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Bulletin SAF 1884


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Notice sur les nécrologes du couvent de Saint-François de Quimper

J. Trévédy

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NOTICE SUR LES NÉCROLOGES

DU COUVENT DE SAINT-FRANÇOIS DE QUIMPER (1).

Le couvent de Saint-Feançois de Quimper, plus connu
sous le nom de couvent des COI'deliel's, a été fondé en 1232.
C'est la premièee communauté de Franciscains établie en
Bretagne et l'une des plus anciennes de France (2). De
bonne heure les peincipales seigneuries de Cornouailles,
eueent des enfeux (3) ; et, avec
bienfaitrices du couvent, y
le tem ps, ce lieu de prièees devin t le rendez-vous funèbre
des possesseurs de ces seigneuries. Non seulement ceux
qui décédaient à Quimper ou aux environs venaient y
prendre leur place; mais souvent des chev'aliers tombant
sur de lointains champs de bataille ou moueant en terre
étrangère tnurnaien t leur;s dem.iel's regards vers l'église
où dormaient leul's pères, et ordonnaient que leurs restes y

fussent apportés .
Les cartulaires ou nécrologes (4) gardaient notè de ces
inhumations en indiquant sou vent les alliances des décédés.
verrons, il s mentionnaient les
De plus, comme nous le

morts appar(enant à des familles ayant enfeu au couvent,
même quand ils n'y avaient pa~ été inhumés. On comprend
tout de suite de quel intéeêt seeaient ces nécrologes sur­
tout pour la période de notre histoire où la constatation

(i) Lue aux séances des 10 nov. cl 29 dé.c '1883. V. Bull. p. 323 et 4J7.
(2) 1\1 AValAH COI( ULOIS, Revue de t' A'rrnor'ique tome 1 nao-es
229 ct suivantefl. " . b'
(3) « Les r~oit1es ne vendaient pas le droit d'eufell; mais on avait
(( gl'alld~ conhancc en.le.lu·s prières et on se porlait facilem ent ft une
(1 donatIon pOUl' ohtel1ll' III sèpulture dans le couvent. )) .
. .. . . '. . (Dom LOBI :" !<;'\û , p. 73) .
. . (11) On emplOIe dans le mêmesen$ Je mot obituaire; mais ce mot se

d~t surtout (( du Jivl'e où l'on écrit les fondations des obits ", c'est-à­
dire des messes anniversaires. (DICT. DE TRÉVOtlX).

des nai,ssances, des mariages et des décès n'était pas
prescrite (1).
M. Aymar de Blois déplorait, en 1845, la perte des nécro­
loges antérieul's a 1681 (2). Malgeé les plus actives recher­
ches, il n'avait retrouvé que le dernier nécrologe relatant les
inhumations faites de cette date a la suppression du couvent.
Ce document est déposé a la Mairie de Quimper, et la conser­
vation' en est désormais assurée, la Mairie appoi'tan t le
soin le plus louable (soin malheureusement trop rare 1) a la
garde des vieux registres des paroisses. Le nécrologe a été
mis au rang de ces registres.

Mais que sont devenus les nécrologes plus anciens
embrassant une période de 450 ans? ..
Il Y a quelques mois, Dom Plaine, bénédictin de Ligugé,
) adressait a notee confrèee M l'abbé Peyron, la copie
abrégée d'un extrait des anciens nécrologes (3). Il écrivait
que M. Pol de Courcy possédait l'ancien nécrologe tout
entier; et il exprimait lé vœu que notre savant confrère
publiât ce document avec des notices que personne ne sau-

rait faire comme lui. "
La vé'rité est que le's anciens nécrologes ne sont pas

retro·uvés, mais que M. de Courcy en posséde un ex­
tralt fait a la fin du XVIe siècle. Cet extrait provient, me
dit son possesseur, des manu,scrits du P. Augustin du Paz,
acquis, en 1631, par Pierre' de Lannion, baron du Vieux-

Châtel et seigneur de Quinipily, gouverneue des villes de
Vannes et ,Auray (4).

f{) Ordo de Villers-Cotterets (t039) et de Blois (1579).
,2)' M.de Blois, Loc. cit. '
(3) Cette copie est intitulée: Ex martirologio Franciscanorum Cori·
sopilensium. lei Martyrologe est pris Jans le sens d'obituaire, « livre
ou tableau des fonda.tlOns, obits ou prières ». .
(4) Ce registre u fait autrefois partie de collections où il a porté suc­
cessivement les nos 60, 528 et 1776 •

Le fl'agment de la Biblioth8que nationale, l'extrait de
M. de COUl'CV, le nécrologe postérieul' à 1681, une vingtaine
de pièces déposé~s aux A rèlâves dépal'tementaLes, voilà
ce qui nouS restait, il Y a quelques mois, du couven t ?e
Saint-François! Mais il vient d'èt.re déposé aux Archives du
Finistèi'c près de 150 pièces des XVIe et XVIIe siècles, qui
offrent un grand intérêt Elles mèritent une sérieus~ étude
qu'un autre fera mieux que moi. Toutefois, en me boen::mt à
parler du nécrologe, je me permettrai, pour éclaircir cer­
tains points, de faü'e q uelq ues emprunts à ces actes si
heureuserr.ent retrouvés.

L'extrait contient la copie de 153 actes, un du XIIIo siè-

cle et les autres des XIVe et XVe siècles et du commence­
ment du XVIe. Le document que Dom Plaine a retrouvé à la
Bibliothèque nationale (fonds Baluze)se rapporte à la
mème époque. Il contient 33 actes, dont 7 seulement ne se
trouvent pas dans l'autre extrait. . .
M. de Courcy a bien VOUlll me communiquer son extrait,
en mème temps que M. Peyron me remettait la copie de
Dom Plaine. La confél~ence cIe ces deux documents offre

un grand intérêt: Les vingt-six mentio'ns qui leur sont
communes sont identiques,. et de cette identité on peut
conclure à la parfaite exactitude de l'une et l'autre copie.:
Les deux extraits ont été dl~essés, au point de vue généa­
logique ; et. les copistes, parmi les nombreux actes qui
passaient sous leurs yeux, ont choisi ceux qui se l'appor:"
taient aux familles nobles de Cornouaille .

Un des 1:5-3 actes est à mettre à part: c'est le pl'ocès-
veebal de la pQse de la pl'emière pierre des toüi's de Saint-'
COJ'entin, procès-verbal identique à celui que M. Le Men

a tmprun té au Cartulai!'c du chapitre et publié dan s la .1-10-

nOgT'aphie de la cathécl,oale (1), A ce procès-verbal se rat­
tache la mention relative a Jean de Langueouez, commis­
saire déléguè pour reprèsenter le duc Jean V a cette céré.­
monie. (N° 59) (2)

Restent 151 actes .

Deux constatent .l'inhum~tion de deux évêques, Rai-
naud (1245) et Guy (1-:102) (3). Les 149 autres se rapportent

a de~ familles de Basse-Cornouaille. Ces derniers actes ne
constatent en réalité que 113 décès: 6 actes fon~ double
emploi, c'est-a-dire que 6 décédés ont été inscl'Ïts deux fois:

deux femmes sous le nom de leurs deux maris et les quatre

autres sous leur nom de J'amille ou dJ seigneurie, puis
. sous un autl>e nom (4).
Les actes sont rangés ,sous 41 noms de famille ou plus
.souvent de seigneuries: l'extrait se divise ainsi en 41 ar­
ticles ou séries .
Le copiste n'a pris nul souci ni de l'ordre alphabétique
entre les séries, négligence facilement réparable, ni de l'or­
dre chronologique entre les actes d'une même série. incon­
vénient plucl grave. Un exemple suffira poUl' montrer corn­
ment les dates sont emmêlées: la série la plus longue est

celle des actes concernant les seigneurs du Jueh; voici les
dates de ces actes : 1460, 1439, 1430, 1539, 1462, 1470,

1436,1 100,1427, 1468, 1387, 1501, 1369, 1534, etc.
Ce désordre, qui 8tonne au premier abord, s'expliq ue par
l'usage des Cordeliersd'inscril'e les actes dans l'ordre
des jours de l'année. Le nécrologe conservé à la mairie de
Quimper nous révèle cette circonstance: chaque page du

. (1) Page 240, note f.
(2) Je donnerai un numéro à chaque mention, et, dès éluJourù'hui, je
me l'Mere à ces numéros, \ .
(3) Nous verrons plus tard que cette date e~t erron'éc .
(4) Les actes ainsi dédollblé~ sont SO~IS ' Ie~ nos 5 et 25,
el 29, i15 ct 127, 133 et 137, 69 et 138. •

cahier a Bté d'avance padagée en six ou sept parts (1 )
1 janvier, 2,3, etc .... jusqu'au 31 décembre; les inscriptions ,
sont faites sous chaque jour, et c'est seu~ement sous chaque
jour que l'ordre des années se retrouve. Selon cette mé­
thode, un mort du 1 janvier 1789 serait inscrit avant un '
mort du 2 janvier 1681; mais il est clair que de deux morts
du 1 janvier, un de 1681 et un de 1789, le premiel' est

inscrit d'abord.
Cet ordre était sans doute emprunté à la rédaction du
reO"istre des obits ou annLDe.rsa~res, qUI necessa~rement
devait suivre l'ordre des jours. . Peut-être même pourrait-
on se demande!' si les COl'deliers tenaient concuremment
un nécrologe et un l'egistre des anniversaires ou obits, ou
si les nécrologes copiés dans l'extrait et celui de la mairie
n'étaient pas à la fois nécroLoges et obituaires.
On peut inférer' d'une note mise par le copiste en tete de
l'extrait de M. de Courcy (2), qU'lI avait sous les yeux des
registl'es présentant les actes par ordre d'années jusqu'à
1400; et, pour l.a pél'iode suivante, un registre dressé
comme le nécl'Ologe qui nous reste, rangeant les actes par
jours de l'année. Le copiste devant fondre tous ces registres

en un a suivi la nouvelle méthode des COl'deliers, il a eopié
le dernier registre selon l' ordre'des inscri ptions et in tercalé à

leurs dates de jours les actes antérieurs à 1400. 'Cette mé­
thode prod.uit des résultats assez bizarres: c'est ainsi qu'au
nom de Nevet, tl'Ois actes consécutifs ont les dates que
voici: Mai' 1371. Août 1444. Octobre 1371. '
Les ac~es du nécrologe pe sont pas des actes de sépulture
_ comme" ceux que rédigeaient et que rédigent aujo~rd'hüi les
(f) .Je ne p~i8 (lire cases puisqu'il n'y a pas de lignes séparalives entre ,:.,.
Jc.s Jours; malS ce mQl rend bien la pensée. '
- (2)." 1 c.s article~ marqués d'une + Elont coppiés et mis de suite~par
" annees .Jusques a l'an 1400 n. Les articles ainsi mal'qùés sont au
Il,ombre de 29 et se placent entre 1337 ct t399. '

curés des paroisses; mais des rnentions de décès analogues
aux actes de décés que rapportent les officiers de l'état-civil
de nos jours. . La formule habituellement employée ne
peut laisser de doute sur ce point. Les actes commen­
cent uniformémen_ t par la date dujour et du mois, .puis il
est écrit d'OI'dinaire : Tali d-i~ obiit : ce jour mourut (1).
La date de l'année est d'ordinaire portée a la fin des actes.
La date indiquée est donc la date du d écès et non celle de
l'inhumatwn., quand la sépulture l::\. eu lieu dans Je couvent.
C'est ainsi 'que les seigneurs qe Plœuc, de Poulmic, de
Langueouez, de Lescuz, de Tresseaul (Tréséol), morts a la
bataille d'Auray et inhumés aux Cordeliers, sont inscrits ,
sous la date du 3 des Calendes d'octobre 1363 (28 septem­
bre) (n° 103). C'est la date de la bataille dans laquelle
Chades de Blois perdit la vie et qui mit fin à la guerre de
la succession. Il est clair que l'inhumation n'a pu avoir lieu
a Quimpel', le jour même de la bataille.
C'est même une particularité assez bizarre que la date
d'es inhumations ne soit indiquée que dans irois actes en

tout. .
Ainsi il ne faudrait pas croire que tous les morts men­
tionnés au nécrologe ont été déposés sous les dalles ou dans
les enfeux du couvent. Le c'ontraire résulte manifestement

de certains actes : C'est ainsi qu'un acte (n° 113) de
1425 (2) mentionne six seigneurs de Pont-(I'Abbé) , de
Poulmic, de Tyval'len (Rosmadec), du Perriel', de Lisivy,
de Lanros, morts au siège de Saint-James de Beuvron . Or,
l'acte fait connaître qu'un seul d'entre eux, le seigneur de ,
Poa.1mic, a reçu la sépulture au couvent de Saint-François;
cependant outre la mention collective consacrée aux six
morts, au nom de Poulmic, chàcun des cinq seigneurs non

(1) Il Y a quelquefois un équivalent: Tali die vila hae fUr/elus est. •
(2) Vieux style, Il faut substituer 142(j à U25.

inhumés aux Cordeliers a une mention particulière ROUS
son nom (1). (nOS 106, 125, 7, 67., 60).
Bien plus! Un acte de 1411 (na 118) constate la mort de
Jean Le Barbu, seigneur de Quilliou (par. de Plogastel­
Saint-Germain), décédé ci Paris et inhumé dans le couvent
F,'eres mineurs de Paris. Comme seigneur de Quilliou,
des
Jean Le Barl)u avait enfeu aux Cordeliers, et il était dévoué
au couvent (2 ): sans doute un anniversaire y était célébré
pour lui; triple motif pour que les religieux aient relaté sa
mort. '
De même Marie de Tromelin, dame de Botpadern et de
Livinot, qui avait été en troisièmes noces femme de Allain
Guengat, vice-amiral de Bretagne et maître d'hôtel du

roi François 1 , figure au pém'ologe comme décédée le 15
des calendes de janvier 1547 (18 décembre précédent) (na 5).
Or elle a été inhumée le 19 décembre, dans le chœur de
Saint,·Corentin. (3).
serait facile de multiplier ces exemples; mais ceux-ci
suffisent. On peut pl>ésumer qne les morts non inhumés aux
Cordeliers et mentionnés aux nécrologes y figurent ou à
raison d'un obit fondé par eux ou pour eux, ou par un sou-
venir reconnaissant des Frères., comme bienfaiteurs du
couvent, ou comme appartenant à des familles ayant droit

d'enfeu.
Il serr?-ble même assez probable qu'au cas d'inhumation,
les Frères, très jaloux, cornme nous le verrons, d'ènterrer
dans leur couvent, ne manquaient pas de relever cette cil'-

(1) M. DE BLOIS (loc. ciL) trompé par p, LEBAJJO (Les seize quarr.iers
r'~ la maison. rie ~~s~adec., Histo~re de. Breta.gne) a écrit _que les six

selg~e~l!'s avalent ete IIlhum('s aux (,ol'deher:i, L'erreur de Lebaud avaitété
~orrIgee par DOl\1 L~Bl~EA~" V. Bulletin arch. de f8g3, page 229, la recti­
flcallOn ~e Bol: ~ vlce-l ,resldent M. Audrall et la cilalion empruntée à
DO,m .Loh!neau (Preuves, p. fO03 de la meution collective /des six se'gneurs
tues a Sall1t-.James de Beuvron).
(2) L'acte dit: Qui mliltum afficiebatur (sic) ad ordinem.
(3) Voir ;Uonog. de la Cath., p. '253, liok 2.

constance; or, sur 143 morts mentionnés à l'extrait du
nécrologe, la mention de l'inhumation n'est faite que
soix.ante-sept fois ... Peut-être serait-il permis d'en conclure
que les' autres mods mentionnés à l'extrait du nécrologe
n'ont pas reçu la sépulture au couvent 1 ...
Les actes sont écrits en latin selon l'usage du temps et
l'habitude des communautés. Les Fréres Mineurs n'étaient.

pas en général des lettrés comme les Bénédictins~ et leur
latin n'est pas élégant: ils suivent des form ules, comme
aujourd'hui certains rédacteurs d'actes de l'état-civil, trop
heur'eux quelquefois de n'avoit' qu'à remplir des cadres
imprimés d)avance. Qu'importe-t-il ~ Ce n~est pas des
modèles de style que nous deman~lons aux humbles Frères,
mais des indications que seuls ils peuvent aujourd'hui nous
fournir (1).
Un repI'oche plus juste à faire aux Cordeliers, c'est
d'avoir trop souvent latinisé les noms propres de manièl'e

i nous donner des énigmes à deviner (2). Qu'ils éefivent de
Rupe-jorti, de Foresta, de JU[jo, de Fago, de Veteri-

Castro, etc. pour de Rochefort, de la Forêt, du Juch, du
. Faou~ du Vieux-Châtel, ou bien Bal"butl, Aibi~ etc., pour
Barbu, Le Blanc, etc., passe encore! Mais on avouera que
dans le nom de Pyru~ il est assez difficile de deviner la tra­
duction du nom de du Perrier (du Poirier )~en latin Pirus (3)

A répoque où ' nou,s l'epode le néerologe; éerÎl'e en latin
-- on 'pourrait mème dire en ' mauvais latin, . c'était se

(1) Il Y a pourtant un acte qui vise à la période, C'C!'it ceiui qlii
• constate Je-décès de Allain de Guengat, maître d'hôtel de François Irl' ct
vice-amiral de Bretagne (nO 24).
("2) Cependant beaucoup de noms ont gardé leUt' orthographe native:
deux sont écrits en breton: Ar S'1UX (Le ~aulx, seigneur de Pratauros,)
ct An Dreff (du Tl'eff, seigneur dudit lieu).
(3) Le copiste a jugé prudent d'indiqllel' edle lrnductioll dans une
il a sagement fait (Voir no 7).
note et

conformer a ' l'usage général; maiB les Cordeliers avaien L
des usages particuliers qui se retrouvent dans leur .nécro­
loge. Ainsi, longtemps avant la réforme du calendrier par
GréO'oire XIII (1581), les peuples chrétiens supputai.ent le

temps comme nous faisons aujourd'hui, par le quantiéme
du mois et le jour de la semaine. Au contraire, les Corde­
liers de Quimper ont gardé, au moins jusqu'au XVIe siécle,
l'usage de compter par ides.) nones et calendes du calen­
drier romain (1). D'autre part, bien que les chiffres dits
arabes, soient entrés dans l'usage en France a la fin du

XVe siècle les COI'deliers se servaient jusqu'au XVIe inclu-

sivement, des lettres em ployées commechîffres. Leurcopiste,
pour exprimer les nombres, emploie tantôt les lettres,
tantôt les chiffres arabes (2). .
En reproduisant les actes en latin, il conviendra, pour
évitel' toute méprise, de traduire les noms de familles et de
lieux. Il y aura lieu rie garder les indications par nones.)
ides etcalencles, .chacùn pouvant facilemènt ramener le _
jour ainsi désigné au quantiéme du mois. Au contI'aire, il
. n'y a aucun intérêt a respecte!' l'orthographe des Corùe-
liers en faisant usage des lettres employées comme chiffres;
et il aura suffi, je crois, de signaler leur usage a cet égard.

Comme nous le verrons, les Franciscains de Quimper

n'étaient pas riches (3) . Ils se montrent reconnaissants des
bienfaits. Pas un de leurs bienfaiteurs ne décède sans l'ece-

(1) Ils avaient abandonné cet usage avant 1681. comme on 10 voit pal'
le demier nécrologe
(2) Ponr être complet su ries habitudes al'ehaïques des Cordeliers il
fa~t or~ppeler q~'il~ avaient cOllservé les caractère~ gothiques dans le~lrs
brevlallcs ImlHlmes. Mo DI.( BLOIS. Loc, Cil.
(3) ':oir l'exposé de 11 requête pré::1o-)ntée par eux au duc de Mercœur,
le 6 decembrtJ 1593 (Bull. arch. 188~, P. 259.) -

L~s « p~lUVl'eS sUjlplyauts il exposent que fauLe de recevoir les
12 ecus, priX de location de la salle du Pnl,;!dial ct 12 é\:us de rente
sur, Pratanl'OUX, ils « n'ont moïen de vivre et ne faire aucune provi-
« SIon." . -

voir un témoignage de gl'atitude qui devait' survivl'e au
couvent. Les formules cr éloge ne varient guère: A micus
ou A mica, bene ficus, bel1e!lca, mater ... d'autres fois : qui
ou quœ multum ou summum ou supra modum diLexlt .ou
diLigebat conventum istum ou ordinem Beati Francisci; ou
encoee dans un latin plus barbare: qui ou quœ afficiebatur
ad conventurn.
Ces témoignages, quelque touchants qu'ils soient, nous
importent moins historiquement que les titres etles qUàlités
des décédés, que les nécrologes passent sous silence, Cepen-:-
dant, si Fon veut, comme on dit quelqùefois, garder au
nécrologe sa couleur locale, il faut bien en tenir note .
L~extrait de M. Pol de Courcy nous donne, comme nous
l'avons vu, J43 décès (sans comptee ceux de deux évêques) :
L'extrait de la Bibliothèque nationale nous donne sept actes
nouveaux. Voilà donc retrouvés 150 actes de décès ou
d'inhumations de membees des principales familles de Cor-
nouaille .
Si ces actes sont rangés sous -11 noms de familles ou de
seigneuries, gardons-nous d'en conclure que les actes
retrouvés ne fournissent de renseign.ements que sur le

. même nombre de familles. Il ne faut pas oüblier, en effet,
que si ·le droit d'enfeu avait été concédé dans le principe \

aux bienfaiteurs du couvent, il ne se transmettait pas
d'ordinaire aux descendants du nom, mais aux possesseul's
successifs, soit par alliance, soit par acquét. C'est ainsi,

pour ne citer qu'un exemple, qUtl l'enfeu des Lezongar,
seigneurs de Pr8tanras, passa par alliance aux Quélenec,
puis, par succession, aux Visdelou, à la comtesse de La
Marck et à sa fille duchesse d'Arenberg, et enfin pal' acquêt
. à M. de Madec, qui y fut inhumé:, en 1784.

. Plusieurs des seignell1'ies sous le nom desquelles sont
rangés lesactes ont passé'ainsi d'unefarnille à une autre: un

gt'and nombre de femmes sont · inhumées dans les enfeux
de leurs maris; enfin, un grand nombre d'actes donnent les
alliances des décédés. C'est pour ce triple motif que les
.150 actes des deux extraits nous renseignent sur plus de
soixante familles bretonnes. Or, de ces actes, quelques-uns

seulement sont mentionnés dans Guy Autret de Missirien;
dans quelques généalogistes, ou dans les Preuves de nos
histoires de Bretagne. C'est dil'e que les extraits de M. Pol
de Courcy et du fonds Baluze sont à peu près inédits. Pour
apprécier l'intèrèt qu'ils présentent, il suffira de citer
quelques-uns des noms auxquels les actes se rapportent:
de Coatanezre, du Faou, de Guengat, du Juch, de 1\.er­
laouénan, de Langueouez, de Lespervez, de Lezongar, de .

Névet, de Plœuc, de Pont (l'Abbé), du Perrier, de Ros-

madec, de Tyvarlen, de Vieux-Castel, etc. .
En outre, les actes nous donnent quelques indications sur
les enfeux existant aux Cordeliers, et sur la place qu'occu-'
paient quelques-uns d'entre eux; mais le nécrologe conservé
à la Mairie nous apportant sur le mème point quelques ·
lumières nouvelles, je reviendrai sur ce sujet quand je
parlerai de ce dernier nécrologe.

Après ces observations générales, qu'il soit permis de
. s'arrèter sur quelques actes qui rappellent des faits de
notre histoire ou révèlent des détails de mœurs.
J'ai déjà signalé les mentions de décès ou d'inhumations
de seigneurs tués à la bataille d'Auray (1364) et au siège
de Saint-James-de-Beuvron (1426) (1). . .
. La bataille d'Aul'ay est trop connue pour qu'il y ait à
insister. Le siège de Saint·James l'est moins. Au commen­
cement de 1426, Arthur de Richemont, qui venait de cein-

dre l'épée de connètable, 'entl'a en Normandie. Il prit et

(1) Voir ci-dessus p. 8 •

rasa Pontorson et vint assiéger Saint-James. Il commandait
des honimes levés en Basse-Bretagne et dont la plupart
. voyaient la gUf::rre pour la premiére fois. Le connétable
rés'olut l'àssaut; se chargea de l'attaque d'un côté, et
ordonna aux Bas-Bretons d'attaquer de l'autre côté que

protégeait un étang. Les 1?1'etons se portérent courageu­
sement à, l'assaut; mais une troupe d'Anglais sortant tout
à, coup par une fausse porte prit les assaillants en flanc et
en poussa sept ou huit cents dans l'étang. A ce moment
. passa « une grande compagnie de gendarmes bretons qui
(t battait l'estrade ». Les Bretons déjà, ébranlés , la prirent
pour un parti ennemi, se crurent enveloppés, s'effarérent et
se rejetèrent en désordre du côté du connétable dont le

m6uvenient fut arrèté. Au milieu de la nuit survint une
panique. Les Bl'etons commencèrent .a déloger sans permis­
sion, et « mirent le feu à, leurs logements ». Le connétable
fit de vains efforts pour les al~rêter; dans la presse, il fut
jeté à, bas de son 'cheval et presque foulé aux pieds. Il lui
fallut abandonner son bagage et son artillerie et revenir à,
Rennes., où le duc licencia l'armée (1).
Je prends les actes qui suivent dans l'ordre, non de leurs
dates, mais de leurs inscriptions .

(N° 20). « Ce jour 1 des Calendes de rnai (1404)
, « mourut Eude, vicomte du Faou, qui décéda en Angleterre
« avec beaucoup d'autres nobles et fut apporté en cè

« couvent. » ,

Cet acte rappelle le souvenir d'un désastre. Henri de
Lancastre venait de détrôner et de faire tuer le roi Richard II
le dernier d~s Plantagenets. En 1401, Owen Glandwl'"

noble gallois, descendant des derniers princes Bretons
de Galles, se porta vengeur de la mort de Richard
et réclama l'indépendance et la soUveraineté de son

(f) Dom LOBINEAU, p. lJ67.

pays. Deux expéditions dirigées con~re lui par Henri IV
en personne furent sans résultat. Glandwr 8:vait invoqué
l'appui du roi de Fl'ance; et, en 1404, une armée frllnçaise
de 8,000 hommes avait traversé la Bretagne pour prendre la
mer à Brest. Des seigneurs bretons crurent l'occasion bonne
de passer aussi en Angleter.re; et 2,000 chevaliers ou écuyers
s'embarq llèrent à Saint-Malo. Ils marchaient sous Jean de
Rieùx et les sires de Chàteaubriant,de la Jaille et du Chastel,
Tanneguy, Au dépar,t, ceux-ci ne s'en­
frère du fameux
tendaient guère, et le fait suivant amena une division , ,
complète,
La flotte rencontra en mer un convoi espagnol chargé de

. vins. L'Espagne était alliée de la France, comme la Bre-
tagne à ce moment. Mais les Bretons ont « de toute antiquité
aimé le vin » (1) ; et la tentation vint à quelques-uns d'atta­
quer le convoi; d'àutres plus sages s'y opposaient: ils ne
furent pas écoutés et le convoi fut pillé; après quoi, des

reproches on en vint aux injures: 'enfin les trois chefs se
séparèrent, se donnant seulement rendez-vous à Yar-
mouth. .

La Jaille et du Chastel abordèrent les premiers avec
200 chevaliers, mais sans archers ni arbalétriers. 6.,000 An-'
glais rassemblés en hâte les attendaient. Ils avaient creusé
sur la grève un fossé large et profond qui ne laissait qu'un
étroit passage et qui rempli pal" le flux était infranchissable.
Malgré l'avis de du Chastel, La Jaille attaqua follement et
de front, et du Chastel ne put se dispenser de le soutenir.
Bretons accablés sous une grêle de traits ne pu­
Mais les
rent forcer le passage. Du moins vendirent-ils 'chèremen.t
leur vie: tous furent tués, moins une vingtaine qui furent
faits prisonniers.
Le reste de la flotte arriva apTès le désastre et dut re-

(t) Dom LOBINEAU, p. 73.

prendre la mer sans oser rien tenter. Mais, un mois après,
Tanneguy du Chastel vengeait la mort de son frère. Avec
400 gentilhommes bretons, il surpr-it Yarmouth, brûla' la
ville et revint en Bretagne « chargè d'un butin ines­
timable» (1).
(N° 26). « Le 13 des calendes -l'octobre 1369, mourut
« en Espagne, vaillant chevalier, seigneur Hervé du
« Juch. »
1369 est l'annéA de la seconde et dernière expédition de
Du Guesclin en Espagne; nul doute que Hervé du Juch n'y '
'eût suivi le connétable.
'L'acte ajoute: « Cujus escarum ossa fuerunt delata ad
« conventum: » c'est'-à-dire en mot à mot: « les os de ses

« chairs furent apportés au couvent. » .
Ce détail nous rappelle un usage de ce temps. L'art des
embaumements pratiqué par plusieurs peuples rlel'antiqui<é, .
était depuis longtemps négligé et perdu. On ne savait plus
conservee les parties molles des corps et on n'en gardait
que les ossements. Pour séparer les ~.nes des a:utres on
un moyen simple, mais qui répugne et · que
employait
l'Église allait défendre comme une déte'stable barbarie (2):
on faisait bouillir les corps jusqu'à ce que les os fussent­
détachés des oliairs. C'est ainsi que le corps de saint Louis
mort devant Tunis (1270) fnt .découpé en plusieurs part~ et
mis dans une chaudière pleine d'eau, de vin ét d'aromates .

Les ossements furent rapportés en France pour être
. déposés à Saint-Denis, et les chairs furent emportées au

plus vite à la terre c.hrétienne la plus voisine, en . Sicile, et

(f) 001\1 LOBINEAU, p. 505 et 506.
11 dit que 1,500 Anglais furen~ tués: on peut se demander corume:nt,
puisque les Anglais lançaient des traits de loin et l'al' dessus le fossé
que les chevaliers pesamment al'rués essayaient en vain de passel'.
(2) Boniface VllI lepremicJ', Cil " f ,300.C. QANTU, Bist. univ. XI, .

déposées au monastèl'B de Montréal, pl'ès de Pë:derme ,1).

« N° 62). Le 7 des Calendes de novembre (26 octobl'e)
« 1371, mourut Jean de Foucaud il Béchel'el : il fut ap­
« pOl'tè au couvent de Quimper. })
Bèchel'el est aujourd'hui un' chef-lieu de canton d'Ille-et-
Vilaine, su~' la route de R"ennes à Dinan.
La hauteur escarpée sur laquelle s'élève la petite ville était
couronnée par un château-fort. En 1363, Charles de Blois
vint l'assiéger; Jean de Montfort rassembla ses troupes à
Vannes et vint au secours de la place avec Olivier de Clis-
son, Tsuneguy du Chastel, Jean Chandos, entr' autres;
mais désespérant ne déloger ,Charles de Blois, il se con tenta

de le contre-assiéger et de l'affamer. Charles de Blois me-
nacé de disette. fit dire au comte « qu'il ne tenait qu'à lui
(( qu'ils se vissent dans un lieu plus commode ») et assigna .

la .lande dlEvran. ~lontfort acc.epta le rendez-vous et les
deux armées' allaient en venil' aux mains lorsque les évê-

ques s'entremirent et négocièrent le traité d'Evran, qui par-
tageait la, Bretagne entre 'les deux compétiteurs et qui ne
devait satisfaire personne,

Après la mort de Charles de Blois, Jean IV, demeuré
seul ... avait fait alliance avec le roi dl Angleterre, malgré

Ci) C'est le récit de GUILLAUME D'R NA~GIS, (SISMONDI, T. VIII,

Ce recit est confit'mé par / Guillaume Guial'd. (Hist. de France. La
Branche aux royaux lignages.)
Les .enlrailles oe lui 6té~s
Furent il Palerme aportées;

En un escrill fort ct ferré
ses os enserré
RcfiJrent

Desqllicx .'1 Ol'CS grant part i c _

De Saint-DJuis en l'Abaie, etc .

(~csqucls i! y a aujourd.'hul:. une grande pal'tie il Saint-Denis.). .

J?lll.vllle q\~1 u',accompagnapas saillt, LO:lis il Tunis a conté brièvement
la CroIsade; 11 Ùlt :. « que le COl'pS du Hoi fut rappOl't0 h Saint-DeniS,
n. en. ~ranc~ Il ; malS cette phrase ne doit pas fai/'c illusion: en padant
aWSl Il se réfèt'e à l'usage qui était d'emporter seuiemenl les ossements.
'BULLBTlN .ARCBROL. DU FINISTBRIl. TOME XI. (Mémoires).

l'opposition d'une parti e des seigneu l's bl'etons, et les

Anglais gardaient plusieul's places, notamment Becherel.
Charles V s'en plaignit vivement, et n'obtenant que de belles
parole.;;, il fit entrer une armée française en Bretagne .'
sous lr~ conduite de du Guesclin, moins fidèle à son pays
qu'au roi. Au mois d'août 1371, Becherel fut. investi
par des seigneurs Normands. Après uri an, les capitaines
Anglais menacés de famine, offt'irent de se rendre à com-
position, avant la Toussaint, si le duc n'obligeait pas les
Français à lever le siège. Le r.oi autorisa les assiégeants à

accepter cette proposition. La Toussaint approchant, il
. en voya à Becherel l'amiral de France et d'autres seigneur's
« qui se tinrent sur les champs en ordre de b~taille ', et, per­
« sonne ne s'étant présenté pour les combattre, la garnison
« l';emit la place. » .
Nul doute que Jean Foucaud mort le 26 octobre 1371
n'ait fait partie de la garnison de Bécherel (1). .

(N° 97) « Le 13 des Calendes d'août 1444, mourut le

«( seigneur Hervé de Nevet, qui était très attaché

{( couvent. Son corps fut inhumé à St-Renan (Locronan)
« contre sa volonté exprimée dans une clause de son testa-

(1) Voir DOM LOBINRAU, p. 361, 403, !dL Au début de la guerre de la
:-illccession les Foucaud tenaÎent le parti de Charles de Blois, du moins
DOM LOBINEAu nommc-t-il Pierre. Foucaud faisan l partie, en 1336, de la
compagnie de Even Charruel, p. 348. Un Pierre Foucaud mort à Vannes,
Calendes de décembre 1380, a été inhumé aux Cordeliers (nO 63)
le 8 des
dans le même enfeu que Jean Foucalld ci -dessus .
(2) Un de nos confrèrf's pense qlle par Saillt-Henan il faut
ent~ndr(: la p~roisse de Sai'lt-~onan cie Quimper, une des cinq chapel­
lel1les de~Sel'Vles dans la cathedrale et comprenant la rue . Rovale et la
rue Verdelet. •
. Mais,. d'a.J)rès M. Le Men, le n~m ?e la par?Îs~e de ~aÎnt-Roll'~n n'appa- .
raIt quapres la l1(lUvelle orgamsatlOl1 }Jarol~slale faite au XVIIe siècle.
de la catlJédrale nommée aujourd'hui N.-D. des Ca/'mes n'a
La chapelle
pris le vocable de saint Ronan qu'en 1572 (lllonog de la Cath. p. 48 .
et suiv.)
~es seig.neurs de Névet avaient pl'ééminences dans· l'église de Locronan
qU'lis avalent en g/'ande partie. édifiée. Le château de Névet, chef-lieu

d'un fief qui s'étendait SUl' dix-sept pa~OIsses? était dans le voisinage de
se nommaIt anClenllement Saint,..Renun-du­
Locronan. Enfin Loc/'onan
Bois. Le chanoine Moreau, p. 55, dit Locrenan-tIu-Bois .

(C ment. Les fl'èL'es protestèrent hautemellt et s'adl'8ssél'cnt
« au juge (conquerentibus et petentibus); justice fut fnite, .
« et le corps du décédé leur fut L'enc1u, et fut inhumé par eux.
« dans le tombeau de sa famille. » ' , '
Cette victoire juridique que les Cordeliers prennent soin
de constater' ne devait pas être la dernière (1). '
Le 1 septembre 1623, ils obtinr'ent un arrêt du Par-
lement « portantréglemellt aux convois, lèvement er,
« conduite des corps des. décédés aux églises ou couvents

« par eux choisis.» Le chapitre et les curés de Quim­
per n'en tinrent compte: et, en 1629, les Cordeliel's assi­
o'uèrent les uns et les autres ' devant le présidial Tous

firent défaut, et, le 6 mars 1629, le présidial ordonna qu'il
« serait porté état à l'arrêt, avec défense aux cléfen­
« deurs, et à tons autres, d'y contrevenir sous peine de

« saisie de leu!' temporel. »
Nous n'avons pas l'arrêt; mais la sentence nous en fait
connaître le dispositif. Il veut qué « les recteurs ou curés
« assistés de prêtres paroissiaux lèvent les corps 'des dé-
« cédés en leurs paroisses pour les porter et conduire aux
(C couvents ou autres églises choisis pOUl' la sépultu!'e, -

« sans qu'il y ait nécessité de les porter à l'église de leurs
« paroisses;» et sur le refus des eu!'és, l'arrét permet
« aux autres ecclésiastiques de pr'océder à la levée des
.« corps.» Ce qui veut dire qu'il autol'ise le::: prètres des
églises ou les moines des couvents choisis pour la s~pul­

ture à. aller eux-mèmes chercher les décédés.
Enfin, la sente'nce nous révèle que le refus d'obéir à l'ar-
rèt, en levant et corivoyant les corps, a pro~uit des Sèan­
. clates pubLics; et elle appointe le pl'ocUl'eur' du roi à infor­
mer sur ces faits.

(1) Mieux v~lait procédér ainsi régu);l'I'Ciî:Cut que d'excitcl' ou d GIlCOU'
rager une ~.cenc vlOl.cnte comme celle que raconte l\:l. Le Meil (Mon,
p. ~9i et SUlV.) (Aunee i5i4;. ·· .

Ces instances intr:oduites par les COl'deliel's à propos des

inhumations étonneront peut-ètl'e; mais les pièces récemment
déposées aux Archives du Finistère en donnent l'explica­
tion. Depuis au moins deux siècles, la détresse du couvent
était extrème. Il avait peu de rentes en denrées. Le~ rentes
en · argent ne montaÏ-ent pas, en 1636, à 550 livres; elles
fu rent en bonne partie remboursé.es avant 1722: et elles
n étaient pas régulièrement payées: les nombreux procès

suivis à cet égard en font foi. Les quêtes ne se faisa,ient
guères que dans le Léon; 'et Quéménéven, seule paroisse de
l~al>rondissement actuel de Quimper, recevait la visite des
Frères quêteurs. Les inhumations assuraient au couvent un
. 'casuel dont il avait un absolu besoin. Ainsi s'explique, je
crois, l'ardeur jalouse avec laquelle les Cordeliers poursui­
vaient à la lettre l'exécution des dernières volontés des
défunts touchant leurs sépultures .

(N° 148). « La veille des calendes de janvier (1475) mourut
(c noble seigneur Yves de Quélen, seigneur du Vieux-Chas-

« tel, inhumé, lui quinzième, dans la sèpulture de ses pa-
« rents ... qui tous 'firent la guerre dans la Terre sainte, et
« aimèrent tant l'Ordre et le Couvent qu'ils voulurent être

« ensevelis dans l'habit de saint François. » (1)

(1) La généalogie de la maison de Quélen dressée en 1690 par DOM
GALLOIS, collabol'ateUi' de Dom Lobincau, donne 1278 au lieu de 1475; ,
mais cette dernière date est la bo'nne :
fO En 1278, Eon de Quélen n'e'jt P4S élé qualifié de seigneul' du
Vieux· Chastel, cette seigncurie n'étant entrée dans la fami ! le de Qllélen

que près d'uu siècle après, par le mariage de Eon 0\1 Yvon (aïeul de
celui qui nous occupe) avec Aliette, dame du Vieux-Châlel, héritière de

son frère Geoffroy (mort en 137f) et inhumé aux· Corùeliers (11 147).
2 Eon de (juélen eut pour femme JE'aUlle du ChàteJ, qui mourut
en 14g8 el fut inhumée allx Cordeliers (nO 149,.
veuve
On peut se demander pourquoi quatorze Quélell ont été inhumés aux
Cordeliers, avant Yves en 1475. Cc n'cst pas comme sei~neurs du Vieux­
Chastel, pUIsque l'aïeul de Yves, 6pouÀ d'AILtte, il .élé lü prümier Qué­
len fi porter ce iilre. Peut-être eelle maison de Quélen, si dévouée il l'Or­
dre, avait-ellc enfeu ail premier couvent ùe Fl'ancj~caills fonùé en Bre­
tagne ? •.
Nous pouvons ajouter que la mention ci-dessus a été emprunté!} par

Les grandes expéditions ,connues sous le nom de Croi-
sades étaient finies depuis longtemps; mais il n'était pas
rare que des chevaliel's s'en p.lIassent en Terre-Sainte O ~ l en
Ol'ient combattre les infidèles. C'était comme un pèlerillage

al'mé. On peu t voir dans ,la salle des Croisades au Musée
de Versailles une liste de seigneurs ftançais qui passèl'ent
en Orient ap,'ès Û ;s Croisades. Cette liste est loin d'0tre
complète. Le nécrologe nous pel'met d'y ajouter Jean, vi­

comte du Faou, qüi mourut à Avignon (1397) au retour
d'une seconde expédition en Terre sainte (n° 19f
Yves de Quélen fit ain s i. Il tl'Ouvait dans sa famille
. d'illustres exemples. Qualot'ze chevaliers de son nom
avaient combattu en Ol'ient; et parmi eux son trisaïeul,

Eon ou Eudes. Celui-c.i était parti, en l249, pour la pre­
mière croisade de saint Louis, avec ses teois frères (1).

Tous trois périrent à la Massoure. Vingt ans après, Eon,
déjà vieillissa nt, suivit le roi a Tunis avec ses quatre fils:
trois moururent devf\nt Tunis.. Eon mourut huit ans après
au château de Quintin et fu t inhumè anx COl'deliers de
Quimper sous l'habi L des Frèl'es Mineurs (2.).
Si c'ètait pOUl' les membres de la maison de Quélen une
tradition de donner des soldats au tombeau du Christ, c'en

était une allssi, d'apl'ès la mention ci-dessus, de se cou-

cher' dans la tombe sous la bure des Frèl'es Mineurs. Cet

lIsage est· fl'équemmEint constaté à l'extrait des anciens né-

crologes, et il a peesisté à ' Quimpel' jusqu'à la date à la- .
quelle s'arrête notee e.xtraü, c'est-à-dit'e jusqu'au milieu du

XVIe si ècle.

l'd~lll!{~r .~Je, ;:l'xt,rait ;1 un néero'loge postérieur à 1400, puisqu'il · ne l'a
pa:; Il.il •. , jlICt.: cl une CI'?IX, en rné\l'ge (V. p. 7) comm(' il a fait pour

les ,ll1~ntlOlls r~lali\'cs a Geoffroy, frère d'Aliette :1370. il Plesentia de
Qll:nl}lI., Sri mere (J3471 (nO i45)el à AUllette de Briziac, darne de
QU/S!IIIIC, son aïeule (13!53! (no t46 ). .
,(0 Son nom est écrit ' il Vl '/'saillc~ (Ge croj~ade) auprès de !wuucoup
d autres noms Bretons. , '
, (2) D01\1 G ALl.OIS, ' cité par M. DE BLOIS. •

Outl'e les actes se i'apportant aux maisons nDbles de
Cornouaille, l'extrait de M. de Courcy nous donne les
actes d'inhurnation de deux évêques (nOS 151 et 152): celui

de Rainaud, mort en 1245, qüe M. Le Men dit avoir eté
inhumé à Saint-Corentin, et celui. de Guy .. mort en 1402 .. et
que M. Le Men rejette du catalogue des évêques de Quim­
per (1).
Cette double décision est-elle définitive ~
En ce qui concerne Guy inhumé en 1402, M. Le Men ap-
puie son opinion des plus sérieuses raisons. Cet évêque a
été omis par tous les chronologistes et est mentionné pour
la premiêl>e fois, en 1657, par Guy Autret de Missirien, qui,
par malheur, cite trop briévernen t l'acte du nécrologe (2}
Or en 1402, le siêge épiscopal était tenu par Thébaud de Ma­
Iestl'oit, qùi l'occupa de 1384: à 1408, et qui avait succédé
.immédiatement à Geffroy "Le Marhec, évêque depuis 1358.. ' .
Un évêque du nom de Guy, nwrt en 1402 .. ne trouve donc
pas sa place 'dans le Catalogue des évêques de Quimper.
On peut se demander s'il n'y a pas eu une erreur de
date, et si au lieu de 1402 il ne devait pas être écrit 1266 ~
Je remarque en effet (et cette obser'vation n'a .pas été
faite par M. Le Men), que Guy mort en 1402 serait décédé

le 4 des ides de juillet (12 juillet), le même jour que Guy de
Plonévez, décédé en 1266, et inhumé devant le grand autel
des Cordeliers (3). . .
Il serait singulier que ces deux évêques de même nom,

dont un omis par tous les chrono logistes, fussent morts le
méme jour de l'anné~. Je ü'hésite pas à croire que quelque

(i)' Voir Monogr. de la cath. de Quimper, p. 81 et slliv.
(2) GUY DE MI5SInlEN, Catalogue ries évêques de Cornouailles, p. 178 :
1( Gu y, évc~que de Cornouaill e. . . .. mou ru t le 4 des ides de juillet
« 1402, ct fut inhumé au chœul' des Cordeliers, eomme il est marqué
« dans leur nécrologe.)) .

(3) DOM TAILLA~DIEH. . Cat . des Erêques.

copiste a introduit au nécrologe une erreur de date.; et a,

si l'on peut ainsi parler, dédoublé Guy de Plonévez mort en
1266, inhumé à la place indiquée, et sur la ,mort et l'inhu­
mation duquel il ne s'élève aucun . doute (1).

Le Men ne me persuade pas quand il cherche à
'Mais M.
démontrer que l'évéque Rainaud n'a pas été inhumé aux
Cordeliers.
La mention qui concerne cetévéque est formelle (2) :
« 3 nonarum Maii obiit Reverendus patér et Dominus
« Dnus Renaldus episcopus Corisopitensis fundator hujus '
« conventus pater et amious fratrum MoCCoXL quinto. »
Mais, dit 'M. Le Men, Rn,inaud n'était pas fondateur des
Cordeliers et « cette erreur doit ,d'abord rendre suspect le
reste de la citation.» Comment! Je suppose qu'il soit
démontré, ce dont je douto, jusqu'à plus ample informé,-
que le seigneur du Pont-l'Abbé a été le seul fondateur du
éouvent; et parce que la mention faite au nécrologe se
trompe sur ce point, je dois rejeter le reste de cette men-
tion 1. .. Où en serions-nous si cette méthode passait dans
notre vie usuelle? Voila un maire qui" dans un acte de
naissance ou de décès, attribue à un homme une qualifi-
cation qui ne lui appartient pas: oserons-nous dire que cette
erreur qui ne touche pas au fond de l'acte va inficier l'acte
tout entier ?

Ne nous montrons pas si rigoureux; ne rejetons pas de
prime abord un texte ancien qui, fautif sur un point de détail,

. (1) L'err~u~ est d'autant plus facile il admettre que la date était cel"­
tall1emcut eCflte Cl! lettres sur l'original. Or, les deux dates s'expriment
par lc même nom brc de lett l'es: ' .
1266 MoCCoLXVlo
1402 MoCCCCollo

POUl' produire l'clTcur, il a suffi que les lettrcs L et X svient prises
des CC, et le V mal fait' pOUl' un r.
pour
(2) Ce. teXte cst ùOllué lur Alhert Legrand e,t par D. Tail landier
qlll S~bstltuc seulement Jc mot am or au mot amicus, et qui énit la date
eu chlffrcs ct cn tête dc !'act J, '

peut étre exact sur le point principal; mais étudions-le sans
prévention en le rapprochant des textes et des faits .
Albert Le Grand cite le texte ci-dessus et ajoute qu'on lui
a montré, devant l'autel, la tombe de Rainaud, sur laquelle

était gravée la représentation d'un évêque. Sur quoi M. "Le
Men de dire: Oui : il y avait une tombe devant l'autel;
mais c'était celle de Guy de Plonévez : « C'est sans doute
« cette tombe, dont Albert Le Grand ne parle pas, qui lui
« a été indiquée comme étant celle de l'évéque Rainaud. »

Mais ce raisonnement un peu risqué, il en faut convenir,
va s'évanouir,s'il est démontré qu'il y avait deu:.e tombes

d'évéques devant le grand autel. Interrogeons les textes et
les faits.
Les textes d'abord .... De la mention ci-dessus relative a
Rainaud, il faut rapprocher la .mention relative a Guy:

« ·1 iduum Julii. Tali die obiit Reverendus pater et
« Dnus Guydo episcopus corisopitensis pater et amicus fra­
« trum minorum sepultus coram majorialtari ju:.eta Dnum
« Renaldum a parte clausterii. » .
Voila qùi est clair: Guy (de Plonevez), inhumé devant
le grand autel, près du seigneul° Rainaud, du côté du
c'est-a-dire a droite.
cloître,
Mais poursuivons : On lit au nécrologe Gonservé a la
mairie de Quimper: .

1 sous la date du 10 mai 1722.: « Ce jour fut inhumé
« dans notre église, dans le .caveau qui joint le marche­
« pied du grand autel, où ont _ été enterrés deu:.e évêques,
« le corps de feu écuyer Charles Dondel, seigneur du '
« Parc et de TreffreRt, conseiller du Roi, Sénéchal de Cor-

« nouailles, premier magistrat au Présidial de Quim-
« per, etc. » .

2 Sous la date du 21 janvier 17.25: « Ce jour a été inhumé
« dans le · caveau qui joint le marchepied du grand autel,

« ou ont été enterrés deux évesques, le corps de feu Père
« Guillaume de la Croix, Gardien (1) de ce couvent. »
Donc, devant le marchepied du maître-autel, il y avait un
caveau a deux places, qui furent occupées: d'abord, celle de
gauche, par Rainaud, celle de droite par révêque Guy; et
postérieurement le Sénéchal et le gardien du couvent furent
aux deux évêques. . . .
superposés
On lit d',ailleurs au dernier nécrolog:e, sous la date du .
30 juillet 1681: « Ce jour fut inhumée dans notre chœur,
« en une tombe proche des Éoesques, deffuncte Madame de .

.« Keraneisan. » ,
Et sous la date du19 février 1766: « Ce jour noble homme'
« Mathieu Michel Merle, sieur de Penguilly, fut enterré
« dans la tombe au-dessous de celle des Evêques. »
Ces mots ne peuvent désigner que la tombe .de Rainaud

et de Guy, ces deu~ évêques de Quimper qui ', seuls avec
leur successeur, Alain de Lespervez, ont été inhumés aux
Cordeliers; mais ce dernier évêque reposait dans la chapelle
JOl~mant l'aile droite du chœur, sous un beau tombeau por-
. tant sa statue en relief ( ~ ).

Comme on le voit, la tradition de rinhumation des deux
évêques dans le caveau voisin du marchepied de rautel se

' perpétuait de siècle en siécle; elle n'était pas perdue

]ors de la démolition de l'église, en 1845; et voici le récit ~e
M. de Blois, qui sans doute fut témoin oculaire des fouilles
faites alors:
« L'autorité municipale, a la prière de Messieurs du cba-

« pUre, a bien voulu faire pratiquer des fouilles pour re-,
« chercher les restes des deux anciens prélats. On a trouvé,
«en effet, sous l'emplacement des marches du grand aut-el, .

(1) C'est-à-dire Supérieul'. (Dic!. de Tl'évOIIX.) .
(2) M, DE BLOIS d'après Albert Le Grand. La statue a .été brisée
en :f. 793 ,: , quelqu,c,s panneaux .du IOI~1ùea~ s~lr lesquel,s sont scylptées
les armomes de 1 eveque sc VOIent aU.Jolud hUi au Musee d'éll'cheqlogie .

« un caveau., .. , Au milieu de sa profondeur. , . " il était
« coupé par un rang de traverses en fer . que l'état du
« métal ne permettait pas de rapporter à une époque très
« éloignée. Au-dessus de ces traverses on a rencontré

« deux squelettes bien conservés; au-dessous, des osse-
« ments fort altérés par le temps .. Ces circonstances s'ac-
« cordaient exactement avec les indications sur lesquelles
. « on avait entrepris .les fouilles. Les ossement~ supérieurs
« provenaient sans d-oute ' des deux sépultures du XVIIIe

« siécle; ceux de dessous devaient étre les restes des évé-

« q ues. »
Je ne pense pas qu'il puisse .rester aucun doute sur. la

sépulture de l'évêqu o Rainaud a ux Cordeliers. M. Le Men
'a été trompé par la mention incomplète de Guy de Missi­
rien; sans doute il n e connaissait pas les actes d'inhuma­
. tion de 1720 et 1725, et il avait perdu le souvenir des
opérées en 1815 (1).
fouilles

Nous avons dit que le clcl'l1ier Nécrologe des Cordeliers
était conservé à la mairie de Quimper. C'est un cahier de

papier simple contenant 59 feuillets ·de 29 c. de long sur
19 de large; il a été récemm ent relié.

(1) Le r'lisonnement de M. Le Men se l'éduil en dernière analyse il

ceCI:
« L'abbé de Bois.billy a signalé la tombe d'un évêque nommé Raoul
Rainaud à Saint·Corentill, près de l'ent.rée Il:.! la chapelle de. la

• Vicloir~ . (coté suù) ; M. de Blois (de Morlaixt a vu cette tombe en
1820, et l'a l'apportée à Raoul ou B.ainaud mentionné pal' Albert Le .
Grand (1300 à 1320).
. 01., Albert Le Grand a commis une el'r~ur manifeste . . A· celte date,
l'évêque était Alain Morel; et Quimpel' n'a pas eu d'autre évêque Q,\l
nom de Rainaud que celui mort en 1245. Sa tombc l'st il Sclint·Corentin,
Jonc elltl n'a pu être aux Cordelicl's. .
ne me convainct p.1S. Il f::ltldl'ait démontrer (l'abord qlle M. de
Tout cela
n'a. pas commis Ulle erreur, et que
Boisbilly, écrivant au dernier siècle,
au Nécrologe
. son opinion est plus certaine que l'i :ldieatioll faite
avant 1400.

Ce cahier porte à la pr~mière page: « Papier pour ~1ar­
« quel' les anterments (sic) de l'année mil six cent quatre:
'no't-un, » Mais il faut se gal'der de prendre ces mots a

la lettre : 'ils signifien t que le cahier a été ou vert au com-
mencement de cette année: en effet" lè registre contient les
inhumations faites aux .cordeliers pendant plus d'un siècle,

à partir de 1681. , ,

Depuis 1547, date de l'acte le plus récent de l'extrait de
M: de Courcy, les Cordeliers se sont mode~nisés ' : ils ont

abandonné leur latin pour écrire en français; ils
!';e sel'vent de chiffres arabes et. non plus , d~ lettres pour
exprime!' les 'nombres; enfin, ils ne datent plus par ides,

nones et caLendes" etc., mais ils comptent les jours selon
l'usage vulgaire, par le quantième du mois.
Mais ils ont conservé l'usage de mentionner les décès
dans l'ordre des jours de l'année'. A cet effet, chaque page

du registre a été à l'avance divisée en part~ à peu près

égales, portant en marge les dates 1 , 2, ,3 janvier .. et
ainsi de suite jusqu'au 31 décembre. On a même songé aux
années bissextiles et le 29 février n'a pas été oublié. D'a­

près cette méthode, le premier ac.te inscrit, sous la date du
3 janvier, est de l'année 1762; 1e second, sous la date du

7 janvier, est, de l'année 1773; et l'acte le plus ancien par
sa date (3 mars 1681) est précédé de' 39 autres, quelques- ,
uns plus récents de près d'un siècle.
Contrairement à ce que j'ai dit sur' l'extrait.de M. de
Courcy, les actes du dernier Nécrologe sont des actes de
sépulture. Tous à peu près commencent uniformément par

ces mots: « Ce jour a été inhumé ..... » -La date consi­
gnée en tête de chaque mention est celle de l'inhumation',
et la date du décès n'est presque jamais indiquée.

Les actes sont écrits d'ordinaire p ::lr le Frère sacristain,
d'au tees fois par le Gardien ou Sup['l'.ieur. Le tiers à peine

des actes est signé ou pal' le Supérieur ou par le sacl'istajn,
quelquefois par les deux. Trop souvent la rédaction accuse

bien peu de soin: il y a des actes où le nom patronymique
n'est pas indiqué, d'antres ou le décédé est désigné set~le-

ment pai: son surnom (1). Enfin, quelquefois, la mention
de l'année est omise, notamment dans deux actes concel'-

nant des religieux du couvent.
L'acte lé plus ancien en date étant de 1681, le plus ré­
cent de ] 785, le nécrologe contient les inhumations faites
. pendant 104 ans. On peut s'étonner que 235 inhumations
seulement soient mentio1ll1ées. Si l'on déduit celles de 23
religieux, d'un homme et de sept femmes du Tiers ordre de
Saint-François ct d'un serviteur du couvent, en fout 31
inhumations, il ne reste plus que204 sépultures de personnes
étrangères à la communauté. C'est-à-dire que les Cordeliers
n'ont pas inhumé deux morts par année depuis 1681. En-
core parmi les 204 morts enterrés par eux, faut-il comptol'
le tailleur, le couturier, le couvreur, le boucher de la mai­
son et des membres de leurs Îmnilles.

L'antique usage de se faiee enterrer aux Cordeliers était
à peu près perdu; les successeurs des Rosmadec, des barons

. (1) Notamment dans ces deux mentions que ~I. de Blois avait pris '
soin de l'elevel' .: .
« Ce jOtll' 7 mars (1681) a été itihumé~1 line bonne femme àgée de cent
" treize ans, proehe de Sainte-Marie-Egyptienne, en la chapelle de la
« Sainte-Trinité. )) .
.. Ce jour 19 avril 1683 ..... cn la chapelle Je la Trinité .Un

homme llommé la Grande-Barbe.
Il amait été eUl'ieux de connailre le nom de cette cc:lte!laire; mais
c'est en vain q\le j'ai intcrrogé les registres des sept paroit:ses ue Ql1Ini­
pel', pour l'anné'e 168J, 11 faut qu'clic soit d':eédée dalls ullé ral'Oisse
VOISlfle. .
En ee qui concerne la Grande-Barbe, j'ai été plus heureux .. l'ai
trouvé it la paroisse de la Ch,mde/euT (place Saint,Col'lmtin, rues du
Frout, des Regaires, place Toul-al-Laër), sous la dale dll 18 cwri11683,
la melltion suivantn : « Ce jour 18 avril i6!:i3 mourut français Vrldis ct
" fut le lendemain enterré dans l'égl ise de Saint-Fronçois aprrs a\'oil' reçu
les sacrements du soussigné recteu!' Nicolas Auff, ct. »

' Cet homme étant le seul mort de Quimper porté c~ JOUi' au\ Cordeliers,
nul doute que cet acte ne nous donne le nom de ln Grande-Barbe .

de Pont-l'Abbé des Vieux-Chàtel, etc, ne réclamaient plus

la place que les armoiries de leurs seigneuries « insculp-
tèes » sur les tombes avaient marquée pour eux; et les

anciens. enfeux seigneUl?iaux gardaient les morts qui leur
avaient été , confiés autrefois sans en recevoir d'autres.
Quelques-uns mémeétaient, on peut le Croire, abandonnés
par les nouveaux possesseurs des seigneuries ayant enfeu
dans leurs paroisses, et les Cordeliers en disposaient,apparem­
mentavecla tolérance des nouveaux seigneurs . .! ene'retrouve
au dernier nécrologe que quatre des noms de famille figu­

rant à l'extrait de M. de Courcy; et ce document ne men-

tionne, comme nous le verrons plus loin, que quatre des

enfeux d'ancienne. fondation. '

On peut remarquer- aussi que la partie de l'enceinte du
couvent désignée sous le nom de cimetière ou de cour, ne
servait . plus aux inhumations (1); toutes les sépultures
mentionnées dans le nécrologe sont faites dans le cloître,
le chapitre et surtout dans l'église ét ses deux chapelles
annexes.

Le dernier nécrologe fait double emploi avec les registres
des paroisses régulièrement tenus à cette époque et con­
servés à la mairie de Quimper avec beaucoup de soin. Pour

ce motif, il est. infinim~nt moins précieux qué l'extrait des
anciens nécrologes. Toutefois, il présente encore et à plu-
sieurs point de vue, un véritable intérêt.

Il permet de dresser une nomenclature assez complète depuis
1681 jusqu:àla suppression du couvent: 1° des Gardiens ou su-
périeurs; 2° des frères sacristains; 3° des relîgieux inhumés
au couvent. Mais il a une bien autre utilité; les actes indi-

(1) La dernière inhumation faite dans la cour est du 6 mars f683.
En 1741), les Corde'liers yendirent une · partie du cimetière, voisine de
la pO.J't,c princil~ale, ~II sieur Amette, procureur fiscal des Regaires; il Y
fit bahr la maison a drOite de la porte. (SUI' le sieul' Amette. Bull. de , ,
1883 : Pratanras et Coatfao) , . .

quant souvent en quelle partie de l'église a eu lieu l'inhu- ;-'

mation, nous révèlent les vocables de la plupart des autels,
ou méme de tous les autels; ils complètent les indications
un peu sommaires que donnaient- les anciens nécrologes
sur la place des enfeux; ils mentionnent quelques enfeux
de seigneuries que l'extrait des anciens nécrologes ne
faisait pas connaître; enfin ils nous apprennent les nom~
des familles possédant des sépultures au dernier siècle~

III

A vant le dernier siècle, le couvent des ,Cordeliers tout
entier était une sorte de l1écropole: on y enterrait par­
tout, dans le cimetière ou la cour, da,ns le cloître, dans le
chapitre, mais SUl'tout dans l'église.
Cet édifice orienté de l'est à l'ouest était compris entre

le cloître au sud et la cour ou cimetière au nord. Il com-

prenait trois parties distinctes:
1 ° L'église avec un seul collatéral, selon l'usage des
Franciscains: ce collatéral s'élevait au nord contre le

ClmetIere;
2° Appuyée contre le mur du collatéral et dans le cime-
tière, une chapelle appelée par le nécrologe chapelle des
Agonisants, èt que les titres de la seigneurie de Pratanras
etlestitresanciensducouvent, nomment N.-D. de Vertu(1)
, , Le seigneur de Pratanras, outre une , vitre au chœur de
l'église, un écusson sur un bénitier du cloître et l'enfeu dont
nous allons parler, avait sur cette chapelle le droit de litre

et de lisière, comme seigneur fondateur et supérieur (2) ;
3° Une chapelle' formant comn-:e une ai~e sud du chœur,
que M. de Blois ' croit étre la chapelle souvent désignée

(t) Acte du 27 mai 1632. Fotidation. Arch. dép. "
(2) Aveux de Pl'atanràs ct p. v. du sénéchal de Quirnpel' (i64-1). _'
Arch. dép. V, Bull. arch. 1883. p. ,

dans l'e,xtrait et dans le nécrologe sous le nom de chapelle
du Juch, du nom d'une seigneurie voisine de Quimper.
Or, chaque 'pavé de l'église et de ses annexes était la
pierre d'un tombeau. Les tombes formaient des rangs
serrés; le N éCl'ologe mentionne à chaque instant la tombè .

4 7 , du ] 1 e rang. De plqs, il y avait dans l'épais­
s'eur des murs, huit arcades tumulaires; trois dans .le mur
sud entre l'église et le cloître, trois dans le mur nord du
collatéral, deux au mur sud de la chapelle du Juch·. L'an­
cien Nécrologe nous apprend. qu'il y avait aussi des enfeux
dans la sacristie, dans le cloître, dans le chapitre. On inhu- •
mait jusque sous les marches des autels et sous les stalles.
A quelle seigneurie ou a quelle famille appartenait cha-
cun de ces enfeux '? C'est ce que les pierres tombales ne
pou~aient plus révèler à M. de Blois en 1845. Les vandales
de 93 avaient passé là; leur fureur sacrilège avait martelé
les écussons de tous les monuments funéraires; et c'est à
peine si sept ou huit tomb'es, peut-être cachées par d'autres
à cette époque, avaient échappé au marteau, (1).

L'ancien Nécrologe nous fournit ,sur ce point quelques
indications que complète le nouveau. nécrologe.
Ainsi il nous apprend que les seigneurs de Botpodern et
de Coatcanton avaient leurs enfeux dans la' sacristie; les

. Penguilly, dans le cloître; les Coatanezre, dans ]e chœur'

les seigneurs de Guengat au haut du chœur, du coté d'u
cloître, c'est-a-dire, d;après le plan, à droite; les seigneUl's
de Kerlaouénan,au haut du chœur, du même côté; les
seigneurs du Vieux-Châtel, au haut du chœur. Les sei-

gneurs duJ uch sont mentionnés plusieurs fois', comme
inhumés dans leur chapelle (2) ; nous avons dit, en effet,

que dans la chapelle formant l'ailesud du chœur, il y avait

. (i) Elles sont aujOUl'd'hui déposées dans la eOUl' du
Musée al'chéolo-
gique. _ .
(2) ..... In suâ capellà Cl1m parentibùs suis. .

en outre, deux.
il s'y ü>ouvalt,
deux arcades ' tumulaires;
tom bes élevées
La maison de Lezongal' avait deux. ellfeux.. Les seigneurs
de Lezongar (par. d'Esquibien, bl'anche aînée), étaient inhu­
més dans le chapitre; ceux de Pratanras (pal>. de Penhars,

'branche cadette) avaient quatre tombes armoriées au milieu

du ch~ur, mais un peu en avant et non coritre la première
marche de l'autel, place où était, comme nous l'avons vu,
la tombe des évêq ues. C'est dans une de ces quatre tombes

que, le 28 juin 1784, fut inhumé M. de Madec, acquéreur

et dernier ,seigneur de Pratanras (1).
L'ancien Nécrologe ne nous indique pas l'emplacement
de l'enfeu des seigneurs de· Pont-l'Abbé, qui passent pour
fondateurs du couvent; mais les aveux de la baronnie nous
apprennent que le seigneui'; avait la vitre en supério.rité

dans l'église des Cordeliers et une tombe élevée vis a vis
du sanctuaire comme a la place la plus éminente (3) .
Ainsi l'extrait des anciens Nécr'ologes, qui mentionne une

quarantaine' d'enfeux, assigne seulement la place de neuf

. d'entr'eux. Le nouveau ' Nécrologe nous fournit quelques

,indications . supplémentaires. Parmi les enfeux dénommés
aux anciens néceologes, il n'en mentionne que quatre, celu i
de Prataneas, ·dont nous venons de parler, ceux de Kerhaeo

(il, M. de Plœuc), du Faou et de Moëllien.

L'enfeuclè'Kerharo i3tait dans la chapelle du Juch (3) (u0 38
et 58) ; celui de la vicomtédu Faou, sous la lampe; à l'eritrée
du chœur (n° 28) ; et l'enfeu de Lesivy étant, d'~près l'ancien
nécrologe, à droite de celui du Faou, l'indication relative à

ce dernier' enfeu nous donne la place du ' premier; enfin

(1) Arch. dép. Voir ci-dessu.s. p. i2. '
(~) Aveu 'du 29 septembre i732, f i9 v , Arch. dép.
(3) Dans no autre endroit (no 91) 011 voit que M. de )llœllC avait une
tombe jointe au grand tombeau vis à vis la porte du doi'loir; il est
q1l'il s'agisse du 'même enfeU, la porte pouvant êtt'e percée ùans .
possible
du J tich. . ,
la cha pelle

l'enfeu des seigneurs de Moëlli était au chœur, vis à vis du
l'Evangile (n° 72),.
pupitre, du côté de
Le nouveau Nécrologe nous signale, comme ayant droit

d'enfeu, queJques seigneuries non mentionnées dans l'ex-
trait, et iniique la place de ces sépultures. Ce sont: .
La terre de Méros (appartenant à la famille de Rosily),
ayant enfeu dans le chœur, du côté de l'épître (n° 24) (1).
La terre de Pratmaria. (prés de Quimper), ayant appar­
tenu aux Coatanezre (2), puis passée par mariage au sieur
de Beaucours (3), puis aux du Haffond, seigneurs de Keres­
~am (4), sergenterie fé9dée des Regaires, appartenant à la
famille du Haffond de Lestrédiagat, en 1681 (5), avait un
caveau dans le sanctuaire (N°S 70, 81).
La terre de Trohannet (paroisse de Langolen), apparte­
nant à la famille Tréouret de Kerstrat, avait enfeu dans
la chapelle du Juch (N° 46), et probablement vers le bas du
chœur à gauche, puisqu'une tombe en cet endroit por-

tait un marcassin, armes de cette famille (N°S 18, 47).
Il est présumable qu'il y avait aux Cordeliers d'autres en-
feux de seigneuries; et l'étude des titres de fondatlons
récemment déposés aux Archives du Finis-tère permettra un

jour de compléter cette liste.

Outre ces enfeux qui étaient d'attache à des seigneuries,
le couvent renfermait de nombreuses sépultures de famille .

(1) Elle sembie même avoir eu une alltre tombe ~t un banc daùs la
chapelle de Saint-Pierre d'Alcantara (65). .
~incent Coatanezre, seigneur de Prat maria, reprit Con­
LaVigne et Kermassonnet (Moreau, p. 65). En 1578 et 1579,
carneau sur
Je même çtait seigneur de Pratmaria~ (Arch. dép. Fonds des Cord.

S. 2 èt 3).

(3) LE CHAN. MOREAU, p, 168.

(4) En 1653, aveu .rendu à Mme de Bréhault. prieure de Locmaria, au

des enfants limeurs de Jacques du Haftond et de dame Guille­
nom

te Beaujollan, seigneur et dame de Kcrescam, Tl'énélop et P ratmaria.
met,
(0) Aveu de l'évêque au roi. Arch. de l'Evêché, 1682. CV. le Bullelin .
de 1883, p. 86 Coat{ao et Pratanras). . , .
BULLBTIl'f A.RCBÉOL . DU FnOSTBRB. 'tOMB XI. (Mémoires). 3

M. de Blois en a donné une liste; mais il n'est pas douteux

que les titres des Cordel~ers nous en révèleront d'autres;
et. le moment n'est pas veriu d'en dresser une liste nou-
velle. . .

Quoiqu'il en soit, on peut dès aujourd'hui remarquer que
le droit d'enfeu aux Cordeliers s'était, s'il est permis de le
dire, démocratisé au dernier siècle. A cette époque, en: effet, .
ce ne sont pas seulement des maisons nobles, mais aussi

• des familles bourgeoises qui jouissent.de-ce droit.

De plus, certains noms sont cités isolément, soit que les
décédés aient obtenu une tombe polir eux-mêmes dans les

emplacements non encore cédés, soit que leur. inhumation
se soit faite dans les enfeux des seigneuries ou des familles

avec l'autorisation des possesseurs, autorisation que l'es
actes prennent souvent soin de mentionner (1).
Enfin, comme nous l'avons déjà indiqué, les Cordeliers
. inhumaient un assez grand nombre d'artisans et en parti­
culier ceux qui travaillaient pour le couvent. C'était pour
ceux"'-ci comme ' un témoignage. de reconnaissance pour
les services rendus. Ils inhumaient aussi des pauvres.
Saint François avait choisi la Pauvreté pour sa Dame et son

Epouse (1). Ses disciples honoraient la Pauvreté dans les
indigents; ils offraient souvent à ceux-ci un dernier asile

dans leur église; e1, quand on lit ]e dernier nécrôloO'e on
se demande si des indigents n'ont pas reposé sous les tombes

armoriées des Rosmadec, des vicomtes du Faou et d'autres
hauts et puissants seigneurs. .

(1) V. notamment acte!' 16 et 88. ' .
(2) Vo.i~ ,son ad~irable Cantique à la Pauvreté: (( Seigneur.
(( axez pitIe de mOl et de Madame la Pauvreté: )) etc. (F. Ozanam les .
Poetes franciscains, p. 68.) ,

J'ai sio'nalé un autre intérèt du dernier nécrologe, je veux
dire l'indication des vocables des autels, et l'indication de la
. place que plusieurs d'entre eux occupaient. .

M. Aymar de Blois avait donné la description de l'église
au moment de sa démolition; notre confrère, M. Bigot, en
a dressé le plan. Ils vont nous servir de guide. Faisons
donc après eux le tour de l'église; le dernier nécrologe
en main, nous pouvons assigner à chaq ue chapelle le nom
qu'elle portait. '
Nous entrons dans le couvent rar la porte de la. rue
Saint-François. Nous passons entre la chapelle des Agoni­
sants et le cimetière jusqu'à une croix de pierre élevée sur
deux marches fort hautes. D'après la tradition, c'est du haut
de ces marches, que lors de rinvestissèment de Quimper
par le duc d'Aumont (octobre 1594), un Cordelier encoura­
geait les Quimpérois à la résistance (1).
Nous pénétrons dans l'église par la grande porte, unique
entrée du public, ', ouverte à l'angle nord-ouest. Nous avons, à
notre gauche, le collatéral unique. Il , est désigné sous le

nom de chapelle de la Trinite. En effet,ce nom plusieurs
fois répété au Nécrologe ne . peut se rapporter à une des

chapelles proprement dites, puisque outre l'autel de la Tri-
nité, l'autel d~ Sainte- Mar?e l'Égyptienne est indiqué
étant en la chapelle de la Trinité (519, 45); et que
comm,e

d'ailleurs on compte dans cette chapelle au moins . o'nze
rangs , de tombes et trois arcades tumulaires. Nous y ,
reviendrons tout à l'heure ,

(f) Le. chanoine MOREAU ne relate pas ce fait; mais en un autre

enul'Oit, Ji raconte que les Cordeliers excitèrent ou favolisèrent une
vél'i!able émeute contre le Sénéch:tI Jacques Laurent, qui dut sortir de .
VIlle (28 septembre 1lS90). , Le Sénéchal avait dit que (( quand ]e roi

(( (Heuri IV) SCl\iÏt le diable illcarné et qu'il aurait des cornes longues
comme les bras, il serait toujours son serviteur 1 ... Il P. 53 et 54.

A quelques mètres de l'entrée nous' rencontrons le grand
bénitier accolé au premier des sept piliers qui séparent le
collatéral de la nef (nO 98).
Devant nous, le mur sud de l'église est percé de quatre
grandes fenêtres: elles sont très-élevées de terre parce que '
est adossé à la paroi extérieure. «( Pour dissi-
le cloitre
« muler la nudité du mur inférieur, ce mur est décoré de

« deux chapelles en arcades cintrées qui pénétrent dans
« son épaisseur et de trois arcades tombales ou enfeux (1) )) .
, Devant nous, en face du bénitier, accolée à une ,arcade

tombale, voilà une chapelle que Jes orfèvres de Quimper.1. .
nombre de sept, ont en 1486, dédiée ' à saint Eloi, leur
patron (2). Mais le dernier nécrologe ne donne pas ce .
vocable, et il semble qu'au dernier siècle saint Eloy ait été
destitue de son autel au profit de saint' Bonaventure (3) .
Contre ~le seco'nd pilier est une image, sans doute une
statue, de Notre-Dame, vénérée sous le nom de Notre­
Dame du pilier (N° 23). Vis-a-vis ce pilier, contre le mur
sud, est un grand crucifix.
Cette porte percée dans le mur au-delà de la chapelle
Saint-Eloy conduit au cloître. De l'autre côté de la porte
est une seconde arcade tombale puis la chapelle de Notre-
Dame de la Conception.
-La chaire du prédicateur est adossée au mur vers le
l'église, et a l'èst de la chaire se voit un grand
milieu de
tableau de saint François.
Au-delà une .autre chapelle, dite de Saint-pierre d'Alcan-

(t) M. DB BLOIS, Loc. cit. Le plan de M BIGOT ne figure que deux
arcades tombal.es} mais il y en avait en effet une tt'oisième entre la
porte de la saerlStle et le chœur, comme nous le vel'rons, '

(3) (( Au bas de la nef, vis à vis le bénitiel' ... , « vis à vis' b' autel de
,aint Bonaventure. li (20 février f 77 f, 93.)

tara, « devant la sacristie, avec une tombe dans la muraille
« du côté du petit jardin. » (N°S 26 et 37) (1). Cette indica­
tio~ nous apprend ainsi que la sacristie était à cet endroit
adossée au mur; qu'à l'ouest elle confinait au cloître et
qu'à l'est un jardinet la séparait de la chapelle dont nous
allons parler. . .
cet enfeu s'ouvrait la grande arcade donnant
Au-delà de
ouverture à la chapelle du Juch.
Cette chapelle renferme deux enfeux voûtés. dans le
mur 'sud et deux tombeaux élevés (N° 52). Ce sont, à n'en

, pas douter, les enfeux des seigneuries du Juch et de Ker­
haro. La chapelle, pour communiquer avec la sacristie, par
le jardinet, a une porte ouverte à l'ouest (2). Elle forme,

comme dit M. ·de Blois, une des, ailes du chœur.
Du temps d'Albert Le Grand, il y avait, à l'entrée du
chœur, un jubé probablement en bois, p~isqu'il n'a laissé

aucune trace. '
Nous entrons dans le chœur. L'autel ,est adossé contre la
fenêtre du pignon. Devant l'autel se trouvent les sépultures
des Évêques, de la seigneurie de Pratanras et de la baron­
nie de Pont que nous avons signalées. M. de Blois men-'

tionne deux tombes de cuivre 'et suppose qu'elles pouvaient
être dans la chapelle du Juch. Une seule tombe de cuivre

est mentionnée dans le nécrologe comme étant dans le
chœur (N° 20). Mais une fondation faite le 10 avril 1614,
par Françoise Guégant, douairière de Keronsal, nous
apprend que son secolld mari, René du Cleuziou, a été

inhumé au coin de l'~gJjs~, entre les' deux piliers de cuivre,
près le grand autel, d ucôté de IJÉvangil e. (3) Je men tionne ce

détail sans pouvoir en donner une explication satisfaisante .
Faut ::-il r~pporter ce mot de piliers aux tombes de cuivre;

0) V. in fine, additions ,A.
(2) Cette porte était maconnée en i84!5.
(3) Fonds des Cordeliers; iO août i614. Arch. dép .

s'agit-il de deux ·· de ces coLonnettes très-tl·apues qui) au
XIIe et XIIIe siècles) étaient employées à soutenir) à très­
peu d'élévation de terre) des tombes de bronze ou de cui-
vre? (1) -
Il s'agit maintenant de déterminer la place du balustre
du chœur, dont il ne restait aucune trace en 1845, et que
M. Bigot n'a pu figurer à son plan. Notre confrère suppose
que le balustre suivait une ligne tirée du mur ·à peu près à
.la rencontre du second pilier. (2) Le chœur ayant 9 m. 05 c.
de largeur, cette ligne lui en donnerait 10 de profondeur,
soit à peu près le quart de la longueur de l'église. Cette

supposition se confirme par la mention que fait Albert Le

Grand « d'une chapelle à côté de la porte du chœur, sous le

« jubé du côté de l'Évangile. » 'Cette chapelle devait être

adosséeà un pilier. Placéplushautetappuyé contre le premier
pilier, le balustre aurait en partie fermé la grande arcade .
. ouverte sur la chapelle du Juch, et aurait laissé au chœur
des dimensions absolument insuffisantes surtout quand

le jubé existait. Le balustre ne pouvait, être placé plus
bas; en effet l'enfeu signalé dans le mur qui sépare l'église
du jardinet devait être presque en face de ce pilier et nous
savons qu'il n'était pas dans le chœur. .
Si nous tournons le dos à l'autel, voilà devant nous, à
la lampe sous laquelle ont reposé les
peu de distance)

vicomtes du Faou. .
Appuyé contre le premier pilier, à partir du chœur, très
vraisemblablement le second pilier) voici l'autel de Sainf- .
Antoine, avec marchepied, balustre et banc seigneurial
(NU 28, 77, 36) ; contre ce pilier, du côtê du collatéral,
ou contre le troisième pilier du côté de la nef., voici l'autel
de Saint-François: les deux autels sont indiqués comme
presque contigus (N° 72) .

(1) V. Bull. de f883, p. 332.
(2) V. additions, ~'n lUte, B.

La chapelle de la Trinité présente des dispositions ana­
logues à celles de la nef. Le mur nord est percé de sept
fenétres: deux sont aveuglées par l~ chapelle de Notre­
Dame-de- Vertu ou des Agonisants. Le mur est percé de
trois arcades tombales dont une dans la partie du mur
commune au collatéral et à la chapelle des Agonisants;
de plus il est garni ~e plusieurs chapelles.
L'autel le plus voisin du chœur est l'autel prévilégié des
Trépassés (N° 79). Un 'peu plus bas et contre le mur, puis ..
qu'il est entre une arcade tombale et un confessionnal, est
l'autel de Sainte- 111arie-Egyptienne (N°S 1 et 94). -

C'est aussi contre ce mur que se trouve l'image, ou la sta-
· tue de .Notre-Dame-de-Pitié (N° 38). '
Restent seulement deux vocables indiqués par le Nécro­

loge: Sainte- A nne et Saint- Yves. Nous n'avons aucune
indication sur la place de l'autel Sainte-Anne; et de Saint­
Yves nous savons seulement qu'il était dans la nef princi­
pale (N°99), appuyé probablement contre un pilier', puisque
nous avons reconnu les vocables des trois autels adossés .

au mur.

Enfin, il y avait dans' l'église une ·statue de saint Jean-

Discalcéat, cordelier à Quimper ... au XIVe siècle, qui mourut
lors de la peste de 1343 victime de son dévouement. Cette
statue, seul et respectable débris de l'église des Cordeliers,
nous la voyons aujourd'hui, derriére le chœur de Saint.;.

Corentin. Où était-elle placée dans l'église du coq.vent ~
Au lieu même où les restes de saint Jean avaient été

déposés, c'est-a-dire, d'après Albert Le Grand, (( en la
( chapelle qui est à côté de la porte de chœur, sous le Jubé,
(( du côté de l'Evangile. )) C'est, a n'en pas douter, l'em-

placement de la chapelle Saint-Antoine, adossée au second
pilier. La statue, qui est de petite dimension, devait êt~e
posée SUl' un Fiédestal, ou une console, auprès de l'alItel

de Saint-Antoine; c'est ce qll'on infère de ce mot d'un des
actes: petit a~del de Saint-J ean-Discalcéat. . C'est au' pied
de cette statue, et a la place où avait reposé le saint
Cordelier que, depuis 1741, trois religieux ont été' succes­
sivement inhumés -(l).

Le voisinage de Saint-Antoine allait procurer a Saint-
_ Jean un honneur inattendu et dont nous pouvons chaque
jour être les témoins. Cest une vieille pratique, dans plusieurs
contrées chrétiennes d'invoqu~r saint Antoine de Padoue '
pOUl' retrouver les objets perd-us. (2). Au dernier siècle, il

était d'usage~ en adressant sa prière a saint Antoine; de
déposer une modeste offrande sur son autel, presque aux
pieds de saint Jean. Ce saint dans lequel les Cornouaillais
voient un ami, et qu'ils appellent familièrement Santilc dû
(le petit saint noir), devait tout naturellement ,remporter
dans l'esprit de ses compatriotes sur saint Antoine, un saint
étranger, inconnu d'eux. C'est donc au voisin de saint An-

toine qlle, dans la suite des temps s'adressèrent les prières èt

les aumônes. Depuis que la statue de saint Jean a été réta-
blie à Saint-Corentin, cet usage a repris cours; et chaque

jour des sous sont déposés dans le tronc de saint Jean, ,
pour qu'il fasse' retrouver les objets perdus.

Si ce qu'on rapporte est vrai (et beaucoup n'én doute,nt pas), ,
saint Jean ' exauce les prières aussi bien que faisait saint
Antoine. Il encourage ainsi la naïve substitution faite a
son profit, et que saint Antoine aura sans doute pardonnée.
Auprès de la chapelle de la Trinité était, nous l'avons
vu, celle des Agonisants. « C'est la, dit, M. de Blois, qu'on '

« adressait des prières pour les mourants tandis que, sui-
« vant rusage qui s'Ç>bserve en beaucoup, de lieux, la cloche
« annonçait par ses tintements répétés, la dernière heure

(t) V. additions in fine C.
(2) Sur les motifs de cette dévotion, voir les Bollantlistes, Acta sancto­
rum, de saucto Antonio (au 13 juill), tome XXIII, notamment pages 220,

« de celui qui allait trépasser. » De là le nom ou le surnom
vulgaire de la chapelle. Elle . renfermait une statue de .
sainte Reine, à gauche, du côté de l'épître (N° 23).
On peut s'étonner de ne pas voir mentionner une cha­
pelle dédiée à sainte Claire, l'amie et l'héroïque émule de
saint François. Du moins le souvenir de la vierge d'Assise
était-il conservé dans le couvent; la porte donnant sur la
rue Keréon s'appelait porte Sainte-Claire (1).
Pénétrons maintenant dans le cloître: Voilà, au milieu,
une croix de pierre au pied de laquelle plusieurs inhuma ....
tions ont eu lieu au dernier siècle; à un angle se voit la
chapelle Sainte-Barbe, où étaient plusieurs enfeux de fa­
mille.
Le cloitre donnait passage aux salles. dans lesquelles
siégeaient le Présidial et les juges des hautes justices de
Quéménet (au marquis de Pont-Croix), de Coatfao et Pra,...

tanras, du Hilguy (Plogastel-Saint-Germain) 'et du Plessis-
Ergué (Ergué-Armel). Dès le temps de l'établissement du
Présidial, des salles avai/,:mt été empruntées au Couvent '

pour tau,dience et le conseil (3). Cet emprunt était un bail,
et une somme de 40uze écus fut promise aux Cordeliers~ qui,
eurent souvent de la ' pe:ine à la faire payer. Environ cent
ans plus tard (le 22 décembre 1657), un bail régulier fùt
'. passé avec la communauté de ville chargée d'assurer le

logement du présidial. Aux termes de cet acte, les Corde-
l~ers louèrent pour un terme de trois ans, sauf prolongation,
le bâtiment parallèle au mur de ville le long du Stéïr. Ce
bâtiment dit, dans l'acte; « département de Saint-Louis »
comprenait le réfectoire qui devint salle d'audience, la cui-
sine au bout méridional, et, au-dessus de la cuisine deux
étages renfermant quatre pièces qui devaient servir de

(1) Acte de fOlldation du 27 mai 1732. Arch. dép.
(2) MOREAU, p. 209.
(3) V. Bull. ·de1880, p. 209 et suiv.

chambre du conseil, de parquet pour les « geps du roi »,
et les huissiers.
Tout le bâtiment était loué sauf la cuisine. On y avait

accès de l'extérieur par le cloitre et une porte ouverte sur
la rue contre la chapelle dü Juch au sud .

Ce provisoire très-gênant, et contre lequel les Cordeliers

réclamèrent souvent devait durer près d'un siècle et demi, et .
survivre au couvent (1). . _
L'ancienne salle du Présidial n'existe plus; la cuisine
subsiste au rez-de-chaussée avec les salles au.dessus; mais
ce dernier débris du vieux monastère va disparaître à son
tour. Si vous êtes curieux de le voir, notre confrère, M. Rossi,

vous en fera les honneurs avec une grâce parfaite; mais il
faut se hâter, car avant longtemps la pioche aura ràis2m de

ces VIeux murs.

Reveno~s' aux nécrologes.
Le plus récent des actes releyés dans rextrait'de M. de
. Courcy est de 15.47; le plus ancien du dernier nécrofoge

est de 1681 ; il reste ainsi à combler une lacune de 134 aris !
L'espoir de retrouver les anciens nécrologes doit être
abandonné. Peut-être ont-ils péri avec tant d'autres titres,

lé 12 décembl'e 1793, quand la municipalité de Montagne- "
sur-Odet, ci-devant Quimper, applaudissant aux dévasta-
teurs des Cordeliers, et s'en faisant l'émule, ordonna le
brûlis des pagodes prétendues sacrées (1), c'est-à-dire des
statues de sairits arrachées aux églises de la ville. Le der­
nier nécrologe seul a été sauvé par un heureux hasard,
comme le fut la statue de 'saint Jean Discalcéat .

Mais ce qu'on pourrait peut-être espérer de retrouver,
ce seraient des extraits, comme ceux dont je viens de parler,

(i) Je ne puis insister ici. Le hail de 1657 a donné lieu' à beaucoup de
débats ,que les titres nouvellement déposés font connaître. '
(f) Rég. du Comité de surveillance. Dé!. du ~7 frimaire an Il.

dormant dans quelques bibliothèque privée .. Je dis privée.)
car de savantes mains ont en vain _ exploré, iL ma prière,
la Bibliothèque nationale, le fonds des Blancs-Manteaux,
que m'a~ait indiqué M. de la Borderie, et 'les Archives de
Nantes c'est-à-dire tous les dépôts publics qui, avec les
archives de Quimper, pouvaient être présumés avoir reçu
des documents de. cette espèce.
l'annonce de la publication des Nécrologes pro-
Peut-étre
voquera-t-elle quelque communication nouvelle? Et peut-

être, à ce point de vue, est-il bon de faire connaître notre
projet de publier ce que nous possédons des Néerologes,
sauf à prier nos confrères d'attendre l'impression sans trop
d'impatience. Un travail de cette nature est long san~ être .
bien difficile, et, pour le me1!er iL fin, j'ai besoin de quelques
loisirs.

. J. TRÉVÉDY,
Ancien Président du Tribunal civil de QuimplIr. - .

CORRECTIONS ET ADDITIONS
ERRATUM. Page 23. Â la mention de l~ sépulture de l'évêque
~ntre les mots amicus fratrum et la date de l'année, intercaler
Rainand,
ces mots: (( sepultus coram majori altari s.ub capsa lignea. ))

A. Page 37. Cette tombe 'ippal'tenait, semble-t-il au seigneur de Ke\'­
haro; du moins, le 1 juin 1692, cette tombe recut-elle Thérèse de
Plœuc, fille de René de PJœuc ; seigneut' de Kerharo. et sœur de Fran­
çois-Hyacinthe, évêque de Quimper.
B. Page 38. -- M. DE BLOIS, a écrit, Revue de l'A.rmorique, p. 242
en note. (( .L'enceinte du chœur dessmée par un rang de hautes et de

(( basses stalles occupait l'espace de ces deux travées (de la nef prihci­
«pale, et de la chapelle de la Trinité) et allait s'appuyel' contre 'le gable
(( de 1 est. ))
C: Page 40. -- Albert le Grand ajoute: Il et depuis le COl'pS (de Jean
levé d'une vieille chasse en laquelle il estoit, et mis
Discalcéat) a esté
en 4ne plus honorable, consel'vée sous un petit dosme eu forme de Chap­
pel}e, faite de treillis ef grilles en fer. D'où encore on a transféré ses
relIques en la Chappelle qui fait l'aisle droite du Chœur, et posées SUl'
l'autel eu un petit Tabernflcle, couvert d'un voHe de riche étoffe. II
(Vie de Jean Discalcéat t. IX). Les reliques étaient encore en cet endl'oit
au temps de Dom Lohineau. Avant le sac de l'èglise, en 1793, elles
furent enlevées et portées à Ergué-Armel, où elles sont restées.