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Bulletin SAF 1890


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Vie inédite de saint Goulven (2ème partie) (traduction)

Dom Plaine

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VIE DE SAINT GOULVEN
Évêque et Confesseur C')
(TI\ADUCTION DU TEXTE LATIN.)
Noms et patrie du père et de la mere
de saint Goulven .

Glandan, abandonnant les Beetons d'outre-met, au milieu
desquels il était né, et ttavetsant l'Océan avec Goloenne, sa
femme, qui était pour lors enceinte, vint aborder sur les
côtes de la Petite Bretagne, qui fait partie de l'Armorique.
Ce saint couple, c'est-à-dire Glandan et sa femme, au
sortir du navire, se trouvèrent seuls et errèrent quelque
temps sur le littoral, qui était alors couvert de bois (1).
Bien qu'exilés, jls n'en étaient pas moins remplis d'une
certaine joie: car cet exil, ils l'avaient affronté de leur plein
gré, et c'était aussi de grand cœur qu'ils en acceptaient les
-rigueurs et les ennuis. Mais de fait ne connaissant pas le
pays, ils ne savaient où trouver un lieu qui pîtt leur servir
d'asile, et la nuit commençait déjà à couvrir la terre de
ténèbre,s, quand ils arrivêrent enfin conduits par Dieu à
Plouider (2). Il s'y arrêtèrent en un lieu qui porte le nom de
Brengorllts (3), et que des marais séparent de Plounéour­
Trez.
Or, il Y a'vait là un colon qui, inaccessible aux sentiments
de charité, ou s'imaginant qu'il avait affaire à des voleurs,
ne voulut pas promettre un asile prolongé dans sa maison à
ceux qui demandaient l'hospitalité pour un temps indéter-
mme.

~ 2. Naissance de saint Goulven.
C~penùant Goloelllle ressentit en ce moment mèmu les
llollleul's de l'enfantemenl, et elle mit au monde un enfant
mùle. Ol', le village d'Odéna (4), où avaitlieu l'enfantement,
est assez éloigné de toute fontaine, en surte qne l'eau n'y
est pas apportée sans dilTiculté. Aussi on l'y l1Ulnage avec le
plus g'ea:nd soin. Par suite, quand le père du nouveau-né eu
demanda au maître de la maison qu'il habitait, elle lui fut
refusée. Le paysan se contenta de ·lui prêt.er un seau vide
pour' en appol'tel', et de hli indiquer le chemin qu'il fallait
prendre pOUl' aller à la fontaine .
?, 3. - Détresse de Glandan.
G lamlan prit donc le seau SUl' son épaule et partit cn
prenant. le sentiee qu'on lui indiquait. Méris ce sentier était

recouvert pal' endl'oit d'une couche épaisse de feui.Iles, et
intercepté ailleurs pa des branchages ou des abattis d'arhees,
en sorte qu'il était facile de se perdl'ü et de s'égarer. C'est ee .
qui arriva au père du saint. Il passa une grande partie de la
journée à errer à travers les fourrés de la forêt , et quand il
sc Cl'llt al'l'ivé à la fontaine, il se retrouva tout simplement à
Odéna.
~ 4. Sa prière.
Dans son trouble et désappointement, il recourut à Diell, et
adl'essa eette prièl'e au Seigneur: « Seigneur Dieu, qui ne per-
« mettez jamais q Ile les ehrétiens, vosserviteut's, soient tentés
( au-delà de cc qui esfenleuI' pouvoir, jetez un regard de com­
« passion su.r notre bassesse: cet enfant, nous ne l'avo11s pas
« rnis au monde pOlll' nous, mais pOUl' Vous; ce Il'est pas
« pour satisfaire les désirs de la chair que nous 1 avous
« engeJldl'é, mais uniquemeut poLil' llOUS eonforrncI' à vos
«( ordres et pour que le nouveau-n~l soit à jamais VOILé à votre
« seI'vice.~e permettez done pas qu'il meure faute de quel­
« ques gouttes d'eau, pI'ivé de la grâce chI saint baptême. ))

~ es. - La fontaine de saint Goulven.
Telle était la prière de Glandan, qui rentrait à Odéna
sans apporter d'eau. 01', à peine ava:t-il planté en terre son
bàton qu'une fontaine d'une eau limpide jaillit à la distance
d'un jet Je pioree cl'Odél1a et qu'un ruisseau se mit à y couler '

avec un doux. mut'!l1\1l'8 .. PU1' sulte, colle qui vOl?-alt d'enfanter

contre la soif qui la dévorait et un soutien dans la faIblesse
de son corps.
Cette fontaine, qui pol't,e encore le 1l0ril defontcûne de sailit
(3), Il 'a pas eeSSt~, j LlSqU'ù nos jours, de fournir aux
Goulven
habitants de l'cau en abondance, et nne eau qui peut rendre
la santé aux malades en maintes circonstances. Soulement
les pieux.fîdèles , en raison mème des nombreux miracles
dont ces eaux étaien"t l'Îl1strument, pour la plus grande gloire
de Dieu et ùu saint, se faisaient scrupule d'y l'~ourir pour
les usages communs de la vie ;et cela avec raison: car une
ehose qui avait été mise une fois au set'vice de Dieu, uue
chose dont le Seigneur lui-même avait signalé la sainteté,
ne poltvait plus convenablement êtt'e employée à des usages
proranes. C'ost pouequoi on t'ouilla la tetTe dans les environs
ùe cett,c fontaille, et olltruuva une S8concIe suurco, qui sert
pour les usages jouenalieJ's, il laquelle on recourt quand il
s'agit d'avoir de l'eau pour boire ou pour préparer les
alimeuts. Quant à la fOlltaine que Dieu a sanetiHee lui-mème,
persoune n'en boit: siuon par dévot.ion ou pour recouvrer la
santé.
~ 6. - Gozien devïent l'hôte des parents de saint Goulven
et le second père de l'enfant.
Le bru't d'un si grand miracle ne tat'da pas à amener :un
grand concours de· peuple à Odéna. On acconrait en foule
seulement ponr voÏl' la fontaine, mais aussi pour con­
non
templer de ses yeux les autres 111iracles que Dieu daignait

opérer pour signaler pal' avance les mérites de celui qui
serait plus tard le pontife de ce pays.
01', parmi ceux qui montrèrent de la sorte un grand em­
pressement, il se trouva un homme riche et craignant Dieu,
qui a laissé son nom au village actuel de Kergozian (6). Ce
Gozian ou Godian ne vit pas sans admiration un tel éclat
de miracles, et s'empressa, poussé par le sentiment de l'amour
de Dieu, de prendre à sa charge l'entretien de l'enfant et de
ses parents. Les biens qu'il avait le mettaient à même de
suppléer à leur indigence et de leur fournir fidèlement tout
ce dont ils avaient besoin : Ce généreux chrétien alla plus
loin : il voulut être le parrain de l'enfant sur les saints
fonts du baptême, afin dé devenir de la sorte son père spiri­
tuel. Puis, comme il n'avait point lui-même de postérité, il
adopta Goulven à titre de fils. Enfin, pour que rieu ne man-
quât au futur Evêque, il eut soin de lui faire apprendre de
bonne heure les premiers éléments des lettres divines et
humaines.
~ 7. - Grands progrès et vertu miraculeuse
de saint Goulven.
Or le saint enfant, rempli de l'esprit de Dieu, fit en peu
d'années tant de progrès dans les lettres, qu'il arriva à égaler
non seulement ses condisciples et les enfants de son âge,
mais jusqu'à ses maîtres.
Plus tard, quand ses parents eurent p~yé tribut à la mort
et eurent été réunis à leurs pères, l'humilité de Goulven eut
à s'alarmer en voyant les foules accourir auprès de lui pour y
trouver la santé de l'âme et du corps. Le saint s'empressait
par charité, non seulement de leur imposer les mains pour
guérir leur corps, mais aussi de leur tenir des discours de
nature à porter remède aux vices de leur âme. Seulement,
comme l'éclat des louanges accompag'nait presque néces­
sairem.ent de tels miracles, le saint en vint à craindre que, par

un efl'et de cette réputation et de cette popularité, quel ....
ques sentiments de vanité ne trouvassent enteée dans ' son
âme et ne lui fissent perdre une paetie de son mérite. En
conséquence, il jug'ea qu'il y avait danger à exposer le trésor
de sa conscience pour quelque fumée de réputation. C'est
désel't, et Gozian, qui venait de l'institue .. son hérItier UllL­
\'el'scl Pal' un testament en bonne et due forme (7), ne put,
nlUIg'('é ses efl"orts, l'empêcher de met.tre ee dessein à exé-

l'UliOlt.
~ 8. Le pénity de saint Goulven.
Le saint choisit à cet effet, non loin ùu littoral, un lieu
marécageux et solitaire, placé au milieu d'arbrisseaux et de
tounus, en un mot, pleinement favorable à la con­
halliers
templation.
Il s'y bâtit une petite maison en forme d'oratoire, ce qu'on
appelle en breton pénit!}, c'est-à-dire maison de la pénitence
ou du pénitent (8). 01', les miracles de la puissance divine
n'ont'jamais cessé jusqu'à présent d'éclater aux yeux des '
hommes dans ce sanctuaire. Et d'abord, on n'y sent jamais le
quand la pOt'te
froid,et le vent n'y entl'ejamais non plus, même
en est ouverte. Les femmes ont soin de s'en tenir à une cer­
taine distance, car les hommes seuls peuvent y entrer, et
encore seulement pour prier. En outre, la piété des fidèles a
érigé à Odéna même une maison de prière en l'honneur de
est né, et ici les malades recouvrent fréquemment
celui qui y
la santé, en même temps que d'autres miracles
le bien fait de
clergé ait pris pOlIr coutume de n'y
s 'y opèrent, quoique le
célébl'er aucun office religieux.
~ 9. Genre de vie qu'y mena le saint.
Saint Goulven se renferma donc dans l'enceinte étroite de
d'y faire monter vers Dieu, jour et nuit, sans se
pénity afin
donner aucune relâche l'encens de sa prière pour le salut

de tout le peuple chl'étien. Il ne sortait de ce pénity qu'une
fois .le jour, pour faire à l'entour, à travers le bois, un pèle­
rinage d'environ trois stades. Celte procession comprenait
trois stations, avec arrêt à chacune pour y priel' un long
espace de temps; t.rois croix fixées au milieu d'lm immense
amas de pierres, une ponr chaque station, en mal'quaient
l'endroit précis. Elles subsistent encore pr'8sentement et
s'appellent les stations de saint Goulven (9).
. Dans cette solitude, le saint pratiquait une chasteté vir­
ginale, une humilité digne de servir d'exemple et une patiençe
qu'aucune difficulté ne rebutait, Sa charité ét.ait ardente et
sa prière fervente. Les réponses qu'il donllait à ceux qui le
consultaient étaient marquées au coin de l'humilité. Ni la
tt'jbulation ne l'empêchait d'être dans la joie et le contente­
meTit. ni la disette des cboses nécessaires à la vie de con-

servel' la longanimité et la paix de l'âme. Son absti.nence
excitait principalement l'admiration; car il s'était habitué
dès l'enfance à ne prendre d'aliments qu'une fois le jour et
en très petite quantité, c'est-à-dire uniquement pour sou­
tenir les forces de son corps, jamais pour le plaisir de satis­
faÎ1'e l'appétit naturel.
~ 10. - Les pirates du Nord et le comte Even .
. En ces années, des pirates Danois ou Normands, origi­
naires des îles et encore adonnés au eulte idolâtrique, infes­
taient beaucoup de provinces et en partieulier notre Bre­
tagne-Armorique. Un jour qne lellrs vaisseaux en avaient
ameué une teoupe nombreuse et puissante sur les côtes du
Léon, appelé alors Létavle, et qu'ils traînaient après eux un
butin considérab}e et de nombreux captifs provenant de
divers pays; le comte Even, sUJ'nommé le Grand, qui avait
pour eapitale la ville qu'on appelle aujourd'hui à eause de
lui Le8nev~n) c'est-à-dire la Cour d'Even, réunit autour de
grande troupe de chrétiens, cavaliers et fantassins,
lui une

a se mesurer
p::nens ,
hien décidé ù livl'el' b,'llRille aux dits

avec eux.
Entretien du comte avec saint Goulven.
Comme le comte était plein de religion, il ,roulut com­
mencer par visitor l'homme de Dieu, Goulven, dont le pénity
n'était qn'à une distance de quatre milles de Lesneven. afin
J'avoit' la consolation d'un entretien avec le saint et de
s'assurer le secours de ses prières. Or, il]e trouva en oraison
dans l'une des stations que nous connaissons, et lui dit en
l'abordant: cc La paix soit avec toi, homme de Dieu; .ie veux
c( attaquer aujourd'hui les pieates, prie pour moi.» Le saint
lui l'épondit : « Que la pa~x de Dieu soit avec toi, mon fils;
« va en toute séeurité ; quand tu reviendras, tu me retl'ou­
ct veras en ce même lieu. ))

ë 12. - La défaite des pirates.
Even ajouta pleine foi à la parole du serviteur de Dieu et
continua sa route, l'empli de l'espoir de l'emporter la victoire
avec l'appll.i des pl'ières de saint Coulven. Aussi attaqua-t-jl
les ennemis avec la plus grande ardeur et leur infiigea-t-il
une complète défaite. Il les poursuivit jusque dans leur fuite
et fit un grand carnage parmi les fuyards. Il rendit aussi à
la liberté tous ceux que les païens avaient réduits en capti­
vité. Un petit Hombre des pirates réuss't cependant à échap­
per par la fuite; mais pour cela, ils durent se cacher le long
du rivage et regagner leur pays en longeant le même Océan
semé d 'écueils qui les avait portés sur nos côtes. De plus,
ils n'eurent jamais dans la suite l'audace de tenter quelque
nouveau coup contre cette région.
~ 13. Reconnaissance du comte Even à l'égard
de saint Goulven. .

Le comte et ses compagnons revinrent à Lesneven après
leur victoire. On dressa la table (H ), et. déjà, les mains étant
levées, on allait commencer à manger, lorsqu'Even se rap-
pela la parole de l'homme de Dieu: l( Au retour, tu me trou-

« \iel'as ici. » et s'écria : il. Je ne veux goûtel' d'aucun mets
« avant d'avoir vu saint Goulven. )) Et aussitôt, se levant de
table, il se rendit au lieu où il avait eu son entretien avec le
serviteur de Jésus-Christ et le trouva continuant à vaquer à
l'oraison. (12) Car le saint: au moment où le comte s'était sé­
paré de lui, s'était pl'osterné par terre, les mains étendues en
forme de croix, et n'avait pas cessé depuis lors d'appeler,
dans cette posture, la miséricorde de Dieu SUl' le prince et
sur le peuple chrétien.
descendant de cheval, s'empressa de prendre
Le comte, en
le saint par la main, et lui dit: « Lève-toi, homme de Dieu;
« les païens sont vaincus, c'est toi qui as remporté cette
« victoire. Ch~isis maintenant ce 'que tu désires et je te le
« donnerai. » Goulven lui répondit: « C'est le Dieu que tu
.. sers, et non ma pauvre personnalité, qui a remporté la
« victoire. Pour toi, prends garde, à l'avenir, de jamais
.. offenser le Dieu qui t'a donné de vaincre ses ennemis.
« Quant à moi, je n'ai besoin d'aucune possession tempo­
« l'elle. Donne plu.tôt à Dieu ce que tu voulais me donner
« dans ta libéralité. Bâtis une église pour que des hommes de
« religion se forment à la piété auprès de mon penit y , et
«( qu'ils puisserlt répandre à jamais leurs prières devant
« Dieu, pour toi et pour tous les chrétiens. Quant à la terre
.. boisée qui entoure mon pénity, tu en accorderas autant
« qu'il en sera nécessaire pour l'entretien journalier de ces
.. religieux. Y>
Cl. Qu'il soit fait, comme tu l'as demandé, s'empressa
«de répondre Even; je donne autant de terrain que tu
« pourras en parcourir dans l'espace d'une journée. » Sur ce,
le comte et le saint se dirent adieu et se séparèrent.
~ 14. Saint Goulven et son serviteur Maden.
Saint Goulven tout embrasé de l'amour divin s'élevait

chaque jour de vertu en vertu afin d'arriver à jouir de la

d D' clans la sainte Sion. Il n'avait
vision u leu es leux ..

auprès de lui qu'un serviteur ou plutôt un compagnon nommé
A1ade (:l3;, qui remplissait l'office de 'Marthe, s'occupait du
ministère journalier, c'est-ù-dire du soin de lui procurer du
dehors la nourriture illdispensable au soutien de sa vie.
1\1ais le saint se contentait de pen, il ne mangeait qu'une fois
le jOUl' et jamais assez pour rassasier sa faim. Son occupation
ù lui, comme à Marle Madeleine, c'était de demeurer aux
pieds dn Seigneur, pOUL' écouter sa pal'ole, prêter l'oreille à
SfS entretiens, et jouir pal'i'ois d~ la vile des esprits célestes.
[l n'en advint pas 8utrenient quand son église eut été cons­
tl'uite, et quand le terrain dont le comte lui avait fait
concession eut été parcouru par lui malgl'é la faiblesse de son
cot'ps et ai-nsi ' nettement délimité, puis assig>né . pour
l'entretien des clercs, qui dessel'Vaient l'église (14). Car
même alors Goulven continua à habitel' son Pénity. Il y
vivait sans compagnon, uniquement occupé de Dieu. Il
n'accordait d'autre nourriture à son corps, quand il voulait
rompre le jeune et apaiser à moitié sa faim, que eelle que
par charit.é.
lui envoyait Maden
~ 15. L'Asile ou Minihi de saint Goulven.
Ce terrain, dont il vient d'être question, et dont le saint
fit le tour en marchant ù pied, ne se trouve pas seulement
nettement séparé et délimité par cette sorte de talus en terre,
qui s'éleva de lui-même partout où avaient touch~ les pieds
du saint, mais en outre il a joui depuis lors de si grands
privilèges, il a été entouré d'un tel respect religieux qu'aucun
homme n'a osé jusqu'à présent soit en violee la sainteté soit
y dérober quelque chose par la force, sans qu'aussitôt il
n'ait ressenti dans sôn corps la peine de son audace, saint
Goulven s'empressant de châtier tout eoupable, afin de
maintenir intacte la dignité et l'immunité de ce saint lieu .
De plus, quand on eut déraciné et retiré de l'enclos ainsi
BULLETIN ARCHÉOL. n-v FINISTÈRE. - TOME XVII. (Mémoires). 6

circonscrit tout ce qui était bois on arbrisseau, la terre devint
pl'oductive et très propre à la culture, mais aussi les gens
du pays montrèrent tant d'empressement à s'y établir comme
à suffire à l'entretien de ceux qui y
colons qu'elle a peine
demeurent et la cultivent. C'est ce terrain qu'on appelle
à présent le Minihi ou Asile de saint Goulven (15).
encore
L'homme de Dieu songea également à mettre à part quelques
arpents de terre pris dans l'enceinte dudit asile pOUl' en faire
afin qu'ils devinssent à perpétuité son
cession à Maden,
manoir particulier et celui de sa postérité. De là le Hom de
J( ermaden, ou village de Maden, qui lui est resté (16).
~ 16. Pouvoir miraculeux de Goulven .
Pendant que ces travaux se poursuivaien~, uu grand
nombre de personnes de tout âge et de tout sexe accouraient
auprès de Goulven, pour implorer de lui le double bienfait
la santé de l'âme et du corps. Or quand la foi de ceux qui
mérites du saint et la bonté de Dieu, qui ne
demandaient, les
cessait d'assister Goulven, se trouva:ent d'accord, jamais
les fidèles n'étaient frustrés dans leur espérance .

~ 17. Amitié du saint pour Ioncor.
Uu des plus empressés parmi ces fidèles s'appelait Ioncor,
dire: Celui qui admire, 8' en vante avec bruit (17).
ce qui veut
Il était de Plounéour-Trez, et sutlisammellt riche, bien qu'a­
donné aux tl'avaux des champs. Il venait souvent tI'ouver
l'hommedeDieuafin dereti.rer de ses entretiens un plus gl'and
mépris pour les faux biens de ce monde, un plus vif désir de la

patrie céleste. Par suite une tendre familiarité s'était établie
entre les deux serviteurs de Dieu. C'est pourquoi le saint
appela un jour Maden auprès de lui et lui parla ell ces
termes : « Va trouver notre ami commun Gonco!', qui
« demeure a Plounéour, et tu lui diras: « Voici ce que te
« mande Goulven : « Envoie-moi, au nom de la charité
" di vine, qui nOlIS unit, une bonne part de la chose que tu

u. ùuras dans les mains quand le porteur du présent message
« I.e parlera. )) Quant à toi, Maden, reçois avec action de
« ù'l'clCe tout ce qu'il t'offrira, mais quand tu auras quitté cet
li ~oll1rne de bien, aie soin Je ne jeteI' les yeux sur son
« présent que quand tu sel'as revenu en paix auprès de moi. )
~ 18. Obligeance de Ioncor récompensée.
Maden obéit., vint trouver Ioncor pendant qu'il labourait,
el lui Ht cUIluaitre quel 11lessage il apportJ.it. JoncOl> qui
. l'onduisait en ce moment sa chanue, hésita un moment en
entendant parler Maden. Car n'ayant rien alors dans les
put envoyer à l'homme de Dieu, il se demandait
mains qu'il
ce qu'il y avait à faire. Cependant comme il n'aurait voulu
pOUl' rien au monde lui désobéir ou plutôt désobéir à Dieu
en sa persolùle, inspiré d'en haut par le Saint-Esprit, il se
mit à dire: Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit; et
en même temps il l'amassait par trois fois plein ses deux mains
certaine portion de la terre et de la poussière qui étaient
une
sous le soc de sa charrue, et la mettait dans le sein de Maden.
Celui-ci ainsi chargé reprit la route du retour; mais il sentit
bientôt que ce qu'il portait de la sorte dans son sein ou
dans un pan de sa robe était extrêmement lourd, et devenait
de moment en moment plus pesant, si bien qu'en a~rivant à
l'endroit qui a depuis pris le nom de Huisseau blanc, à cause
du prodige, il ne put s'empêcher de regarder quel était cet
Il ouvrit donc son sei n et rdmaryua que cette terre de
objet.
poussière, dont il avait reçu une assez forte mesure, s'était
changée en· or pur (19). Mais la chose n'échappa point à
l'homme de Dieu, Goulven. Aussi fit-il de vifs reproches à
son serviteur pour avoir violé sa défense. Maden crut pouvoir
répondre: « Je ne pouvais plus porter un poids qui aug­
« mentait sans cesse: cependant j'ai commis en cela une
« vraie faute; daignez prier pour 11101 : afin que Dieu me la
« pardonne. »)

~ 19. Les trois croix d'or.
Le bienheul'eux Goulven employa cet or à Juire trois croix,
un calice, et trois cloches ou clochettes. Ces dernièl'es avaient
la forme carrée et le son en était agréable, mais le poids et.
la grandeur étaient si considérables qu'on pouvait à peine les
manier et les agite!' d'une seule main. De son vivant le saint
portait les tl'ois croix sur sa poitrine. Après sa mort l'une
d'elles avec une des cloches fut conservée longtemps comme
relique dans sa propre église. La seconde se voit présenLement

à Notre-Dame de Lesneven, la troisième est dans la ville de
Hennes (20), où repose aussi entouré des plus grands
honneurs le saint corps du bienheul'eux confesseur. Toucher
ces cloches, que le saint avait fait fondre pour l'avantage des
fidèles, ou en til'el' des sons suffisent joul'nellement pour ell
obtenir des Lienfaits de divers genre et pOUl' rendre la santé
aux malades. Quant à la cloche qui était restée dans l'église
même du saint, elle s'est perdue plus tard par la négligence
de ceux qùi avaient mission de la conserver (21). Mais la
croix d'or dont il vient d'être question s'y voit toujours (22).
Les malades qui viennent la baiser avec respect reçoivent
très souvent le bienfait de la santé à son contact, mais si
quelqu'ul1 a le malheur de prêter sur elle un serment
trompeur, il en est puni sur le champ et d'une manière
exemplaire.
~ 20. - Saint Paul de Léon renvoie un de ses pénitents
à saint Goulven.
Notre Patron, saint Paul que le roi très chrétien,Childebert
réussit partie par ses prières, partie par une pieuse ruse, à
faire ordonner évêque de Léon (13), hrillait en ces jours de
l'éclat de la sainteté, de la vertu et des miracles. Il gouvernait
depuis longtemps dans la crainte et l'amour de Dieu 'son
. église et le peuple qui lui avait été oonflé. Or il arr~va qu'un
jour après avoir entendu la confessiàn d'un de ses diocésains,

il crut devoit' le renvoyer pour l'absolution à l'homme de
Dieu'Coulven, pour que celui-ci jugât à quel genre de péni­
t,ence le coupab}e devait être condamllé.
~ 21. - L'aveu du pécheur et sa prompte obéissance.

Le pécheur en qlle~tioll vint donc s'agenouiller humble­
münf aux pieds de 1"homme de Dieu et lui parla en ces
tOl'nles: « ~Ioi. et un de mes vOtSIllS, nous nous etlOlls engages
« sous la t"oi du serment à faire dans un temps déterminé la
« visit.e des tombeaux des saints apôtres Pierre et Paul: le
« vO~'age devait se faire en commUll, nous devions nous
« garde!' société fidèle et constante. Par malheur, mes péchés
« Ollt mis obstacle à la réalisation de ce pacte. Car quand
« arriva l'échéance assignée pour nous mettre en route je
« suppliai mon voisin de retarder de trois mois, et il ne se
« l'endit à ma prière qu'à grand regl'et. Or, quand
« sonna pour la seconde fois l'heure du départ, voilà que
« celui qui devait être mon compagnon dut se mettre au lit
« pour cause de maladie, et IÎnalement il est mort decetle
« maladie sans avoir accompli son vœu. C'est donc moi qui
« suis cause que le vœu dont je parle n'a point été rempli, .
« aussi je confesse que j'ai péché, mais j'espère que Dieu me
« pardonnera cette faute, si vous priez pour moi : je suis
« d'ailleurs pleinement disposé à accomplir toute pénitence
« qu'il vous conviendra de m'imposer. ». « Ce quetu devais faire
« pour un vivant, lui dit le saint, « tu le feras pour un mort.
« En d'autres termes, tu porteras le corps de ton ami à Rome,
« et tu l'enseveliras aü milieu des martyrs. » .
Le pénitent obéit sans hésiter. Il enferma le cadavre de
son ami dans un sa cousu avec soin, le mit sur ses épaules
ct le porta ainsi jusqu'à Home. Mais le mérite de cette obéis­
sance et les propres mérites du saint rendirent le fardeau si
léger, que celui qui en était chargé ne le trouvait pas plus

pesant et n'en était pas plus incommodé que s'il eut porté
un sac de plume .
Ce miracle, et les autres e1l grand nombre , que le saint
accomplissait sans pouvoir en dérober la connaissanee au
arriver jusqu'à Rome et au Pape lui-même le
public firent
nom et la réputation de saint Goulven;
~ 22. Saint Paul Aurélien annonce que Goulven doit
être un de ses successeurs .
Cependant le bienheureux Paul, dont nous venons de parler,
ayant atteint une extrême vieillesse., connut par révélation
'divine quel jour il quitterait cette terre pour aller vers Dieu.
Les frères de son monastère le prièrent alors de se donner un
digne successeur avec l'appui du mème Espr·t divin qui lui
avait révélé le jour de sa mort; à quoi il répondit: « Sachez-
« le, mes frères, la divine Providenee m'a fait savoir que vous
« deviez choisir pour évêque après moi ce saint homme qui
« habite depùis son enfance un littoral marécageux sur les
« limites de la paroisse de Plouider (24), y mène une vie
« constamment adonnée à Dieu, ou plutât y vit comme un
« ange au milieu des hommes. Je sais qu'il refusera d'as­
« sumer sur lui un si lourd fardeau, mais en attendant vous
CI avez avec VOl! s Cetomèl'in et d'autres saints personnages
« qui vous défendront des morsures des loups (25). .
~ 23. Goulven est institué, malgré lui, évêque de Léon .
De fait, après la mort de saint Paul Aurélien, les vœux
unanimes du clel'g' et du peuple se réunirent sur Goulven.
On le voulait pour évêque : mais on ne put amener en aucune
manière à y consentir celui qui se jugeait indigne d'un tel
honneur et incapable d'en remplir les oblig'ations. Cependant
comme le peuple et le clergé persévéraient dans leul' réso­
lution, le saint fit semblant d'êtl'e ohlig'é d'aller à Rome et
par vœu à la visite des tombeaux des saints apôtre.s afin de
retarder d'autant l'accomplissement des desseins que la

]>l'ovidcu(;c avait SUl' lui et qui étaient si cOlltraires à ses
pl'essèrellt alors, d'envoyer d a~ance au s~uveralll .PontIfe
tille relation détaillée de la Vle et des samtes actIOns de

Coulven i,2ü). On alfirme d'ailleurs que le Pape avait été
par révélation d~vine de l'arrivée à Rome du saint
averti
ermit.e et. du mot.if' qtlÏ J'y amenait. Aussi l'ordonna-t-il
éVl\que, malgl'é la résistance énergique qu'il opposait.
;\ prl\s quqi le Pont'ire lui octroya · plusieurs privilèges en
VCl'tll de SOli alLtorité apostolique et le renvoya plein de joie
dalls son pays.
~ 24. - Deux mots sur l'épiscopat du saint.
Combien de temps Goulven gouverna-t-il l'Eglise dc
(2ï ),. et par quels nouveaux miracles sc signala-t-il
Léon
pendant SOli épiscopat '? C'est ce que nous n'aurons pas la
témérité de raconter pour ne pas nous exposer à n'avancer
car aucun éCI'it authentique,
que des choses incertaines,
aucune relation digne de foi ne nous a rieu appris à cet
égard, mais ce que nous pouvons affil'mer dans la présente
biographie c'est que jusqu'à son dernier souffie Goulven
mena une vie puee, exempte de toute tache, c'est qu'il
continua à briller de l'éclat des miracles, c'est qu'il sut se
préserver' de tout sentiment délibéré de vanité, de toute
recherche de l'estime des hommes.
~ 25. Dernières dispositions de saint Goulven.
Cependant vint le temps où le Seig'neur, dont les volontés
ne sont jamais privées de leur effet, l'ayant ainsi disposé,
Goulven, soldat du Christ, fut trouvé digne d'être admis à
toucher la solde prescrite, vint le temps où Goulven, .ouvrier
fidèle de la vigne du-Dieu des armées, ouvriel' de cette vigne
Jans laquelle. il avait travaillé avec ardeur non seulement
depuis la troisième, la sixième, la neuvième ou la onzième
heure de sa vie, mais bien depuis le premier moment ' de sa

naissance, fut trouvé digne de participer au denier de la
récompe'nsc, c'est-à-dire digne d'entrer pour l'éternité dans
la jouissance de Dieu lui-même. 01', il se trouvait dans la
ville de Rennes, où l'avaient appelé les affaires de son église
lorsque la fièvre le saisit.
Quand il s'aperçut que son corps· défaillait' ct n'avait plus
aucune force, il avertit aussitôt Maden que son âme allait so
séparer de son corps, et lui parla en ces termes:
« Sache qu'il m'a été révélé par le Seig'neul' que tel jour et
« à telle heul'e j'irai à Dieu; mais il ne m'est permis de te
« léguer en héritage ni mon corps, ni aucune partie de mes
" membres. Reçois seulement cette Cl'oix d'or pour la porter
« à l'église qui a été construite à ma prière auprès de mon
« pénity. Je veux qu'elle s'y consel've avec ma cloche d'or
« comme un gage de mon affection et un mémorial perpétuel
« de nature à réveiller la dévotion et la foi du peuple. »
2 26. - Mort et sépulture de saint Goulven.
Maden, ayant reçu ces gages précieux. de l'~mitié du saiu-t
et le&-ayant serrés avec soin, Goulven remit lui-même son
âme entre les mains des anges, avec toutes les saintes œuvres
qu'il avait accomplies de SOIl vivant. Or, les moines de
Rennes, en raison des nombreux miracles que le saint a:vait
opéré chez eux avant et pendant sa maladie, et mieux encore

en raison de ceux qu'il y opéra aussitôt après sa mort, ces
religieux, disons-nous, voulurent ensevelir le corps vénérable
dans l'encein te même de leur monastère de Saint-Melaine,
tout auprès du corps vénéré de ce saint Evêque et confesseur
(29), afin que de la sorte leur abbaye se trouvât sous le
double patronage de ces deux grands saints. Ils se disaient
avec pleine justice que Melaine et GOLLlven, ayant vécu l'un et
l'autre, tout le temps qu'ils avaient eu à passer sur cette terre,
d'une vie semblable et très agréable à Dieu, avaient droit,

après avoir milité cie la, même manière, à jouir en retour
d'une sépulture qui fut également honorable.
~ 27. - Portion des restes mortels de saint Goulven
retrocédée aux habitants du Léon.
Dans la suite des temps, quanù les restes mortels de saint.
Goulven eurent été levés de terre et exposés à la vénération
publique, les habitants du Léon étant venus prier à son
tombeau obtinrent à force d'instances et de supplications
qu'on lem' retrocédât un article de la main du saint (30).
01', cet article fut apporté par ellX à son église de Goulven
et il est encore aujout'c1'hui conservé ·et en grande vénération
avec les autres reliques, c'est-à-dire la eroix 'etla clochette
d'or dont il a été question plus haut. .
~ 28. - Épilogue.

Saint Goulven mourut pleill de jours et de saintes œuvres
]e 1 cr juillet, année BOO ou environ de l' Incarllat.ion du Sei-
gneur. étant Roi ~lu Monde, notre SeigneUl' JéSllS-Chl'ist, à
qui appartient l'honneul' et Ici. gloire dans les siècles des
siècles. Amen.
Fl~ nE LA VIE DE SAnT (;OCLYE~ . 1

APPENDICE (3.1 1
Pr~.lTI.ière Prose de saint Goulven,

Crüé) tune Crea lOrelll
Pour la créa tu re, c'est rendre
hommage nu Créateur que
Ycuerautill', dum hOllorem
d'entourer ses Saints d'hon­
Ejus SlIllcLÏs exhibent.
lIenr' et de vénératioll.

Laus ct hOIlor [sint] Golvino
Lourtuge et honneur soient
(lonc à Goulven, que le Dieu
Qnelll diicctn Ln Deo Trillo
Trine et Un a aimé comme eu
facta exhibeut.
Ejlls
font foi ses gestes et actions .

Qnem ill terris sublimavit
A Goulven queJésus-Christ a
honoré du don des rniracles,
Christus ~ignis et dHavit
qu'il a cornblé de gràcps de
~ratià.
Multifofmi
tout genre.,

Cujus ortu, dono Dei,
A peine, en elret, est-il né,
et voilà que pHI' un don de
Fons iIlünensm speciei
Dien une font[lÎne d'une grande
Prope porturn oritur.
beauté jaillit de terre, tont
près du port.

Quo decllmbens recreatur
L'eau salutaire qui en jaillit
redollne des forces à la mère
infans haptiz<1tur,
Mater,
encore étendue sur S3 coucber
JEgris sains refunditur.
l'eufant y est baptisé, les ma­
lades v recouvrent la sauté .

A prirnevo, C3rnem areet Dès le premier àge, Goulven
crucitic sa cbair, en ne la
Aquâ, pane, quod non marcet,
nourrissant que de pain el
Aspirans ad gaudium,
d'eau, car il aspire aux joies
qui ne doivent jamais se flétrir •

Serviteur de Jésus-Christ,
Christi cultor, verbo, vitù
Goulven fut vierge daJls ses
Virgo semper, hercmÏla,
paroles eL daus ses actes, il
Triplex \'ieit prœlinuL
l1alJitn le désert, il triompha
dans le triple combat contre
la cOlleupiseence.

Ni le veut, ni le froid ne
YeuLllll1, frigus nullus domo
furent jamais sentis daus la
Quel hltelJat, sentit, U0l110
IlWbOll qui servait de retraite
QUD!l1 non iutr[lt feminiJ.
à Goulveu, lll<1is aussi nulle
femme ne doit y pénétrer .

Aidé du secours des prières
E,illS prece delJellavit
de Goulven, le comte Even
Dux Evenus, et IH'oslravit
délit et extermilJa les bataillolls
Barbarorum agmlfia.
des Barbares.

Goul vcn fil trois cloches ct
Tres campatHls et totidctll
trois eroix d'or avec la pOI.lS­
A uri Cl'uees l'ccit idelll
siôre (1 ue IOllcor lui eu voyai t.
De transmisso pulvere.

Sur l'ordre de Goulven, un
Ej us ,i lISSlI, Rom:lI11 latus
mort est porté à Rome, mais
Se portantem, morti datus
il n'accable d'aucun poids celui
Nllllo pressit pondere.
qui le porte.

Demandé pour évêque par
A Letavis postulatus
les habit:.ll1ts du Léon, Goul\'en
Coutradieens est sacratlls
résiste mais S<:\l1S proUt, car il
Manu Papœ propriù.
est sacré de la main même"du
Pape.

Beaucoup de prodiges sont
Mulla signa snbticentur
clans la
passés sous silence
ne graventur
Auditorum
crainte de fatiguer les oreilles
Aures propter tœdia.
de ceux qui écoutent et de leur

causer de l'ennui.

(;onlveu, flprès avoir IJieu
Lnhorunti Christi in vite
trnvnillé à ln vigne du Christ,
Dat in sero Christus, VitiC
reçoit du même Jésus-Christ,
Perenuis dcuarium.
~lU soir de la vic du tom ps, le
denier de la vie éternelle .

Imitons-Je et cOUl'ons il sn
Quem currentes sil, sequ:ll1lllI'
suite nnn d'obtenir par lui le
V t pel' j psum COllSCqlW 1l1l1I'
prix de la course que nOlis
Facto curtin, hraviul1I, Ameu.
aurons acconl plie. Ainsi soit-il.

Seconde Prose de saint (-;oulven. (32)

Gràtulalllur, Leouia,
CIHlutQnS à la gloire dll Léon
Jes gestes de saint Goulven
De Golvini historià
[liIlSi que ses miracles.
Et ejl1s rniraculis.

Prœsul smletus, mgrcgius,
Ce })outife saint, excelleut,
plein de gloire et d'éminente
G }oriosus, cxim ius
vertu, eut pour berceau Odcna.
In Odena nascitur .

A sa naissanee une source
Fon lis vena aperi tUf
d'eau a jâilli, l'enfant renait à
Dnde IJuer reuascituf
\:ette fontaine et les infirmes v
Et purgan tur infirmi.
trouvent une eau salutaire .

Il se construit nne petite eel­
DOlfJuscnla cOl1struitllr ;
Iule claus laquelle Ile ~c f::lit
Frigus intns non sentitlll'
sClJlir ni Je froid ui les se­
Nec venti concussio.
cousses du vent.

(aseos tl'es mire mutaI.
11 change en ]liCITes tr6i~
fromages, qu'une femme avait
lu lapides, quos recusat
refusé de Ini donner.
l\'1uIier erogare, (33)· _

Ici il change la telTe en or,
Ten'am mulnt hic in aunllll,
et en fait croix, cloches,
Cnll1ulans Dei thesaurum ,
pour p,mich ir les trésors
I·ices
de Dien.
Cl'ucr.s, clochas, calices.

.Le Léon est livré nu pillage;
l..eoniam prœdantur ; ferf'ntf's
Jllnis ensuite Goulven fRit tom­
\Ïctoriarn tenet pel' cu ses 0
lps vainqueurs sons Ic~
ber
glaive des soldats du" eornt.e
EWlli excrcilus.
E\'en .

Dieu attentif aux prirres de
p(>l' GolyiulIll1 110xios pcrcellit,
Goulven frnppe snI' les impies,
BOlln rapta l'eddere compellit ;
et les force ;'1 rendre le bien
il extermine les palf'lls.
volé;
ExLirpnnwr paganl.

Le eomte Even lui avait
Quantum potest circuirtl
donné tout le terrain, qu'il
Uno die ac nuire
pounait parcourir et circous-
crlre en nn JOlll'.
EVr.llllS conlulerat.

Aussi uu murde terre s'élève
MllrÏ terrr'C eriguntnr
partout où le.;; pieds du saint
Ubi peeles gradiul1tllr
la trace
ont touehé, afin que
en reste visi ble.
Extnt: apparentia.

Un chrétien déclare en con­
Christianlls conntetur
qu'il a péchè, et qu'il
fession
Se peccasse, obmeretul'
mérite pénitence.
Verre pœnitentiam.

Ln chose est portée à Goulven
Gol vino sic retard ari
priver lè mort
qui ne veut pas
i\lora hUllC crepit defraudal'i
son droit. (34) .

Socium velle SUD. (34)

, .. oici sa sentence: « Prends
Ai! sanctus: corpus port:l,
ee c::ldavre, et traîne:le par
Humo trahens id in sporUl
terre jusqu'à Rome.
Romam ·versùs bajlllan~.

Leve pondus invenies
Le poids t'en paraitnl léger,
tu l'enseveliras avec les mar­
Cnm occisis sa~pelies. j)
tyr:,.» La renomméedeGolllvell
Fama Romœ innotnit.
:l l'riva a insi jusqu'à Rome.

"Une p,ar~lysie naturelle, qui
Paralysis naturalis
s etend31t a tout lA corps dis­
Pelli tur univers a li s
parait des pieds d'une jeune
De pedibus filire. -(35 )
fille. (35) .

Mulier de fracto crnre
Une femme est guérie par le
saint d'LIlle jnmbe cassée et

Liberata fuit cure
nrrachée auxflotsde la mer (36).
De profundo marino. (36)

Ter scinditur die festi
Par trois fois fnt déchiré un
drap, dont on voulait parer UÏl
Pannus disponendus vesti .:
vétement (en tra VRi liant \ un
G olv illo re mitti tu r. (37)
jour de tëte. On en fait présent
à saint Goulven. (37)

Les cise:mxs'attê:1chentA cette
Forfex hœret huic manui
Illl;in et ne peuveut cn être
Dissolvi neqlleullt cultri;
détachés; la coupable le re­
Intendit, liberatul'. (37 lJi~ )
marque (prie), et e~t délivrée.
(37 bis) .

vir in foro equnm emit,
Un homme achète lm chevnl
an marché, lllê:1is le cheval
Deyiavit equus : L'remit, .
s'f\g:lre: l'acheteur en frémit
Yovit ipsurn Prm~lll i.
do douleur, et voue sa bMe il
sni ut Gou 1 ven.

Domum venit, quà non fuit; Or le cheval arrive de lui­
môme à la mason de l'acheteur,
Sancti yirtus edomuit
qll'il n'avait jamais habité, pHI'
Quoù prius perierat. (38)
un etl'et de la puissance du
saint, qui domine les iostincts
des animaux sallS raisoll. (38)

Je 2 H5 " n:

Gràce il saint Goulven l'enll
Sütl lmllieus corrum pere
bouillmlte fnt impuissante 11
Cnrla III nqua nec delere
détmire des chartes, il e(fncer
dfls IctUes, h attnquer de s im­
Lilleras nec infringere
pies scenux en cire. (39)
io'ua cerm potuit. (39)

Un homme essaie vainement
Aquam fontis vuIt bullire
nu moyen du fen le plus nrdent
lo'ne tenSO homo mire
de faÎl'e bouillir l'enu de la
Cor temperat mentis dine
sainte fontnine .. Goulven apaise
la colère d'llU cœur ulcéré, qui
Quod nequit sed tepuit. (40)
rentre en lui-même, en vovant
de ses effort~. (40)
l'inntilité
Equus potnns mox sanatur
Le cheval, .qui boit de cette
eau, recouvre la vigueur, les
Omnis languens hinc curatur
malades v retrouvrent la santé
Cum mens sancto conformatlll'
, pourvu toutefois que les cœurs
avec ceiui de
soient à l'unissOll
Fnndens preces Domino.
Goul ven q lland la prière monte
Dieu.
vers

QnœdalTI doums eomburitur,
Le feu consumait une maison,
m,lis il respecte un enfêmt, qui
Puer inlus non la>ditUl',
ét.ait ~l l'intérieur. On retrouve
Ipse sanus iuvenituJ';
cet enfant sé'lin ct sauf. Goulven
l'avait préservé dé toute at­
Colvino conservante.
teinte du feu .

Vil' jumentum nequa/11 rapit ;
Un homme méchant vole une
. jument. A l'instant même il est
Cœcitatern fine ct1pit.
frappé de téeité. Un autre pnrle
Yil' asyli malLllll sa pit,
mal de l'asile du saint. Goulven
lui fait sentir son indigrwtioll
Innn. sancti mox obc::tpi t,
et châtie son audace.
Patitur ultionern.
J esu, llostri miserere.
Jésus, ayez pitié de nous .
Bon pasteur, soyez notee pro­
Pastor bone, nos tuef(~.
Greffez la paix dans
tection.
Et pacem nobis insere.
uos cœurs et donnez-nous il la
prière de Goulven de partager
CUIT! allgelis fne gaudere
la joie des anges. (41) Amen .
Golvini suffragiis. AmelJ.

Notes de la vie de saint Goulven.
('1/. ) Biblioth. nationale de Pari~, man. fl':mçais 22,321, p. 1:268
. et sui v-.
(1) Cet endroit du littoral porte m:rintpnnllt le nom significatif
de Grh,e de Saint-Gonltien.
Cette v[lste pnl'oiss8 est proche Lesnoyen et doit ce .
(2) Plouider.
nom il. son patron, snillt Didier, éYè(]ne cle Lnngres. Le pénity de
saint Goulven, dont il sern mention pins bas, était sis en cette
pnI'oisse avant ln création dt' ce llf~ dr. Goulven, qui est postérj(~ure
(111 VII' siècle.
(3 ) Br'engoni,lh, ou Brenqu.rnz, forme un village cl( -) Plonéour-
Trez, d'apr(\s M. de Kerdnnct. Vies cles saints de· llrelngne, p. 367.
(4) Le nom d'Odéna ou Otena ne s'appl ique plus nnjourd'hui
qn'ù une chaumière attennnt nu péniLy de saint GOUIVNI, mais
il est possible qn'il en fllt autrement an VI' siècle.
(5) La fontaine de sn int Golv in, primitivement GolDin, se trollv'c
à une distance d'environ 500 pas du village de Kerolllien, en Ploui-
der. . .
On continue à y aller en pélérinage pour être guéri de la fièwe.
(Abbé Le Guen, lettre de juill. 18791.
(6) Le village de [ierqozian, en Plonidel', a perdu son Dom pri­
aujourd'hui Yieux-Chastel, 111alS les anciens aveux
mitif et s'appelle
le lui ont maintenu au moips jusqu'en 1497, sinon beaucoup plll~
tard .. (V. Kerdanet, p. 369). -
(7) De ce fait que Godianus sava it éCl'ire et rédiger un testament,
ce semble, que l'état des lettres était alors assez
on doit conclure,
prospère en Annonque. .
(8) Le pénity de snlnt Goulven on Goulvien se trou \'e sur une élé­
vation à l'onest d'Odena, au N.-O. de Goulven, clans la direction de
Kerlouan, Ù 800 mèlres de l'église paroissinle. On en a fnit unc
chapelle, qui, avec son enclos, forme une circonférence de 620
pieds. (Kerdanet, p. 370).
(9) Ces croix ont dispnru avec le temps, nHlÏs les stations sont
connues avec assez de précision. La première sc trouve ù
encore
Croas-Prat-ar-Vern (Croix du plateau dn grand mftt) il mi-chemin
de. Keroulien et du bourg de Gonlven, sur la route de Kerlouall ; la

seconde il Kerdraon, sur la route de Plouescat, .'1 400 mètres de
réalise; la troisième au village dit Gouer-Venn (ruisseau blanc),
i'n~ la l'oute de Lesneven. ~Abbé Le Guen, lettre de juillet 1879).
10' Ce sont ces expressions: Dcmi. et Norrnanni, qui ont donné

lieu de croire qu'il s'agissait ici des Normands des IX· et X' siècles.
Mais il suffit, pour les expliquer, de se rappeler que l'auteur écri­
vant il l'époque des invasions des Normands, pouvait ne voir aucun
inconvénient à appeler du même nom des envahisseurs qui vivaient,
il est vrai, deux ou trois siècles plus tôt, mais qui étaient originaires
des mêmes pa~ls du nord. Quant à l'ensemble du récit, il est en
contradiction formelle avee une opinion de ce genre. Comment
admettre, en elfet, CJue le pays de Léon portait encore le nom de
Letavie dans les jOUl'S du roi Salomon et des comtes qui lui ont .
Goulven aurait-il été conlemporain de saint Paul '
succédé? Comment
de Lé.on, s'il n'avait vécu que du temps de Nominoé et de ses suc­
cesseurs?
(11) Le mot: discnrnbere est mis ici par Imitation de l'Evangile
et de l'antiquité classique, ma is il ne doit pas être interprété à la
lettre, car rien ne prouve que l'usage des lits de table ait été connu
en Bretagne depuis la prédication de la foi chrétienne.
(12) La tradition nous apprend que ce lien était celui de 'Croas­
Kerdraon, soit la seconde des stations du saint.

(131 Ce nom de Madeu ou Jl/at-Den (bon homm,e), est très connu
Une paroisse du nom de saint Maden a été créée en
en Bretagne.
1824 : précédemment ce n'était qu'un village de Guenroc (Côtes-du­
Nord), arrondissement de Dinan .
. Saint-Maudan, Plumaudan, Trémaudan, etc., semblent des appel­
lations analogues.
(14) Il s'agit ici de l'église priorale de saint Goulven, qui a con­
servé ce titre jusqu'en 1789 et avait pour protecteur le seigneur
de Penmarch, de la race des anciens comtes du Léon.

(15) L'asile ou rnachi de saint Goulven, dont nou~ avons ici les
1789. Les lieux de ce genre étaient
origines, a subsisté. jusqu'en
nombreux en Bretagne. 1\1. de la Bigne-Villeneuve en a fait un
relevé détaillé et en a compté plus de 60,' maisceilli de saint Goul-
ven était l'un des plus célèbres. (V. les Mémoires de Ja Société
archéol. d'IIle-et-ViIaine, ann. 1861).
(16) Le village de Kermaden existe encore, il est en Plouider.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. - TOME XVII. (Mémoirei ). 7

(17) joncor (de Plounéour-Trez), ne pal'aît pas être UH nom breton,
llU' moins dans la forme; peut-être doit-on lire Jan-Car, qui don­
nerait un sens.
(18 ) Alba Fos~a, en breton Ar-C'hmt'De1'- Venn, nom d'un ruissenll
qui coule au village de Kerdr::lon.
(19) Ce miracle est l'un des six qui sont repl'ésentés SUl' le l'étable
de l'église paroissiale de Goulven.
(20) Le souvenir de cette double cloche de saint Goulven, celle (de
Lesneven et celle de Rennes ), parait s'ètre perdu depuis lesjoUI's de
J'écrivain: la tradition et les monuments locaux sont muets il leU\'

égard, si je suis bien renseigné.
(21 ) Ne serait-ce point cette cloche qui aurait été transportée li
Gonlien, près Douarnenez? On l'appelle dans le pays la cloche de
saint Goulien, et c'est le saint qui a donné son nom à cette nouvelle
paroisse, seulement la cloche en question au lieu d'être en or n'est
qu'en argent on en laiton.
(22) Cette cl'Oix d'OI' a dispnrn de Goulven depuis les jours du .
biographe.
(23) On doit remarquer ici, il l'encontre de ceux qui prétendent
Paul Aurélien a été le premier évêque du siège qu'il occu­
qne saint
pait, que, si ln chose était vraie, l'écrivain n'aurait pDS manqué
de l'affirmer en toutes lettres.
(24) Le pénity de saint Goulven appartenait de fait à la paroisse .
de Plouider avant que Goulven eut été érigé en paroisse.
(25) Cette dernière remarque 'nous explique comment il y a appa­
rence de contradiction et non réelle contradiction entre le r.écit de
'Wrrnonoc, le biographe de saint Paul Aurélien, et le propre réc.it de
notre auteur. Car si ce dernier affirme que saint Goulven devaIt
succéder à saint Paul Aurélien, il ne le donne nullement comme
du même saint, ce que fait Wrmonoc
successeur imniédiat
Cetomarinus. Il y a donc accord pour le fond entre les deux
pour
auteurs.
(26) Il est fàcheux que le biographe n'ait pas donné un nom il ce
pape, mais, d'après la tradition consignée dans le gwerz de saint
il s'agirait de saint Grégoire-le-Grand en personne.
Goulven,
(27) Le Propre de Léon, publié en 1736, s'est cru autorisé à
donner à saint Goulven 40 années d'épiscopat. Nous ignorons Slll'
quoi il se fondait pour avancer une assertion aussi catégorique .

("t8) Le biographe de saint Goulven est ici bien incomplet. (V:
prolégomènes, ~ 2.)"
('29) L'asserlion du biographe de saint Goulven relative à cette
possession simultanée par les moines de Saint-Melaine, de Rennes,
des corps de saint .Melaine et de saint Goulven, ne manque pas
d'ifllportance- et ne doit pas passer inaperçue. (Voir Prolégom.,

(30) Cf~ serait se trO?1per 9ue ,de s'i~agin:r .qu'il s'agit ici de l'os ,
dn IJrns, qui fut donne en ~;)33 a la meme eghse de GOlllven par le
B, Yves Mabyenc. (V. Prolegom., p. VII).
(31 ) Les deux proses que nous plaçons ici en appendice nous ont
été fournies l'une par le missel de Rennes (1492) qui se conserve
• uujourd'hui il la bi~liothèque nationale (de Paris), l'autre par celui
de Saint-Pol-de-Léon (1526); qui fait partie de la bibliothèque
de 1\1. Pol de Courcy. L'une et l'autre sont en petits vers rimés
avec syllabes comptées, et doivent avoir pour autAur un double
poèt.e breton; c'est à ' ce titre surtout que nous croyons inté­
de leur donner place ici. Joignez à cela qu'elles a ppartien­
ressant
nent au genre historique et qn'on y trouve un résumé exact des
faits et gestes du saint.
32) Cette seconde prose n'est à certains égards qu'une imitation
du Lauda Sinn de saint Thomas-d'Aquin, mais elle offre cette par­
à c~rtains
ticularité intéressante que l'auteur paraît mieux informé
égards que le biographe même de saint Gonlven, surtout en ce qui
concerne les miracles posthumes.

(33) Ce fait a été passé sous silence par le biographe.
(34) Il Y a peut-être ici faute d'impression, aussi j'ai traduit libre­
ment d'après le sens et les faits plutôt qu'en suivant les mots.
(35) Cc miracle et les suivants sont post.érieurs à la rédaction de
la biographie du saint. Le P. Albert Le Grand les rapporte succinc­
tement d'après des mémoires particuliers.
(36) Le texte est inintelligible littéralement avec le mot cure, qui
doit être une faute d'impression. Mais il est manifeste que le poète
a ici en vue lc miracle n° 13 du P. Albert Le Grand. Une femme
s'était cassée la jambe sur la grève et ne pouvait plus faire un pas.
Elle allait être submergée infailliblement par la marée, si saint
Goulven ne l'avait guérie sans retard •

(37) te prodige était resté ignoré, il moins qu'il ne s'::lgis-;e du
même, dont il est question dans la strophe suivrlllte .
(37 bis) Le P. Albert Le Gnllld le ra ppOl'te sons le n° 6.
(38) Ces deux strophes ont trait au miracle rapporté par le même
hagiographe sons le n° 14. J'ai tradnit le sens non la lettre dn
poète.
(39) Ce prodige e~t raeonté par le P. Albert Le Grand sous le n° 3.
(40) Ce prodige et ceux de la strophe 25' n'ont rien d'analogues
dnl1s ceux que le P. Albert Le Grand a recueillis .
(41) Celte dernière strophe, .le le répùte, est manifestement ulle
imitation de celle qui termine la prose du Saint-Sacrement: Law/o,
Sion, Sall,atm"Wl. .

ORIGINES DE LOCIIARIA
J)'Al'H]~S UN DOCUMENT DU XVIIe SIÈCLE .
:\otre Bulletin publiait, dans sa dernière livraison, Ull
ancien document CORcernant Locmaria, extrait par M. de la
Borderie du fonds de l'abbaye de Saint-Sulpice, de Rennes.
Cette pièce originale, dont l'écriture, dit M. de la Borderie,
est du milieu du XIe siècle, et qui, depuis la fin du XVe siècle,
. n'était plus en possession du prieuré de Locmaria, fut le
titre principal sur lequel s'appuyèrent les Prieures, . à la fin
du XVIIe siècle, pour réclamer contre la dépendance dans
laquelle elles se trouvaient vis-à-vis de l'abbaye de Saint-
Sulpice. .
En 1689, (1) Jeanne du Talhouët faisait rédiger par
Me Julien Le Lièvre Duval, avocat à la Cour, demeurant à
Rosporden, un long mémoire pour prouver « que le prieuré
de Locmaria est un prieuré conventuel et indépendant de
l'abbaye de Saint-Sulpice par son titre, par sa fondation et
par sa possession. » Ce mémoire serait à citer en entier, cl!l'
il est le commentaire historique et critique des donations de
Bénédic, d'Alain Canhiart et de Hoël, dont malheureusement
l'auteur n'a sous les yeux qu'une copie, l'original étant·
depuis longtemps entre les mains de l'abbesse de Saint­
Sulpice. Voici d'abord comment le sieur Le Lièvre explique
cette anomalie. '.
« Il arrivait, dit-il, quelquefois que les Prieures de Loc-
maria devenaient abbesses de Saint-Sulpice et que pour
reconnaître l'élection qu'on avait faite de leur personne, ou
poussées par leur ambition de . procurer quelqu'avantage à

(\) Archives départementales du Finistère, série G, . 316 .

leur nouvelle dignité, aux dépens de celle qu'elles abanùuII­
naient, elles abusaient du dépôt et de la disposition qu'elles
avaient des titres du Prieuré pour transporter à l'abbaye de
Saint-Sulplice ceux qui concernaient les anciens droits du
Prieuré, ses privilèges et sa fondation, »
A l'appui de son dire, l'auteur cite l'élection, en 14H8,
d'Andrée de Belloneau, Prieure de Locmaria, comme abbesse
de Saint-Sulpice, et l'élection à la même dignité de Gabrielle
de Morais, en 1577, Il ajoute que les pièces qu'il produira
sont de simples copies collationnées sur les originaux en
1656 et fournies par dame Marguerite d'Angennes, abbesse
de Saint-Sulpice, ce qui est « une nouvelle preuve, dit-il,
que les originaux des anciens titres du Pr'euré ont été
divertis et transportés dans l'abbaye de Saint-Sulpice, dans
les archives de laquelle ils sont encore aujourd'hui. »
. L'auteur discute ensuite, point par point, le texte des
donations de Bénédic et d'Alain Canhiar:t; voici le résumé
de ses principales conclusions.
Le Bénédic, évêque et comte de Cornouaille, dont il est
question dans ces actes, vivait en l'an 1022, par conséquent
le monastère de Locmaria existait un siècle avant qu'il fut
question de Saint-Sulpice de Rennes, abbaye fondée en 1.i12.
De plus, il fait observer que la donation de Budic n'est pas, à
proprement parler, la fondation du monastère de Locmaria,
mais une donation à un monastère déjà fondé: « toutes les
observations qu'on vient de faire, dit-il, prouvent première­
ment qu'il y avait originairement un double monastère à
Locmaria, un de religieux, gouvernés par un abbé: l'autre
de religieuses, gouvernées par une 'abbesse ; en second lieu,
ces mêmes actes prouvent que ces monastères avaient . été
fondés et dotés par les anciens comtes de Cornoup,ille, spécia­
lement par Bénédic et Alain Canhiart; on ne peut pas même
raisonnablement douter que la fondation de ces monastères
n'eùt été faite par leurs prédécesseurs puisque leurs dona-

tLOIlS font mentioll d'un ahbé et J'une abbesse , et d'un monas-
tére déjà existant. II
Cette opinion d'un monastère existant à Locmaria avant
la donation de Bénédic, évêque et . comte de Cornouaille,
appaJ'aît dans plusieurs actes du Prieuré conservés aux

archives départementales. (1) Dans une supplique au comte
de Toulouse, en i 720, la Prieure J eanne-Thérèse Frélon de
Saint-Aubin dit que « les Pl'ieurés de Locmaria et du Quil­
liou sont des anciennes fondations ducales faites dans les dix
et. onzième siècles; et dans un mémoire rédigé vers 1750, (2)
pour prouver que la Prieure n'est pas tenue à payer la
portion congrue au vicaire de Locmaria il est dit cc quoique
annexé à Saint-Sulpice par Conan, duc de Bretagne, Ermen-
garde, sa mère, et Mathilde, son épouse, il est constant
cependant que le Prieuré est infiniment plus ancien que
l'abbaye de Saint-Sulpice comme il se justifie par une
ancienne charte de l'évêque Raoul~ de l'an 1152, dans laquelle
cette abbaye est qualifiée Donwn regale ab antiquis Britan­
norum Ducibus, 8cilicet Cagnardo, Hoello, Alano, Conano
instructum, et juste confirmatum. Le ~ens littéral et naturel
de ce texte est que le monastère de Locmaria -était un don
royal, c'est-à-dire une fondation faite par les Rois et ensuite
enrichie et confirmée par les Ducs de Bretagne Cagnard,
Hoel, Alain et Conan, ce qui suppose cette fondation faite,

pour le moins, dans le neuvième siècle et avant l'an 874. »
L'auteur du mémoire de 1689 pouvait donc conclure que
Locmaria était cc par sa fondation et dans son orig'ine un
monastère indépendant et qu'on ne peut sans contradiction
soutenir qn'il soit un membre ni une obédience de l'abbaye
de Saint-Sulpice, puisque ce serait supposer le membre plus
ancien que le chef et la fille plus vieille que la mère. »

leur nouvelle dignité, aux dépens de celle qu'elles abandon­
naient, elles abusaient du dépôt et de la disposition qu'elles
avaient des titres du Prieuré pour transporter à l'abbaye de
Saint-Sulplice ceux qui concernaient les anciens droits du
Prieuré, ses privilèges et sa fondation. »
A l'appui de son dire, l'auteur cite l'élection, en 14H8,
d'Andrée de Belloneau, Pl'Ïeure de Locmaria, comme abbesse
de Saint-Sulpice, et l'élection à la même dignité de Gabrielle
de Morais, en 1577. Il ajoute que les pièces qu'il produira
sont de simples copies collationnées sur les originaux en
1656 et fournies par dame Marguerite d'Angennes, abbesse
de Saint-Sulpice, ce qui est « une nouvelle preuve, dit-il,
que les originaux des anciens titres du Pr'euré ont été
divertis et transportés dans l'abbaye de Saint-Sulpice, dans
les archives de laquelle ils sont encore aujourd'hui. »
, L'auteur discute ensuite, point par point, le texte des
donations de Bénédic et d'Alain Canhiart; voici le résumé
de ses principales conclusions.
Le Bénédic, évêque et comte de Cornouaille, dont il est
question dans ces actes, vivait en l'an 1022, par conséquent
le monastère de Locmaria existait un siècle avant qu'il fut
question de Saint-Sulpice de Hennes, abbaye fondée en 1112.
De plus, il fait observer que la donation <;le Budic n'est pas, à
proprement parler, la fondation du monastère de Locmaria,
mais " qne donation à un monastère déjà fondé: « toutes les
observations qu'on vient de faire, dit-il, prouvent première­
ment qu'il y avait originairement un double monastère à
Locmaria, un de religieux, gouvernés par un abbé: l'autre
de religieuses, gouvernées par une 'abbesse ; en second lieu ,
ces mêmes actes prouvent que ces monastères avaient " été
fondés et dotés par les anciens comtes de Cornou,aille, spécia­
lement par Bénédic et Alain Canhiart; on ne peut pas même
raisonnablement douter que la fondation de ces monastères
n'eùt été faite par leurs prédécesseurs puisque leurs dona-

liolls font mention d'un abbé et d'une abbesse, ct d'un monas­
tére déjà existant. l)'
Cette opinion d'un monastère existant ft Locmaria avant
la donation de Bénédic, évêque et . comte de Cornouaille,
appal'aH dans plusieurs actes du Prieuré conservés aux

archives départementales. (1) Dans une supplique au comte
de Toulouse, en 1720, la Prieure Jeanne-Thérèse Frélon de
Saint-Aubin dit que « les Pl'ieurés de Locmaria et du Qüil­
liou sont des anciennes fondations ducales faites dans les dix
et, onzième siècles; et dans un mémoire rédigé vers 1750, (2)
pour prouver que la Prieure n'est pas tenue à payer la
portion congrue au vicaire de Locmaria il est dit « quoique
annexé à Saint-Sulpice par Conan, duc de Bretagne, Ermen­
garde, sa mère, et Mathilde, son. épouse, il est constant
cependant que le Prieuré est infiniment plus ancien que
l'abbaye de Saint-Sulpice comme il se justifie par une
ancienne charte de l'évêque Raoul~ de l'an 1152, dans laquelle
cette abbaye est qualifiée DonUln regale ab antiquis Britan­
norum Ducibus, scilicet Cagnardo, Hoello, Alano, Conano
instructum, et juste confirmatum. Le ~ens littéral et naturel
de ce texte est que le monastère de Locmaria était un don
royal, c'est-à-dire une fondation faite par les Rois et ensuite
enrichie et confirmée par les Ducs de Bretag'ne Cagnard,
Boel, Alain et Conan, ce qui suppose cette fondation faite,

pour le moins, dans le neuvième siècle et avant l'an 874. »

L'auteur du mémoire de 1689 pouvait donc conclure que
Locmaria était « par sa fondation et dans son orig'ine un
monastère indépendant et qu'on ne peut sans contradiction
soulenir qu: jl soit un membre ni une obédience de l'abbave
de Saint-Sulpice, puisque ce serait supposer le membre plus
ancien que le chef et la fille plus vieille que la mère. »

. Il est encore constaté dans ce mémoire qu'aux monastères
d'hommes et de femmes, gOllvernés, l'un par un abbé, l'autre
par une abbesse, succédèrent deux prieurés, l'un d'hommes
l'autre de femmes.
' . Voici comment s'exprime l'avocat de Jeanne du Talhouët.
« On a prouvé par les actes ci-dessus induits qu'il y a eu
originairement un double monastère à Locmaria l'un de

religieux gouverné par un abbé, l'antre de religieuses gou­
verné par une abbesse. Le prieuré de Locmaria· a continué
depuis sa conventualité et a entretenu sa communauté de re­
ligieux et de religieuses, c'est-à-dire le double monastère
ct,ui avait été établi par sa fondation. La dame Jeanne de
Talhouët en produit une preuve authentique par une sentence
de Barthélémy, Archévêque de Tours, rendue en 1182 SUl'
une appellation que le Prieur et les religieux de Locmaria
avaient relevée devant lui d'une ordonnance de l'archidiacre
de Quimper-Corentin, par laquelle ils avaient été condamnés
de lui payer un droit de visite duquel ils furent déchargés
par l'Archevêque en considération de la pauvreté de la mai-

son. »

Cette sentence de 1182 fait également mention du prieur
etdes religieux de Locmaria « Reverendum priorem et fratres
de loco Mariœ et des religieuses du même monastère, monia­
les) ibidem Domino seroientes) et il distingue ces religieux
du prêtre ou curé d,e la paroisse qui ne portait pas l'habit
de leur ordre, clericw3 non habens habitum religionis
illius ibidem constitutus, lequel on déclare soumis à l'auto­
rité et à la juridiction de l'Archidiacre, »

L'auteur du mémoire cite encore plusieurs actes de 13[17,
1379, 1386, 1398, 1486, où il est question d'un Prieur et.
d'une Prieure à Locmaria avec ses religieuses, mais on ne
parle plus de l'eligieux vivant sous la conduite d'un Prieur. Il
est donc probable qu'au XIIIe siècle le monastère d'hommes

disparut et le prieur, <;omme dit le mémoire de 1750 (1L
fut un religieux Bénédictin faisant près les religieuses l'oflice
de chapelain et d'aumônier, ayant pour cela son logement
ct sa nourritUl~e, et étant amovible à la volonté de la f>rieul'e
« les prêtres séculiers qui leUl' ont succédé après le Concile
de Trente qui a achevé de réléguer les moines dans leur
monastère ont été regardés d'abord eomme de simples cha­
pelains, puis dans la suite comme vicaires perpétuels.» .
11 faudrait donc dire pour se conformer aux conclusions
du mémoire de 1689 : .
1° Que l'acte de Bened.ic, évèque et comte de Cornouaille,
1022 concernant Locmaria, est plutôt une donation faite à
un monastère déjà e~istant que la fondation primordiale du
monastère lui-même.
2° Que dès l'origine, il y eut à Locmaria double commu-

nauté d'hommes et de femmes: l'une gouvernée par un abbé:
puis par un Prieur, jusqu'au XIIIe siècle au moins. L'autre
gouvernée dans le principe par une Abbesse, puis par une
Prieure, jùsqu'en 1792.
Quant au texte de la donation, .il est plus complet que
eelui que nous a laissé Dom Morice, mais moins complet et
moins exact que celui qu'a publié sur l'original M. de
la Bordet'ie, en ce qui concel'l1e l'ortogt'aphe des noms
propres. Voici quelques-unes des difi'érences de Jecture :
En la copIe du mémoire.
En l'original.
Glumarclz[ us J.
Gle uma"h uc
Mœntudic.
lribum Matundic

Crechturnier .
Chenecturnur
Ilizoch, abbas Nisoch, abbas (2). '
Gurloen, cappellanus Hurlœou, cappellanus.
Orduthal, monacha Ordulchal, monacha .

(2) C'était vraisemblablement, dit !'auteul' du Mémoire, le successeur de
GUl'chi dénommé dans les deux premières fondations .

IO(i
Disons , eu teell1Lnant) que la place exacte qu'occupait la
croix citée dans le 1 C I' acte de la donation de Benedic, évêque
et comte de Cornouaille, est déterminée d'une manière
précise dans la supplique de Madame de Frélon, Prieure, au
comte de Toulouse, en 1720, où l'on peut lire que les comtes
de Cornouaille firent donation au Prieuré de Locmaria
«( d'une portion de ]a montagne de Cuchi, à présent Frugy,
jusqu'à une croix qui était autrefo :s au pied de la dite mon­
tagne et dans la place de laquelle croix l'on a, depuis les
deux siècles derniers, fait bâtir une chapelle, moitié' de
laquelle est située dans la paroisse de la rue Neuve et l'autre
moitié en celle du dit Locmaria. en vertu de la dite fon-

dation. ))
PEYRON, pnÈTnE,