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Bulletin SAF 1885


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Comptes des Miseurs de la ville de Quimper, en 1594, 1696 et 1597

M. le commandant Faty

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VIn

COMPTES DES MISEURS DE LA VILLE DE QUIMPER

EN FONCTION PENDANT LES ANNÉES 1594, 1596 et 1597,
A L'ÉPOQUE DE LA LIGUE EN BRETAGNE
Relevés par le Commandant FATY (1) .

Les documents relatifs aux évènements de la Ligue en
Bretagne, surtout. ceux qui concernent la ville de Quimper,
sont excossivement rares; très-peu sont parvenus jusqu'à
nous" et c'est toujours aux. Ménwires du chanoine Moreau
qu'il faut s'adresser pour en connaître q Jelques épisodes,
malheureusement incomplets. Aussi, doit-on saisir avec
en~pre~sement les renseignements qui peuvent jeter quel­
que lumièl'e sur cette époque mémorable, qui vit notre
province écrasée et pour ainsi dil'e ruinée, dans cette ter-
rible lutte occasionnée par nos discordes intestines.
Notre obligeant confrère M. Luzel, archiviste du Finis-
tère, ayant bien voulu nous comm uniquer trois cahiers où
sont insceits les comptes des miseurs de Quimper (2), pen­
dant les années 159-1:, 1596 et 1597, nous allons les exa-
miner et fail'e pat't à notre Société des recherches qui peu-

vent l'intéresser,
Les anciens t.i tres relatifs au budget de notre ville
sont peu nombreux; cependant, une annotation inscrite

( i) Notice lue dans la s~ance du 26 février 1880.
(2) Le lTIiseur d'une ville était un fon~tionnail'e chargé de recueillir
les recettes (üunicipales et de solJ rIes d ~penses de la cité; l'étymolo­
gie de ce nom vient de mise, vieuX: mot qui signifie dépense d'· z.:n
compte; misent' désignait donc une pel'sonne chargée de la dépense.
Quant à la recette, on la nommait, en terme de comptabilité, remise
d'un cumpte. Aujourd'hui, les comptables qui remplissent ces fonctions,
portent généralement le titre de receveur. .
BULLETIN ÀRCHÉ0J-' DU FINISTÈRE. Tome XII. (Mémoires), 10

sur une feuille de garde nous apprend que, jusqu'à une
certaine époque, on les recueillait avec soin; elle men-

tionne les comptes de 1475 à 1616 réunis en une seule
liasse. Mais, au XVIIIe siècle, une personne, qui étai t pro­
bablement chargée de la conservation des..al'chives, ajouta
et écrivit au-dessous de leur énumération; ces comptes

n~ont rien de remarquable; malencontreuse ietée qui fut la
cause dela déplorable destruction du plus grand nombre
d'entr' eux et notamment des plus anciens ..
Les comptes que nous com,pulsons sont fournis avec un
luxe de détails qui, de nos jOUI'S, seraient tl'ouves excessifs;
pour notre part, nous aurions mauvaise grâce 'd'adresser ce "
reproche aux honnêtes gens qui les ont établis, cal' c'est
précisément ce soin des petites choses qui nous a permis
de constituer ce court historique.

Compte de feu Mtloe ROLLAND LE DENIC, COITJmencé le pre­
mier janviel' 1594 et fini le 31 décembre de la dite année.
- Ce compte fut présenté le 15 avril 16U6 à la Cour des
Comptes de Bretagne, par Mtre Rolland, prevost tuteur des
enfants du défunt. Voici quels étaient les articles les plus
importants des recettes:

RECETTES.
RECETTBS ORDINAIRES
Deniers communs et d'octroi ..
Taille du mois de janvier ....
Taille du mois de mai. . . . . .

Pavage (i) et Yssue de la ville.

A reporter . .... .

(1) Le pavage était un droit qui se prélevait sur certaines denrées, à la
sortie des villes. .

Report . ..... , 1.473 09 ~
Devoir de 30 sous par tonneau
de vin (1). . . . . . . . . . .. 1.708 10
Devoir de 40 sous par tonneau

de vin

Total des recettes ordinaires . .
RECETTES EXTRAORDINAIRES

Devoirs du Papegaut (3). . . . .
Remboursement de dépenses non
effectuées . . . . . . '. . . . .

Somme pl>ovenant de la pancarte

de l'année 1593 ....... .
Reliquats et produit d'autres re­
cettes afférentes aux exercices
précédents, dépenses non j usti­
fiées reprises en recette.. . . . 6.899 »
res

Total des recettes extraordin .

EMPRUNTS
Emprunt pour satisfaire à ,qu'on
avait promis au sieur Dom.

Jouan, colonel de l'armée Es­
pagnole . . . . . . . . ....
Emprunt pour l'armée du duc .
d'Aumont .......... .

Total des emprunts. . . . 40.200 )}tI

Montant de toutes les recettes.. 56.881119

(1) Ce devoir ou impôt de 30 sous par tonneau de vin était très­
ancien, il avait été octroyé par le roi, peu de temps après la réunion de
la Bretagne à la France.
(2) Ce devoir avait été aulorisé par le duc de Mercœur, non seulement
sur les vins, niais il imposait encore par millier de fer 20 sous; iD sous
par muid de sel et 20 sous par tonn-eau de blé, froment et seigle, pour
subvenir au·x fortifications et autres affaires communes de la ville.
(3) Pendant la Ligue, les exercices du Papegaut furent suspendus; les
gratifiqations aCGordées aux vainqueurs furent attribuées aux travaux de
défense de la ville .

Somme qui représent.erait de nos jours Ulle valeur de plus
de 280,000 francs, somme énorme, a une époque surtout où
le pays était déjà ruiné et pri vé des ressources qu'il puisait
dans son commerce, autrefois flori ssant, et. dans l'agricul­
ture, alors insuffisante pour l'alimentation de la province.
Sans compter les dépenses que réclamait la sûreté de la
ville, il fallait subvenir, non-seulement aux exigences des
troupes alliées et nationales, mais encore satisfaire aux ré­
quisitions des bandes ennemies, qui rançonnaient sans pitié
une contrée dévastée par les misères de la guerre et pal' la
famine. Nous ne nous étendrons pas davantage sur cette
dont le chanoine Moreau et ses contem­
déplorable situation,
porains nous ont laissé un tableau SI horrible et si saisis-

sant.

Au nombre des articles de recette, 'nous avons mentionné
deux emprunts; nous allons indiquer dans quelles circons-
tances ils ont été effectués.
Le premier fut contracté pm' les habitants de Quimper,
« pour satisfaire il. ce qu'ilz avoient promys fournir au sieur
Dom Jouan de Laquila, (d'Aquila) collonel de l'armée espai­
gnole. » (1) Les ravages et pilleries de cette armée n'étant
retenus par aucun frein, le soldat non-seulement volait et
. maltraitait l'habitant, mais encore il dévorait le peu de
vivres qu'il possédait; enfin, d'après une vieille expression
militaire, il vivait largement sur le dos du paysan. Dans le
but d'arrêter ces violences, les bourgeois de Quimper, de
concert avec ceux des juridictions de Concarneau-Foues­
nant et Rosporden, Châteaulin, Carhaix et autres localités,
résolurent de s'entendre pour obtenir du colonel espagnol
la cessation de ces excès, et 1 ui promirent une somme de
15,000 livres, sur laquelle la ville de Quimper contribua '

(1.) Nous prévenons que nous avons reproduit les noms propres men­
le manuscrit, tels qu'Ils ont été écrits par le comptable,
tionnés dans

pour 7,200 ~ais nous verrons dans la suite que ce don
octroyé a titre gracieux ne produisit guère de résultat, pas
plus que les nombreux cadeaux en nature qui furent
adressés par la communauté de la ville au colonel espagnol. .
Voici le motif rapporté par le comptable au sujet du se-
cond emprunt, effectué SUl' la demande du maréchal d'Au­
mont, le vainqueur du colonel Dom Jouan d'Aquila. ' «( Le
comptable remontre que: en ' ladicte année 1594, deffunct
Monseigneur le Mareschal Daumont, lieutenant du Royen
ses armées et pays de Bretagne, fist entendre aux bour­
geois et habitans de la dicte ville que le long siège et fatigue
que la dicte armée auroit souffert au fort de Cranson, par
auparavant occupé par les Espaignols, l'auroit rendue en
telle nécessité, par la faulte qui se seroit trouvée des deniers

destinez a l'entl'etenement d'icelle, qu'il estoit de tout im-
possible de la rem 3stre en . estat et empescher les ra vaiges .
que faisoient sur le plat pays les gens de guerre de la dicte
armée. Pour empescher telle oppression, il auroit advisé
recourir promptement sut' les serviteurs de Sa Majesté la
somme de XI. M. escuz, par forme de prest et paiement. »
etc. (1). .
. Le contrat, daté du 14 octobre 1594, signé du duc
d'Aumont, stipule en outre qu'intéréts et principal seraient
remboursés, en l'espace de sept moif:. Les frais de ce con­
trat s'élevèrent a 10 1. 10 s (52 fr. 50 c.)

Une commission, dont faisaient partie les bourgeois Mery
Girondeau (2), Jean Furic et Sébastien Dubuc, fut instituée
pour réaliser cet emprunt, qui ne s'effectua qu'avec beau-

(i) Ici le comptable commet une confusion; il est plus exact dans un
il cet emprunt, qui fut imposé par le maréchal d'Au­
autre article relatif
mont, immédiatement après la capitulation de la ville de Quimper l dans
le but d'assiéger le fort de Crozon et de combattre vigoureusement l'ar~
mée e. .
(2) Girondeau était receveur de la Pancarte de Quimper .

coup de difficultés. Les habitants n'y purent contribuer que
pour 24,000 livres, « ne pouvant trou ver davantaige, ) et
l'on dut s'adresser, pour le parfaire, à 'Monsieur de Sour­

déac, gouverneur de Brest, qui avança 9,000 livres, moyen­
nantintérêt. Ce gouverneur, voulant garder l'anonyme,pour
des motifs restés inconnus, opéra ce placement sous le nom
de Mery Girondeau. Du 25 octobre au 14 décembl'e, les
commissaires versèrent, en quatre fractions, le montant des
33,000 livres, entre les mains du sieur Hus de la Bouche",:

tière, trésorier des Etats de Bretagne. Les sousct'ipteurs,
d'après les conditions, . touchèrent un intérêt de 8 010 par
an, intérêt qui leur fut payé dans la suite par les États de
Bretagne, qui prirent cet emprunt a leur compte .

Ainsi, le total de la recette de 1594,
s e eva a . . . . . . . . . . . . . . . .
Les dépenses de cette année montè-

rent à. . . . . . . . .. . . . . . . 10 • •

excède la
La mise ou la dépen~e
recette de . . . . . . . , . .

que la ville remboursa aux héririers Le Denic, en exé­
cution d'une ordonnance de la Cour datée du 17 mai 1613,
à la suite de l'apurement de ce compte" c'est-a-dlre 19 ans

après rexercice 1594. Cette tardive restitution n'eut lieu
qu'après bien des débats et la production de nombreuses
pièces, qui vinrent affirmer la réalité des dépenses contes­
tées au défunt comptable.
DÉPENSES
Nous ne pouvons énumérer ici par le menu toutes les dé­
penses de ce budget, qui s'élèvent a la somme de 57,917 1.
19 s 6 d. ; ,ce détail serait trop long et surtout trop fasti­
dieux; nous nous bornerons donc a les résumer età rapporter
celles qui sont susceptibles d'un certain intérêt.

Rentes ordinaires.
Sous ce titre, le comptable déclare avoir payé 24 liyres
au receveur des domaines du roi, ' et pareille somme à
Messil'e Charles de Lescoët, évèque de Cornouaille. C'est
ce que nous appelons aujourd'hui des im pôts directs; ils
étaient les seuls qui fussent dus au roi et' à l'évèque de
Quimper. Ces rentes étaient prélevées sur la taille du mois
de mai.
Gages et salaires des officiers et comm'is de la ville.
Au nommè Denys de l'Estang, greffier du
Conseil.
Conseil « estably durant les derniers troubles en ladicte
ville », 100 livres. Ce Conseil, élu sans doute par la corn':"
munauté de ville, peut ètre considéré comme un Conseil de
défense. •
Sergents du Conseil. ' . Aux deux sergents, pendant
l'année, 33 1. 15 s.
Canonniers. A Heùry BeJ,thou-, canonnier de ladite
ville, pour un an de ses gages, à 7 livres par mois, 84 livres.
A Jehan Kervern, ancien canonnier, pour deux mois de ses
gages, septembre et octobre, a 24 livres par mois, 84 livres.
Ce J ehan Ker~ern fut appelé comme auxiliaire, à l'époque

du siège de Quimper par le maréchal d'Aumont.
Au moyen':"âge, et longtemps après, les villes fortifiéea
entretenaient des canonniers. Un seul suffisait ordinairem.ent
pour le service de leur artillerie; ses principales fonctions
consistaient à connaître la fabrication de la poudre, surtout
du pulverïn servantd'amorce ~ a confectionner les gargousses
destinées aux pièces de canon, qui étaient alors d'un cali­
bre irrégulier, chacune d'elles ayant sa charge et son pro­
jectile particulier. Quand on établissait une batterie, on
lui donnait quelques aides, mais, il devait surveiller le char-
gement, pointer et mettre le feu. Son habileté était ordi-

nairement le résultat de l'expérience et de la pratique.
Quant à son savoir, il se bOl'nait à possèdee quelques for­
mules pour la fabrication et le dosage 'des munitions, la
confection des pétards et des mèches. Ce n'était certaine­
ment pas dans des traitétl d'artillerie que la plupart d'entre
eux puisaient ces connaissances, entre autres les canon­
niers de Quimper, Berthou et Kerver'n, qui ne savaient pas
lire et qui ne pueent signer la quittance de leurs gages.

Talnbour de ville. -Henry Helloret, tambour de ville de
Quimpel', à raison de six livres pal' mois, reçut la sornme
72 livres, pour l'année 159:l:. Le comptable nous apprend

qu'il signa lui-mème sa quittance .
Sonneur .de cloche de l'église Saint-Corentin . Jacques
Vallet toucha 108 sous, pour « avoir sonné hl campane lors

• des congrégatious et assemblées générales de ladicte ville,
en nombre de dix huict, à ràison de six sols cbacune, comme
il appert de son certificat signé de luy. ») Ainsi, ce fonction-
naire savait aussi signer. .

C'était donc une somme totale de 340 1. 3 s. octroyée aux
employés de la ville, ou 1,700 fI'. 75 c. de nos jours. Aujour­
d'hui Quimper ne s'en tire pas a si bon marché .
Payements aux gens de guerre .

Aux quatre capitaines Desrochers, Desforges, de Lestang
et V~llegueury~ commandant quatee compagnies du régi-
ment du comte de La Maignane, pour somme promise par
. les gens du Conseil, d'apl'ès leur ordonnance du 12 février
1594, 1335 livres.· Les quittances signées par les capi­
taines susùommés ne furent pas admises par la Commission.
Voici pour quel motif: « Pârce que le siellr comte de La
Maignane auroit reçu déjà en plus la somme de 149 esCuz

ainsi qu'un certain nombre de foing, paille et avoine, mon-

tant à la somme de 1872 escuz; les quatre quittances ren-

ainsi , qu'il
se pourvoIr VOlra
audict comptable pour
dues
l>avoir affaire. »
Nous ne savons si dans la suite Le Denic parvint à ren­
trer dans ses fonds. Cette ,réquisition avait été exigée, en
1593, pal' La Maignane qui, à cette époq ne, pressurait Le
pays bas. C'était un terrible chef de bande qui, grace à
Pintervention 'du baron de Molac, en 1586, avait évité la
potence et sOl'tit de la Bastille, où il était détenu depuis un
an par ordre d'Henri III « pour ses volel'ies SUI' terre et
sur mer. » Ce pillard sans scrupule ravagea, entre autres
paroisses, celles de Châteaulin, Plomodiern, Plounévez"
Quéménéven et Locronan~ sous prétexte de rafraîchir ses
troupes », ou, selon le r>écit du chanoine Moreau, « elles
firent une telle 'cure et pillage, qu'elles ne laissoient après
elles que ce q lli estoit tl'Op chaud ou tl'OP pesant. »
Encoul'agé par l'impunité, La Maignane résolut de venir
s'établir à QuÏIn pel' et en demanda l'a\ltorisation à l'assem­
blée de ville, qui, peu soucieuse de recevoir un pareil hôte,
employa tous les moyens possibles pour décliner l'invita­
tion. Les eomptes de Le Denic rapportent qu'à ce sujet, les

bourgeois lui écrivirent, les 1 el' et 2 janvier, que le 2 janvier
également, le Conseil « advisa et délibéra de faire entendre
par remontrance à Monsieur le duc de Mercœur, gouver­
neur de ce pays, Ie~ oppressions et ra vaiges faicts en
l'esvéché de Cornouaille par plusieurs troupes y estant
sous son autoT'ité. » Et dans ce but, il lui députa Jean
Rozerech, sieur de Pénanrun; conseiller au présidial de
Quimper, lequel, pour ses frais de voyage, reçut la somme
de cinquante écus. Le 8 janvier, M. de Mel'cœur, selon la
supplique qui llli avait été adressée, éCI'ivit au comte de

La Maignane, alors au Faou, pour lui faire de sérieuses
remontrances; mais, elles ne produisii'en t aucun effet sur
son subordonné, qui n'en continua pas moins ses exactions.
Le Denic paya '50 sous au messager porteur de la lettre. Le

28 janvier, le Conseil de ville délibéra de nouveau d'envoyer
un habitant a Locronan, vel'S La Maignane, qui s'y trouvait,
(( pour lui remontrer les viollances et rd,vaiges que faisoient
aulcuns soldats de ses trouppes S~ll' le plat pays et envyrons
. de la ville de Quimper, et le pryer d'y remeydier et empes­
cher telles pillel'yes. » Le nommé Calvez, qui porta la lettre
où étaient exprimées ces plaintes .. teçut 50 sous, et le clerc
qui l'écrivit, 5 sous.

Enfin, après l'échange' de plusieurs autres lettres, on
parvint a traiter. Le comte de La Mdgnane voulut bien se
retirer, sans doute après "(me convention qui accordait a .. ses
capitaines cette allocation de 1,335 livres que nous' avons

mentionnée plus haut. Nous ferons remarquer que les dates '
que nous citons précisent l'époq ue où ces évènements eurent

lieu. . .

A M. Jacob de May, sieur de la Rivière-Brossay, gen-
darmp, de la compagnie ·du sieur de Montbarrot, la somme

de 600 livres, par ordre de M. le Maréchal d'Aumont (( pour
récompense de son équippage, qu'il auroit perdu au siège

mis devant Quimper par le dict Mareschal» suivant quit-
tance du 15 octobre 1594. .

Par ordonnance du Conseil du 9 août 159-1:, payé au sieur
Dom Jouan de Laquila, colonel de l'armée espagnole, la
somme de six mille livres, sur celle de 7,200 livres que la .
ville de Quimper s'était engagée a payer audit colonel, avec
condition que son armée évacuerait le plat pays, suivant
quittance du sieur Dédrano, capitaine, datée de Rosporden,
le 13 août 1594 .
Eecilla, représentant Petro de Albino, trésoeier
. A Miguel

de l'armée de Dom Jouan, la somme de 1,200 livres resl.ant
a payer sur celle de 7,200 Iivr'es, d'apeès quittance du
17 août, signée Miguel de Ercilla et Petro de Albana .

Constructions, 7 éparations et entretien des tow's, murailles,
pavés, ponts, portes et barrières et autres edijices de ta

ville.

Ces différents travJ.ux, mentionnés en cent trente-neuf

articles, s'élevèrent à peès de 2,200 livres (11,000 francs).
La plupart avaient pOUl' but de mettre en état de résistance

la ville, q IIi s'attendait de jour en jour à être assiégée. On se
préoccupa d'abord de la tour Bihan, la position la plus

importante de Quimper, ver,s laquelle, dans les sièges pré-
cédents, rennemi dirigeait de préférence ses effort:;;. Ses
. défenses furent considérablement augmentees. D'après le
compte du miseur, on déblaya ses approches, en démolis-
sant les murs des jardins qui l'avoisinaient, on brûla la
maladrerie, nommée le Lazaron; « on perça des canno-

. nières» et on donna plus d'élévation aux murs, qui furent
consolidés. Il en coûta 240 1. 10 s. 9 d.

Nous voyons aussi que « la tour des moulins de l'esvéché,
regardant sur !)estang de l'esvéché -de · Cornouaille » fut
réédifiée; à cette époque elle était complétement en ruine.
Cette tOUI', par sa situation, était trés-rapprochée du mont
Frugy, où s'embusquaient les ennemis, qui dirigeaient de ce
côté un tir continu sur le quartier de l'évêché. A son sommet,
établit une plate-forme, sUl' laquelle quelques pièces
d'artillerie furent installées. Cette réparation s'éleva à

On mit aussi en bon état les portes de la ville. Celle

nommée Mèdaed exigea de sèrieuses réparations; on' en aug-
menta aussi les défenses. Une herse, qui coûta,60 1. 8 s .,
fut placée « près et hors de la porte ». Au-dessus de rédi­
fice,on construisit une solide plate-foeme pour y recevoir de
rartillerie; une seconde herse fut encore établie à l'in té-

. rieur, sous la voùte. Tous ces t ravaux coûtèrent 2941: 16 s .

- Le chanoine Moreau nous dit qu'à cette époq ue" il existait

. à Quimper six portes, nommées: Bihan) Saint-Antoine) des ,

Regaires, du Parc-ar-Costy (ou Saint-François) de la rue
Neuve et Médard. Le compte de Le Denic en mentionne
deux autres, celles de Sàint-Mal'c et de la rue Billy, aux-
, quelles on fit quelques légères réparations. Pour la pre­
mière le fOI'geur La Tl'oze fournit « une barre de fer com­
prins le clou pour l'attacher- 15 sols» ; pour l'autre, le même
forgeron reçut 12 sols « pour l'avoir accoutrée ». Peut-être
doit-on voir dans le nom de ces deux portes une erl'eur de
copiste; ou peut-étre aussi ne doit-on , les considérer que
comme deux simples poternes ouvrant une issue des rel).1-
parts dans les fossés de la ville (1).
Les ponts de Quimper furent réparés avec soin; on en
désigne trois, le pont Fer'myn (Finnin), le pont de Loc-
maria et celui de la rue N eu ve. Ce dernier reliait deux
portes, rune près de l'évêché et l'autre, à l'entl'ée de la rue
Neuve. Ces ponts, sur lesquels on traversait la riviére
l'Odet, étaient alors simplement construits en bois, ce

qui nous est démontré par les notes du miseùr, dans les~
quelles il n'est question que de ma.driers, de planches et de
barres de fer pour leurs réparations, qui s'élevèrent à en viron
120 livres. Il n'y est nullement fait mention de travaux de
maçonnerIe.

Nous ne saurions dire si, à cette époque, toutes les rues
de la ville étaient pavées; au sujet de ce chapitre, le miseur

ne dépensa que 7 l. 5 s. seulement pour « pavage autour
de la porte Médard. »
(i) A ce sujet, nous émettons une troisième conjecture, qui paraît être
la plus vraisemblable. Longtemps avant cette époclue, certaines rues ou
étaient pourvus de portes qui, en temps de troubles,
quartiers de Quim per
si fréquents autrefois, assuraient la sécurité de la ville. Amsi, la rue ,
la cathédrale Saint-Corentin jusqu'à la place Maubert,
Kéréon, depuis
le nom de Porsmen, en français Porte de pierre;
portait anciennement ,
il Y exi:,tait en effet un édifice de ce genre, qui la lim tait à l'est. Pas loin
de là, à la jonction de la rue Royale avec celle du Guéo\let, s'élevait
aussi une autre qui a tout récemment disparu. Il est ,probable que
ces portes Saint et Billy, mentionnées par Le Denie, appartenaient
à cette catégorie de défenses intérieures.

En outre, on éleva des boulevards, des éperons et des
terrassements qui, en s'ajoutant aux fortifications de la
ville, la mirent en situation de pou voit· repoussel' toute
agression et de se défendre, dans d'excellentes conditions.
Des ouvrages avancés fur'ent même établis dans les fau­
bourgs et sur la Terre-au-Duc.
La dépense de ce~ différfmts travaux s'éleva à prés de
mille livres. Ils furent poussés av~c activité surtout dans
les mois de juillet, août et septembre, au moment où l'on
prévoyait que le maréchal d'Aumont entrepr'endrait lesiége
de Quimper. On fit appel à des terl'assiers de Lamballe,
robustes ou vriers, qui rendil'ent d'excellents services, en
venant en aide à la popul.ation et en se chargeant ùes tra­

vaux les plus pénibles. Le Denie nous a conservé le nom
des membres du conseil qui ont survetllé et contrôlé l'exé­
cution de ces différents ouvrages; nous allons en citer

quelques-uns : François Kerguélen, Jean Furie, Michel
Lemal'ec, Allain Chevillard, Corentin Cal vez, Michû Allain,
Eustache Beaudouin et Hel'vé Pasquier.
On voit qu'à cette époque, la moyenne des salaires des
charpentiers, forgerons, maçons, couvreul'S était de 10 à
12 sous par jour (2 fr. 50 c. à3 francs), de~ manœuvres, celle
de 6 à 8 sous (1 fr. 50 c. à 2 fl' .); quant aux terrassiers, qui
étaient les plus nombreux, ils étaient payés à la tâche,
comme le démontré cet article: on dépensa 72 s. 6 d. ( pOUl'
gettons en plomb pour bailler et merq uer (mal'quer) ceux
qui portaient la hotte aux fortifications. »
Nous -trouvons enCOl'e un al'ticle de dépense qui rappelle
l'entreprise malheureuse de LAzonnet sur Quimper, en la
méme année. On sait que, dans cette circonstance, le sieur
de Grandville, averti à temps, partit d'Hennebont avec

40 salades (1) et environ 150 arquebusiers à cheval et arriva

(1) Ces cavaliers qui tiraient leur nom d'un casque d'une forme toute

à Quimper, le 6 septembre, vers six heures du soir. Après
avoir évité l'ennemi, il s'introduisit dans les douves et par­
vint jusqu'à la porte Saint-Antoine, qui était alors murée et
qu'on démaçonna, à la hâte, le sept àu matin, pour lui

faciliter 1 entrée de la ville. Voici ce qu'il en coûta pour
ef(ectuer ce travail: « à six maczons employez chacun une
journée à '.démaczonner la' p orte Sainct ·Anthoine de ladicte
, ville, pour faIre entrer en ice11e le sieur' de Grandville et sa
compagnie et icelle porte ensuite re rhaczonnée la somme de
60 sols. » Pour ens ourag ' l' ces OUVl'lers à activer leur
travail « on leur ,baillà et fou'rnyt 50 sols de painet de 'vin 1);
générosité dont le comptable ne-nous don ne plus un pareil
exemple. En ajoutant les réparations exécutées aux ferrures,
le tout monta à 7 1. 15 s. ' ..
Voici une singu.lière dépense, qu'on est étonné detrouver
au nombre de celles qui concernent les fortifications.
( A uroit ledict feu Le Denic payé à Gondefer, cordonnier,
soixante- trois sols pour trois soulles' accoustuméès · estre

baillées chacun an, le jour de mardy gras, au peuple de la-

dicte ville. » La soulle était une boule de foin recouverte

de cuir; elle servait à un jeu qui, aujourd'hui , a presque

entièrement disparu, en Bretagne. On voit qu'à cette époque,

l'allocation accordée aux amusements du peuple était des
plus modestes.

« A ultre de8panee tant poar aehapt d e poutdres et baltes

à canon., charroy et entretennement de L'artiLlerie, et auLtres
choses requis pour 8outenù' le siège mis devant ladicte ville
par jeu Monsieur le l~laresehat d' ri umont. »

Tel est le ti t t'e de ce chapitre,dans lequel nous apprenons
quelles furent les mesures prises pour l'a défense de Quimper
. particulière nommée salade, étaient aussi munis de for les cuirasses. On
peut les comparer à la grosse cavalerie de notre époque. Les écrivains
Înilitaires sont peu d'accord sur l'étymologie de ce nom; quelques-uns
pensent qu'il remonte aux croisades et qu'il rappelle la coiffure du sultan
Saladin.

qui, sans avoir oppos~ une sérieuse ré::tistance,serendit,le 12
octobre 1594, au maréchal d'Aumont, ' ~rois jours après son
arrivée devant la place, grâce à la falblesse de la garnison

et surtout aux discordes qui divisaient la popula,tion.
Cependant, les habitants s'étaientjmposé d'énormes sâcri-
fices et avaient pris toutes les précautions possibles pour

mettre ,leurs fortifications en bon état. ,Ils avaient songé

aussi a s'approvisionner d'armes et de munitions de guerre ..

ce qui offraIt de grardes difficultés, dans un temps où les
communications étaient si difficiles. Mais, un instant, la

fortune vint singulièrement- les fa voî'iser, sous ce rapport.
Un navire jlaman, c'est ainsi qu'il est désigné par le
comptable, avait été capturé a Penmarch, où il était placé

sous la garde des officiers de justice de Quimper. Il était .
charged'unegrandequantité « de canons, cOl'seletz, picques
et 'aultres munitions de guerl'e ». destinés sans doute aux
Royaux. Au mois de janviel'"la communauté décida que
Méry Gir'ondeau, bourgeois de la ville, faisan t partie du
Conseil de défense, irait fi Pennemal~ch, afin d'y prendre
- des dispositIOns pour le tranSpDrt de ces armes et de ces
munitions à Quimper. La somme dépensée pour cette opé­
ration s'éleva à 2~)5 livres (1,275 francs). Elle indique l'im­
portance de cette capture, dont nous ne connaissons pas
l'énum'ération des différents objets qui la composaient et qui
furent. déposés dans les magasins de l'artillerie, aIol's situés
sur le quai
Au moment de l'investissemei'lt, les approvisionnements
furent complétés. On acheta 170 liyl"es de poudre fine, qui
contèrent 144 1. 10 s. ; 2,280 balles ponr arquebuses
revinrent a 277 1. 8 s. Le forgeur La Tl'oze fabriqua six
balles d'artillerie (six petits boulets), qui furent payées
60 sous; elles étaient probablement destinées à Hn petit
canon d'un calibre- particulier .. Ce n'était pas une opera­
tion facile; peut-être ce forgeron fut-il g uidé par le canon-

nier de la ville, Henry Berthou. On ,employa 247 planches
de sapin pour faire des clôtures et établir des plates-formes
pour l'artillerie; cette fourniture monta à 331 1. 15 s. -
Quinze hommes r~çurent 9 1. 7 s. « pour mettre le canon
sur les murailles». On. acheta six arquebuses à mèche) à
8 livres l'une (40 francs).
Pour cacher la vue des maisons qui avoisinaient le palais 1
de l'évêché et qui étaient continuellement « Ïllsultées »
(inquiétées) par le feu de l'ennemi. partant du mont Frugy,
on plaça un rideau d'une certaine élévation sur les murailles
de cette partie de la ville. Cette précaution fut également
prise à .l'égard d'autres murailles, qu'on ne désigne pas,
mais qui, probablement, étaient celles du quartier Saint­
François. Dans ce but, on acheta 19 pièces et demie de toile
d'Olonne, à 12 livres; en ajoutant les clous, les cordes, les
ficelles etc. pour tes coudre et les tendre, on voit que cette
dépense s'éleva à 3301. 10 s. .

La ville de Quimper ... défendue par une compagnie dè

100 hommes, détachée du corps du duc de Mercœur, et par
plus de 1,200 habitants, tous armés d'arquebuses, sous les
ordres du gouverneur, le capitaine Saint-Quérec, aurait pu
certainement opposer une certaine résistance; mais, mal-

heureusement, ses défenseurs étaient di visés en deux partis,
à chaque instant prêts à ' en venir aux mains. Constamment
en étaL de méfiance, se surveillant mutuellement, ils se
préoccupaient moins de l'ennemi que des manœuvres de
leurs adversaires politiques; aussi, de chaque côté, pour
éviter les snrprises, les Ligueurs et les Royau x passél'en t·
ils les nuits qui' precédèr'ent la redd.ition de la place à sur­
veiller les portes et les l'emparts et à confectionner « dos
bouchons d'es(oupe, de soufft'e et de go ldf'On pour j '3ter et
éclail'er les m1ll'ailles durant la nuyct. » On en fit une
énorme consommation, qui monta a 19.1 1. 4 s. 3 d.
avec les autres frais occasionnés par le
Cette dépense...

a 1,721 livres 18 sols
siège portent le total de ce cha'pitre
3 deniers. '
Dons et qratiflcations accordées par.la ville et eommu­
nauté à pü;sieurs personnes « d'autorité et mérYie »et pour
frais d'affaires communes. . ,
Parmi ces personnages « dJautorité et de mérite », se
trouvait naturellement le terrible Don Jouan d'Aquila, com­
mandant l'armée espagnole, en Bretagne, dont les troupes

commirent tant de ravages, dans les paroisses qu'elles
occupaient.
le but d'obtenir sa bien-
Les habitants de Quim per, dans

veillance et surtout ·son intel'vention pour faire cesser ce

déplorable état de choses, tout en lui adressant leurs plain-
tes, jugérent a propos de lui offeir des cadeaux, dontle choix
nous fait supposer que ce puissant personnage avait un goût
prononcé pour les friandises. Nous ajouterons qu'a ces
cadeaux on doit ajouter 7,200 livres, qu'il reçut, au mois
d'août, et dont nous avons précédemment parlé. A ce sujet,

voici ce que nous apprend le compte de Le Denic. « Par
ordonnance et délibération du Conseil de la ville de Quim-

per,tin, du 16 mars 1594, il auroit esté advisé de faire quel-
ques pré::santz au sieur Don Jouan LaquilIa, collonnel de
l'armée espaignole étant lors en ce pays et ordonné au dict
feu Le Denic faire la des pance des dicts présantz, suivant
laquelle ordonnance, il auroit envoyé audict sieur Dom
Jouan: 105 livres de ressin (raisin) qu'ilauroit payé la somme
de 151. 12 s. (1). Pour une piecze de sucre pesant 25 livres,
. il auroit payé 15 1. 6 s. Payé aussi par ledict feu Le

Denic, 6 1. 5 s. pour 150 livres de pruneault, a 2 s. 6 d. la

livre. . Pour 500 livres de pommes doulces, 100 sols
tournois, a raison de 20 sous le cent. Pour 200 orenges,

évident que cet envoi consistait en
(i) En raison de la saison, il est

raISInS secs.
BULLETlN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. : _ . Tome XII. (Mèmoires). il

30 sols, à raison de 15 sols le cent. Pour des nouzelles (1)
d'espaigne, paya le dict deffunct 6 livres. Auroit encore
ledict feu Le Denic payé pour quatre barilz de confitures
pour présent au "ieur Dom Jonan, 25 L 10 s. Pour
12 livres dallemandes (amandes) sans cocque, 12 livres.
Pour deux milliers dallemandes en cocque 4 1. 10 s .
Pour deux poches à mettre lesdictes allemandes ... 40 sols.
Paya en oultre le deffunct Le Denic pour quatre bou­
teilles de vin blanc et clairet pr'ésantéesaudict sieur Dom
Jouan, 9 1. 12 s. Pour les bouteilles contenant le vin, payé
à Yvon Certain, pinthier, 75 sols. A Jean MOl'éano, qui
au l'oit esté avecq un garson et deux chevaulx porter les
dicts présents audict sieur Dom Jouan_.luy fust payé 70 sols. »
Cette libéralité ou « ces douceurs», suivant l'expression
du comptahle, coûtèrent à 1j3. ville, 1001. 10 s. (550 francs

de notre monnaie.)
On n'oublia pas non pl us le sergent-major de l'armée
espagnole (2), afin d'en obtenir les bonnes grâces « Auroit
aussi le dict deffunct payé la somme de 102 sols, pour six pots
de vins et deux cens d'orenges envoyées le 28 mars par les
habitants audict sergent-major de l'armée espaignole. »
. dicts
Le colonel Dom Jouan vint vers cette époque a Quimper;
il fut logé, aux frais de la ville, chez l'hôtelière Marie

Courier, qui reçut 9 livres. Au mois d'août, nouvelle
dépense de 41. 10 s., a l'auberge d'Ambroise MuHot. Nous
voyons eneore q ue,le 3 août, les bourgeois Méry Girondeau (3)
et Robert Baudouin (4) furent députés au colonel Dom J oU: -.n

. (i) Ces nouzelles étaient propablement des noisettes.
2) Ce grade correspond aujourd'hui à celui de chef d'état-major.
3) Méry Girondeau était fermier du devoir ou de l'impôt sur les vins.
(4,) Robert Baudouin, dit Castille, était apothicaire. C'était un ancien
nous connaissons, à cette époque, deux apothicaires à Quimper,
. soldat;
et Claude Paumier. A cette remarque, nous ajouterons que le chanoine
lui
Moreau, ainsi que les miseurs ne citent le nom d'aucun médecin ou chi­
dans la ville .
rurgien exerçant

par les habi tants de la ville pour lui renou veler leurs doléances
relativemen~ aux rapines exercées par ses troupes. Dans
cette ambassade, les présents ne furent pas oubliés; ils con­
sistaient en une barrique de vin de gascogne, accompagnée
de 'quelques fruits, qui coutèrent 55 1. 10 s'. Les bourgeois
de Quimper, ceux surtout qui étaient du parti du Roi, éprou­
vèrent une telle joie, lorsqu'on publia la capitulation de la
ville, que le même jour (12 octobre), ils s'empressèrent
d'offrir un grand dîner au maréchal d'Aumont ainsi qu'à
ses officiers. Si nous en jugeons par la carte à payer, le festin

fut des plus plantureux, Mathieu Léano, qui avait fourni le
, gibier et toutes les viandes, reçut 67 1. 10 s. ' Le pâtissier
Delye toucha 18 livres. On paya à Yvon Certain, pour
une pièce de vins rouge et pour 36 pots de vin blanc clairet,
60 livres, en tout 1451. 10 s'. (727 fI'. 50 c.).
Quelques gentilshommes, plusieurs chefs et des soldats-,
qui n'avaient pu trouver place au repas offert par la ville,
furent traités par Allain Chevillard; cette dépense s'éleva
à 105 l. 15 s. Enfin, le sieur Hardy, l'un des maréchaux
de l'armée du Roi, reçutle même jour 600 livres, sans doute
à titre de gratification et probablement aussi pour obtenir
de son intervention que la population ne fût pas trop fouLée
par les gens de guerre. .
On voit que Quimper faisait grandement les choses; la
ville, pendant cette année ~t pendant les précédentes, té­
moigna le même accueil aux chefs des Royaux et des Li­
gueurs. Probablement elle faisait contre fortune bon cœur,
et par politique, prenait tous les ménagements possibles, en
s'imposant de rudes charges pour obtenir de ses redoutables
hôtes qu'on ne ruinât pas trop la cité, par des contributions
ou des exactions, comme il était d'habitude, en ces temps
dp, guerre civile.
Ainsi, le duc de Mercœur, l'adversaire du maréchal
d'Aumont, passant à Quimper, fut logé et nourri dans une

maison particulière, aux dépens de la ville. Il ne nous a pas
été possible de préciser les frais qui en rés,ultèrent; seule­
ment nous voyons que le pintier Yvon Certain réclame une
somme de 32 1. 15 s. ( pour dommaiges et diminution pour
la vaisselle qu'il auroit prestée, durant le tems que Mon­
seigneur le duc de Mercœur auroit logé en icelle maison. »
- Entre autres cadeaux, sans compter quantité' de fruits,
on lui offrit !n 1. 10 s. de confitures fournies par l'apothi­
caire Claude Paumier, plus une pièce de vin, achetée
36 livr'es.
Quant au sieur de Goulaine, officier de l'armée de Mer­
cœur et son représentant à Quimper, ses frais d'hôtellerie
et gratifications réunis, montèrent à 600 livres « en consi­
dération des bons offices qu'il auroit rendus au bien des
affaires de la ville, en laquelle il auroit empesché y avoir
garnison. » Nous pourrions encore 'citer de nombreuses
dépenses de ce genre, mais n'insistons pas, ce serait dé­
passer les limites que nous nous sommes imposées; seule­
ment, nous terminerons en rapportant ' celles qui concer­
nent le sieur de Grandville, qui vint au secours de la ville,
si à propos, au moment où elle allait tomber au pouvoir
de Lezonnet. '
Le 7 septembre ]594, une partie de la compagnie du
sieur de Grandville fut logée chez la maîtresse d'hôtel Ca-
therine Gérault, qui reçut 63 livres pOUl' f['ais de logement
et noureiture; l'autre partie, commandée par le capitaine
Frac, fut hébeegée par les soins d'Eust,ache Baudouin,
bourgeois de la ville, qui dépensa 60 livres. Quant au sieur
de Grandville,il vint s'installer chez Adéline Mouault, hô-
tesse du Lion d'or (1), avec six ou sept personnes de sa

(i) L'hôtel du Lion d'or existe toujours; il est situé sur la place Saint­
c'est très probablement le plus ancien de la ville. D?après le
Corentin;
chanoine Moreau, cette hôtellerie existait alors place Médard; le cha­
noine fait probablement erreur, si ' nous nous en rapportons à des docu-
ments contemporains. '

, suite; sa dépense s'éleva à 249 1. 16 So Ce person.nage, dbnt
on nous a laissé un portrait des plus flatteurs, qui, d'après
le chanoine Moreau « estoit un gentilhomme presque en­
core escolier, n'ayant pas plus de vingt ans, mais plein de
belles qualités, doux, humble, vaillant et courageux; » ce

personnage, ajoutero~1s-nous: se distinguait aussi par la
délicatesse de ses sentiments et par son désintèressement,
exemple très' rare, a cette époque, surtout chez bien des
, gens de guerrr. Au moment de quitter son hôtesse, la
dame Adéline Mouault, et en prenant congé d'elle, il voulut
lui payer la dépense que lui et sa suite avaient faite, pen­
dant les quelques jours passés dans son hote1. Mais, a~s­
sitot plusieurs bourgeois, qui étaient présents, s'interposè­
rent, prièrent le sieur de Granville de ne pas payer et la
dame Mouauld de ne rien recevoir de lui, assurant que la
ville, en reconnaissance du service rendu par ce gentil­
homme, solderait certainement cette dépense, et s'offrant de
la prendre à leur compte, en cas de refus. Les choses, pa-
o ' raît-)l, ne se passèrent pas aussi coulamment; la ville
refusa d'abord d'allouer cette somme au miseur Le

Denie,' qui, sans son auto['isation, l'avait imprudemment
avancée. Il en résulta un procès, seulement terminé au

, mois de janv.ier 1596, qui donna raison au comptable.

Suivent encore bien d'autres frais de logement et d'hô-
tellerie, occasionnés par les officiers et les messagers de
passage en la ville de Quimper, nous en passerons le détail;
qui n'a qu'un intérêt secondaire, '
Les bourgeois., qui étaient si généreùx au sujet des étran­
gers et surtout des gens de guerre à qui ils offraient l'hos­
pitalité, usaient égaement de gracieux procédés à llégard '
des autorités les plus im portantes de leur ville, en leur

adressant ' des cadeaux, dans le but « d'obtenir leurs bons
offices pour les affaires de la ville', » Ainsi, nous voyons
que le gouverneur, le capitaine Saint-Quérec, reçut pen-

dant l'année, quatr'e pièces de vin de Gascogne, plus 100 li­
vres, à titre d'indemnité de logement, dépense qui s'éleva à
. 283 livres (1). Le sénéchal, pour sa part, voulut bien ac­
. cepter trois barriques de vin du même crû, montant a la
somme de 1311. Il s. Le procureur du roi en reçut aussi
deux, revenant à 86 1. 10 s.
Quoique la communauté de Quimper eut autorisé ces
différentes allocations, nous remarquons, en marge de ces
articles, une observation de la Cour des comptes, qui veut
bien, pour cette fois, les admettre, en raison des circons-
_ tances et des malheurs du temps, « mais que pour ce qui con­
cerne le sénéchal et le procureur du roi, qui ne doivent
prendre aulcune chose des c1icts habitants, il ne soit plus, à
l'avenir, procédé de la sorte. )
Citons encore cet article: dépense du prédicateur qui
auroit, au di ct an, presché le Carême en la ville de Quimper,

Enfin, ce chapitre relatif aux dons., gratifications, ca­
deaux « douceurs », etc., s'élève à plus de 3,500 livres.

« Praix pour affaires et escriptures, voyages â messai-

gerles. »
C'est sous ce titre que le miseur Le Denic présente un
long chapitre donnant connaissance par le « mynut » (menu)

des dépenses que la ville dut solder relativement aux nom­
breuses affaires de différente nature occasionnées par les
évènements de cette époque .
Au nombre de ces affaires, il en est une surtout qui nous
a paru intéressante, cell"e qui concerne les députés que
Quimper envoya, en 1594., a Dinan, où le duc de Mercœur,
chef de la Ligue en Bretagne, essaya d'y réunir un parle-
ment pour l'opposer à celui de la province. Ce ' parlement

(i) Il demeurait dans une maison située place Maubert.

éphémère a laissé peu de traces dans notre histoire; a
peine en est-il fait mention .

Par ordonnance et délibération du Conseil de la ville, en
date du 30 mars 1594, il fut décidé qu'on enverl'ait deux
députés aux États, convoqués à Dinan pour le mois d'avril,
par le duc de Mercœur. Allain Le Guirieuc, sieut' de Les­
conan (1) et Pierre Guégf\l1t, boul'geois de Quimper, Jurent
désignés pour remplir cette mission, et afin de les indem­
niser de leurs frais de voyage et de séjour à Dinan, il leur
fut alloué une somme de 390 livres. Au moment du départ,
on eut soin de leur remettre trois copies d'un mémoire re­
latif aux affaires de la ville, qu'ils devaient soumettre a
l'assemblée; ce mémoire concernait particulièrement « cer­
taines charges et informations faites sur le comte de la
Maignane. » Les députés de Quimper se mirent aussitôt
en route, voyagèrent d'abord sans incident; mais, en arri-
vant à Moncontour, petite ville, peu distante de Dinan, ils
furent arrêtés par les royaux, qui les incarcérèrent. Cette
fâc~euse nouvelle parvint bien vite à Quimper, où elle
produisit la plus grande émotion, émotion d'autant plus ,
vive qu'on ignorait le lieu de leur détention.
messager, nommé François Tanguy, fut
Aussitôt, un ,
adressé,le 6 avril, au duc de Mercœur, qui se trouvait alors
à Redon, pour lui porter 'une lettre « l'advertissant de la
prinze des députés de la ville allant aux Estats et,le sup­
plier de pourvoir à leur délivrance. » Tanguy, pour accom­
plir cette mission, reçut douze livres. En même temps, on
députa les sieurs de Kel'vallès et Jean L'honnoré vers Le-

zonnet, qui commandait à Conq (Concarneau), pour le prier
« de moyenner la liberté des deux prisonniers. » Les frais

(i) Le Guirieuc, sieur de Bonescat et de Lesconan était avocat du roi
de Quimper. NQus reviendrons plus tard SUI' les aven-
au Présidial
de ces deux infortunés députés .
tures

de voyage s'élevèrent ' à douze livres. Le même messager
Tanguy reçut encore douze livres, pour aller à Lesneven;
on pensait qu'il pourrait y apprendre le lieu où les dèputés
étaient détenus. .

C'est le 16 avril que l'on connut, . par les députés eux-
mêmes, qu'ils étaient en prison à Moncontour; leur lettre
étaÏL adresséê au sénéchal et aux habitants de Quimper. Le
24, niême mois, les bourgeois et habitants de la ville,
assemblés en leur maison commune, délibél'èrent sur la
délivrance de leurs députés, « prins prisonniers de guerre à
Moncontour et décidèrent que Riou Kerguelen, bourgeois .
d'icelle, seroit envoyé au dict Moncontour, avec mémoires,
instructions et argent pour frayx de voiage. » A ce sujet,
on lui remit une somme de 90 livres.
Nous ne savons quelle suite eut cette affaire, car nous

voyons que,. quelques jours après, les prisonniers furent

transférés à Ploërmel. 1
Toutes ces démarches étant restées sans résultat, le 3 juil­
let, les habitants de Quimper tentèrent un nouvel effort, et,

pour le rendre plus efficace, ils résolurent d/envoyer une
ambassade imposante ... tant par le nombre que par la qua­
lité des personnes qui en faisaient partie. Elle se composaIt
de nèuf députés: les sieurs Vincent Rozerec'h (1), Pierre
Jaureguy, Claude Rousseau, Yves Allanou (2), Allain
Chevillard (3), Pierre Auldroict, Michel Le Maree (4), Pierre
Dariette (5), et Martin de la Masse (6), à qui on accorda
pleÎns pouvoirs. Ils furént autorisés àse rendre à Ploërmel,
à Dinan et partout où leur présence serait jugée nécessaire;

(1) Vincent Rozerec'h, sieur de Penanrum, écuyer.
(2 Yves Allanou, avocat au Présidial.
(3 Allain Chevillard, riche négociant.
(11 Michel Le Marec, sieur de Kerbasquen .

()) Pierre Dariette, négociant marchand de fer .
(6 Marti!i de la Masse, contrôleur et. garde de l'artillerie et des muni­
tIons de QUImper.

pour leur sécurité ... on obtint des sauf-conduits signés des

chefs des deux partis, et enfin, comme frais de voyage, on
leur accorda 180 livl'es. .
Le succès couronna-t-il les démarches de cette députa-

tion? Nous en doutons, car nous voyons que ... le 22 juin et
le 18 juillet, les prisonniers s'ad·ressaient encore au séné-
chal et aux habitants et leur écrivaient de leur prison de
Ploërmel. A leur rentrée de captivité, la ville dût certaine­
ment les indemniser des pert.es qu'ils épl~ouvèrent. Si nous
nous en rapportons à cet article de dépense, datée du mois
de novembre, qui confirmerait cette assertion: « 75 livr~s
pour deux baricqu~s de vin de Gascoigne baillées par le
au sieur de Lesconan, l'un des députez de
dict feu Le Denie
Quimper, pour aller aux Estats en J'année 1594, à valloir
sur ce qUIluy estoit due parîcelle ville, tant pour recom­
panse de partye des pertes et dommaiges par luy souffertes,
ayant esté prins prisonniers. )) Il est probable que l'indem­
nité promise figure dans les comptes de l'année suivante,
q!-le nous ne possédons pas, malheureusement.
Les habitants de Quimper, voyant leurs députés sous les
verroux, et sans doute, ne se faisant pas illusion sur les
difficultés qu'ils éprou veraien t pour obtenir leur liberté, dès
le 18 avril, dans le but de ne pas laisser leurs intérêts en
souffrance devant le parlement dé Dinan, décidèrent par
une délibération prise en assemblée générale : « qu'au
lieu et place des sieurs Allain 'Guirrieuc et Pierre Guégant,
prins prisonniers, iceulx bourgeois auroient nommé et
députté Mtre Jan Rozerec'h ... sieur dè Penanrun (7) et Hervé

de la Raye, sieur de Kerguidu; auxquels auroit esté déli-
béré bailler mémoires et argent pour leur voiage.)) Les
nouveaux élus se mirent en route le 21 ; l'allocation qui

(7) Jean Rozerec'h était probablement le frère ou un parent de Vincent .

leur fut accordée s'éleva à 240 livres, plus d'autres menus
frais, pour la conduite de leUl""s chevaux.
Par « messaigeryes » le comptable désigne les frais occa­
sionnés par les ambassadeurs, les députés et même les plus
modestes messagers chargés, par les habitants de Quimper,
d'une mission près les chefs des armées amies ou ennemies,
les grands personnages et les municipalités de la province.
Le total de la dépense occasionnée par ces frais s'éléve à
un chiffre considérable. En ces temps de troubles et d'oppres­
sion, où chaque parti était tour à tour vainqueUl' ou vaincu,
la ville faisait tous ses efforts pour éloigner les gens dé
guerre, que les privation!3, les misères. de cette pénible et
longue campagne et surtout leurs mœurs farouches et
dégagées de tout scrupule rendaient si redoutables. Aussi
les habitants ne négligeaient aucune démarche pour éviter
ces hôtes dont les excés auraient infailliblement occasionné
leur ruine. Ces messages avaient encore pour but de si­
gnaler aux chefs les ravages exercés par leurs soldats, soit
dans les environs de Quimper, soit dans les paroisses rurales,
plaintes assez inutiles, dont nous avons déjà entretenu nos
lecteurs et qui, malheureusement, n'apportaient aucun
remède au mal. Enfin, on voit de nombreux messages adres-
sés aux localités pour différents motifs.
C'est encore ave.c l'exigeant et insatiable dom Jouan que

nous voyons les habitants de Quimper entrer en pourparler.
Ce colonel espagnol sait prendre toutes ses aises, dans le
pays qu'il occupe; lui faut-il des voitures pour transporter
les bagages de son armée, lorsqu'elle change de cantonne-
ment f Vite il s'adresse à la communauté de ville, qui publie
aussitôt qu'on devra mettre à sa disposttion les chariots et
les attelages dont il aura besoin. Les chevaux de sa cava­
lerie sont-ils déferrés, à la suite d'une longue et pénible
marche? Pour les remettre promptement en état, il réclame

à Quimper-quatre maréchaux-ferrants, qui lui sont immé-
diatement envoyés.
Le 24 mars 1594, la ville lui adressa un député, Pierre
Auffret, pour obtenir un passeport et une escorte afin de
faciliter le transport des succulents cadeaux don t~ous avons
donné plus haut la longue énumération. L'escorte envoyée
à Quimper fut largement hébergée aux frais des habitants.
Vers la fin du même mois, le Conseil députa vers ce
colonel, probablement peu reconnaissant des (( douceurs »'
qu'en lui avait adressées, six de ses habitants: savoir, au
nom de l'église, le sieur du Marc'hallach, chantre et cha­
noine de Cornouaille, comme représentant la noblesse, les
sieurs de Kermoguer et de Beaucourt, ainsi que les nommés
François Kerguelen, Pierre Auffret et Martin de la Masse,
choisis parmi les bourgeois de la ville. Cette députation
avait pour mission (( de remontrer les oppressions et ruyne
que la dicte armée espaignole apportoit au pays circon­
voysin et tascher de la faire desloger. ») Les frais ' de cette
députation, qui se rendit à Locrenan, s'élevèrent à 341. lOs.
La démarche de l'ambassade ne produisit aucun effet; à
son retour, le Conseil de ville, ayant appris que dom Jouan
avait l'intention d'occuper Quimper, crut dans cette grave
circonstance, devoir faire acte de fermeté, ce qui était peu

dans ses habitudes. Il envoya donc immédiatement le cha­
noine du Marc'hallach et Pierre Guégant près du colonel
espagnol (( avec lettres missives de la part d~s dicts habi-
tants et le prier de ne trouver mauvais si iceulx habitants
refusoient l'entrée de la ville aux soldats de ses trouppes. »
Plusieurs députations furent envoyées au sieur de Lézon-

net" relativement à des affaires que le comptable n'indique
pas. La ville aussi eut de fréquents raFports avec le comte
de la Maignane; elle l'invita par deux fois à venir à Quim-
per, afin de s'entendre avec le duc de Mercœur, pOul'
délibérer (( Sl~r certaines dispositions à prendre au sujet du

bien de la ville. )) La Maignane, soupçonneux et peu ras-
suré, ne crut pas devoir assiBter à la conférence. De nom­
breuses lettres lui furent encore adressées, à Pont-Croix, a
Carhaix et en différents lieux, pour des motifs qui nous sont
mco.nnus.
La correspondance ne fut pas moins active avec le duc
de Mercœur, à qui l'on écrivait fréquemment. Nous voyons
qu'une ambassade lui fut adressée le 6 mai 1594, à Dinan;
tenaient les États; elle était composé-e du chanoine
où se
du Marc'hallach, de Pierre Kergadelen, sieur du Dresnou,
écuyer, et de François Kerguelen, sieur de Kervalles ; «( pour
empescher que le sieur de Goulleyne n'eust logé en le gou­

vernement de la dicte ville de Kempert et esvéché de
Cornouaille. )) Les frais de cette mission s'élevèrent a
126 livres.
Il est encore fait mention d'une autr'e ambassade envoyée,
le 8 juin, « pour empescher qu'il n'y eust garnison dans la
dicte ville de Quimper et lever l'impression qu'avoit le dict
duc de Mercœur de la mauvaise volonté des dicts habitants
à son service, et pour cest effect commis et députtés le
sieur du March'hallach, chantre de COl'nouàille, de Bodoyer
et Jan L'honnoré, et ol'donné au dict feu Le Denic leur
payer dadvance pour les frai x du dict voiage la somme de
six 'vingt eecus. )) Cette démarche des habitants nous prouve
quel prix ils attachaient a l'estime du duc de Mercœur.
Nous trouvons aussi quelques articles concernant les rap-
ports de la ville avec le célèbre et féroce La Fontenelle. -
Le 12 février 1594, le messâger François Legal -reçut
6 1. 15 s. « pour sallaire et journées de voiage qu'il auroit
faict a Douarnenez, vers- le sieur de Fontenelle, pour luy
porter lettre de Monsieur le duc de Mercœur.)) , « Paya le
dict feu Le Denic, le 7 mai, a un messaiger envoyé du
commandement des dict bourgeois et habit~nts, . à Locor- __
nan (Locl'enan), porter lettre au sieur de la Fontenelle y es-

tant lors 20 sous.» « Pour la des pance du sieur du Mar­
ch'hallach chanoine de Cornouaille, et Rubien, députtez de

tin
de la ville do Kemper pour aller à Locornan trouver le

sieur de la Fontenelle, 72 sous.» « A un messaiger en-
voyé du ~ommandement du capitaine de la ville à Sainct
Germain, pour découvrir où estoient les teoupes de la Fon­
tenelle, luy fust payé 15 sous pour ce. » « Au sieur de
Kerdaniel, soldat des gardes de feu Monseigneur le duc de
Mercœur, venu ' à Locornan faire desloger les troupes du
sieurde La Fontenelle y estant, la somme de six escuz vall~n t
18 livres, la dicte somme payée du commandement des
dicts bourgeois, ' en présence de Robert Baudouyn et Yvon
Grasset, le 15 du mois de may 1594. » - « Pour la ,.des­
pance 1'aicte par le dict sieur de Kerdaniel.) en la maison de
tin
Marie Roudeau, en la dicte ville.de Kemper ,et pour le sal- _
laire d'un homme qui luy a Ul'oit esté baillé pO Uf' le conduire
à Locornan, la somme de douze livres. »
Au nombre des députés choisis par la ville, nous voyons
souvent figurer le nom du chanoine du Marh'hallach., qui
n' ;1 ésitait pas à accepter les missions les plus ingrates et

même les plus périlleuses) en se mettant en rapport avec
des hommes aussi redoutables que La Fontenelle et La Mai­
gnane, gens perfides et sans scrupule, dont les cruautés
bien connues imposaient un effroi que beaucoup de per­
sonnes n'eusent pas osé affronter. La maison du March'hal-

lach, une des plus anciennes de la Bretagne, compte plu-
sieurs de ses membres qui ont prouvé que l'abnégation et
le courage sont héréditaires dans cette famille. Nous en
trouvons encore un exemple, à une distance de troIs siè­
cles de la. Ligue, en la personne d-'un digne et vénérable
.. ecclésiastique, chanoine aussi de la cathédrale de Quimper,
dont le dévouement et le patriotisme lui ont acquis la r~s­
pectueuse admiration de ses concitoyens .
La correspondance de Quimper avec les localités envi·

ronnantes était très-fréquenté; comme nous l'avons déjà
dit, elle avait surtout pour but de s'avertir mutuellement
du passage et du stationnement des tl'oupes des différents
parties qui parcoul'aient alors la Bretagne et de demander
aide et protection pour se débarrasser de ces hôt~s incom-

modes,' dont les exigences ruinaient le pays. Nous nous
bornerons à citer quelques cas. Au mois de mars, un

messager, venu de Châteaulin, apporte une lettre aux ha­
bitants de Quimper « pour les advertir qu'il y passoit quel­
»; le messager reçut 40 sous. On
ques compaignies
donna 6 1. 13 s. à trois messagers pour porter des lettres
aux habitants de Pont-Croix, Audieme et Douarnenez. -

Le Il mai, François Lequelen fut envoyé à Penmarch

« pour les affaires de la v~lle, payé'12 1. 10 s. tant pour sa
despance et dung homme de pied que louaige de son che­
vaL » Françoi~ Legal reçut 40 sous pOlll' avoir porté
une lettre aux habitants de Douarnenez. Un messager
chal'gé d'une lettre d'avertissement, datée du 3 septembre,
pour Morlaix, fut payé 60 sous. Notons encore que tout
porteur d'une missive adressée aux habitants de Quimper
recevait une gratification proportionnée à . l'importance du
personnage qui l'expédiait. Ainsi, les messagers des ducs
d'Aumont et de Mercœur et de la Maignane étaient large­
ment rènumérés; on leur accordait de 6 à 12 livres. '
A cette époque de guerre civile, les habitants de Quim­
per étaient, pour ainsi dire, presque constamment bloqués
dans l'enceinte de leur ville. Ignorant ce qui se passait au
, dehors, même à petite distance, et redoutant à tout moment
d'ètre surpris, ils n'avaient d'autre moyen, de se procurer
des nouvelles, qu'en en voyant aux environs des émissaires
connaissant parfaitement le pays. Ces braves gens, investis
d'une mission toute militaire, allaient en reconnaissance ,
se mettaient à la recherche des troupes, observaient leur
marche, s'enquéraient de leur nombre et des lieux qu'elles

devaient traverser ou occuper. En rendant compte de leurs
observations, ils ne manquaient pas de signaler les désas­
tres et les rava ges occasionnés par les gens de guerre, dans
la contrée qu'ils venaient d'explorer. Les personnes qui
remplissaient cette mission pleine de périls étaient ~ssez
nombreutes et ne balançaient pas, pour une modiqu'e rétri­
bution, a se lancer dans des aventures où leur vie était en
Jeu. .
On se préoccupait surtout de l~armée espagnole, la tee­
reur du pays; on cherchait a connaître ses évolutions. Les
troupes qui la composaient, après avoir épuisé et réduit a
la misère un canton, sous prétexte de se l'afl'aîchir~ allaient
s'installer dans un autre, qui . ne tardait pas a subirlè
même sort. D'après les dates données par Le Denie, on peut
suivre les mouvements de cette armée. Ainsi, au mois de
mars 1594, les bourgeois envoyèrent deux messagers a
Kerahès (Carhaix) « pour descouvrir si l'armée espaignolle
estoit deslogée du dict Kerahès (Carhaix). » Ifs reçurent
6 1. 10 s . . - Le 9 avril, ces messagers retournèrent au
même lieu, pour s'assurer si l'armée du roi avait occupé
cette ville, après le départ de l'armée espagnole; on leur
alloua 4 1. 10 s. Le 15 avril, le commandant de la ville
de Quimper envoia un émissaire qui reçut 70 sols, pour
s'informer de nouveau si les compagnies du roi étaient
réellement logées a Carhaix et a Châteauneuf. Au mois .
de juillet, on l)aya .60 sols a un espion qui fut à Crozon
pour « savoir si les gallères d'Espaigne y estoient arri­
vées. » Au même mois, toujoUl·s pour avoir des nou­
velles, un messager fut chargé de découvrir si les Espai­
gnois étaient revenus à Carhaix, ou si cette ville était oc­
cupée par d'autres troupes; on lui alloua 50 sols: Au
mois de novem bre, nouveaux émissaiI'es expédiés à Scaër,
Châteaulin ' et Locrenan, pour sur'veiller l'armée de dom
Jouan; à ce sujet, on leur paya 10 livres. ·Pour d'autres

motifs, nous voyons qu'au mois de juin, on donna 60 sous
à deux messagers qui auraient été au Sainct et à Bannalec
• pour avoir des nouvelles de l'armée du roy. » Au mois
d'août, on envoya à LOCI'e~an, pour s'informer ou ,...était la
garnison de Brest, qui avait fait une sortie; on alloua
13 sols a l'émissaire. Mème mois, payé 25 sols., pour

découvrir ou était la compagnie du sieur Lezonnet, con-
duite par le sieur de KeraI!collan. A la même époque,
donné 60 sols à un homme expédié à Landerneau, pour s'in­
former s'il y avait des gens de guerre dans cette localité.
- Le 3. septembre, un l1'lessager reçut 4 1. 10 s. ~.our s'as-
surer si la ville de Morlaix cc estait réduicte en robeissance
. U :uroy.» Le 8 septemb~e, on paya, du commandement
de la ville, 40 sols à Jean Fenyn c( pour descouvl'Îr' les en-
vyeons dicelle. » Au nombre de ces émissaires, on en
trouve deux qui furent chargés, le 21 fuin, d'une mission
secrète pour Daullas (Daoulas), Landerneau, le Faou, et en

outre de s'enqéurir ou stationnait. }'at'mée du roi; on leur
alloua 8 livres. Le même chapitré nous appl'end que, le
17 septembre, on donna 18 sols à Blaise Guérin et au tam­
bour de ville «. pour avoir "faict Ü'oys bannyes par la ville
tin
et forsbourgs de Kemper , portant commandement à tous
habitants d'icelle de se munü' de vivres. » On s'attendait
alors à être assiégé par le maréchal cl' Aumont. Aussitôt
après la capitulation de Quimper, le même maréchal fit
publIer par le sergent Louarn une ordonnance c( portant
commandement a toutz .solda,tz qui auroient porté les armes
au service du duc de Mercœur de , vuider la dicte ville. »
Cette bannie coûta 50 sols. Au moment ou le maréchal
d'Aumont était occupé au siège de Crozon, une panique se
répandit à Quimper. On s'attendait à y être attaqué par
l'armée de Dom Jouan, qui se trouvait à Plomodiern. Le
sieur de Mont.barrot, qui avait lagarc1.e de la ville, fit publier
cc certaines ordonnances portant commandement à toutz

gentilshommes estant dans la dicte ville de tenir leurs
armes prestes,afin de monter à cheval,lorsqu'il en eust esté
besoing. » L'huissier Legault,qui fit cette publicat.ion,reçut
30 sols. -

Nous pourr'ions encore citer' de nombreux al'ticles de ce
genl'e, Inais nous nous arrétons, pour ne pas dépasser
les limites que nous nous somJ:),1es imposées. Seulement,
nous voulons faire part à nos lecteurs d'une particularité qui
a attil'é notre attention. A eette époque" les différentes
administrations de Quimper, notamment la eomrpmiauté
de la ville, ne possédaient. pas de secrétaire. Lorsqu'on adres­
sait, soit ~n rapport au Padement, soit une lettre à un haut
personnage et même à un simple pal'tÎculier, 'on recourait
à un clere ou à un écrivain de profession, qui la rédigeait.,
moyennant un salair8 débattu à l'avance. Ces praticiens,
outre une belle écriture, possédaient probablement des for­
mules indispeil~ables ou usitées en ce temps-là. Leur talent
en calligraphie ne devait pas les enrichir, car nous voyons .
que le salaire qu'on leur accordait était des plus modestes.
Citons quelques exemples:
5 sols (1 f. 25) payés, le premier janvier 1594, à Nicolas
Pro uer « pour avoir escript et copié deux foi~ une lettre
tin
missive escripte par les dicts bourgeois de Kemp'3r au
sieur comte de Maigllane. «( Auroict pareillement payé
10 sols (2 f. 50) à un clerc qui auroict copié deux lettres
escriptes l'une par le sieur de Lézonnet et l'aultre par le~
dicts bourgeois au comte de la Maignane.» Payé deux
sols à un clerc qui copia une lettre adressée aux habitants
de Conq (Concarneau). A Jacques Provost, 60 sols pour
trois copies des articles délivrés par les bourgeois aux
députés se rendant au padement de Dinan. Payé à un
copiste qui am'ait copié certaines charges et informations
faites sur le comte de la Maignane., pour être remises par
les dits députés au duc de Mef'cœur, à Dinan, 4 1.10 s. Cette
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. . Tome XII. (Mémoires). ~ 12

somme atteste la lo:pgueur du mémoire et surtout l'étendue
des griefs. A un clerc qui aurait cùpié une lettre adressée
à Dom Jouan, 8 sols. « A un clerc qui aurait écrit par
tr'ois fois les mémoires et articles baillés aux dits Roze­
rech et de la Raye, pour aller aux Estats de Dinan, au lieu

et place des dicts Guirieuc et Guégant, prisonniers, 100 sols.»
- A un clerc qui auroit écrit une lettre aux habitants de
10 s. A Pierre Leurier, pour deux lettres écrites
Morlaix,
à M. de la Maignane et à Dom Jouan, 40 sols. Hest temps
denou8 arrêter; nous n'en finirions pas, si nous citions la
nombr.euse correspondance dont il est fait mention dans le
miseur Le Denie.
compte du

·':',:.·:Enfin, en récapitulant tous les articles de dépense qui

figurent au chapitre désigné sous le titre de « frais pour
· affai,'es et escriptures, voyaiges et messaigeryes, » on trouve
une sommede près de 2,600Iivres,qui représentent 13,000 fI'.

de nos jours .

Nous terminerons ici l'.e~amen du compte de Rolland
Le Denie, procureur miseur de la ville de Quimper, en 1594.
Il est probable qu'il n'accepta pas avec g,'ande gaieté de
. cœur cette fonction, qui lui fut imposée, comme à tânt d'au-
tres; sa mission, en ces temps difficiles, dut lui susciter bi2n
des embarras et notamment bien des difficultés pour ren­
trer dans les fonds qu'il avait été obligé d'avancer. Au mo­
ment de sa mort, qui arriva au commencement de l'année
1610, il n'avait pu établir son compte de gestion, faute de
documents et surtout de quittances relatives aux sommes
considérables qu'il avait déboursées. Rolland Prévost, tuteur

· de ses enfants, s'efforça, pendant six ans, de mettre en
ordre cette comptabilité, qui embrasse tant de détails diffé-
rents. En la présentant au contrôle, il y joignit une pièce
dût sans doute être prise en sérieuse c6'n~id'ération par
qui
les examinateurs; c'était un codicile que Le Denie avait
ajouté à son testament etdans lequel il indiquait les articles

dé dépense dont il n'avait pu obtenir les quittances des per-
sonnes qui en avaient touché le montant. Ce ne l'ut, comme
nous l'avons déjà dit, au commericement de ce travail, que
le 5 mai 1613, date de l'apurement de cette gestion, que les -
enfants Le Denir. furent remboul'sés de la somme de
1,0351. 11 s 6 d. dont la ville était redevable à leur père.
Nous n'avons trouvé, jusqu~à présent, aucun l'enseigne­

ment sur Rolland Le Denic; Le chanoine Moreau, qui nous

a dépeint, avec tant de détails les principaux personnages
de notre ville qui vivaient à cette époque, n'en fait pas
mention, dans ses mémoires. Cependant, son nom se ratta-

che à ungrand évènement de notre histoire locale; le, 20
octobre 1594, délégué par les habitants de Quimper, il signa, ,:, '
en qualité de leur seul représentant, la capitulation imposée' ,
par le maréchal d'Aumont. ,"

Le compte du 1 al' janvier au 31 décembre 1595, établi par
Yves Allaoou, qui succéda comme misenr de la ville de
Quimper a Rolland Le Denic, a dispaJ'u. En 1596,' cette
' charge fut imposée à Jean Lhonnoré, qui l'exerça pendant ,
les sept premiers mois de cette année,(3t ensuite à François
Lhonnoré, qui dut continuer', pendant les 5 ' derniers mois
de l'exercice, la gestion de son fr'ère, décédé le 30 juillet .

A l'époque dont nous nous, occupons, longtemps avant

et après, les rniseurs" les ' administrateurs des hôpitaux: les
directeul's de l'aumônerie ou du bureau de bienfaisance" etc.,

'étaient nommés à ces fonetionspar les habitants de la ville,

réunis en assemblèe générale. Ils ne pouvaient se soustraire
," à cette obligation, à moins de présenter des excuses~ qui
. étaient sévèrement contrôlées et presque toujourE:l rejetées.

On comprendra leur répugnance à accepter cette ingrate
mission, lorsqu'on saura que leur charge les obligeait, pen-

dant tout le temps de leur gestion, d'assurer le service,
quelles que fussent les avances auxquelles les dépenses
pouvaient les obliger. Il fallait, par conséquent, être riche
et posséder des fonds considérables qui, une fois sortis de
leur bourse, n'y rBntraient qu'avec la plus grande difficulté .
. Ce mode de nomination était parfois des plus arbitraires;
ceux qui en étaient l'objet, souvent en butte à la jalousie
ou à la haine plus ou moins justifiée de leurs concitoyens,
étaient obligés d'en subir le lourd lardeau.
Donc., au mois de décembre 1595, Jean Lhonnoré, sieur
de Kerambiquette, fut désigné par l'assemblée de ville pour
succéder à Yves Allanou, miseur alors en fonction, et pour
. exercer cette charge, pendant l'année 1596. C'était un riche
bourgeois,que le chanoine Moreau cite dans ses mémoires,
comme ayant offert un déjeûner, à l'évêché, aux principaux
de la ville, lorsqu'elle fut inopinément attaquée par Lezon-
net et sur le point d'être enlevée (1). Jean Lhonnoré qui,
suivant son expression « avoit esté obligé, obstant le mal­
heur du temps, de laisser la ville et de se dommicillier pa­
roisse de Sainct-Mathieu, forbourg de Kemper », crut
devoir représenter que, ne faisant plus partie de la localité,
il était en droit de refuser la 'mission qu'on voulait lui im­
poser. Peu de jours après, le 9 dècembre, l'affaire fut sou­
mise au Présidial. Il s'y rendIt en compagnie de Maître
François Legoazre, « procureur fabrique des paroissiens de
Sainct-Mathieu, lequel a faict pareil empeschement que le
dict Lhonnoré, disant se joindre avec Juy pour le corxs
. (corps) de la dicte paroisse en 'préj udice de jouir de leurs

et exemptions~ » Mais, Jean Lhonnol'e était un
privillaiges
des principaux ligueurs de Quim pel'; en outre, sa nombreuse
famille partageait ses opinions; le parti royaliste, animé

(1) Histoire de la Ligue en Bretagne, par le chanoine Moreau, p. 186,
nouvelle édition.

d'un sentiment de rancune, était bien aise de lui occasion­
ner quelques désagl'éments et le .Présidial.. tout d$voué au
nouvel état de choses, ordonna: cc qu'il seroit contrainct
d'obéyr pl1r emprisonnement. » Forcé de se soumettre, le
nouveau miseur prêta inlmédiatement serment.
Jean Lhonnoré mourut avant l'expiration de son mandat.
Son frère François, désigné par l'assemblée de ville pour le
remplacer~ à. com ptee du ter août, surlendemain de sa mort,
fit opposition à cette décision, en prétextant qu'il était déjà.
aumônier de la ville. Ce motif ne fut pas .admis pal' le Pré­
sidial, dont l'ordonnance, datée du 2 août, décida qu'il
serait remplacé par un ~utre aumônier et qu'il serait tenu
d'acceptel' la charge de miseur « pour obéyr a laquelle ..
ordonnance, et esviter l'emprisonnement de sa personne. ».,
François Lhonnoré s'exécuta et prêta le serment exigé. Il
mourut de la peste, peu' de tem ps apl'ès 1596, et ce furent les
héritiers des deux frêres qui ' durent établir et présenter
leur' co'mpte de gestion.

Compte de feux ~1aîtees Jean et François LHONNORÉ, com­
mencé le premier janvIer 1596 et fini le trente-un décem­
bre de la dite année. Ce compte fut présenté, le 22janvier
1607, à la COllr des comptes de Bretagne par nobles gens
Charles Lhonnoré, sieul' de Kel'ambiquette, fils dudit
défunt Jean Lhonnoré, et Marguel'i te M orice, femme en
premièl'e noce de Fl'ançols Lhonnoré, également décédé
et dont elle avait un enfant (1) .
Nous devons prévenir ici que ee eompte n'est pas établi
aveela même précision que celui de Rolland Le Denie. Pour
l'admettre comme complet, il serait nécessaire d'y intro­
duire les modifications ou rectificatioris prescrites par son
, apurem ent, qui eut lieu au mois de février 1609. Malheu­
reusement, cette piéce importante a disparu; cependant

(1) ,La veuve de François Lhonnoré, quelque temps après la mort de
son mari, épousa' Yves Furie, procureur.

. l'examen du document qui nous reste, tel qlùl est, nous
procurel'a encore quelques renseignements sur les événe-
ments qui ont eu lieu) à l'époq.ue où il fut rédigé. ' /
RECETTES (H.

RECETTES ORDINAIRES
Deniers communs et octroi. .. 160 e » s
Taille du mois de janvier .. " 162 l)
. Taille du mois de mai. . . . . . 19 2-1:

Pavage et issue de ville .....
Devoir de l'écu par tonneau de

VI n '". . . . . . ..
Autre devoir d'un écu par ton-
neau de vin. . . . . . . . .. 1 .896 »
Total des recettes ordinaires ..

RECETTES EXTRAORDiNAIRES

Devoir du papegaut. . . . . . .
Intérêts des onze mille écus

pretés au maréchal d'Aumont .
et payés par M. Hus · de la
Bouchetièl'e, trésorier des
Etats de Bretagn~. . ....
Total des l'ecettes extraol'dinl'CS . 1.155 35 .
toutes les recet-
Montant de
tes (2). .

reporter.

(:1) On remarquera que ce compte se chiffre par écus et par sous. Cette
manière de procéder eutrait aussi dans les habitudes du temps. Voir au
compte de Le Denie, pag'os :130-31, les explications déjà données sur les
difi'érents artides des recettes ordinairps .
(2) La somme de 6,i06 écus 29 sols ou 18,319 livres 9 sols rpprésen-
de nos jours, en numéraire, la valeur de 91,596 francs, à peu près.
terait,
Mais nous devons prévenir que, sur cette somme, les miseurs, qui étaient
des perceptions, reuevaient celle de :1806, écus, qu'ils
responsables
pu verser à la caisse, en raison de circonstanQes que nous rap­
n'avaient
porterons, dans le cours de cette notice .

DÉPENSES
Report ....... .
Dépenses approuvées par la

Commission ......... .
1. 760 e 27 s 3 d
Déficit.
que les héritiers des frères Jean et François Lhonnoré
furent condamnés à restituer à la caisse. Il est probable
qu'à l'apueement de ce compte, ils durent représenter des
quittances, qu'ils n'avaient pu d'abord se procurer, et qu'ils
ne remboursèrent pas en totalité une somme aussi impor-
tante.

, On voit qu'à cette époque, le budget de la ville ést moins
chargé que celui de 159·1; l'emprunt des 7,200 livres, con­
tracté pour satisfaire le colonel espagnol Dom d'Aquila, a
été remboursé" l'année précédente; celui de 33,000 livres,
ordonné par le maréchal d'Aumont, a été mis à la charge
des Etats de Bretagne, qui en paient l'intérêt, à un taux de
8 0/0. C'était un 'placement d'autant plus avantageux et
inattendu que les intéressés avaient dû l'effectuer, contraints
par une dure réquisition imposée par le maréchal, le len-

demain de la capitulation de la ville (1). '

Les recettes ordinaires, compal'ativement à celles de 1594,
ont considérablement augmenté, surtout celle de l'impôt sur
les vins. Le total de ces différentes augmentations' s'éléve à
la somme de 8,094 livres. Quant aux recettes extraordi-
naires, elles ont diminue de 6,560 livres; ainsi, en ne com­
prenant pas dans le compte de 1594 ,les 40,200 livres qui
furent empl'untées, en cette année, on voit que le budget de
1596 lui est supérieur de 1,639 livres de recettes. C'était un
. progrès sensible, dans l'amélioration des finances muni-

cipales.

(1) Voir à ce sujet les récriminations du chanoine Moreau, page 259, .
nouvelle édition:

DEPENSES
Greffier, payé 33 écus et tiers (100 livres) à. François de
• Kerguellen, greffier de la communauté de ville ..
Sergent, à. Jean Collobert, 8 écus « pour avoir adverti les

habitants de 19.dicte ville à. aller aux assemblées d'icelle. »
Receveurs et miseurs, 35 écus aux miseurs Jean et Fran­
çois Lhonnoré pour l'année de ce compte. Nous ferons obser­
ver que cette allocation,toute gracieuse, avait été su'pp6mée,
les années précédentes, en raisot;1 de la pénurie des finances
et des besoins de la ville. ,

Tambour de ville, à. Henry Héloret « tambourg de ladicte
ville »; 24 écus .
Canonnier, à Henry Berthou, canonnier, 28 écus, pour ,

ladicte année de sa charge. Les nommés Héloret et Ber-
thou figurent déjà. au compte de Rolland Le Denic ; leurs
appointements n'ont pas varié, ils sont restés les mêmes
Sonneur de cloche. « A celluy qui auroict sonné la cloche
pOUl' assembler les habitants, aux occasions, 156 sols. »
Ce chapitre s'élève à 368 livres (1814 francs d'aujourd'hui)
représentant les émoluments attribués aux fonctionnaires
de la ville de Quimper, ce qui n'était pas exagér·é. Cepen­
dant, en 1594, le compte de Le Denic ne leur accorde que
3401. 5 s (1,700 fI'. 75 c.). •
Dépenses pour les fortifications du fort~ des Chambrières
et autres endroits.
La reddition de Quimper au maréchal d'Aumont, en
1594, ne mit pas fin aux hostilités. Loin de se décourager,
la Ligue redoubla d'énergie et la guerre civile continua à.
,ensanglanter et a couvrirde ruines la province de Bretagne,
jusqu'en 1597, époque où le duc de Mercœur fit sa soumis­
sion au roi Henri IV.
, Depuis la capitulation, la ville, constamment menacée
par les Ligueurs, redoutait les attaques de La Fontenelle

et surtout celles de r/ ercœur, 'qui ne pouvait se consoler de
la perte de cette place importante. Le maréchal d'Aumont,
pour la préser'ver de toute surprise, ordonna d'en augmenter
les fortifications, particulièrement aux endroits qui n'étaient
pas garnis de défenses suffisantes pour résister à un siège.
Les travaux durent commencer dans le courant de 1595
et fut'ent continués pendant toute l'année 1596. Le compte

du miseur mentionne surtout le fort, ou plutôt l'éperon des
chambriéres, ainsi nommé parce que les chambrières de la
v-ille s'y distinguèrent par leur patriotisme, en portant la
hotte pour le tl'ansport de la terre employée à sa construc­
tion. Cet éperon était situé à cent pas de la porte de Mes­
cloaguen, ou Saint-Antoine, vers Saint-Nicolas. On en
èleva trois autres, un devant la porte Saint-Antoine, un

deuxième entre Saint-Nicolas et la porte M: dard et le troi­
sième, à la jonction du Stéir et de l'Odet. ,
travau-x furent surveillés p3r Yves Certain et Hervé'
Ces
Sohier.
Les journées des _ terrassiers montèrent à 750 écus, à peu
prés 11,250 francs de nos jours. L'élargissement et le curage

de la douve du ravelin de la porte Méd,ard revint à 40 écus. '

Cette pénible besogne fut exécutée par 'des terrassiers Lam­
ballais. Comme ces ouvrages n'étaient pour ainsi dire com­
posés que de . terrassements, les matériaux et la main-
d'œuvre ~es maçons, charpentiers, etc., ne coûtèrent que

27.écus 40 sols. Le total de ces différents travaux s'éleva à
817 écus, 40 sols.
Pont de Locmaria.
Ce pont, qni probablement avait été détruit pendant le

dernier siège" fut rétabli au mois de mars 1596. Les entre­
pf'eneurs de ce travail se nommaient Hervé Le Feunteun et
René Erluen; on leur alloua (( pour bastir et construire Ld
moitié du pont _ tournant de Locmaria; 10 écus. ») Ce qui

laisse supposer que l'àutre moitié de ce pont tournant, qui
touchait à Locmaria, fut réédifiée aux frais de la r~roisse
de ce nom. Voici ce que la ville de Quimper' paya à ce sujet
aux entrepreneurs: 10 écus à Pierre Dadette pour
, 288 livres de fer, 60 éc, 43 s. et 303 livres de clous de ,
caravelle (1) un écu 50 sols, a Louis Helguen, pour avoir
« fait dresser les ferrailles mises audict pont », 6 éc. 27 s. 6 d.
-A diverses pers.Jnnes qui ont fourni du bois et des planches
de sapin, 110 sols,' Total 80 livres.
Bois de chauffage et chandeLLes fournis aux cOl'ps-de-garde.
Quimper ayant, a eette époque, une furte garnison, 'devait,

d'aprés les réglements en usage, entl'etenir de .chauffage et
d'éclairage les cinq corps-de-garde de la place. Cette four­
niture s'obtenait par adjudication. C'est le nommé Mathurin
Le Maître qm avait celle des fagots et du bois. La quantité
qu'il en livra lui fut payée 250 écus. Comme le bois coût.ait
alors twis livres la corde, la consommation doit être esti­
,mée à 250 cordes, soit 25 cordes par corps -de-garde et par
an. Quant aux chandelles, nous ne savons pourquoi elles
furentfournies par les cOlnptables Jean et François L'hon­
noré; probablement parce qu'ils fabriquaient cette denrée.
On en allouait quatre par jour à chaque poste. à raison de
dix SOL:S la livre, ce qui éleva cette fourniture à la somme
de 180 écus. Ces dépenses, pour le chauffage et l'éclairage,
ne furent acquittées qu'après avoir été' vérifiées et àpprou­
vées par le sieur de Kermoguer, gouverneur de Quimper (2).
Nettoiement des rues et pavés de la viLLe.

(, A Yvon Lisé, la somme de neuf v:ugtz-huict escuz, pour

(1) Clous servant il construire les caravell.~s, sortes de navires en
usage à cette époque.
(2) Il en est encore de même aujourd'hui. « Cette fourniture est mise
en adjudication et n'est délivrée que sur un ordre du commandant de la

place. '

avoir, durant ladicte année de ce compte, nettoyé' les bour­
riers et les immondicitez des rues et pavez de ladicte ville,
suivant le bail qui en auroict esté faict., daté du saeziesme
jour de janvier du dict an, signé I.(ERGUÉLEN, greffier de la
cour et j ul'idiction du dict Kempercorentin » La somme de
198 écus, qui représente 2,970 francs de nos jours, était
alors énorme; elle indique suffisamment quel était, à cette
époque, le déplorable. état de malpl'opreté de Quimper.
Après les 'pidémies qui "l'avaient ravagée, en 1594 et 1595,
on commençait à comprendre la nécessité de l'assainir et

d'en éloigner les éléments pestilentiels qui avaient occa-
sionné tant de désastres. Plus tard, on reconnut que les
ordures recueillies pouvaient ètre utilisées pour les besoins
de l'agriculture et pour la fumure des terres épuisées; des
cultivateurs s'offrirent d'abord de les enlever gratuitement .
Il s'établit ensuite une concurrence, dont l'hôpital Saint-
Antoine profita, la comtnunauté de ville lui ayant accordé
le privilège de mettre en adjudication le droit d'en.lever les

la ville, et ce droit, sous le nom de la ferme
immondices' de
des boues, devint dans la suite un de ses revenus les plus
importants. La première adjudication qui nous soit connue
remonte à 1725; elle produisit 2~ sols seulement, mais elle
augmenta successivement, et nous la voyons s'élever, en
1754, il 30 liv!'es; en 1764, elle est accordée à quatre parois­
siens de Plomelin., moyennant 50 livres; elle monta en
1777, à 270 livres; en 1797, à 294 livres. Après la Révo­
lution, l'hospice de Quimper continua de jouir de ce privi­
lège, qui lui rapporta annuellement de 1797 à 180!, 501 francs
et de 1805 àJ809, 474 francs. Aujourd'hui, et probablement
depuis 1810 (2), cette recette fait partie du budget da,la ville.

(2) Nous n'avons pu préciser cette date, celle de i810 doi~ être consi-
dérée comm0 approximative. .

, Feux de joie.
« Les comptables su plient leur estre y passé et alloué la
somme de deux escus que le dict feu Jan L'honnoré auroict
paiée pour le boys emploié à fail'e des feux de joie, lors de
l'absoluTion donnée au Roy par nostre Sainct- Père le Pape,
suivant ol'donnance verballe des officiers de la cour du dict
Kimpercol'entin, du sixiesme jour de janyier mil cinq cens
quatre vingtz saize. »
Cette date du 6 janvier 1596 mérite d'être retenue.
Hpnri IV avait fait abjuration de l'hérésie le 25 juillet 1593,
dans l'églIse Saint-Denis, entre les mains de Renaud de
Beaume, archevèque de Bourges, et fut sacré à Chartres
le 25 février 1594, parce que Reims était encore au pouvoir
de la Ligue. Il fit son entrée à Pal'is, le 24 mars de 'la
même année, et c'est seulement le 17 septembre 1595 que
le pape Clément VII, après bien des difficultés et des négo­
ciations, consentit à lui donner l'absolution. ' Quim per, en
fêtant ce 'grand évènement, le 6, janvier 1596, était bien en
retard sur presque toutes les villes de France, qui s'étaient
empressées d'en accueillir la nouvelle par' de magnifiques
réjouissances (1) .

Munitirms de guerre.
Les dépenses en munitions de guerl'e et pour les frais de
l~ur transpol't sont insignifiantes. Cependànt, il est inté-
ressant d'en faire connaÎtl'e les motifs, qui nous révèlent
des faits nouveaux, peu importants, il est vrai, mais dont
l'histoire du chanoine Moreau ne fait pas mention. Ainsi,
outre les deux sièges de Douarnenez qu'il rapporte, il
parait qu'à la fin de 1595' ou au commencement de janvier

(1) Rappelons aussi qu'à l'occasion de l'ab:iuration et la plupart de ces villes avaient déjà donné des fêtes splendides, dont
leurs archives nous ont conservé le souvenir.

1596, on essaya de surprendre cette place, et qu'une expé­
dition, organisée dans ce but, fut dirigée par un personnage

que le manuscl'it, peu lisible en cet endroit, désigne sous
un nom difficile à déchiffl'er, mais qui se rapproche de

celui du sieur Coatredès (1). Du l'este, voici cet article
exactement reproduit. « A Jan Louget, de Pennemarch, la
somme de troys escuz, pour avoir conduict en la dicte ville
tin
de Kemper les pouldl'es, balles et mèches, au lèveinent
du siège de Douarnenez, posé par le sieur de Corntredès,
ainsy qu'il apert par quictance du di ct Louget, du vingt­
huictiesme jour de janvier mil cinq cens quatl'e vingtz
saize, de 1 uy signée. » Men tion nons encore que, le 6 mars
et le 23 avril de cette année, Quimper fut émotionné par
deu x alertes, ce qui arri vait alors assez souvent. Pour
surveiller les murailles et en empêcher l'escaladl~, on dé­
pensa 4 éc. 14 s g d. « pour avoir faict jetter la nuict dans
les douves de la dicte ville plusieurs bouchons de paille et
de filace durant la dicte année.» " Autre article qui se
référe au précédent: « à François du Buc, flaman, 21 escus
pour 750 balles de fer pour servir aux canons de la dicte
. ville, suivant la délibération des dicts habitans, en leur
assemblée tenue le cinquiesme jour de mars. »)

P our la vérification du traité entre les habitants
et sa :~Jajesté.
Nous avons vu que la capitulation de Quimper, imposée
le 25 octobre 1594, par le maréchal d'Aumont, fut signée

par lui et le miseut' Le Denic, délégué par les habitants de
la ville, le 20 du même mois . Le roi en approuva les

17 articles, qui lui furent soumis à Saint-Germain-en-Laye,
(1) Il est probable que ce personnage n'est autre ' que le sieur de
Coatreùès, chef d'une famille ancienne et considérable de l'évêché de
Tréguier, dont fait mention, à la prise du château de Kérouzéré,

le 8 novembre 1594. Restai! une dernière et importante
~ formalité, celle de soumettl>e ce tl>aité au Parlement de
Paris, pour en obtenir l'enregistrement. Dans ce, but la
communauté de Quimper décida, le 16 janvier 1596, que
Maître Jacques Le Ferec serait en voyé à Paris; pour les
frais d'enregistrement et ceux de son voyage, on lui alloua
144 écus 40 sols .

A.fessageJ's, Espions~ ete.
Les deux partis, épuisés par cette longue guerre civile,
pendant l'année 159(), convint'ent de plusieurs trèves, qui
étaient de peu de durée et qui se renouvelaient li leur
échéance. Nous ,voyons, d'après, le compte des frèl'8s
Lhonnnré, que la suspension des hostilités n'empècha pas
certains chefs Ligueurs d'en violer les conditions. Ainsi,
au mois de janvier, Kermoguer, le gouverneur de Qu,imper,

envoya le messager Ollivier Floch à Douarnenez, « trouver
le capitaine La Bouille, y commandant en l'absence de
La Fontenelle, mesme à l'île Tristan, et pour scavo,ir la
volonté du di ct La Bouille s'il voulloit obsel've1' la trefve et
empêcher les courses de ses soldats sur le pays, à la grande
oppl>ession et toulle du pauvre peuple, » Pour sa mission,

Ollivier Floch reçut 30 sols (7 fr. 50 c.). Le capitaine
La Bouille,peu soucieux de respecte l' ce~te trêve, qui

paraît avoir été consentie après la levée du siège de DouaL>-
nenez dont nous venons de parler, n'en continua pas moins
ses exactions. Le gouverneul' Kermoguer envoya, le. 28 jan­
vier, un auti'e messager à Rennes, à MonsieUl' de Saint-Luc
({ pour luy donner ad vis que ledict La Bouille ne faisait
aucun estat d'entretenir la dicte trefve. » Ce messagèl'

reçut SIX ecus .
Au mois d'avril, Monsieul' de Saint-Luc, li eutenant­
génér-al en Bretagne, en même temps que [e mal'échal
d'Aumont, vint à Quimper « pour connaître comment on

s'y gouvernoit (1). » et particulièr!3ment pour tâcher de se

rendre maître de La Fontenelle. On Salt comment il y pàr-
vint, par l'entremise du capitaine Le Clou; on sait aussi
comment La Fontenelle fut fait prisonnier, en tombant dans
une embuscade qu'on lui avait tendue. M. de Saint-l ... uc,
qui auroit dû le livrer a la justice, ou plutôt le faire pendre
immédiatement, n'écoutant que sa basse c.upidité, après en
avoir tiré une énorme rançon, lui rendit la liberté. L'auteur
,de la Ligue en Bretagne ne nous donne pas la date de cet
évènement; on peut presque la préciser, en s'en rapportant
a l'article suivant, où il est fait mention de l'arrivée a
Quimper de M~ de Saint-Luc, qui pri! logement dans la
maison d'Allain Le Baud, sieur de Pratanras: « Le dict
deffunct Lhonnoré auroit paié, le quatorziesme jour d'avril 1
mil cinq cens quatre vingtz saize, il deux hommes qui au­
roient tandu de la tapisserie a la maison de Allai Le Baud,
sieur de Pratancras (sic), lors de la venue de M. de Sn.int-

Luc, lieutenant pOlIr lB l'oy au dict pays, 20 sols. » (2)
« Demandent miRe (porter en dép,.1nse) les dicts comp-
tables de la somme de deux escus, paiée par le ,dict def­
funct Lhonnoré a ung autre messaiger que le dict gou-
verneur auroit envoyé, le dernier jonr du dict ;ï oys d'avril

1596, en la ville de lM odaix pour portel' la continuation de
la tI'efve de deux moys escheuz en juing au dict an . » . .
« Davantage, suplie leur estre alloué la somme de 25 sols:
paiée ' a ung autre messaiger, par le comma dement du

dict gouverneue, pour avoir esté a Douarnenez pour la cas­
sation d'armes publiée a Rennes, au mois de juillet au dict

Malg ré ces trêves successives dont nous venons de don-
ner les dates, qui ont un certain intérêt pour Fhistoire de
nbtre Bretagne « les ravaiges et les pilleries » n'en conti-
(i) CHANOINÈ MOREAU, page 336, nouvelle édition.
(2) Erreur. Lire Pratanros o (MoREAU, page 21.2).

nuaient pas moins, sur .certaines parties du pays. Le compte
que nous exami.nons, en les mentionnant, fixe aussi les
époques où ces évènements eurent lieu.
er mai, Lhonnoré, suivant l'ordonnance . du gouver­
neur Kermoguer, donna quatre écus à deux messagers
( qui furent envoyés de Morlt:.ix au dict Kermoguer, sça-
voir, l'un de la part du sieur de Coetnisan (1), et l'autre,
de la part du baillif de Kempel'tin, lors à Morlaix, advertir
tin
le dict gouverneur de Kemper , de la prise du château de
Primel, près Morlaix" par les Espaignolz.» Le . 21 mai,
Lhonnoré paya 25 SOIS à un messager, expédié par le gou-
verneur de Concarneau, qui venait prévenir les habitants
de Quimper de se tenir' sur leurs gardes et leur annoncer
que le baron de Camors, tenant le party de la Ligue, s'es­
toit saisy du manoir du Cozquel', sur la rivière de Bénodet,
fOt'tiffier la dicte maison, assisté de nombre de
et faisait
gens de guerre, et pour regal'der le moïen de le faire

quitter.
A Ollivier Floch, deux écus payés le 4 avril 1596, par
ordre du gouverneur Kermoguer « pour avoir esté à Hen­
nebond espier où alloit l'armée espaignolle estant alors
allant (2).» Le 27 juin, la communauté décida qu'on
enverrait Corentin Saoulle près de M. de Sourdéac, pour
prier ( de faire retil'er l'armée qui ravagJoit et ruynoit
le plat pays.., près de la ville de Kemper.» On lui donna

(1) Pierre, comte de Boiséon (en Lanmeur), seigneur de Coefnisan et
. de Kérouzéré, vicomte de Dinan et de la Bellière, baron de Marcé et
chevalier de l'ordre du roi, gentilhomme ordinaire de sa chambre et ca­
pitain de 50 hommes d'armes, venait tout récemment d'être nommé
gouverneur d ~ Morlaix. Il éta lt de l'évêché de Tréguier et immensément
riche. En 1590, les Ligueurs s'étant emparés de son château de Kérou­
.l'ayant fait prisonnier, pour obtenir sa liberté, il paya une ran­
zéré et
çon de 20,000 écus (300,000 francs). Son fils ainé le remplélça dans son
commandement en 1627, époque probable de sa mort.
(2) C'est-à-dire qui était en marche.

cinq écus pour exécuter cette mission. Mais, en passant au
Faou, il fut fait prisonnier par La Fontenelle. Averti de ce
contre temps, Jean Lhonnoré, le 23 du méme mois, chargea
un soldat de la gal>nison, nommé La Comme, à qui on
remit 4 écus 30 sols pour ses frais de voyage, de s'enquérir
du lieu où était détenu le messager Corentin Saoulle.­
Les désordres occasionnés parles gens de guerre conti­
nuant toujours, le 12 juillet, les habitants de .Quimper
adressèrent encore le messager Ollivier Floch à M. de
Sourdéac, à Brest « pour lui porter le"ttres et lè suplier de
descharger le plat pays de l'armée du roy; logée en la
ville du Pont (l'Abbé), et commandée par le sieur de Ker­
goumarc'h (1), gouverneur de Guingamp. » POUl' sa peine,
Ollivier Floch reçut 2 écus 30 sols. « Suplient aussi les
dicts comptables leur estre cy passé et alloué la somme de
vingt escus, que le dict François Lhonnoré auroit a plu­
sieurs et diverses fois paiée aux espions qui devoient aller
descouvrier et recongnoistre aux occasions les entreprises
et force de l'ennemy. , Le total des dépenses inscrites au
chapitre des messagers, espions, etc., s'élève à 98 éc; 17 s.
6 d. (1,47 l: fI'. 25 c.).

Dépenses pour les gens de guerre.
Ces dépenses sont peu considérables. En cette année, on
. s'attendai t à quelques troubles, à l'occasion de la foire de
Saint-Corentin. Pour la sûreté de la ville, on fit venir le
capitaine Mageance, qui séjourna à Quimper avec sa com­
pagnie, pendant quatre ou cinq jours. Le capitaine reçut
24 écus, son lieutenant, le sieur de Charpenteny et ses sol­
dats, qui furent hébergés par des taverniers de la rue
Ne uve, occasionnèrent une dépense de 30 écus. Une

( 1) Kéréault de Kergoumârch faisait partie des Royaux qui prirent le
. château de Kerouzéré. Il fut moins heureux, au siège du Granec, qui fut
enlevé, quelque temps après, par La Fontenelle.
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. Tome XII. (Mémoires). i3

compagnie suisse, celle du capitaine ' d'Erlac, se tt'ouvait
aussi a Quimper; voici ce qu'il en est dit, dans le compte
des fl'Mes Lhonnoré : (( Au sergent-major de la compaignie
du capitaine d'Erlac, lors en la dicte ville de Kempel'tin, la
somme de 6 écus, pOUl' ayder au médicament de la blessure
qu'il aurait reçue lors de l'émotion qui arl'iva en la place du '
Tour du Châtel, le jour du départ des dicts Suisses. )) Nous
venons de transcrire fidèlement cet article., qui n'est pas
dat è, et auquel nous ne saurions ajouter aucun commen-
tair'e.

ALLocation au deputé envoyé aux Etats.

Le 17 novembre ]596, la communauté de Quimper
s'assembla et fit choix de M. Thomas Guégant pour
assister, en qualité de député .. aux États de Bretagne, qui
se réunirent à Rennes, au mois de décembre. Pour ses frais
de voyage et de séjour, on lui alloua la SOn1me de 120 écus.
Ce Thomas Guégant était probablement un parent de
Pierre Guégant, qui fut fait prisonnier à Moncontour par
les Royaux, en' 1594 ..

Responsabilité du 111. iseur j'eLativeme1it aux ?ecettes
et revenus de La ville.
Non seulement le miseur, de la ville de Quimper, pour

sl,\bvenir aux dépenses journalières, quelle que fût leur im-
portance, était obligé de faire des avances de fonds consi­
dérables, m8.is encore il était responsable de la perception
des impôts et des revenus de la ville. Lorsqu'il entrait en
charge, son prédècesseur lui remet.tait un état indiquant
toutes les différentes recettes a recueillir; il avait mission ,
d'en, opérer le recouvrement et de poursuivre 1/38 receveurs
oufet'li:iiers des devoirs, qui, pour un motif quelconque,
négligeaient d'apporter a sa caisse les fonds qu'ils devaient
y 'lerser. Tout déficit lui était imputé; pour en obtenir

décharge, il était tenu de prouver qu'il avait employé tout
les moyens possibles) mè~ne la poursuite des retardataires
devant les tribunaux. Avant de transmettre sa comptabilité
au contrôle de la Cour des comptes à Rennes, rassemblée
de ville nommait une Commission de quaüe ou cinq
bres) qui. procédait à la vérification des écritures. Les
mem
de recette et de dépense qui n'étaient pas appuyés
articles
avec cette minutieuse forma­
de piéces probantes) rédigées
lité qui était le propre de cette époque, étaient rejétés. Le
malheureux fonctionnaire, pour renouveler ou remplacer
les documents qui lui manquaient, passait un temps infini
en sollicitations et en démarches près des créanciers ou des
fermiel's, qui, loin de lui venir en aide) étaient souvent bien
laisser dans l'embarras; ses efforts échouaient
aises de le
surtout lorsque les dé.biteurs étaient décédés, et qu'il
s'adressait à leurs héritiers, qui ne s'exécutaient pas tou­
jours, mèrrie après de longs et coûteux procès .

Obligation du /y; iseur de complète? toutes les l'ecettes qui
n'ont pas été intégraLement versées à La caisse.

D'après ce qui précède, et en envisageant les désordres
et les misères de cette époque, il est facile de ::::e faire une
idée des lacunes qui flécessairement existaient dans les
comptes de Jean et de François Lhonnoré, décédés avant
d1avoir centralisé leurs opérations. Ce soin, transmis à leurs
héritiers) devenus responsables, produisit fort peu de résul­
tats, si nous nous en rapportons aux décisions de la com­
mission de vérificat.ion, qui, out.re un certain nombre de
dépenses rejetées pour différents motifs, mit à leur charge
les fonds provenant des impôts qui n'étaient pas rentrés
dans la caisse municipale. - .

Nous en donnons ici le détail; on jugera de leur inipor-
tance.
Ainsi, dans le relevé des recettes de cette année 1596,

on mentionne celle, des deniers d'octroi, qui s'élève a 160 écus.
Le comptable n'en a reçu que 40. La commission, jugeant

insuffisantes les diligences qu'il a faites pour le recou-
vrement des 120 autres, le condamne a les verser a la
Calsse.
La taille du mois de janviel' monte a 162 écus; le miseur
ne représente que 155 écus 51 sols 6 deniers, différence
6 éc. 8 s. 6 d. a répartir entre 81 contribuables: dont la
plupart sont cependant taxés a des sommes bien minimes,
car le plus imposé doit 20 so!setvingt-quatre d'entre eux
ne sont côtés qu'a 20 deniers et au-dessous. Le comptable,
pour justifier ce déficit, démontre que les retardataires sont
en grande partie des mendiants et des vagabonds, que plu­
sieurs sont morts, par suite des misères causées par la

guerre, et qu'en outre, lorsqu'on a voulu recourir aux
exécutions (( a l'égard de ces pauvl'es gens, le peuple s'y'
sel'oit lui-même opposé,comme la chose est notoire a tous. »
Devant ces raisons, la commission exonéra le miseur de
cette somme de 6 éc. 8 s. 6 d,; mais en spécifiant « que sa
santance ne pourroit tirer a conséquence, pour t>advenir. »
Au sujet de cet article, la commission témoigna une' indul-
' gence qui n'était pas dans ses habitudes. Elle fit aussi
preu ve de prudence, car d'autres tentatives d'exécution n'au-
raient abouti qu'a émotionner le peuple. '
Le premier devoir de l'écu par tonneau de vin est indiqué
au nombre des recettes comme devant produire 2,612 écus,
30 sols. Le miseur n'a reçu que 1,023 ée. 42 s. 6 d. . ; il reste
a recouvrer 1,588éc. 7s. 6 d. Le comptable fait observer que

le fermier de ce devoir, nommé Allain Chevillard: en raison
des troubles et des désordres quiexistaient en ce temps-la,
quoique ayant été exonéré de 600 écus par le sénéchal de

Quirp:p.er, n'a pu parfaire la somme stipulée par son bail.
Mais', la commission n'admet pas ces explications; le séné-
chal, dit-elle, n'a pas le droit , d'ord.onner une pareille

exonération, sans le consentement des bourgeois. A ce sujet,
elle prescrit de procéder à une information et décide, en

attendant, que le comptable devra opérer le versement en .
litige. ' A près de longs débats, l'assemblée de ville voulut
bien admettre cette réduction de 600 écus précédemment
OI'donnée par le sénéchal et la somme à recouvrer fut
eéduite a 988 éc. 7 s. 6 rI.
Le second devoir de l'écu par tonneau s'éléve a 1,696
écus; le misem> n'en a touché que' 620, déficit 1,276 écus.
Malgré toutes ses démarches, il ne lui a pas été possible
de recueillir une plus forte somrne; le fermier Métayer,
comme son collègue Allain Chevillard, à cause des mal­
heurs du temps, n'a pu profiter des avantages de son bail;
il s'est ruiné, et quoiqu'il ait été aussi exonéré de 600 écus .
par la ville, il est morç insolvable, en prison, dans la plus
profonde misère. Ces motifs, cependant si sérieux, n'atten­
drissent pas la commissio-n, qui ol'donne que les héritiers
de Jean et de François Lhonnoré auront a rembourser
696 écus, qui, ajoutés aux déficits précédents, forment un
total de 1,804 éc. 7 s. 8 d.

Cadeaux aux autorités de la ville.
Le comptable fait figuree au nombre de ses dépenses trois
barriques de vin, montant a la somme de 39 écus, dont il
aurait fait présent? de la part des bourgeois, au sénéchal et
au procureur du roi, . en reconnaissance des peines qu'ils
prennent pour les affaires de la ville, dont ils n'exigent au­
cun salaire. Cette dépense est rejetée par la commission
« comme chose non deue. »
Procès engagés par la viLLe pour différentes causes.
Le miseur ne mentionne pas les causes de ces p~6cès
intentés à différents particuliers, devant 'le Conseil du roi et
les Parlements de Paris et de Bretagne. Les frais en sont

considérables et se montent à 6.46 écus 53 sols. Attendu
J1absence de plusieurs documents les concernant, la com-
mission ajourne le comptable à six mois, pour les repré-
senter. Nous ne savons quelle suite fut donnée à cette
affaire.
. Ajfaires des députes A Llain Le Guirieue, sieur de LeseoTtan
et Pierre Guégant.

D'après le compte de · Rolland Le Denie, nous avons déjà,
entretenu nos lecteurs des aventut'es de 'ces deux person­
nages, nommés députés pat' les habitants de Quimper, le
30 mars 1594, pour les représenter aux Etats convoqués il
Dinan par le duc de Mercœur, chef de la Ligue en Bretagne.
Suivant ce document, nous avons appris qu'ils avaient été
fads pt'isonniers par les royaux, à, leur passage à Moncon-
tour, et peu de temps après, transférés à, Ploërmel. T Je compte

de Le Denic ne nous dit pas de quelle. manière et à la suite
de quelles démarches ils furent rendus à, la liberté. Le cha­
noine Moreau (1) nous donne une relation de cette capture

• qui diffère en plusieurs points des renseignements que nous
a laissés Rolland Le Denic, auxquels nous ajouterons ceux
récemment découverts, dans nos Archives départementales,
par M. Luzel, qui a eu l'obligeance de nous les communi-
quer. . . -
que dit Moreau: son récit, très intéressant
Voyons ce
cependant, n'est · p'as d'une rigoureuse exactitude, et dans
l'intérêt de notre histoire locale, nous replacerons, sous
leur véritable jour, plusieurs incidents in'exactement racon­
et sur lesquels il a été mal servi par ses sou venirs. Outre
tés
les deux députés Le Guirieuc et Pierre Guégant, nommés
par la ville, il cite Jean de la Garenne, chanoine de la ca-
thédrâte, délégué par le clergé. Cette députation, au lieu' de

(i) Page 206, nouvelle édition .

l'envoyer à Dinan, il-Ia dirige sur Lamballe qu'il désigne
comme point de réunion des Etats de la Ligue, « si bien
m'en souviens », dit-il. Il nous apprend « qu'à cause du dan­
ger des chemins », Lezonnet lui donna une escorte de 150

salades, commandée pal' le sieur de Kercourtois, son lieute­
nant, qui, al'rivée à la Houssaye, bourg dépendant de Pon-

tivy, y prit logement, avec l'intention de continuer sa route
le lendemain. De grand màtin, quelques heures avant son
départ, cette escorte, se croyant en sûreté et n'ayant pas
pris toutes les précautions pour se garder et couvrir les
approches de son cantonnement, fut attaquée par un parti
de royaux, cormn andé par le sieur de Camors.
La déroute fut complète. Kercourtois se fit bravement
tuer, après avoir vainement tenté de ralliel~ ses soldats
affolés qui prirent la fuite, en laissant un grand nombre
des leurs sur le carreau, Les vainqueurs, en prenant
possession du village, ydécouvrirent les députés,qu'ils firent
prisonniers et donnèrent en garde a deux ou trois soldats,

pendant que les autres fouillaient la localité et que hi. cava-
lerie suivait les fuyards, qui se sauvaient vers Pontivy.
« La Garenne, ajoute le chanoine Moreau, qui ne man­
quoit pas de courage, comme ill'avoit fait souvent paroitre,

en bon lieu, avant d'estre attaché au bréviaire, voyant
qu'ils n'avoi" ent que leurs gardiens autour d'eux, dit a ses
deux autl'es compagnons, en langage breton: Y a-t-il pas
moyen de nous sauver des mains de ces coquins?- Guégant
lui répond: Quel moyen?- Ils nous tireront à coups d'arque-

buses, et s'ils nous reprennent,ils nous tueront; il vaut mieux
payer rançon que de mourir de leurs mains. La Garenne
ne répliqua rien a tant de langage non entendu et fort sus­
pect aux soldats qui les gardoient; mais, sans prendre
aucun avis, prend son temps. et tout a coup, un grahacqup
de poing dans le côté de lJun des soldats et un autreà.i'au-
tre qui étoit de son autre côté, les jetant par terre, et a celui

qui étoit devant lui le boulverse aussi par terre pareille­
ment, Je tout en un instant, et saute tout botté et éperonné
dedans la rivière, qui étoit auprès et guéable, et passe de
l'autre côté. Les soldats s'écrient que les prisonniers s'é­
chappent~ dont voici une troupe qui arrive, qui accompa­
gnent les fuyards d'une grêle d'arquebusade, mais pas un
coup ne porta,et ils ne suivirent pas plus loin les prisonniers,
qui se sauvèrent à Pontivy. Peut-être ne savoient-ils pas
que c'étoient des députés, comme ils le surent après. Le dit ·
La Garenne, par son évasion, gagna trois ou quatre mille
écus au clergé de Cornouaille, qui eût payés pour sa rançon.)
Suivant la narration du chanoine Moreau, on doit suppo­
ser que les trois députés pàrvinrent à se tirer des mains de
l'ennemi et à recouvrer leur liberté; mais, il n'en fut pas
ainsi; l'intrépide et vigoureux chanoine parvint seul à s'é­
chapper, et ses infortunés compagnons, mis en pl'i~on,
attendirent longtemps leur délivrance, qui ne leur fut accor-
dée qu'après une forte rançon imposée par le sieur de
Camors. Comme nous l'avons vu plus haut, les habitants
de Quimper employèrent toutes les démarches possibles
pour leur venir en aide. Le Denic nous dit bien ce qu'il en
coûta ' à la ville pour frais d'émissaires, de députations,
etc., mais, il ne fait pas mention de la rançon qui fut payée
au sieur de Camors. .

D'après les documents que nous examinons, il résulte
que les. Quimpérois, vers le mois de septembre de cette
année 1594, s'entendirent avec le sieur James de la Ville­
carré, gouverneur au nom du Roi de la ville de Ploërmel,
qui voulut bien être leur négociateur et avancer la somme
de 4,000 écus, que le sieur de Camors réclamait pour la
rançon des prisonniers. Cette démarche près d'un puissant
adversaire, si redoutable à leur parti" n'avait rien de sur-
prenant, en ce temps de guerre ~ivile, qui fournit tant
d'exemples semblables .

De la Villecarré, sans doute, détenait déja les prisonniers,
lorsque, le vendredi saint, le duc de Mercœur, qui voulait, a
quelque prix que ce fût, s'emparer de la ville de Ploërmel,
donna ordre a quelques-uns de ses capitaines de la sur­
pl> endl'e, pendant l'office. L'entreprise eût probablement
réussi, si un bourgeois, Jean Perret, qui s'était absenté du
sermon pour affaires particulières, n'eût aperçu de sa
fenêtre, six hommes habillés en paysans, qui s'avançaient
sur le pont et attaquaient les soldats du corps-de-garde; il
remarqua aussi plusieurs autres personnes cachées dans le
jeu de paume et sous le pont. Il donnê:l aussitôt l'alarme et,
aidé de quelques citoyens, se posta auprès de sa maison, qui
joignait la porte de laville, pour s'opposer a t'ennemi. Pierre

d'Esq uier et Pierre Perret, sieur des Crolais, sénéchal de
Ploërmel, se mirent promptement à la tète du peuple, et,
avec l'aide de la garnison,ils repoussèrent les assaillants, qui
perdirent en cette affaire 250 hommes tués, blessés ou faits
prisonniers. En mémoire ' de cette victoire, jusqu'a la Ré-
volution de 1789,on fit une procession qui en rappelait le
souvenir. Ce fait, dit Ogée, est pro vé par la lettre du
capitaine de la VilIecarré au maréchal d'Aumont ... datée de
Ploërmelle 21 avril, jour du vendredi-saint de l'an 1594 .
Après la capitulation de Quimper, qui se rendit au duc
d'Aumont, M de la Villecarré, voulant rentrer dans
ses fonds, s'adressa à l'assemblée de ville, qui en refusa le
remboursement. Cette décision peu équitable, était sans
doute la conséquence du changement de gouvernement ...
. passé des Ligueurs aux. Royaux. M. de la Villécar-ré, après
avoir épuisé tous les degrés de juridiction, transmit sa
réclamation au Conseil privé du Roi, devant lequel, le
26 juillet 1596, les habitants envoyèrent Maître .Riou de
Kerguélen ... sieur de Keranroch, pour soutenir leiIrsinté-

rets . Il en coûta à la ville 530 écus, montant des frais de
poursuite et d'indemnité au défenseur. Nous ne savons

quelle fut ·la décision du Conseil privé, mais, nous sommes
persuadés qu'elle ne fut pas favorable aux habitants de
Quimper, ca.r· nous voyons ceux-ci se tourner alors vers le
sieur de Camors, pour le contraindl~e à restituer la rançon
qui lui avait été payée pOUl' la délivrance des prisonniel's,
en donnant pour raison que ce seigntjur, précisément dan's
le même mois où il l'avait touchée, avait ahandonné le parti
du Roi pour se rallier à celui des Ligueurs.
A ce sujet, ils firent procéder à une enquête, qui eut lieu
le 24 décembre 1596, devant Guy Le Méneust, chevaliel',
sieur de Berquigny, sénéchal de Rennes, où se tenaient alors
les Étatsde Bretagne. Cinq témoins déposèrent à l'audience:
1 ° Noble hom111,e Bernard Nouel (Noël), sieur de Kel'danel,
demeurant à Morlaix~ député de cette ville aux États, âgé
de 35 ans, 2° Maître Jean de Vaumorin, demeurant ordi­
nairement à Morlaix.,. aujourd'hui à Hennes, âgé de 48 ans,
3° Noble homme Vincent Le Grand, sieur de ' Kercaul t.,
demeurant à Morlaix, député de cette ville aux États, âgé
de 41 ans. 4° Maître Auffroy Toulconet, ancien receveur

des fouages et impôts de l'évêché de Léon, demeurant à
Morlaix, âgé de 30 ans. 5° Noble homme Jan Duquelenec,
sieur de Saint-TuaI, avocat à la barre de Concarneau, y

delneurant, et à présent à Rennes., comme député de ladite
ville de Concarneau, âgé de 38 ans.
Ces cinq témoins, après avoir prêté serment, déposèrent
unanimement: « Que, enquis de la part des dicts bourgeois
et habitants de Kempercorantin,· sur l'equeste par eulx pré­
sentée, dépose que: environ le moys d'avril mil cinq cens
quatr,e-vingts quatorze, le sieue de Camor, tenant lors le
parti du Roy, auroict prins prisonniers de guerre les depputés
de la dict de la Ligue, qu'il ouyt nommer ·Mtre Allain Le Guirieuc et

Pierre Guégant, lesquels il randit en la ville de Ploërmel,
oü commande le sieur de la Villecarré, et environ quatre

moys après, et au rnoys de septembre dudict an 1594, ledit
sieur de Camor quicta le party de Sa Majesté, pour se ran­
ger dupartydes rebelles. Et ouyt dire communément, estant
le thesmoing dans le siège de Morlaix, quele dict sieur de

Camor assis toit le sieur de Mei'cœur audict moys de sep-
tem bre, près la ville de Morlaix, lorsque. le dict sieur de
Mercœur tascha à lever le siège posé par Monsieur le
maréchal d'Aumont au devant du chasteall du dict Morlaix .
Et, en ouItre, q ne tout depuys le.dict temps, le dict Camor
a tenu et tient encore à présent le party des rebelles au
Roy. ))
Nous ne connaissons pas les résultats de cette enquête,
seulement, nous voyons que les bourgeois y perdirent leur
temps et probablement beaucoup d'argent en poursuivant
le sieur de Camors, un aventurier de sac et de corde, sans
ressource et toujours insaisissable. Mais, animés de cet esprit
processif, qui était si tenace, à cette époque, ils n'abandon-
nèrent 'pas la partie ·et voulurent contraindre les députés
Le G~irieuc et Guégant à payer leur rançon. Cette injuste
prétention n'ayant pas été admise, ils s'adressèrent ' au
Géneral (1) de l'évêché de Cornouaille, près duquel ils
n'eurent pas plus de succès. D'un autre côté, le sieur de la
Villecarré n'employait pas moins d'énel'gie à réclamer cette
somme de 4,000 écus, qu'il avait avancée, sous la garantie
des habitants de Quimper.

Tous,ces différents procès, pflssant de juridiction en jui'i-\
diction, finissaient en dernier ressort par être soumis à la
décision du Conseil privé du Roi, qui rendit plusieurs arrêts,
notamment le 2 octobre 1598, et au mois de mars .1599,
arrêts qui furent favorables au sieur de la Villecarré.
Ce procès Onéreux qui se prolongeait sans résultat,
devai t cependant avoir un terme. L' Assem blée de ville pro-

(i) Juridiction de cette partie de la Bretagne .

posa une transaction au sieur de la Villecarré, qui l'accepta, ,
mais en imposant des conditions assez rigoureuses. Le
26 juillet 1600, les bourgeois se réunirent « dans la grande
salle de la chapelle Nostl'e-Dame de la Cité », en présence
d'Allain Tanguy et Denys Le Stang, notaires royaux, qui
dresséL'ent l'acte dans lequel il fut stipulé que les habitants
de Quimper « demeul'eront quittes de la dicte rançon, tant
,en principal qu'accessoires, mais, qu'ils recognoistront de-
, voir audit sieur de la Villecarré la somme de quatre mille
escus, laquelle sera constituée à raison du desnier à douze,
qui seroit par an tmis cents trente trois escus un tiers,
(1000 livres), laquelle ranie, ils ont promis payer au dict
James de la Villecarré, escuyer, en sa maison, à Saint­
Brieuc .. ou à Rennes, chez Maistre Yves Cormier, sieur de
Messière .. notaire , » La ville se réservait la faculté de
rembourser le capital, a une époque qu'elle déterminerait
plus tard; en outL'e, elle consen ti t à payer 50 écus à la partie
adverE:e, à titre d'indemnité de procédure.
Comme garantie de cette transaction, le sieur. de la
Villecarré exigea que vingt-cinq notables bourgeois, fai­
sant partie de cette assemblée et dont les noms sont con­
dans l'acte, se reconnaîtraient solidairement respon-
signés
sables du paiement de cette rente de '1,000 livres « sous
obligation hypothèque de tous et chacuns leurs biens pré-
sents et futurs, tant en général qu'en particulier et par leUL's
serments. »
Tel est le dénouement de cet incident, sur lequel nous
nous sommes un peu étendu, mais nous avons pensé que
cette digression ne ser.ait pas sans utilité pour élucider un
point important de notre histoire 'locale, jusqu'à présent .
, resté dans l'ombre.
terminerons ici l'exam-e'n du compte des fréres Jean
Nous

et François Lhonnoré. Nous ne pouvons en donner qu'un
aperçu, malheureusement incomplet, le procés-verbal d'apu-

t'ement n'étant pas parvenu jusqu'a nous. Les héritiers des
comptables durent, en attendant la décision de la Cour des
. comptes, faire de nouvelles démarches pour recueiI1ir 1,804
écus, qui restaient encore à percevoir sur les impôts, et
1,760 autres, employés à des dépenses dont ils n'avaient pu
présenter les quittances. C'était un déficit de 3,564 écus ou
53,000 francs de nos jours. A ce sujet, comme conclusion
et ,pour leUl> justification ils s'expriment ainsi:
Protestations des comptables.
(1 En cest endroict, les comptables' déclarent n'avoir peu
entièrement recouvrer leurs acquitz, à raison des guerres et
le descès arrivé au dict Jan Lhonnoré, dur'ant l'excise
, (l'exercice) de ,sa charge, et du di ct François Lhonnoré, de la

maladie contagieuse de laquelle il auroict esté affligé, en la
dicte ville de Kempercorentin, a la fin de la guelTe; et que
lors de leurs dictz . descés, paJ>tie de leurs dictz acq uitz,
procès et procédures estoient entre les mains des procu­
reurs et advocatz des dictz habitans, tant au Conseil privé
du Roy, requeste du Pallais à Paris, Cour du Parlement et
requeste du Pallais de Rennes, que en aultresdivers lieux,
que les subséquans miseurs et procureurs de la' ville de
Kempercorentin ont retirez, sans que lesditz comptables en
ayent eu aulcune connoissance, que depuis les six moys
del'niers qu'ilz sont appelez en la chambre pour compter

de la dicte mise rie, ayant obtenu lettres monitorialles, pour
r'évélation de ceux qui retiennent leurs dictz acquitz. Au
moyen de quoy, font expresse réservation d'adjouter en la
despance du présent compte ce qu'ilz recouvrirontd'acquitz
et les employer a leur apurement, en conséquence des mo­
nitoirs qu'ilz ont faict publier. ))

« ESTAT PARTlCULIER Dar le menu des desniel's mises et

dépances déboursez et faitz par noble homme Allain Che-
vil1art, procureur' syndic des nobles, bourgeois et . habitans
de la ville de Kempercorantin, pour l'armée du Roy . et le
sièae mys au devant le fort de Douranenès, par le sieur
capitaine du Pré, maistre de Camp conduisant la dicte
armée, le seiziesme febvrier mil cinq cens quatre vingtz et
. dix sept, et pour au~tres sièges du depuys mys, par Mon!?iieur
de Sourdéac, lientenant pour sa Majesté en ce pays, con­
duisant la dicte armée du Roy adevant les forts de Pen­
march et du dict Douarannenès, en la dicte année mil cinq
cens quatre vingtz dix sept,. desquelz deniers myses et .
dépances il suplie aiocation pour la somme a la quelle ilz
seront trouvez monter, Iuy servir de descharge en la dépance
de son conte général et à mesditz sieurs habit:;-:,ns et nobles

bourgeois pour se pourvoir pour le rembouesement, Olt
ainsin (ainsi) qu'ilz voisront lavoir afair'e. »
Ce document, comme l'mdique son in titulé ne repré-
sente pas le compte général des . recettes et dépenses de
l'année 1597, mais seulement la partie concernant les fl'ais
occasionnés par les différentes expéditions militaires qui
eurent lieu dans le courant de cette aIinée. Le comptable le
soumet à la Commission, non-seulement pour en obtenir
décharge, mais encore dans le but d'ètre utilisé par les
habitants de Quimper, afin de se « pourvoir pour le rem-
boursement ainsin qu'ilz voisl'ont lavoir afaire. » .
Nous nous sommes àemandé dans quelle circonstance il
devait être présenté, pour obtenir ·ce remboursement des
sommes énol'mes que la ville avait déboursées. Chevillart
ne nous le dit pas; mais, à ce sujet, nous émettons une
opinion qui nous est personnelle et que nous soumettons à
l'appréciation de notre Société.

Aussitôt après la soumission du duc de Mer'cœur,

Henri IV rèsolut de visiter quelques villes de Bretagne, pro­
vince qui avait étè le dernier boulevard de la Ligue. Cette
nouvelle, transmise par le chancelier Hérault de Chiverny

au Parlement, qui siégeait alors a Rennes, avisait encore
que di fïérentes mesures sel'aient prises dans l'intérêt du
royaume, entre autres, une demande de subsides pour les
frais occasionnés par l'armée royale, venue de très-loin
pour pacifier le pays.
Après avoir passé quelques jours à Nantes, Henry IV fit
son entrée à Rennes, le 9 mai 1598, la veille de la Pentecôte.
La réception fut des plus simples" le Roi l'ayant ordonné

ainsi. Les Etats, s'étant réunis .. accueillirent, sans objection,
la demande de subsides; ils accordèrent 800,000 écus
payables en quatre ans, et, en outre, s'engagèrent à fournir
les vivres et les vaisseaux nécessaires pour accélérer le
départ des Espagnols cantonnès au Blavet, ou Port-Louis.
Les habitants de Quimper ne furent pas les derniers à

connaître les intentions du Roi et prévirent que, pour com­
pléter les subsides demandés, ils y contribueraient pour
une large part proportionnelle, qui viendrait encbre aggra­
ver leurs impôts, déjà si lourds. Ils s'avisèrent pour s'en •
dispenser de constater que, dans l'année précédente, ils
s'étaient imposé des sacrifices considérables, spécialement

en frais de guerre, pour le service du Roi, sacrifices dont la­
plupart des villes de la province avaient éÜ3 exem ptes.-Sans
doute, en transmettant leur mémoirs , ils demandèrent,
sinon, l'exonération de la part qui leur incomberait dans
la répartition des 800,000 écus 1 au moins un notable

allègement. .
C'est le 10 avril 1598 qu'une Commission, sous la prési­
dence de Jacques Laurent de la Motte, sénéchal et premier
magistrat de Cornouaille, s'assembla pour vérifier le mé­
moire présenté par Allain Chevilla et. Cette vérification fut

terminée le lundi 4 mai, c'est-a-dire
ClDq Jours avant
l'entrée du Roi a Rennes. Ce mémoire
produisit-il l'effet
qu'on en pouvait attendre? Nous l'ignorons. car, ainsi que
nous l'avons déja dit, le but de son établissement n'est basé
que sur une conjecture qui nous est personnelle, miûs qui
nous paraît des plus vraisemblables, surtout lorsqu/on con­
sidèl'e que la date de sa rédaction coïncide avec l'arrivée
d'Henri IV a Rennes. C'était donc une excellente occasion
de le présenter au Roi et de le soumettre au Parlement ...
appelé' en ce moment à voter des subsides c.onsidérables.
Enfin, quoiqu'il en soit, ce document est parvenu jusqu'a
nous, malgré plusieurs lacunes et l'absence des totaux de ses
différel1ts chapitres. Nous n'hésitons pas a le présente!' à
. notre Société ... à laquelle il offrira quelques renseignements
intéressants sur les évènements qui ont eu lieu en 1597.
Le mémoire d'Alain Chevillart est diV'isé en douze cha­
pitres de dépenses, dont le montant s'èlève a L 1,172 écus
58 sols, qui, aujourd'hui, représenteraient une valeur de
près de 72,000 francs.
Siège de Douarnenez par le capitaine du Pré (1) .
Le maréchal d'Aumont, après la capitulation de Quimper,
en donna le gouvernement au sieur de Kermoguer et y
laissa une garnison de seize compagnies, sous le comman­
dement du capitaine du Pré . Ces compagnies, qui n'étaient
pas complètes, représentaient cependant un effectif de douze
à quinze cents hommes, force encore considérable et suffi-
sante, dont ils ne surent tirer aucun parti, surtout pour proté-
ger le paysconstamment pressuré par La Fontenel1e,qui avait
l'audace de pousser ses ravages jusqu'aux portes de la ville.

(i) Ce nom s'écrit, de plusi~~rs .manières, Pré, du Pré, Dupré, du
Prez; comme nous 1 avons dé]a dIt, ilous donnons textuellement les
noms propres d'après le manuscrit, qui souvent les orthoO"raphia difie-
remment, dans la même page. . <:1

Ce redoutable chef de bandits, après avoir résidé a Cor­
lay et .au château de Crémènec, prés du Faouët, résolut de
s'emparel' de l'île Tristan, situation extrêmement forte,
dont il augmenta les défenses. C'est la quJil établit le centre
de ses opérations, ou son quartier général, selon l'exjJres-
sion militaire. Kermoguer et Du Pré n'ignoraient pas ce
projet, mis promptement a exécution, mais, par une coupa-. "'-,_
ble indifférence, ou une incroyable incurie, ils n'y firent
aucune opposition. Le chanoine Moreau, a ce sujet, leur
reproche amèrement leur inaction et surtout leur manque
de courage, en négligeant d'utiliser (( la casanière garnison

de Quimper. » .

La Fontenelle fortifia si bien son île, qu'il était impossi-
ble de s'en rendre maître, autrement que par la famine ou
la trahison. On ne pouvait y entrer que d'un côté, qui se
trouvait baigné des eaux de la mer, a toutes les marées, et
d'où l'on voyait a 600 pas tous ceux qui auraient voulu en
approcher. La Fontenelle, en sûreté dans son fort, exerça, .
. pendant tl'ois ans, tant su'r mer que sur terre, tous les bri-
gandages dont il était capable.
. A la fin de l'année 1596, Henri IV, qui avait été informé .
des ravages et des crimes de ce scélérat, apprenant que le
capitaine Du Pré, alors a Paris, l'avait laissé paisiblement

se fortifier dans l'île Tristan, fut tellement indigné, qu'il
ordonna son arrestation et sa mise en jugement. Du Pré,
pour avoir sa grâce, promit de se rendre maître de l'île,
d'en chasser La Fontenelle, ou de périr dans cette expédi­
tion. Le roi lui pardonna, à cette condition, et le fit partir,
sur le champ, pour Quimper.
Aussitôt de retour, il forma un petit corps d'armée, com­
posé d'un millier d'hommes, fournis par les garnisons
voisines et celle de Quimper. C'est avec cette faible troupe
qu'il partit pour combattre La Fontenelle, dont les forces
étaient autrement. considérables. Celui-ci rattendit tran-
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. " Tome XII. (Mémoires). 14

quillement dans son île, protégé par de puissantes fortifi­
cations et pal' une flott.e dont faisait partie un magnifique
vaisseau,qu'il venait de faire construire. Du Pré fut appro-

visionné par la ville, en munitions et en matériel de toute
sorte. Le chanoine Moreau et Ogée ne nous donnent pas la
date de cette expédition; le miseur Chevillart nous apprend
qu'elle eut lieu au mois de février 1597. En partant, Du Pré
nourrissait un projet dont la réussite paraît cependant
assez difficile; il comptait SUl? certains engins pour incen­
dier le fort et la flotte de La Fontenelle.

C'est le 16 févrivl' que les contingents de cette petite
armée, réunis dans les faubourgs de Quim pel', se mirent en
marche sur Douarnenez. Pour les diriger, on leur donna
trois guides, qui reçurent deux écus. Suivait un convoi de
douze charrettes, fournies par la yille. « pour debvoir estre
employées à mener le canon et 8ultres munitions de guerre
dudict capitaine Du Pré. » Le salaire des conducteurs, leur

nourriture et celle des chevaux, pendant trois jours, coû-
tèrent 20 livres 10 sols. L'artillerie de siège ne se composait
que d'une seule pièce de canon, remisèe au Guéodet, et qui
fut pr~tèe par les bourgeois. Venait encore une voiture,

spècialement destinée à transporter les engins de destruc-
tion préparés pour « brusler le grand vaisseau et le manoir
de La Fontenelle. » D'après le compte de Chevillart, voici
les matières qui entraient dans leur composition: un baril
de goudron, 50 livres de braie de Flandre, 25 livres d'étou­
pes, une certaine quantité de souffre et de fascines, dont le
montant s'éleva à 4 écus 10 sols.
La distance eo ntr!? Quimper et Douarnenez n'étant que

de vingt-deux kilomètres, Du Prè arriva le même jour
devant l'île Tristan Le lendemain, il se présenta sur la
plage, « faisant voltiger (caracoler) son cheval, provoquant
l'ennemi de sortir à l'escarmouche. )) Cette ridicule bravade
lui fut fatale, les assiégès l'accueillirent Et coups de mous-

quets'.; blessé mortellement, il mourut, quelques minutes
après, sur le théâtre de ses fanfaronnades. « Ainsi s'ac­
quitta de la promesse qu'il avait faite au roi, à Paris, de

conquérir l'île . ou de mourir. Ses gens se contentèrent de
perdre leur capitaine et. s'en retournèrent, sans hasarder '
d'avantage ) (1).
Le troisiè!lle jour après son départ, le corps expédition­
naÎl'e en désarroi, était de retour à Quimper. Mal accueilli
par les habitants, qui lui fermèrent leurs portes, pour éviter
les désordres, toujours à redouter en pareille circonstances,
il fut cantonné dans les faubourgs et les environs, qu'il se
mit à piller. On dut en appeler à l'intervention de M. de
Sourdéac et du sieur de Kergoumarch, pour obliger ces
divers contingents à rentrer dans leurs garnisons. Enfin, on
leur donna quelques guides, et nous voyons que, le 25 fé­
vt'ier, le régiment de Molac retourna Et Châteauneuf et au
Vouelgouec1 (Huelgoat) et les Suisses à Brasparts .
Cette campagne de trois- jours ne coûta à la ville que
35 écus 5 sols .

Tentatives de La Fontenelle pour sU1'prendre Quimper.

La mort de du Pré et la honteuse retraite de ses troupes,
ne firent qu'augmenter l'audace de La Fontenelle. Ce bri­
gand, prévoyant que la guerre ne pouvait toujours durei',
résolut, avant la conclusion de la paix, de s'emparer de
. Quimper ... où il savait trouver un immense butin: accumulé
par des personnes riches qui, depuis plusieurs années, s'y
étaient réfugiées. Ses capitaines l'engagèrent fortement à
cette entreprise, comptant profiter du sac de la ville pour
s'enrichir et vivre dans l'aisance, après avoir déposé les
armes.

(i) Moreau, 2 édition, page 302.

Le chanoine Moreau nous a donné, dans leurs moindres
détails, tous les préparatifs de cette expédition ; nous n'y
reviendrons pas. Seulement, nous ferons observer qu'il n'est
pas d'accord avec Chevillart sur les dates que nous donne
ce comptable Ce point historique mérite d'être élucidé •

Dés le mois d'avril, La Fontenelle avait déjà poussé une
reconnaissance sur Quimper. Elle fut sans importance fot ne
produisit aucun résultat. Celle du mois de mai fut plus
sérieuse; il Y mit en action toutes les forces dont il pouvait
disposer. Moreau écrit que, le 30 mai, La Fontenelle atta­
qua la ville, qui s'y attendait et qui faillit être enlevée.
Chevillart nous démontre que cette attaque eut lieu le E mai .
Voici, à ce sujet, les indications que nous trouvons dans son
mémoire; elles prouvent aussi que, pour sa sécurité, Quim­
per, toujours sur le qui-vive, prenait ses précautions:
(( ~e quatriesme de may mil VC IIIIxx dix-sept, au l'oit par
l'ad vis et commandement du di ct sieur gouvemeur (Ker­
moguer) et Monsieur le Sene'schal, envoyé un espion,
nommé Jean Bargou, à Douarannenes, pour descouvrir et
scavoir quelques nouveEes du dict sieur de La Fontenelle

et de ses troupes, lequel messager auroit reçu la somme
de 60 sols. Plus, ledictjoul', il auroit.envoyé ledict Malme­
necq, inessager à Penmarch, pour -scavoir sy lennemy sy
fortifioit, auquel pour trois jours auroit esté payé un escu et
demy. Du cinquiesme jour du dict moys de niay, an mil
VC IlIIxx dix sept, auroit envoyé trois espions descou vrir

quelle route eut faict l'armée de La Fontenelle, que l'on
disoit qu'il ven oit donner en ceste ville, à cha(~un desq uelz

espions il auroit payé trente sols, faisant quaüe livres dix
sols. Le di ct jour' (5 mai), l'armée du dict de La Fonte­
nelle estant retirée du faubourg de la Terre au Duc, aumit
de rechef envoyé deux autres espions suivre la dicte armée

et pour scavoir quelle route il eut prins, ausquelz espions
qui seroient demeurez jusqu'au lendemain auroit le dict

procureur de la ville (1) payé la. somme d'un escuz. Du
sixiesme may au dict an, par le commandement de Mon­
sieur le gouverneur, auroit le dict procureur de la ville
envoyé Yvon Le Moe), porter une lest1'e du dict gouverneur
au dict seigneur de Soul'déac, ft Brest, pour Iuy donner
advis de ce qui s'en estoit passé ft Quimper, auquel Moel,
pour gu~rdon et salaire aUl'Oit ledit procureur payé trois
escuz. » .
Autr~ contradiction. Le chanoine Moreau, dans son
récit, nous dit que le sieur de Kerollain (2), gouverneur de
Concarneau '. qui prit une part si brillante à 'cette affaire,
arriva ce jour-là, par un heureux hasard, à Quimper, avec
une faible escorte composée de cinq cavaliers et dJun

trompette. On doit supposer une erreur ou un manque de
mémoire de sa part, si l'on s'en rapporte à l'article suivant:
cc Du lundi cinqmesme may mil Vc IIlIn dix sept, auroit
payé à Jan GrouIt, hoste11ier, pour la despance dusiell.r de
Keranholl en, gouveeneur du chàteau de Conq et ses gens,
venus exprés, pour donner secours à la ville contre les
. forces de La Fontenelle, qui auroit donné le dict jour dans
le faubourg de la Terre au puc, la somme de cent quatre
vingt dix sept livres quinze sols.» La somme de 1971.
15 s. (représentant aujourd'hui 988 fI'. 75 c.) pour la dépense
de Kerollain et de ses six hommes, qui ne firent que sé-
journer à Quimper J est vraiment exagérée; elle était
suffisante pour nourrir et défrayer une troupe d'un effectif
autrement considérable. On peut donc en induire que
Ke-rollain, prévenu du danger que courait Quimper, était
. suivi de sa compagnie de gens d'armes. Nous sommes per-
suadé que ce capitaine .n'y fit qu'une courte station, parce

( i) Le miseur était aussi qualifié de procureur et de procureur syndic
de la ville .
(2) Jean Jegado, sieur de Kerollain. Ogée le nomme Crecholain, et
ChevillaIt, Keranhollen. .

que, quelques jours après, le 9 mai, il fut rappelé de nou-

veau, comme nous le verrons bientôt.
La Fontenelle, dans la soirée du cinq mai, battit en re­
traite sur son île, après une perte ,de 150 hommes mis hors
de combat, l'abandon de 65 chevaux et d'une partie de ses
bagages. Les charrettes qu'il avait fait venir pour emporter
, le butin qu'il se flattait de rècueillir, apl'ès le pillage, de la
ville, servirent a transporter ses nombreux blessés. Pré­
voyant qu'il ne tarderait pas a ètre attaqué, il s)empressa
de réunir près de lui ses petites garnisons détachées dans
les environs, entre autres, 300 hommes stationnés a Dinan
et a Pontivy, et, soit par achat, soit par extorsion, il accu-
mula dans son île toutes les munitions de guerre et de

bouche qu'il put se procurer.

Sièges de Penmarch et de Douarnenez par Sourdéac.

Après le malheureux siège de Douarnenez où du Pré

'perdit.la vie, aprèS les deux rècentes entreprises de La
, FontenellE} sur Quimper, Sourdéac, gouverneur de Brest,
jusque~'laresté sourd aux nombreuses demandes de secours
qu\m lui 'adressait, sortit de son apathie, prévoyant qu'un
jour son inaction lui serait reprochée et qu'on lui ,en de­
manderait un 'compte sévère. Le souvenir du capitaine du
Pré, devait quelqUe peu préoccuper son esprit .

Après de nouvelles et pressantes instances des habitants

de Quimper, qui 'redoutaient le retour de La Fontenelle
devant leurs mur,s, il se décida a réunir un corps d'armée

et les moyens nécessaires pour l'assiéger dans son île. En
attendant, les Quimpél'ois, peu rassurés, dans la crainte de
attaques, s'adl'essérent encore a KerolIain pour
nouvelles
leur venil; en aidé , Un article de dépense, daté du 9 mai,
,nous précise le jour où le capitaine de Concarneau reçut
cette invitation. « A un messager qui auroit esté dépesché

et envoyé par mes dicts sieurs g.ouveneur et séneschal,
pal' l'advis de partie des habitans de la dicte ville, à Concar­
neau, pour suplyer le sieur de Keranholen, gouveneur du

du di ct lieu de venir avec ses forces en ceste dicte ville.,
quel sieur Keranholen, auroict pareillement envoyé le dict

messager à Quimperlé, pour faire venir partye de ses trou­
pes y estant, auquel voiage ledict messager auroit esté .
troys jours etdemy et pour ce auroit eu deux escuz.) .
Kérollain séjourna deux jours à Quimper, du vendredi
soir 9 au dimanche matin 11 mai, d'apr'ès un autre article
qui mentionne quelle fut, pendant le même temps, la dépense
occasionnée par sa compagnie, qui n'était pas au complet.
« Du "IX may mil Vc HIIn dix sept, auroit payé au dict feu

Grouit pour auitre d$panse par le dict sieur de Keranhollen

et ses gens faicte chez ledict sieur GrouIt, qui a~roient esté

mandez venir au secours de ladicte ville contre l'effort du
sieur La Fontenelle et ses forces qui lui venoient de Pontivy

Hennebon et d'ailleurs, la somme de cent cinquante livres

dix-sept sols, le tout par le commandemen t et de l'adveu de

la ville, recours au bl'ève par le dict GrouIt fourny, ' datté

du neuf may mil Vc HlI dix-sept. En comparant · 'ce

chiffre au précédent payé le 5 mai a l'hôtelier GrouIt, on
peut juger si nous nou~ sommes témérairement. avancé en
prétendant que, lors de la tentative de La Fontenelle,

devait avoir une troupe bien plus considérable que
Kerollain
la faible escorte de six cavaliers qui l'aurait accompagné,
d'après les mémoires du chanoine Moreau .
Sourdéac fit ses préparatifs pour attaq~er La Fontenelle.
Ogéé et le chanoine Moreau ne nous donnent pas la date de
son entrée en campagne et ne sont pas d'accord sur la durée
de cette expédition. C'est encore le miseur Chevillart qui va

nous éclairer à ce sujet. Les dates sont les j.alons de l'his-
toire. .. on ne saurait apporter trop de soin à les préciser, sans
elles, on ne peut classer les événements à leur véritable place .

Sans perte dé temps, il ordonna aux garnisons suivantes
de se dirig81', en totalité ou en partie sur le Faou, point de
rassemblement de son armée. Elles provenaient de : Brest,
Quimper, Dinan ... Morlaix, Tonquedec, Guingamp, Pont­
l'Abbé ... Concarneau; Lannion, Tréguier, plus trois compa­
gnies de Suisses du régiment d'Erlac, soit environ quatre
mille hom.mes, tant en infanterie que cavalerie. Le parc de
siège fut fourni et appeovisionné par les villes de Brest et
de Quimper. Comme lieutenants, Sourdéac s'adjoignit le
baron de Molac, Kergomar et de la Tremblaye.
C'est le 11 mai que le contingent de Quimper se mit en
marche. « Du dimanche unziesmc may mil Vc IIIIn dix sept ...
Messieurs de Keranholen et Manjance(Magenc~) sont partis
pour se joindre a l'armée de Monsieur de Sourdéac, estant
au Fou; ausquelz auroit esté fO~lrny trois guides, scavoir:
Louis Paigné, Hervé Le Toullec et Jan Omnès, les dits
Toullec et Pa igné ont esté deux jours et ledict Omnès cinq
jours pour espionnage, et auroient eu à raison de BO sols
par jour, chacun d'eux la somme de quatre escus etdemy. »
AussÏt6t ses troupes concentrées, Sourdéac, avant
. d'assiéger l'île Tristan, résolut de se rendre a Penmarc'h,
pour s'emparer du château de Kerousi, où La FonteneHe ,
avait placé une forte garnison qui, a un moment donné,
pouvait faire une' sortie et entraver son expédition sur
Douarnenez. Dans ce but, il partit du Faou et s'arrêta un
instant a Locrenan, ·qu'il quitta le 15. Le compte de Che­
villart nous indique l'itinéraire que l'armée suivit pour
atteindre Penmarch. « Les dicts sieurs de Sourdéac et gou­
verneur font partir (de Quimper, le 14 mai) les quatre mes-
sagers, dès les dix heures du soir du dict jour, pour aller a
l'armée estant a Locrenan, afin de guider la dicte armée
d'aller a Sainct Allouarn et de la a Pont-l'Abbé et de la a

Penmarch, ausquelz messagers, pour avoir esté occupez
quatre jours, auroit esté payé à raison de 30 sols toul'nois
par jour pour chacun d'eux, 'la somme ' a uict escuz. »

La distance de Locrenan à Penmarch ne dépasse pas
50 kilomètres; l'armée mit probablement deux jour~ à la

franchir et dut arriver à destination le 18 au plus tard.
Sourdéac prit la place d'assaut, passa une partie de la gar­
nison au fil de l'épée et fit pendre le reste. Son artillerie
était dirigée par Henry Berthou, le canonnier de Quimper,
aidé de Rehé de Vuleren et d'un matelot leur coadjuteur,

qui reçurent chacun un écu pour se rendre de Quimper à
Penmarch. « Plus aux sieurs Jean Quelfen et Guillaume
du Pré, députés pour la conduite des canons ,et garde des
munitions, durant le siège du dict fort de Penmarch où ilz
ont esté occupez d~puis le 18 du mois , de may jusqu'au
22 dicelluy, auroit payé pour la dépanse douze livres. »
Nous ne saurions donner précisément la date de la prise
du château de Kérousi, mais il est trés-probable que
Sourdéac s'en empara le 22 mai, car le surlendemain, il ,

donna des ordres à plusieurs compagnies restées au Faou

de venir le rejoindre à Douarnenez et se mit en marche le
même jour, dans l'intention de faire le siège de l'île Tristan.
« Du vingtquatriesme may mil Vc IIIIn dix sept, jour de
samedy, à quatre guides fourny à _ mon dict sieur de Sour­

déac, pour guider l'armée à Douarannenès, auroit payé à
chacun des dicts guides, pour deux journées, à raison de
30 solz tournois par' journée faisant ensemble quatre
, escuz. )

« Aussitôt son arrivée, qui eut lieu le 25, il reçut un déta­
chement de pionniers, venant de Quimper, pourentrepren­
dre les ' travaux du siège. Mais, ces travaùx étaient d'une
difficulté inouïe; le repaire de la Fontenelle, protégé par la
. mer, n'était abordable que d'un seul côté joignant la terre
ferme; lorsque la marée était basse, il était impossible d'y
établir des tranchées ou des chemins d'approche, et la

plage elle-mème était dominée par le canon des assiégés.
« Ce beau siège, dit le chanoine Moreau, aussi téméraire-

ment entrepris que mal poursuivi, dura un mois ou six
. semaines (1) avec aussi peu d'avancement le dernier jour
que le premier, étant l'ennemi dans une place avitaillée de
toutes provisions. Or, quand il y eut eu devant trente mille
hommes, qu'ils eussent été soutenus, ils n'y eussent rien'
fait et n'y avaient à craindre que la famine ou trahison,
chose à quoi on avait fort bien pourvu. )
Par une nuit obscure, en pleine marée, les assiégés firent
une sortie et attaquèrent à l'iinproviste, du côté de Tréboul,
le ,quartier du capitaine Magence, qui fut tué, avec grand
nombre des siens.
découragé, comprenànt l'impossi-
A bout de moyens,

bilité de réduire son ennemi paisiblement à l'abri et qu'une
flotte ravitaillait abondamment, Sourdéac, pour se débar­
rasser des soucis d'un siège qui menaçait de s'éterniser,

ne crut mieux faire que de s'absenter de son camp, sous
différents prétextes et d'en confier le .commandement au

baron de Molac. Parfois, il. va à Quimper, où il sJinstalle .
dans un logis aménagé par la viqe, qui poussa la géné-
rosité jusqu'à lui garnir largement sa bourse; on le voit

aussi prendre ses aises à Saint-Pôl-de-Léon, a Brest ... d'où
« il écrit, le 25 juin, à la noblesse de Léon de le venir trouver­
a l'armée devant Douarnenez » Le 16 août, il arrive encore
à Quimper; de son logis il adresse des ordres a l'armée de
siège. C'est à la fin du mois d'août que les assiégeants:
apprenant que les Ligueurs se réunissaient à;. Vannes, à
Pontivy et à Hennebont, pour marcher sur Douarnenez,
crurent prudent de lever le siége, après l!n conseîl de guerre
présidé par Molac, en l'absence de Sourdéac.
Cette détermination fut prise au grand regret des habi .
tants de Quimper, qui s'étaient imposé cl'~normessacrifices
et qui redoutaient de voir encore appara.itt'e leur terrible

(:l) Bien plus longtemps, comme nous le verrons tout à l'heure .

voisin. A ce sujet ils écrivirent au maréchal de Saint-Luc
deux lettres dont la date nous apprend le terme de .ce blocus,
qui dura pl'ès de trois mois: du 1 septembre « à, un autre .
messager pour avoir esté devers le dict sieur mareschal,
luy porter lettre pour le supplyer de continuer le siège
devant le fort de Douarannenès, qui fut levé d'une partye,
suivant l'advis donné par le dict sieur de Sourdéac, auroit
payé le dict Chevillard la somme de sept escuz. A un
autre messager (1), pour avoir esté donner advis par lettre
au dict Monsieur le mareschal, du lèvement inopiné du
dict 8iège de devant le fort de Douarannenès, auroit esté
payé pareille somme de sept escuz. » •
L'artillerie de siège était déjà, revenue à, Quimper, comme

l'indique cet article de dépense, « du XXX aost mil VC
IIII*· dix-sept auroit payé à, trois charpantiers, pour avoir
racoustré le pont de la porte Médard pour faire entrer les
canons du dict sieur de Sourdéac en ville) 36 sols. A
Henry Berthou et René Cunnien., pour leur salaire durant
]e tems de quatre moys qu'ilz au l'oient esté occuper aux
sièges de Douarannenès et de Penmarch, auroit payé un
escu par jour et pour ce cy 123 escuz. »

Poudre, balles (boulets), armes et mèches.

Ces munitions fournies par la ville s'élevèrent à, la somme
de 1,137 écus, 48 sous (aujourd'hui près de 17,000 francs),
« d'après l'estat baillé par le garde- de l'artillerye et muni­
tions dicelle ville, signé Martin ' de la Masse, du 22 no-
·vembre 1597. » Voici, le détail des livraisons les plus Impor­
tantes. 2)260 livres de poudre ègrainée, à, 20 sols la
livre, 753 éc. 20 sols. 174 balles de batterie (boulets de

(1) La date manque, mais elle doit être très rapprochée de celle de la
lettre précédente. . .

siège), chaque boulet .du poids de 20 livres, 174 éc. 136
balles de couleuvrine, chacune pesant 6 livres, 40 éc. 48 s.
- 370 livres de balles de différents calibres, J7 éc. 40 s. "
. Le métal de ces boulets coûtait trois sols la livre. On re-
marquera que le calibre de l'artillerie est de 6 et de 20 livres;
pour se servir de ce dernier projectile, il fallait des pièces
d'une dimension et d'un poids énormes, aussi, leur transport
était-il de la plus grande difficulté. ' Figurent ensuite sur
le relevé, 6 mousquets à 4 écus chacull, 24 éc. 200 livres
de mèches à 6 sous la livre, 20 éc. Cette grande quantité
prouve qu'à cette époque, on connaissait peu l'usage de la
pierre à feu et que l'infanterie était armée de fusils amèche.
- 84 piques à raison de 4 livres chaque pique, 112 écus,
etc.

et autres
englns
Des canons, leur attirail, munitions
de guerre.
Ce chapitre monte à la somme de 435 écus, 10 sols
(6,525 francs). La ville eut à fournir une grande quantité
de gabions et de facines, confectionnés dans les l/ois de
Plomelin, et qui furent transportés par eau a Penmarch .

Elle livra 32 serpes a 20 sols chacune. 17 cognées a
17 sols. 36 civières a 6 sols. ' 68 pelles de bois a 5 sols.
- 16 pêlles en fer a 22 sols. 345 sacs a 15 sols; ces
sacs étaient probablement destinés a' contenir de la terre
pour construire des épaulements. Les réparations au ma-
tériel de l'artillerie s'élevèrent à un chiffre très élevé. A
cette époque, la conduite des canons était dans l'enfance,
surtout en Bretagne. Quand on voulait transporter une

pièce, on devait renlever de son affût, qui n'était pas alors
disposé pour recevoir un attelage, et on la plaçait sur une
chal'rette, qui devai t être . solidement confectionnée pour
supporter son énorme poids. Voici ce qu'il en coûta pour

réparer les deux voitures qui servirent à transporter « les
deux grandes piéces vertes » prètées par les bourgeois de
Quimper (1). .
« Auroict payé pour réparer de neuf, desmonter et monter
les roues des deux. charettes pour deux grandes pièces

vertes de ceste ville, savoir aux dict Jan Jezecquel, pour six
journées à 30 sols par jour, cy 9 livres. Au dict Po..ul L~
Cantal ' et Loups Avelguen, à chacun pour six journées,
auroict payé ledil~t Chevillard six livres à chacun fesant
12 livres. ' Plus aux dicts Coatbécham, Maël et Guillaume
Le Berre) qui auraient chacun d'eux six jours, aurait payé
à raison de 15 sols tournois par jour la somme, de 13 livres
10 sols. Item, pour avoir faict faire 260 clous, savoir
pour clouer les bandes de fer des roues de charettes pezant
ensemble le nombre de 80 livres de fer, pour ce 2 escus. -
Item, aurait faict faire pour les quatre roues des charettes
56 cercles de fer pour soutenir les dictes bandes, chacune

bande pesant deux livres et demye fesant ensemble cent
douze livres, pour ce 3 escus et derny. Plus aurait
achepté 20 livres de fer pour garnir quatre pièces de bois
pour servir de lymon (timon),cy 30 sols. Item, aurait fourny
40 livres de fer pour fairer les goujons de ressort· et des
chaînes de fer pour tenir les lymons des charettes fesant
ensemble un écu.» , En tout) 55 livres) 10 sols ou 267
francs de nos jours. .
On exécuta de nombreuse~ réparations de ce genre, non
seulement à Quimper) mais encore à l'armée de siège, ou
des ou vriel~s réclamés par M. de Sourdéac furent envoyés
« par autorité de justice » ; sur sa demande, ou plutôt ses
ordres, on y expédia aussi des matériaux de toute espèce
• (1.) Pièces vertes, c'est-à-dire en bronze; ces deux canons provenaient
io9~ et qui était chargé
d'un vaisseau flamand capturé à Penmarch, en
de munitions de guerre destinées aux HoyallX.

clous 'et de fer destinés à ces
et pour 76 1. 12 s. 6 c, de
réparations.

De la fabrication du pain de lnunition et des 'charrettes
pour le transporter à L'armée.
Pendant quelque temps, au commencement du siège, la
ville fut obligée de fabriquer une certaine quantité de pains
de munition; elle dut installer une boulang.erie, acheter
. des pétrins, des balances avec leul's poids, ainsi que le
combustible nécessaire. Cette boulangerie, établie dans un
local loué par la municipalité, était pourvue de sacs dans
lesquels on mettait les vivres qu'on expédiait a l'armée (1).
Des charrettes les portaient à destination; leurs conducteurs
recevaient de 20 à 30 sols pa!' voyage. Ce genre de dépense
couta 50 ~cus, 20 sols et 6 deniers. .

Blés fournis par la ville.
« Plus aurait fourny et mys au magasin de ceste ville le
nombre de cinquante-trois rases fromant pour ayder à .
l'entretien du dict siège de Douarannenès, à raison de dix
livres dix sols tour'nois la rase, montant le dict nombre de
bled a la somme de cinq cens cip.quante dix livres, dix
sols lournois, quelz cinquante trois rases fromant auraient
esté avancez paf' quelques particuliers qui en demandent au •
dict Chevillart remboursement, suivant l'assemblée de ville
du seiziesme juillet quatre vingtz dix sept et pour ce 556
. livres 10 sols.
« Plus aurait payé à Cristofle Le Gal, boullanger, la
somme de 13 escus 17 sols et derny, pour trois combles fro­
mant my en farine pris par feu M. Girondeau, munition-

(i) La pâte de ehaque pain, avant d'être mise au four" devait peser
quatre livres et demie.

naire au moulin du Duc appartenant au dict boullanger» (1).
Le total de ces deux fournitures s'élève à 198 écus, 38 s.
6 deniers.
De r équipage des vaisseaux.

Tel est le titre de ce chapitre. Eq:uipage ne doit pas être
pris ici dans le sens absolu du mot; le miseur Chevillard
entend par cette expression dépense pour l'approvisionne­
. ment et les réparations de la flotte. Du reste, ces vaisseaux
n'étaient que de modestes petits bâtiments, ordinairement
employés en temps de paix au cabotage, et qu'on utilisait, en

certaines circonstances. C'est ce qui arriva en l'année 1597;
on 's'en servit pO\lr transporter quelques munitions à Pen­
march, et surveiller l'Odet, où les navires de la Fontenelle,
autrement considérables, remontaient jusqu'aux environs de
Quimper. Du l'este, leur nombre et leurs moyens dè· défense
n'étaient guère. à redouter, si on en juge par les articles
suivants. « Davantage, auroit fourny aux deux navires
de guerre de Penmarch le nombre de dix huict piques, à
raison de quatre livres chacune, 72 1., esquelz comman-
doient respectivement Guyon Cariou et Pierre Lamouroux,
du di ct 'Pennemarch. Plus auroit baillé à Yvon Le Gar-
, . den, commandant en la patache de mon dict sieur gouver­
neu,r, quatre piques valant 16 1.» C'étaient donc trois
bâtiments tout au plus. Par cet autre article, où il est quès­
tiCln de la voilure de l'un d'eux, on appréciera son impor­
tance. « Du 28 jour de juin, pour faire trois voilles
contenant chacune 36 aunes de toile. et de longueur 6 aunes
et de laisse six autres aunes, revenant chacune voille à

(1) Jusqu'à présent, nous n'avon,s pu découvrir la contenance de ces
mesures auxquelles le 'mauuscrit donne le nom de rase · et de comble; il
serait intéressant de les comparer à l'hectolitre de nos jours. En cette
année 1597, la famine était très grande en Bretagne, le blé devait être
d'un prix très élevé.

21 1. 12 S., fesant 64 1. 16 s.) En ne comprenant pas le
prix des piques, qui figure déjà dans le chapitre des mu­
nitions, la dépense pour l'équipage des vaisseaux s'éleva
en totalite à 25 écus 40 sols seulement.

« Des deniers baillez et débourse.6 par leclid procureur
aux messagers, durant le siège mys devant Les forts de
Penmar-ch et de Douarannenès par le cl ict seigneur de
Sourcléac. »
L'énumération en est longue, et le total de ce chapitre
se chiffre par 252 écus 15 sols (environ 2,300 francs de notre
monnaie). Ces messagers, nou$le rappelons encore ici, non
seulement portaient des dépêches aux chefs de l'armée,
aux commandants des garnisons soumises au roi, ainsi
qu'aux municipalites des, villes alliées, mais encore on les
chargeait d'une périlleuse mission, celle d'espionner les
mouvements des troupes de la Ligue. C'es.t surtout pendant
le siège de Doual'nenez qu'on les multifflia et qu'on les
répandit dans les localités suspectes. Nous avons déjà cité

plusieurs articles les concernant, nous nous bornerons
seulement à en rapporter quelques autres.
. «( Du 21 me may 1597, à Yvon Bayon, espion, pour avoir
esté espionner à Douarannenez J du commandement du '
sieur gouverneur, où il aurait esté occupé deux jours,
60 sols. » Cet homme fut aux renseignements peu de jours
avant l'arrivée de Sourdéac devant l'île Tristan. « Du

3 juin, ft trois espions qui auraient esté envoyés, savoir
un au Faout et. au Saint, l'autre à Gourin et vers Carhaix,
et l'autre Châteauneuf, Vuelgoet et Bl>aspartz, pour savoir
s'il y eut des troupes en aucunes des dicte.s places, comme
mon dictsieur MA,ignan (Magnane) avait entendu,et auraient
esté les dicts espions l'espace de quinze jours, le dict
Chevillart auroit payé à ic·eux la somme de sept escuZ et
demy. Du 6 juillet, à chacun des cinq païsants de

Plogonnec qui auroien t prins et 'rendus en ceste dicte ville
deux laquais appartenant à la Fontenelle saisiz de deux
paq netz de lettres, auroit payé à chacun d'eux dix sols
tournois et pOUf' ce 50 sols. Du 17 aost, à Jan Jezequel, '
pour avoir aporté une lettre à rarmée de la part du dict
gouverneur, pour l'advertir que les navires de La Fontenelle
estoient en mer, auroit payé 30 sols. » _ Sans doute en ce
moment cette flotte était en quête de ravitaillement. ,
(( Du 30 aost, à trois guides q ni auroien t esté guidé l'armée
d'allel' à Kemperlé, savoir, deux aux Suisses et l'autre à
Monsieur le bamn (de Molac), aur'oit payé pour quatre
jours à chacun trente sols par jour, font 6 escuz. »

Voici trés-probablement à quelle circonstance se :r:éfère
ce dernier article. Molac, qui, à son grand regret et sur les
- ordres de -Sourdéac, avait levé le siège de Douarnenez,
aussitôt son arrivée à Quimper, apprit que les Ligueurs
étaient réunis à Quimperlé,sous les ordres de la Grandville.

Sans perdre de temps, dès le lendemain de son- arrivée, il
marcha à leur rencontre. Mais la Grandville n'était déjà
plus à Quimperlé; Molac le suivit et l'atteignit près du
château de Quimerch, en Bannalec. C'est sous les murs de
ce château, qui appartenait au sire de Tinteniac, que se
livra cette sanglante bataille où les Royaux remportèrent
une victoire qui contr'ibua à mettre fin à cette cruelle guerre
civile qui durait depuis si longtemps. Dans cette affaire, le
sire de la Grandville fut tué; Molac, qui y fit des prodiges
de valeur, fut blessé en chargeant, ainsi que d'Erlac, le
commandant des Suisses. Jusqu'à présent, nous n'avons pu
découvrir le jour ni le mois -de cet important évènement.
D'après la mise en route de l'armée de Molac, qui eut lieu le
30 août et qui fut dirigée sur Qllimperlé,par les trois guides
payés par le mi seUl' Chevillart, en considérant la pJ'ompti-
tude des mouvements des t'l'oupes royales, on peut avec
certitude 1 ui assigner une date entre le 2 et le 5 septembre,
au plus tard. .

De la dépense des députés.
A notre grand regret, Chevillart ne nous donne pas con-

naissance des missions confiées à plusieurs habitants de la
la ville; il se borne a indiquer les frais de leurs voyages.
seulement citer que: « Du 12 juin
Nous pouvons
1597 il auroit payé aux députés, compris le salaire de leurs
serviteurs et loyer de leurs chevaux, pOUl' avoir esté en
païs bas du Léon acheter de la pouldre et des balles pour
le siége de Douarannenés, la somme de 218 escus, 45 sols .
Du 24 aost, aurait, par les mains d'André Girondeau,
payé au sieur capitaine Parceveau, député pour aller teouver
monsieur le mareschal (de Saint-Luc),la somme de 78 escus.»
. Sans doute, ce capitaine était chargé, pal' les habit~nts de

Quimper, de supplier ce maréchal de s'opposer à la levée
Douarnenez. Il était accompagné de Jacques Le
du siége de
Prédour, bourgeois de la ville,.qui reçut 51 .écus 40 sols.
Le total de ce chapitre s'eléve à 574 écus'25 sols .
« Des payements faitz au sieur de Sourdéac et pour' les
I!omoditez du logix du dict sieur de Sourdéac. »
Nous avo'ns vu que Sourdéac, découragé et ne sachant
quels moyens employer pour s'emparer de l'île Tristan,
confia les opérations du ~iége à Molac, mais sans aban­
donner précisément le commandement de l'al'mée, où il
faisait de courtes apparitions.' Il venait souvent à Quimper"
dont les habitants mirent un hôtel à sa disposition et en

outre 'pourvurent à tous ses besoins, en lui donnant une
somme de 1,200 écus. « Plus le dict Chevillart au l'oit
baillé et payé douze cens escus au sieur Vincent ppur déli­

vrer au dict sieur de Sourdeac ». Ces 1,200 écusrepré~
sentaient alors une valeur de 18,000 francs de nos jours.
C'était sortir de leurs habitudes. Ordinairement, les Quim-

pérois acquittaient les notes présentées par les hôteliers
. chez lesquels ils plaçaient les personnages de passage en
leur ville. Comme leurs hôtes usaient souvent de peu de
discrétion et abusaient de llhospitalité qu'on leur offrait, en
faisant des dépenses exagérées, pour éviter cet abus de
dans cette circonstance, ils crurent sans doute
confiance,
agir prudemment en s'entendant avec l'argentier de Sour­

déac, à qui ils remirent une somme convenue à l'avance.
Cette mesure leur' fut probablement aussi avantageuse

qu'économique. '
Quant au (( logix » mis à la disposition de Soul'déac il

devait être .splendidement aménagé et pourvu de meubles
. de toute sorte (( les comoditez » qu'on y ajouta se bornent
à peu de chose, et coûtèrent en tout 25 écus 39 sols (385 fi.)

On y voit figurer quelq ues charretées de bois, du charbon,
l'achat de plusieurs serrures, de la paille, des réparations
aux écuries, pour y placer les .chevaux de ce seigneur, des
tonneaux à serrure pour contenir l'avoine etc. La dépense
totale s'éleva au chiffre respectable de 1,225 écus 39 sols.

Des frais particuliers.
Ce dernier chapitre, qui monte à 47 écus, est relatif aux
-frais occasionnés pour l'établissement de ce mémoire, qui
fut dressé en qUatre expéditions et accompagné de nom­

breuses pièces justificatives; dans ces 47 écus sont compris
les honoraires des procureurs et des avocats qui apportèrent
leur coricours à sa rédaction. .
s'éleva a la somme de 4,172- écus
Enfin, ce mémoire
57 sols, qui vaudl;aient 72,000 francs aujourd'hui. (, Il fust
faict Ul'resté et signé le lundy 4 may 1598 », par Jacques­
Laueent Sénéchal, Mtre Lohéaec, procureur du roi, Chevil-

lart, miseUl' sortant, François Füric, miseur en chalige, et .

les délégués de l'assemblée de
ville, Corentin Le Baron,
Furi" c et Mtre Stangier . .
Gilles
Nous ne possédons que fort peu de renseignements sur
Allain CheviIlart; nous savons seulement qu 'avant sa
nomination de miseur,' en 1597, il avait été successivement
fermier de la Pancarte et du Devoir de l'écu par tonneau
de vin, ce qui indique qu'à cette époque,i! devait être un des
riches bourgeois de la localité. Le chanoine Moreau le cite
dans ses mémoires comme ayant fait preuve de courage, le
jour où Lezonnet tenta de s'emparer de Quimper, par sur-
pri!:3e. A la tête de quelques habitants, réunis à la hâte, il
défendit les barrières de la rue Neuve et de l'hôpital Sainte­
Catherine; en arrêtant quelque temps l'ennemi, 'il permit à
ses concitoyens de prendre les dispositions nécessail'es pour
empêcher l'envahissement de leur ville.
6 mai 1885. '
FATY,
lIinj or en retraite.