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Bulletin SAF 1887


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Promenade aux manoirs de Pratanroux et Pratanros

M. Trévédy

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PROMENADE AU MANOIR DE PRATANROUX
(LE TEMPLE DES FAUX DIEUX)
ET AU MANOIR DE PRATANROS
(COMMUNE DE PENHARS) •
Il Y a près de Quimper, en la commune de Penhal's,
tl'ois lieux habités nommés Pratanras, Pratanroux et Pra­
tamos (1). La presque similitude des noms donnés à trois
terres voisines> sinon contigües, devait pl'oduire et a pro­
duit la confusion; et les trois noms sont trop souvent
employés i'ndifféremment l'un pOUl' J'autre (2). Cependant
c;es trois terres sont distinctes; et, si Pratanras et Pl'atan­
roux ont été pOUl' un tem ilS réunis dans les mémes mains,
la tel're de Pl'atanros a toujOUl'S été séparée des deux autres .
Chacun de ces lieux a son histoire.
De ces trrlis terres, Pratamas était de beaucoup la plus
importante. Son chàteau était le chef-lieu d'un fief rele­
vant du fief de Quémenet, éclipse de l'ancienne v'icomté
puis principauté de Léon; mais il avait lui-même seigneurie
• Notice lue a la séance du 26 mai.
(i) C'est-à-dire, paraît-il, le pré du Ras (une lande rase, où pousse
seulemeut ulle maigre bruyere), le pré de Le Rol/.x (!Jom d'homme), le
pré de la (;oUine ou peul-Hre de I~ Hase. D'apres l'orthograp1e eu usage
depuis le X VJI< siecle, on devrait écrire Pnltarras, Pratarroux, etc. La
prononciation vulgail'e est Pra lal'as, Pra:larom:, Pradaros ou par abré­
vlatiun PraJra~, etc. DJQS les anciens titres on trouve Pra :l~an-ras, Pre­
dalll'as, Pratancras, Praleras; souvrnt 1'8 finale est remplacée par un z,
(2) LOBINEAU parlaut du même lieu écrit en un endroit PratanroliX et
en un autre P ratallros.

SUI' Ilombr'e de [elTes nobles, haute justice, patibulaires,
préérninenees en plusieurs éf,lises.
J'ai essayé ailleurs de faire l'histoire de Pratanras (1).
Je travaillais sur des documents incomplets et mon étude
est restée insuffisante snr certains points, fautive sur quel-
ques autres. Elle était à refaire et. je l'ai refaite; mais je ne
puis aujourd'hui publiel' toutes mes l'ectifications. Pour le
moment, il ne s'agit que d'esquisser l'histoil'e de Pratan-
. roux et de Pratanros.
PRATANROUX

Reprenons l'ancienne route de Douarnenez que nous
avons cléjàsuivieensemble. Arrêtons-nousa trois kilomètres
auprès de la To ;nbe de Tang: .ly (2). A gauche
de la ville,
débouche une allée plantée de hètres : 8ntl'ons sous leur
ombrage. A deux cents mètl'es, l'allée toume en descen-
dant vers le sud; suivons la ... Deux cents mètres plus
loin, à mi-côte, s'ouvre devant. nous une po l'te' ogivale ac­
costée de deux tOlJrelles disparaissant sous le lierre. Nous
sommes a Pratanroux.
Ce lieu est connu dans le pays sous le nom de Temple
Jaux dieux, el l'opinion vulgaire voit dans ces ruines
des
(i) BULL. DE LA Soc. ARCH. i882. (Promenadeà Coatrao et Pratanras).
(2) Je devrais dire l'endroit où rut la Tombe de Tanguy. La tombe,
respectée depuis au moins cent cinquante ans, vient presque de dispa­
raître : un brave homme ayant besoin de quelque.s mètres de terre et en
trouvant partout, est venn prendre justement celle de la tombe. J> le
plus que je ne le blâme: son excuse est dans son ignorance et
plains
sa rusticité. Réservons nos sévérités pour les villes qui, ayant la pré­
tention d'aimer les arts et les vieux souvenirs, renversent ou masquent
sans pitié dès monuments qu'elles sont incapables de remplacer .

les l'estes d'une maison de Templiers. Le peuple a gardé
le souvenir de ces religieux qu'il nomme les ,'doines rou­
ges ; mais au mot de Temple il a associé l'idée des
dieux du paganisme. De là le nom encore aujourd'hùi uni­
versellement répété. Ce nom était populaire dés le dernier
siècle, ainsi que nous l'apprend Ogée (1). L'auteur du Dic­
tionnaire de Bretagne contestait la tradition populaire. en
quoi il pouvait avoir raison; mais il se trompait en disant:
« On ne sait rien ni de la fondation ... ni de la démolition du
château de Pratanroux, et on n'en connaît même pas les
possesseUl's. » La date approximati ve de la fondation est
rèvélée (Jal' les caractères de la construction; et de nos jours
encore, elle est l'endue évidente pal' les arrnoi ,'ies visibles
sur pl us d'une pierr'e; quant aux possesseurs du château,
nous allons bientôt les nommer.
Cambry a visité Pratanroux en l'an III. Il l'a vu, comme
il a vu beaucoup d'autres choses, à tl'avers le prisme de
son imagination \2. 1. Ecoutez plutôt:
« Le Temple des F aux- Dieux. C'était un lem pIe de
Druides, qui n'avaient d'autres temples que l'air, les bois
ou la voûte du ciel (3). C'était celui de Jupitel' Ammon,
d'Isis, peut-être une ég lise de Templiers. (Cette dernière
conjecture me parait la plus vl'aisemblable).
« C'était certai nemen t la demeure d'hommes puissan ts
dans un siècle très reculé.
« Deux tour'elles régulières, mais petites, accompagnent
la porte il. tl'iple cintre, plein, aigu, surbaissé. Les chapi­
teaux, sans ordre, sont couvel'ts d'ornements. de fleurons,
de tètes barbues d'un style extraordinaire.

(i) OGÉE. Dict. Art. Penhal't (Penhars) écrit mal à propos, Prat-en­
Rouzé.
(2) CAMBRY. Catalogue des objets ayant échappé aIL vandalisme l'é­
'volutiollnaire, p. 20.
(3) Je copie sans comprendre.

« Lü large table de gI>ani t. qui fOl'me le manteau de la
. cheminée du salon (sic) principal, n'offre pour ornement
qu'une téte isolée à longue bar'be, à larges moustaches, i
pleine de force et de caractère. Cette tète est couronnée
d'un cer'cle orné de fburs de lys S'il était permis de ha­
sarder une conjecture, elle serait celle de Philippe-Auguste.
« La chemin ée s'élève jusqu'au sommet de la maison (1).
Le;; montants sont grotesquement travaillés et ne ressem­
blent à ri en de ce que j'ai vu dans les plus anciennes ruines.
La cheminée d'une salle adossée a celle-ci s'y joint: une
lantel'l1e octogone y réunissait les fum ées ... Fenétres, bâ­
tisses, souterrains, la grandeur des piéces, le peu d'ordre
dans les communications, d'énOl'mes tmucs de lierre .... ,
moins de richesse et cie profusions d'ornements que dans
les deI'niers siècles attestent l'ancienneté de ces vastes
ruines ... Que de détails pour un paysagiste!
« Près du château on voit une espèce de tenasse dégra­
dée; c'est là sans doute qu'on se formait à la lutte, à la
COUI'se, aux jeux de bague, à tous les exel'cices de la Che­
. valerie.
« J'ai peu vu dans la Suisse, sur les bords de la Loire,
dans le Tyrol, dans la Souabe, de plus pittoresque monu­
ment du moyen-âge. Prévenu contre les exagérations, j'y
fus saisi d'un frisson religieux, qu'augmentait un site sau:­
vage, silencieux, entouré de taillis, coupé de ruisseaux,
jadis couronné de fOI'ets, don t les troncs dépouillés attes­
tent l'antique existence. »
Quel enthousiasme! De quels frissons aurait été saisi
Cambry s'il n'avait pas été prévenu contre toute exagéra-
tion, et qu'aurait-il dit s'il lui avait été permis de hasarder
une conjecture?
(i) C'est assez l'ordinaire ...

Le chevalier de Fréminville a visité Pratanroux en 1832.
L'auteur était disposé a voie des maisons de Templiers un
peu pal'tout. Ii en compte trois aux environs de Quimpel' :
une au Moustoir, SUI' la l'oute de Concarneau, une autre au
Petit Guélen, SUI' la route cie RospOl'den (1), la troisième a
Pratanroux (2) . Il fàut en ajou:er une quatriéme, dans la
Vitte- Close de Quimper, au lieu mêm e où, en 12.3~, l'évéque
Raynaud établit le couvent de Saint-François (3).
Admettra-t-on facilt'm en t qu'entre le Petit-Guèlen et
Pratamoux, c'est-a-dire dans une distance de sept kilomé­
tr'es au plus, les Templiers aient eu trois maisons L ..
Cette eéSCl've faite, la descr·iption de ',1 de Fréminville
nous intéresse parce qu'elle nous montl'e Pl'atanroux, il ya
cinquante ans. La voici:
« Quel fut mon étonnement, lorsque, en arrivan.t a ce
prétendu Temple des Faux Dieux, je vis tout simplement
les ruines d'un chateau fortifié du XIIIe siécle !
« Son portail pratiqué dans une forte muraille revètue en
pierro de taille est une grande a rcade gothique en ogive, et
dont les moulures surportées par de petites colonnes enga­
gées sont d'un bon effet. De chaque côté de cette arcade
est un e tour l'onde dont le couronnement est depuis long­
temps tombé,et des guidandes de liel're flottent. maintenant
sur ces pierres désunies a la place du noble étendard du
Temple.
« L'enceinte n'existe plus qu'en partie, elle parait avoir
été carrée. On voit a droite, dans la COlle intérieure, les dé­
bris des bâ.timents qui servaient de logements. Les portes
qui y conduisent sont toutes en ogives, ainsi qu'une autre
(i ) Voir les Troi8 Moines l'ouges dans le B.~RzAz-BRllIZ. i re Partie.
XXIV. Je donnerai quelque jour une éturle SUl" Sainte-Anne du Guélen.
(2) A ntiquités dit Finistère, 1. p. 3-12 et suiv.
3) BULL, ARCH, XI. 2 Partie, p. i.

gra nde arcade qui se voit su l' le derrièr; et parait avoir été
un e poterne. »
L'auteür . conclut que ces ruines n'ont appartenu qu'à un
château gothiqu e' dont l'édification ne pouvait remonter
avant 1200. {( Ce château, ajoute-t- il, aliéné après l'expul-
« sion des Templiers a passé en plusieurs mains: il a
« été longtemps possédé par la famille de Prat-an-Roz. »
Lisez, commè nous le vel'rons, Prat-an-Roux .
Vingt ans plus tard, en 1853, lors de la publication de la
nouvelle ildition d 'Ogée, ces ruines gardaient encore un
aspect qu'elles ont perdu. Dopuis trente ans, le temps a
fait son œuvre. Nous cherchons en vain « les fenètL'es ogi­
« val es de la grande salle, et cette énorme cheminée,dont
(, le tU"yau recouvert en lanterne avait la ressemblance d'un
« clocheL', » que M. de Blois a vues et décrites. Ces fenêtl'es
et cette cheminée avait fait prendre cette partie des ruin-es
pOUl' les reste ; d'une chapelle. De plus, dans les croix
pattées {( inscull,tées » sur les murs, on avait cru recon- .
naître la croix. pattée des Templiel's . Maiscette supposition
s'évanouit devant cette simple remarque: .
Une a'.1cienne famille du pay~ portant le nom de Pratan-
roux avait pour armes la croix pattée d'azur.
A un e époque que nous allons indiquer, cette famille
s'allia à la maison du Juch, qui avait pour armes un lion(1).
Or, les croix que l'on voyait à Pratanroux étaient partout
alliées à un lion. C'est donc la croix de ' Pratanroux et non
celles du Temple que l'on voyait sur les ruines (2) .
(i ) Armes: D'azur au lion d'argent armé et lampassé de gueules. -
Pont-Croix porte: D'azur au lion morné d'argent. (Accord. de l'an
H06). Devise: Bien saI'. Au XIVe siècle, un sire du Juch prît pour
une fleur de Nonpareille, par allusion à la vertu de sa femme, et
cimier
adopta le nom de cette flem pour devise.
(2) M. DE BLOIS. Loc. cit.

Pour ne rien omettre, faut-il rappeler qu'on a voulu voir
dans le château de Pratanroux la demeure du roi Salomon,
d'où il aurait daté une charte « in au la Penhar;s. )) Pour
accom moder le nom de Pratanroux il. cette idée, on l'a tra-
vest: en Prat-an-Roué (Pré du Roi) (1). Rien n'établit cette
supposition absolument gratuite. .
Tout au plus pourr.ait-on soutenir (mais comment le dé­
montrer?) que le château miné aujourd'hui a été con"truit
sur le site de la demeure royale de Salomon ou d'un prieuré
du Temple.
Mais je vous retiens trop longtemps a la porte du châ­
teau .... Entrons ... Quelle désillusion 1. .. Depuis 1853, le
temps et surtout les hommes ont accompli leur œuvre de
. destruction. Devant nous s'étend une vaste place pleine de
débris. C'est la cour du château.
Tâchons pourtant de nous reconnaitre au milieu de ce
cahos. Le plan cadastral dressé en 1831 va nou:-; servir de
guide. Il délimite la vaste cour, en carré long, contenant,
avec les bâtimenls qui l'entour'aient, plus de vingt-six ares.
La cour était originairement close, partie par des bâtiments,
partie pal' un mur dont plusieurs pans subsistent encore,
notamment contre la porte d'entL'ee il. gauche et vers le sud.
Ce mur mesure 5 mètres de hauteul' sur 80 centimétres
d'épaisseur. Vers l'est, faisant pendant il. la porte par
laquelle nous sommes entrés, s'ouvrait une seconde porte
analogue il. la première. _
Les bâtiments qui sont dessinés au plan cadastml sont:
il. droite en entrant, la maison du fermier qui subsiste,
- au fond â l'angle nord-ouest, le vieux château. Au coin
sud-ouest se voit une COl1stl'Uction ancienne un peu au-des­
sous du sol.
(i) OGÉE Art. Penhal's. Mais on n'a jamais écrit Prat-tm-té comme
la carte de l'état-major.

La ferme a été rebâtie des débris du chât.eau, au commen­
siècle; elle garde encore sur un lin­
cement du dernier
teaule Lion du Juch.
Le vieux château était formé de deux corps de logis se
coupant d'équerre; à j'angle s'élevait sans duute, selon 'la
mode du XVe siècle, la tout' contenant l'escalier: elle a '
disparu depuis longte mp's ; mais, il y a une vingta in e d'an­
nées, le vieux château montrait encore les pierres sculptées
et armoriées que .sig nalent Cambry et M. de Blois. Ces
piel'l'es subsi~tent peut-être; mais leurs sculptures et leurs
armoic-ies se cachent dans le mur d'une créche élevée vers
l'angle sud-ouest. La haute chemin ée ayant l'aspect d'un
clocher est tombée. Ce qui reste aujourd'hui du chateau
semble avoir été la cuisine. Voila, auprès de la cheminée et
daos l'épaIsseu r de la mmaille, un fou r ... Appl'ochez avec
prècaution : des poules couveuses y on t leurs nids ...
Je soupçonne Cambry de n'avoir pas vu ce qu'on nomm e
de ce nom mystérieux, le souterrain (1).
C'est la petite construction que j'ai signalée. Cette con~­
truction recouverte de tene et de broussa-illes est voûtée ..
On y descend par une porte ouverte à l'est. Ell e est percée
,de un soupit'ail voûté vers le sud et -d'une seconde porte
dans le pignon ouest. Longu e de 9 mètres, elle est large
de 3 mètres. La voûte qui se courbe presque à partir de
terl'e est élevée de 2 mètres: une fouille pratiquée devant la
porte n'a pas mis fi jour une seule marche d'escalier. Il ne
semble pas que cette salle basse ait été pavée. Quelle en
a été la destination primitive'! Je n'ai pas l'heul'euse ima­
gination de Cambry; et je vois tout simplement dans cette
construction une caDe.
De l'angle sud-ouest de la cour part un sentiel' pavé qui
(1.) 00 dit que ce prétendu ,souterrain. passant et repassaot sous l'Odet,
va jusqu'a Poulguioao et de là vers le collége de Quimper.

descend vers le sud. Il contourne le mur du jardin et con- .
duit à une fontain e. Le limpid e fil et d'eau qui s'échappe de
ce bassin co ul e sur une longueur de quinze métres sous le sol
du jardin par un aqueduc construit p.n be lles pierres et
encore en pa.dait état (1). Nul doute pourtant que cet aque-
duc ne date du temps où l'ratanroux était l'hab itation du
seigneul' ; c'est-a-dire du XVie siècle au plu s tard. Nous
verrons bien tot q Ile le château étai t occu p8 par le fel'mier
dès le commencernent du XVIIe siècle; et ce n'est pas
assurément pour le fermier que le seigneur eût pris la
peine de bâtit, un aqueduc si luxueux.
Le coL) Il bier signalé pal' les vieux titl'es a disparu sans
laisser de traee.
Les ruines, telles qu'elles nous appal'aissent aujourd'hui
encore, justifient l'appréciation de Cambry: Pratanroux
fut la demeul'e d'hommes puissants.
Mais il ne faut pas que l'expression châteauJortijié em­
ployée pal' M. de Fréminville induise en erreur. Il n'entend
pas pa l' là un château fort pouvant recevoil' une garnison
et soutenir un siége en règ le, mais une de ces maisons, du
genre de Pratanras pal' exemple, entourées de murs percés
quelquefois de meurtrières et pouvant résister a un coup
de main .
furent les possesseurs du château ~ C'est ce que
Quels
nous allons rechercher.

Le château de Pratanroux était, dès avant le
XIV· siècle, le chef-lieu d'un fief relevant, comme Pra- ,
(i) C'est une des sources du ruisseau qui descend à travers l'enclos du
Couleurs, au-dessous du port
séminaire et alimente en partie l'étang aux
de Quimper.

tanras et Pra tanros, du fi ef de Quéménet. Prata lll'OUX sui­
vit le sort de Quémenet qui devint, vers 1630, une annexe
du marquisat de Rosmadec, plus tard de Pont-Croix

Quelle était à cette époq ue la consistance de cette terre 1
C'est ce que nous.ne pouvons dire. Les Archives départe­
du Finistère ne possèdent rien de relatif à Pratan­
mentales
roux; et le plus ancien aveu qu'une ob ligean te cClmmuni­
cation m'ait permis d'étudier, est de 16!3. Toutefois, on peut
supposer sans témérité que trés-anciennement Pl'atanroux
avait la haute justice, les patibulaires, les prééminences aux
églises réclamées par cet aveu. Je passe .... L'étude de la
consistance du fief sel'a mieux placée à la date de l'aveu
Jusqu'au XIV· siècle, la seigneurie de Pratanroux avait
eu des seig neurs particuli ers portant son nom. Est-ce l'un
de ces sei@:neurs qui a bâ.ti le château don t nous voyons
a uj ourd'hui les ruines? Cette construction doit-ell e dater
XlIio siècle, comme l'indique M. de Fréminville, et
comme il semble probable à l'annotateur d'Ogée? Non,
puisque les armes de Praf.anl'OliX et du Juch n'ont pu s'al­
lier qu'au milieu du XIV· siècle (2).
Les plus anciens titres où nous ayons trouvé le nom des
Pratanroux sont de cette époq ue : Ce sont quatre testa­
relatés au Cartulaire de saint Corentin.
men ts
Au mois de ma l'S 13!8, Azénol' de Pratanroux, veuve de
Jean de Lezarsco uët, fonde une messe annuelle, et nomm e
au nombre de ses exécuteurs testamentaires sa fille Mar-
g uerite. La mêm e année, H enri de Pratanroux fait une fon-
dation analogue, et nommepou l' exécuteur testamen taire, son
(1) FOllrches patibulaires de Quémenet. B ULL. 1883, p. 211.
(2) Je parle du Chateall dont nous voyons les rumes. Il est clair
remplacer un autre; et que ce lieu pouvait être bâti même
qu'il a pu en
XIIIe siècle.
avant le

héritier, le fils de Jean de Pratanroux. En 1351, c'est Jean
de Pratanroux, homme d'al'mes (armigel') et Henri de Pra­
tanroux qui, à leur tour, fondent des messes, le premier
pour lui-même, le second pour lui et pour Guillaume de
Pendreff (1).
Dés cette époque, les seigneurs de Pl'atanroux avaient
une noblesse ancienne. Ils s'alliaient déjà aux plus nobles
famil les. La maison de Rosmadec n'était pas encore parvè­
nue au degl'é de richesse auquel allait la porter le mariage
de Jean, 1 du nom, ayec Alix, héritière de Tyvarlen
(vers 1383), mais elle avait déjà l'illustration, et d'an­
ciennes alliances avec les maisons du Juch (1289) et du
Pont (l'Abbé) (1294) . 01' c'est en cette maison que Guil­
laum 3 de Pratanroux s'allia vers le milieu du XIV· si0cIe.
Il épousa Marguerite de Rosmadec, soeur de Guillaume, qui
fut père de l'évêque Bel'trand. Ils eurent une fille nommée,
comme sa mèl'e, Marguerite, qui fut héritière de lenr sei­
gneurie. Elle fut mariée à Hervé du Juch, chevalier,
« puîné de la maison du Juc~, duquel est issue toute la
« branche des seigneurs de Pratanroux . » (2)
Ce mariage se place au pIns t6t vers 1350; c'est donc
seulement dans la seconde moitié du XIV· siècle que les
croix pattép.s de Pratanroux ont pu s'allier au tian du
Juch; et l'alliance de ces armes sur les pierres du château
ne permet pas de reculer au-delà de 1350 la date de sa fon­
dation.
La maison du Juch . était une des plus anciennes et des
plus illustres de Basse-Bretagne. La seigneurie, au temps
où elle fut acquise par Sébastien II, marquis de Rosma-
dec (avant 1643), s'étendait SUl' plusieurs paroisses, notam-
(i) Cal'tuJaire de Saint-Corentin. N° 51, fo 26 et suiv.
(2) La COLo~mIÈRE-WuLSON. Généat. de la maison de Rosrnadec .

ment Ploaré, Plogonnec, Plonévez-Porzay, Ergué-Gabé­
ric (1). Elle avait haute justice. Son chef-lieu était au
Juch, en la paroisse de Ploal'é, lieu charmant où se voient
encore les ruines du château et l'église, dont les seigneurs
étaient fondateul's. Ils avaient le même titl'e de fondateurs
en plusieurs églises, notan,ment il. Quimper, pour la cha-:­
pelle dite de leur nom qui formait l'aile droite du chœur
des Cordeliers, chapelle où ils a\'aient un enfeu.
Dès l'époque où nous sommes, la maison du Juch avait
son nom dans notre histoire. Un seigneul' de ce nom
Hervé (2) est du nombl'e des nobles Bretons qui, en 1203,
demandent vengeance du meUl'tre du jeune Al'thur (a). -
. Un autre est nommé pal'mi les seigneurs que le Duc assem-
ble il. l'Ost de Ploërmel, eri 1294, avant de porter la guerre
en Guyenne (4) . En 1364, 10rsqueQuimpel' es! assiégé par
Jean de Montfort, vainqueur il. Amay, et qu'on délibère sur.
la reddition de la ville, Hervé du Juch est nommé le pre­
mier (5). En 1365, Jean IV, « grand inventeur de gabelles
et de subsides. » (6) songe a établir un dr'oit de douanes il.
l'entrée des ports de Cornouaille: il s'assure du consente­
ment des quatre principaux seigneul's du pays: Hervé du
Juch est l'un d'eux (7).
Un siècle plus tal'd, nous voyons le seigneur du Juch, en
possession d'un devoir de cou l', disons mieux ... d'un droit
(i) Je n'ai pas trouvé de litres anciens du Juch, et ces renseignements
sont empruntes à l'aveu rendu en i730, par le marquis de Pont- Croix,
successfur dn marquis rie Rosmarlec.
(2) Le prénom de Hervé alterne avec: celui de Henri; et daus les
act s écrits eu latin il est dJlicile de di.:.tillguer avec certitude Hel'­
vœlls de flel/ricus.
(3) LOBINuu, p. i89.
(~) ID., p. 282.
5) Mélanges d'Rist. et d'Arch. bretonnes. l, p. 77 à 82. Dom
MOHICE. Preuves. l, col. i585-i586 a donné une partie du texte de la
Capitulation.
(6) RÉ VIN. Queslion .~ féodales, p. 76,
(7) LOBINEAU, p. a8i.

singulier ... Voyez la place qu'il occupe dans le cortége du
duc François II, sortant du château de l'Hermine, a Van-
nes, pour aller ouvrir le Parlement général tenu en cette
ville en 1462 :
« ... Le Duc suivait revêtu de son grand manteau royal
fourré d'hermines, dont le comte de Laval, sire de Vitré,
et le sire de La Roche-Bernard soutenaient les deux côtés;
la queue était portée par le sil'e de Derval et Châteaugiron.
A côté du sire de Derval était MSir. Remi du Juch, cheva­
lier, lequel , par un pri vilége accordé a ses ancêtres, devait
porter le manteau d II Duc, quand le Duc n'en était pas re-
vêtu, et l'avoir a lui a la fin des Etats. Le Duc étant ce
jour la revêtu de son manteau, Remi du Juch portait sur
le bras un chaperon fOUl'ré d'h.ermines, en signe de son
office (1). »
Cet, honneur fut confirmé par Anne de Bretagne, aux
États de 1498; mais Lobineau parle-t-il très-exactement
en disant que cet honneur fut confirmé au seigneur de Pra­
tanroua: (2). Il est clair que ce n'est pas comme seigneur de
Pratanroux, mais comme seigneur du Juch, que le titulaire
des deux seigneuries eût pu réclamer cet honneur. D'un
autre côté, l'époux de Marguerite de Pratanroux n'était pas
l'al né de la maison du Juch; et il n'est pas démontré que
l'extinction de la branche ai née ait dévolu à la branche
cadette l'honneur dont il s'agit.
III
Quoiqu'il en soit, Pratamoux allait appartenir pendant
plus de deux siècles à la maison du Juch.
(i) LOBTNEAU, p. 679, a un peu ra jpuni le style
et l'orthographe. Il
publie le PJ'ocès-Vl'J'bnl. l'rl'uves, col. :1230 et sui v.
(2) Dom LOB:NEAU, p. 822.

Nous trouvons le nom d'Hervé du Juch, mari de Mar­
guerite de Pratanroux, au Nécrologe du couvent des Cor­
deliers de Quimper.
Le Nécrologe lui donne.la qualification d'illustre cheva­
lier et nous apprend qu'il mourut en Espagne, en 1369. Il
avait sans doute suivi du Guesclin à sa seconde expédition
au-delà des Pyrénées. « Ses ossements, nous dit le Nécro­
dans la chapelle des Cordeliers (1).1)
loge furent rapportés
Marguerite de Pratanroux survécut onze ans à son mari
et mOUl'ut en 1380. Les deux époux furent, selon la tl'adition
de leur famille, des bienfaiteurs du couvent; et la l'econ­
nàissance des Frères Mineurs rappelle le souvenir de leurs
bienfaits. Après eux, dix seigueurs ou dames de Pratan­
roux sont mentionnés au ~écrologe, et cinq d'entre eux ont
reçu la sépultUl'e au couvent (2).
rapproché dp-s réformations des fouages,
Le Nécl'ologe
celle de 1426 notamment, nous permet de dresser la généa­
logie des seigneurs de Pratanroux de la maison du Juch. Je
traduis plus loin les dix actes du .Nécrologe se rapportant
à ces seigneurs. .
Hervé du Juch et Marguerite de Pratanroux eurent pour
fils et héritiel' Helll'i du Juch, qui, en 1426, est nommé à la
réformation des fuuages de Penhal's avec son fils Herv3. Il .
semble permis de lui atU'ibuer la mention suivante du
Nécrologe:

(i) V. BULL . de 1884, p. :l6. Ces mots doivent être pris à la lettre:
des embaumements était perdu, et l'usage s'etait établi de fa ire bouillir
l'art
les corps jusqu'à ce qUi:! les chairs fussent détachées des os; les ossements
seuls ét~ient emportés au loin. - Ainsi fut-il fait pour saint Louis. Mais
depuis, Boniface VIII (-1.300) avait défendu celle pratique comme une
détestable barbarie. CANTU, Hist. un/v., xr, p. 391..
(2) J'ai démontre ailleurs que les actes des Nécrologes ne sont pas des
actes de sépulture et qu'un grand nombre de morts y mentionnés n'out
pas reçu la sépulture au couvent. (Voir Bull. de i884, p. 7 et suiv.).
Le registre intitulé par les Cordeliers Nécrologe est pIns exactement nu
obituaire.

« Le 17des calendes dej'uillet 1427, mourut noble cheva­
lier, Henri du Juch, bienfaiteur spécial de l'Ordre, ))
Il eut pour femme Catherine de Kervégan, mentionnée
Henri du: Juch, et qui mourut, le 3 des
comm e épouse de
nones de février 1430; bien que ni l'un ni l'autre ne soit
qualifié seigneur ou dame de Pratanroux, il ne peut rester
aucun doute sur ce point: les 'actes qui suivent sont trop
explicites (1).
« Le 6 des ides de juin 1436, mourut noble dame Béa­
trice de La Forét, dame de Pratanroux. ))
C'est la femme de Hervé du Juch qui va suivre. En effet,
aux réformations de Loctudy, pour 1426 : « Mire Hervé
on lit
du Juch, chevalier, à cause de sa femm e, la dame de la
Forest, veut sauver un métayer à Lambrigen, qui n'est pas
manoir et a été longtemps exempt. ))

« Le 1 des cafendes de mai 1462, mourut noble et puis-
seigneur Her'vé du Juch, chevalier, enseveli dans sa cha­
pelle avec ses parents. ))
«' Le 9 des ides de janvier ]460, mourut noble dame,
Jeanne Le Barbu, femme de Herlri du Juch, chevalier, sei­
gneur de Pratanroux. )) (2)
« Le 5 des ides d'octobre 1480, mourut au Mur (3) hautet
. (i ) M. DE BLOIS (OGÉE, II, Quimper, p. MiS), signale Hervé du Juch
et Henri, son fils, comme capitaines de Quimper, iMIj,. L)B1NEAU
écrit : Preuves, col. 1631j,. iMIj" 22 aotlt. " Hervé du Juch, capitaine et
son père, appelé comme plège» (c'est-à-dire comme caution.) En
Henri,
i1j,28, Hervé du Juch était auprès du Duc et en recevait des étrennes.)
(LOBrNEAQ, p.. 571j,). -Il semble bien qu'il s'agit des deux seigneurs dont
' nous parlons; toutefois, le !'V~cl'ologe ne leur donne pas le titre de
Capitaines.
(2) Jèanne Le Barbu a été inhumée au chœur de la cathédrale, par
privilège et par exception (Monogr. de la Cnthédl'., page 253, note 2).
L'acte du Déallui donue le titre de militessa (chevalière) et rapporte
l'inhumation au 11j, février H6fi. Cette date est certaine et l'erreur doit
avoir été commise dans la copie du Nécrologe qui donne les dates en
lettres. '
(3) Il ne s'agit pas de la ville de Mur (Côtes-du-Nord); mais de la
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. T. XIV (Mémoires). i3

puü:,sant et vaillant (probus) chevalier Henri du Juch, marié
à Marguerite du Juch apl'ês la mort de Jeanne Le Barbu,
inhumé avec ses ancêtres, le surlendemain de son décès. Il
aima l'ord['e des Frères plus qu'on ne le peut dire. ))
Bien que le Nécrologe ne donne pas à ce seigneur le titre
de seigneur de Pratanroux) il ne restera aucun doute si l'on
l'appl'oche cette dernière mention de celle qui précède et de
celle qui suit:
« Le 3 des nones de décembre 1494, mourut noble dame
Marguerite du Juch> dame de Pratanroux, très attachée à
l'Ordre et au couvent, inhumée dans l'habit des fréres. »
C'est la seconde femme du chevalier inhumé en 1480.
doute qui pouvait naitl'e sur le prénom est levé .

Capitaine de Quimpel', ce chevalier, seigneur de Pratanroux,
signe du nom de Henri des reçus du devoir de billot, en
et 1472, et des procès-verbaux de travaux faits
aux fOl'tifications. En 1475, il passe avec l'évêque une
nous parlel>ons tout à l'heure; et cet acte
tl'ansaction dont
l'appelle vingt fois peut-être Messire Henri. Enfin, aprés
sa mort (20 novembre), l'évêque accol'de l'exemption
du droit de rachat à Hervé du Juch, fils ainé de noble Henri
du Juch, seigneur de Pl'atanroux (1).
Hervé était né du second mariage de son père, au plus
tôt pal' conséquent en 1461. Il était mineur, en 1480, et
sous la tutelle de sa mère (2). Il mourut, en 1501, n'ayant
pas quarante ans; et on s'étonne que les Cordeliers le
maison noble du Mur (par. de Saint-Evarzec) - appartenant aux du Juch.
- Réf. de 1.536, Saint-Évarzec.
(1.) J'ajoule qu'un acte du 1.6 avril U6q, (très-lisible) nomme le sei­
de Pralanroux. Henri du Juch. (Arch. dép. fonds du chapitre).
gneur
m~me année, il figure sous le même prénom à un acte de garantie
de Quimper, conjointement avec Guillaume de Lisiart,
donné au chapitre
dont nous parlerons plus loin (Id., fonds des Cordeliers
(2) 20 novembre i!~80, Reconnaissance passée par Marguerite du
fils Hervé, mineur. Troheïr.
Juch, en son nom et comme tutrice de son

disent plein de jours: c'est pourtant à lui que se rapporte
l'acte suivant:
cc Le 4 des ides de septembre1501, mourut haut et puis­
sant <,cuyel' (scutifer), ayant fait nombre de campagnes,
Hervé du Juch, seigneur da Pratanroux, en son temps ca­
illustre ville. Il mourut pleuré de tous, en
pitaine de cette
pleine possession de S011 esprit, plein de jours, et fut inhumé
dans la tombe de ses pél'es. »
Ce vaillant homme laissait une veuve encore jeune, qui
se remaria, et des enfants mineurs .
L'ainé des enfants suit:
« Le 11 des calendes d'octobre 15340, mourut noble sei­
gneur Raoul du Juch, seigneur de Pratanroux, inhumé
dans l'habit de l'Ordre. »
Raoul du Juch était majeur dés 1519, puisque, le 3 octo- .
bre de cette année, il fit donati on aux Cordeliers d'une
rente de 30 livres. Cette rente a donné lieu il. de curieux
débats, sur lesquels nous aurons à r·~venir.
Voici maintenant la veuve de Hervé du Juch:
c( Le 3 des ides de février 1539, sortit de cette vie d'exil
illustre demoiselle Marie Guernapin, veuve d'insigne che­
seignl3ur de Pratanroux, devenue femme du sei­
valier,
gneur de Boisboissel. Tous deux ont été inhumés daus ce
couvent; elle (Marie), dans l'habit de l'ordre, auprés de ses
deux époux et de son fils aîné. »
Le fils ainé est Raoul, qui pl'écéde. En effet, le 2 janvier
1502 et le 27 septembre 1503. Marie Guernapin c( veuve de
cc Hervé du Juch, seigneur de Pratanroux et capitaine de
cc Quimper » donnait procuration .à, Guillaume Lisiart (1),
(i) Guillaume Lisiart était sans nul doute fils d'autre Guillaume, sei­
de ~rohaDet et sénéchal de Cornouaille, mort en 1495 (Nécrologe
gneur
Cordeliers). Nous le retrouverons en parlant de Prataoros.
des

seigneur de Tt'ohanet, comme tutrice de Raoul, Henri et
Jeann e, ses enfants mineurs (1).
Rao ul eut pour femme Jeanne de la Chapelle, seconde
sire de Molac. C'était une illustre alliance:
fille d'Allain,
. J eanne descendait, par les femmes, de la Maison de France,
et ell e comp lait parmi ses ancêtres trois mal'échaux et un
ami ral de Bretagne. En 1505, en présence du roi Louis XII
et de la reine Anne, elle avait été mariée au château de
Blois avec Jean III, sire de Rosm·adec, dont elle eut plu­
sieurs enfants. Devenue veuve en 1"515, elle épousa Raoul
Juch, auquel elle survécut (2) .
Rao ul du Juch avait laissé une fille mineure, Claude ou
Claudine. C'était une rich e hél'itière, qui fu t placée sous la
tutell e de Rolland de Lezongar, seigneur de Pratanras (3) .
ti on des fouages de 1536 la qualifie dame de
La rèforma
Pratanroux, Porzmell ec, Kergol, Kerriant, (Ket'rien),
Coatligavan, Kerva lgant (par. de PeDhars), Lestr.e -
au (par. de · Lanvern, écrit Languern), La Forêt
qué
(par. de Plomeur), Tréviét'on (par. de Cuzon). Mais
èration est incomplète: il faut y ajou ter le manoir
cette énum
et la seignemie de Troh eïr (paroisse de Kerfeunteun), qui
appal'tenait aux du Juch de Pratanroux, dès 1426 (4) le
(i) Comme on le voit, le capitaine de Quimper, mort en 150:1,
est toujours nommé Hervé ; de même dans la reconnaissance de son
douaire donnée par M.arie Guernapin, ~n :1505. n signe en :1500,
du nom de Hervé, une transaclion avec l'Evêque.
du 6 novembre 1-535 mentionne les deux douaires dus a
(2) Minu
Marie Guernapin, veuve d'Hervé et a Jeanne de la Chapelle, veuve de
Raoul. G. :17.
Isabeau de la Chapelle; sœur ainée de Jeanne , mariée à Jean . de
Rohan, sire de Landal, mourut sans enfants en 1.519; son opulente suc­
cession, recueillie pal' sa sœur, fut portée aux Rosmadec qui ont donné
une nouvelle illustral.ion au nom de Molac. LA COLOMBIÈRE-VULSON.
Gén. de 1a maison de Rosmadec.
(3) Inv. des titres de l'Évêque. G. 52. -
(~) Héform . de Querfuntun (sic), :1426. Henri dn Juch à l'roheïr, ma­
1444. Henri du Juch a deux métayei·s a l'roheir.
noir.
Plus anciennement l'roheïr avait eu des seigneurs particuliers. J'en
parlerai bientôt dans une notice sur le manoir de l'roheïr.

château et la grande terre de Liscuis (aujourd'hui Lis­
avec haute justice (pal'. de-Laniscat), qui sans doute .
cuit),
lui venait de sa mère (1).
Comme dame de Troheïr, Clande du Juch rendit pour la
prem ière foi.s hommage à l'Evèque de COl'nouaille, en 1534:
Le 25 décembre de cette annèe, à la gl'and'messe de Noël,
au moment où le chœur entonnant j'Introït va annonceJ' au
peuple la joyeuse nouvelle: « Un petit enfant nous est né! »
le Sénéchal et les officiers des Regaires qui étaient en robe
a leur banc, vinrent se J'anger devan t le trône épi~copal,
dans l'ordre qu'ils occupaient à l'audience. L'office fut
suspendu; le Sénéchal donna la pal'ole au Procureul' fiscal,
haute voix: {( Il est dû à Monseignem Hn demi
leq uel di t à
d'or pal' M. de Troheïr. M. de Troheïr est-il présent L. »
écu
A cet appel un gentilhomme entra au chœuI', alla s'age­
nouillel' devant l'Évêque, qui était alol's Claude de Rohan,
fit aveu, et remit un demi éc u d'Ol' au nom de la dame de
Troheïr. ' En 1537, Claude de Rohan, intronisé en 1501,
achevait la quatrième période de neuf ans de son épiscopat.
La dame de Troheïr dut lui faire présenter (( une paire de
mitaines enrichies d'or. » Telle était la double redevance
due pal' le seigneul' de Troheïr à l'Évêque de COl'nouaille,
Tel était le cèrémonial qui s'est maintenu
depuis 1475.
jusqu'à la fin du dernier siècle (2).
Si le seigneur de Troheïr ou son mandataire ne se prè­
sentait pas, le Procureur fiscal faisait constater l'absence,
requérait dèfaut,condamnation et saisie de la seigneu rie. La
sentence était prononcée sèance tenante (3).
('i) Ne pas confondre Lescuis ou Liscuis avec Lescuz, grande terre
Plomodiern.

(2) Transaction passée, le 19 mars H75, entre l'Evêque Thibaud de
et autre transaction passée, le 17 août i500, entre
Rieux et Henri du Juch
~10ël et Hervé du Juch, fils de Remi. Arch. dép.,
l'évêqùe Raoul Le
êque. Troheïr. G. i7. Aveu de l'Evêque au Roi, i682.
fonds de l'Ev
(3) J'ai dit aIlleurs (Promenade à QUImper), qu'au dernier siècle, le

Ce droit "inglllier avait été le prix de la tolérance donnée,
en 1475, par l'évêque Thibault de Rieux a Henri du Juch,
capitaine de Quimper, d'élever une justice {( à trois potz aux
mettes (confins) du village de Kergroach)) faisant partie
de la terre de Troheïr, mais dépendant du fief des Regaires .
Deux ans après, la dame de Troheït' n'avait plus a solli- .
citer l'assistance d'un gentilhomme étranger; et le demi
écu d'or était présenté à la messe de Noël par son mari,
Rolland de Lezongar (VIe du nom), fils aîné du seigneur de
Pratanras (1). .
Les Lezongar de Pratanras étaient la branche cadette de
cette famille. Seigneurs hauts justiciers à Pratanras, ils
allaient, en 1542, acquérir le fief de Coatfao, contigu à
Pratanras, avec haute justice et prééminences en plusieurs
Sénéchal du Présidial s'éleva contre cet usage qu'il nomme peu décent.
En réponse, l'Evêque produisait des sentences de défaut et de saisie, et
maintenait que la cérémonie s'accomplissait chaque année depuis ifJ,70.­
Mais il est clair que ni le Sénéchal de Silguy', ni l'Evêque Annibal de
Cuillé n'avaient sous les yeux l'acte constitutJf du droit. Notre confrère,
M. l'abbé Peyron est mieux instruit que les deux adversaires. n a
retrouvé et il me communique la transaction de H70, et des actes d'exé­
cution qui l'ont suivie. J'étudierai quelque jour ces curieuses pièces, en
vous promenant à Troheïr.
(i) SUCCESSION DES JUCH DE PRATANROUX
Hervé t 1369. Marguerite de Pratanroux t 1380.
Henri t 1fJ,27. Catherine de Kervagan t ifJ,30.
Hervé, capitaine de Quimper t ifJ,62. Béatrix de la Forest t :1fJ,36.
Henri capitaine t :1fJ,80 \ Jeanne ~e Barbu, t :1fJ,60 ou ifJ,60.
, 1 Marguente du Juch t ifJ,9fJ,.
Hervé, capitaine t ioOL Marie de Guernapin t i039.
Raoul t 103fJ,. Jeanne de la Chapelle.
Claude, dernière du nom[ 0
en cette branche, ) . Rolland (VI) de Lezongar t i06 .
sans enfants t :1090 1 TrOlllus de Mezgouez t :1608.

églises. L'écusson de Lezongar, d'azur à ia croix d'or,
brille encore aux vitres de la cathédl'ale de Quimper; à
J' époque dont nous parlons, il se voyait aux vitl'es des COI'­
deli el's et li, celles des églises de Penhars,de Plonéis, etc.
Les seigneurs de Pratamas étai en t fondateuI's de la cha­
pell e de N.-D. de Pitié, dite au dernier siécle, des Agoni­
sants, accolée li, ['église des COI'deliers; li, ce titre, ils avaient
en cette chapelle le droit de litre ou ceinture funébre. En
outt'e, ils possédaient quatre tombes armoriées devant le
grand autel de l'église (1).
L'une de ces tombes s'était referm ée, en 1538, sur Jeanne
du Fresne, premiére femme de Rolland, seigneur de Pra­
tan ras (2). Elle laissait deux filles, Jeanne et Marguerite.
L'année suivante, Rolland de Lezongal', leur donna pour
seconde mére Claude du Juch; en 1540, il en eut un fils,
nomm é comme lui Rolland; il maria ses deux filles, J'aînée
vers 1550, la cadette en 1556, et mOUI'ut en 1560.
partir du mal'iage de Claude du Juch, l'histoire de
Pratamoux se confond, pendant un demi- siècle, avec celle
de Pratanras. Je dois douc renvoyel' li, ce que j'ai dit à pro­
pos de cette seigneurie. Je ne consignerai ici que ce qui est
indispensable ou ce que de nouveaux documents me per­
mettent de rectifier (3).
La veu ve de Rolland de Lezongar se consola vite·; et, déjà
sur le retour, puisqu'elle avait un fils de vingt-trois ans,
elle se laissa charmer, après la reine Catherine de Médicis,
par la bea uté de Troïllus de Mezgouez (4). Troïllus ètait
alors seulement seigneur de la Roche et gentilhommeordi-
(i) Aveux de Pratanras, Arch. dép.
Nécrologe. 8 des Ides d'octobre.
(3) On excusera ces redites. C'est la seule rectification qui sera jamais .
publiée.
(4,) D'Hozier dit en parlant de Troïllus: «li ful honoré par la reine
Catherine de sa confiauce la plus intime. »
Comine en termes décents ces choses-là sont dites! ...

nail'e de la chambre du Roi; mais on sait à quelle haute
fortune· allait le porter la faveur de la Reine etdes Rois ses
fils (1). Cla ude du Juch l'épo usa en 156i:l, et lui fit don de la
seigneurie de Liscuis . Auparavant, elle avait di stribué
d'autres terTes moins im portantes à d'autl'es gentilshommes,
otamment à Claude de Kerlech (2). Son fils Rolland (VIle du
émut de ces prodigalités et provoqua l'interdiction
.nom) s'
sa mère. Elle fu t prononcée par défaut.
L'affai l'e fit scand ale. Le plus g rand seigneur du voisi-
nage, le sire de Rosmadec et de Tyval'len (3) réunit une
sorte de conseil de famill e au F,tO u, et y appela les gentils­
que Claude du Juch avait g ra tifiés de ses lal'gesses,
hom mes
entr'autl'es, com pa l' ut, et consentit pour
Claude de Kerlech
lui-m ème et un a utre à la nullité des donations , Troïllus
était présent; il fut convenu que « l'arrèt de défaut serait
exécuté comme définitif ») et que Troïllus garderait J'usu­
scuis fruit de Li
L'acte de transaction dressé en conséquence par les no-
(1.) Troïllus devint:
es ordres du Roi (1569).
Chevalier d
Pensionné de 6,000 lIvres (1.575).
Marquis de la Roche-Coetb'emoal et baron de Laz (1576). .
Vice-roi de Terre- Neuve (1577).
Dans l'acte que nous citons plus loin (1.582), il prend les titres de Con­
seiller au Conseil privé, de sr de la H.oche, du Guerlesquin, vicomte de
Carantec, gouverneur de Morlaix.
(2) Claude de Kerlech, puis baron de Kerlech (1576), était de l'illustre
aison du Chastel; il descendait de Bernard, juveigneur du fameux
Tanneguy, qui avait pris le nom de Kerlech en épousant l'héritière de
cette maison. Claude fut autorisé, en 1.578, à reprendre le nom de du
Chastel.
3) Tanguy de Rosmadec, baron de Molac, de: Tyvarlen, etc., qui
avait épousé en secondes noces Marguerite de Beaumanoir, fille de Jac­
ques, seigneur du Besso, etc. Tanguy de Rosmadec, capitaine de
cinquante hommes d'armes, lieutenant pour sa Majesté en Bretagne, reçut
le collier de Saint-Michel, en 1568, et eut l'honneur de le donner depuis
à Claude, son frère, et à Claude de [(el'lech son beau-frère (1.570). Il
mourut à Rennes le i 7 juin 1574, à la nouvelle de la mort du roi
Charles IX. li laissa un fils unique, Sébastien, premier marquis de Ros­
madec.

taires de Quimper, le 21 mars 1566, tI'ès-long et très­
instructif, contient beaucoup de dispositions; une seule
nous intéresse 'particulièrement et doit ètre mentionnee (1).
Rolland de Lezongar avait vendu une partie de la terre
de la Forét, et Troillus de Mesgouez l'avait l'achetée. Rol­
land lui céde le reste de cetle terre et reçoit en échange
« la maison du Scouédou (de l'écu), autreme:1t la maison
« de Pratanroux, avec ses jardins, cours, issues et appar­
« tenances située sur la place du Tour du ChâteL, et un
« four, une maison et un petit parcq illec près, sittué en la
« rue Saint-Mal'c és-faubourg du dict Quimpert . v
Cette maison de Pratanl'oux était le pied-à-terre, en ville,
du seigneur de Pratanroux, comme la maison de CoatCao et
II:! manoir de Kerlo! ou de l'Isle étaient les pied-à-terl'e des
seigneurs de CoatCao et de Kel'lot. L'hôtel en ville, le ma­
nOll' à la campagne étaient dans les mèmes mains ct por­
taient le même nom.
La rente de 30 livres donnée par Raoul du Juch aux Cor-
deliers ne leur étant pas payée depuis quinze ans, les pau-
vres Fr'èr'es dUl'en t, en 1569, l'ecou l'i r à la j USI ice, Mais com­
ment oblenÎl' et faire exécutel' une condamnation contre
Troïllus de Mesgouez ~
La rente est hypothéq uée sur toute la seigneurie, notam­
ment sudelieu de Lestannou (pal'. de Tréoultré-Penmarch.)
Les Frèl'es croient faire acte d'habileté en assignant
Guyonne de ((el'ouant \par. de Tréméoc), comme détentrice
de Lestannou. Hélas! ils ont mal choisi leur advel'sail'e!
Guyonne va ~puiser' toutes les arguties de procédure. par­
courie toutes les juridictLOns : et, protestante, elle portel'a
jusqu'à la chambre de L'Edit ce mauvais pl'océs perdu
d'avance. La procédul'e durel'u quatorze anné&s pendant IBS­
quelles, bien entendu, la rente ne sera pas payée; et c'est
(i) Arch. dép. Fonds de Pratanras.

seulement le 10 juin 1581 que sentence sera rendue contre
la défenderesse s'obtinant à ne pro1uire aucune pieee.
Guyonne de {(erouant aurait renùu des points à la com­
tesse des J)laideurs qui n'avait plus que cinq ou six
procès (1). Le pl'océs contre les Cordeliers 11e suffisait pas
à notre in trépide plaideuse. En 1580, veuve de Hervé Le
seigneur de Poulguinan et de la Coudraye (par. de
Vestle,
Tréméoc), ell e sontenait sept mauvais procès contre Pi erre
L'Honol'é, aum6nier de Quimpel', pour sept rentes formant
un total de 10 li vres 6 sous, dues pal' elle-méme ou par son
Il est clair qu'elle n'allait pas accepter la sentence
mari.
Guyonne a été condamnée sauf son recours contre qui de
droit, c'est-à-dire contre Claude du Juch. Elle n'a qu'une
chose à faire, exercer ce recours, appeler en garantie;
Mais vivre sans plaider, est-ce contentement?
La voilà qui s'oppose à l'exécution et qui va recommencer
ses folles procéd ures et ajouter les frais a ux frai s. Tl'oïllus
et Claude du Juch se ravisent enfin, et, faisant ce q\Lils au­
raient dû faire dés le début, ils interviennent et transigent
(JO dé~embre 1582). Ils paieront aux COI-deliers 250 écus
d'or soLeil pour les trente années arriérées et 30 livr'es pour
chaque année à venir.
Mais les COl'deliers ne sont pas au bout de leurs ennuis!
Comment Troïllus s'inquiétel'ait-il de payer la rente du e par
sa femme ~ Le revenu de ses seigneuries et de ses chal'ges
augmenté de la pension de 6,000 livres qu'il touche de la
Cour ne suffit pas à ses dépenses. En 1595, avec son frére
[(el'moallec, qui ose prendre le titre
René, seigneul' de
(1) Monsieur, tous mes procès allaient être finis; •
Il ne m'en restait plus que cinq ou six petits.
(Acte 1. Scène VII).

d'abbé de Landévenec, Tl'oïllus va s'empa!'el', on ne .sait
com ment, des chapellenies et des prieurés de l'abbaye,
et va les attribue!' a des titulai l'es supposés. En même temps
les deux frét'es vont pille!' l'abbaye, abattre ses plus beaux
arbres, démolir une partie de ses édifices. En 1596, les reli-
gieux obtiendront une sentence de t'éintégration ; qu'importe
à TroïlIus f Il a assez de ct'édit pour empêchet' l'exécution;
et en 1603, les Ft'ères attendent encore leut' rent!'ee en pos-
session! A dette époque, le sénéchal de Carhaix constate
que les vases sacrés et les ornements de l'église ont été
par les deux Mesgouez. D'impérieux besoins
enlevés
nt peuvent seuls expliquer, sans les justifiet', ces bri­
eI'al'ge
gandages sacriléges (1).
expliquent aussi que la seconde partie de la transaction
Ils
de 1582 reste lettre morte, et, le 20 août 1599, les Cordeliet's
sont contraints d'assigne!' de nouveau. Le procés dure jus­
qu'en avril 1602, et la sentence du 13 de ce mois alloue aux
demandeurs vingt années d'arrérages échues depuis 1582 : ce
veut dire que depuis la transaction de 1582, la !'entl2 n'a
qui
pas été payée une seule fois,
Cette sentence ne fut pas rendue contt'e Claude du Juch,
mais con tre ses héritiers.
(i ) Lire la notice de M. LEvOT sur l'Abbaye de LrwdéveJ/.rc et l'Ktude
SUI' quelq/lCg (ti/ciens (:ouventg par M. Du CHATb:LLfim. On verra de cu­
rieux détails. Un téulOin dépose devant le sénéchal ':e Carhaix que
Troïllus a monté à cheval les dl:'grés de l'autel et ouvert le tabernacle de
la pointe de son épée, el en a lui-même enlevé les vases sacrés!
Qu'on rap proche de ces profanations « le zèle et lervpnte dévotion
au service de Dieu » dont. Troïllus faisait pal'a·ie en i577. Il est vrai
qu'il s'agissait alors d'obtenir « commission d'équiper une flotte pour
aller à Terre-Neuve », et le titre de vice-roi de Terr.-Neuve.

En 1589, Troïllus de Mesgou ez, attaché au parti du roi
fut surpris et fai t pl'isonnier par les Lig ueul's. Il allait subir
une captivité de huit années. C'est pendant cette captivité
que Claude du Juch mourut, en 1590 (1).
Son fils, Rolland de Lezongal', était mort avant elle.
Rolland, si sévére aux prodigalités de sa mére, dépensa
lui-méme au-delà de ses revenus. Il se mil à rebâtir le châ­
teau de Pratanras 'et il y fallait beauc mp d'a rgent; il
démembra Coatfao, il finit par vendre le fief; mais il exel'ça
l'éméré au demier jouI' du term e, en sorte que Coatfao et
Pl'atanras se retrouvèrent réu nis dans sa succession.
Rolland mourut peut-être sans alliance, certainement
sans enfants, vers 1572, puisque cette année même, aveu
fut rendu au Roi pa r Jeanne de Lezongar, sa sœur aînée,
du premier mariage de son pére avec Jeanne du Fresne. .
fille
Elle" 'était seule hél'itiél'e de son frère consanguin, sa sœur
Marguerite étant mOl'te sans enfants, avant 1569 (2).
Jeanne de Lezonga l' était fem me 011 peut-être déj à veuve
d ..: Jean du Quélennec (seigneur de Bienassis et de Saint­
Quérec, èvêché de Saint-Brieuc) Celui-ci était de la bl'an­
che cadette de l'illustre maiBon qui a possédé pendant plu­
sieuI's siècles la vicomtè du Pont, et acquis par mariage la
bal'onnie de Pont, en 1507. Devenue da me de Pratan ras,
e1]e revint ~ son berceau et elle mourut, le 29 septembre
1587. Le nécr'o loge des Corde liers mentionne sept seigneurs
(i ) Hi90. Saisie féodale de la ten e de Troheïr, 2 mai 1590, après
décès de Claude du Juch. TItres de l'Evêché. Troheïr. G. i7. Arch.

G. 52. M. PO L DE COURCY. Biogr. bretonne, v La Roche, II, p. 168,
donne 1592.
(2) 1569 est la date du second mariage de son mari, Jacques Gautron,
vi~mte de Plaintel (chev. de Saint-Michel, p. 138). L'annotateur donne
à la mère de Marguerite, le nom du Fresnay j il faut lire du Fresne.

ou dames de Pratanras inhumés au chœur de l'église, de
1402 a 1540, La derniére des Lezongal' y vint rejoindre ses
ancêtl'es (1 ).
Elle laissait au moins six enfants, au nombre desquels
.Jean du Quélenec, gouverneur de Quimpel', sous la Ligue,
que le chanoine Moreau nomme le' sieur de Saint-Quérec
et du Hilguy, ce soldat plein d'honneur, si simple et si
devant le maréchal d'Aumont (2).
digne
De cette nombreuse famille, une fille survivait seule en
1605, FI'ançoise, dame de Bienassis, épouse en second ma­
riage de Gilles Visdelou, seigneur de la Goublaye, au voi­
sinage de Bienassis. Entre autres enfants elle eut trois fils,
Jacques et François.
Claude,
Claude, l'aîné, sénéchal de Quimper, devint conseillel'J
puis président au Parlement. Sa descendance grandit de
génération en génération pendant plus d'un siècle; sa
quatrième descendante fut comtesse de la Marck et de Lu­
main; et la fille de celle-ci épousa le duc d'Arenberg,
Saint-Empire, de l'illustre maison de Ligne (3).
prince du
Nous retrouverons Jacques plus tara a Pratanros.
fi'rançois devint évêque de Madaure, in partibus, puis
coadjuteur de Quimper, enfin évêque de Léon.
Mais l'histoire des descendants de Jeanne de Lezongar
est étl'angère à Pratanroux. Cette seigneUl'ie ne leur a pas
appartenu, comme l'a cru M. de Blois (4); et pour une rai-
(1) Le nécrologe ne va pas au-delà de 15 mais l'inhumation de
Jeanne de Lezongar nous est apprise par l'acte de délivrance du legs
fait par elle, délivrance eonsentie par Jean, seigneur de Saint-Quérec,
son fils, le 8 janvier 1588. Fonds des COl'detiers. Arch. dép.
(2) Chan. MOREAU, notamment p. 219. .
(3) La biographie générale de Firmin-Didot nomme la duchesse d'A­
renberg demoiselle de la Marche. L'erreur est d'autant plus fâcheuse
qu'il y avait il celte époque en Cornouaille une famille d~ la Marche ..
(4) « Cette terre a passé des du Juch aux Quellenec, pUIS chez les VIS­
delou-Bienassis, qui l'ont transmise aux princes de la Marck et d'Aren­
berg. »- yo Penha.rs. C'est Pratanras qui a passé des Lezongar
aux d'Arenberg.

son bien simple, c'est qu'elle ne faisait pas partie de la suc­
cession de Rolland de Lezongar, décédé avant sa mére~
Claude du Juch; et que Jeanne de Lezongar n'était pas
héritière de Claude du Juch, seconde femme de son père .

Au cours de l'année 1592 et les deux années suivantes,
nous voyons les Fl'éres Mineurs présenter requête au
duc de Mercœur, pour obtenil' le paiement de la rente' de
12 écus ou 36 livres due sur Pratal1l'oux :
« Cette seigneurie, elisent-ils, a été saisie entre les mains
cc de la justice pour le seigneur du dict lieu être contraire
. « au sainct party, et les recepveurs de la saisie refusent
« de payer la rente . J) (1 ).
Le duc s'empressa d'ordonnancer les trois requêtes.
Quel était ce seigne ur' de Pratanl'oux contraire au saint
parti? Son nom nous est révélé par la sentence rendue
en faveUI' des Cordeliers, le 30 mars 1602, et mieux encore
par la transaction passée le 11 octobre sui vant.
Ce seignem était Jean de Baud, qualifié écuyer, seigneur
dela Vigne(par. de Languidic,évêchéde Vannes); or, celui­
ci était fils ou héritier du sieur de la Vigne, celui qui, en
vint en pleine paix avec Kermassonnet, se saisir de
Concal'Oeau, et qui y fut tué misé l'ablement cc homme moral
et bienfaisant, dit le chanoin e MOI'eau, a la réSBI've de « sa
(( religion »); et riche, si l'on en juge par la lourde chaine
d'or qu'il portait si fiérem ent au col et. qui (( faisait tl'ois
tours . » (2)
(1.) BtlLL , DE LA Soc. ARCH. IX, p. 259.
(2) MOREAll, p. 63.

Comment Pratanroux est-il passé aux de Baud~ Par
La transaction de 1602 nous
succes:::ion co lIa téral e.
repr'ésente Jean de Baud, seigneur de la Vigne, comme
hél'itier de Claude du Juch, décédée sans h0irs de coeps; et
elle nous appren 1 que Pr _~tanl'oux et TroheÏl' furent recueil­
lis dans sa succession (1).
Un bail à domaine du manoir de Troheïr (9 octobre
1603) et un bail à ferme du moulin de Tl'obeïl' (3 janvier
1608) confil'ment ce renseignement,et qualifient Jean de Ba ud
de seigneur de la Houlle, qui ven ai t des de Baud, et de Lis­
cuis, recueilli dans la succession de Claude du Juch.
Enfin, une sentence du Présidial de Vannes, du 14 fé­
vrier 1616, nous appl'end que, à cette date, Jean de Baud
était encore PQssE'sseur des deux seigneuries de Pratan­
roux et de Troheïr (2).
VII
Moins de dix ans après, les deux seigneuries vont passer
ensemble dans la famille des Rosily, seigneurs de Méros
(paroisse de Plonévez-du-Faou).
Cette transmission s'était faite par un mariage.
On lit, en effet, au procès-verbal de la réformation de
1668 que, en juillet 1594, Anne de Baud épousa Jacques de
(i) Cordeliers. Cote AA.
(2) Sentence de réform;llion du domaine royal rendue le Hl, juillet
i682, sur l'nyeu de l'évêque de Quimppr au roi. La sentenc2, si sé­
vère pour l'Evêque, est mal fondée; mais ne nous en plaip-nons pas:
elle a' donné heu il l'appel de l'Evl'que; et l'appel nous a valu le lumi­
neux mémoire de H3vin sur Quimper. La ~entence vise: i 0 une
condamnation prononcée il Vannes, le i4, fév rier i4,16 (lisez l.6i6) contre
le sieur de la Vigne, fonùé ès droits de Siméon (lisez Rolland) de Le­
zongar et Claude du Juch, sa compagne.

Rosily, et qu'ils eurent pour fils François que nous trou­
verons tout à l'heure (1),
Jacq ues de Rosily qualifié seigneur de Méras, Pratanroux,
Troheïr, Crec'hmal' (2), appartenait à une ancienne famille
comparut à la réfOl'mation de 1426, et à une montre de
qui
en la paroisse de Cbàteauneuf-du-Faou; et qui, à la
réformation de 1669, allait faire preuve de huit généra­
tions.
En 1627, les seigneuries de Méros, Trobeïr et Pratanroux
appartenaient à François de Rosily (3), .
J'infére' cette date d'une énonciation de l'aveu qu'il ren­
dit, le }<, décembl'e 1613, pour le fief de l-'ratanroux, au
marquis de Rosmadec, seigneur de Quémenet, II déclare,
en effet, que les deux seigneul'ies (( lui sont échues depuis
les seize ans environ par le décés de Jacques de Rosilyet
de Anne de Baud, sa conl pagne, ses père et mél'e. »
L'aveu nous donne la coo,sistance de la seigneuri!l de
Pratanroux en 1643,
Elle compl'enait, outre le manoir de Pratanroux, les
, manoirs de Coatligavan, Porzmellec, Kel'vihel (plus tard
La Coudl'aye) Kel'riant ~aujourd'hui Kerrien) Kervalguen
(aujourd'hui Kervalgan), pal'oisse de Penhars, les villa­
ges de Creac'haradec (aujourd'hui Kercaradec) KeL'lezanez,
(i) Le procès-verbal indique Anne de Baud comme appartenant à une
tam ille autre que celle de la Vigue; mais les actes que nous étudions
révèlent et rectifient cette erreur.
(2) Aveu du lu septembre 1726, de Troheïr. G. 17. .
(3) Mais . non plus Creac'rnarc ou Ker'!.tÎsy qui avait été attribué à
Mauricette de Rosil y, femme de Jacques de Kerguern, conseiller du Roi
au Présidial de Quimper. . .
Le 24, mai 164,1, ils faisaient baptiser à Saint-Mathieu de Quimper un
enfant qui eut pour parrain Pierre Lhonoré, sr de Penlrat, et pour
marraine Claude de Chibaux, douairière de Kernisy.
Jacques de Kerguern signe à un autre acte de baptême à Saint-Ma­
thieu, le 28 octobre :1.655.

Runelaff-an-Poul-a-Feunteun (plus tard Ruglaon), même
paroisse; Kersalo, paroisse de Plonéïs, Kermorantin,
paroisse de Plomelin, Kerveguen, paroisse de Plogastel­
Saint-Germain, Saint-Guezennec ou Saint-Guennec, pa­
roisse de Com brit. Les manoirs de Pratanroux, Coatli­
gavan, Porzmellec étaient affermés; les autres biens étaient
a domaine congéable.
Les biens en Penhal's et Plonéïs avaient une contenance
de 789 joul'Oaux (394 hectares), dont 24~ journaux ou
121 hectares pour Pratanroux même. L'aveu ne donne pas
la contenance pour les biens des autees paroisses .

.Le revenu n'était que de 3221. 14 s . en argent; plus des
l'edevances en nature: boisseaux combles de froment, 17,
de seigle, 39, d'avoine> 18, de mil,4, (dus par Ruglaon),
22 chapons, 6 poulets, 3 moutons gras.
Il y avait seulemént huit cheffrentes ou rentes féodales
chacune faisant en tout 51.
de quelques sous ou deniers
4 s . 4 d. Une de ces rentes était assise sur la montagne de
Rohan ou de la Justice, voisine de Quimper, et trois autres
étaient dues par « le manoir de la Pallue à Bourlebou,
ayant appartenu a Mre Hervé Le Vestle. )) (1)
Ce manoir allait devenir le couvent du Calvaire et il est
devenu le Séminaire au commencement de ce siécle (2).
Dés 1643> le manoir de Pl'atamoux servait d'habitation
au fermier. L'aveu le décrit en ces termes: « Le manoir et
« lieu de Pratanroux, contenant maisons, colombier, aire>
« courtils,. pourpris, verger, bois de haute futaie, taillis,
« rabines, prairies, paturages, tant en clos qu'en frostage,
(i l BULL. de i88i, p. i23. Hervé Le Vestle, mari de Guyonne de
Kerouant, était mort avant i380, laissant une fille, Esther, qui devint
dame de la Coudraye et de Poulguinan; elle épousa François de la Haye,
seigneur du Plessix au Chat. Elle etait de la religion réformée, comme
sa mère. La Coudraye et la Pallue furent pillées pendant les troubles de
la Ligue. .
(2) La chapelle porte la date de i663.

« à présent profité à simple ferme pOUl' payer par an
(C 150 livl'es et une charretée de joncs. ))
Cette situation n'était pas nouvelle; à supposer que
Raoul du Juch ait habité le . manoir de Pratanroux, il est
certain que sa fille Claude ne l'habitait pas constamment,
et nous voyons par les titres que Jean de Baud (1603-1608)
habitait le manoir de la Vigne ou Liscuit, et que Jacques et
François Rosily demeuraient au manoir de Méros.
Un siècle environ après, le manoir n'offrait plus au fer­
mier une habitation assez sûre, et, des débris de l'ancienne
demeure du haut et puissant seigneur, on bâtissait une
maison plus modeste mais plus commode pour le fermier'.
La réunion de Pratanroux et de Troheïr avait eu pour les
vassaux de Pratanroux un g rave inconvénient. Le petit
ruisseau de Pratanroux, après la suppression de l'étang,
ne suffisait plus à faire tourner un moulin, et le seigneur .
contraignait les vassaux à suivre le moulin de Troheïr que
faisait et que fait encore toumer le Stéïr. Pour les vassaux
habitant sur les confins de Pluguffan c'était tout un voyage,
et par quels chemins!
Voici maintenant les droits seigneuriaux réclamés par
l'aveu:
« Item a droit de juridiction et obéissance sur les hommes
cy-devant dénommé,? à cause de la seigneurie de Pratan­
roux, selon la natUl'e du fief, haute, moyenne et basse jus­
tice et patibulaires es levées à tl'ois pos tz (trois piliers) -
avec droit de déshérence et panage (1); {( dl'Oit és chapelles,
{{ bancqs, escabeaux e\ enfeus prohibitifs de tous temps
« immémorial avec armes, armoir'ies, tant en bois qu'aux
({ vitres des paroisses où sont situés lesdits manoil's. ))
(i) Déshérence: droit de succession aux vassaux décédés sans hoirs.
Panage : droit de faire paitre dans les bois .

L'intitulé d'e l'aveu réduit à trois le nombre des églises
seignenr de Pratanroux a des prééminences: savoir
où le
l'église des Cordeliers de Quimper, la cathédrale et l'église
de Penhars.
Il ne reste à la cathédrale aucune trace des vitres et de
l'enfeu de Pratanroux. La notice de Jean Beaujouan récem­
ment publiée (1) et le Nécrologe ancien nous apprennent
que des seigneurs de Pratanroux ont été inhumés aux
Cordeliers; mais ces seigneurs étant de la maison du Juch
semblent avoir été déposés dans l'enfeu de cette grande
'seigneurie. Le nouveau Nécrologe mentionne par deux
fois J'enfeu de Rosily; mais les expressions employées
semblent indiquer que cet enfeu appartenait à la terre de
Méras.
Où s'exerçait la haute justice de Pratanroux ~ L'aveu
est muet sur ce point. Tout ce que nous pouvons dire c'est
qu'elle n'avait pas son auditoire aux Cordeliers de Quimper,
comme d'autres justices appartenant à des fiefs voisins de
Quimper (Le Quémenet, Pratanras, Le Plessis-Ergué) . .
Où se dressaient les patibulaires du fief ~ L'aveu ne le
dit pas; et j'ai vainement cherché sue les terres de Pra­
tanroux un champ qui gardât avec le nom de justice le
souvenit· des fourch!'ls patibulaires. Peut-être ces patibu­
laires étaient-elles celles que Henri du Juch, capitaine de
comme nous l'avons vu, dressées en 1475,
Quimper, avait,
avec la tolérance de l'évêque, sur la colline de Kergroach,
dans la 'paroisse de Saint-Mathieu de Quimper et dans le
Regaires?
fief des
Nous voyons François de Rosily donner des baux du
moulin de Troheïr , en 1653, 1657 et 1661.
était mort avant le 18 septembre 1668, puisque nous
(V. BULL. XlI, p. 3.

voyons à cette date Catherine de la Motte, douairière de
Méros, recevoir l'aveu de 'la Coudraye (1).
Cet aveu est rendu par Fl'ançoise Amproux, veuve de
écuyer Ninon, sieUl' de la Forest, conseiller au présidial.
Entre 1716 et 1726, la Coudl'aye fut aliénée par le sei­
gneur qui retint seulement les droits seigneuriaux, à la
charge d'une cbeffrente de cinq deniers ou une obole.
Mathurin de Rosily. fils de François, seigneur de Méros,
de Pl'atanroux, de Troheïl', etc., compamt a la réfor­
mation de 1669 et, pal' arrèt du 13 juin, fut déclarè noble
d'ancienne extraction; il faisait, comme je l'ai dit, preu.ve'
de hui t génèrations. Dans un des baux qu'il donne du moulin
de Troheïr, en 1675, 1679. 1684, 1685, 1691, il se qualifie
de chevalier.
Le 12 juin 1669, le même déclarait minu pour le rachat
des seigneuries qu'il avait héritées de son père; et, le
1 décembre 1672, il recevait du sr Louis de Talhouet,
receveur du mal'quis de Rosmadec, quittance de la somme
de 500 livres. Dans cet acte, il est ajouté a ses titres celui
de seigneur du Moustoir.
Le 18 février 1675, il rend aveu au marquis de Rosmadec.
Deux articles portés a l'aveu de 1643 ne figurent pas à ce
second aveu: ce sont les manoirs de Coatligavàn et Porz­
mellec. Le marquis « les a aliénés », c'est-à-dÏI'e qu'il a
transféré ses droits domaniaux. Mais cette aliénation n'a
pas amoindri les droits du seigneur . de Pratanroux; et
l'avouant a bien soin de retenir sa juridiction SUl' ces deux
terTes .
(1) Il avait plusieurs eufants de son mariage avec Catherine de la
Motte; une de ses filles, Marie-Yvonne, épousa François chef de nom
et d'armes de Kergoel, conseiller, puis président au présidial. Un fils
naquit de cette union, le 21 septembre 1668, qui fut baptisé en grande
pompe à Saint-Ronan, le 7 janvier 1669, par François de Coëtlogon,
évêque de Cornouaille. Il eut pOUl' parrain René de Névet, chevalier,
seigneur de Beaubois, etc. et pour marraine son aïeule paternelle.

Dans ces trente an nées, les fermages se sont notablement

élevés; quelques redevances en nature ont été converties
en monnaie. Je n'An citerai que deux exemples. La ferme
de Pratamoux s'est élevée de 150 livres a 255 livres, et le .
domaine de Kerlezanez paie 150 livres en argent au lieu de
nature. Nulle mention des commis­
quelques fournitures en
sions que nous verrons plus tard accompagner le renouvel­
lement de la baillée .
Mathurin de Rosily avait eu pour femme Jeanne Le Pape,
qui fut inhumée dans l'enfeu de Méros, aux Cordeliers, le
22 juillet 1708; et, deux ans aprés, le 30 novembre 1710, son
mari vint prendre place auprès d'elle.
Comme seigneur de Troheïr, Mathurin de Rosily avait
plaidé contre l'Évêque à pl'OpOS de l'hommage et du demi
(1696) ; mais il fut, sans nul doute, débouté de ses
écu d'or
prétentions, puisqu'il rendit aveu en 1702 (1).
Après sa mort, Pratanroux et Troheïr furent séparés.
Pratanroux appartint a l'ainé, Joseph-Marie, seigneur
de Méros. Troheïr devint le lot de FrançoIs de Rosily,
seigneur de la Tour, demeurant a Quimper (paroisse de
Saint-Ronan) ; trente ans plus tard, nous retrouvons Tro­
heïr aux mains de Mathurin de Rosily, conseiller au Par­
lement, fils de Joseph-Marie, seigneur de Méros, et héritier
principal et noble du seigneur de la Tour (2).
Le 5 février 1716, Joseph-Marie de Rosily, fils de Ma­
thurin, rend aveu à Alexis, Sénéchal de Cal'cado, marquis
de Rosmadec, qui va obtenir la continuation du marquisat
sous le nom de Pont-Croix (1719).
La composition de la terre de Pratanroux est la même
(i) Titres de Troheïr. G. 17. Il laissa défaut et la saisie de Troheïr
i693, 1698, i699, t700 et sans doute les années inter­
fut prononcée en
médiaires.
(2) i2 mars i7MS. Bail du moulin de Troheïr.

qu'en 1675, et le revenu n'est pas sensiblement changé,
sauf cependant pOUl' Kervihel, Querviel ou la Coudraye, qui
paie 120 livres monnaie, au lieu de six: pipes de seigle.
Un aveu rendu, le 12 juil:'. 1726, par le possesseur de
la Coudl'aye, ajoute aux seigneuries de M. de Rosily, celle
de Kernazin. C'est en cet aveu que la Coudraye nous appa­
la premiêre fois comme ne payant plus que la
raît pour
l'ente féodale d'une obole.
Cet aveu est rendu après la mort de Françoise Amproux,
veuve de M. Laforest Ninon, (1) par Geneviève Ninon,
dame de la Forest, faisant pour elle et son frère Olivier
Sernin Ninon, trésorier et chanoine de l'église cathédrale,
actuellement a Paris. L'aveu comprend la foi, l'hommage
chambellenage, lods et ventes, rachat et autres droits
seIgneUrIaux.
Joseph-Marie de Rosily mourut avant 1745, laissant
pour veuve Geneviéve Le Pape, qui fut elle-même inhumée, le
août 1754, dans la chapelle de Saint-Corentin d'en haut

à la cathédrale (2).
portant comme son aïeul le nom de Mathurin est
Son fils,
qualifié chevalier et seigneur de Mèros, Pratanroux et
Troheïr en 1745 (3). C'est lui, comme nous l'avons vu plus
haut, qui réunit de nouveau Pratanroux et Tl'oheïr.
Mais il était conseiller au Parlement: il faisait sa rési­
dence ordinaire à Rennes; après lui, son fils, qualifié mar­
quis de Rosily, allait habiter Nantes; et les vieilles sei­
gneuries possédées par les ancêtres et transmises par héri­
tage, au moins depuis 1426, allaient être vendues et venil'
en mains roturiéres, mais enrichies par le travail et três
dignes de les posséder.
(i) Stlpult. Cordeliers. 26 février f723.
2) Sép. Saint-Sauveur. Aujourd'hui chapelle Saint-Paul.
3) Bail du moulin de Troheïr.

VIII
En 1772, François-Julien de Rosily, chevalier, mar'quis de
Rosily, seigneur de Méros, Châteaugal, Coetanfao, Pra­
tanroux et Troheïr, donnait à ferme le moulin de Troheïr .
En 1775, n'ayant aucun intérèt à garder des possessions
s! lointaine" à cette époque, il donna mandat à Me Jean­
Pierre Le Ballenois,' ancien avocat en Padement, demeu­
rant à Quimper, de vendre Pmtanroux et Troheïr en gros,
c'est-à-dire en bloc. Mais le mandataire, plus homme d'af­
faires que son mandant, fit autrement et mieux. Il détacha
du gros des biens quelques domaines congéables, que les
domaniers payèrent fort cher et vendit le reste en deux
lots, Pl'atanroux et Troheïr.
J'ai sous les yeux l'affiche rédigée par Me Le Ballenois
pOUl' parvenir à la vente. Quelques détails donnés sur Pra­
tanroux nous intt3ressent: « Cette ferme est recherchée aux
mèmes conditions (300 livres), et 200 livres de commission.
Les logements du métayer sont commodes et bâtis à neuf.
Il ya beaucoup d'anciens édifices en ruines dont les maté­
riaux suffisent pour Îaire une habitation gl'âcieuse. »
Quel homme pratique que Me Le Ballenois 1 Dans ces
belles ruines qui exciteront vingt ans plus tard l'admira­
tion de Cambl'Y, il voit une carrière 1 •••
Les revenus des terres formant le fief de Pratanroux,
montent à 1798 1. 21 s. 15 d. 1 obole, soit en nombres ronds
1,800 livres. Les fermages ont augmenté: il est tenu compte
des commissions relativement élevées: le revenu des bois
taillis arrentés pour neuf ans est évalué annuellement à
144 livl'es.

La mise à prix portée à 15,000 livres allait être dépassée.
Le 31 octobre 1775 « noble homme Pierre-Clément Caussy,
(c manufacturier de fayencerie et Dell. Jeanne-Josèphe Bou­
cc cher, son épouse » acquirent Pratalll'oux pour le prix de
16,400 livres. Le sieur Caussy ne comparaissait à l'acte
que pour la régularité : l'acquisition 'était faite au nom .
de sa femme, dont les parents payaient le prix en avance­
ment d'hoirie.
Pratanroux était vendu avec (c les droits et prééminences
dépendants du manoir, les corvées des vassaux et posses­
seurs des lieux de Kerriant, Kerviel (Kervihel ou la Cou­
draye), Cl'éachcaradec, Coatligavan, Kerlezané, Ruglaon,
Porzmellec et autres sujets à faire annuellement 16s foins
du manoir et un denier obole de cheffrentes sur le man oit'
de la Coudraye. » Il est déclaré dans l'acte que Pratanroux
est chargé envers la communauté des pères Cordeliers,
ancienne de 36 livl'es, à raison de
d'une l'ente de fondation
ses prééminences en l'église du couvent (1). Enfin M. de
Rosily, qui n'a pas encore vendu Troheïr, stipule expres­
sément que les vassaux de Pl'atamoux continueront - de
suivre Le moulin de Troheïr pour leur mouture (2) .
La terre noble de Pratanroux allait être pour la première
fois possédée par un roturier et cette situation juridique
donnait ouverture au droit de franc fief. En principe tout
héritage noble ne pouvait être possédé que par gensfrancs,
c'est-à-dire nob Les, libres et exempts des impositions dont
les roturiers sont chargés. Mais, en fait, il avait bien fallu
roturiers pourraient possédel' des héritaC' .
admettre que les
ges nobles; et nombre de l'Otul'iers qui, à ce titre, devaient
(1) La rente fondée par Raoul du Juch.
(2) La famille de Rosily a produit François-Joseph de Rosily chef
1764. De son mariage avec Marie-Jeanne-Renée Gourio est
d'escadre en
à Brest, le 13 janvier 1748, François-Etienne qui est devenu vice­
-Louis et de la Légion d'honneur.
amiral, grand-croix de Saint

être imposés, furent propriétail'es de terres nobles qui, de
leuI' nature, ne pouvaient étre imposées (1). On tourna la
difficulté. Le propriétaire roturier paier'a une taxe qui n'est
pas une imposition mise sur la terre, mais qui tiendl'a lieu
de cette imposition et le Trésor n'y pel'dra rien. Cetta taxe
est connue sous le nom de droit defrancfief.
Le sr Ca ussy fit la déclal'ation détaillée sur laquelle la
taxe devai t être calculée; et la taxe fu t fixée pour vingt années
de jouissance a 856 livres pOUl' Pratanroux et a 742 livres
pOUl' Troheïr .
. Cette taxe parut à M. Caussy très exagérée et il la con­
testa. Il n'était pas seulement un habile manufacturier (2);
mais il était membre de la Société royale de l'agriculture
de -BI'etagne. L'Intendant étant Yenu a Quimper en 1775,
visita la fabl'ique de Locmaria (3). M. Caussy saisit l'occa­
sion de l'entretenir du druit de franc fief, il sut intel'esser
l'Intendant et ii obtint l'autorisation de présenter un mé­
moire sur ce sujet.
J'ai cette piéce sous les yeux. M. Caussy réclame l'ab ais':
sement de -ses deux taxes a 450 et 342 livres, c'est-a-dire
à plus de la moitié pour Troheïl" et il déduit en fort bons
termes les motifs de sa demande. Puis il discute le droit
même de franc fief; et, a ce propos, il entre dans de curieux
détails sur la situation faite a l'agriculture par le système
financier du temps .
(i ) Le roi Louis XIII disait dans le préambule de l'ordonnance du
29 llovembre i6H : « La plus grande partie rles francs fiefs sont tombés
aux mains des ecclésiastiques, communautés el roturiers .... » Ce mou­
vement codinua ; ce qui n'empêche pas d'écrire, de nos jours; dans une
Histoire de France destinée aux écoles : « Tous les seIgneurs étaient
nobles.» C'est absolument faux. Je crois l'avoir démontré dans Seigneurs
nobles et Seigneurs roturiers.
{2) M. LE MEN. La Manufacture de faïence de Quimper. BULL. Soc.
ARr.H. T. IfI, p. 3;>.
(3) L'intendant était Gaspard-Louis Caze, baron de la Bove (1774,­
i 7Sti,).
(ft) Voir un extrait de son mémoire ci-après.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. T. XIV (Mémoires). 14,

Ce mémoire instructif produisit son effet. Le droit de
franc fief fLit considérablement réduit; et, moyennant le
paiement d'une somme une fois acquittée, M. Caussy put
se prom ôttre de jouir tranquille pendant vingt ans, jusqu'au
31 octobl'eJ 795.
Mais avant ce terme une Révolution avait passé. Le vœu
de M, Caussy demandant une imposition annuelle de la
terre était satisfait. Bien plus! la répartition égale de l'im­
p6t sur toutes les terres, qu'il aurait considérée comme un
rêve en 1775, était un fait accompli.
Les deux terres de Pratanroux et Trobeïl' réunies dans
les mêmes mains, au moins depuis 1426, sauf quelques
années du dernier siècle, ont été sépal'ées au commence­
ment de celui-ci; mais elles sont de nouveau réunies aux
mains d'un descendant de l'acquéreur de 1775,
. Nous pouvons maintenant nous rendre à Pratanros dis­
tant à peine de tI'ois cents métres vers le sud-ouest. ' Je
vous y retiendrai moins longtemps.

PRATANROS
Il ne reste aucune tl'ace du manoir de Pratalll'os. Il a été
détruit, il y a une vingtaine d'années; el (c'est la règle !)
ses débris ont rel'vi à construire la maison de ferme et les
bâtiments de sel'vice.
J'ai eu, je le confesse, un moment d'embanas: malgré
toutes mes recherches, je n'ai pu trouver que trois actes
et de dates bien récentes, se rapportant directement à Pra­
tamos ; les voici dans l'ordre chronologique:

Le marquisde Pont-Croix rendant aveu au roi, le 30 oc-

tobre 1730, donne de Pratanros la description suivante (1) :
« Seigneurie de ligence sur le manoir de Pratanros, ses
issues, largesses, appartenances et dépendances, il. présent
appartenant aux successeurs et ayant caus.e du sieur de
Pratll.nros. »
Quels étaient les noms patronymiques du sieur de Pra-
tanros et de ses successeurs ~ Enigme que l'aveu nous laisse
il. deviner. . -
Comme on le voit, l'aveu ne mentionne ni « jardin, bos­
quet en décol'ation, bois de futaie, ni colombier et chapelle, l)
tous objets qui, .selon l'usage ancien, établissaient la con­
sistance d'un manoir chef-lieu d'une terre de quelque im-
portance. Nous sommes en droit de conclure de là que Pra-
tamos n'était, du moins au dernier siécle, qu'une de ces
habitations modestes, comme il en l'este tant dans nos
campagnes, bien diffé l'entes de Pratanroux et de Pratanras.
Mais, il. défaut de vastes possessions, le seigneuè de Pra­
tamos prétendait, il. la fin du siècle dernier, il. des préémi­
nences et des droits honorifiques assez étendus dans l'église
paroissiale de Penhal's. L'énoncé qui suit m'a été fourni
par un heu l'eux hasal'd.
Le 26 septem bl'e 1781, M. de Madec, il. son retour du
. Mogol, avait acquis du duc et de la duchesse douairière
d'Al'enberg les seigneu l'ies de Coatfao et Pratanl'as. Je
recherchais un jour son appropriement, lorsque, il. la suite
des conclusions prises pour lui il. l'audience des plaids gé­
néraux, le 14 février 1782, je lus (2) :
« Sur quoi la dame de Kerrollain, comme tutrice de ses
enfants propriétaires de la terre de Pratanros, a déclaré
(i) Article 2:199, fo 364, ra.
(2) Arch. dép. B. 1.07. Supplément fo 7, Vo à fo 1.0 vo.

s'opposer, en conservation des prééminences suivantes en
Penhars, lesquelles consistent dans le droit de
l'église de
une gl'ande tombe au milieu du
fondation de lad. église
chœur élevée d'environ 4 pieds aux écussons de sept macles
d'argen t posées 3. 3. et 1. droit de sépulture au chœur de
lise pl'Ohibitif à tous autres, avec un escabeau entre
lad. ég
iceluy et la chapell e de Pratanros les armoiries susdites
en cinq soufflets aux lieux les plusèminents de la maîtresse
vître du côté de l'épître la chapelle de Pratanros du côté
plusieurs écussons dans les vîtl'es d'icelle
de l'épitre avec
aux lieux les plus éminents le droit de lizière et de cein­
ture funèbre tant au dedans du chœur et de la nef 'qu'au
dehors de lad. église, aux mUI's desquels, notamment au
pignon oriental, sont des écussons, des armoiries de lad.
l'elief; et en consel;vation des
seigneurie en pierre avec
au tres pl'éém i nences men tionnées dans les titres et les pro­
cèsverbaux qui les constatent. »
Le présidial prononce « l'appropriement envers et contre
tous fors les opposants, au nombre desquels la dame de
acte des oppositions, et .ordonne aux op­
Kerrollain, donne
posants de fournir moyens. »
Aux term es de l'article 278 de la coutume, l'opposition
était périmée par un an. Je ne vois pas que la dame Ke­
rollain ait foumi moyen dans ce délai fatal. La preuve, je le
aurait été difficile à fail'e, du moins en ce qui
suppose, lui
fondation de l'église de Penhars.
concerne la
Dep uis quelle époque la famille de Kerollain était-elle
propriétaire de Pratamos? C'est ce que je ne dirai qu'ap­
proximativement. Cette te ne fractionnée en plusieurs lots
a été vendue pal' la nation, le 25 floréal an VII (12 mai
« sur l'emigre Kerolin. » L'acte de vente renvoie
à un acte d'acquêt dressé, en 1741, par Le Bris, notaire
à Quimper. Mais, comme il arrive tmp f2ou\'ent, l'indica­
tion est absolument inexacte. J'ai pu vérifier les actes

du notaire Le Bris; pas un ne manque; mais j'ai vai-
nement cherché l'acte d'acquêt de Pratanros; les recher-
ches faites au bureau de l'emegistrement n'ont pas eu plus
de succès. .
Les propr;étaires actuels n'ont d'autre titre que la
vente nationale; et la nation en retenant les titres an­
ciens n'a pas su les conserver: il ne reste rien de Pratan­
l'OS aux Archives départementales . .
C'est donc ailleurs qu'il m'a fallu chercheI' les anciens
possesseurs de ce manoir, que l'aveu de 1730 ne prend
pas la peine de désigner pal' leur. nom patronymique. J'ai
retrouvé quelques-uns d'entr'eux à .partir seulement du
XV· siècle, mais encore aurai-je le regret de laisser plus
d'une lacune--à remplir .
Au commencement du XV· siècle, Pr'atanros. avait pour
seigneur une famille Le Saux ou Le Saulx , Cette famille
portait d'azur à sept macles d'argent: ses armes se voient
encore aux vitres de la cathédrale de QuimpeI', à la voûte
de la quatrième travée de la nef (1) et à l'église de P enhars.
Les Le Saulx. avaient alliance avec les maisons les plus
élevées du pays. C'est ainsi que le Nécrologe des Cordeliers
mentionne, aux nones de mai 1424, le ùécès de Catherine
Le Saulx, femme (ou veuve) de Guillaum e de Tyvarlen, .
En 1420, Riou Le Saulx, seigneur de Pratanros, obtint
en mar'iage Eléonor'e de Rosmadec, fille puinée de Jean de
Rosmadec, chambellan du duc, et de Alix de Tyvarlen et
nièce de l'évêq ue Bertrand.
Riou Le Saulx figul'e comme noble homme à la réforma­
tion des fouages de Penha I's, en 1426. Un autre Le Saulx,
René, est mentionné comme exempt des fouages au manoir
de Kercaradec, que·nous trouverons plus tard.
(1) Seulement on a mis mal à propos un champ de gueules au lieu
d'azur.

Riou Le Saulx et Eléonore de Rosmadec ement enü'e
autres enfants, un fils nommé Riou comme son père, qui
seigneur de Pra tanros ; et une fille nommée Alix
devint
ou Adélice, qui fu l donnée en mariage à Rolland de Lezon­
gal' (III du nom), bientôt seigneur de Pratanras.
Ce mariage se fit en 1440. Rolland de Lezongar est qua­
lifié à cette époque seigneur de Kerespem : il devint sei­
gneur de Kerangar à la mort de sa mére, Marie de Keran­
gar (144.0), et seigneur de Pratanras à la mort de son père
(1467) (1). En 145], il figure à une montre comme écuyet'du
duc, et en 1467, à la réformation des fouages de Cléden­
cap-Sizun; enfin, en 1477, il est mentionné en qualité
d'homme d'armes cie la compagnie de Tanneguy du Chas-
tel (2). •
Une montre générala de Cornouaille est tenue à Carhaix
en 1481, Rolland III n'y comparait pas en personne; mais .
son fils, Rolland le jeune, y figure pour son père et lui-
méme comme seigneur de Kerespem et du Hilguy « en
d'armes à trois chevaux et 0 (avec)
équipage d'homme
lui un coustilleur )) (3).
D'autre part, Riou Le Saulx, seigneur de Pratanros et
Rolland de Legonzar, sans aucune qualification, figurent à
un acte de garantie solidaire (100 s. monnoie) au profit du
chapitre de Quimper en 1452 (4). Il semble bien qu'il s'agit
des deux beaux-frères, Riou II et Rolland époux d'Alice
Le Saulx.
Alix de Pratanros mourut, le 3 des ides d'avril 1486
(i) Nécro!. de Saint-François. 3 calend. Octobre 1.440 et :12 calend.
nov. i467. Les deux époux ont été inhumés dans la même tombe au
milieu du chœur de l'église.
2) D. MORICE, Preuves, t. II, co!. :1604 II coL 32~.
3) IDEM. T. 11., col. 871.
(4) Fonds du chapitre G. 92. :li août :1452. L'acte porte Riou Le Saulx,
seigneur de Pratanroux. La confu5ioll se faisait déjà entre Pratan-
et Pratauros. .
roux

(11 avril) et, son mari, le 13 des calendes de juin (20 mai)
de la mème annèe . Alix fut inhumée dans une des trois
tombes de la seigneurie de P "atan ras, devant l'autel des
Cordeliers; et son mari dans la tombe du milieu du chœur,
qui avait dèjà reçu son père et sa mère et une fille aînèe
nommèe Alice . comme sa mère (1). L'acte du Nècrologe
III le titre de insignis vir et prudens seu­
donne à Rolland
tijer (homme distingué et sage ècuyel').
Pratanros, eut un fils de mème
Rolland, fils de Alix de
nom et son petit-fils, encore du même nom, épousa> comme
nous l'avons vu, Claude du Juch, dame de Pratanroux;
ainsi, son fils Rolland VI, demier Legonzar seigneur de
Pl'atanras, a eu pour ancêtres les seigneurs de Pratanroux
et ceux de Pratanros.
L'année même où mouraient Rolland III et Alix, Pratan­
l'OS avait pour seigneur Jean Le Saulx, probablement fils
de Riou. II était en même temps seigneur de Coatcanton
(Melgven) et de Kercaradec, non loin de Pratalll'os, et cha-
noine de Quimper (2).
Vers le même temps, mourait Marie Le Saulx, femme
Me Guillaume Liziart « homme probe el sagace » dit le
Nècrologe de Saint-François, seigneur de Trohannet (par.
de Langolen), et sénéchal de Cornouaille (3).
(i) Nécrologe de Saint-François.
(2) Monogr. de la cath., p. 127.
(3) Nécrologe des Cordeliers, 8 des calendes de décembre U88. Comme
seigneJlr de Kergonan (Ergué-Gabéric) Guillaume Liziart avait un enfeu
il. Saint-Corentin. 011 peut encore reconnaitre ses armes (d'or il. trois
croissants de gueules) dans la chapelle Saint-Sauveur, oI;t est figuré le
miracle des trois gouttes tie sang.
Guillaume Liziart était sénéchal dès ilJ,55. Cette année même, il fut .
pal' Pier~e II, avec Bertrand de Coëtanezre, aumônier du duc,
chargé,
d'une importante affaire. Il s'agissait d'enquérir sur les Droits ducaux
dans les diocèses de Cornouaille, de Vannes et de Léon.
« Le roi trouyait mauvais que le duc prît le serment des évêques, et
traitait cela d'entreprise nouvelle. » Mais le duc établit victorieusement
l'ancienneté de cet hommage, son titre de fondateur de toutes les églises

La succession du chanoine Jean Le Saulx a dû passer
a un collatér,al ne portan t pas ce nom ou a un acquénur ;
du moins, cinquante ans plus tard, la tl'ouvons-nous toute
entiére a.ux mains de Adelice de Kerourangan, dame
de Pratanros, Coatcanton, Kercaradec. Kel'aullen, Bot­
tyliau (1) (1536).
cinquante ans après, cette terre esten la possession,
Enfin" ,
de la famille Le Baud à laquelle appartenait Guillaume
Le Baud, sénéchal de Quimpel' au t~mps de la Ligue et
seigneur de C,'éachmar ou Kemisy (Saint-Mathieu de
Quimper).
Comment combler cette lacune d'un demi siècle? Com­
ment établir la transition entee les Le Saulx et les de
Baud L. P eut-être est-il permis de voir un descendl1n t des
Le Saulx de Pratanros dans Frauçois Le Saulx, chambellan
François II, auquel le Duc maria la fille de Michel
du duc
cie Quimper? Et peut-être François Le
Mal'io:), ma rchand
Saulx peut-il nous servir de tl'ait d'union entre les anciens
et les nouveaux posesseurs de Pratalll'os ?
Je lis dans la Monographie de la Cathédrale que Jean "
Marion habitant la ville close de Quimper' en 1472, fonda
sa femme une chll.pellenie daus la chapelle de Saint­
avec
Adrien (aujourd'hui Saint-Corentin). Les pa tl'ons de cette
étaient en 1530, Jehan Marion, et en 1548, An­
chapellenie.
sa veUDe, comme tutrIce de son fil s (2). 01',
drée Le Baud,
Jean Marion, le fondateur de la chapellenie eut entre
autres enfants, Jehan, et Michel, dont la fille unique fut

et sa jouissance des droits régaliens. LOBINEAU, p. 661, et Prenves,
/lOI. HS!.
Guillaume Liziart signe un marché passé avec. lin charpentier pour
le croisillon sud de Saint-Corentin, 25 avril 1477. M. LE MEN, p. 282.
Il est mort le 13 des ealendes de novembre 1.495. Néel'otoge des Cor­
deliers.
t) Ué!. (les fouages 1536,
"2) M:onogr" p. 161.

mariée à François Le Saulx, secrétaire du duc François II.
Voilà donc une apparence de relation établie entre les
Le Saulx et les Le Baud (1 ).
Pourquoi le mariage fait sous les auspices du duc? Le
VOICI:
Michel Marion s'était emiehi dans le commerce de mer.
En 1483 et 1486, il avai t pris la ferme des impôts de Cor­
nouaille : La guerre éclata, en 1487, entre la France et la
Bretag ne; et l'armée du roi Charles VIII vin t assiéger le
duc François à Nantes. Le parti français était puissant en
Basse-Bretagne, où dominait l'influence du baron de Pont
(l'Abbé) et de la maison de Rohan, qui possédait les fiefs de
Quéménet et de Crozon. Michel dévoué aux intérèts bretons,
malgl'é les menaces de mort ·et de pillage, rassembla une
troupe de cent vingt hommes résolus> les instruisit, les
èqui?a à ses frais, 'et arma en guerre un de ses navires amarré
dans le POI't. Un jour, Quimper le voit traverser ses rues à
la tète de sa compagnie « enseignes déployées et à son de
» Il embarque son monde; il fait voile vers l'em­
trompe.
bouchure de la Loil'e ; il entre dans le port de Nantes, et il
est avec ses compagnons de toutes les sorties. Après deux
mois les Français rebutés levèrent le siège. Presque tous
(1) Il est difficile de croire que Jehan, l'ainé des deux: fils du fonda-
• teur de la chapellenIe, fût le patron de la chapellenie en 1530 et qu'il
eût un enfant mineur en i548; en etM, son frère puiné Michel avait une
fille dé;à nubile en 1487. Je pense que Jean, le patron en i530 et le
père du mineur, patron en 15 18, était le petit-fils du fondateur. Lagénéa­
ogie s'élablirait ainsi:

Jean Manon, fondateur. - i4i2 .
J ea n .....
Michel mort en 1487.
Jean, patron, 1530, marié à Andrée
Jehanne, sa fille, mariée à Fran-
Le Baud.
çois le Saulx, 1.488.
Son fils mineur, patron en 1M8.
Ainsi Jeanne Marion aurait été la tante à la mode de Bretagne du fils
mineur de Andrée Le Baud. Ce mineur a pu être son héritier et la suc­
cession de celui-ci a pu passer à la famille maternelle; mais tout cela
est hypothétique.

les Cornouaillais étaient tombés devant l'ennemi: Le maî­
tre de la nef avait été tué à son bord; le bàtiment avait été
" brûlé et coulé Michel Marion -lui-rr,éme a llait succomber à
ses blessures; il mourait content f,uisqu'il avait vu la
retraite des Français; mais il mourait ruiné sans ressour­
ces. Le duc (et ce n'était que justice) pI'it la fille de Marion
sous sa protection et la maria; quelques années plus tard
(1490) la duchesse Anne lui fit remise d'une somme consi­
dérable dont Marion était l'esté débiteur envers le trésor.
Nul doute que le mari de Jehanne Mal'ion ne soit ce
François Le Saulx, qui figure, en 1492, aux registres de la
Cour des G(lmptes, en qualité de conseiller auditeuI' (1).
Deux siècles après, le souvenir de Marion " et de son gen­
dre persistait à Quimper; et l'évêque, dans son aveu au roi
du 14 juillet de cette année, désigne ainsi une maison de la
« maison autrefois à Marion, et depuis à Fran­
rue Kéréon
çois Le Saulx. »
Maintenant si l'on demande: est-ce pal' succession col-
latérale ou par acquêt que Pratanros a passé des Le Saux
aux Le Baud, je répondrai: Je ne puis le dire avec certi­
tude. Mais, il m'a paru permis de rappeler cet épisode de
la vie de Quimper et de prendre l'occasion de saluer au
passage le nom d'un patriote breton oublié depuis bientôt
quatre siècles (2).
Transportons-nous à la fin du siècle suivant. - En 1583,
(i) M. DE FOURMONT .. Hist. de la Cour des Comptes, p. 29ii. . .
(2) C'est à M. DE LA BORDERIE que Michel Marion doit la résurrectIon
de son nom. Il a trouvé la glorieuse histoire de notre compatriote. dans
l'acte signé du 8 décembre i490, par lequel Anne de Bretagne faIt re­
mise à Jeanne Marion de la somme restant dUJ au trésor. M. DE LA
BORDERIE a écrit: « Sauf la poésie du nom, Marion ne le cède pas à Léo­
Il a même sur ce dernier l'avantage " de n'a voir été ni roi, ni
nidas.
prince ma.is ul!- simpl~ b.our~eois ql!-e rien n'obligeait. .... de n'avoir
pas faIt d'lnscflptIon Dl Vlse"a la glOIre et d'être mort obscur, sans al!-tre
ambition que celle du devoir grandement ef vaillamment accomplI. »
!tlél. d'hist. et d'archéol. Bret. 18iiii. T. l, p. 292 et suiv.

le sieur de Pratanros est Me Allain Le Baud, l'eceveur des '
décimes de l'évéché, au moins depuis 1575 (1) et qui en
1583, céda cet office (2). . .
Allain Le Baud acquit, en 1581, de la dame de Coatcan­
ton, les prééminences que cette seigneurie possédait, depuis
deux siècles, dans la chapelle dite Saint-jean-Baptiste
(aujourd'hui Saint-Pierre); et fut inhumé dans un des deux
enfeux voütéEi qreusés dans le mur (3).
C'est lui, ou son héritier de même nom, sieur de Pra­
tanros, que le chanoine MOl'eau nous recommande, en
1591, comme « homme d'affaire et expérimenté, bien af­
fectionné au duc de Mercœ ul'. » C'est lui que l'assemblée de
ville adjoignit aux députés qu'elle envoyait au maréchal
d'Aumont pour traiter de la reddition de la ville, que lui­
même avait désignés et au nombre desquels se trouvait le
sénéchal Guillaume Le Baud. Allain Le Baud manqua
payer cher la confiance des Quimpérois. Il parut devant
le maréchal (\ ayant au col l'écharpe de couleur» de la
Ligue, et pour cett.e raison le fougueux mal'échal vou-
lait le faire pendre présentement (4).
Le même ou son hél'itier de même nom était encore en
possession de Pt'atanros, en 1622. Cette année méme, cinq
uzaines de chevron en châtaignier furent fournis par lui
pour la reconstruction de l'hospice Sainte-Catherine (5).
Quelques années plus tard, le seigneur de Pratanros
était Jacques de Visdelou , second fils de Fl'ançoise du Qué-
(i) 1.1. juin, il signe une quittance en cette qualité. Fonds du chap
Arch. dép.
(2) Il céda son office à Jean Le Métayer, sieur du Mouster. Arch. de
évêché.
(3) C'est dans cette chapelle que repose M gr Graveran. Les écussons des .
arcades tumulaires devaient porter les armes des Le Baud: d'argent à une
quintefeuille de gueule. Monogr., p. 34,.
(4,) MOREAU, chap. XXX.
(5) Hospices de Quimper. BULLETIN ARCH. i883, p. 371..

lenec et de Gilles de Visdelou, et petit-fils de l.a dernière des
Lezongar de Pratanras (1).
Jacques est d'abord qualifié seigneur du Dellien (2), du
Hilguy (par. de Plogastel), seigneurie ayant haute justice
et patibulaires, qui lUl venait de sa mère; le Delien, ve­
nait de la succession paternelle. Un peu plus tard, il prend
le titre de seigneur du Pràtanros. Voici, je crois, comment
cette seigneurie était entre ses mains.
Jacques avait épousé en premières noces Mauricette,
fille de François du Châtel, seigneul' ou marquis de Mesle,
et de cette plaintive Marie de Keroulas, dent la ballade a
immortalisé les malheureuses amours (1626) (3). Mauricette
mourut sans enfants, l'année suivante, et Jacques Visdelou
épousa Marie de Lohéac, fille de Mathieu, procureur du
roi sous la Ligue (4) et de Marguerite Le Baud, fille ou
nièce d'Allain Le Baud, dont nous venons de parler, sei­
gneur de Pratanros. C'est par là, semble-t-il, que le titre
de seigneur de Pratanros est venu à Jacques Visdelou.
Jacques Visdelou était commandant de l'arrière-ban et
de la garde-c6te de l'évêché de Cornouaille, et en outre
lieutenant des maréchaux et juge du point d'honneur dans
le diocése. Jeune encore, en 1633, il eut rhonneur de re­
Saint-Michel. En 1667, quand il com­
cevoir le collier de
parut à la réformation, il exerçait enCOl'e ses fonctions; il
vivait
Jacq ues avait eu trois fils de son second mariage. Uun
d'eux nommé Sébastien eut pour parrain Sébastien de
Rosmadec, gouverneur de Quimper .
i ) V~ ci-dessus Pralanrollx, p. i93.
2) On trouve seigneur d'Elliant, d'Ellien, du D('Uien, des Liens. .
EU;ant a l'inconvénient d'introduire une confusion avec
L'orthogl'aphe
la paroisse d'Elliant, dont les Visdelou n'ont jamais été seigneurs-.
(3) Mauricetle était veuve de Maw'ice du Busquee, depuis 1.624. L'hé­
ritiére de [(eroullas, BEVUE HIST. DE L'OUEST, III, p. il et suiv.
(6.) MOREAU dit Mathieu (p. 1,60); on trouve ailleurs Mathurin.

L'alné, Guy, fut conseiller du roi au Présidial, alloué,
lieutenant cl'iminel, puis conseiller au Parlement en 1661.
Dès 1658, il est q ualifiè seigneur du Hilguy, de Pra­
tanros, '!enant de son père et de sa mère; et de seigneur
de Kervastar, de Coatfom, etc., dont il prenait le titre peut·
être du chef de sa première femme. Françoise de Ker-
bloyson.
comparut avec son père à la réformation de 1668;
Guy
par arrêt du 31 décembre de cette année, sur le rapport
de M. Descartes, le titre do chevalier leur fut confirmé.
L'ainê de ses fils, François, nè le 3 octobre 1655, et bap­
tisé à Saint-Ronan de Quimper, le 11 avril 1658, eul pour
parrain son grand oncle l'évêque de Madaure. Le :,22 février
1683 (La Chandeleur) il contracta mariage avec Suzanne­
Claude de ' Plceuc, fille de Nicolas de Plceuc de Kerharo,
Pierre de Lemo, et qui prend le titre de comtesse
veuve de
est qualifié chevalier, seigneur du
de Lémo. Lui-même
Hilguy, de Pratanros, Kervastar, Kergambadè, La Forêt,
Costeforn (sans doute Coatforn), Le Cosquer, etc. François
Visdelou habitait d'ordinaire son château du Hilguy, puis­
qu'il est dit paroissien de Plogastel-Saint-Germain; mais
les èpoux avaient un hôtel paroisse Saint-Ronan à Quim-.
pel'; et c'est là que sont nés leurs enfants.
Un fils, né le 2 février 1687 (Saint-Ronan), mourut le
lendemain; et une fille Marie-Françoise, née le 25 mars
1684, resta seule. Avant la fin de l'année 1701, elle était
-orpheline, et elle avait pour tuteur Julien Le Mauyc, sieur
de Keranguen (1).
Le 21 février 1703, elle fut mariée par Mgr François de .
Coetlogon, dans la chapelle de l'èvêchè, à Messire Fran­
çois-Roger Robert, chevalier, conseiller du roi en ses
conseils, intendant de justice, police et finances de la ma-

(i) Titre de Kerlot. Arch. dép. _

rine en Bretagne, et des armées navales de S. M. (1). L'acte
de mariage (La Chandelem) qualifie la mariée dame dn
Hilguy ou Hilliguit, du nom de sa principale seigneurie;
mais il n'est pas douteux qu'elle ne fût aussi dame de Pra­
tan l'os. J'ai sous les yeux de nombreuses Ci ui ttances don­
nées par Marie de Visdelou et son mari du fermage de cette
terre et une baillée donnée. pal' elle en 1741 (8 mars).
Pl'atanros chan­
A cette époque, en effet, le régime de
gea. La dame Robert donna pour neuf ans la taillée à do­
maine congéable, moyennant une rente égale au fermage
(270 li vres) « plus 50 livres de' beurre»; et elle vendit les
droits réparatoires pour la somme de 1,200 livres (~) .
Devenue veuve, Marie de Visdelou épousa le comte du
ne parait pas avoir eu d'enfants.
Guay, dont elle
18 février 17G3, elle était marraine, à Saint-Mathieu
de Quimper, de Nicolas-Marie Joseph de Ploeuc, fils aîné
du troisième mariage de son cousin, le marq uis de Ploeuc .
Elle est morte vers 1767 (3).
De son premier mariage elle avait eu trois enfants: il
ne semble pas qu'un seul lui ait survécu. Un de ses fils,
enseIgne de vaisseau, était mort en 1710. Sa fille, 1 Claude, fe:nme de Vincent de Lantivy, seigneur de Talhoet,
était morte avant 1763, sans postérité; son fils ainé, qui
avait été intendant de la marine à Toulon, ne figure pas au
nombre de ses héritiers, et il semble que ceux-ci soient tous
des collatéraux.
La liste nous en est donnée par une assignation notifiée
en janvier 1768, au nom de Fl'ançois-Marie, écuyer, hé-
(i) Arch. dép. B. 36.
(2) Audouyn, notaire, Qnimper. Enr. :1.7 mars :1.74:1.. C'était un
bail en premier détachement.
(3) Mais pas à Quimper, ni au Hilguy. Je n'ai pas vu l'acte de décès .

ritier de Marie-Françoise Robert, dame de Talhouet (1).
Au nombre de ces héritiers figure Marie-Perrine de Coet­
logon, comtesse de Carné et Jacques-François-Fortuné de
Bahuno, chevalier, seigneur de Kerollain. Il n'est pas dou­
teux que c'est comme héritiers et non comme acquéreurs que
nous les voyons l'un et l'autrl' en possession d'une part de la
succession de Marie de Visdelou : en 1768, Le Hilguy ap-
partient a la dame de Carné (2), et, un peu aprAs, nous
voyons' Pratanros aux mains de la famille de Bahuno .
Nous avons vu la dame Bahuno comparaître en justice,
en 1785, comme tutrice dé ses enfants mineurs, propriétai­
res de PJ'atanros (3). Douze ans aprés, l'ainédeces enfants,
Annibal-Paul Bahuno de Kerolain étflit jugé émigré (29 sep­
tembre 1793) et ses biens étaient séquestrés, Il fut fait
deux lots de Pratanros, savoir: le foud du convenant, com­
prenant34 journàux de terres chaudes, 9 de terres froides
et 7 de prairies, et les bois nommés bois de Pl'atanros, Coet­
ar-Moign et de la Fontaine, comprenant 48 journaux.
(1.) Suzanne de PlŒmc avait marié sa fille Charlotte de Lémo (du
1.e m~riage) à Jacques-Charles de Cleuz,' marquis du Gage, représenté
en 1.76,9, par son petit-fils Jacques-Claude de Cleuz, marquis du Gage,

Je trouve B 87. Mî r à la date du 20 janvier 1.768, la mention sui­
vante :
Mre Francois-Marie Robert, écuyer, mousquetaire de la l. re compagnie,
héritier sous bénéfice d'inventaire de Marie-Francoise Robert, dame de
Talhoët. demandeur, contre Marie-Perrine de Coetlogon, comtesse de
Carné; Mre Jean-Marie du Vergier, chevalier, seigneur ne Kerorlay,
mari et procureur de droit de dame Marie-Josèphe du Couédic; M re Jac­
ques-Claude de Cleuz, chevalier, seigneur marquis du Gage; Mre Jac­
ques-francois-Fortuné de Bahuno, seigneur de Kerollain; Mr" Fran­
çoiR de Penandrelf, chevalier, seigneur de Kerautret, tous héritiers de
feue dame Marie-Françoise de Visdelou, veuve en premières noces de
feu sieur Robert et en secondes de feu comte du Guay.
(2) 1.768, 1.3 .avril Procure donnée pour faire aveu en son nom. 1772,
13 décembre. Baillée des moulins du Hilguy.
. (3) i 7 8i. Opposition à l'appropriement de M. de Madec. Voir ci­
de3sus, p. 207. 1782, 1.2 janvier. Baillée à domaine .

Le 6 floréal an VI (25 avril 1798) les bois furent mis en
vente sur le prix de 8,667 francs évaluation de l'expert; la
seiziéme bougie s'éteignit sur une enchère portant à 102,000
francs ... mais 102,000 en assignats, c'est-à-dire moins du
10" de la valeur nominale (1).
Le convenant mis en vente le 25 floréal an VII (14 mai
1799) fut acquis par les domaniers au prix de 3,200 francs (2).
Reprenons maintenant la route de Quimper; mais gar­
dons nous de passe l' par le même chemin. Pour aller à
Pratanroux et à Pratanl'os, nous avons suivi la vieille route
qu'ont foulée autrefois les seigneurs du Juch et les Le Saulx;
pour en l'evenir, pl'enons une route qu'ils n'ont pas soup­
çonnée, je veux dire la voie ferrée : elle 'longe la COUI' de
Pratanros. L'itinéraÏt'e de ce point à Quimper n'est pas sans
intérét.
A notl'e droite, voilà le vaste enclos du Séminaire, aupa­
ravant couvent du Calvaire et plus anciennement manoit,
, de la Pal ue.
Nous voici sous l'ancienne route de Douarnenez, à la
montagne de la justice. Le gibet de Quémenet s'élevait à peu
de dist.:mce a droite du pont sous lequel nous passons.
Nous pescendons ensuite vers Kernisy ou Cl'éac'hmarch:
- Kernisy autrefois manoir, devenu en 1793, prison pOUl'
les personnes susp ectes, puis redevenu maison d'habitation,
est aujourd'hui un asile ouvert au repentir. En traversant
(i) L'écmt entre l'évaluation et le prix de vente s'explique par la dé­
es assignats : personne n'ignore qu'un louis de 21!, livres va­
préciation d
8,000 francs en papier. V. vente nation, vol. :1.4, n° 665 et
lait
vol. i8, n° 3l.t,l.t,.
(2) M. de Bahuno revenu de l'émigration r ecouvra quelques biens non
aliénés, car on le voit, en 181.0, faire des baux de ce, bIens en Pluguf­
fan. A vant l'émigration, comme depnis, il avait domicile à Henne­
bont. Enreg. 2l.t, novembre i81O.

son avenue faut-il rappeler Ue ne dis . pas saluer) la mé­
moire du sénéchal Le Baud ~ Il fut seigneur de' Kernisy,
il s'y retira en 1594, aprés sa révocation.
Plus loin, nous traversons à niveau la route nouvelle de
Douarnenez, puis celle de Locronan sur un viaduc; enfin
nous arrivons au pont sous lequel coulent les eaux limpi­
des du Stéir.
Arrètons nous un moment: si vous regardez en amont,
voilà, à quelq ue distance, perdu dans les peupliers et les
saules, le manoir des Salles; auprès de vous, sur la rive
gauche de la rivière, cette maison enguirlandée de lierre,
qui porte le cachet du XVI· siècle, c'est le manoir du Parc .
Vous auriez vu autrefois, à une cinquantaine de mètres
en aval du chemin de fer, un vieux pont fort utile, puisqu'il
mettait en communication cette partie de Kerfeunteun avec
la rue de la Providence et les routes de Locronan et de
Douarnenez. Ce pont empruntait son nom de pont Saint­
Yves à l'hôpi tal voisin placé sous ce vocable.
En continuant notre route, nous pouvons visiter le site
de l'hôpital Saint-Yves. Cette ruelle pavée et encore nom­
mée ru eLLe Saint- Yves donnait accès au pont. Il ne
reste du vieil hôpital que les murs de son enclos, et, dit-on,
une petite chapelle, servant aujourd'hui de buanderie (1).
Sortant du chemin que le remblais du chemin de fer a trans­
formé en impasse et reprenant la route c9mmlmale, nous
cotoyons à droite les dépendances d'une ancienne chapel­
lenie ditede Poulhaou; enfin nous rentrons en ville.
Les Salles et le Parc, que je viens de nommer, ont leur
histoire. Si vous le permettez, je vous la dirai un jour, et
en même temps celle de Troheïr et de Kerpaën (aujourd'hui
(i) Ce point mérite confirmation, ce pelit édifice étant séparé de l'en­
clos par le chemin public.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. T. XIV (Mémoires). 1.5

Kerben), deux manoirs situés un peu plus haut, sur les
bords du Stèïr.
histoire offI'ira, je l'espère, un peu plus d'intérêt
Cette
que celle de Pratanros. A Troheïr, à Kerpaën, nous sui­
vrons de curieux débats de ' dl'oit féodal. Aux Salles, nous
rencon (rerons un seigneur qui enflamma la colèl'e du
roi Louis XI, et manqua de susciter un~ guerre à la ' Bre-
tagne .
J. TRÉVÉDY,
Ancjen Président du TribuDal civil de Quimper .