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RÉPONSES A DIVEi'lSES QUESTIONS ARCHÉOLOGIQUES.
PAR L ABBE..n.BGRALL .
Les stations paléolithiques en Basse-Bretagne .
MONSIEUR LE PRÉSIDENT,
Le Congrès de Quimperlé n'ayant malheureusement
pas eu lieu, j'ai l'honneur .de vous adresser pour la Société
archéologique du Finistère, une réponse à la première
question du programme de l'Association bretonne. .
Eœiste-t-il en Basse-Bretagne des stations de Fépoque
paléolithique (âge de la pierre éclatée)? S~il en eœiste., en
donner la description., en déterminer le caractère et
t importanr;e. .
Le docteur Le Hir, de Morlaix, a signalé une petite
station de l'époque dite paléolithique sur le terrain de la
com)1lune de Guiclan, dans une grotte anciennement
habitée, appelée dans le pays Roc'h- Toùl, ( roche percée ».,
et située sur la rive gauche de la Penzé, en face du moulin
du Luzec. Dans un champ·voisin de cette grotte il a trouvé
également un grand nombre d'éclats ,de silex, surtout aux
époques où lê sol était remué pour la culture.
Le regretté docteur a rendu compte de ces explorations
dans les numéros des Matériauœ pOUlo servir à fhistoii'e
primitive et naturelle de l~homme, ainsi que dans le
Bulletin de la Société archéologique du Finistère.
Les échantillons qu'il a trouvé dans ses recherches et
ses fouilles ont peu de caractère, et sont loin d'avoir l~im-
portance- de .eeux des grands ateliersl de SoIn tré, la Made-
leine, le Moustier, le grand Pressigny, etc. lh; ne compren
nent que quelques lames,quelques grattoil'S et des pointes
de flèche assez informes. Cela se comprend du reste: notre .
)ays est très pauvre en silex, et les anciens habitants qui
des galets roulés recueillis dans le lit des riviéres ou sur
le bord de la mer. .
Outre cet atelier peu important, on peut en indiquer
encore quelques autres ' qui semblent de la même époque.
Dans les belles fouilles faites par M. Grenot li la pointe
du Souc'h, commune de 'Plouhinec, il a trouvé dans
les curieuses sépultures gauloises qu'il a explorées une
grande quantité de l.ames et d'éclats de silex~ Cette parti- .
cularité l'a porté à étudier le terrain ' environn~nt, et il a
pu reconnaître que tout la partie inculte qui entoure le
geoupe de monuments est parsemée de ces éclats, et qu'il
suffit d'y donner un coup de pioche pour en ramener
d'autres à la surface du. sol. Il y a particulièrement dans
les environs un champ cultivé qui en est littéralement
rempli.
Cette grande abondance de silex . éclatés .semble indi
. quer la présence en ces lieux d'une population trés~anciebne,
et l'établissement d'un atelier pour la confection des armes
employées à cette époque. .
Toujours sur la côte de Plouhinec, mais pl~s 'au nord,
tout près de l'embouchure de la rivière d) Audierne, à la
point.e de Porz-Doun, près du village de Saint-Drejel, j'ai
assisté au mois de mars 1882 à l'exploration d'autres sépul-.
tures comprenant. trois chambres couvertes, une chambre
à ciel ouv.ert et deux galeries. Or~ ces monuments ont
fourni aussi beaucoup de petits éclats de silex, mais ni
pomtes de fléches ni lames de grande dimension. Il me
semble qu'on est fondé li conclure cependant que là aussi
existait un petit centre d'industrie. .
En suiv.ant vers le sud la côte de la baie d'Audierne,
on passe SUl' le terrain de Plovan. Dans cette commune ont
été fouillés des tumulus d'assez' grande importance., dont
quelques-uns ont donné des résultats intéressants- et fort
curieux. Prés de ces tumulus, j'ai pu recueillir à la surface
du sol un 'gr{tnd nombre d'.éclats de silex dont la plupart
sont dus certainement à l'action de l'homme et qui sem-
bleraient dater de l'époque du monument.
- Si l'on continue à côtoyer la mer vers le sud, on
arrive à la Torche de Penmare'h. La existait très ancien
, nement un centre de population vivant dans un état de
civilisation des plus primitives. Son existence est démon-
trée par la présence d'un Kjokken-Modding, analogue 'à
ceux . qU'Ol~ trouve en si grand nombre sur les côtes du
Daner:narck. C'est un immense a p.1as de débris de cuisine
consistant surtout en des coquillages mélangés de cendres
et de charbons. Au milieu de. ces cO'quillages se rencontrent
~.' aussi des écailles, ·.des arêtes de poissons, des os d'échas
• sier; on y a même trouvé un squelette h11main. Les habi-
tants faisaient leur cuisine en cet endroit et consom-
maient leur repas sur place : c'est ce qui a produit à la
longue ce grand amoncellement de débris . Il semblerait .
que leur outillage fût très simple ainsi que leur vaisselle .
On n'a trouvé parmi ces restes aucun débris de vase en
terre, mais on y trouve un nombre prodigieux de lames de
• silexe~ de quartz qui leur servaient de couteaux .
« A la Torche de Penmarc}!i et à Roe}h- Toul, on est
peut-être fondé à croire qu'on se trouve réellement en
présence de produits de l'épopue . paléolithique, ou de la
pierre éclatée, car il me .semble q Il'on n'a rencontré avec
ces silex aucun instrument en pierre polie; mais à la
pointe du Souc'h, les mêmes monuments ont fourni des
,silex éclatés et des haches polies. Nous ne serions donc
plus à l'époque ' paléolithique, mais a l'âge néolithique,
qui a produit de SI jolies haches dans notre pays .
. Même, à la pointe de Saint-Drejel·, nOLIs serions déjà .
en plein âge . du bronze, puisque, au milieu de toutes ces
petites lames . de silex, il m'est arrivé de trouver trois .
jolies pendeloques, dont une en cristal de roche, une
seconde en pierre rouge et la troisième sous forme de
petite hachette en chloromélanite ou ell: jadéite; puis, tout
il. c6té, un petit fragment de poignard en bronze qui mal
heureusement n'a pas été recueilli en entier~
Devons-nous conclure qu'il y a eu réellement en nott'e
pays une époque paléolithique ~ S'il en est ainsi, elle a .
du moins laissé peu de traces sur notre sol, tandis que la
plupart des monuments révélent l'époque néolithique, ou
même l'âge de bronze.
En terminant, me· sera-t-il permis de poser une ques-
tion qu'il serait désirable d'éclaircir ~ D'où les habitants
primitifs de ce pays tiraient-ils les lames de silex de 20 et
25 centimètres de longueur qu'on trouve dans les anciennes
sépultures, sou~ forme de couteaux; de scies et de poi
gnards ~ D'ou re~evaient-ils les . hachés polies en jadéite,
·en chloromélanite et en bibrolithe qui ,sont, i~ est vrai"
assez rare~ mais qui proviennent certainement d'ailleurs,
puisqu'il n'existe pas dans le pays de gisment de pierres
de cette nature. ' .