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Bulletin SAF 1885


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Hervé de Porzmoguer. Documents inédits.

M. de la Borderie

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VII

HERVE DE PORZMOGUER

DOCUMENTS IN8DITS
Par l'héroïsme de sa mort, Hervé de POf'zmoguer, en une
heure, conquit l'immortalité. Rien de plus illustJ'e que sa
mort, rien de plus inconnu que sa vie. Avantlejour (1).
illuminé par son sacrifice) où était-il? que faisait-il ~ Nul ne
le sait. Dans cette pénurie de renseignements on se tien t ,
heureux de rec,ouvrer quelques notions généalogiques sur
les rejetons de sa famille, aux XVIIe et XVIIIe siècles (21.
Nous espérons donc qu'on trouvera quelque intérèt dans
les documents que nous produisons ici, qui nous font con-
naître des cirèonstances importantes. relatives à la per- ,
sonne de . Porzmoguer dans le courant des dix dernières
années de sa vie.
Au Congrès breton de Guingamp, en 1875, nous avions
donné leçturoe de ces documents, mais ils n'ont pas été rju,­
bliés, ils sont donc encore dans leur primeUt'.

Leur authenticité ' est incontestable; ils proviennent des
Registres de La ChanceLLerie de Bl etagne, des années

Un seul de ces documents, le plus important et le plus

(1.) Sur ce jour, sur la date du ,combat de la Cordelière et de la Ré­
gente il ne peut, quoi qu'on en ait dit, y avoir de doute: c'est bien le
'1.0 août 151.::3. Non seulement cette date est ùans Bouchart, chroniqueur
mais elle a été établie très-solidement par le savant Jal
contemporain,
dans son étude historique Marie la' Cordeliëre, voir A 1lnales mari.times
et coloniales, décembre 1.844. .
(2) Voir Bull. de la Société archéol. d1b Finistère, t. XI, 1. re partie,
p. 1.6-1.7 et t. VIII, p. 148 et 1.64. .
BULLETIN ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. Tome XII. (Mémoires). 9

ancien ... nous est arrivé avec son texte complet. Pour les
autres, les Registres, comme c'est le cas le plus habituel,

ne nous les font connaître que par extraits, mais par ex­
traits authentiques et officiels .
La première de cés pièces est un .mandement ou or­
donnance de Lo"uis XII, roi de France, du 17 août 1503 ...
presr.rivant la formation et l'armement d'une flotte desti­
née à protéger les navires marchands sortant des ports de
Bretagne pour aller faire le commerce dans la Manche ou
, . dans l'Océan~ jusqu'à l'Espagne. C'était là, en Bretagne,
depuis le XIVe siècle (1372), une institution réglée et qui avait
singulièrement favorisé le développement du trafic mari-
time : on appelait cette flotte le convoi. Quand il n'y avait
pas de guerre, quand les armateurs bretons ne, voyaient
pas de péril sur mer pour leurs navires, s'ils ne réclamaient
pas la protection du convoi, le duc ne formait pas de flotte
et le convoi ne sortait pas. Mais, en 1.503, entre la France
et l'Espagne la guerre sévissait, les Espagnols infestaient
la mer; le commerce breton ne pouvait se passer du
convoi, et il avait de bonne heure adressé au roi d'instantes
requêtes à ce sujet.
tarda pas ft y faire droit : mais comment? A
Le roi ne
cette époque l'Etat n'avait pas de marine, tout au plus, par
exception, quelques bâtiments. Quand le souverain avait
besoin d'une flotte ... il la formait par voie de réquisition, en
frétant, pOl,lr le service public, un cer,tain nombre de na­
vires empruntés soit à des villes, soit à .des particuliers,

que le .trésor du prince indemnisait.
En ce qui touche la Bretagne, quand il s'agissait de
une flotte de convoi, le dùc, et au XVIe siècle le roi,
former
par mandement ou ordonnance, les bâtiments
désignait,
requis pour ce service 'et fixait pour chacun d'eux le chiffre
jours après, une autre ordonnance
de l'équipage. Quelques
nommait l'amiral OlÎ capitaine général, le capitaine de

chaque vaisseau, et fixait les dates des divers voyages du
convoi, habituellement au nombre de trois : le premier du
15 septembre au 15 novembre, le second du 15 janvier au

15 mars ou du 1 février au 1 avril, le troisième du
1 er avril au pl' juin, ou parfois du 1 er mai au 15 juin. C'é-
tait là, on le voit, la sauvegarde du commerce et de la
prospérité de la Bretagne : l'ordonnance ci-dessous du roi
Louis XII s'en explique nettement. ' \

Elle désigne pour constituer la ft.otte de convoi quinze
navires ou nefs, dont elle donne les noms et auxquels elle
attribue, ensemble, 1690 hommes d'équipage. Dans cette
énumération figure l'article suivant:
« Le cappitaine' PROMOGUER (sic) 6 sa bande, avec quatre
« navires, par estime, 300 hommes (d'équipage). »
Ce n'est pas tout: à la fin de l'acte, après la date (Van­
nes, 17 août 1503), le roi ajoute cette clause:
« Et pour tant que dempuix la dabte de ces presentes
« nous est venu à cognoissance que ledit PORTZMOGUER

« a recoupvré [c'est-à-dire pris sur les ennemis] ung na-
« vire de 300 tonneaux, ordonnons audit PORTZMOGUER,
« oultre le nombre cy-dessus à luy ordonné, le nombre de
« 200 hommes pour l'equipaige dudit grand navire. )
Ainsi, sur cette ft.otte de convoi, comprenant au total 16
bâtiments avec 1890 hommes d'éqUlp~ge, Porzmoguer avait
une bande, c'est-à-dire une compagnie, un corps de troupes
sous ses ordres, recruté et entretenu par lui, embarqué sur
cinq navires montés par 500 hommes d'équipage, et il était
seul dans la ft.otte à avoir une pareille situation. Sarenom-
mée, son importance comme chef de guerre et comme
homme de mer était donc dès lors bien établie, dix ans avant
le combat de Saint-Mathieu.
'La confiance qu'inspirait son habileté, son courage" pa­
raît encore dans les termes du mandement par lequel le
roi ordonne au capitaine de Morlaix de lui fournir pour

son atmement tout ce dont il autai ~ besoin (pièce nO II)
Les autres pièces nous le montrent sous un jour un peu
moins favorable. C'était avant tout un batailleur: quand il
;y avait guerre, J 'ien de mieux, ses coups tombaient dru
comme grèle, en tout bien, tout honneur, sur les- ennemis
de sa patrie. La guerre finie, il ne pouvait se résigner à '
subir les lois de la paix; sur mer la tentation de s'y sous­
traÏl'e était trop forte, la facilité trop grande; il cédait) et
il tombait dans la piraterie. C'est ainsi qu'en 1506 il s'em­
para de navires et de riches cargaisons appai'tenant à des

marchands écossais (pièce n° III ). Poursuivi pour cet ex­
ploit devant le Conseil souverain de- Bretagne (qui alors
remplaçait le Conseil du Duc), il fut condamné à restituer,
, et même, ses complices ayant trouvé moyen de ne pas se
laissel' prendte, lui seul il paya pour tous; trois ans aprés

(en 1509) iln'ava:it pas encore réussi à les faire contribuer

(piéce n IV).

Dans la derniére de nos pièces, c'est encore Je batailleur
qui pamÎt, mais du moins ce n'est plus le pirate. Nous
, vOJTons Porzmogùer accusé de meurtre sur la personne de
Jean de Keraëret (pièce n° V) du 23 février 1510). Il s'agit
là d'un e querelle entre Bretons, entre gentilshommes; des
mots, des récriminations, des injures on passait trop facîle­
ment aux coups, et parfois sans intention aux mau­
vais, coups. Ne connaissant pas le détail de l'affaite nous ne
pouvons déterminer , ni en bien ni en mal, dans cette
circoqstance, la responsabilité dePorzmoguer-.

Cf{ qtl1ressort surtout de nos do6ùments inédits, c'est le

tempérament essentiellement belliqu:eux de notre héros, c'est
l'importance de son r61e, comme homme de mer et de
guerte, dix ans avant la bataille terrible qui, en tuant son
corps, fit vivre son nom et sa gloire. . .
militaire, d'une splendeur épique, incompara­
Cette mort
ble, fut clone le couronnement naturel, la consécration, la

récompense héroïque d'une vie dont chaque jour avait été
un combat.
Quant au nom du héros, remarquez que l'altération en
remonte bien haut, qu'elle est contemporaine -du héros lui­
même, puisque, dans le récit de Bouchart il est appelé
Primoguer, et dans le Registre de la Chancellerie de 1503,
une fois au moins, Promoguer. Il est probable que de tout
temps c~ nom a été par bien des bouches mal prononcé .

De cette altération voici un autre exemple curieux, tiré
d'un livre peu connu, composé au XVIe siécle par un Breton,

le Compendium "temp%um du P. Jean Rioche (1), abrégé
intéressant de l'histoire générale de l'Europe depuis J ésus­
Christ, où les faits q ai interessent la Bretagne ont une
place de faveur. Sur le combat naval de Saint-Mathieu du
10 août 151a, Rioche dit:
« Inclytus dominus PRIMOGAIUS seu PORMOGOET, Brito
« magnanimus, ductor regiœ navis quam Anna regina, à
« proprio insignians torque predecessorum ducum Britaniœ,
« Cordigeram nuncuparat, regiam navem Angliœ Regen-

« tem, cui admiraldus insidebat, pleno velo invadit. Et

« diutissimo et terribili certamine anchorisque atqne buri-....
« nis connectuntur indissolubiliter et quemdam voracem "
« ignem [Pormogoet] in je ci t, qui ambas naves afflagravit,
« nemine salvo. ) (f. 471 1'0).
Si Pormoguet ou Pormogoer, l'une des variantes données
par Rioche, se rapproche fort de la forme véritable Porz-
mo au moins que notre moderne Primoguet, dont ce :latin est

peut-être l'original, car Primogaius (latiJ?) : : Primo.qai

(français), et pour l'oreille Primogai est tout à fait identi-
que à Primoguet. .

(i) Rioche, originaire de la paroisse de Plouasne, était Cordelier à
Saint-Brieuc. Son livre Iut imprimé à Paris, non en i080, comme le
dit la Biographie bretonne (II, 7 i~), mais en i076. .

Mais ce qui est surtout notable dans le passage ci-des­
sus., c'est le ton vibrant, ému, fièrement patriotique, auquel
s'élève tout à coup le chroniqueur. L'héroïsme de Porzmo~
guer était dès lors un des plus brillants et des plus précieux
fleurons de la çouronne de gloire de la Bretagne: un Breton
n'en pouvait parler de sang-froid. .
ARTHUR DE LA BORDERIE.

(io03, i7 et 20 août).
Loys, par la grace de Dieu roy de France etc. à noz
allouez etc. salut.
Comme, po~r obvier aux entreprises faictes allencontre
de nous, de noz subgectz, pays et seigneuries par les roy
et l'oyne d'Espaigne, à present noz ennemys, nous ayons
drecé et faict assembler grosses armées en divers lieux tant.
par mer que par terre, si est-il que les bourgeoys et mar­
chanz de cestuy notre pays et duché [de Bretagne], .par
nous mandez, congregez et assemblez en nostre ville de
Vennes, entre autres choses, nous ont faict très instantes
dolliences (1) et remonstran?es c?mme n?stre~icte armée
par mer est à present en lomg.tames partles d lCy, et que '
journellement ili sont endommaigez par lesditz Espaigneulx.1
sont à grant flote sur la mer: à l'occasion de quoy ne
qui
peuent yssir hors des havres pour mener et conduyre leur
faict de marchandie, et que prochainement vient la saeson
de vendange, où est une grande partie du faict de leurs
véaiges tant pour vendre, achapter, trocquer et faire le faict
leur vocacion, qui cède et tourne au bien universel de
nostre pays et augmentacion de noz deniers et
cestuy
finapces : nous suppliilns quïl nous plaise faire drecer et
eqmpper en mer une autre bonne et grosse armée par
manière de convay, pour tenir et garder en seureté lesdiz
marchans avecquesleurs biens et marchandies, ainsi qu'est
de coustume quant le cas le requiert, et sur tout ce leur
pourveoir de remède convenable. .
Pour ce est-il que nous, lesdictes choses considerées,
desirans à nostre pouoir subvenir et ayder à nosdiz subgectz,
preserver de tout mal, dommaige et incon­
les deffendre . et
venient, et pour autres causes à ce nous mou vans, libera­
lement inclinans à la supplicacion et requeste desdiz bour­
geoys, marchans et habitants dudit pays, nous rendans cer­
tains des entreprinses et invasions surdictes, avons ordonné
et ordonnons par ces presentes ledit convay estre faict et
en telle puissance et numbre de navÏl~es et gens de
mis sus,
guerre comme par nous sera avisé et ordonné, ainsi mesmes
que en ce jour avons en nostre Conseil audit pays deliberé

(*) Arch. de la Loire-Inférieure. - Reg. de la Chane. de Bret. de

l'an io03, fD i67 recto.
( i) Doléances .

et conclut, et dont ~vons baillé articles et advertissemens
ès gens desdictes villes, en , mandant et mandons par ces
presentes ès maistres, contremaistres, carczonniers (1), et
ceulx a qui sont les navires cy apres declerez :
Premier la grant neif de Bouvardiére, avecques sa barque
neuffve, pour l'equippaige de laquelle sont ordonnez le num­
bre de troys cens hommes;
La [J.rant neif de Sainct Malo, -pour l'equippaige de
sont ordonnez sept vignt dix hommes; .
laquelle
La neif du sieur du Guémrxdeuc, Four l'equippaige de
sont ordonnez soixante hom mes;
laquelle
La neif de Lantriguer, pour l'equippaige de laquelle sont
ordonnez soixante dix hommes;
Le cappitaine PROMOGUER (sic) 0 sa bande, avec quatre
navires, par estime troys cens hommes;
Le navire nommé l'EspaigneuL de Kempercoreniin, pour
l'eq uippaige duquel sont ordonnez soixante et ·dix hommes;
La grant neif de Guillaume Finamour, pour l'equippaige
de laquelle sont ordonnez cent hommes;
Le navire Jehan Frolai, pour l'equippaige duquel sont
ordonnez le numbre de quatre vigns hommes; ,
La neif de Vennes, pour l'equippaige de laquelle sont
ordonnez le numbre de six vigns hommes;
La MicheLLe du Croesic, ..... pour l'equippage de laq ueUe
sont ordonnez le numbre de sept vigns hommes;
Le navire nommé le SeneschaL et le navire nommé le
Ch app 0 n, par estime sont ordonnez pour l'equippaige
d'iceulx le nombre de troys cens hommes:
Tout incontinent (2) iceulx et chacun respectivement
equipper, avitailler, artiller (3) etacoustrer prests d'aller leurs
diz navires, chascun en guerre, pour le faict dudit convay,
au plus tard dedans le cinquiesme jour de septembre pro­
chain venant, pour, iceluy jour, si le temps est con venable,
partir et saillir hors des havres et costes de ce pays et duché
pour la seureté et deffense desdiz marchans et [dela] chose
publicque dudit pays, sur paine, ceulx ,qui seront en deffault,
(1.) Carçonnier, carsonier ou carsenier. C'était le « chef de quart ».
(Jal, Glossaire nautique, p. ~32). '
(2) Remarquez que le commencement de cette phrase se trouve avant
l'énumération des navires du convoi: ' « Mandant il ceux il qui sont les
navires cy apres declarez ... tout incontinent iceux (navires) et chacun
respectivement équiper, avitailler, artiller l'J, etc. Ainsi se construit la
phrase. '

(3) Munir d'artillerie et de tous autres engins de gueire.

d'estre reputtez rebelles et d~soboïssans .3. nous et audit
pays, et comm~ telz estre corrIgez et pugmz.
Sur le debvOlr duquel convay, (1) lequel avons ordonné
et ordonnons par ces presentes estre prins et levé sur les
et marchandies subgectes audit debvoir en la forme
denrées
et manière acoustumée, par la main de nostre tresorier,
et commys, seront poiez et salarisez lesditz mais­
ses clercs
tres, cappitaines et equippaiges desdiz navires, tant de .
autrement, au pris, pour ~has- .
soulday, avitaillement, que
cun compaignon, de la somme de quatre livres monnoye,
tant pour gaiges,·avitaillement, droictsde navire, que autres
choses. Et eIi ouItre, joyront les cappitaines et eompaignons
desdiz navires des prinses et conquestes qu'ilz feront sur les
navires qu'ilz pourront avoir et explecter dessur les enne­
ad ce qu'ilz aint meilleur couraige de deffendre le pays.
mys,
Et pOUl' tant que, espoir (2), entre cy et ledit cinquiesme
jour de septembre pourroint venir vins nouveaulx et autres
marchandies subgectes audit debvoir, mandons expressé-
ment et conimandons à nostredit tresorÏer attendant
faire et bailler la ferme dudit debvoir de convay meptre
et deputer clercs et commys en chascun des portz et havres
de eestuy nostredit pays et lieux aeoustumèz, pour . recep­
voir et recueillir les deniers dudit debvoir. Sur lequel, pour
diligenter l'equippaige et avitaillement desdiz navires,
par nostre tresorier ou- sesdiz cbmmys qui
voulIons que,
sont sur les lieux, soyt baillé, poyé etavancé, ainsin que les
deniers viendront, èsdiz maistres, parczonniers (3) et .cal'C­
zonniers desdiz navir8s et chascun soubz le numbre de nos­
tre ordonnance faicte pour chaseun desditz navires, au
desir (4) desditz articles. Et iceulx maistres, parczonniers
et carczonniers [seront] parpaiez sur les deniers d'icelluy
revenu ou prix de la ferme surdicte, pour le temps de trois
chascun de seix sepmaines, à commencer audit
véaiges
cinquiesme jour de septembre et parachever selon le temps
saesons qui seront declarez à celuy que envoyrons et
et les
ferons admirai ou cappitaine general dudit convoy .
Et prenant nostredit tr~sorier, sesdiz clercs ou comIIlys,
(i) Le devoir du convoi était une taxe spéciale levée sur les marchands
et m~rchandises pour la protection desquels était tormée la flotte de
convm.
(2 Peut-être.
(3 Parçonniers, lat. partionarii, de pars: ceux qui ont part à la pro­

priétédu navire .
(~) Suivant les dispositions des dits articles .

relacion et quictance desdiz cappitaines et maistres desdiz
navires en presence de l'un de noz officiers de justice dessur
les lieux, voullons [ces relacion et quittance] valloir gaeant
et descharge à nostredit tresorier aux comptes qu'il en rendra
à la Chambre de noz Comptes, sans autre circuit: aux gens
de laquelle nostz'edicte Chambre des Comptes, .attendu <""que
ceste mise et despense est pour la seurté et deffense de
nostredit pays et preservacion de noz deniers, mandons et
commandons l'allouer en clèl'e mise. Si vous mandons, etc .
Donné à Vennes, le XVIIe jouI' d'aougst, l'an de grace
mil cinq cens et troys, et de nostre reign~ le seixiesme.
Et pour tant que, dem puis là' dabte de ces presentes, nous
est venu â congnoessance que ledit PORTZMOGUER (sic) a
recoupvré ung navire du port de ' troys centz tonneaulx,
ordonnons audit PORTZMOGUER, oultre le numbre cy dessus
à luy ordonné, le numbre de deux centz hommes pOUt
l'equippaige dudit grant navire. Donné comme dessus. .

(Seellé e 25 août 1503).

(HS03, 19 septembre) .
Mandement adreczé au capitaine. de Morlaix, par lequel
est mandé audit capitaine bailler à HERVÉ DE PORTZMOGUER,
capitaine sur mer, ordonné pour le convoy, des poudres
de canon, hallebardes et picques, qui sont audit Morlaix,
jucques au nombre qu'ils verront suffire, baillant caucion
de restituer lesdictes picques après son retour dudit convoy.
Signé Gibon. (SceLLé à Vannes Le 19 septembre 1503).
III'
(iD06, 9 juin).
Mandement de justice et evocacion au Conseil pour
J ehan et. Robert Abretons, frères, et Georges Yvon, mar­
chans frequentans la mer, du royaume d'Escoce et de la
nation d'iceluy: icelui mandement adreczé aux juges de
Rennes, Nantes, Treguer et autres, de faire enqueste et
informacion de pluseurs pilleries leur faictes par PORZMO­
GUER et autres; et ceulx qui seront trouvez chargez, les
rendre prinsonniers ou Bouffay de Nantes, ou ~es a.iourn~r
à comparoir en personne et par arrest audlCt ConseIl.
Raporteur, Macé. Signé Le Fourbeur (SceLLé le 9 juin 1506).

* Reg. de la Chane. de Bret., an 1503, f. U8 verso.
* Reg. de la Chane. de Bret., an 1506, f. 59 vO.

(USû9 nouveau style, 7 février).
Evocacion à Lesneven, pour HERVÉ PORZMOGUER ... à l'en­
contre de ses CO.l1sors et complices qui furent à la prinse de
certains navires et biens appartenans à Jehan AbT'eton et
Georges Yvon, Escoczois, affin d'avoir vers sesdiz consors
son recours pOUl~ les contl';aindre à poier et porter, chascun
d'eulx pro rata, la mise de la somme en quoy il a esté con­
damner poier ausdiz Escoczois pour r eparacion à la dicte
prinse. Signé Le Fourbeut'. (SceUé d evant le vice-chancelier
Le 7 février 1508 vieux style).
(WiO nouv. style,. 23 février).
Mandement dirigé au premier huyssier ou sergent requis,
pour le ProcureuT' général, Yvon Kerareec (s ic) et Jehan
Coetdelez, allenéontl'e de HERVÉ PORZMOGUER, touchant
mettre à execucion certains jugez autresfoiz ensuyz
comme est contenu en ung acte ataché à ce present man­
dement soubz le contreseel de la Chancelerie de la mort
ensuye en la personne de feu J ehan de Keraret : et ce neant­
moinz plegemens et opposicions, ou cas desquelz l'evoca­
cion au Conseil. Raporteur, Gedoyn, Signé Vaucouleur.
(SceLLé Le samedi 23féorier 1509 vieux style) . .

ÉCLAIRCISSEMENT
Le titre de capitaine sur mer, donné à Porzmoguer par
la pièce ci-dessus n° II, prouve bien qu'il était homme de
mer et non pas seulement chef de troupes, comme on l'a
cru en se fondant sur une relation de la bataille de Saint­
Mathieu attribuée à Pierre du Louët, neveu de 1a femme de
Porzmoguer, et publiée pour la première fois par M.Pol de
Courcy dans la Revue de Bretagne et de Vendée (année 1859,
2 semestre, p. 398). Cette relation nomme dix-huit ou
vingt des compagnons de Porzmoguer qui périrent avec lui
dans l'incendie de la Cordelière, entre autres Martin Le

\'!' Reg de la Chane. de Bret., an WÛ9, f. 22 rO.
'" Reg. de la Chane. de Bret., an W:l.O, fO 38 rO.

Nault, qualifié par la relation « maistre de la ccu-raque ».
On a cru que ce titre attribuait à Martin Le NauIt le com­
mandement naval de la Cordelière, si l'on peut parler ainsi,

et réduisait Porzmoguer au commandement militaire, c'est-
à-dire au commandement des troupes embarquées sur ce na-
vire (1). Ce serait vrai s'il s'agissait d'un bâtiment marchand,

mais il s'agit d'un navire de guerre, et dans ce cas c'est une
errelll;, réfutée par un ouvrage qui fait autorité en la
matière, le GLossaire nautique, si remarquable et si savant,
de M. Jal. Voici ce qu'il dit à l'article Maistre (p. 956) :
«( MAISTRE. « Aux nefs oneraires ou navires en mar-
« chandise, le Maistre est le premier, le pilote le second,
« ensuite le contre-maistre, etc. » (Et. Cleirac, Rôles

. « d' Oleron, art. 1 ). Sur les navires de guerre (ajoute
M. Jal), au XVIe siècle et au commencement du XVIIe, le
Maistre était le troisième officier du bord: « Dans chaque
« navire de guerre le capitaine est le pl>emier, le pilote est
« le second, ensuite le Maistre qui a le commandement sur
« l'équipage ). (Cleirac). .
M. Jal cite ensuite un passage de la Chronique de Jean
d'A uton, relatif à l'an 1507, où l'on voit; sur une nef armée
en guerre, le rnaistre du navire demander au capitaine
·d'ordonner une manœuvre d'où dépend le salut du bâtiment .
. Le maistre de la Cordelière n'était donc, dans l'ordre

maritime, que le troisième officier du bord, et Porzmoguer,
capitaine sur mer, en méme temps qu'il était capit.aine d'un
corps de troupes, unissait sans aucun doute au commande-
ment militaire le commandement nava1. .

Ajoutons que, dans son étude si soigneusement faite sur
!vlarie la Cordelière, M. Jal ne semble méme pas douter '
de l'union de ces deux commandements aux mains de
Porzmoguer.
ARTHUR DE LA BORDERIE .
(1. Voir Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t. VIII,
p. 1. 8 et i6~ .