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Bulletin SAF 1893


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Preuves à l’appui de l’Histoire des temps préhistoriques

M. Halna du Fretay

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PREUVES
A l'appui de l'Histoire des 1'emps néolithiques '
(DEUXIÈME PARTIE)

Préface.
J'ai eu l'occasion de dire dans un de mes derniers ouvrages
que le musée si complet formé par moi à la suite de mes·-·
fouilles pendant tant d'années était la véritable histoire
écrite· et remplaçant les textes qui manquent pOUl' tous les
émigrants d'origine unique, ' qui successivement ont peuplé
la terre depuis les premiel's âges jusqu'à notrB èl'e.
Le plus remarquable de nos musées de France et le seul
complet, le grand musée de Saint-Germain, par les objets
qu'il contient aussi est le livre ouvel't de l'histoil'e ; ce n'est
. pas dil'e pour cela que les musées des départements ne
contiennellt pas de véritables richesses archéologiques, mais
aucun n'est complet et une œuvre très utile et on ne peut
plus intéressante serait la réunion par une spécialité des
comparaisons entl'e tous ces musées dans, un ouvrage .
ulllque.
tous les matériaux de l'histoire
Saint-Germain renferme
de l'homme depuis son apparition sur la terre et le visiteur
peut y lire avec la plus grande facilité les chapitres succes­
sifs de cette genèse et les dates des progrès de l'humanité.
L'homme antédiluvien qui n'avait alors que les o~tils et
les armes en silex taillé a perfectionné peu à peu son outil­
lage et ses armes; enfin après la découverte des métaux il
devient presque l'homme actuel. :
Cette histoire par la vue de toutes ces séries devient
lumineuse, on croit entendre l'orateur invisible tirant de
llULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. . TOME XX. (Mémoires). 9.

chaque objet des déductions qui amènent des dates précises,
les démon·stl'actions sont claires et nous conduisent à
l'flOmme historique du début de notre ère.
Tous ces. objets nous donnent.la vie .intime des peuples et
la déc ·ouvel~te de leurs habitations nous initie à leurs mœurs;
le bois y jouait toujours un grand rôle, on le trouye dans
les établissements lacustres comme dans tous ceux qui loin
de l'eau et en dehors des abris sous roches servaient à des
familles ou à une population agglomérée .
La forme était généralement ronde ou ovale et j'ai déjà
dit brièvement dans un de mes écrits que ces habitations
rappelaient les huttes actuelles de nos charbonniers d§\ns les
forêts; le tour et la toiture étaient formés par des branches
flexibles, de l'argile et de longues herbes entremêlées de
feuilles, etc.; de nos jours, dans bien des contl'ées, les
hommes actuels ne sont pas mieux logés et n'emploient pas
la pierre.
Je termine celte préface par un mot SUl' la trépanation; je
n'ai pas trouvé de preuves de cette tentative sur les,;vivants,
d'où je conclus que c'est une théorie légC'ndaire, comme tnnt
d'autres sur l'histoire préhistorique .
L'inhumation d'autre part n'était pas le rite funérail'e
avant notre ère, mais deux cas peuvent se présenter de la
trépanation possible après la mort. Ce serait alors si on en
trouve les vestiges, l'idée innée de l'âme ayant son siège au
cerveau et trouvant ainsi l'issue vers un autre monde soup.,.
çonné et peut-être espéré; on pouvait en même temps c·on­
servel' dans la famille comme fétiche cette rondelle · cros
ayant la forme d8s rondelles de pierre si en usage chez les
Celtes et les Gaulois.

On enlevait ce souvenir au mort que l'on ne .pouyait inci­
nérer par suite de force majeure ou on faisait cette opél'ation

sur le mort avant l'ineinél'ation.

Le~ Celtes dans la forêt de Jùw~casec, en Sain t-Goaze?,
et COIl/lillliW.'Î 'Doi~ines (F'inistè·re). .
A ulle (~poquü ('IlCOI'Û l'l"cenle, celte autique fOl'êt a vu une
tr'Rnsf'Ol'maliull complôlp Slll' une de ses liJ1lites et au milieu
des \'alll~('s a sUI'gi sm' la hauteul' le château de Kerwazec
avec SOli ruehet si pHl'liculier, ses quatl'e gl'alldes façades si
dilIé,'cnles, si rnollvelllclllées et d'un st~e si parfait; c'était
l'œun'(l de ~l. Louis de l\c,'jégu, le g,'and pionnier, l'agri-
(,lllteUl' de g(~nie elle cher politique, .
L'emplacemellt élHtL bien choisi; de tous côtés des her­
bages imuwllses, de l'eau cil'culanL partout et comme horizon
h'ois les plans successifs et étagés de la forêt rappelant la
Suisse dans ses parties boisées.
Aujoul'd'hui cette tel't'e considél'able d e douze kilomètres de
diamètre appartient toujollrs à la l'am ille de Kerjégll ou à
ses descendant.s et le château de Kcnvasec est habité maill­
teuallt par le comte et la comtesse de Saint-Simon; les
lI':tYallx sont tcrmilles dRUS cet Immense parc, tout est
parfait, et rien de banal , bien au contraire, ne fl'appe les
yeux dalls cc gl'and cll 11 n'y n pas lIll e SCIllc IlOte fausse clans ce bel ensemble,
où tont dénote lc talcll t et le goùt parfait du cré.üel1r, 1\1.
Louis de KCl'jugu, et de SOIl successeUl', le comte de Saint.­
Simon, conLinné.\lIt l'œU\T8 de SOli beau-père. Toutes les fois
quo je me suis appl'OcIJé de ln fOI'êt, j'ai toujonrs été frappé '
par les denx aligllements de gt'ands menhirs qU'i orientés du
nord au sud en montrent les entrées, Un troisième aligne­
ment dans la fo ' êt même, continue cette indication de ceux
qui ont élevé les premiers menhirs.
Je vais parler en e ffet d'un monument bien rare et bien
ancien : l'allée couyel'lc de Castel-Huffel, en Saint-Goazec.
J'ai rouillé ce spécimen des premiers monuments mégalithi-

ques l'année dernière, mais je l'avais déjà signalé dans un
. de mes ouvrages (Les âges préhistoriques), partt"en 1889 .
. Je disais que les monuments les plus anciens avant les
premiers dolmens et remontant à une très haute antiquité,
trois mille ans avant notre ère, étaient les dolmens sans
-tables, toutes les pierres étant posées presque verticalement
. _ au nombre de deux seulement ou davantage se rejoignaI?t
par le haut et formant ainsi toiture.
Quelques pierres brutes arc-boutées constituaient des
. contre-forts et en même temps des alignements qui les soli-
difiaient par le bas. .
Une sQite de ces grandes pierres plates relevées et se fai­
sant vis-à-vis forme par le fait une allée couverte. J'avais
cité dans cet ouvrage Castel-Ruffel, mais j'avais parlé aussi
d'un autre monument du même genre et un des deux plus
remarquables du Finistère: . celui de Lesconil, en Poullan .
Il avait été fouillé avant moi; mais je l'ai visité dernièrement.
Il se compose de seize gl'ands mégalithes, y compris les
deux qui le ferment aux extrémités et il est orienté du nord
au sud, comme celui de Castel-RuiTel.
L'allée de Castel-Ruffel, sépulture certaine, a 12 mètres
de longueur; toutes les pierres plates levées ont une hau­
teur de 2 mètres à 2 m. 30 au-dessus du sol, sur la longère
qui fait face à J'ouest; du côté de l'est elles sont plus basses,
supportant celles de l'autre côté et se trouvant en moyenne
à 0 m. 40 au-dessous du sommet du monument.
Leur profondeur en terre est très peu considérable; on
voit . qu'à cette époque l'outillage pour creuser manquait
absolument, et je crois qu'ici on a profité pour élever ce
souvenir funéraire d'un emplacement où il y avait dans le
sol un contre-bas qui a ensuite été comblé.
Ma fouille m'a ..fait découvrir sur plusieurs points séparés
par de la terre et 0 m. 30 au-dessous de la surface du sol,
des. cendres et des vestiges de débris d'ossements calcinés,

absolument réduits, apportés du bûcher voisin, et nul part

- poterie,
Je vois dans cette constatation, non seulement une époque
très lointaine, mais de plus la preuve de plusieurs sépul­
tures, toutes avec le rite da l'incinération. Voilà une donnée
de plus à l'appui de la thèse que je soutiens; et ici l'incinéra­
tion étant prouvée tl'ente siècles au moins avant notre ère, on
peut en conclUl'e que c'est une coutume des premiers hom­
mes, que mes recherches m'ont fait voir toujours constante
pendant toute la suite des temps préhistoriques.
Il est possible qu'à Castel-Ruffel, le genre de cons­
truction rendant possible l'entrée de l'allée couverte, les
sépultures aient été successives, je le crois même; mais il
n'en a pas été de même à une époque pàstérieure, celle des
dolmens. Là le monument était fermé et les sépultures, s'il
y en avait plusieurs comme je l'ai souvent constaté, étaient
toutes du même jour.
L'inventaire, avec la description des objets trouvés, dont
plusieurs rappellent le type quaternaire, nous donne à penser
que la tradition est relativement récente et que les habi­
t.ants de Castel-Ruffel ont encore, avec un progrès certain,
beaucoup des habitudes et des instincts de leurs ancêtres
avant le dernier diluvium.
Ici il -n'y a pas de silex taillés, les pierres du pays ont été
employées, les grès spécialement; du reste, bien des siècles
après, les hommes préhistoriques se sont encore servis de
matériaux qu'ils avaient à leur disposition, et je peux citer
entre bien d'autres preuves une pointe de lance en grès,
caractérisée, que j'ai trouvée dernièrement sous un petit
tertre et au milieu des cendres provenant de l'incinération,
près des alignements de Camaret (Finistère). -.
Les pierres de fronde, galets de rivière, donnent une
indication précise: ce sont bien des objets de service dé-

posés dans la sépulture comme mobilier funér?ire. Ils sont
à la base du monument, au milieu dos cendees et à 320 mètres
d'altitude.
Il y avait quinze pointes de [fèehes ou de lances en grès
retaillé, avec bulbe de percuss ion très visihle SUL' plllsieUl,'s.
POUl' d'alltl'eS objets on avait employé le poq .. hyre, le quart.z,
le .schiste compact, et j e cite en terminu nt l'objet le plus .
curieux. de co mobilier fUL1 érail'e , une pointe d'épieu en
sehiste de 0 m. 35 de longueur.
La forêt de Kerwasec porte les traces des séjours succes­
sifs des populations avant l'âge do l'h istoire ; qui nze siècles
après la cqnstruction de Caslel-Ruffel et auhmt à peu près
avant notre ère, on élevait la longu e allée co uvel'te de Ker-
wasec; ce sont des tables sur de gl'ands supports, mais ici
la sépultul'e a été violée à une époque éloig llée et je me suis
contenté de constater le ['it,e de l 'i ncinération.
Dans une grande plaine à l'est de l ... euhan et au sud de
Kerwasec, j'ai visité ensuite trois tun1ul lS foemant tl'iangle
et j'ai constafé eucore par la sit.uation de cleux grands men­
hir en face la protection divine demandée pour 18s morts.
Le premier tumulus que j'ai foùlNé .constrnit entièrement
en argile a 20 métres de diamètre sur 2 mètres de hantent' ;
l'urne dont j'ai vu les traces ét.ait absolument décomposée;
l'eau qui vient tous les hivel's au lliveau de la base de ce
gl'and tertre avait aussi faiC "-' . Isparaitl'o une partie des cen- .
dres dont j'ai pu el~co['e pourtant distinguer une très notable
quantité; l'eau avait aussi effacé une partie de l'aire de feu.
Le second tumulus et le plus grand à l'ouest du premiel'
avait 34 mètres de diamètre sur 3 mètres de hauteur; il Y
avait des alte~nements de feu très marqués et ayant laissé
tin.e certaine épaisseur de cendres ~·ur toute la surface du
tumulus, mais bien plus sensibles au centre et à mesure
qu'on se trouvait plus près de la base .
J'ai déjà cité ces alternements de feu dans un de mes.ou-

'l'a~'e:; pal'\l ell 18UO: La Bretagne au.x temps néof'ithiques,
Il (lt"l'l'Î Vtl lit. la fouille du g'I'Hnd tumulus de la Motte, en
Loc 1'0 lia Il ' Fin i:-; h' J'{~ ) .
Ct'llt' l'üpélilioll du l'Cil est, l'HI'l', mais clIc peut se véeifier
à dl':-; t'poques lI'l~S dil'f('reiltes, et elle est en tous cas la
IH'eu\"(~ d un lemp~ l'l'olollg-'' pOUl' la cérémollie i\wèbre. La
masse du tumllius se ~olllposHit. au 110l'll de tel'ee noire sans
IOUl'he lwise ùans le 1Ilëu'ai~ voi!::iin, eL au sud d'm:gile blanche
til'Hnt ail jmllw. Cl'S deux compositions partageaient l~
tumulus jllste pHI' la moitié dans toute sa hauteur et dans
tOllle son élendue, preuve indiscutable qu'il n'avait pas été
('enUlllié ct IJue la sépulture n'avait jamais été violée.
L'ail'c de fell était censidéeable comme étendue, et les
l'Cll<.Il'CS avaient une bien plus grande épaisseur que dans
tons les monuments similaires: leur hauteur au-dessus du
sol calciné était eu moyenne de douze centimètres.
Il faut chercher la cause de cette quantité de cendres dans
ulle réunion de la tribu pendant un cer'tain nombre de joues
à l'occasion de la moet de plusieurs membres des familles
qui en faisaient paetie, victimes d'une attaque. Les survi­
vants restés maitl'e du tel'raln avaient ainsi rendus à leurs
morts le denlÏer hommage.
Le troisième tumulus éLait plus petit mais on pouvait voir
au centl'e quatre petits menhirs peu choisis et formant le
carré; j'écarte d'ailleurs absolument l'idée qu'ils aient été
placôs là pOUl' servir de supports à une table supérieure for­
mant dolmen. J'ai trouvé à la base les preuves de l'inciné­
ration eL quelques d~bris de l'urne décomposée par les
infiltrations de l'eau du marais voisin qui est l'hiver au
lliveau de la base du tumulus .
. Dans aucull ùe ces trois tumulus, je n'ai trouvé de mohi­
liee fuuéraiee et tout m'indique qu'ils sont contemporains
des dolmens, deux mille ans environ avant notre ère: c'est
l'âge des premiers grands tumulus en terre.

Sépultures préhistoriqttes par incinération
avec tombes en pierres polies.
Un de mes collègues de la Société archéologique du
Finistère a fait un rapport insél'é.au procès-verbal du bulletin
de février 1891 ; le voici:
« En creusant en Gouesnac'h (Finistère), à un demi-mètre
« sous terre, un cultivateur a trouvé le sommet d'une pierre
« qu'il a dégagée complètement, lorsqu'il s'est aperçu qu'elle
« 'avait une forme arrondie et à la base tout autour il a mis à
« découvert 7 à 8 galets bien posés et rangés symétrique­
« ment autour de la pierre principale, mais n'a fait aucune
« autre remarque; je possède la pierre principale qui a 54
« centimètres de hauteur. 84 centimètres de circonférence
' « dans la plus grande grosseur;,. elle était debout en ' terre, .
« reposant sur le bout le plus mince. »
L'auteur a terminé ce rapport court et clair en demandant
si on doit voir dans 'le groupement des pierres dont il parle
un monument dît à l~ main des hommes et il espère qu'un
membre de la Société pourrait peut-êt.re avoir connaissance
de quelques trouvailles analogues.
J'ai répondu: .
Il n'y a aucun doute à avqir : c'est une sépulture et ~i la
décoüverte avait été faite par un fouilleur expert et non par
un ignorant qui a pourtant su expliquer à mon collègue
comment le~ pierres étaient groupées, on aurait trouvé les
cendres dans le petit monument et à côté: c'est-à-dire les
preuves certaines de l'incinération. Il faut d'ailleurs attribuer
à cette sépulture une époque très rapprochée ne notre ère
J'ai déjà décrit dans mes ouv.'ages des constructions funé­
raires de trè$ petites .Çlimensions, des miniattires en compa­
raison des grands dolmens et des imID:enses tumulus et je
vais à l'occasion du mémoire ci-dessus faire le récit inédit

d'une découverte à peu près semblable que j'ai faite moi-
même à la limite de la forêt de Conveau, commune de Gourlll
Un coup de charrue avait fait découvrir le sommet de la
pierre principale en granit, à 0 m. 4.0 au-dessous du niveau
du sol; elle était de forme arrondie tronquée régulièrement
et intentionnellement à la base entourée d'un renflement
circulaire.
Cette pierre était admirablement taillée, polie pour ainsi
dire et couverte de nombreuses cupules; elle"donne la repro­
duction exacte d'un tumulus très i.'éduit et orne une des salles
Vieux-Châtel; son diamètre est de 0 m. 60 et
du musée du
sa hauteur égale.
L'incinération avait eu lieu dans une excavation probable­
ment naturelle, à l'endroit même où ce petit monument avait
été élevé; un lit de pierres recouvrait les cendres et la pierre
formant tombe était posée dessus bien d'aplomb. Cette
sépulture doit être attribuée comme celle de Gouesnac'h à
une époque très rapprochée de la conquête par les Romains.
J'ai fait tout dernièrement une autre découverte pour
laquelle il faut indiquer nécessairement la mème date, c'est­
à-dire une époque très peu éloignée du début de notre ère.
Je décrirai tout à l'heure dans un des chapitres suivants
la station fortifiée de Chorn-ar-C'hoat ; j'ai trouvé ce spéci­
men curieux, d'un travail très soigné pour la préservation
des cendres d'un mort et l'hommage rendu à sa mémoire, à
cent mètres du campement dans la direction de l'est; au­
dessus était un petit tertre de 1 m. 50 de hauteur.
A la base, j'ai été très étonné à la vue d'une carrée en
granit poli remplie de cendres à l'intérieur jusqu'au sommet
des quatre pierres. La terre seule recouvrait " ce petit monu­
ment, mais au-dessus le tertre était composé d'une très
grande quantité de petites pierres mêlées à de la terre for­
mant ainsi un barow et non un galgaL

J'ai tl'ansporté et reconstitué pour le musée du Vieux-
. Chàtel cette sépultUl'e d'un des premiers bretons de notre
ère. En voici la description: les deux pierres des côtés est
et ouest ont 1 m. 05 de longueur et 0 m. 26 de hauteur sur
une épaisseur de 0 m. 12. .
Toutes les pierres étaient posé'es sur champ, le dessous et
l'intérieur avaient été laissés à l'état brut régularisé seule­
ment; l'extérieur et le dessus seuls étaient polis .
Trois moulures en saillie très prononcé l'une au milieu et
les autres à chaque côté ornaient chacune de ces deux pierres
sur une largeur de 0 m. 15 au côté extérieur terminée sur sa
continuation au-dessus par une moulure circulaire en bosse
de 0 m. 12 de diamètre.
Les deux autres pierres terminant ce carré et placées
entre les deux premières qu'elles rejoignaient à leurs extré­
mités n'avaient qu'une seule moulure au milieu et une
longueur de 0 m. 90 seulement. Pour le reste les dimensions
sont les mêmes et les quatre côtés de ce carré offraient à
l'œil avec la cendre qui le remplissait à l'intérieur un ni-
veau parfait. .
Il n'y avait pas d'urne et pas de trace de mobilier funéraire.
J'ai parlé dans d'autres ouvrages des corbeilles de pierres
renfermant les cendres sur lesquelles on roulait une grosse
pierre brute, où on élevait un tumulus. Ici c'est après bien
des siècles la même coutume, mais l'outillage s'est perfec­
tionné, la corbeille est en pierre polie et un barow rempla- ,
çant la grosse pierre a été élevé pour protéger les derniers
restes du mort.
III .
Dol'llwn so'us tttrnulus de Kerlivit, en Pouldergctt
(Finistère) .
de hauteur sur
Le tumulus n'était pas grand (2 mètres
recouvraIt etait
5 mètres de largeur), mais le dolmen qu'il

tout à fait remarquable par la perfection apportée à sa cons­
truction, et je ne m'attendais pas à trouver une crypte sou­
tCl~raine aussi soignée sous un si petit tumulus.
Le dC'ssus de la table étai t à 0 20 au-dessous du sol, et
aucunc saillic no se remarquait à l'extérieur des plerres qm
étaient régulières et avaient à lïntérieur des parements .
parfaitement unis, les fiUppOl'lS se rejoignaient exactement
dans toute leUl' hauteur et les tables étaient bien posées sur
un plan horizon taL
Les quelques rares inLcrstices qui pouvaient exister étaient
bonchés avec ùe l'argile battue, et j'ai constaté même l'em-
preinte ùes mains. .
La crypte éLait orientée du nord au sud et avait en lon-
gueur à l'intérieur .............. , lm UO
En largeur. . . . . . . . . . . . . . . . . . ., pn 43
En hauteur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1 42
Les deux grands côtés avaient chacun deux supports. les
petits côtés un seul; deux tables les recouvraient et le pavé
était formé aussi de deux pierres donnant une surface unie
et parfaitement régullère.
J'ai trouvé à l'intérieur:
1 ° Deux poignards en bronze très bien conservés: l'un,
de 0 m. i() de longueur sur 0 m. 05 de largeur; l'autre, de
o m. 15 sur 0 m. 035. Tous les deux ont un renflement dans
la ligne médiane et ont au pourtour un double filet gravé;
ils étaient emmanchés au moyen de rivets qui existent
encore;
2° Une pointe de flèche à ailerons et pédoncule et quelques
silex taillés, grattoirs et pointes;
3° Des boulets de pierre) pierres de fronde .

Ce dolmen n'était qu'à six kilomètres des tumulus de
que j'ai décrit dans mon ouvrage: Bronzes et silex
Kervini,
dans les deux twnulus (Lccolés de Kervini en Poullan lu le
20 .septembre 1887 au Congrès archéologique de Bretagne .

A Kerlivit, je n'ai pas fait, il s'en faut, une aussi remar­
quable trouvaille pour mon musée, mais j'ai trouvé la même
réunion du bronze et de la pierre. Le dolmen ressemblait .
beaucoup au second, creusé à Kervini ; le rite avàit été aussi
l'incinél'ation et l'époque de la construction la même, soit
le quatrième avant notre ère.

Petite tombelle allongée, en Saint-Nic (Finistère).
Encore un monument minuscule, si on le compare aux
grandes tombelles et aux grandes allées couvertes; en effet,
cette tombelle allongée n'avait que 1 m. 50 de hauteur sur
6 mètres de longueur et l'allée couverte qu'elle recouvrait
reposait sans pavé au niveau du sol et n'avait que 4 mètres
de longueur sur 0 m. 60 de hauteur; elle était composée de
supports et était recouverte de petites tables en granit.
J'y ai trouvé comme mobilier funéraire: 1° deux urnes,
dont l'une à forme très surbaissée, presque plate et très
ornée de petits traits et de points en tous sens; l'autre très
petite, bien faite, de 8 centimètres de hauteur seulement,
sans ornementation, toutes les deux sans anses; 2° une
magnifique hache en porphyre jaune de 0 m. 24 de longueur
et deux autres en diorite de 0 m. 32 et 0 m. 34 centimètres
de longueur; 3° deux pointes de flèche à ailerons et pédoncule
et neuf ~ilex taillés; 4° deux grattoirs ' polis en fibrolite,
objets extrémement rares; plusieurs pendeloques ovales en
porphyre rouge, en agate, en diorite, 0 m. 03 de longueur,
percées à une extrémité d'une façon très évasée des deux
côtés, avec un diamètre très réduit au milieu. Toutes ces
pendeloques sont d'un admirable travail; 5° un grain de
collier en ambre.
Les cendres et le charbon étaient là en abondance; le rite
n'était donc pas douteux; quant à la date, il faut la fixer .

avant la découverte des métaux, à l'âge où les pierres polies
étaient le plus soignées, vel'S le douzième siècle avant notre
ère.
station fortifiée de Chorn-al'-Coët, en poulder'gat (Finistère).
Dans mon ouvrage: Les preuves à l'appui de l'histoire des
temps néolitiques (Fe partie) lu en juin 1891 à la séance de •
la Société archéologique du Finistère, j'ai décrit la station
fortifiée de Vern-Bihan, en Plonévez-Porzay (Finistère), et
terminé en disant que les objets trouvés, tous gaulois, indi­
quaient néanmoins l'occupation romaine comme très proche,
et j'ajoutais qu'en fouillant plus tard une station du même
genre que" j'avais visitée et dont la fortification avec fossé
et douve se continuait aussi jusqu'à la source, mon opinion
changerait certainement pas.
Il s'agissait de Chorn-ar-Coët que j'ai culbuté comme
l'autre entièrement et mes conclusions seront les mêmes,
n'ayant trouvé aucun vestige romain.
quoique
Les débris de poterie étaient très nombreux, mais n'avaient
pas grand caractère; c'étaient le reste des ustensiles de
ménage et ils n'indiquaient aucune date absolument précise.
Ce camp de formè circulaire et situé à un kilomètre du
dolmen de Kerlivit que je viens de décrire avait dû être habité
fort longtemps; il avait 25 mètres de diamètre â l'intérieur
des fossés et douves avec une seule entrée et c'était en somme
l'habitation prolongée plus tÔt que le camp construit en vue
de la défense momentanée; plusieurs substrucions très gros­
sières dont la base se trouvait au niveau du sous-sol indi­
quaient l'emplacement des petites loges qui avaient ensuite
été terminées avec du bois, des végétaux divers et de l'argile.
Trois grands foyers à l'intérieur du campement servaient
à la tribu, le fond de deux d'entre eux était composé d'argile
battue mêlée de petites pierres et le troisième était formé de

trois pierres à plat; les deux premiers n'avaient pas de mur
au pourtour, le troisiéme était entouré sur trois côtés d'un
petit murtin et donnait partout la preuve sur un diamètre de
trois mètres d'un feu violent et répété; on distinguait même
sur quelques pierres un commencement de fusion et ,parfois
de vitrification complète.
Les trois foyers étaient dans la mème ligne à l'extrémité
du camp, du côté opposé à l'entrée.
J'ai trouvé dans cette statioQ. :
1 ° Des pierres de fronde allongées ou arrondies comme
- des boulets et des percuteurs de toutes tailles.
2° Plusieurs supports de 12 centimètres de hauteur en
moyenne, arrondis et bien travaillés, destinés à soutenir au
feu les plates-formes contenant la nourriture.
Ces derniers ustensiles étaient souvent en p:erre, j'en ai
trouvé beaucoup, mais ici je crois pouvoir assurer qu'elles
étaient toutes en fer, je drois en avoir bien constaté les traces,
ainsi que les restes d'outils et d'armes rongés par la rO,uille.
3° Une hache de combat en fer, bien conservée: son tran­
chant a 13 centimètres de longueur et l'emmanchement se
faisait à l'intérieur d'une tige épaisse parallèle au tranchant.
LlO Une faucille en fer de 25 centi!11ètres de long'ueur non
compris l'emmanchement, droite dans toute sa longueur
avec une légère courbe à l'extrémité. .
5° U ne très petite fourche en fer.
6° Un coup de poing en granit uni mais non poli à 2 pointes
et formant ovale au milieu pour la mise en mains.
7° Une g'ouge longue de 18 centimères en schiste verdâtre
très dur, usée à l'extrémité seulement et sur un seul côté, le
reste de la pierre restant à l'état naturel.
8° Quelques silex taillés en très petit nombre.
go Une carrée de fer de 0 111. 40 de longueur élevée sur
pied de 0 m. 15, faisant l'office des trépieds actuels. Dessus
était posée une poêle ovale longue de O'm. 35 avec une pro-

fondeur de Ç) centimètres et 2'7 centimètres de largeur;
le pied large et épais a en plus de 0 m. 42 de longueur.
Tout cela est rare et bien cUl'ieux et permet comme pour
la station de Vern-Bihan, que je viens de citer, de bien fixer
l'époque. Dans la première station fouillée, j'avais trouvé des
socs de charrue, à Chorn-ar-Coët je n'en ai pas découvert,
mais cette poêle et SOIl trépied sont bien de la même époque
et sOl,tis ùes ùges pI'éhistoriques, nous entrons dans la
période historique.
100 Plusieurs meules en granit ayant en moyenne 0 m. 40
de diamètre, le fer a été employé pour le mouvement de rota-
tion, l'époque se précise donc de plus en plus. .
11 ° Un joli usoit' à face carrée. . .
12° Une hache en porphyre gris clair à tranchant absolu-
ment transversal et très bien conservé .
13° Un grand mortier en quartz blanc avec sa molette.
14° Une énorme molette destinée à écraser le grain sur
les g'randes roches plates.
15° Une pointe de flèche taillée en feuille de laurier.
16° Un petit cube poli en granit amphibolique, de 35 milli­
mètres de côté, Quel était son usage? Je parlerai bientôt
dans le chapitre de Trez-Goarem d'un cube plus petit avec
encoches qui avait servi aux premiers maçons, de fil à
plomb. Dans celui-ci il n'y a pas d'encoches.
17° Un joli ceItre en fibrolite, transformé. Ce doit être une
ancienne hache dont ses possesseurs ont fait un outil; j'ai
trouvé très souvent ce genre de ceItre et je les ai signalés
dans mes ouvrages, mais sans les définir d'une façon spé-
ciale. .
Celui dont je m'occupe aujourd'hui est absolument intact
et son poli partait dans la partie large indique un
usage prolongé; à la pointe terminée absolument comme
une hache il a 13 millimètres de largeur et dans sa partie
large qui était auparavant le tranchant 53 millimètres; la

longueur est de 75 millimètres et l'épaisseur de 22. La base
a deux dépressions très accentuées de 11 millimètres cha­
cune et l'outil tenu à la main par le petit bout servait de
polissoir tantôt d'un côté, tantôt de l'autre.
18° Une pierre de fronde en amphibole projectile qua­
drangulaire à quatre pointes très prononcées. .
. 19° Une autre pierre de fronde en quartz blanc à 4 pointes
.. très prononcées aussi mais placées autrement, trois d'un
côté et une seule de l'autre.
Tous ces objets indiquent avec certitude l'occupation gau-

loise, les Romains ne se sont jamais arrêtés là; malgré
l'absence absolue du bronze, les armes et outils en fer dont
une partie s'est conservée indiquent le progrès et la fin de
l'ère préhistorique; mais en même temps il y a les pierres
de fronde, les unes, galets de la mer, d'autres fabriquées
sur place avec les pierres trouvées dans les environs.
Je constate donc toujours et partout la preuve de la réu­
nion des pierres finement ou grossièrement travaillées en
même temps que les métaux; c'est enfin bien prouvé et il est
acquis définitivement que les auteurs passés en établis­
sant tant d'ages différents des pierres et des métaux ne con­
naissaient pas le premier mot de la question.
Les silex taillés servaient en même temps que le fer et le
bronze et faute de silex on employait pour armes et pour
outils d'autres pierres du pays. Mes prédécesseurs dont les
conclusions étaient toujours faites d'avance d'.après ce qu'on
était convenu d'admettre dans ce qu'on appelait alors le
monde savant, n'étaient pas de mon avis, mais j'ai donné les
preuves répétées de la vérité, et l'on peut dire avec une
absolue certitude que, depuis l'emploi des métaux, toutes les
populations préhistoriques ont toujours continué à se servir,
après les avoir façonnées, des pierres qu'ils trouvaient sur
place.

Le tumulus de Keroutou.s, en Plonévez-Porzay (Finistère).
Dans un ouvl'age paru en aVl'i11890, j'avais décrit les plus
anciens tu mulus et aussi ceux de la dernière époque élevés
par les Gaulois, qui allaient Lienlôt appartenir à l'âge de
l'histoire et terminer la période néolithique. (
Parmi les pl'emiers, j'ai cité ]e grand tumulus de la Motte,
qui occupait à une grande altitude le sommet de la ·montagne
de Locronan, et j'ai dit que, précédant notre ère de trente
siècles, il était aussi antérieur à l'âge des dolmens.
J'ai fouillé l'allllée dernière un autre tumulus de la mème
époque, que son propriétaire, M. Césaire de Poulpiquet,
avait mis tl'ès amicalement à ma disposition. Ce tertre
occupait le point culminant de la montaglle de Keroutous,
en vue de Locronan et du grulld tumulus de la Motte, à
tl'ois kilomètres do ce dernier .

prlTlClpe
ètre dans le
Les dimensions avaient dù
mètres de diamètre sur 1 m. 50 de hauteur; mais il avait été
grallé et aplalli et son sommet offrait une surface plus large
et moins élevée, très régulièl'e et parfaitement al'l'ondie; la
fouille m'a douné l'explication que je devinais, car il m~
se~blait bien que la sépulture n'avait pas dù être violée, ce
dont j'ai eu la prouve en reconnaissant clairement qu'on
avait fait usage de sa plate-forme.
Le rite avait été l'incinération: j'ai trouvé à la base du
tumulus la roche et la t.erre calcinées, les cendres, et quel­
ques restes d'ossements incinérés et absolument décomposés.
Je n'ai pas trouvé d'urnes, les anfractuosités de la roche
avaient dû en tenir lieu; il n'y en aY~lÎt pas non · plus dans le
tumulus de la Motte ou une corbeille de pierres la remplaçait .
Le mobilier funéraire ne se composait que de deux objets:

1 Une pointe de flèche triangulaire on schiste extrême­
ment dur, d'une longueur de 0 m. 05 ; 2 un couteau fabriqué

avec le même schist~, aiguisé sur une longueur de 0 m. 09,
avec 0 m.03 en plus retaillé pour l'emmanchement .

Dans la plate-forme supérieure, j'ai découvert l'emplace-
ment d'un de ces moulins des premiers âges, absolument
primitifs dans leur construction, que je décris au chapitre VII
de mon ouvrage: Preuves à l'appui de l'histoù"e des te'mps
néolithiques (Fe partie).
J'ai trouvé des débris d'une meule et intact un de ces petits
galets allongés si polis aux deux extrémités et gui, posés
verticalement dans le trou du galet plat, faisaient marcher
les meules par la force du vent ou d'une petite turbine dans
le moindre ruisseau.
Ce petit galet qui, dans sa partie la plus renflée, n'a que
millimètres de diamètre sur 65 de longueur totale, me

fait ajouter une observation à ce que j'ai déjà eu occasion
d'écrire sur ce sujet; c'est que plus les galets sont petits,
plus les moulins sont anciens.
A Keroutous, il faut fixer l'âge à une époque très rappro-
chée de notre ère. .
VII. .

Tumulus de [{e'f'IJigen; en PlQ1nodiern (Finistè1"e J.
Fouille du 28 mai 1892.
Ce tumulus, que j'ai découvert sur les terres du village
de Kervigen (Plomodiern), ep. vue de la Lieue de Grève, au
sud-est de la baie de Douarnenez, était très peu visible:
o m. 50 de hauteur maximum au-dessus du sol, sur un dia­
mètre difficile à déterminer à cause du peu de hauteur, mais
que j'estime à 6 mètres environ.
Plusieurs coups de sonde m'avaient tout d'abord donné la
certitude de l'existence d'une grande table et je pouvais croii'e
à la découverte prochaine d'un dolmen souterrain; il n'en
était rien; mais la sépulture n'en est pas moins très curieuse.

Ces fouilles, que j'ai faites si souvent depuis tant d'années,
donnent souvent lieu à ùes surprises, ct quand les opérations
ont été faites avec le plus g'l'and soin, l'observateur est
obligé de conchll'e que les hommes des temps primitifs,
devant la nécessité de renùre l'hommage funèbre à un chef
respecté, ne pouvaient guère employer que les matériaux
qu'ils tl'onvaient aux envil'ons. .
De là tonles les dilTél'ences de genl'es, de formes et de
dans les monuments mégalithiques. La table
gl'andcul's
avait 2 ll1. 30 SUl' 1 111. 80 ùans les plus grands diamètres et
la fOl'me affectait un ovale réguliel' obtenu par la percussion
piel'I'c éCI'asant sur tout le pOUl'tOl.rr, par
avec un mal'teau en
lames successivcs, cettc gl'ande dalle en schiste rouge,
apportée des falaises de la côte d'une distance de 500 mètres
envil'on. L'épaisseur dans toute l'étendue était de 0 m. 30
environ, sans différences bien appréciables.
la pose, elle avait glissé sur l'emplacement
Au moment de
de la sépulture, et sur la rai,tie nord: dans la plus grande
10ngueUl' de la table, il n'y avait qu'un mètl'e de terre au- .
qlle le côté sud était recouvert de 1 m. 70.
dessus, tandis
L'urne était sous cette partie de la dalle à 0 m. 30 de
l'extrémité sud et 1 mètre de profondeur sous cette table,
sur l'ancien sol naturel nettoyé, de sorte qu'elle se
posée
trouvait à 3 mètres au-dessous du sommet du tumulus.
L'intervalle entre l'urne et la table sans supports · était
comblé avec de la terre choisie remplie de charbons, et
autour de l'urne comme à l'intérieur j'ai vu des cendres en
Je n'ai pas trouvé là ces restes d'ossements
abondance.
n'ayant pas eu l'incinération complète, tout étant absolument
réduit . .
Il y avait certainement à cet endroit, avant la sépulture,
une excavation naturelle et le tout a été comblé après la
céI'émonie funèbre. Sa profondeur, -avec l'outillage très
imparfait pOssédé avant la découverte des métaux, m'a tout

d'abord donné cette idée, qui m'a été confirmée par l'étude
du sol primitif en pente vers l'emplacement de l'urne .
Deux galgals de consolidation en schiste plat, formant
demi-cercle, avec une profondeue de ° m. 80, s'arrêtaient
au sud et au nord au niveau supérieur de la table.
L'urne a deux anses à une hauteue de vingt centimètres,
col évasé et . bord rabattu, sans ornementation; l'épaisseur
iudique l'époque moyenne· de la céramique préhistorique.
Le mobilier funéraire se composait :
1 ° De deux pointes de flèches en silex, dont l'une a la
double encoche d'emmanchement;
2° rrois pointes de lances et une jolie petite pointe de
flèche en schiste verdâtre;

3° Une fine rondelle en grès;
4° Un beau percuteur presque cari'é, en grès;
5° Une hachette en grès gris taillé.
En résumé, cette table sans piliers rappelle au premier
abord ce que j'ai dit dans mes précédents ouvrages au sujet
. des grandes pierres brutes, première défense des cendres
des morts; mais ici p ya des différences: la profondeur, le
double galgal, puis la table a été retaillée et régularisée; le
mobilier funéraire vient aussi m'aider. Les objets un peu
primitifs viennent s'ajouter à ceux de premier choix. Je crois
donc pouvoir assurer que le métal n'est pas encore décou-
vert, mais que l'époque en est très rapprochée et j'indique le
XIe siècle avant notre ère. '
Très près de là s'élevait un petit tel'tre de deux mètres
de diamètre que j'al fouillé. Il se composait entièrement,
jusqu'à ° m. 60 de profondeur au-dessous du sol, d'un
galgal. Au fond il y avait énormément de cendres, des traces
de feu répétées, et comme mobilier funéraire:
1 ° Une grande urne à deux oreilles de 0 m. 29 de hauteur
avec ornementation en creux au col et autour de la large
ouverture, poterie épaisse, style absolument gaulois;

20 Une grosse pierre de fl'onde et d'autres plus petites,
galets de la mer choisis avec soin;
3° Un usoir percuteur;
40 Une fllsaïole en terre cuite, forme bombée;
50 Une rondelle en schiste de 0 m. 07 de diamètre.
Ici le peu de profondeur, lc genre et le mobilier nouS
indiquent la sépultlll'e gauloisc de l'époque gallo-romaine .
Il Y avait à côté un alltl'e petit tertre du même g'enre ; J Y al
trouvé, avec les pI'cuves de l'incinération, une urne, sans
anses à forme SUl'baissée, gauloise aussi, de la même époque
gallo-l'omainc, sans mobilier funéraire.
VIII.
La lJlaine de TrezgoaTem, en Esquibien (Finistère). - Sépul­
tures avec les deux rites de l'incinéTation et de l'inhu-
mation.
Je n'aipas fait de fouilles, j'ai seulement visité cette im­
mense plaine, aux rares ondulations, abritée des vents de
mer par une crête continue mais peu élevée qui la sépare
d'une très longue grève.
sur un espace de deux cents hectares, le sable
Aujourd'hui
chassé par le vent de mer a entièrement recouvert ce terrain
fel,tile autrefois et je me suis assuré qu'on découvre encore
sur bien des points sous ce sable une terre végétale excel-
lente et des substructions nombreuses.
Sur la partie la plus elevée deux cimetières ont été décou­
verts; ils sont peu éloignés l'un de l'autre et occupent le
centre de l'espace dont je m'occupe.
Dans le cimetière à l'est le rite employé a été celui de
l'incinération; dans l'autre à l'ouest l'inhumation avait été
le mode funél'aiee et on y a constaté des sarcophages ordi­
naires du genre des stone-cist; d'aùtl'es beaucoup plus
soignés en gl'anit avaient des r'ainures, de soi,te que les côtés
et le couvercle s'emboîtaient parfaitement. .

On a trouvé aussi dans le sable calcaire des ossements
indiquant qu'on y avait déposé des cadavres; le nombre des
sépultures était du reste considérable et indiquait une occu­
pation prolongée.
Une femme et un enfant ont été trouvés côte à côte et à'
côté de stone-cist en pierres; les matériaux maniables man­
quaient évidemment très souvent à cet endroit.
Bien des objets ont été tl'ouvés dans ce cimetière avant
ma visite, des fusaïoles, des armes en métal. Pour moi, j'ai
récolté seulement une pointe de lance en bronze et deux
objets qui étaient autrefois pour les maçons ce qu'est
aujourd'hui le fil à plomb. Ils ont été relevés dans deux
stone-cist à côté des cadavres; un autre en terre cuite avait
été trouvé aussi dans les mêmes conditions.
Il avait dù être déposé au moment de l'inhumation, à côté
de la main de l'homme adulte qui avait le squelette d'un
enfant en travers sur sur les pieds.
Des deux échantillons que je possède, l'un est rond et a
.une longueur de 6 centimètres sur un diamètre de 2 centi­
inètres nt est percé d'un trou à une extl'émité, l'aUtre forme
un petit cube de 25 millimètres de côté avec encoche au
centre sur toutes les faces pour attacher le fil.
L'époque est donc bien clairement indiquée: nous sommes
au temps des premières constructions qui ont suivi pour les
Gaulois l'occupation romaine. Ces populations, d'ailleurs,
ont pu êt.re soumises, mais non assimilées, et ont gardé leurs
usages même pendant le moyen-âge. Ces hommes, en pos­
session de la terre cultivée, étaient devenus chrétiens, et,
abandonnant les anciennes coutumes après la mort., ils
avaient construit les stone cist et les sarcophages pour ense­
velir leurs morts; mais ils étaient certainement les descen­
dants directs de ceux qui, fidèles encore au rite de l'inciné­
ration, avaient déposé les cendres de leurs morts dans le
cimetière voisin. .

Les urnes, presque toutes décomposées, étaient protégées,
les unes par quelques ' très petites imitations de dolmens,
d'autl'es par de petits galgals en galets de la mer; j'ai vu des
cendres en gl'ande quantité et quelques petits ossements qm
avaient échappé au feu.
est aillsi dans tous les foyers en plein air et même
Il en
dans une cheminée, où il reste, quand le feu s'éteint faute
d'aliments suffisanfs, -dcs moreeallX de bois ayant fi. peine
subi à une extrémit.é l'action du fCll, trace qui s'efface rapi­
dement s'il n'y a pas eu carboni ation .
l...'elTet du feu peut ainsi, dans certains cas, ' ètre très peu
visible SUI' un os après un grand nombre de s:ècles; c'est ce
qui a porté des archéologues peu clairvoyants à essayer la
reconstitution d'un cada'He avec un seul ossement de quatre
céntimètl'es, par exemple.
J'ai lu bien des mémoires de ce genre.
Heureusement, il y a des savants qui regardent de plus
près, et je vais citer un exemple pour un pays où l'incinéra­
tion n'était pas, disait-on, le rite employé.
Je lisais le 30 juillet 1890: « On vient de découvrir dans
« la plaine de Marathon un tumulus mesurant 9 mètres de
cc hauteur et contenant des urnes remplies de cendres et
« d'ossements ». C'est concluant.
Dans le cimetière préhistorique de Trez-Goarem, on avait
trouvé, m'a-t-on dit, un certain nombre de haches en pierre,
Pour moi, je n'en ai rapporté qu'un boulet de pierre paI!fai­
t8ment régulier, de 0 m. 09 de diamètre: la matière est très
dlll'e : c'est le granit transformé par l'amphibole verte.
Baron HALNA DU FRETAY,
Chàteau du Vieux-Châtel, par Quéménéven (Finistère),

. , oo»:O