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Bulletin SAF 1890


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Pierres à empreintes et pierres à bassins

Abbé Abgrall

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LES PIERRES A EMPREINTES - Lg~ PIERRES A BASSINS
ET LA TlIADITrON POP-CI.Alnr. .

La Société archéologique du Finistère ayant demandé dans
son questionnaire que l'on signaltlt les pierres à empreintes
connues dons notre pays, j'ai cru qu'il était bOT} de faire la
nomenclature de celles dont j'ai connaissance et d'indiquer,
par la même occasion, d'autres roches ou monuments. aux­
quels se rattache quelque récit légendaire .
Tout objet qui sort de l'ordinaire, et offre un caractère
tant soit peu étrange, frappe l'imagination du peuple et
. devient facilement le sujet d'une légende. Dans cette caté­
gorie, il faut placer les pierres à empreintes et les pierres
à bassins. Les histoires qui s'y rattachent seront racontées
longtemps encore après nous .; mais il est bon cependant de
les consigner, de peur que quelques-unes ne périssent.
PIEHHES A EMPREINTES.
1. - Plougou:lm. - Griffes du Diable.
Sur le versant du coteau qui fait face au moulin de Kerhoant,
à droite de la J'oute de Saint-Pol à Plougoulm, est une pierre
qui porte l'empreinte des griffes du diable. On y voit en effet
dix petits trous parfaitement marqués, absolument comme
si des doigts crochus s'y étaient enfoncés. Voici la légende:
« Le diable vint à Cléder pour voil' les œuvres qu'y opérait
saint Ké. Quand il y fut arrivé, J vit au loin se dresser vers
le ciel le clocher du Creis,-[(er. Cette vue l'irrita; et il saisit
une roche pour la lancer contre cette flèche si Lelle qui pu-

bliait au loin la gloire de Notre-Dame. Mais.la Sainte­
Viero'e arrêta la pierre à mi-chemin et elle tomba dans la
toujours la trace des griffes qui l'avait saisie. » • . •
Aut.ant que j'ai pu en juger, cette pierre est un petit menhir
avec cupules, comme il en existe un certain nombre ,dans le
sommet dit coteau, on trouve les vestiges d'un village gauloIs,
avec. foyers, dépôts de cendl'es et fl'agments de poteries.
C'est là, peut-être, qu'ont demeUl'é ceux qui ont dressé ce ,
menhir et. cl'eusé ces cupules.
Il. Trégune. Pied du Diable. .
Au bord de la route de Trégunc à la chapelle de Saint­
philibert est une gl'ande pierre plate, où l'on voit en creux
la tl'ace du pied du Diable.
- Pied du eheval du roi Grallon.
lU. - Pouldavid .

Les gamins qui vont barboter dans la yase qui forme le
l'anse de Pouldavid prétendent tous y avoir YU une
fond de
pierre portant la tl'ace du cheval du roi GraHon. C'est là, en
effet, selon la légende, que passa ce prince en fuyant devant
les flots qui submergeaient la ville d'Is; c'est là qu'il pré-
cipita sa fille qui le suivait en croupe et que s'arrêtèrent les '
vagues après l'avoir eng'loutie; d'où est resté son nom à

cette localité: Poul-Dahut, trou de Dahut ou Ahès.
IV. - Le Faouët. - Botte de saint Miehel.
Environ à mi-côte du chemin pavé et escarpé qui monte
au plateau élevé derriète lequel est bâtie la curieuse chapelle
de Sainte-Barbe, on m'a montré une pierr,e, d'environ un
pied carré, présentant uue empreinte où les gens du p~ys
reconnaissent la trace de la botte de l'archange saint Michel.
pour l'admettre; mais saint
Il faut avoir beaucoup de foi
N{ichel a sa petito chapelle à côté de celle de sainte Barbe, .

et il était bon que quelque chose allnon~'ât sa présence avant
d'al'f'lVer a son oratoIre.
V. - PlouJean. - Pied de la Duche.sse Anne.
Presque en face du château de Traoll-Feunteuniou, du
côté ouest de la route qui ya de Morlaix à Plougasnou et à
Saint-Jean-du-Doigt, est une croix en pierre très simple,
montée sur deux ou tro's degrés d'ardoisine ou de mica­
schiste. On m'avait souvent raconté que sur rune des pierres
de ces degrés se trouvait l'empreinte du pied de la Duchêsse
Anne. J'avais passé plus de trente fois par ce chemin sans
avoir jamais eu la cnriosité de m'arrêter pour m'assurer du
fait. La dernière fois que j'y passai, en août 1881, j'étais en
tournée d'exploration avec mon ami, M. Paul du Chàtellier.
Nous descendîmes tous deux de voiture pour faire la cons­
tatation, et nous pûmes reconnaître la trace d'une chaussure
assez profondément enfoncée dans la pierre.
Voici dans quelles cirsonstances le fait s'est produit,

d'après les traditions locales:
En 1506, la Reine Anne vint, par permission de L01.).is XII
son époux, faire un voyage en son pays. Après avoir passé
par l~s principales villes de la Basse-Bretagne, elle vint à

Morlaix, et comme elle soufIrait d'une fluxion à l'œil gauche,
elle désira qu'on lui apportât la relique du doigt de saint
Jean pour l'appliquer sur l'œil malade. Le clergé des pa­
roisses voisines se réunit donc à cet efIet, et la relique pré­
cieuse fut posée sur un brancard, pour être portée proces­
sionnellement jusqu~à Morlaix. Mais à peine était-on sorti
dans le cimetière, que le brancard se brisa et que la relique
disparut. On rentra à l'église, et ce ne fut qu'après avoir .
récité plusieurs prières et suffrages qu'on la retrouva dans
l'armoire où elle était habituellement renfermée. Après un
pareil prodige, on n'osa pas tenter de nouveau l'entreprise,
et on alla rendre compte du fait à la Reine qui demanda

pas à lui, mais bien à elle de se déplacer. Elle voulait faIre
voyage à pied; mais, cédant ù l'importunité de ses gens,
elle consentit à aller en litière pendant une partie de la route.
Arrivée au milieu de la Lande, appelée Lann-Festour, elle

mit pied à terre, et le pied qu'elle posa sur une pIerre s y
ImprIma.
cet endroit, on éleva une croix qu'on appela Croas-ar-

Rouanes, cl'oix de la Heine, et la pierre qui avait reçu l'em-
preinte de son pied y fut placée et s'y conserve encore.
La tradition dit aussi qu'elle demanda comment s'appelait
le maître du terrain sur lequel elle s'arrêta, et quand on lui
eût répondu qu'il s'appelait de la Lande, elle reprit: de la
Lande, salut! Est-ce là l'origine du nom de la famille de
Lansalut? (1)
VI. . Plounéoez: . Lanhouarneau .

Près de la route de Plounévez à Cléder existe une chapelle •
Sainte-Brigitte, et dans la rivière qui coule près de cette
est une gl'osse pierre émergeant de l'eau et sur
chapelle
laquelle la sainte aurait posé le pied, y laissant la trace que
l'on voit encore.
tradition pour saint Hèrvé : on voit la trace de ses
Même
pas sur une pierre, au bord de la route de Lanhouarneau à
Plougar, près du village de Guernévez.
VII. Croix de saint Derrien.
Sur le bord du chemin de Landivisiau à Lesneven, presque
en face du bourg de Saint-Derrien, se trouve d'un côté nné
croix en granit renversée, de l'autre le pie~ de cette croix,
0 m. 35 et long de 1 m. 50. SUI'une des faces
épais d'environ
de cette pierre on voit deux sillons transversaux, profonds
(1) Si cette famille y tient, elle n'est pas difficile: la vérité est qu'elle
remonte à 1438. (Voir l'article Le Gac, dans M. Pol de Courcy.)
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINIST1~RE. TOME XVII. (Mémoires)~ 5

de trois ou quatre centimètres. C'est saint Derrien qui a
porté là cette lourde pierre, et la corde dont il s'est servi
pour la charger sur son dos s'y est enfoncée et ya laissé sa
trace Imprllnee.
trompe fort si cette pierre n'est pas une ancienne
Je me
borne militaire, qu'on aurait retaillée pour en faire ulle gaule
de croix. Le long de cette belle voie romaine qui va de
. Carhaix à Plouguerneau, plusieurs pierres militaires ont dû
disparaître ainsi.
VIII. ' Notre-Dame des Fontaines, à Gouézec.
Près de la chapelle de N:-D. des Fontaines: sur le bord de
la route de Quimper à Pleyben, existent deux ou trois sources
abondantes et un petit ruisseau. Un jour un pauvre homme
chargé de famille vit sa femme donner le jour à tro' s jumeaux.
Désespéré, et. ne sachant comment gagner du pain pour tant
d'enfants, il met les trois jumeaux dans un panier et se dirige
vers la chapelle des Fontaines pour les noyer. Arrivé là, il
dépose le panier sur une pierre pendant qu'il cherche l'en­
droit le plus favorable pour les faire disparaître. Mais voilà
que lui apparaît ulle belle dame qui lui reproche sa cruauté
et qui lui dit de s'en retourner avec ses enfants, l'assUl'ant

qu'il ne manquera jamais de pain pour les nourrir. Depuis
ce temps la marque du panier est restée gravée sur la pierre .
IX. Pierre de sainte Nonne, à Dirinon.
A un kilomètre au sud du bourg de Dirinon, au milieu
d'un vieux chemin presque abandonné, se trouve. un petit
, rocher que les habitan ts du pays ont en grand respect et en
grande vénération. C'est là que sainte Nonne, patronne de
la paroisse, rugiti ve et sans asile, mit au monde son fils
saint Divy ou David. Au bas de la pierre on voit les traces
des genoux de la Mère, et au haut le creux dans lequel elle
enfant; car le rocher s'amollit comme de la cire
déposa son

our servit· de berceau au nouveau-né. Comme l'eau manquait
elle vit, jaillir une belle source ou elle baptIsa son fils, qm
de\'ait devenir plus tard un grand saint.
C'est la fontaine qui se voit à quinze ou vingt pas plus
haut que cette pierre et qUl port.e toujours le nom de fontaine
de Sainte-Xonne. (1)

PU~HHES A BASSINS
Cel'laines roches présentent à leur surface supérieure des
creux ou bassins de formes bizarres, dbnt quelques-uns sont
de formation naturelle et d'autres proviennerit de la décom­
position lente opérée par les éléments, l'eau, l'air, la gelée.
L'imagination populaire s'en est emparée aussi, et n'a pas
manqué d'y rattacher des légendes.
J. Lit de saint Pol, à Lampaul-Guimilia~t.
Sur le bord du vieux chemin qui conduit du bourg' de
Lampaul au village de Kerviliner, à l'entrée des garennes
de Br'ézal, s 'élève un rocher de quartzite excessivement dur,
au sommet duquel existe un ~reux qui présente à peu près
la configuration d'un corps humain.
C'est là. que saint Pol (saint Pol-de-Léon, je suppose)
aurait fait quelque temps un ermitage, et c'est le creux du
rocher qui lui servait de lit. Pour le démontrer, les enfants
qui passent par cet endroit ne manquent jamais de l'escalader
et de s'y coucher, en faisant remar,quer que la tête, les
épaules, le corps, les jambes et les pieds y trouvent parfai­
t:ement leurs places .

(1) Cf. La vie cie sainte Nonne, mystère brelon du xv" siècle, traduit
M. Le Goniclec (183i), rééc\ilée pOar M. E. Ernault, Revue cettique,
par
lome Vll. juillet 1887, p. 266.

il. - Moëlan. -- Rockers du Guilly .
Au sommet du coteau qui fait face à l'anse du Guilly se
trouve aussi un rocher qui a servi d'ermitage à un ancien:
cénobite, comme le prouve le creux qù'on voit dans cette
pierre et qui n'est autre chose que la chaisè où ce hon
ermite venait s'asseoir.
III. Lit et chaise de saù-"t Ronan.
« Non loin de la ville de Saint-Renan, dit Fréminville,
nous arrivâmes au bord d'u~e petite rivière, près d'un moulin
à eau, nommé le .moulin de Chanan ; là, sur une roche plate
que baigne la rivière, on nous montra la prétendue empreinte
de saint Renan; c'est une excavation effectivement de gran­
deur d'homme ·et ayant absolument la forme du creux d'un
sarcophage, avec l'emplacement de la tête bien marqué. » (1)
Au haut de la montagne de Locronan, sur le' parcours de
la procession de la Troménie: retournant de Plas-ar-C'horn
à l'église paroissiale, se trouve le rocher nommé dans le
pays al' Gazee-ven, et sur lequel s'asseyait saint Ronan pour
contempler ce pays immense et l'horizon magnifique qU'OIl
découvre de cet endroit. Les pèlerins de la Troménie ne
manquent jamais de faire trois fois le tour de ce rocher. .
IV. Chaise de Michel Le Nobletz, à Saint-1W.ichel-cle-
Plouguerneau.
Près de l'endroit désert où Michel Le Nobletz se retira
pendant un an dans la solitude, pour se préparer à sa vie de
(f) Un monument de ce genre existe dans les Côtes-du-Nord, à Kerroc'hou,
commune de Maël-Pestivien. M. Henri Martin le décrit ainsi dans une
lettre du 4 septembre 180;'): « C'est un bloc naturel, mais la figure creusée
en travers de ce bloc ne peut être un jeu de la nature. J'ai pris la mesure
du lit de 1lie1Te avec mon corps: il avait l'air fait pour moi. La tête est
un rond très creux: la gaîne des jambes est profonde aussi. La partie
destinée aux épaules et au torse est moins creusée, mais très sutlisamment. »
L'auteur décrit ce monument avec encore plus de précision dans son livre
intitulé: Études d'archéologie celtique (1812), p. 206.

missionnaire, OH construisit une chapelle à son patron , l'ar­
change saint Michel. Non loin de cette chapelle se dresse
sur le bord de la mer un rocher immense, aux flancs escarpés.
c.'~st là que montait le jeune solitaire pour m,éditer en face
du vaste océan; et vous pouvez vous asseoir encore dans le
pierre qui lui servait, il y a près de deux cents
fauteuil en
ans.

Ne sel'ait-ce pas ici l'occasion de parler de certains autres
objets auxquels se rattachent aussi quelques croyances ou
pratiques, soit pieuses, soit superstitieuses?
Dolmen de saint Théodore, en Primelin.
Tout près de la chapelle de saint Théodore, en Primelin ,
, se trouve un petit dolmen qu'on aperçoit de la route qui
mène à la pointe du Raz. La table, de pl 90 de longueur, est
soutenue à ses extrémités par deux supports de om 53 de
hauteur, et en dessous existe une tombe de llll 30 de lon­
g·ueur, Olll 40 de largeur et Olll 70 de profondeur.
Les gens du Cap attribuent à cette sépulture ancienne des
vertus miraculeuses, et le jour du pardon une foule de fié­
vreux viennent s'y coucher, paul' y êtt'e g'uéris de leur mal. .
Trézélidé.
A Trézélidé, près d'lm petit oratoire rustique élevé en
l'honneur de saint Kéran, il y a aussi dans le sol une petite
cavité où l'on vient s'étendre pour être guéri de différents
maux.
Landeleau. - Lit de saint Théleau .
A Landeleau, à 4 ou 5 mètres de la façade ouest de l'église
paroissiale, existait un petit oratoire qui q été détruit il y a
peu d'années , et dont les murs, présentant quelques appareils
. en arète de poiss0!1, semblaient dater de l'époque romaine.
Cet oratoire portait le nom d'Ermitage de saint Théleau .

Sous l'autel en bOlS on remarquait un sarcophage en pierre,
dont la partie creuse, en comprenant la logette pour la tête,
mesure 2, mètres de louglrellr, o III 50 de largeur aux épaules
et om 38 aux p~eds. Ce sarcophage, qui est maintenant. trans- .
porté dans l'église paroissiale, est désigné sous le nom de lit
de saint Théleau. Saint Yves, de passage dans co pays, s'y
est couché toute une nuit par dévotion et par mortification.
Bateau de saint Gonogan) à Beuzec-Gap-Sizun.
A un kilomètre au nord du village de Lescogan, qui doit
son nom à une chapelle dédiée à saint Conogan, se trouve
une roche isolée, longue de 8 mètees , afTeclant la forme d'un
bateau, complètement détachée du sol et ne reposant que par
quelques points sur une piel'l'o plate, comme un navire en
construction sur son chantier. C'est le bateau sur. lequel
saint Conogan aurÇ ~-t traversé la mer .
Ce qui complète t'illusion, c'est que , à quelques pas de là,
se voit une autre pierre plus petite, ayant la même forme et
qui semble avoir dû servir de chaloupe à ce navire.
Bateau de saint Viol en Tréguermec.
Ici, ce n'est plus un bateau entier que l'on peut voir, mais
seulement une moitié. Car le rocher sur lequel saint Vio, ou
Vouguay, archevêque d'Armach, fit la traversée d'Irlande
au pays de Penmarc'h, se brisa en deux lorsque le saint
débarqua. Une partie retourna en Irlande, et l'autre resta
dans ce pays. L'on y voit l'empreinte de la tête du saint
prélat, et tout auprès on construisit une chapolle en son
honneur.
. La noce de pierre) à Braspartz.
Non loin de la route qui passe au pied du mont Saint­
Michel, sur le bord ~u grand marais qu'on appelle Yun-Elé)
on aperçoit un alignement formé d'une vingtaine de petits .
menhirs, et auquel on donne le nom de Eurecl- Ven, « noce de

lierre. )) Ce SOllt de~ geus se rendant à ulle noce qUL ont ete
1 . l' l' , . 1'1 cl
)étl'jl1és et qUl sont restés l epllls a 19ues et ImmO)1 es ans
1 . 'f"d 'ù' ,.
cel. enùroit SI 1'01 et SI eser~.
~1. Sauvé, ancien receveur des douanes, a raconté aussi,
dalls la Revue des traditions populaires, l'origine d'un
cl'omlec'h aux. environs de Kerlouan. C'était des gens reve-
Ilant un soir d'un repas de noces, fort animés par la boisson
(\t, la bonne chère, chantant et dansant le long dù t.rajet.
Yoilà qu'ils entendellt le son d'une clcièhette ct qu'ils voient
un pl'Nrc aeeompagné de son eufant de ehœnt', portant le
saint viat.ique Ù lUI malade. Au lieu de se mettl'e à genoux
pour aOOl'et' leul' Sauveur, qui passait, ils se prirent à chanter
avec plus d'at'deul' et. à danser une ronde impie autoul' du
pl'êt1'8. Tout-à-conp leur chant cessa et leur.danse s'arrêta;
ils étaient tous changés en pierres, et ils restent là rangés
CIL cerde, pOllr l'exemple de ceux qui voudeaient les imiter.
La tombe du géant, à Brennilis (com.7111tne de Loqueffret).
C'est un dolmen qui pOI'te Cil breton le nom de Bez-Guevrel
el qu'on appelle eu ft'ançais tombe de Gargantua (?) CeUe
~épulture a des dimensions tl'ès considéi'ables, mais le géant
était si gl.'and, qu'il a fallu le plier en neuf pour l'y renfermer . .
Pont et marteau du diable, à Lannilis.
Sur IR rivière de L'Aber-Vrac'h, à 2 kilomètres en aval
du moulin du Diouri~, existe un pont 9u plutôt un gué
romain ou gaulois, formé de très gros qnart.iers de roches et
de dalles de dimensions cyclopéennes. Nécessairement
. l'imagination du peuple y a vu l'œuvre d'une puissance
surhumaine ot en a fait le pont du diable, absolument comme
pour le pont de Saint-Cadoc: SUl' la rivièro d'Etel, en y
mettant 10 même marché ou la même condition, d'avoir ·à lui
le premier être qui passerait sur ce pont.

Pour tailler et mettre en place de si gros blocs, il fallait

un bien grand marteau. On le voit maintenant à quelque
distance de là, sur le bord de la grand'route, auprès de la
maison du cantonnier, parmi les hautes touffes de sureau qui
bordent son petit jardinet. Lediable, furieux de n'avoir eu pour
prix de son travail que l'âme d'un ch~t qu'on lança sur le
pont quand il fut terminé, jeta au loin son marteau, qui vint
se ficher, en terre à l'endroit où il est resté depuis. Cest une '
croix en granit dont un des croisillons a disparu, ainsi que
l'extrémité supérieure; et jamais un paysan, qui salue avec
tant de respect les autres croix, ne se signera devant celle­
car c'est le marteau du diable.
gué, appelé Pont-CracJh, a un caractère b' en ancien,
et je n'ai vu nulle part dans le pays de travail analogue . .le
suis porté à croire qu'une voie romaine y aboutissait. C'est .
par là qu'a passé saint Pol-Aurélien lorsqu'il se rendit de
Lampaul-Ploudal 'zeau à Plouguerneau ou au Grouanec,
plebs lapidea. Tout près de ce pont, sur le terrain de Plou­
guerneau, se trouve le village de Prat-Pol, avec une chapelle
et une croix qui portent aussi son nom. Le saint y fit jaillir
trois sources, dont deux sont encore' visibles, et dont la
troisième a disparu.
,le termine ainsi, sur un' point historique, cette excursion
un peu longue sur le terrain des légendes.
AB nÉ ABGHALL,
Aum6niep de lJHo:~piee de Quimper.