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Bulletin SAF 1888


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Un sceau de l’ordre hospitalier de saint Antoine

M. Faty

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Voilà la légende qui m'a été racontée, samed i dernier, par
un habitant de Cléden-Cap-Sizun .
Voici le fait qui lui a donné naissance.
Il y a deux ans, une bouée sll rmontée d'un signal de brume
avait rompu sa chaîne et flottait, en épave, dans le Raz-de­
Sein. Drossée par le courant, elle dût entrer dans la baie de
Douarnenez et être prise par le retollr du flot, qui se fait dans
ces parages, à trois heures de montée. La conqne du signal cie
brume, fonctionnant par intel'valle, etait la voix de la Sicène,
et les fucus attachés à l'épave représentaient sa chevelure.
Cette explication n'a pas satisfait mon interlocuteur. Lui et
bea1lcoup d'autres croiront encore longtemp3, dans le Cap, à
l'apparition de la Sirène.
Et c'est ainsi que se forment, souvent, les légendes . Si tout
ceci ne démontre pas l'existence réelle des Sirènes, il prouve
du moins qu'on y croit, à la pointe du Raz-de-Sein et dans
tout le Cap-Sizun.
LE CARGUET.
Au(lierne. le '28 Mars 1888.
Il C>9 Q

UN SCEAU
DE L'ORDRE HOSPITALIER DE SAINT-ANTOINE.

Avant de nous occuper du sceau que nous présentons à
l'examen de notre Société, nous croyons intéressant de donner
quelques renseignements sur l'origine de l'Ordre hospitalier de
Saint-Antoine, sous la règle de Saint-Augllstin.
Josselin Oll Gozzelin, un seigneur du Dauphiné, en revenant
d'un pélerinage, apporta de Constantinople les reliques de

Saint-Antoine, instituteur de la vie monastique, qui naquit
l'an 251 en Egypte et mourut le 17 jan viel' 356, âgé de 105 ans.
Josselin les déposa dans la cbapellede son château de l'Albène,
où elles furen t honorées, pendant plus de deux cents ans. Un
de ses successeurs, d'autres disent Gaston, gen tilhomme
Dauphinois, les transporta à la Mothe-aux-Bois, qui prit le nom
.de Saint-Antoine-el>Viennois. A cetterpoque, sous le pontifi cat
li' U l'bain II, régnait .une terl'i ble épidém ie, qu'on appela i t alors
le mal sacré, ou des ardpnts, ou le feu de Saint.-Antoine, dont
l'i n tercession {tai tin voq 1 iee clans ces clou 101lreu~es ci l'constances.
Les malades qui visitaient le tombrau du Saint occupaien t
continu el lemen t, dans !m déplorable abando n, les en virons de
l'église; Gaston et plusieurs genti lshommes voisins en furent
vivement touches, En 1095, ils s'en tendirent pour fonder un
. hÔpital, se dévouèrent au ~erv ice des pauvres et formèrent un
institut, avec l'ap probation du pape Urbain Il.
Ge qui n'étaitqn'un hôpital, à son origine, devint une célèbre
abbaye, cbef c!'ordre._ Les religieux portaient su r leurs babits,
qui étaient ceux des prêtres séculiers, la figure de la lettre T
de couleur bleue. Cet ordre a possédé, dans tout le monde
chrétien, plus de quarante commanderies générales, et -sous
celles-ci, un grand nombre de commanderies particulières.
L'abbé de Saint-Antoine nom mait de plein droit aux comman­
deries généra les, et les commandeurs généraux, aux-comma!1-
deries particu lières qui dépendaient d'eux, Cet institut religieux
fut supprimé en 1790, à la Révolution. A celte époque, il avait
bien perdu de son ancienne splendeur, et le nombre de ses
sons était considérab lemen t dimiminué.
mai
Maintenant, procédons à l'examen de ce sceau, qui est
certainement digne de nous intéresser. Il est d'une formé ovale,
dont les deux extrêmités se terminent en pointe; il mesure
65 millimètres de hauteur sur 40 de largeur. Saint Ant0ine,
qui occupe le milieu du champ, est nim bé, vêtu d'un manteau et
d'une longue tunique, laq neUe est bordée à sa base d'un cercle

de flammes ardentes, attribut qui se remarque dans toutes ses
représentations; de la main gauche, il tient lm livre, sur sa
sur un bâton; une clochette
poitrine, et de la droite, il s'appuie
attachée à son poignet est suspen'due le long de son bâton. De
ce côté, on distingue la tête de son cochon, qui est couché
derrière lui. Le Saint est accosté de deux enfants agenouillés,
tenant un cierge et en adoration devant lui. A la hautenr de
on voit deux tau, auxquels soni suspendus un bras,
sa tête,
SOU8 celui de droite, et urie jambe, sous celui de gauche, objets .
qui rappellent les fonctions hospitalières de l'ordre. A la pointe,
ou extrémité inférieure du sceau, on remarque une quintefeuille
placée entre deux palmes; à l'extrémité opposée, un arc, de
forme très gracieuse, avec ornements gothiques, encadre la tête
du Saint; au-dessus, un tau placé entre le commencement et

la fin de la légende.
Au nombre des détails que nous venons de décrire, nous
avons signalé deux tau; à ce sujet nous croyons devoir
une explication, attend u que cette pièce héraldique ne
donner
se rencontre, pour ainsi dire, que dans les armoiries de l'Ordre
de Saint-Antoine. Le tau, en terme de blason, est figuré par
un grand T, c'est-à-dire une espèce 'de croix potencée dont on
a retranché la partie qui est au-dessus de la traverse ; l'epré-

sen té avec des émaux, il est toujours d'azur élU de couleur bleue.
quelques-uns, est tirée de l'apocalypse, où
Son origine, selon
elle est une marque que l'ange imprime sur le front des pré­
destinés; d'autres ont cru que c'était un béquille ou potence
d'estropié, qui était convenable à cet ordre, parce qu'il était

hospitalier. .
Quant au bras et à la jambe suspendus au-dessous des deux
tau, ils rappellent les effroyables souffrances dts malheureux
qui succombaient après la perte de ces membres, que cette
en cendres.
terrible maladie calcinait et réduisait pour ainsi dire
La légende de ce sceau se déchiffre facilement; ses caractères
magnifiques et bien conservés, qui paraissent remonter à la

fin du XIV· siècle ou au commencement du XV·, se lisent

amsI;
Si: gillu m : indulgencia (rum) sancti an thonii ; v·iennensis.
Sceau des indulgences de Saint-Antoine-en-Viennois.
Ce qu'il y a de singulier dans cette légende, c'est' que le
Si[}illum se trouve divisé en deux parties, et que la
mot
deux dernières pal' deux
première syllabe est séparée des
ous n'avons pas encore
points, c'est une particularité que n
ntrée.
renco
Ce curieux objet est. en cuivre; il devait se fixer dans un
manche de bois et y être maintenu, au moyen d'une forte
goupille. Sa provenance est inconnue, ayant été trouvé par
un maçon, qui est mort, il y a deux ou trois ans, la seule
personne qui aurait pu nous donner quelques renseignements .
Aussi, nous est-il impossible de déterminer à quelle com-
manderie il a appartenu, de préciser son usage et dans quelle
au plus pourrions-nous supposer qu'il
circonstance; tout
qu'on accordait aux personnes qui
scellait les indulgences
allaient en pélerinage, pour obtenir de saint Antoine la
préservation du fléau; dans ce cas, il semblerait indiquer la
mai::son, chef d'ordre, de,Saint-Antoine:-en-Viennois; s'il eh
doublemellt précieux.
était ainsi, il serait
Mais il est probable que plusieurs commanderies de cet
ordre avaient un sceau identique à celui que nous examinons.
Nous laissons le soin à. nos confrères, plus compétents que
nous en ces matières, de nous fixer sur ce point important.
un hôpital
Nous ajouterons que Quimper a possédé autrefois
sous le vocable de saint Antoine, abbé et ermite en Egypte.
On suppose, sans pouvoir l'affirmer, qu'il faisait partie des
quatre hôpitaux que l'évêque Bertrand de Rosmadec désigne,
aux rentes de l'aumônerie
en 1431, comme devant participer
venait d'instituer. Mais cet établissement ne relevait
qu'il
d'aucun institut religieux; il était de fondation l;iÏque, et fut
toujours administré par la commmunauté de ville. C'est en

- 1594, pour la première fois, qll'il en est fail mention; à cetle
époque, il élail très pauvre, et ne recevant que cinq ou six
malades au plu s, il fut obligé de reco urÎl' à l'hôpital Sainte­
Catberi ne, qui, dans cemomen t de détresse, 1 ui don na 150 li vres,
à ses dépenses les plu s urgentes: Ju sq u'à pl'ésent
pour subvenir
nous n'avons trouvé aucun document antérieur à cette rlernière
date; ainsi, il serait donc téméraire, sans autres preu ves,
hôpital Saint-Antoine.
d'attribuer ce sceau à l'ancien
Nous croyons que cet ordre hospitalier est auj ourd'hui
complètement éteint; mais son patron reste l'a longtemps un
es enfants qui vonl yoi!',
joyeux souvenir, dans la mémoire d
dans nos spectacles forains; cel te singulière comed ie, nom mée
la Tentation de saint Antoine, représental;tt les tribulatiolls
vie monastique el son étrange
éprouvées par l'instituteur de la
compagnon, un magnifique cochon. Nous-même, nous ne
pouvons nous empêcher de sou rire, en songeant à ces joyecsetés
que nous avons applaudies, dans notre enfance, et SU!'tOllt à
cette supplicat.ion qu e saint Antoine adressait aux démons:
Hendez-moi mon cochon, s'il vous plait,
Ah ! Messieurs daignez me le rel1dl'e ;
si beau, il e&t si bien fait,
Il est
Son cœur est si bon et si lendl'e.
J acq ues Callot, peintre, dessina t.eu r et gra veu r de prew ier
ordre, né à Nancy en 1593, mort en 1635, âgé de 42 ans, a
reproduit avec' son ineomparable burin eette fameuse scène de
la Tentation de saint Antoine; c'est une œu vre capitale, la
plus importante de toutes ses pl'Odllctions, qui s'élèvent au-delà
de 1,600 pièces. Cetle magn i fiq!Je représentation, qu e nous
sufllrait, à elle seule, pour populariser la
connaissons tous,
nt ermite. .
mémoire du sai
L'histoire ne nous a pas tran smis le nom du fidèle com pagnon
aint Antoin e, ainsi quo la date de sa mort; tout ce qu'on
de s
peut en dire, c'est que sa mémoire a été longtemps entourAe
d'une certaine bienveillauce, qui s'est reportée sur ses nombreux ,

descendants, élevés d'lns les cemmanderies de l'Ordre. Ainsi,
le 17 janvier, jour de la fête de saint Antoine, on leur a~cordait
un grand congé; ils parcouraient les ru es de la ville,
s'arrêtaient devant r.haque maison, pour y recueillir une
offrande, qui était absorbée sur-le-champ. C'est dans le Midi,
particulièrement dans le Dauphiné, à Saint-Antoine-en­
Viennois, à Montpellier, etc., que se faisait c.ette sorte de quête,
dont le sou venir est rappelé par ce proverbe: « 11 va de porte
en porte, comme les cochons de saint Antoine
», en parlan t
d'un pal'asite qui cherche de bons dîners .
FATY.
23 mars \888.
CE QUI RESTE
DES ANCIENS NECROLOGES DU COUVENT DE SAINT-FRANÇOIS,
DE QUIMPER.
Il Y a quatre ans, j'ai rendllcompte à la Société archéolo­
gique de deux fragments des anciens Nécrologes du couvent .
de Saint-François de Quimper (1) .
aucoup le plus important, m'était obli­
Le premier, de be
geamment communiqué par M. le baron de Courcy. « Il
provient, me dit son savant possesseur, des manuscrits du
P. Augustin du Paz, acquis en 1631 par Pierre de Lannion,
bal'On du Vieux-Cbastel et seigneur. de Quinipily, gouverneur
des 'villes de Vannes et Auray. » Cet extrait. comprend 153
actes: deux du XIIi" siècle, les autres des XIVe et XV· siècles
et de la première moitié du XVl" siècle .
Bulletin de 1884,2' partie, p. 1.
(1) Voir