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à l'histoÎl'e
servir
Notes ', pour
ED. PIETTE.
l)AR
eutait encore sur l'existence sltnultaneede,l homme et ,des "
Couilles dans les cavernes. Le résultat de leurs e'xp16ratIùns.
les fr~ppa eux-mêmes d'étonnement. Cet homme des vieux ,
temps quoterna~res, auquel les uns ne voulaient pas croire, " "
de l'animalité, s'était élevé à la 'conception' des art's plas- "
tiques' et, s'était pass~onné pour eux. Ne c6nn~issant pa's ' fè"::-'
métal, il s'était efforcé de sculpter et de gi'aver avec des
éclats de silex,et il avait représenté, non sans un remàr-
quable talent d'imitation, les . animaux au milieu des:q'uèl~ il .
avait vêcu, le mammouth, le renne; les équidés, etc. Cettè '
révélation produisit, dans le monde savant, des sentiments '
d'admiration ou de scepticisme et, chez les explorateùrs des
cavernes, un gi'and enthousiasme. ' . '
Je demandais un jour à M. Franchet, excellent observa-
vateur qui a dirigé les fouilles de M. de Vibraye à Laùgerie~ '
Basse, s'il n'a~ait pas étudié la composition des amonèelle~
ments à gravures et à sculpture et s'il n'avait pas observé
des différences dans les couches dont ils sont formés. Il me ' .
répondit: « Ni M. de Vibraye ni moi n'y avons 'songé; et ' "
et Christy n'ont pas pensé plus que nous à en faire .
Lal'tet
l'étude stratigraphique. Émerveillés à la vue des surprellants '
vestiges d'un temps si éloigné, nous ne cherchions H 'que ;dës " ,
gravures et des sculptures; nous les cherchions 'avèc la
même passion que l'ouvrier des placers qui a la soif de l'or
et -n'a d'yeux 'que pour les pépites dans les terl'es' qu'il
retourne. »)
Ce qu.e lJle d·is,ait M. Fran"che.t est vrai. Il serait pourtant
inj~ste de prétendre que les ppem~e.rs fouilleurs de grottes
n'O,I~t fait qu'appol'ter . de nouvelles preuves à l'appui de la
contemporanéité de l'homme et des animaux disparus pen-
dant l'ère quaternaire primitive. Lartet et Ch-risty et, après
eux, MM. de Vibraye, franchet et 'Garrigou on,t su distin,-
guer, dans le's cavernes et les abris, trois types de stations
humainE(s, celui du Moustier, celui de Laugerie-Hal,lte et
celui ~e la M~delei ne (Basses-Pyrénées).
To\)~efois, en présent<;lnt ~n bloc au p,ublic les vestiges
de~ <;lmas à g~avu.res et à sCI,l,lpture,s,ils ont involontairement
fajtnaître, d.ans ce,rtains esprits, une conception erronée
dont ils ne son,t pas responsa.bles : des ar.chéologues se sont
imq.giné que l'homm.e de l'âge du renne était venu occuper nos '
régipns <;l~~C ~ne i'ndustrie toute faite et qu'il les avait quit
tées lorsque le 'cl,i~at lui était devenu défavorable, sans avoir
ri~J1 q.jouté à sa civilisation première. En réalité la civilisa~
tion t,lfandienne est née sur le sol de l'Europe occidentale
et surtO,llt sur celui du pays. de ,Gaule; elle s'y est déve-
y. q. eu son ~pogé~, ses transformations et son déclin.
loppée,
Lo'l;sque l'on explore attentivement: couche par couche, les
amoncellements des cavernes, on voit l'industrie se trans-
former d'une assise à l'autre, et ses progrès se · réaliser ..
succ.essivement par l'invention d'armes ou d'instruments
nouveau,x, ou par leur pel'fectîonnement; et rien n'est plus
captivant que cette étude. C'est celle que j'ai entreprise de
puis vingt-trois ans par l'exploration de nombreuses grottes;
et je c,rois pouvoir maintenant en faire connaître les résultats
, avec quelque ~ssurance. ' .
Je, nomme glyptique la péi.~iode pendant laquelle l'homme.
des vieux temps quaternaires çisela l'os, la corne, l'ivoire
Ou lq. piarre, à::- l'aido du sUex, les sculpta ~u les couvrit, de
de Solutré et ne s'est , terminée, qu'à 1 extmctIOn du renne
dans nos reglOns. " .
des ossements brIses' des ammaux'
cavernes se compose . ffi ' ;. :' ,
, . l'h Un examen superficIel su It pour
manges par omme.· ., " .
' At les vesticres des éqUldes predomment
aire reconnal re que 0 . ' , ,
'l'nfe'rl' eures et que ceux des , cervIdes sont
ans es assIses, . ' ,
équidiens et les temps eervidiens, ,
On peut croire, au premier abord: que celte division
repose sur un fait bien peu important: lm changement dans
la nourriture de l'homme. Mais ce changement en indique
un dans le climat. Les équidés et surtout les chevaùx se
plaisent dans les pl'airies plantureuses. Les rennes préfè
rent les pâturages couverts de mousses et de lichens; ils
savent écarter la neige avec leurs sabots et les palettes de
leur ramure pour atteindre les végétaux dont ils se nour
rissent; et là où ils vivent en hiver sans souffrir,les chevaux
ne pouvant brouter que les brindilles des ârbres au-dessus
de la nappe neigeuse mourraient bientôt de faim. Le chan
gement des espèces vivant en troupeaux dans le voisinage
des demeures de I1IOThme est donc l'indice d'une modification
de climats. L'élude de~ gisements prouve d'ailleurs, comme
on devait s'y attendre, que le remplacement du cheval par
le renne fut plus complet dans les régions mo'ntagneuses que
dan~ les pays de collines et de plaines. '
temps équidiens, assez doux au début pour que
Les
l'homme se plût à construire ses huttes en plein air, èbfitrè
l'escarpement d'un rocher, deVInrent progressivement. secs '
et froids; les oiseaux des rég'ions c~rcumpolaires coriimen-
cèl'ent à affiue ... dans le midi de la France, et'les hommes
transportèrent leurs demeures dans' les càvernés ôu sous
l'abri d'un rocher en surplomb. Avec les temps cervidiens,
le ,cie,lse, chargea de plus d'humidité ; mais' le froid ~ubsista
d'~9()rd et couvrit les campagnesde '-frimas. La température,
finit cependant par être moins rigoureuse, et la fin c!est,~mps
cervidiens fut caractérisé'e par des iùondations llOmbreuses,
, dont on voit les dépôts dans les grottes sitùées au voisinage
des cours d'eau. " '< ' ' ,
Les , temps , éqTh-idiens comprennent aeux sûbdÏ\Tisions ':
éliphanUe~ne ou éburnéenne et l'époque hrpii-
l'époque
qUte~ne. , ',' " " . ,
L"e~ iemps cervidi,en·s en comprenüJntüeux également:
l'époque rangilérienne et l'époque élaphienne. ~
,Époque éléphantien.ne.
L'époque éléphanti~LUlè, qui corl~espond ' à celle de S,olutré,
prcsent~à!,on , début deux sortes' de stations ,: cel~es des
plataux,du , nord-est " de la France, où le climat est con,ti-
nentral et celles du 'midi, situéesassèz pr;ès du littoral pour
que l'influenc.e "du climat maritime s 'y soit' fait sentir. Le
type de lac ,première est 'Solutré en Mâco'n'nais; c~lui de la
seconde , est Brassem pouy -en-Chalosse. '
Ces deux gisements sont c'6mplexes et leurs assises sont :
loin d'être toutes synéhronlques. Celles qUé je rega'rde "
com~~ , :contemporaiiles sont la: premiè're de Brassempouy,
fouill;ée par 'M. de Laporferie, et ta d'erniere de Soll}-tré, que
M. Arcelin a " décdte sous le nom de f0!Jers de l'âge d(!,
renne. Elles renferment toutes deux des pointes de lance en
silex et des ,grattoirs ,identiqnes, et toutes deux, au point de
vue de l'arl, sont caractérisées par la sculpture en ronde
bosse. Leurs faunes se ressemblent beaucoup'. A Brassem-
pouy" on a trouvé le grand ,félin ' des cavernes, la panthère,
l'hyène, JaGhetée" , .le , loup, le renard, l'ours 'des cavernes, ]e ,
rhinocéros , à
nadnes ' cloisonnées, Je mam'mouth, le .chevaL
renne, ,le cerfCQmmun. M. Arcelin cite les
l'aurochs, le
mêmes espèces dans les foyers de l'âge d,u renne de Solutre,
à rexception ,'de la pentl~'ère et du rhinocéros. Mais ce qui
différencie l~s gisèments, c'est ciué le renne, abondant sous
le climàt rigoureux du Mâconnais, fut très rare en ce temps-'
là, dans la Chalosse, tandis q~le l'éléphant, tres commun ,a
Brass~mpouy, fut en nombré bien 'JJloindr~ à Solutré.A~ssi les
habit~nts de Solut~'é sculptèr,ent n:voire du, ma!llmout,h, ma~
tière qui se prête admira~lerrie'rlt ,'~ ce ' travail; ,ils devinrent
d'habiles artistes épris des for'mes féminines. Ils ,firent, non '
seulèment des statuettes, mais., des amulettes, et d'autres-
objels ql~ " ils couv~ire'nt , de sill~ns ondu-Ieux et profo~ds d'un, '
caractère très qrnemental. Les lqngues saillies sinueuses
placées entre les sillons forment de y:,éritables reliefs. Ce- '
pendant ,Il n'apparaît pas jusqu'à pré~e:ntl.par les œuvres
parvenues jusqu'à nous, que les horp.mes ,de ce temps aient:' "
appliqué l'art dU ,'relief à la figuration des êtres animés.
De'remploi de l'ivoire, pour la sculpture résulta lin art
particulier, l'art éburnéen que l'on doit distinguer, de l'-art '
tarandien qui fl?rif aux époques suivantes en utilisant la
ramure du renne comme matière sculptable.'
Si, dans la Chalosse, à l'époque éléphantienne, quelques
tribus élevèrent leurs aspirations au-dessus des besoins de ",
l'existence matérielle et emplo.yèrent,leurs lo:sirs à la pra- "
tique des beaux-arts, : d~autres restèrent immobilisées dans
les mœürs' et les cQutumes ancestrales" ,n'ayant ·~ncore
d'autr'e désü' que de satisfair'e les appétits de la vie animale. '
Les stat.ions qui se rattachent à cf\lle de Solutré par la forme
de leurs silex sont nombreuses; mais il n'est pas toujours
facile de savoir siylles ont é,té touchées" par une étincelle de
civilisation. Presque toutes son~ les emplacements de de-
'meures construites en plein air, à l'abri d'un escarpement '
de rocher, et ap-rès leur abandon, les œuvres d'art, s'il y en
et les ossements se sont trouvés exposés à la pluie et
avait,
à des gelées intenses dont l'action fort souvent l~s a désa-
grégés et détruits. Pal'mi ces stations, il y en a de div~rs
types qui s'échelonnent dans le temps; telles sont celles de
Montaut, du 'Bouchet et de Gorge-d'Enfer. "
, Toutes ces ' stations paraissent, d'après les débris osseux
qu'elles contiennent en plus ou moins grande quantité.
appartenir à l'époque éléphautienne. Il ne faudrait pourlant
• pas considérer cette , assimilation comme incontestable. La
présence d'ossements de Mammouth, celle même de dents
-de grands carnassiers n'en est pas une preuve indiscutable,
puisque ces carnassiers vivaient encore presque tous à
répoq~e hippiquienne, et que le mammouth ne s'est ét.eint
que vers la fin de la période glyptique. Il est certain qU'aux
temps éburnéens, il y eut des tribus très différentes par
l'état d'avancement de leur industrie, les unes attardées et
très. grossières, ne se servant ençore que du silex, les autres
excellant ' déjà dans l'art de la sculpture, Et cet état de
choses dura longtemps. Peut-être même les tribus rebelles
aux beaux-arts se perpétuèrent-elles jusqu'à la fin de la
période glyptique, puisque aux temps, néolithiques, quand
le travail de l'os fut à peu près abandonné, on vit reparaître
dans quelques régions une partie de l'outillage en silex de
Solutré et notamment les pointes de sagaie. I~ y avait donc
eu quelque part des familles qui en avaient consèrvé la
tradition. .
, Les fouilles de Brassempouy, qui ont permis de cons- .
tater, au début de la péri,ode glyptique, une époque ébur-
, ' néenne, ont jeté un jour puissant sur l'état des premiers
hommes qui se sont élevés au-dessus de l'animalité dans
notre contrée. La descriptioll des stations stériles en œuvres
d'art ne rentre Ras dans le eadre de cette note. Je n'ai donc
pas à m'oècuper de celles de Gorge-d'Enfer, du 'Bouchet,
de Montaut, de Laugerie-Haute, de Saint-Martin d'Exci
deuil, de Ba'degol, de la Balutie, où l'on ne rencontre ni
gravures ni sculptures.
, Époque.hippiquienne.
A l'époque _ des éléphants succéda l'époque hippiquienne,
ainsi nommée parce q,ue, dans ces amoncellements:' le pom
bl'e des 0$ de cheval est v'raiment considérable,'et aussi parce
que les al,tistes de ce temps ont parfois représenté cet animal
avec le long panache de sa CJueue et, de sa crinière flottante:
Elle eut deux plJases : celle de la sculpture,en relief et cèlle
de la gra\'ure aux contours découpés. Pendant la premièr~,
~a faune fut à peu près ce qu'elle était aux temps ébürnéens ;
elle comprit le félin des cavernes, la 'panthère, l'ours des
cavernes, l'ours féroce, le renard: le mammouth; l'aurochs,
le renne, le bouquetin, etc. Il y a don'c eu continuité de .
Les , rennes et les aurochs étaient nombreux, les
faune.
mammouths peu abondants, même dans les plaines. L'hyène
tachetée avait peut-êtl'e disparu. L'action, d'un climat sec et
fl'oid déterminait les principales différences entre les deux
époques. Les grands carnassiers et les pachydernes en su
bissaient surtout l'influence. Pendant la seconde phase, les
devinrent de plus en plus rares; j'ai encore trouvé
éléphants
panthère dans ses amoncellements; je n'y ai plus
des os de
rencontré de débris de grands félins ni d'ours des cavernes.
Ces espèces semblent s'être éteintes pendant ,la première.
Les aUl'Ochs étaient devenus moins nombreux. Mais s'il n'y
eut pas de révolution brusque dans la faune, une transfor
, mation considérable se produisit dans les arts ' et dans l'in-
dllstl'ie.
L'époque éburnéenne · avait été cQractérisée au point de
l'art, par la sculpture en -ronde bosse. Ses artistes
vue de
s'étaient plu à reproduire 'en ivoire les contours féminens.
La première phase de l'époque hippiquienne fut caractérisée
par la sculpture en relief. Ses artistes, au lieu de s'adonner
à l'étude des formes humaines, se complurent à Ja représen
tation des animaux. Ils n'abandonnèrent pas complètement
la sculpture en ronde bosse. Cette forme de l'art subsista,
quoique peu usitée,' jusqu'à 'la fin de la période g·lyptique.
Il y eut transmission de généi'atlon à génération . . On faisait
encore des statl,lettes aux temps cervidiens. .. ' _
Ce fut à récole de la nécessité que l'homme apprit à
sculpter en relief. Le climat, en devenant plus sec, avait.
rendu, comme je viens de le dire, les éléphants plus rares" .
surtout ,dans les régions élevées et montagneuses qu'ils n'a- ,
vaient jamais guère fréquentées. Faute d'ivoire" il fallut
ciseler la ramüre des rennes que l'on avait en abondance
et qui d'ailleurs était bien supérieure pOt~r la confection des
-armes et des instruments. Mais le bois de çe .cervidé es.t
aplati; le milieu en est spongieux; la portion corticale se
prète seule à la sculpture. Les artistes obligés de choisir les
parties les plus plates, où le tissu spongieux e~t très mince,
ne pouvaieùt donner aux animaux représentés une épaisseur
suffisante. Aussi , les stat.uettes en bois , de renne sont-elles
faites ordinairement pour n'être vues que de côté. Elles sont
en réalité fOl'mées de deUx reliefs accolés l'un à l'autre et
raccordés, souvent ave'c maladresse, par le dos et par le
ventre. L'homme de ce t.emps cherchait à se perfectionner
dans son art. Il imitait, par la sculpture, le squelette et
l'écorché; il faisait des ét.udes du pied et
reliefs étaie'nt !ordinairement très bas; aussi pour mieux
faire apercevoil' diverses part.ies de la tête, notàmment les
yeux, il en exagérait la saillie. Cette exagé,ration d~wint,
dans les 'âges suivants, la caractéristique d'une école de
sculpture. ' -' , -
Il ne borna pas l'art à la représentation des être animés;
il imagina des ornemenis dont il ne trouva pas le modèle
dans la nature. Telle est la volute dont ii sut varier les
formes les plus gracieuses, tantôt sculptant des circonvolu
t'ions en relief, tantôt les creus'ant. largement dans le bois de
renne. 'Tels sont aussi le cercle à centre faisant saillie, les
torsades gui ressemblent à des colonnes. Ces ornements
sont entrés dans le domaine de l'humanité. De la volute sont
rent . ,?os tentures, nos rideaux et nos tapisseries, et nos
arc,lute,ctes font encore ciseler sur nos monuments les cercles
àJcentre en relief. '
juger par ce que nous savqns, cette. première pha~e
A en
de l'époque hippiquienne, malgI:'é l'infériorité .de lamatiè~e '
sculptable, . fut la plus brillante des temps quaternaires au ~
point ~è ' vue de l'art, et. s'il ne convient pas d'être plus affir- '
matif â. c~ sujet, c'est parce que l'époque éléphantienne nous .
est iÙ'lpiuTaitement COllnue et nous réserve peut-êh'edes'
surprises. ,
Aucune pointe de sagaie en silex rappelant les formes de
celles de Soluh;é ' ne gît dans les amas formés pendant la .
première phase des temps hipplquiens. Mais on y trouve
des armes en ramure de renne ornées de reliefs et un outil-
lage en bois du même cervidé, remarquabl~ par le nombre, ..
la forme et la nouveauté des instruments.
La statioi1 de la rive droite de l'Arise, dans la g110tte du .
Mas-d'Azil, présente à sa base un amoncellement qui est •
un excellent t.ype de cette époque. Il repose, par places, sur
de petits amas à ossement.s d'aurochs et de cheval, jsolés
dans les dépressions du sol, trop peu earactérisé,s par leur
faune et 'leur industrie pour que l'on puisse leur assigner
une date précise, Ils paraissent cependant se relier étroite-
ment à l'assise hippiquienne. ·Celle-ci contensit, à sa partie
inféri.euse, quelques' sculptures en ronde-bosse taillées dans
le bois du renne, mêlées à des sculptures ·en bas-relief. Les
couches suivantes ne' contenaient que des figurations d'ani- . '
maux en ' saillie. Toutes étaient en ' ramures de renne, à
l'exception d'une qui était en ivoire et représentait des
bouquetins (1) . . A la partie supérieure de l'amoncellement,
(1) On doit s'attenclrë à trou ver des objets en ivoire clans les pays de
collines et de plaines. qqe dans les régions montagneuses. L'habitat de '
Il ne peul gravir les penles abruptes ..
l'éléphant est dans lesvaHées.
la gl'avure commençait à se mêler à la sculpture sur un
même bois de renne. Et comme aucun progrès ne s'est
pel'du pe.ndant l.a période glyptique, l'art du relief va passer ..
dans les âges suivants; mais il sera encore moins usité que
la sculpture en ronde bosse. '
Cette assise, bien développée au Mas-d'Azil', était très
mince à I3rassempouy, à peine indiquée à Gourdan, nulle à
Lortet, bien représentée dans les deux geottes d'Arudy et
dans celle de Lourdes, riche à la Madeleine,. à en juger par
les planches des llèliquiœ. Les publications de M. Lartet et
Christy, Girod et Massénat prouvent que les sculptures sont
très nom!)rcuses sous les vastes abris de Laugerie-Basse.
Sur les amoncellements à sculptures en reliefs affleurent
ceux qui renferment des contours découpés. L'artiste exécu
tait une gl'avure sur un fragment d'omoplate ou tout autre
os mince, puis il retranchait toutes les parties de l'os qui
dépassaient .les contours de l'animal gravé. Les objets qu'il
dessillait ainsi étaient ordinairement des têtes de cheval
avec la chevêtre, des tètes de bouquetin, de chèvre, etc .
Parfois, lorsque l'os avait une épaisseur sufIbante, il le
àe'tlsait en certains endroits pour donner un peu de relief
aux parties voisines qui devaient être en saillie, et son
œuvre alors tenait à la fois de la sculpture et de la gl'avure.
D'aui refois, après avoir gravé une tête sur une surface plate,
il raclait ]'os tout autour, au lieu de l'enlever complètement,
et faisait ainsi une gravure au champlevé. Il découpait aussi
des rondelles d'os pour y figurer divers sujets. Toutes sont
percées au centre où sé trouvaient fans doute leurs points.
d'attaelle. Les plus ccmmunes étaient celles où étaient
dessinés un cercle et ses rayons.
Avec ces gravures sur os d'une forme très caractéristique,
il Y en avait d'aut.res rares sur le bois de renne' ; on voyait
aussi quelques outils en ramure, nouvellement inventés, et.
uu ensemble intérass:mt ~e p :Jtits
si{ex bie:l tt>availlés:
étrang~r.3 aux aS3isa.3 inférieure3 .
Époq'ue ran[Jilérienn~ .
Sur les amas équidiens s'étend8nt, en stratification ordi- .
nairement tranO'ressive les anus cervidiens. A la base de
l'assise ranO'iférienne on trouV8 encore des contours décou~
pés, mais cette forme de l'art disparaît avant le milieu de
cette assise pour ne plus repal'altre ensuite.' Les rondelles:
au contraire, sont assez nombreuses dans toutes les couches,
jusqu'à la ' fin de la période glyptique. Les artistes y gra
vaient alors presque toujours des animaux au lieu d'y
buriner des rayons. L'époque ran'giférienne fut par exèel-
lence celle de la gravure. L'homme en couvrit les os et les
ramures du renne. La' sculpture fut délaissée. Elle eut ce
pendant encore quelques fervents et produisit des œuvres
qui ne 'sont pas sans valeur, notamment une tête d'équidé
en ronde bosse, très remarquable, trouvée au Mas-d'Azil, à
la partie supérieure de rassise. presque à la limite inférieure '
des amas élaphiens. L'œil est placé sur une saillie pour le
rendre plus apparent : les naseaux et la joue ont un relief
très exagéré à dessein. Ces artifices employés pour frapper
les regards démontrent combien les artistes avaient réfléchi
à leur art, avaient tl'availlé et combiné les effets; et l'on ne
peut se refuser à y voir des procédés d'école.
C'èst de la même assise ou de l'assise élaphienneque pro- .
vient une autre sculpture due à la même manière, représen
tant une tête de Cervus elaphus, recueillie par M Nelli dans
la grotte des' Espélugues à Lourdes. L'œil est placé aussi
sur une saillie; le mufle forme un relief considérable, très .
exagéré, et sur ce relief, les naseaux et les lèvres ressortent
encore. C'est du convenu; ce n'est pas l'imitation exacte de
la nature; mais de loin, cela fait un grand eflet.
L'existence d'une école propageant ses procédés ,et les .
transm,ettant de génél'ation en génér.ation pro:q.ve q.ue les
belles gravures et les belles sculptures .des temps quater~ · · .
naires n~ sont pas de simples manifestations-.d'activité indi
viduelles et isolées, mais les productions d'un' art véritable,
reposant sur des données apprise.s. . ! , : .
Des armes et des instruments nouveaux, mêlés aux petits.:
outils en . silèx signalés dans l'amop.cellement précédent;
donnent aux amas rangifériens un cach,et particulier. Leur ,
faune se rapproche beaucoup: de celle des temps ac~uels. Iile .
renne prospérait; de. rares bandes de mammouths -parcou- .
raient encore la campagne; ) Jes trou.peaux d'aur:oehs GOU,:" .
vraient parfo"is les plaines. Mais rien ne prouve jusqu'à pré:
sent que les espèces de grands carnassiers qui vivaient au ..
commencement de la période glyptique subsistassent ~ncore.
Ce fut pendaiit l'époque rangiférïenne que fut inventée .. :
l'aiguille; on en a trouvé quelques-unes dans l'assise pré .c~- ,
dente, mais elles paraissent y avoir été introduites par des
remaniements. Le harpon a été connu dès les temps raI)gi-
fériens; l'usage ne s'en génér'alisa pas immédiatement.
Les amas d(3 cette époque, tr(~s développés à Gourdan et
au Mas ' d'Azil, n'étaient pas sans importance dans les ca
vernes de Lortet, d~ Lourdes, d'Arudy, de Saint-Michel
d'Arudy. On croit en avoir trouvé des traces à Bra,ssempo'!y.
L'abri de Plantade, à Br,:miquel, les cavernes de la Made-
leine et des Eyzies, l'abr: de Laugerie-Basse renfermaient
en grande quantité des gravures et outils semblables à ceux
qui caractérisent les amoncellements rangifériens.
Époque élaphienne.
Avec l'époque élaphienne commença la dégénérescence
du renne, sous l'influence d'lm climat pluvieux, mais non la ..
décadence de l'art.. La ramure de cet animal devint rare. On
la r~cueillit précieusement; les artistes, quand elle leur
mapCfua, gravèrent sur la ramure du cerf élaphe, sur l'os et
même sur la pierre. Leurs œuvres dénotent un ' véritable
figurèrent des groupes, et donnèrent parfois à .
talent. Ils
leur travail un fini remarquable. Leur souci du détail allait
jusqu'à leur faire dessin~r ~vec patience les écailles d'un
poisson ou les polIs sur tout le corps d'un amimal. Quand
ils étaient fiers de leur œuvre, il la signaient ou y gravaient ,
leur· marque de propriété. .
g'ravures ont été faites . par des hommes de talent,
Ces
peut-être un peu trop minutieux. Il y en. a d'autres {r.ès né':'
gligées qui révèlent chez leurs alIte urs la préoccupation de '
se montrer ingénieux plutôt que véritables artistes. .'
A côté des œuvres d'art véritable, on trouve les essais faits
par les enfants et les inhabiles. Communs à l'époque de la
gl'avl.ire·, ·· ils ' étaient beaùcoup plus rares à. l'époque de. la
sculpture. . .
Quoique les hommes des temps élaphiens aient sculpté ;
rarement, ils n'avaient pas perdu les traditions des siècles '
passés. Ils recherchèrent l'ivoire fossile pour le travailler. .
De là une sorte de retour vers le passé: non pour l'art qui a .
tl'Op vieilli pour revenir aux formes éburnéennes, mais pour
la matière taillable. Les œuvres ne furent pas toutes remar-
quables. J'en ai recueilli de bien insignifiantes. J'ai cepen- .
dant trouvé au Mas-d'Azil un objet en ivoire. a~sezintéres
sant. Il a la forme d'une colonnette couver~e d'ornements
pointillés, dus à l'imagination. Peut-être est-ce à cette
reporter les statuettes d'ivoire de Bruni-
époque qu'il faut
quel représentant des rennes et celle de ~ourdes représen-
tant un équidé: Il est au moins certain qu'elle.s n'appartien-
nent pas à l'époque éburnéenne.
L'outillage de l'assise éléphienne est en. grande partie le
legs des âges précédents. Les harpons en bo.i.s de renne, les
aiguilles et les flèches à base en biseau y abondent. Les
ysont tous ; mais à ce.s types
silex de l'époque rangiférienne
s'en joignent denouv,eaux. Tels sont de petits '
déjà anciens
grattoirs 'arrondis que l'on fabriquer~ encore au début de ..
l'époque néolithique. Un des instruments nouveaux les plus
caractéri:::;tiques est un gros lissoir en bois de cerf élaphe
ou de renne. Il y a aussi dans la partie supérieure de l'amas,
presque à la limite de cet amas et de la couche à galets
coloriés, quelques hal'p:::ms en ramure de cerf, précurseurs
des temps néolithiques .
L'assise élaphienne était bien développée dans les grottes
de Gourdan, de Lortet, du Mas-d'Azil (rive gauche) et de
Lourdes.
Les gl'avures qui représentent rhomme chassant l'aurochs
et la loutre chassant le poisson doivent aussi provenir de
l' assise ~la phienne.
La faune de cette époque fut à peu près celle de l'époque
actuelle. Le renne était en voie d'extinction,' le màmmouth
avait peut-être déjà disparu. Le loup, le lynx; le chat sau
vage, le renard, le blaireau, l'ours commun, le sanglier,
l'aurochs, le ·bœuf, le cerf commun, le chevreuil, le chamois,
le bouquetin, les équidés, le lièvre, le rat d'eau, le saumon,
le brochet, de nombreux oiseaux prospéraient alors dans la
reglOn pyreneenne. .
Avec l'époque élaphienne disparurent le renne et aussi les
art.s qui ' employaient 1'on bois comme matière brute. De
nouvelles races' humaines envahirent la terre de Gaule, races
grossières et utilitaires, ·qui n'empruntèrent à la civilisation
glytique que les outils et les instruments qui pouvaient leur
servir. Les familles d'artistes qui vivaient sous l'abri des
grottes furent noyées dans le flot des envahisseurs au mo
ment où elles étaient dévoyées par la perte de la matière
première de leurs instruments. .
Mais ce fut un remarquable spectacle que celui de la
naissance des beaux-arts pendant l'ère quaternaire, leurs
tl'ansfol'mations sous l'empire de la nécessité, les efforts de
l'homme pour s'y perfectionner. et leur extinction quand le
bois de renne et l'h'oire manquèrent à la fois. .
--ctSu, "