Pommerit~Jaudy (4). .
A Saint-Brieuc, nous honorons les reliques de saint

(1) M. du Mottay aclllléLLait nne voie de Morlaix à Guingamp ;.mais
son .prolongement an deLà. M. Kerviler considérait ceLLe
n'admettait pas
voie comme « sans ' raison d'être » si elle ne se prolongeait pas jusqu'à
Yillni.ac. ·:Je m~ois avoir démonlré l"existence cleI.a voie d'Yffiniac .à Morlaix,
et je l'ai jalonnée par à pen pl<ès sur une ligne presque droite an . sud de
hl -route nationaled'ytfin,iac 'ù Belle-I1e-en-Terre. A pm'lir cie ce point, la
route s'est à peu près superposée à la voie. Congrès de l'Association bre­
à ·Saint-Brieuc. Juin 1896.
tonne
('2) Croas-Jan est une colline au-de3sus de Plounevez-Moëdec, au sommet
de l'aquelle se croisaient deux voies romai'nes. JI est pl'obable qu'il y avait
là un poste militaire, qui 'était en vue de Bellou, du Menez-Brée et d'u .
Camp, immènse o/Jf1idwn qui domine la forêt de Coat--an-Nay, voie cie
Carhaix à Tl'éguier. Recherches. p. 2ü.

(:3) Beclwrclws, Nous reparlerons un jour cie cette chapelle.
(4) RecheJ'che.~, p. 1.)0 et suiv.

]3rieuc et de saint Guillaume; J de plus, nous vénérons les
images des Sept-Saints sous le poeche de la cathédrale; puis
nous gagnons le primitif oratoire de Saint-Brieuc; là, nous
nous agenouillons dans la chapelle de Notre-Dàme de la

Fontaine qui recouvee l'oeatoire et la fontaine; les eaux
limpides sont retenues dans un bassin entouré d'un banc de
pierre, et l'usage des pèlertl1s est de s'y baigner les pieds.
Ceux suetout qui sont ntteinls du mal des ardents ne man­
.queeont pas l'occasion (L ). Les' malades seront reçus à l'hô-
tellerie, c'est-à-dire à l'hôpital 'de la chapelle (2) .
. ' En sortant de la ville, les pèlerins reprennent la voie de
Tréguier et la suivent jusqu'à "X,ffiniac qui marque le 'fond
Saint-Beieuc. Yffiniac est le point de rencontre '
de la baie de
l'Ouest: celle que les pèlerins ont
de trois voies venant de
suivie depuis La Roche-Derrien , celle de Morlaix et celle de
Carhaix. Vers le point où elles convergent nous nOUS écar­
tons un peu de la route pour visitee la chapelle et la fontaine
Sept-Saints (3).
des

Là les pèlerins ont encure une fois ,le choix entre deux
.voies.oL~une l~s con,duit par Corseul et Dinan à Dol (4). L'autre
plus peès de la mer est la voie passant la Hance pour a:ller
directement à Saint-Malo (5). C'est la voie ordinairement
suivie. Nous la peenons. A la limite de la paroisse, aux
Ponts-Neufs, on nous ,montre la plac'e où Jt)al! de Brois,.

(1) Au commencement du siècle, des vieillards. par traditi.on et sans
le basslll du lavoir le doué des
plus comprendre, nommaient encore
ardents. De la Vil lerabel, Le vieux Saint Brieuc, p. 41-4'2, 93:-91.
Le m ·~t dcs ardents était, à ce qu'il paraît, l'ergotisme gangt'eneux.
On le nommait aussi (eu Saint-Antoine L'Eglise qui a soulagé toutes les
misères avait créé un ordre religieux diL tes An.tonins ou fl'èr'es de "Saint­
Antoine pOUL' le soin des ardents. De là le second nom de la maladie. ' .
('2) M. de Geslin, Evêchés de Bretagne, 1. p. 28'J. De la ViIlel'abet.
Acte ùe 13ü'2, p. 50. . . .

(3) Nousparlerons un jour de cette fontaine. .
(Il) Recherches, p. 9 L Voie cl' Avranches à Corseul par DOl.
(5) Armorique, etc., I. 240-248 .

époux de Marguerite de Clisson: va fail'e bâtir un hôpital (1).
Dans la.paroisse de Morieux nous trouvons une fontaine des
Sept-Saints; et quelques lieues plus loin: dans la paroisse
de la Bouillie, nous trouverons une aumônerie (2) .
Pour aller de Saint-Mâlo à Dol nous suivrons la voie
d'Alet à Avranches, qui touche à Dol (3) .
De Saint-Malo ou Dol, il faut revenir à Vannes.
Si nos pèlerins étaient partis de Saint-Malo, ils auraient
,eu la voie allant de Saint-Malo à Vannes par Corseul, La
Trinité-Porhoët et Saint-Jean-Brévelay (4). Mais ils ont fini
par la visite à Dol. Une autre route leur est ouverte. Ils
prennent la voie de Dol à Dinan dont nous avons parlé plus

haut; et à Dinan ils trouvent une voie descendant au sud
par Trédias et Tromeur. C'est la route que Lobineau a VUe
auprès de l'abbaye Saint-Georges, en Trédias; et c'est en
.cette paroisse que se trouvait, en 1346, une chapelle ou
Sept-Saints (5). Cette voie de Dinan vers Vannes
fontaine des
(1) On lit dans Recherches. p. 52 : « Les ducs de Bl'etagne y fondèrent
un hôpital, en 1397. (Les Ponts-Neufs) vinrent plus tard, vers le xv· .
siècle, en la possession des comtes de Penthièvre. » Double inexactitude:
En 13'17, le comté de Penthièvre fut .donné en apana-ve par le duc Jean III
à son fl'ère Guy, père de Jeanne, femme de Charles de Blois; en '13m, le
comté était en la possession de leur fils aîné, Jean. Le comté fut confisqué
pal' le duc Jean IV après le guet-apens de 1420 .
M. du Mottay renvoie au président Habasque. (,Votions . . , III p 3.)
A cet endroit, M. Habasque donne deux extraits d'un acte du 25 mai 1397,
qu'il a vu : « Le comte ,Jehaü de Bretaigne fonda un hôpital en sa ville
des Ponts-Neufs, en '1397. » M. Habasque prend aussi le comte ,Jehan de
Bretagne pour un duc de Bretagne. Non. C'est Jean de Blois prenant le
nom de Bretagne que ses descendants s'obstineront à portel', mème après la
défense que la reine An ne de Bretagne leu l' fit faire pal' Lou is XlI ('1501).
\2) liecherches. p. 11 t. A rlnoriq ue . 1. p. 203;
(3) A1'lIwl'iq-ue, p. '283. Rencontre de la voie d'Avranches à Dol et Corseul.
(4) Recherches, p. 111 et suivantes. C'est au bOl'd de cette voie, en
Saint-Mêloir, que se "trouvait la borne milliail'e décrile par Lobineau.
Preuves. col. '2, et qui existe encore dans le cimetière.
(5, Communication M. le ' Mis de Lestourbeillon au congrès de l'Asso-
ciation bl'etonne ci. Saint-Brieuc (juin 189j). Lettres de Charles de Blois
données à Jugon, le 13 décembre 134{j, confirmant la fonclation « d'un

est très directe, soit èlu'elle se prolonge en ligne droite par
Merdrignac et .Iosgelin pour rejoindre la voie de Corseul à
Saint-Jean-Brévelay, soit qu'on la prenne pour un raccourci
entre Dinan et la voie de Corseul à Vannes ( l).
La traite entre Dol ou Saint-Malo et Varmes est]a plus
longue que les pèlerins aient à faire entre deux stations .
Après leur visite à Saint-Patern, le pèlerinage accompli,
il faut nntrer à Quimper. Ils prennent la grande voie venant
de Nantes qui évitant la rivière d'Auray passe en droite ligrie
de Vannes à Sainte-Anne (2). En chantant, ils saluent l'église
de Pluneret, et ils passent sans le remarquer cont're le champ
du Bocenno, où s'élèvera deux siècles et demi pIns tard la
chapelle de Sainte-Anne. Qui leur eût dit que cinq siècles
après eux, au temps où nous sommes, la vapeur de l'eau
bouillant dans une chaudière amènerait là des milliers de
'pèlerins ayant]a même foi et la même espérance ·qu'eux ... ;
mais ne sachant plus marcher comme eux!
Ils passent Hennebont, Quimperlé. A moitié · chemin de
Quimper, ils trouvent à Locmaria-an-Rent (Locmaria de la
une fontaine dite des Sept-Saints. Ils s'y reposent.,
route)
invofJuent. ]es Sept-Saints: 'puisent à la fontaine, se lavent les
pieds et font leurs offrandes. Pour plusieurs ce sera un
hôpital au bout de la chaussée Trédias, en la paroisse de Tromeur, sur le
chemin des Sellt-Saints à Bicongny ». Je n'ai pu retrouver ces deux der­
niers points sur la carte de l'état-major. Le prieuré de Saint-Georges est
peu au nord-est du ruisseau de Mirbel formant la limite entre
marqué un
les deux communes de Trédias et Tromeur. Dans cette dernière commune,
le nom de l'Abbaye marque sans doute le sile de l'hôpital. On ne retrouve
aujourd'hui sur les lieux le nom ni même le souvenir de Bicongny et des
Sept-Saints, chapelle ou fontaine.

Cl) Ce qu i me semble pl us · probable. Tréd ias est à pei ne à neu,f kilo­
de la voie de Corseu 1 vers La ngouèd re et Plénée Jugon.
mètres
Out.re la voie yenant . de Corseul à Vannes, M. du Mottay (p. 1fJ'J et
suiv." et M. I{erviler (p. ~éil) lraeent une voie partant de Dinan vers
Saint-Méen, Guer et Rieux, sUt' la Vilaine ... A la hauteur de Trédias,
ceLte voie ' n'est pas à 10 kil. de l'autre. La voie vue il Tl'édias était-elle
voie de jonction entre les deux autres? Il faudrait la reconnaître
une
(2) :JI moJ'ique . . p. ·244. i

denier, une obole; mais d'autres ont passé, d'autI'es vien_
dront nombreux; ' et, si modique que soit chaque offl'allde.
le p-rieuré de Locamand, yoisin et propriétaire de la fontaine,
en tire une certaine somme do :,t son rentier tient compte (l).
Trois lieues de Bretagne seulement s L~parent Locmaria de
Quimper. Nos pèlerins se, remettcn t en route, Bientôt ils
s'agenouillent dans la chapelle de Sainte-Anne du Guelen:
e'n la paroisse d'Ergué-Armel ; Bi parm i eux il y a des mala-
d'es, ils recevront des secours dans l'hôpital contigu à la
chapelle (2). . .
Un peu plus l'oin,du haut. de la colline: les pèlerins aperçoi-
vent la cathédrale dont le chœur récemment constl'llit domine

(1) Ee Men, p, 191- Le rentier cité . par l'auleur est au ' fonds du collège ·
de Quimper. - Arch. du Finistère, D. 17. ' .
12~1 Plusieurs disent aujourd'hui Notre-Dame
du Guélcn : les vieux

titres disent Sa~nle-A nne.
La charte de Conan IV mentionne « hospitale inter cluas Quimper»
appartenant aux Templiers: on a expliqué ces mots par « entre Quimper
et Quimperlé "; et, partant cie là, rapporté celte mention à Sainte-Anne
d'u Guélen, où exista tl'ès anciennement. un hôpital.
Les biens cles Templiers furent en partie clonnés aux chevaliers cie Saint-
Jean de Jérusalem, clepuis cie Malte. Un édit cie décembre 1 lin transféra
quelques-uns de ces biens aux ordl'es réunis cie N.-D. du Mont-Carmel et de
Saint-Lazare; dès le IÎlois suivant, le manclatail'e des deux ordres s'em­
pl'essa d'assigner le prêtre « possesseur et aclminisll'aleur cie l'hôpital
Sainte-Anne,- en revendicalion, restitution cles fruits, ete. Il
Mais, depuis plusieurs siècles, Sainte-Anne était en la possession de la sei-
gneul'ie clu Plessix.Celte seigneurie était sans doute entl'ée dans la maison de
Plumc par le mariage cie Constance de Léon avec Guillaume cie Plœuc ,vers
1'2(9); clu moinsfail-elle partie des biens que Jeanne,leur héritière, porla pal'
son mariage en 1 L29'l à Tanguy de Kel'gorlay, qui prit les noms et arm es
de Plœuc. En H:iï3, le seigneur clu Plessix invoqua le titre de fondateur de
l'hospice et cie la chapelle où il avait toutes prééminences et dont il pré­
sentait le chapelain, clès l'année 1',61. Il obtint gain cie cause, puisque
l'acquél'eur (en 17(0) cIe la maison de Plœuc a joui cles mêmes droits jus­
qu'à la Révolution .
L'annotateur d'Ogée reconnaît à la chnpclle Sainte-Anne le style des
'Templiel's 'et la place dhllS la commune d'Ergué-Gabéric! lOgée, 1. '2(j~ )

la vil}e, et, selon le vieil usage, ils saluent (1). Ils desG.endent,

passent le pont Firmin et entrent joyeusement en y~H.~.

Nous avons dit qu'il était d'usage de faire le pèlerinage à
certaines époques déterminées; mais le pieux ,wyage n'était
pas interdit à un autre moment; et nul doute que les pèler-in$
n'obtinssent alors la permission de vénérer les reliques ..
C'est ce que nous pouvons inférel' du pèlerinage accompli '
par le duc Jean V. Malade de la rougeole à Rennes, en mai .
14f9, il promit le voyage des Sept-Saints. Nous ne pOtIvon~
suivl'e le duc de ville en ville; mais nous pouvons cependant ,
dire que, le 21 septembre, il était à Aur.ay; que le· 22

et le 23 octobre, nous le trouvons à ,Dinan, le 29 à Jugon, le
15 novembre à Saint-Pol-de-Léon et le 9 décembre de retour

à Vannes, où il est encore les 12 et 16 du, mois (2).

De ces dates authentiques, extraites des lettres et mande-

(1) C'était l'usage pour les CornouaifIais de saluer saint Corentin quand
clu haut cles collines qui enlourent la ville. Cet usage
ils l'apercevaient
est attesté pal' le nom cie montWlne du Satnt clonné à une colline SUl' \?an­
cienne roule cie Douarnenez, d'où 'en venant en ville on aperçoit la cathé­
drale pour la première fois. Pendant mon demier séjour à Quimpel' (de
1~,5 à 18 :3i ,', j'ai YU à cet endroit pl,us d'un paysan venant en ville saluer
la cathédrale.
Les pèlerins apl'ès avoir passé le Guélen trouvaient une grande route
venant de droite (du pont du Clenyou ' et allant vers Locmaria ' (Civitas
Aquilonia.) C'étailla voie venant cie Carhaix. La yoie qu'ils avaient suivie
se confondant avec elle tournait vers Locmaria. Quand Wuimper fut une
il fallut une route pour rejoindre la voie romaine allant vers Vannes.
ville,
Celte roule fut-elle l'ancienne l'Oute rectiflée qui monte au Dourguen ? Ne
fut-elle pas plutôt l'ancienne route cie Conca rn eau monlant à Ergué-AI'mel?
Je serais pOI'lé à le croire, pui sq u'elle est plus cou rte du pont Fil'min
(alors entrée cie ,'ille) à la voie romaine. En tout cas, il ne fallait qU'l/ne
l'Oille pour arriver SUI' le plaleau entre Ergué-Armel et le Guélen; et on .
peut s'étonner qu'au temps cie la rectification cie ces routes ' on n'ait pas
joint la route cie Vannes à ce ll e de Concarneau, vers Ergué-Armel, pour
les faire descendre ensemble sur Quimper.
('2 ) Lettres et mandements du clnc Jean V. T.l • Introduction. ILiné-
raire de J ean V. p. CXIX •

ments signés par le duc , nous pouvons conclure que ,pal' ti il
pied de Vannes avec son fidèle amiral de Penhoët (1), apl'ès
le 21 septembre, le duc s'était dirigé SUI' Dol et Saint-Malo'
qu'il avait visité les deux églises av~mt J'aller à Dinan, le
22 octobre; qu'il séjourna à Dinan et au chât.eau de Ju gon
appartenant à Marguerit e de Cl1sson, comtesse de P enthi èv l'e.
qui méditait déjà la t.rahison de l'ann ée suivante. ' '
D',après ces dates, le Yoyage de Jean V, coinmencé seu]e_
me~t huit jours avant la Saint-l\:licbeJ, a dépassé de bea u_
coup le terme du tempol'éll finissant le 14 ~ctobre. Nons ne
disons pas que le duc ne E'oit rentré à Vannes que le 9 dé­
cembre ; mais il suffit de le trouver le 15 novembre à Saint­
Pol-de-Léon, à plus de vingt lieues de Quimper, pour
reconnaître que son voyage,a duré deux mois, sinon plus.
C'est que le duc séjournait de proche en proche, comme
nous le voyons faire à Dinan, s'écal'tait de la route dirècte
par exempl'e quand il alln faire visite au cbàteau de Jugon;
et, ' chemin faisant, il s'ocè~lpait, comme en ses nombreux
voyages, des affaires de l'Etat.

Tous les pèlerins n'étaient pas assurés, comme le duc de
Bretagne, de trouver bon gîte,' après une journée de m<'II'che :
et pourtant, malgl'é les fatigues, les hasards , et même les
dangers de èe long voyage, les pèlerins étaient nombreux.
Ce mot ne dit rien, il faut un chiJfre. Le voici: on a pu

corüpter que dans une seule année de la fin du X1V siècle,
tre'nte ou trente-cinq mille pèlerins visitèrent l'église de
Saint-Patern, à Vannes (2), et la plupart probablement les

(1) Lobineau. Hist. p. 5:18,
(2t Ce chiffre se déduit du total dcs offrandes, comme nous le yerrons
Wlen, p. 1\:)1.. Toulel'ois, il
plus loin. Abbé Luco; et, d'après lui, Le
ne résulte pas des renseignemenls de J'abbé Luco que fous les pèleri ns
ayant passé à Saint-Patern fussent pèlerins des Sept-Saints.

six autres églises; et ces chiffres, nous le verrons plus loin;
ne semhlent pas exagérés.
Trente-cinq mille, c'est le trentième de la population de
la Bretagne (1). Or, remarquez le, le pèlerinage des Sept­
Saints n'est vraiment populaire que dans les sept évêchés
dont ces saillts furent les apôtres ou les fondateurs; les
et de Rennes y sont étrangers. Or cès
fidèles de Nantes
'deux diocèses contiennent à peu 'près le tiers de la Bretagne
et de sa population (2). C'est donc le vingtième du peuple des
sept évêchés qui, dans cette année du XIVe sièCle, fait le
voyage pieux autour de la Bretagne. '
C'est-à-dire que sur vin'gt personnes il en partit uUe, sur
200, 10, et sur 2000, 100. On peut dire que cette année non

(1) Voici comment j'arrive à ce chiffre d'environ un million pour la
population d'u duché. ,
Nous n'avons aucun dénombrement de la population; nous savons seu­
lement que, en 1~H, on comptait dans le duché 98.447 feux. Lobineau,
JJi3t. p. 4~;). Mettons en nombres rO,nds 100.000 feux, et supposons sept
ou huit personnes par ménage'. Nous arrivons à 7 ou 800.000 habitants.
Mais ie (image était Ill) impôt roturier dont la noblesse, le clergé, 'quel­
ques villes même par privilège avaient l'exception. En ajoutflllt. 200.000
(c'est beaucoup) nous arrivons à un million, chiITre m,aximurn.
Quatre' siècles plus tard (1775) Ogée évaluait la population à 2.'211.'250 ;
mais cette évaluation ~lait critiquée comme bien exagérée ... , et elle l'était
en eJÏet.
Quatorze ans après OgéQ, en 1780, Necker évaluait la population de la

France à 24.800.000. Le chiITre donné par Ogée pour la Bretagne est de
près du onzième de la population de la France. Ce qu'il est diOlcile
d'admettre.
En eITef le recencement publié en dernier lieu (1891) donne pour la
population de la France 38.411:3.192, et pour celle de Bretagne 2.07t.137,
soit le treizième et non le onzième de la population de là France.
La même proportion devait exister en 1789 entre les deux chi/Tres: le
treizième de 24.800.000 est 1.907.692; moins de deux millions.

(1) Les deux évêchés de Nantes et de Rennes comprenaient le pays au
de la Vilaine, de son embouchure jusqu'à trois lieues au sud
sud et à l'est
de Rennes, au confluent du Meu: la limite de Rennes suivait ensuite le
Meu jusque vel'S Mordelles, puis une ligne pl'esque dr'oite jusqu'au delà
de Tinténiac, enfin une ligne irrégulière aboutissant au Couesnon aupl'ès
de Pontorson: les deux évêchés ainsi circonscrits comprenaient un tiers du
duché .et, je suppose, d!l sa population, soit epvirop 350,000.

seulement Ghaque ville, mais chaque village· fut repr.ésenté
au pèlerinage.

Nous avons dit que, dès avant 1248, il Y avait dans la
cathédl'ule de Quimper un trollC destiné à recevoir les
olTr'andes des pèlerins en général, et sans doute celles des
pèlerins dès Sept-Saints. .
Les aumônes se partageaient entre les chanoines; et en
i1 fut statué que ceux qui résidaient pendant six mois
seulement ne 'recevraient que la moitié de . la part des cha-
noines r,ésidanls toute l'année (1). ' ,
Deux ~-ècles plus taed (en 1424): Beetl'and de Rosmadec
allait commencee à.construire les tours: un tronc fut cons-
truit de BOU\Teau et fermé de deux clés :' l'une gardée par le
procureur de l'œnvre, l'autre par un chanoine. Le chapitre
abandonna toutes les offrandes pour la construction com­
mencée, en l~éservant pourtant celles qui seraient recueillies
aux a deux époques du pèlerinage,des Sept-Saints (2) ».
De même à Vannes, il y avait un tronc des pèlerins des
Sept-Saiilts dans l'église Saint-Patern; et un compte du
késorier pour quelques an nées du xive siècle a été conservé( 3).
Il ne pouv.ait en être al.ltrement dans les autres églises.
(1). Le 'Men, p. Hl ',. Il remoie au cart. 56, fo 1, lire '21.
('Z C'est ce t acle qui nous révèle que depuis le commenCflment du siècle,
les l(}Jn j )()l'atl:ll a va ien t été l'éd u i ts de qua tre à deux. Il est assez cu l'ieu x
pou l' être ci lé en pa l'tie .
« Anno Domini 1'12 '[ die XIX marlii, canonici voluerunt " quod ... fieret et
erigeretul' rie novo unus truncus firlTIandus seu clauclendus duobus cla-
yi bus, quaru.111 unalTI cuslod iet procurator opel'is in pal'te inferiori et
occidentnli ... ab nl1no inchoHti, et nliam unns cie canonicis ; quoclque
pl'OCU riJ tOI' operis rec-i peret obln tiooes omnes in cl ieto tl'U nco facienclas. .
exceptis oblationibus quœ fient cluobus tempol'ibllS anni, videlicet temporibus
pel'egeinationis septem sanc!.o l'lIl11 Bl'itanni G'c . )) Les clHlno in es se réservent
les ofIl'andes de ces cieux t'poql1es entièrement ",in soliclum) se lon l'ancien
usage.
(3) Abbé Lu, Co.

Beaucoup des pèlerins étaient pauvres et ne pouvaient
laisser aux églises qu'un denier ou même une obole. Ce fait
est constaté dans une enquête faite à Vannes, en 1400-1401-- ' ,
1402, et dans laquelle $ont entendus comme témoins des .
et des curés des environs qui avaient fait le pèle­
chanoines
rinage, et rendent compte fidèle de ce qu'ils ont vu (1).
Et cependant le compte conservé à Vannes apprend que,
dans une année de la fin du XIVe siècle. le chiffre des offrandes

des pèlerins à saint Patern s'éleva à 100 livres, « qui repré-
sentent, dit l'abbé Luco, huit ou neuf mille , francs de notre

monnaie (2) )). Les offrandes du temporal de saint Michel seul·
figurent dans cette somme pour 40 li vres, les deux cinquièmes, -

soit 3,200 ou 3,600 fr. monnaie actuelle. "

C'est de ce chiffl'e des offrandes que l'abbé Lùco a cru

pouvoir déduire le ' nombre des pèlerins, qu'il prop?se de
porter, comme nous l'avons vu à 30 ou 35,000, Quelque
élevé que soit ce chiffre, eu égard à la modicité des offrandes
, déposées, il peut n'êtJ'e pas exagéré P3). "
Chose remarquable! Les gueri'es du XIVe siècle n'interrom-
pirent pas le cqncours des pèlerins. Nous en avons la preuve
par ce qui nous est appris de Vannes, la ville, épiscopale la
à la guerre. Les A,nglais la tenaient et ils avaient-
plus exposée
transformé l'église Saint-Patern en forteresse. L'entrée de ,
la ville close et celle de l'église 'étaient interdites; milis les
reliql,18s de saint Patern étaient exposées sous le porche,

(1) Abbé, Luco . .
('2) L'abbé Luco multiplie par 80 ou (JO pOUl' obtenir le ral1porl de la livre '
du XIVe siècle au franc actuel. En 1250, M. de la Borderie multiplie par
100. En 1386, il multiplie seulement par 10. (Cours d'hisLoire de Bre­
tagne. J[, p. 215.) A l'époque ititerméc\iaire, il faut prendre' un ~hiffre
moyen, Si no semble un peu élevé, on ne peut guère du moins descendre
de 70. 100 livres vaudraient 7,00;) fI'. au minimum.
au-dessous
(:3) 30,000 pèlerins dépoSfl41t 8,000 fI', d'ort'randes la moyenne serait de
26 centimes III (2G,f:iG). Pour 35,000 la moyenne serait de près de 23 cen­
times (~ '!,85). C'est beaucoup, eu égard aux renseignemen~s donnés par les
chapoin es de Vannes, témoins en 1400. ' .'

sur une tombe dans le cimetière, ou dans une chapelle voi­
sine; les .pèlerins al~rivaient dans le faubourg leurs cierges
allumés et pouvaient accomplir en toute liberté leurs actes
de dévotion (1). Il allait en être autremeat pendant les guerres
de la fin du XVIe siècle.
Au début de ce siècle, le pèlerinage se faisait encore;
mais, s'il faut s'en rapporter, comme on ra fait (2), à un
acte de 1518~ le parcours avait été sensiblement modifié,
deux nouveaux faints ayant été substitués à deux des
anCIens. .
Cet acte est. le testament de Nicolas. Coëtanlem, neveu et
successeur de Jean Coëtanlem. Noble du pays de Morlaix,

• celui-ci appal'aît au xv siècle comme le précurseur des Jean
Bart et des SUl'couf. Sous le duc Fl'ançois II sa flotille par­
cou!'t la Manche; il monte un navire qui porte un nom
vulgaire mais significatif: La quiller .. et La Cuiller écume ·
la mer. Pour se ménager l'Angleterre~ le duc est contraint
d'éloigne!' Coëtanlem, mais il le comble de présents; el
Coëtanlem devient grand amiral de Portugal (1481).
Nicolas avait continué les armements et par occasion les
courses de son oncle; et, s'il y avait acquis moins d'honneurs,
. il Y trouvn dn moins de riches profits.
Le 11 avril 1518, Nicolas Coëtanlem .fait son testament; il
distl'iLue de grosse~ sommes à nombre de personnes et à
lIne cinquan taine de chapelles ou d'églises de Bl'etagne, de
France, d'Allemagne et d'Espagne, llotamment à Saint­
Jacques en Galice.
Le legs fait aux églises des Sept-Saints est ainsi con~~u : (:3)
(1) Abbé Luco .
('!) Le Men, p 19'2 et suiv. M. Luzel XIlI. 298 .
(3) Voir bulletin XIII (1~8:j\ p '2.,)'l-!(j!, uoe Botiee de M. Luzel sur
.Jea n et L\icI,las Cudo l,lenl, eL, à la su ite, plusieurs pièces, nol. p. '2ü'2-'29:), le 'l.'eslament rie lVicol'.ls Ooë'anlrnn en laLin avec trilducLion
en françilis. Le legs relalif aux Sept :Saints de IIretaigne se trouve aux
pages 'l~l-'283 . en français .

« Aux Sept-Saints de Bretagne, savoir: à M. saint pierre
de Nantes, à M. saint Paul, à M. saint Tugdual, à M. saint
Guillaume de Saint-Brieuc, à M. saint Samson, à M. saint
Brieuc, à M. saint Malo, à chacun d'eux un écu porté, et
faire le' tour, ainsi que l'on est accoutumé, par le dit testa­
teur ou par quelque autre, au nom du dit testateur et en ses
dépens.
Nous soulignons les deux noms de saint Pierre et de saint
Guillaume. Saint Pierre, qui n'est pas un saint breton, a
pris la place de saint Patern; saint Guillaume, l'évêque de
Saint-Brieuc canonisé en 1247, est substitué,_ non à saint
Brieuc, avec lequel il recevra les prières et les vœux des
pèlerins, mais à saint Corentin, le fondateur de l'évêché de
Quimper. _
Ainsi le Tro-Breiz est absolument modifié: Quimper et
Vannes ne voient plus passer les pèlerins; mais à :Saint­
Brieuc ils s'agenouillent devant les deux patrons du diocèse;
et à Nantes, ils prient dans la cathédrale de saint Pierre. -
Quoique dise Coëtanlem, que l'on est accoutumé de faire
ainsi le tour, nous ne pouvons croire que saint Pierre ait pu
jamais être pris pour un saint breton. Ne peut-on pas soup­
çonner une confusion entre les deux noms latins de Pierre,
Petrus et de Patern, Patefnus ? -
D'autre part,le vieux marin était-il si bien instruit des noms
des Sept- Saints bretons -qu'il n'ait pu faire er-reur en nommant
saint Guillaume au lieu de saint Corentin? Peut-être Coë­
tanlem avait-il une dévotion particulière à Guillaume, le
dernier évêque breton canonisé? Quelle apparence que
la route conduisant à Quimper fût abandonnée par les pèle­
rins, et que l'église de Saint-Brieuc seule en Bretagne eût
deux des Sept-Saints? '
N'attachons donc pas tant d'importance aux corrections
faites parCoëtanlem à la liste de nos Sept-Saints et ne croyons
pas que ces corrections aient été admises en Bretagne- ,

,Nous avons la plwuve du contraire . . N!avons-nous pas
',.dit qu'au temps où Côëtarilem dictait son testament, Alain
. Bouchard, dans son édition de 1514, donnait les effigies et
les noms des Sept-Saints qu'il nommait les patrons de la

Bretagne .? N'avons-nous .pas vu, à la fin du XVIe siècle
d',A lZgentré .écrire que les Sept-Saints de Bretagne étaient
les se"pt évêques venus d.e la Grande-Bretagne dans la Petite
,a\'ec les émigrés bretons? Enfin au xvrr siècle, le P. Mau­
noir céléb'rait les Sept-Saints, Paul, Tugdual, Briellc, Malo,
Samson; Patern et Corentin qu'il met au premier rang, à
cause de la. vénération particulière qu'il avait pour l'évêque
du d,i'oGèse auquel il avait consacré son apostolat et dans
lequel il d'evait mourir (1).
Comme on le voit, la tradition des noms et de lu qualité
'des-8ept-Saints est constante après comme avant la pièce que
-nous venons d'étudier .

Nous avo"Us vu dans la suppression de deux des qua tre

àvan~ la fin du -X.V siècle, un indice de l'a[faiblis­
tempol'aux
nt de la vogue du pèlerinage au cours dè Ge siècle. On
-seme
péut 'cl'oire que la décadence, une-fois .. commeneée,contiuuél
au XVIe siècle; « et vers la fin ùu' siècle les guerres.de ·la Ligue
. rendirent impossible cet acte·de l'eligion .)) (2) .

(1) ,M. Le Men dit, en bon Quimpérois .dévoué à saint Corentin ':
« Est-ce pour l'acheter cette injusti(~e ll'exclusion de saint Corentin
tle l:a liste des Sept-Saints) que le P: Maul1oit' écrivait au XVIIe siècle les
lignes suivi:mtes »apl'ès avoir nommé les Sept-Saints: (( Vous avez· été
entre les beaux ,astre~ .de l'Eglise, ce qu'est le soleil entre les planètes:
Vous avez été le premier maître des H.ois de l'Armorique .. " et le P.
·Mam10lt' cite ·la séquence de la tète de saint Corentin. Non! Jamais le
P. Maunoir, qui n'avait pas su le Lestament de Co i:!tanlem, ne sl.est .clou.té
de. l'éclipse prétendue subte par le nom de saint Corentin. Cette phrase
'du ·P. Maunoir se ' ll'û"uve dans la préface de son livre (rarissime) intitulé
·le Sacré cùllè.gè de Jésus. (Abbé Peyron'. .
(~) Le, Men 'p. 103.

Et cela s'explique trop bien. Les gUeI're.s du XIVe siècle
n'avaient pas, nous l'avons vu: interrompu le pieux voyage,
parce que les Anglais entrés en Bretagne étaient catholiques
comme les Beetons. Mais, pendant les guerres de la J..Jigue,
il en allait tout autrement. Les Anglais venus au .secours de
l'armée royale, .les lansquenets allemands, les soldats gas­
cons enrôlés dans l'armée étaient anglicans, luthériens, cal­
vinistes. Ils voient des idolâtl'es dans' les catholiques ligueurs
ou non: « Ils pillent, disent les Etats, profanent et· brûlent
les églises, et foulent les saints sacrements aux pieds (1) »:
Supposez ces hommes dont l'indiscipline a fait une troupe de
brigands rencontra"nt des pèlerins en route!... La prudence
commandait aux pèlerins de ne pas tenter le voyage. .
l'habitude du pèlerinage une
Après des années de troubles,
fois perdue ne reprit pas.
Mais le souvenir resta, nous l'avons vu par l'exemple du
P. Maunoir, et l'Eglise Gontinua à chanter ses hymnes en
l'honneur des Sept-Saints.
Au dernier siècle, un imprimeur de Quimper (Jean PeI'ier)
éditait le propre du diocèse (1702 ) : il y comprenait une
séquence pour la fête de saint Corentin qui commenC8 ainsi:
Septem sancto's veneremur , Vénérons les Sept-Saints,
Et in illis admiremur et admirons en eux
Septiformam gl'atiam ; les sept dons de l"Esprit;
Qui pervers os converterllnt, ils ont converti les infidèles,
Qui repleti repleverunt remplis de la science sacr~e

Dogmate Britanniam. ils en ont rempli la Bretagne .
His prœfllisit Corentinus A leur tête brille Corentin

(l) 'Remontrances des Etats au Roy, 4 janvier 1503 (Mor ice, Pl'. III, col.
15:'17). Sur ces actes de sauvagerie sacrilège (Mol'eau, ch. XIX, p. 138, et
Il, 398-399;, etc.) Quant à l'ef'fl'oyable inclisèipline de l'armée,
Moriee, Hist.
le calviniste royaliste Montmarlin voit dans le désastre de Craon une juste
puni'tion « de tant de rayages et d'inhumanités sur le pauvre peuple. »
(Moriee, flist. Il, CCXXXVI). . .

Patern et Malo
que
Quem Paterous, Maclovius~
le visitant en ce lieu même
Dùm hic locus visitatul'
admirent sans réserve (1).
Adinirantur nimium.
A :nsi dans la séquence de saint Corentin, voilà rappelés
les Sept-Saints,pères des Bretons dans la foi ,et voilà nonimé's
Patern et Corentin qu'on nous a rüprésentés comme exclus
de la glorieuse liste' dés le commencement du XVIe siècle.
Pendant qu~ l'église de Quimper chantait, au denlÏer
siècle, les saints Patern, Corentin et leurs cinq compag'llons,
cathédrale con,servait « l'ancien autel » signalé en 1701 à
Lobineau, et elle l'a gardé jusqu'aux sacrilèges dévasta­
la fin ,du siècle (2).
tions de

L'hymne ne se chante plus. L'autel a disparu; seule la
petite niche qui le surmontait en m?-rque encore la place au
pilier droit de l'entrée du chœur au-dessus de la statue de
saint Corentin. Le souvenir des Sept-Saints est rappelé dans
un panneau qui ,les représente ' en peinture au l'étable de
l'autel dédié à Notre-Dame de la Victoire, dans la chape.Ile
absidale; mais ces images sont trop 'peu visibles.
, Il y a une vingtaine d'années, les chapelles qui entourent
le chœur ont é'té réparées. Presque toutes ont reçu des voca­
nouveaux~ dont quelques-uns dictés par de généreux
bles
donateurs sont des noms de saints éteangers à la Bretagne
(1) Je copie ceLLe séquence dans S.lint CorenUn. htsto':l'e de H vie (~t
dJ so , ~ culte, par M. l'abbé Thomas, aumônier du Lycée cie Quimper. -
Quimper, de Kerangal, 1887, p. 'n-1-'276. , Pdtem et Malo. c'est-à-dire
les pèlerins diocésains des saints Patel'll et Malo.
(2) L'autel cie Quimper fut détl'uit dans le sac de la cathédrale le jour de
la saint Corentin, H décemure 1793 :' les statues des saints, si elles
étaient de pîerre furent bt'isées comme les effigies de3 évêques dont les
sépultures furent violées. Si elles étaient étaient en bois, elles furent
brùlées sul' le Ch~mp-de-f)ataiUe au pied de la statue de la Raison, solen­
nellement, et en présence des autorités constitùées. C'ét'ait l'executi on'
d'un arrêté de la commune de Quimper presct'Ïvant cc la destruction des
idoles Il. Le'Guillou de Pènanl'OZ L'Administration du Finistère p 374-,

- :làS ....

et même à la France. Comment n'a-t-on pas réservé une des
place· et une des premièl'es -- pour l'autel des Sept-Saints?
Toutefois, une travée reste vide vers le haut de l'église, à
droite, entre la chapelle Saint-Paul et la chapelle des Saints-
Anges. Voilà une place bien en vue et qüi, à ce titre, serait
bien choisie pOUl' nos Sept-Saints Bretons, « apôtres et vrais
pèl'es de la nation bretonne en Armorique. »

Mais cet acte de réparation restera-t-il isolé? ..
Pendant des siè'cles, six cathédrâles bretonnes et l'église

de Saint-Patern de Varmes ont reçu la visite des pèlerins
des Sept-Saints de Bretagne. Les églises de Saint-Pol, Tré-
guiel', Saint-Malo et Dol ont été dépossédées de leur siège
épiscopal; mais elles subsistent. Or, si je sLiis bien informé,
dans aucune des sept églises hors Quimper il ne reste une
image, une inscription, un souvenir collectif des Sept-Saints
de Bretagne!
, Ce n'est pas tout. Des chapelles ol'iginairement dédiées à
nos Sept-Saints, combien, tombées en ruines, ont disparu!
Combien ont été vendues à la fIn du dernier siècle pour être
livrées à un usage profane ou exploitées comme carrières!
De celles qui subsistent combien ont changé de vocable, ou '
bien gal'dant le vocable des Sept-Saints sont consacrées à
d'autres que nos Sept-Saints de Bretagne!
Je n'ai pu retrouver et nommer plus haut que quatre de
ces chapelles: il faudrait retrouver les autres.
Le travail qui précède appelle, me dit-on, ce complément.
Je me suis laissé persuader; et; 'avec votre aide, je veux
essayer une enquête par toute la Bretagne sur les chapelles,
fontaines et lieux ayant porté ou portant encore le nom des
Sept-Saints. Les renseignements qu'on peut attendre ne
manqueront pas d'intérêt; ils nous réservent, je crois; plus
BULLEnN AllCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XIIIl. ( émoires). 16

d'une surprise; mais ils nous montreront, aussi bien que le
p'~lerinag~, ce que fut le culte d'honneüp si oublié, si mécOhnu
urd
a:.tj9 'hui. que nos .pères rendaient aux Sept-Saints' de.

Bretagne. . . .