Avertissement : ce texte provient d'une reconnaissance optique de caractères (OCR). Il n'y a pas de mise en page et les erreurs de reconnaissance sont fréquentes
XVII
FRAIS DE RÉCEPTION D'UN PROCUREUR FISCAL DE LA JURI
DICTION DES REGUAIRES DE SAINT-BRIEUC, EN LA GRAND'
CHAMBRE DU PARLEMENT DE BRETAGNE.
La pièce dont je vais avoir l'honneur d'entretenir nos
il semble, de nature à éveiller la curiosité, car
confrères est,
jusqu'ici je n'ai rien rencontré d'analogue. C'est une note,
une vèritable facture d'épicier. .
prime abord on est porté à se demander quel intérêt
peut avoir un pareil document. La publication a paru ce
pendant intéressante à deux points de vue; d'abord, à cause
de son ancienneté. Il y aura bientôt cent soixante-six ans qu'il
a été ècrit. En second lieu, parce qu'il rappelle un usage
aujourd'hui totalement disparu de nos mœurs. Cette pièce est
la note du sucre vendu, par P. Denis, marchand-épicier,
près de l'Écu de France, à Rennes, pour être offert à titre
d'épices à MM. les Membres de la Grand' Chambre du Par
lement de Bretagne, par Me René Du Bois, sieur de Saint
.Renan, à l'occasion de sa réception en la charge de Procu
reur fiscal de la juridiction des Reguaires de Saint-Brieuc .
On appelait au trefois « Epices », le droit alloué aux juges
dans les procès par écrit, parce que ce droit consistaiLdans
l'origine, en véritables épices, c'est-à-dire en sucre, en con
et de dragées. - « Aimer
fitures, en boîtes de fruits confits
épices » ou le pain d'épice, se disait en plaisantant des
les
ges peu délicats qui recevaient volontiers l'argent des
plaideurs.
Il était également d'usage, lorsqu'un officier d'une cour
inférieure se présentait pour sa réception devant la Co'ur
souveraine, de faire un présent à MM. de la Grand' Chambre,
en leur offrant des épices ou des friandises.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE . T. XIV (Mémoires). 23
C'est ainsi que cela se passa le 18 décembre 1721.
Mais qu'est-ce que c'était qu'un Procureur fiscal? Le
ProcureUl' fiscal prés la cour des Reguairel> remplis
sait les fonctions qu'occupe actuellement le minis
tère public dans nos tribunaux. Les fonctions de cet
officier de judicature étaient cependant plus étendues
que celles d'un peocureur de nos joues, car en dehors de
ses fonctions judiciaires proprement dites, il avait a
veiller à la police de la ville, dans l'étendue du fief de
l'évêque; cela exista à Quimper, jusqu'au moment où les
juges royaux enlevérent ce droit aux juges des Reguaires.
Mais ils conseevérent cette préeogative à Saint-Brieuc.
De plus, en tant que juges féodaux, ils appelaient les
vassaux à faire aveu des domaines qui relevaient de
l'évêque. Les peéeogatives de la justice temporelle des
évêques au Moyen-Age surpassaient beaucoup celle des
barons; car, elle était une éclipse de la souveraine,
appelée pOUl: cette raison : RÉGALE (1), d'où est venu le
mot de justice temporelle ou juridiction des Régales Ou
Reguaires. Ce tribunal, composé d'un sénéchal, d'un alloué
ou lieutenant, d'un procureur fiscal et de son substitut, de
sergents, de notaires, tabellions, gardes-notes, enfin d'un
g reffier.
La juridiction des Reguaires ressortissait directement
au Parlement de la Province, et c'est évidemment à ce titre
que les magistrats des Reguaires, bien qu'officiers de jus
tice seigneul'iale, étaient reçus en Grand' Chambre du Par
lement, absolument comme les premi~rs officiel's des Pré
sidiaux royaux et de l'Amirauté.
Maintenant, voici ce document qu'il a paru utile de faire
précéder de ces quelques explications .
(i) Le mot Reguaires vient du mot latin : Regalia prœdia ecclesiis
ab regibus alias concessa, dit DU CANGE •
Rennes 1721. Monsieul' Du Bois, procureur fiscal des
l'eguel'res de St Brieux doibt à P. Denis, m épic , près ·de
l'écu de Fl'ance pOUl' 190 liv. de beau sucre en pain ordi
naire à 100 1. le % et 40 1. de SUCl'e royal à 175 1. le 0/0, le
tout pl'ix fait pOUl' sa réception en sa charge devant Mes
sieurs de Grand' Chambre du Parlement de ce payes et
autres Mr. le 15 et 16 décembre 1721. -
Monsieur le pl'emier Président (1). 20 1. royal sucre .
Monsieur le Président de Cucé (2) _ . . . . . . 20 1.
Monsieur le Président de Robien (3). . . . . . 201.
Monsieur de Perchambault (4) doyen. . . . . . 20 1.
Monsieur de la Niuet (5), sous doyen de la Cour, sucre
royal
Monsieur de Nyau (6), commissail'e. . . . .. . 201.
de Montebert (7), commissail'e. . . . '201.
rvfonsieul'
Monsieur du Pont-Doville (8). . . . . . . . . 201.
Monsieur \e ProcUl'eur général (9). . . . . . . 201.
Monsieur de Montreuil, greffier de la Cour . . 20 1.
Monsieur Gerbiel" 1 commis de la Cour. . . . 10 l.
Monsieur de Bois Orieux, docteur en droit. . . 10 1.
Monsieur Berthelot-Plessix, Pr'ocurem de la
Cour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 1.
190 1. de beau sucre en pain ordinaire, à ] 00 l.
le 010, fait.. . . . . . . . . . . . . . . . 190 1.
40 1. de sucre en pain l'oyal à 1751. le 0/ 0, fait 70 r
Total. . . . . . . . 2601.
J'ay ce jour receu le contenu ci-dessus de mon dit sieur
du Bois à Rennes, ce 18 décem bre 172l.
Bon pom 260 \. (*)
Félix DU BOIS SAINT-SÉVRIN.
i) M. Pierre de Brilhac, seigneur de Nouzières, vicomte de Gencay,
2 Gahriel de Boisgelin, seigneur de Cucé.
(8 Paul de Robien. .
. (4) René de la Bigotière, seigneur de Perchambault.
(5) Le nom paraît mal écrit, je suppose que c'est de la Noë j il serait
de connaître le nom exact du personnage, puisqu'il
pourtant intéressant
~référence dans la qualité du sucre.
est l'objet d'une
(6) François-huy de Nyau, seigneur de Chatelou.
(7) Louis Charette, seigneur de Montebert.
(8) Claude du Pont, seigneur d'Ovilie.
(9) Charles Huchet, seigneur de la Bédoyère.
(4) En tenant compte de la différence de la valeur de l'argent, c'est
de600francs. Aussi,
une dépense qu'il faudrait évaluer aujourd'hui à près
au siècle dernier, employait-ou plus souvent du miel que du sucre royal
pour le café.