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Bulletin SAF 1882


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Promenade château de Pratanras et au château de CoatFao (près de Quimper). Les seigneurs de Pratanras et de Coatfao (maison de Lezongar, maison du Quélenec, maison de Visdelou)

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PRpMENADE A PRATANRAS ET A COATFAO.

A la fin de notre prom.enade à la colline de la Justice et
cl La tombe de Tanguy, je vous disnis que le seigneur de
Praianras était selogent féoclé de la Cour des Regaires de
Cornouailles... J'avais trouvé ce renseignement dans
Révin (1) .
En commcnçan t l'étude des titres de Coatfao et Pratanras
. consel'vés aux archives départementales, je ne me propo­
sais que de verifier l'affirmation du vieux feudiste et

comme je vous·le disais, de l'ùssemblel' quelques traits de
fhistoù'e des Sergents féod és . Mais les premières recher­
ches en ont amené d'autres : je n'ai pas su résister à

l'attrait de l'inconnu; et j'ai fait comme ces voyageurs,
qui, emportés par la curiosité, s'écartent de leur route et
finissent par oublier le but q n'ils se proposaient au départ.

Reprenons notre prom .. enacle où nous t'avons laissée, à la
tombe de Tanguy.
A deux cents métres de ce point,l'ancienne route de Douar­
nenez que nous suivons rejoint la route nouvelle. Trois
ou qliatre cents mètres plus loin, arrivés au sommet
de la colline, vous apercevez sur la droite la montagne de
LocTonan et les cimes des lvlontagnes-JVoires voisines de
. Châteaulin, Gouézec et Laz, qui ferment l'horizon. Entré la
montagne de Locronan et un sommet voisin de Châteaulin,

se montre à l'arrière-plan, lorsque le temps est clair, une

des cimes du Mè.nez-Hom. A gauche, voici l'entrée du ma­
noir de Kerrien ... Je salue en passant cette maison qui

tant de fois me fut hospitalière ... A droite, sur une colline
voisine, ce manoir perdu dans la verdure est celui de Toul­
goat, où vécut et mou l'ut le dernier sénéchal de Cor-

(1) Qm:stions féodales. Chap. II. (Mémoire pour l'Evêquc de
Quimpa.)

nouailles, Le Goaezre de Kervélégan. A gauche, le clocher
de Pluguffan pointe sur une colline. Enfin, un peu au-dela.J
en face de la route, qui tourne en descendant à gauche,
cette grille soutenue par six piliers de granit avec une large
porte accostée d'écussons armoriés, c'est l'entrée du châ-
teau de Pratanras.
Les armoiries qui décorent la pode et la fière devise qui
surmontent les écussons sont celles du dernier seigneur

de Pratanras et de Coatfao.
La seigneurie de Coatfao (1) avait son siège principal en
Pluguffan (2); le château de Pratanras (3) était en Pen-
hars, et les deux fiefs s'ètendaient sur plusieurs autres pa­
. roisses. Ces deux terres furent réunies en 1542, et elles
. . n'ont èté distl~aites l'une de l'autre qu'un instant, par un

acte de 1568, et dèfinitivement par le partage fait, en 1806,
entre la veuve et les héritiers du dernier seigneur (4) . Mais,
après l'annexion, éhacun des fiefs originaires garda ses'
droits particuliers; et le seignetlr, en rendant aveu, a bien
soin de distinguer ses droits à cause de Coatfao, et ses
di'oits à t;ause de Pratanras. .
Parmi les pièces conservèes aux archives, deux ont une
importance capitale: .

1 Un arrêt ~u 18 décembre 1642 de la Cour des comptes
de Nantes, mis au pied d'un aveu du 4 aoùt 1638, et visant
les actes et. titres produits à l'appui de l'aveu, en exècu-
tion d'un arrèt du 19 fé.vrier 1640. Ces titres sont ènumérés
dans un inventaire. .

(1) Coa Irao. le bois de hêtre. Dans les tifres 011 trouve Coetfaou,
Coalfaou, Coetfao et Coatfao; la delllière orthographe a prévalu .
(2) Autrefois PluQuen, Plouguen, Plouguffan, Ploeguinan (Réf. des
- fouages, f426), aujourd'hui, dans le langage vulgaire, Pluguan .
(3) Éerit tour à tour Pl'adanras, Predanms, Prdtancras, Prataras.
Souvent l's finale est remplacée pal' z. On prononce d'ordinaire Pra­
taras 011 même Pratras .. L'étymologie est prat an ras (le pré du ras).
(4) Ade de dépôt au greffe du tribunal dU .3 mars 1806 •

2° Une sentence des commissaires nommés par le Roi
pour la réformation du domaine de Quimper et autres juri-.
dictions voisines, sentence rendue le 21 avril 1683 et mise

a la suite d'une déclaration au roi du 8 septembre 1681. La

sentence vise un grand nombre d'actes .de toute sorte,
parmi lesquels plusieurs, bien quJant.érieurs a l'aveu de
1638, n'avaient pas été produits a l'appui de cet aveu.
Les actes énumérés a l'arrèt et a ia sentence, si nous les
avions in extenso, nous initieraient a l'histoire des deuxfi.efs
depuis le commencement du XVe siècle. Mais par malheur
les rédacteurs de ·ces deux décisions n'ont pas songé a sa­
tisfaire notre curiosité. Ces documents ne contiennent qu~
des dates et des résumês som maires, n'indiquant même pas
le plus souvent les noms des seigneurs qui recevaient ou
rendaient les aveux ou qui étaient parties aux actes (1) .

Les titres conservés aux aechives ne m"apport;::tient sur
beaucoup' de' points qlJ,'une lumière insuffisante; mais

notre savant confrère, M. Pol de Courcy, M . . Saulnier,
conseiller a la cour et vice-président de la Société archéo-
logique d'Ille-et-Vilaine, d'autres encore me sont venus en
aide avec le plus aimable empressement. . C'est grâce a
. ,. eux que j'ai pu' mener à fin cette notice (2) .
J'essaierai, dans une première partie: 1° de décrire les

châteaux de Coatfao. et de Pratanras et d'indiquer leurs
origines ~ . 2° de résumer l'histoire des deux fiefs après
leur réunion. Jo me propose (bns une seconde partie, d'é­
tudier les droits seigneuriaux de Coatfao et de Pratanras.

(1) Les actes visés dans l'arrêt de 164:1 sont, :iÏ-je dit, pOl't~s à IID
inventaire. Dans les nombreux emprunts que je ferai à l'arrêt de la Cour
des comptes et à la sentence des commissaires de 1683, je citerai pour
abréger pal' ces mots: inventaire, sentence .
(2) Les noms de mes ohligeants correspondants se .:etrouveront dans
les notes au bas des pages. Je leur adl'esse à tous mes ·remercÎments. Si
cette notice a quelqueiotél'êt, c'est il eux qu'elle le devra, età M. Luzel,
archi vi ste du département. .

I. LE CHATEAU DE COATFAO.
Il Y avait anciennement un château Jort a Coatfao ; mais
il semble que dès le commencement du XVe siècle, il était
la demeure d'un métayer (1). Du moins est-il certain que,
dès 1575 et 1584, ce c c manoyr » était louè c( avec ses appar­
« tenances » a un cultivateur c( pour deux mesùres com­
c( bles de fl'oment et quarante sols ) (2). En 1679 « ran-
c( cienne maison ou château était en ruines, fors qu'il y .

« avait encore quelques murailles ou vestiges portant
c( marque de château) (3).· En 1730, le château avait
perdu son nom, pour prendre celui de Pors qu'il porte

encore; et le nom de Coatfao ne se ' donnait plus, comme
aujourd'hui, qu'au bois voisin et a la terre toute entière.
A cette époque, la vieille forteresse était tenue a domaine

congéable (4) ; elle n'était même pas comprise parmi les
édifices, mais elle était descrîbée parmi les terresfroides (5).
Toutefois le lieu oùfut le château gardait encore, avec le
'nom de château, ses prérogatives de "chef-lieu du fief)' et
c'est la qu'étaiènt rendus certains devoirs (6). .
Le plan cadastral de la commune de Pluguffan dressé en

(1) Réf. des fouages de Pluguffan (1426) que je mentionnerai plus
loin.
(2) Baux des 6 mai i 575 et 17 mai f084, communiqués par M. le
Conseiller d'Amphel'l1ct, propriétail'e actuel de Coatfao .
(3) Aveu du f8 mai 1679. Arch. dép .
(1) A veu du 1.7 mai f 730. « Le manoir noble de Coatfao, dit le Pors,
« tenu à domainecongéable. )) A l'ch. dép,
(5) Déclaration à domaine du 30 juin f 781 du lieu du Pors .. ,. Arr,h.
dép. .
« Terres froides ..... La moitié de la mazière et applacemcnt de ran­
« rien château de Coalfao appelé Coz-Castel, l'autre moitié appartenant
. « etc.. .. Il
(6) Aveu du 27 llovembre 1751. Redevances d'Audierne notamment.

1837, figure pl'ès du village du POt's, à quinze cents métres
au nord du bourg, une parcelle de forme circulaire entourée
d'une bande étroite. Cette parcelle est nommée à la matrice
cadastmle, hastel,J (le château), et la bande qui l'entoure
est nommée la venelle. Auprès, vers le nord, est un champ ap-
pelé Parc-hastel (1). Le premier coup d'œil 'jeté sur' le plan
ne peut nous tromper : le hastel et la venelle sont
l'ancien manoir et sa douve.
Allons donc voil' ce qui en reste!. .. Suivons la route de
Douarnenez qui contourne le parc de Pratanl'as, où nous '
reviendrons bientôt: prenons la route de Plogastel-Saint-
Germain, nommée autrefois le Chemin du lharquis (2) . Du
, sommet de la colline que nous gravissons, nous apercevons
la mer, de Loctudy à la pointe de 'frévignon, au-delà de
Concarneau. A la seconde borne kilométrique, une avenue
de hêtres, qui s'ouvre â gauche, nous conduira droit au
village du Pors. Là nous n'avons pas besoin de cicel'one ...
Voilà le hastel et sa douve ! .. Les lieux n'ont pas changé
depuis la confection du cadastre.
Le hastel est un cirque elliptique de 32 sur 36
mètres de diamètre: il forme une sorte de cuvette dont les

bords se relèvent presque régulièrement de 2 ou 3 mètres
vers le sud, l'est et l'ouest, de 3 ou 4 mètres vers le nord.
L'anéienne enceinte se reteouve toute entière. Du côté du
sud-ouest, se voit une ouvel'tu,re parementée qui donnait
accès dans l'intérieur.
Au nord .. se reconnaît la douve large de 7 à 8 mètres que
figure le plan cadastral; à l'ouest, cette douve est devenue

un chemin; au sud-ouest, elle est occupée par une maison

de construction très-ancienne qui masque en partie l'entrée

(t) Le Hastel et Ll venelle nO i77, section B', dite de Coalfao ; le

Par.c-Hastel, nO f65.
(2) ... de Pont-Croix. Le cadaslre 'a conservé au chemin.ce nom
populaire.

de l'enceinte; au sud, la douve a disparu sous une cons-
truction moderne; à l'est, la culture l'a envahie. Des arbres
ont été exploités, d'autres poussent sur le sommet du
rempart nord.
De ce côté, le rempart large de 11 mètres environ
parait construit en terre a l'extérieur; mais il semble qu'à
l'intérieur il est revètu d'un parement de pierres. Aux au-
tres orients, le rempart est large de 5 à 6 mètres; et le pare-
ment de pierre apparaît, par endroits, à l'extérieur.
A l'opposite de l'entrée, .se voit, comme appuyé contre le
rempart au nord-est, un amoncellement de pierres. A côté,
dans l'épaisseur du rempart, à l'est, s'ouvre une sorte de

couloir parementé,- large de deux mètres environ, où un
maréchal avait, il y a quelques ann8es, établi une forge .
Il ne semble pas que le vaste. espace circonscrit .par
. l'enceinte ait été couvert; sa ruine e~tamoncelé beaucoup

plus de débris ... et le sol à l'intérieur eût été bien plus élevé
ne l'est en réalité au-dessus des terrains voisins .
qu'il
Il semble que le rempart décrit l'enceinte d'une cour et

que l'emplacement du château est marqué par l'amoncelle­
ment de pierres qui se voit au nord-est. Cette supposition
rempart
devient plus vraisemblable si l'on observe que .le

nord plus élevé et plus large formait la principale défense;
et le couLoir pouvait conduire à la porle du château.
Les champs cont,igus sont couverts de moissons, mais le
hasteZ est inculte ... Pourquoi? C'est que nous dit-on, sous
la couche herbeuse qui couvre le sol, il n~y a que des
pierres. Ces pierres proviennent sans doute ou du mur de
constructions accessoires qui devaient se
défense ou des
trouver dans l'enceinte.
Le hasteZ, tel qu'il apparaît !lUX yeux, n'est-il pas un de
donjons à motte dont M. de Caumont rapporte la cons­
ces
truction au XIe siècle, et qui n'étaient, à proprement parler,
que des fortins ou des postes d'observation?

Nous cherchons en vain, dans les. murailles des quatre
maisons dont se compose le village, des pierres empruntées
à un manoir qui aurait succédé au donjon et portant, si on
peut le dire, leur marque d'origine. Nous n'en trou'vons pas
une seule.
Vers le nord, au delà de Parc-hastel, s'élève une émi-

nence circulaire d'environ 25 mètres de diamètre. Cet amon-
cellemenf de terre est ancien,. puis qu'on y a exploité des
pins dont les souches èno!'mes se voient encore à fleur de

terre; il est évidemment artificiel. Il y a peu de temps, un
carrier, y cherchant un trésor, ra ouvert de l'est à l'ouest
d'une large tranchée. L'espoir du brave homme a été déçu;
mais sa peine n'a pas été perdue, puisque ces fouilles ont

démontré que ce tumulus ne couvrait pas une sépulture.

C'était sans doute la motteJéodale :e'est-à-dire la butte
de terre que le_ seigneur élevait non loin de son château .
comme signe de sa pui~sance sur le sol, et au pied de
laquelle s'était très-anciennement rendue la justice.
Cette butte semble avoir pour les habitants du' voisinage, .
un caractère myst9rieux ; mais d'où vient le nom bizarre de
phare qu'ils lui donqent, dit-on, de temps immémorial? ..
Peut-être pourrait-on hasarder cette e)' plication: de ce
point très-élevé (1) le regard embrasse toute la partie sud

de l'arrondissement de Quimper, et s'étendant sur' la mer
aperçoit les feux de Penmarch, de Loctudy, des Glénans .
. N'a-t-on pas appeléphare le lieu d'où l'on voit les phares? .. (2)

Mais cette vue admirable ne faisait pas de Coatfao un

agréable séjour. Ce plateau élevé était un poste d'obser-

(1) La carte de l'Etat-major marque presque'sur le site du Phare une
altitude de 162 mètres.
(2) D'après une tradition, 'que je n'ai pu vérifier,
on aurait autrefois
allumé des feux en cet endroit comme signal.

vation bien choisi; mais il est nu, aride, battu par les vents
de la mer. Si~ cùntrairem ent aux indications fournies par
la vue des lieux, le « château ou manoyr » de Coatfao a
jamais été autre chose qu'un fort ou poste d'observation, il

a été inhabité p J l' ses seigneurs, de temps immémorial.
En 1670, comme nous l'avons vu, Coatfao était à peu près.
dans le lTlême état qu'aujourd'hui. En 1584, 1575 (1),1566 (2),
et sans doute depuis l'annexion des deux fiefs, en 1542, le
seigneur de Coatfao demeurait à Pratanras.
Remontant beaucoup plus haut on est autorisé à dire qU8
dès longtemps Coatfao n'étaÎt pas habitation seigneuriale.
Les plus an,ciens aveux mentionnés comme rendus à

Coatfao sont de 1 I02 et 1416; malheureusement la sentence
qui les réfère ne fait pas connaître le nom du seigneur.
Un peu plus tard, Coatfao appartenait à « Damoiselle
« Jeanne du Ponthou, compaigne de Pierl?e, baron de Ros-

« trenen.» (Aveux de 1421 à 1U7). Il s'agit de Pierre VIII,
de la maison du QUélenec, consp.iller et chambellan de
Charles VII et lieutenant général du duc de Bretagne,
Arthur de Richemont (3).
Ce grand seigneur n'habitait pas Coatfao : :en effet on lit ·
dans la réformation des fouages de Pluguffan pour ]426 :
«(. IVlétayers ... au sire de Rostrenen, à cause de sa femme,

« au manoir de Coatfao ... » .
années après, Coatfao passait de la rr.aison de
Quelq ues
Rostrenen à celle de Pont (l'Abbé), par le mariage de Mar-
Rostrenen avec Jean du Quélenec, baron du
guerite de

Pont (4).

(t) DatlX ùéjà cités.
(2) Transaction du 24 mars 1566. Arch. dép.
(:~) Aveux renclus à Jeanne du Ponthou, i!J21, 1422,1423, 1424, 1431,
14lt2, i445, H46 t t 14lt7. Sentence. L'a"cu de 1423 se retrouve aux
Archives départemelltales. . .
(4) Avcux rendus à Jean, haron du Pont à cause de Maq~llcrite de
Rostrenen sa corupaigne. 14 52, 14 153, 1455, H 60, 1465 et 1475. Sentence.
Les titres discnt inJiffécemment de Pont ou du Pont.

Ce maeiage, que j'ai trouvé indiqué a 1-150, se fit avant
cette date puisqu'on lit a la réformation des fouages de
Pluguffan pour 144:1 : « Le seigneur de Pont a Coatfao .....
« deux métayers. »
. Ce seigneur fut appelé comme sergent jéoclé du Duc
aux Etats généeaux de Vannes, en 1!162. Tout baron qu'il
était, il allait être contraint de faü'e office de sel'gent. ...
Par bonheur, le sire de Guéméné-Guingamp était trop

jeune pour paraitre en public portant la COl.ll'Onne du-
. cale; le baron de Pont fut appelé a le suppléer, et, pour
cette fois .seulement, au lieu « de ranger la foule sur le

« passage du souverain une vergette blanche ô la main J>
il marcha dans le cortége « portant le ceTele rO~Tal du Duc
« sur un riche carreau brodé et enrichi de pierres et de

« perles , » (1)
Jean du Quélenec mourut avant 1480, puisque, cette an­
née même, Pierre, seignew' de Pont.> figura a l'entrée so-
lennelle de l'évèque Gui du Bouchet (2). .

Pierre mourut peu après, et, le 2 juillet 1492, aveu était
fourni « pour le rnanoir de Kerguizirin, en la paroisse de

« Beuzec-Cap-Cavall a Alein de Tyvaranlen, receveur du
« Pont, pour haulte et puissante damoiselle Heleine de

« Rohan, dame du Pont, de Rostrenen et du Ponthou, ou
« (au) nom et comme tutrice de hault et pLlissant Jean,
« seigneur du Pont, son fils mineu!'. » (3)

En 1493, Je.an dll Quélenec rendait aveu a la seigneurie
de Quintin (ou il était rendu [aveu en son nom).> et il était
qualifié de haut et puissant baron du Pont et de Rostrenen
vicomte du Faou et de Coatmur, sire du QUélenec, de

(1) Dom Morice, P1'euves, t. 1 p. 1 et 2.
(2) Voir onogr. de la cath., p. 148 .
(3) Cité pal' M. Le Men. Notice sur Tronoën. Bulletin 'de f877-f878,
page 137.

Finiac (Yffiniac), Lehart (1) la Ville-Pépin (par. de Hil-

lion), Le Vaugailard, Carnoët et autres lieux (2) .

Le même Jean du Quélennec recevait le compte des
revenus de Coatfao en 1501, (3) et possédait encore ce fief

Non seulement les riches et puissants seigneurs de
Rostrenen et de Pont habitaient aux chefs-lieux de leurs
grandes seigneuries; mais ils se souciaient peu de leur fief

de Coatfao. La preuve c'est que, en 1501, le baron de Pont
recevait d'une seule fois les revenus de ce fief arriérés
depuis dix-huit années (5).
Un peu plus tard la seigneurie de Coatfao allait être
vendue an seigneur de Pratanras (6).
A notre tour, abandonnons Coatfao pour Pratanras,

où 'nous ferons un plus long séjour ... Mais gardons-nous
de suivre une seconde fois la route de Plogastel; tra­
versons la, et gagnons le village de Kereval : nous lon­
gerons le sommet de la colline, d'où la vue s'étend au loin
sur les Montagnes noires; et un sentier ombreux nous
ramênera a la route non 'loin de Pratanras.
(1) Paroisse de Senven-Lehart, anciennement' Saint~Guel1-Lellal'f,
avec haute justice . .
(2) Rense.ignements transmis par M. l'abbé Alldo, membre de la
SOCiété aL'Chéologique des Côtes-tlu-Nord.
(3) Compte-rendn à Callac, le 12 mars {501, au baron de Pont et de.
Plusquellec, des fl'Uits et revenus de Coalfao, depuis 1483 ine!.
HOt. Sentence. . .'
jusqu'à
(4) Réformation des fouages de Pluguffan, f 536, ( Le manoit' de Coa t-
fao au baron du Pont. li .
(5) Voir ci-dossus, note 3.

(6) Jean du -Quélenec eut ponr fils Charles, qui embrassa la rêforme
fut massacré dans la C0ur dU .. Louvre, la nuit de la S~int-narthélémy.
Sa femme, Catherine l'Al'che1Vêque dame de Parthenay et de Sou bise,
poursuivait en ce moment contre son mari un scandaleux procès. (Voir
SUI' ce point Sismondi, Histoire des Français, t. XIX) .
. La mo!'t de Charles du Quéleileû rriit tin ft la descendance masculine
des Quélenec seigneurs du Pont et de Rostrenen .

II. LE CHATEAU DE PRATANRAS .

1 L'inventaire et la sentence mentionnent un acte « du
« 18 mars 1478, justificatif que la seigi1eUl'ie de Pratanras
« a ses hautes justices et patibulaires de toute antiquité; »
et plusieurs aveux tén~oignent que les patibulaires étaient .

« de tout temps immémorial aux issues du manoir. » (1).

Il Y avait donc très anciennement a I?ratanras une habi­
tation seigneuriale. C8pendant il ne reste, aux environs du
château actuel, aucun vestige de fortifications; les aveux
n'en font nulle mention; bien ' plus, un procès-verbal d'in­
formation « constate le pillage et l'emport de titres fait en
« la maison de Pratanras, le 3 octobre 1594. » (2).
On peut induire de l'expression maison que Pratanras
. était à la fin du XVIe sièle un manoir non fortifié.
Ge genre de construction n'était pas à cette époque aussi
rare qu'on se l'imagine; et souvent des demeures seigneu­
même des plus opulentes, étaient sans défense (3).
riales,
Telle était par exemple la maison de Mezarnou (près de

Plounéventer), maison'riche s'il en fût! Le chanoine Moreau
nous apprend, en effet, que.., dans cette même année 1594,
le capitaine du · Liscoët put, par une indigne félonie, en
enlever pour 70,000 écus de meubles et de vaisselle d'or et
d'argent, et encore « ne put-il tout emporter 1 » (4)
(1) Aveux, notamment de 1751.
(2) Sentence.
(3) Sans être absolument ouvertes comme les maisons de campagne
de nos jours; mais entourées de murs de cours et jardins, percés

quelquefois de meurtrières. . .

(4) Chanoine Moreau, p. 246, 247. Edition de M. Le Bdstard ùe .
« riche maison
Mesmeur, 1836. L'historien emploie aussi l'expression

« de Mezarnou. li
Voir à ce propos Etu:les historiques sur le Finistère, par M~ Le Men~

Il est permis de croire que le chàteau de Pratanras pillé
en 1594 était le même qui subsistait à la fin du dernier
siècle. Du moins un état descriptif deessé \'ers 1771 ne
dément- il pas cette supposition. (1). On y lit:
« Le manoir de Pratanraz, situé à demie-lieue de
« Quimper (2), peès le grand chemin de Pont- Croix, con-
« siste da,ris un geandcorps de logis en pierres de taille
« contenant nombre de beaux appartements, 6, deux
« étages outre l'embas (sic). L'escalier qui sert- les en
« hau ts (sic). est aussi en pierres 'de taille et fort grand. Il
« est pratiqué dans une geosse tour hexagon'e accolée au
« milieu du bàtiment sur la cour. La principale façade est
« du côté du jardin, lequel forme une bannière ou carré
« long entouré de murs de toutes parts. .
« La cour vast~ et quarrée contient différents bâtiments
« couverts d'ardoises, dont une chapelle un peu caduque.
« Sorti par une grande porte cochère ,en tailles qui fait.
« l'entrée de la cour, on trouve en face un joli bosquet en
« décoration et quelques bois de haute futaye avec des
« entours agréables: Il y a aussi un colombier. »
. Héla$! ce n'était pas seulement la chapelle qui était un peu
caduque. Cette description est faite assurément en vue de la

vente , déjà projetée et qui allait se faire quelques années
'plus tard ... C'est l'art du peintre qui fait le portrait d'une
femme encore belle mais déjà sur le retour, de rajeunir son .
modèle tout en respectant la ressemblance. L'auteur de la

description de Pratanras a fait ainsi. La vérité est que, en
1771, le vieux château était absolument délabré; et cet

p. 1M. Le pillage de Mezarnou eut lieu le 1 août 1594. M. Le Men
donne Je curieux in'Ventair6 des objets volés, et HIes évalue à près de
'f. 500,000 fI'. de notre monnaie.

(1) Cet état ne porte pas de date, mais il se réfère à des baux de
1762, comme aux baux ayan~ cours. Les baux étant de neuf ans, la
date de t'état se place entre 1762 et 1771.
Aujourd'hui 4 kil. 500 m. par la route nOtlvclle.

etat est reconnu par le seigneur lui-même dans le ba]l
général de .1779 (1). On y lit cette clause significative:
« Demeurant loisible aux dits seigneurs d'entretenir ce qui .

« reste du 'château de Pratl',tnras" ou de le larisser tomber,

« s'ils jugent a propos, sans aucune indemnité, à la charge
« toutefois, d'entretenir le logement du métayer. »
Cependan t le château trompa l'attente du seigneur. C'est
en 1850 seulement qu'a la suite d'un incendie, les étages
supérieurs ont été démolis; et une partie du rez-de-chaussée
sert encore de demeure au fermier (2).
Aujourd'hui encore l'exactitude, de la description de .

1771 peut se vérifier sui' les lieux .
Lechâteau était construit un peu en arriére et à quarante

mètees a droite du château moderne. Il était fornié de

deux corps de logis se r2:1 ~::'1trant en équeJ're au coin sud­
ouest de la cou!', aspectés par eonséque11t l'un au nord,
l'autre a l'est. Dans l'angle s'élevait la tour hexagone sur­

montantles toits. Elle subsiste encore jusq u'à la hauteur du
premier étage avec un parement de mm' de chaque côté. A
droite et à gauche de la tou~', se voient les portes ogivales,
aujourd'hui murées, qui donnaient accès de la cour au rez-
. de-chaussée de chacun des corps de logis. Un des bâti-
ments 'qui entouraient la cour subsiste a la .suite de la façade

ouest; c'était et c'est une écurie; en face se voit une che-
minée, dernier débris d'un bàtiment fermant en partie la

cour du côté de -l'est; enfin, du côté du nord, la pOl'te
cochè/oe en tailles donne encore ?-ccès a une futaie. Le

périmètre de la cour qui a 40 mètres de large sur 50 environ
de long, n'a pas changé; celui du jardin a été modifié:

(1) Bail du 16 décembre 1779. Arch. dép.

(2) Un procès-verbal d'expertise de t806, ùressé par les sieurs Fran­
cois Chauvel, Baron-Boisjaifrav et Charles Pil'iou, dOl)ne au château
23 mètres et clemi de lougueu"1' snr 6 mètres et demi de lal'gf. Comme
terme de comparaison, le chùteau actuel a '25 niètl'es de longuellL' sur
f f mèh'cs et demi de large.
BULLETIN DE LA Soc. ARCHÉOL. DU FINISTÈRE. . TOl\Œ IX. :18

d'après la descl'iption, il occupait pll13 de place que le
jardin potager actuel. .
reste aucune trace de la chapelle qui tombant en
Il ne
ruines en 17't1 fut abattue et ~emplacée en 1784:, par la

chapelle actuelle située aupéès du château .moderne. Le
se voit dans le parc à peu de distance de l'allée
colombier

principale. .
On peut assigner approximativement au château de
Pratanras au moins deux siècles et demi ou trois siècles

d'existence avant 1771, et en rapporter la construction à

la seconde moitié du XVe siècle .

Cette date est suffisamment indiquée par « la tour

« hexagône accolée au milieu du bâtiment sur la cour » et

renfermant le grand escalier. Interrogez M, de Caumont,
répondra que, « dans les hôtels et les manoirs cons­
il vous
« truits en pierrés au XVe siècle et au commencement
« du XVIe, l'escalier se. plaçait très-fréquemment dans une

« tourelle formant saillie sur la façade de l'édifice» et que
« ·cette tourelle était a pans coupés.» . .

Visitez le palais épiscopal de Quimper, vous verrez la

t.rès-èlégante tour à pans cou-pés et renfermant l'escalier,
bâtie comme celle de Pratanras. à l'angle formé par les
deux corps de logis. C~tte tourelle est le dernier reste du

palais élevé p~r Claude de Rohan ; et la date de sa
construction se place d'une manière certaine entre 1507

Un dernier indice qu'il n'est pas permis d'omettre: la
chapelle actuelle a été construite en 1784 (2). Cependant
on voit au-dessus de sa porte une pierre aux armes des

(1) M. Le Men, Monog. de la cathédrale de Quimper, p. 228 •
La tour de Pratanrai est certainement de la même époque: le reste

du château avec ses portes. ogival~s pouvait être plus ancien .
(2) Elle a été consacrée, le f4 septembre f 784. Registres des baptêmes
. et mariages de Benhars pour 1784. . .

Lezongar « d'azur a la croix d'or» (1) seigneurs de Pra-
tanras du commencement du XVe siècle à la fin du XVIe. '

Nul doute que cette pierre n'ait été empruntée a l'ancienne
chapelle contemporaine du chàteau, et conservée par le
dernier seigneur en souvenir de ses prédècesseurs.
La visite des lieux faite, asseyons-nous sous l'ombre de
ces beaux hêtres que le dernier seigneur planta ên flvenue
droite,)1 y a cent ans, et que !'al't d'un habile paysagiste
a su faire entrer clans le dessin de ses allées cou'rbes . '

III.
ee chàteau de Pratanras a eu la mauvaise
fortune de
n'être plus habité par, ses , seigneurs depuis
la fin du

XVIe siècle. '
, En 1575, la dame de Coatfao et Pratanras, devenue veùve,

revint habiter le berceau de sa famitle, et y resta jusqu'à sa
mort, en 1587 (2). '
Aprés elle, le château fLü louè à un métayer.
Le petit fils de la dame de Pratanras, sénéchal de Quim­
per, y fit passagèrement sa résidence ' quelques années;
mais il devint conseiller au pal'lement en 1634. A partir
de cette époque, Pratanras n'eut plus qu'une fois l'honneur
d'ètre la résidence de scinseigneur.
Une seule cause suffirait à expliquer cet abandon. C'est
que de 1638 à i714, de 1131 à 17ô5, les seigneurs de Pra-
tan ras furent en mème temps seigneurs d!3 Bienassi;; (pa-
roisse d'Erquy, diocèse de Saint-Brieuc). Cetfe 'réunion
(1) Nobiliaire de M. Polde Courcy. Alias à dextre d'une flCUl' tle
lys lie même. La pierre de la. clnpelle ne porte que la croix.
autrefois une tête de cygne pOUl' cimiel' (M, d,~ Cour-
, L'écusson avait
Itinéraire dé Nantes à Brest. 1865), Dûpuis, la têtc de cygne a
été brisée, je D'ai pu savoir pal' quel acciùcnt.
(2) Aveu dc 1573 (Sentence).
Baux de 1575 et 1584.

Minu de 1587 (Sentence).

devait porter malheur il Pratanl'as. Il fallait choisir entre
deux résidences si loin l'une de l'autre aux derniers siècles,

et les seigneurs donnèrent la préférence a Bienassis.·
Jamais. château ne mérita mieux son nom. Cette belle
demeure est bâtie à une demi-lieue de la mer dans une situa­
tionélevée, mais dans un pli de terrain qui l'abrite des vents
du nord, sans lui interdire une vue admirable vers l'est.
/ Avec ses larges fossés d'eaux vives, sa vaste esplanade,

ses nobles avenues dont les beaux arbres dominent la· baie
de Saint-Brieuc, Bienassis était digne de captiver et de re-
tenir ses:heureux possesseurs. Ils en firent leur résidence ha­
bituelle; ils se plurent à l'embellir et ils en prirent le n'omo
. Bienassis était du reste le chef-lieu d'une terre qui com-
prenait trente-et-une métairies et treize moulins et qui
rapportait beaucoup plus que Coatfao et P.ratanras (1).
En 1714, un partage sépara Bienassis de Pratanras. La
première de ces seigneufies resta à l'aî.né; l'autre échut à
sa sœur puînée. La dame de Pratanras fit pour Un temps
sa résidence dans ce manoir (2) ; mais, peu après, elle de­
meurait dans la paroisse de Pont-l'Abbé-Plobannalec, où
elle mourut, en 1734 (3). Elle ne laissa: pas d'enfants et ses
biens furent partagés entre ses collatéraux. Coatfao et
Pratanras firent retour il la branche aînée représentée par
une fille de quatre ans.
La mère de cette enfant était devenue étrangère il la
Bretagne en épousant, en 1727, un seigneur qui possédait
de grands biens en Allemagne ef un haut grade militaire
en France, et qui vivait dans ses domaines des bords du

(f) Le Président Hahasque (Notions historique.ç sur le littoral des
Côtes-du-Nord, tome III, page f 03) élèvB à 80,000 francs le revenu de
Bieuassis .... (,'est beaucoup! même en y eomprenant les deux sei­
gneuries voisines appartenant au seigneUl' de Bienassis. Il faut sans
doute lire 8,000 livres.
- (2) Bail du 7 mal f 722. Arch. dép.
(3) Aveu du f7 mai 1730. Arch. dép. Aveu du. 27 novembre i7!51. Id •

Rhin, à Pm'is (:3) ou a l'arméè. Elle mourut. en 1731, et sa
fille unique élevée loin de la Bretagne devait épouser a son
tour un prince allemand. , '

, Le grand seigneur mi-padie allemand, nii-partie français,
s'ernpressa de donner la ferme o·énérale des deux fi.efs y

compris le château de Pratanras au receveur de sés domai-
nes, Me René-Corentin Hervieux conseiller honoraire

au Présidial (2). Celui-ci usa de la faculté de ' sous-louer
que lui concédait le bail, sans mème stipuler que le château

serait habité bourgeo{sement, comme nous dirions aujour­
d'hui; et le vieux manoir, sous-loué avec la métairie voi­
sine, -devint la demeure du métayer. Les fermiers généraux
qui ~e succédérent sous-louèeent dans les mêmes con di-

tions (3).

Le château de Coatfao ruiné depuis des siécles et tenu à
domaine èongéable, le château de Pratanras abandonné,
menacé de ruine et offrant à peine un abri suffisant au
métayer, payaient ainsi }'honneu.r d'avoir eu pour maîtres
de trop riches seigneul's !

Pendant que Coatfao passait de la m'aison du Ponthou a
la bal'Onnie de Rostrenen, puis a celle du Pont, Pratanras,

dès le commencement du XVe siècle, appartenait a la famille
de Lezongar (4),

(1) En son hôtel, rue du Parcq Royal (par. St-Gervais). Bail du 21

JUllvil'l' 1744. Arch. dép. ,

(2) Bail ùu 21 janVl,er 1744 fait pll.r-devant les nota,ire~, cons~illers
du Hoi, a Paris. Le pl'iX est de 3.000 fI'. seulement; walS Il est dit que
Me Hel'vièux, comme receveur, « ne pourra exiger autre chose que . ses
débolil'sés. » .
voyages et
m Les derniers baux sont de 1770 et 1779. Arch. dép. Le dernier
bail est donné, pOUl' 5 0.00 livres à la. dame Marthe Digautret, veuve
Gogibus de Ménimande, demeurant à Guingamp, qui ' sous-loue le
château et la ferme pOUl' 600 livres.
(4) Ou Lesongal', selon l'ol'thlJgmphe de beaucoup de lilres.

Le berceau de cette famille était dans la commune d'Es-

quibien, prés de l'anse de Saint-Evet, au couchant du
mqle d'Audierne et à deux kilométres de cette ville. Il .
- ne 'reste du manoir de Lezongar que quelques vestiges (1) .
Eu 1735" il était déjà en ruines; mais une description faite
. à cette époque permet d'en apprécier l'importance: elle

signale « un enclos comprenant de vastes cours et jardins'
« bois de hautes futaies, colombier, entouré d'un mur en
« pierres de taille et fianq ué de forteresses (s le) à ses
« angles. » (2)

Lezongar relevait prochainement du duc et
Le fief de
plus tard du roi; il comprenait une cinquantaine de do­
maines dans les paroisses de Esquibien, Cléden, Goulien,
Beuzec-Cap-Sizun, et un grand nombre de cheffrentes sur

des villages des mêmes .paroisses . .
La maison de Lezongar était ancienne : une de ses
branches possédait les seigneuries de Lézongar et de Les­

tiala (par. de Plomeur). Elle avait haute justice à Beuzec­
Cap-CavaI" aujourd'hui Plomeur (3); l'autre branche pos-

séda les seigneuries de Pratanras et du Hilguy ou Hilliguit
Plogastel-Saint-Germain). .
(par. de
En 1418 et 142~, Pratanras avait pour seig~eur Rolland
de ~ezongar, chanoine de Cornouailles (4) .

Les Lezo'ngar s'alliaient aux plus nobles familles: c'est

(1) Carte de l'état-major. C'est aujourd'hui l'hahitation d'un cultiva-
teur qui en est propriétaire, .
(2) Titre descri.p.tif du27 octohre f 7.~~ (Ço.!l!m. par M. Durest-Lebris,
notaire à Pont-Croix.) ·
(3) Voir sur Beuzec-Cap-Caval, juridiction roya.le et doyenné (sup­
primé en 1258). la notice dd M. Le Men sur Tronoën. Bull. de la Soc.
arch. 1877-78, p. 133 .
(4) Monog. Ile la cathéd, p. 19. Réform. des fouages de Penhars;
1426; On y lit: le Rolland de Lezongar noble, au manoir de Pratanras, y a
Il metayer. li , . .
Ce prénom de ,Rollalld .se transmettait de génération en génération, au
point que, dans les nombreux titœs que nOLIs avons étudiés, nous n'avons
'pas rencontré un autre prénom .

ainsi qu'entre 1440 et 1450, Rolland, probablement neveu du
chanoine, épousa Alix de Pratanros, petite-fiUe de Jean,

sire de Rosmadec, seigneur de Pont-Croix (1).
En 1481, Rolland de Lezongar, ]e jeune,. comparaît pour '
et son père, seigneur de Pratanras, à une montre de .
lui
Cornou:1illes tenue à Carhaix (2). .
Peu après, Pratanras fut le théâtre d'un évènerrient
tragiqu~ que les historiens ne mentionnent pas, mais dont
~an .oine Moreau, une poésie populaire recueillie par

M. de la Villemarqué (3), .des documents contemporains
découverts par M. de la Borderie (4) et une tradition encore

vivante nous ont gardé le souvenir. .

Le chanoine copiant un manuscrit probablement difficile
à lire ne sait à quelle date rapporter cet évènement, et il
hésite entre 1430 et 1489. La date vraie a été révélée par
M . . de la Borderie: c'est 1490 .

(1) Jean de RŒmadec épouse AI·ix de Tyvaden , dont:
Ell'onore de Rosmadec, mariée el1' 1420, à niou le Saulx,. seigneur de
Pratamos, dont. : .
Alix, femme ùe nolldnd de Lezongar .
(HenseiglJements foumis par M. DUI'cst-Lcbris).
On li 1 d ans la Béformation des fouages de Penbars, f426 « Bion le
Saulx, Iloble homme. au manoir de Pratanros. II .
En f462, Alain de Lézongar étaiL sergent féodé du duc et fit k SCI'­
vice Cil persollne aux Etats généraux tenus par François Il à Vannes.
(Voir Dom Moriee ; . Preuves, tome l, page 3.) Allain n'était pas
seigneUl' de Pratanras.
(2) Le père pouvait être Rolland marié à Alix rie Pratanros.
(3) Voir dans le B:tI'zaz-Bl'Ciz: Les. jeunes hommes de Plouyé.
(4) Ces deux iwporlants documents sont:

1° Un compte du miseur ou (comme nous dirions aujourd'bui) du
municipal de Quimper, Jehan Le Baud, de 1493. M. Le Bastard
re('evour
Mesmcur Pa publié en partie dans la seconde édition de l'Histoire de

la Ligue en Bretagne. (Sai nt-Brieuc, Prud homme, 1857. Appenû ICC,
page 395 et suiv.)
2° Uu extrait des registt'es ùe la Chancellerie de Bretagne, du 29 no­
1490, non encore imprimé.
vemhre
ces textes, le ré(:it du chanoine est à compléter et à rectifier
D'après
.... Je ne puis insister ici; mais celte épisode de
sur quelques points
l'hi~loire de Quimper vaut qu'on s'y arrête et peut-êfre y reviendrai-je

ul1jour. .' .

« Il y eut, dit Moreau, nn gl>and soulèvement en cet
« évèché de la populace(l) contre la noblesse et les commu_
« .nautés des villes, qui (la populace) ayant publiquement
« et à guerte ouveL'te pris les armes, ' coururent les villes,
« bourgades et maisons nobles » tuant, pillan t et brûlant.
Le mouvement partit, selon cet historien, des environs
du Huelgoat et de Carhaix; mais (ce qu'il ne dit pas) il se

propagea dans seize p3,roisses .au nombre desquelles Plo-
modiel'l1, Saint-Nic, Plonévez-Porzay (2), Les bandes, sous
la conduite de trois frères de Plouyé, ne trouvèrent devant

elles aucune résistance; ' de proche en proche elles arri-
vèrent devant Quimper, où elles entrèrent « le pénultième
.« jour de juillet. » . .
. Fût-ce « par assaut ou composition? » Lé chanoine
n'en sait rien; maisM. de la Borderie, mieux ii1struit que
lui, nous apprend que les insurgés donnèrent l'assaut à
. cette partie des murs qui borde le j.ardin d'ù collège (3),
« Ils n'èpargnèrent pas le sang des habitants, » dit Mo­
l'eau; « ils' ruinèrent un bon petit nombre de .maisons, 1)
d'après la ballade, et surtout ils firent dans la ville « grande
« pillerie. »(4) .

Mais la noblesse et les bourgeois se remirent vÎte de la
première surprise, ils s'assemblèrent en hâte et appeIèl'en t
un secours dont le chanoine ne parle pas, .un détachement
de soldats anglais. L'année précédente, la duchesse Anne,

pour résister a l'invasion française et à la tyrannie de son
(f) L'historien de Quimper a de cruels dédains pour les insurgés,
qu'il Ilomme tantôt la paysan taille , tantôt la commune; en attachant
sans doute à ce dernier mot la . même répl'Obatioll que Gnibert de No­
gent (nomen pessimum, nom détestable). -- Cité pal' Aug. Thiel'l'y.
. Lettres sur J'histoire de France, XIV.
(2) Extrait ùes registres de la Cha ne. de Bretagnc.

(3) Compte du rniseUl' : il demande « raison de ce .que lui a coùté
« refaire partie des avant murs Ju pan de mur allan.l de la petite
(( porte à la porte. Bizien quels furcnt abat us par la commune à leur

« entrée ct prinse de eette ville (en i490). »
(4) Extrait des registres de la Cha ne. de Bretagne. .

tuteur q Ul voulait la marier contre son gr8, avait obtenu
du l'oi d'Angleterre, Henri VII, une petite armée. Un déta­
chement anglais avait même assiégé ' Concarneau (1). Au
premier appel, les Anglais vinrent camper à Creac'heu­
sen (2), SUl' l'emplacement de l'hospice actuel.
Effrayés de ces préparatifs, et se voyant coupés de leur
route, les insurgés évacuérent la ville, après quatre jours,

et prirent le chemin de Pont-Croix. Arrivés à Pratanras,
ils fir'ent haltè. La marche en avant était pour eux pleine
de dangers: elle les éloignait de leurs foyers et les rap-

pt'ochait de la mer, ou ils pouvaient être acculés. Mieux
valait « risquer le paquet» à Pratanras, ou les bois et les
hauts talus étaient un obstacle aux · charges de la cava-
lerie.
Les montagnards firent tète et soutinrent vaillamment
le choc; mais que pouvaient leurs fourches et leurs bâtons
eo'ntr-e les nobles et les Anglais armés en guerre ~ (3) •
Leurs bandes furent rompues. Puis «( s'étant ralliés en un

(c grand pré près de la Bouexière, sur le grand chemin de 0

cc Pont (l'Abbé) ils firent ferme de reehef; et ils furent de
cc nouveau défaits, » mais» cette fois, sans grande ,résis­

cc tanc.e. Il en fut tant tué en ce pré que le nom de Prat
cc mill goil, c'est à dire (pré des mille ventres) lui · est

(c demeuré jusqu'à ce jour » (4). ,

Ce lieu funeste garde encore ce nom et' le souvenir du
massacre est toujours vivant.. Pour les habitants des cam­

pagnes voisines, les eaux rouillées du ruisseau doivent lenr

(1) Dom Lobineau, livre 21 (an 1489).
(2) Note publiée int' M. de Mesmeut', voit" ei·dcss:,lS, p. 283, note 4.
(3) Compte d" miseur: c( La somme de 87 livres pour une pipe de
cc vin pOli l' envoyer aux Ang!ais et autres gens de guerre, queulx
ce étaient allés il .la jo~rnée de Pratanraz où la Commune était assem-o
« blée. ))

(4) Chauoine ~1oreau, p. 19 et suiy.

. couleur au sang qui les rougit, il y a quatre siècles ' (1).
Toutefois, beaucoup s'échappèrent; un mois après le
massacre, les bandes se eefoemaient à Châteauneuf-du­
Faou (2) et le capitaine de , Quimper partait avec la no-
blesse et les Anglais pour les dissiper. Les seigneurs du
Hilguy et de Pr~taneas figurent dans l'assemblée des no­
bles et bourgeois de Quimper, qui fut 'tenue, à ce sujet, le 7
" septembre (3).

En 1526, Pratanras appartenait a Rolland de Lezongar, .
qui, le 15 mars de cette année, ratifie avec Raoul du Juch,
~eigneur de Pratanroux, « certain contract au profit des
. « chanoines et chapitre de Cornouailles pour différente~
« rentes. » (4)

En 1536, le seigneur de était Rolland de

(1) Le ruisseau ùe l'Eau rouge (Dour du) qui traverse la route de

- Pont-l'Abbé, à 5 kitomètres de Quimper .
Les prairies auxquelles se donne le nom de milgoff, sont celles à
droite, que coupe' le ruisseau descendant vel'S la route,

(2) Moreau n'en parle pas. . . .
(3) On délibère d'tnvoyer « Ulle pipc de vin blanc il Châteauneuf du
« Fou, au capitai:le de l\:imper, aLlX nobles, Anglai,ç et autres gens d'a1'­
« mes qui étaient allés au dit lieu pO lir defaire et r,)mpre la mélsse et
« assemblée que la commuue f lÏ~ait au dit Iiell» ço:npte du mi&eur.
(4) Note mise anciennement au dos de l'acte aujourd'bui presque CffdCé.
A l'ch. dép. .'
(5) Réformation des fouages de Cornouailles, f536. - Monogr. de la
cathédrale de Quimpe,', p, i OL
(6) Aveu du 20 mai 1539. Arch. dép .
(7) P ralan ras étant fief de jl.l,ritliction, les a veux les concernant
« devaient être. baillés pat' le nouveau possesscur dedans l'an à comp­
« ter du jour qu'il ét.ait venu en tlouvélle possession. »
Art. 360 de la coutume.

C'est quelques années plus tard qu'allait avoir lieu l'an- ,
·nexion de Coatfao à Pratanras.

III. LES SEIGNEURS DE PRATANRAS ET DE COATFAO.

- Maison de Lezongar.
L'acte qui a produit l'annexion des deux fiefs n'existe .' .'.
plus aux archives; mais on lit dans l'Inventaire de 1641 : .. ... •

« Le seigneur avouant ... pour justifier de ... commu­
« nique contrat d'acquêt avec actes d'appropriement sans
« opposition dabtés des 6, 13 aO,ust, 22 et 27 septembre

D'autre part, la Sentence de 1683 mentionne plusieurs

fois « le contrat d'acquêt de la terre de Coatfao du 6 août

Enfin ce t acte est rappelé dans un acte de vente du

25 juin 1568 (1).
Les notes sommaires de l'Itwentaire et de la Sentence
n'indiquent pas les noms des parties; l'acte de 1568 est plus
explicite: il nous apprend 'que le vendeur était le baron de
. · lfIJl · •
Pont, le même que nous avons vu comparaître à la réfor-
mation des fouages de 1536, comme seigneur de Coatfao.­

L'arrêt de la Cour des Comptes de 1611 nous fournit l'in­
dication de son nom: c'était Jean du Quélenec, le même
dont il est question plus haut (2) et qui est ainsi désigné
au procès-verbal de la réformation Je la Coutume en 1539 :
, « haut et puissant Jean de Quélenec) bai'on du Pont, V1- ,

comte du Fou, seigneur de Rostrenen. »

L'acte de 1568 nous apprend de plu.s que l'acquéreur était
Rolland de LézoDgar) aïeul du Rolland de Lezongar, ven­
deur actuel.

(:1) 25 juin 1568. Al'i~h. dép.

(2) Page 273.

L\ntermédiaire entre ces deux seigneurs de Prataùras,
fils du premier et père de l'autre) porta le même prénom ,'
. de Rolland. C'est lui qui comparut « comme lieuténant du

capitaine » à la m a:1 t 1'e de Cornouailles tenue le 26 avril
1554 (1) ; et qui, le 2 octobre de la même année, prenait
arrêt du Parlement (2). Le seigneur de Pratanras ne com-

paraît pas à la montre tenue à Quimper les 15 et 16 mai

l'année 1559 ou
Il est probable qu'il était mort dans
1560) puisque aveu a été rendu au Roi, le 15 novembre
1560, pour Coatfao et Pratanras (3) .
Quoiqu'il en soit) sa veuve) Claude du Juch) était rema-
riée, en 1564. '

Ce n)était plus une très-jeune femme) puisque sdn fils
Rolland était maj eur de vingt et ,un ans avant cette an-
née (4). Cependant elle se laissa éblouir par la beautè d'un
seigneur qui avait) dit-on, charmé la reine Catherine de
Médicis. C'était Troïlus de lVIesgoucz ou Mèscoues (5), sei- ,
gneur de la Roche-Héligomarch (paroisse de Saint-Thois),
page de la reine en 1550) et) depuis) gentilhomme de la
cham bre du roi .

Claude du Juch l'épousa et lui fit don de la terre de Lis-
cuis (paroisse de Laniscat) (6).

(1) Manuscrit de Guy Autrel, s6igneur de M.issirien et Lezergué
320 (éommuniQué par M. Saulnier).
folio

(2) Renseignement fourni par M. Saulnier.

(3) Sentence. Voir Ilote 7, page 286
(4) Acte du 24 mars 1566. Cité plus bas.
(5) EcritTroyJJus .

.(6) On écrit aujourd'hui Liscuit. Les époux habitaient en 1566, le
manOIl' de Llscuit, silué SUI' une colline abrupte, cn face de l'ancie'lne
de Bon-Repos, au bord du Blavet. C'est un li en d'une beauté
3bbayc
àp re et sauvage .. QL 10IlC résidence pour le brill-allt" compagnon des La .
Mole et des Pardaillan !
Troïlus ne séjourna pas longtemp" 11 Liscuit. Eu i 568, il é.tait gouvel'­
[lelll' de Morlaix 11 présida la noblesse aux Etats de Bretagne, en 1574.
Le procè.s-verhal de la rérol'lnatiotl de la COl!turne en 1580,,1ui donne

Son mal'i ne fut pas seul honoré des largesses de la
dame de Pratanras. Elle 8 vait donné cl'ëwtJoes immeubles à .
Christophe du Mas, seigneur du Brossay (paroisse de Saint­
Gravé) et peut-~tI7e à Claude, seigneur de Kerlech; ~t en
outre vendu la terre de Trohéïr (pl'ès de Quimper), à
messire François Moreau .
Léwngar, son fils aîné « et héritier présomp­
Rolland de
« tif et att~ndmlt», s'émut des prodigalités de sa mère et
poursuivit son interdiction, en même temps qu'il pouHsui-
. vait l'an.nulation des donations et ventes par elle faites .
Il semble que les actes de la dame du Juch ou les ins-
tances judiciaires rau~-quelles ils donnaient lieu aient pro­
duit un sc~ndale. En décembre 1564, « le baron d~
« Tyvarlen, le seigneur de Kersimon (1) et plusieurs
« autres séigneurs.» se réunirent au Faou. Rolland de Lé-

zongar comparut devant eux, en même temps que Troïlus
de Mesgouez .et le seigneur de Kerlech . Là il fut convenu
que la 'dame du Juch considérerait comme définitif l'arrêt
d'interdiction provisoirement rendu (2) ; qu'elle ne pourrait
ni donner, ni 'Vendre, ni· cc réduire sa rente » et que les .
donations et transports faits seraient réputés nuls, son

mari conservant seulement l'usufruit de Liscuis, sa vie

durant.

Ces conventions furent authentiquées, le 24 niars .1566,
tin
« par les notaires de la court de Quimper » devant les­
quels furent présents Troïlus « pour luyet la dame du

les titres de marquis de Coë.tremoël. baron cL; la Joüeuse (Joyeuse) Gal'de,
de l'ol'dre du roi, gentilhomme ordinaire de sa chambre, Plus •
chèvalièr
tard, Troïlus eut letitre de vice·l'oideTet'l'e-Neu-ve. En llS97,il étaitgon­
de Saint-Lô et Carentan, Il est mort en 1606. Claude du Juch
vel'lleur
était morte depuis longtemps ct Troïlus s'était remarié. .
de la refnrmation. Armorial de M. Pol de Courcy.
Voir procès-verbal
(1) Sans donte Guillaume du Chastel, seignem de Kel'simOll, capitaine
de Bl'est, qui obligea les Anglais et Flamands à se rembarquer après la
le sac du Conquet, en 1558.
prise et
(2) Il faut sans doute entendre par ces mots arrêt rendu 'par défaut.

« Juch, Claude de Kerlech, pour luy et Christophe du Mas, »)
enfin ' Rolland de Lezongar. C'est a l'acte qui fut dressé
sous forme de transaction que j'emprunte les détails qui
précèdent (1).
On pourrait croire que Rolland de Lézongar, sévère' pour
les prodigalités de sa mère ... aurait su ménager ses biens·
Il n'en fut rien. Avant 1566, il avait vendu une partie de sa

terre de La Forest (2) ; le 24 octobre .1567, il vendait plu-
sieocs domaines dépendant de Coatfao, a Messire Pierre

Vouët (3) ; enfin, le 25 juin 1568, il vendait le fiefde Coaifao
avec ses prééminences, sa iustice et tous ses droits a Mes-

sire Christophe de Kerbiriou, seigneur de Kerdélen, demeu-
rant au château de -Tresaol (par. de Plonévez-Porzay).
Cette vente était faite « pour la' somme et le prix de traeze

« (treize) cent-soixante livres monnoye. » (4). Ce n'él.ait
pas cher ... ; mais le prix était payé comptant! (5)
. Il est vrai .que le vendeur se réservait l'espérance: il
avait inseré dans les deux actes une clause de réméré.

Cette précaution ne lui fut pas inutile: nous voyons, en

effet, par une note, mise au dos de l'acte de 1567 que le
retrait fut exercé par le sieur de Pratanras, au dernier jour

(1) Acte du 24 mars i1566. Arch. dép- .

Cet acte très long contient d'autl'es dispositlOlls : .Ainsi Rolland
Lézongar cède à Troïlus de Mesgouez la terre de la Forest dont il avait
une partie que Troïlus avait rachetée, et il reçoit en échange
vendu
)) la maison du Scouédoll, autrement la maison de PratalJl'oux. a "ec ses
(( jardins, cour, issues et apr>al·tenatlce~, située sur la pl;J.ce du Tour du
(( Chastel, en la ville de Quimpel'tin, et un fOUI', une maison et un petit
ft pal'cq iliec près situé en la rue Saint-Marc ès faubour'g dudict
tin
(( Quimper .... ))
(2) Voir la note précédente.
(3) Arc,h. dép. - .
(4) Ar(h. dép. Quaud on étudie de vieux titl·es. il est prudent de
ne pas se fier aux résumés mis après eoup aux marges ou aux dos des
actes. On lit en marge de l'aete de 11568: Vente .. de Coatfao par. Ch . . de
Kerbiriou à Rolland de Lezongar. L'acte constate tont le contraIre ..
(15) Serait-ce pour bâtir Pratanras ou au moins pour l'emhellir que
Rolland de Lézongar était ('ontraint de vendre ses immeubles? La tour
de Pratanras est de cette époque, comme nous l'avons vu.

du terme fixé, 24 octobre 1568. La note ne se rapporte

qu'aux domaines distraits de Coatfao pal' la vente de 1;)67 ;
mais il semble certain que le retrait fut aussi exercé
pour le fief de Coatfao. .
En effet, en 1573-, Jeanne de Lezongar « propriétaire de
Coatfao et Pratanras » rendait aveu au roi (1). Nous n'a­
vons pas cet aveu, que résume brièvement la sentence de
1683; mais on peut inféree de ce résumé que Jeanne ren­
clai t aveu pOUT' les deux fiefs. C'est donc qu'elle venait de
les acquérir en même temps, par succession probable­
ment (2), de Rolland dont elle était la sœur ou plus pro­
bablement la tante (3) .

Maison du Quélenec.
Jeanne de Lezongar, dan1e de Pratanras et Coatfao, ·du
I-Iilguy, du Riblé (paroisse de Plomodiern) de T1'égu­
nan, etc ... , était, en 1573-, veuve de Jean de Quélenec (4).
Ce seigneur descendait . d'une illustre famille qui portait

(1) Sentence. « Hommage et adv·eu rendu par PiélTe du· Quel1enec
« faisant pour Jeamle de Lczongal" douairière de Bien3ssis, et proprié­
« taire ·des dictes tel'l'es de Coatfao et Pratanras, sa mère, des 4 et
« 26 septembre 1573, publié au Présidial de Quirnpel', le 21 oct. au
(( dict an. Il .

(2) IL n'est fait nulle part mention d'acquêt ·par Jeanne de Lezongar.

(3) Jeanne de Lézongar avait, comme nous allons le voir, des enfants
majeurs de vingt et un ~ans en 1573 ; elle était mariée au moins ·depuis
1550 et avait dû naître au moins en 1535. Elle né pouvait être la fille de
Rolland, vendeur en 1568. Autrement ectte famille" aurait compté au
moins cinq générations dans ce siècle: _ .
1° Rolland, époux de Jeanne de Lanmoëlan (en le sllpposant le
même que Rolland le jeune de 1481), mort en 1539 ;

2° Rolland, acquéreur de Coatfao (1542); .

3° Rolland, époux de. Claude d tl Juch;
40 Rolland, leur fils, vendeur de Coatfao, en 1568 ,

5° Jeanne de Lézongar;

6° Les enfants de celle-ci.
(4) Dom Lobineau écrit Quelene(;,
chanoine Mortlau QueHennec,
M. Le Men Qllélenec.
J'ai suivi celte dernière orthographe.

cette huml:rle et noble devise. « En Dieu m'attends! » et qui
avait dopné un évèq,ue il, Vannes (1254), un amiral il, la

Bretagne (au XV siècle) (1), et un premier président il,
la Cour des Comptes (1536). '
Le berceau de la famille était le château du Quélenec
(paeoisse du Vieux-Bourg-Quintin, .trève de Saint- Gil-

das) (2). .
. La branche aînée posséda pecdant plusieurs siècles la
baronnie de Pont-l'Abbé et celle de Rostrenen : le
mariage de Jean du Quélenec, baron du Pont, avec Mar-
guerite de Rostrenen, réunit, comme nous l'avons vu', ces -
dt·mx fiefs dans les mèmes.mains (3). La branche cadette, il,
laquelle appartenait le mari de Jeanne de Lézongar, poss.é­
dait en Haute-Bretagne de vastes domaines.
Le plus important était la terre et le château de Bienas­
sis avec haute justice. Dès 1490, d'après Ogée (4) Bienassis
appartenait à Jacques du QUélenec, seigneur de Fougeray '
et, de la Vallée, qui le possédait encore en 1513 (5). .
En 15,35, Bienassis avait pour seigneur Jean du Quéle- '
nec, 'qualifié de seigneur de Fougeray et de la Vallée, et en
outre de seigneur de Saint-Quérec, terre qui confine il,
Bienassis.

Il semble que cen'est pas lui, mais son héritier de mème
nom, qui épousa Jeanne de Lezongar : du moins rien n'in-

(i) « Lequel eut là lascheté d'abandonner le parti de la duchesse
(( (Anne) pour embrasser ,celui du roi (Charles VlIr). " Lobineau livre 2f
. (an f489). '
(2) Le château ·ùu Qllélenee' était défendu par un éfang ct par des
douves lar!2:es et profondes. Il a 0té détmit pendnnt les. guerres de reli­
gion. Ses débris ont · servi de carrière aux habitants des vi Ilages voisins .
. Dans l'jntéril:'ur on voit encore une petite porte ayant fait partie d~llnc
chJpclle dédiée il Sainte-Barbe, et offrant les caractères du XVIe siècle.
-' Renseignements transmis par M. Audo, curé cl u Vieux-Bourg, me mbre
de la Société al'ehéologique des C6tes-ùu-Nord .'

(3) Voil' ci-dessus, p. 272. .
. (4) Ogée-,. Vo E.rquy,.
(5) Ancienne réformation de5 évêchés de Ql'etaglle, bil.Jliot.hèqlle, de

Rennes 2° volume, folio 451.

clique que les seigneuries de Fougel'ay et de la Vallée a.ient ·
été possédées p'ar les deux épou~; et il est ceetain qu'ils
ne les ont pas transmises a leUl's descendants .
mariage eut lieu, au plus tard au
Quoiquiil en soit, ce
milieu du siècle. Cette date est ,fixée par la date de l'aveu
rendu au roi, en 1573, par PIerre du Quélenec, « faisant
cc pour sa mère Jeanne Lezongar. » (1)
Pour rendre aveu au n~m de sa mère, Pierre devait avoir
la majorité féodale, 'c'est-a-dire cc la capacité de porter et
« recevoir la foi et hommage» (2) et l'àge de cette ma­
jorité était en Bretagne fixé a vingt ans (3). Pierre était
donc né au plus tard en 1552 ou 1553 ; et, a moins qu'il ne
mort peu après, il n'était pas le premier né des enfants
soit
de Jeanne de Lezongar. En effet, un arrèt du Padernent du
(4) mentionne comme l'a-tné un fils du nom
28 février 1605
Charles, qui mourut après sa mère. .
Après la mort de son mari, et au plus tard, en 1575,
Jeanne de Lezongar revint habiter Pratanras (5). C'est

la qu'elle mourut, le 29 novembre 1587, laissant des enfants
encore mineurs, sous la tutelle de Jean du QUé­
lenec (6).
Le tuteur était vraisemblabl-ementce Jean du Quélenec,

(1) Sentence. Aveu au roi de 1.681.
(2) Dellisart, va. Majorité, 1.8.

(3) Hévill. Consultation, 107,

(4) Recueilli par Jiel're Belordeau. COlltI'OV01'iiCS agilées en la Cour du
Parlement de Breta le (16i9, p. 224).
(5) Baux de 1575 et 1584 déjil eit(·~. .
(6 ) Senlwce. ' (C Minll fourny au Hoy pour les ligen'?cs du racllapt
« acqllÎs au Roy pal' le décès de la dicte ûame de U yn.'lssis ÙU ~9 .no-
C! ve 'l hre 1587, par .IeHll du QuelLme~, tuteur des clllan1s de la d'ctc

« mûre. » ,
« ' Lc Müw (art. 81 ct 360 de la, Coutume) est la déclarll.ti.Ql1, aveu et
\1 dénombrement. qu'un nouvel acq'Jéreld' doit bailler pal' le mentt à SOli
« scigneur, des hél'ita~es, l'entes ct devoirs qu'il il acquis ))
Fe l'1'ièl'e, au mot mintt.

BUI,UTlN DE LA Soc. ARCHf;OL. nu FI~JSTÈH1\. " TO~lR IX.

s.eigneur de Saint-Q uerec et dn Hilguy «( de. la maison de
Pratanras, qui fut gouverneur de Quimper, en 1592-, pen­
dant les guerres de la Ligue, « gentilhomme avise, prudent
« et capable même de plus grandes charges )), dit le cha-
noine Moreau. « Avec une garnison de quinze ou vingt
il eut l'art de « maintenir en bonne concorde les
hommes,
« habitants naturellement revèches (1) ». Ce vieux soldat
« eut même le talent de se comporter en sa charge avec le

« contentement des deux partis )) religieux et politiques
qui di visaient la ville (2). .
Sa sortie de charge fut pleine de dignité. Lorsque, le 9
Quimper fut assiégé par le duc cl' Aumont,
. octobre 1594,
« voyant la résolution prise de se rendre, le seigneur de
« Saint-Quéree prit conge des habitants, disant qu'illS pOU-
« vaient demeurer dans le parti nouveau; mais non pas lui,
« par ce qu'on le v()udrait obliger de prêcher le contraire
« de ce q n'il avait fait auparavant, lequel ne ferait jamais:
«. plutôt mourir de mille morts! (3) ».
Une heure après, .le maréchal le « manda à Locmaria où
cc il était logé au prieure. )) Le gouverneur s'y rendit et le
maréchal l'ayant réprimandé sur son attitude, le gouver­
neur répondit simplement cc qu'il n'avait fait que ce qu'il
devait (4).») . .
Le duc d'Aumont retint le seigneur de Saint-Quérec,
sans lui permettre de rentrer en ville; mais, par la capitu-
lation, il lui accorda de se retirer au Hilguy, le jour même.
et digne gouverneur de Quimper
Nul doute que le simple

(i) Page i6L

(2) Page 55.
(3) Page 2f9 .
(4) Page 230. . _
La simple et ferme attitude de Jean dû' Quélenee contraste singu·
avee la. condUite dl} sénéchal Guillaume Le Baud. dont la
lièrement
seule préoccupation (j'ai honte de Je dire) fut de conservel' sa place. Le
duc d'Aumont Je jugea jndign~ d'une faveur si chèrement payée et le
rem plaçll' .

« de la maison de Pra.tanra.s, seigneUL' de Saint-Quéreè et
du Hilguy » ne fùt fils de Jean du QUélenec ct de Jeanne
de Lézongar, puisqu'il possédait des biens de l'un et de
l'autre. Il était donc frére aîné de ses pupilles (1).
Quelques jours avant la capitulation de Quimper, le 3 oc­
tobre 1594, Pratanras avait été envahi et pIllé (2) peut-être
par un de ces « brigandeaux » qui se livraient au pillage
sous prétexte de guerre et souvent « sans distinction de
« parti » ,3), peut-êtl'e même par des troupes réguliéres.
Telle était en effet la discipline de ces al'mées formées d'a­
venturiers de tous' pays 1 Cette supposition est rendue pos-

sible par ce qui se passait en ce moment même à Quimper.
A la premiéresommation du duc d'Aumont (9 octobre
1594), la ville demande une capitulation. Pendant qu'on en
arrête les termes, on convient d'une suspension d'armes.
Mais le maréchal recommande aux Quimpérois « de faire
« bonne garde, notamment du côté OÛ sont cantonnés les

« Anglais, car, disai1-il, s'ils peuvent entrer par surprise,
« il sera impossible de les empêcher de piller, quand bien

« même il y aurait dix capitulations. »' (4)
Le 30 mai 1597, Pratanras allait recevoir une autre vi­
sit'e. Vers dix heures du matin, ce jour, La Fontenelle y
passa, se hâtant vers Quimper, pour s'en emparer d~ vive
force et réaliser ses folles ' et imprudentes bravades (5).

(1) Le chanoine le vieillit en l'appelant « ce vieux soldat. )J Jean du
Quélenec ne pouvait, en 1094, avoir guère plus de 44 ans.
-(2) Sentence. Proeès-verbal d'information déjà cité.
(3) Comm~ faisait aux environs de Guengat le sieur de Kerlan. Mo­
reau, pages 72-73.

(4) Chanoine Moreau, page 220.
(15) Fontenelle avait dit, peu ,.uparavant, il la onme du Guilguiflin :
(( Madame, Quimper est à moi ~ussi. birn que la r.obe que l'ous, r~)I'tt·z
(( est à VOliS, ct ne me tenez Jalllais POUl' honnele homme, SI .JÙ lié
Il VOliS en fais voir les effets plus tôt que v~us ~Ie pen~ez. ,li
C'est un avis transmis par la dame du Gllllgulffin qUl nul les Quim·
pél'ois sur leurs gardes. . -
(Chanoine Morean, r. 3tO et 31 t:.

Qll~lqlles hellI'es après, il revenait de Q.uimper « a\"cc sa

courte honte» et s'arrêtait à Pratanras pour 'y passer la

nuit et «soulager ses blessés », non pour y goûter le som-
meil, tant il craignait « de se voie attaqué par les habitants

de la ville. » Mais les prudents Quimpérois ne songeaient
pas à le poursuivre, trop heureux de l'avoir repoussé « sans
perte d'un seul homme. » (1) .
Le seigneur de Pratanras n'était pas en son manoir pour
recevoir ce dangereux visiteur puisque, comme ·nous l'avons
vu, le malwir était occupé par un métayer (2). Quel était
ce seigneur 1 ... Ce devait être Charles du' Quélenec.
Jaan du Quélenec et Jeanne de Lézongar avaient eu plu-
sieurs enfants. Nous avons mentionné:
1 Charles, nommé t aîné dans l'arrêt de 1605, soit qu'il
fût le premier né, soit qu'il fût devenu l'aîné par la mort de
Pierre. Charles s'était marié du vivant de sa mére et il

mourut avant 1605, laissant un fils qui,décéda peu après (3).
2° Pierre, majeur en 1573, et rendant aveu pour sa mère
veuve; on n'en trouve aucune autre trace. .

3') Jean, le gouvei>neur de Quimper, qui mourut avant
1605 et sans. laisser de postèrité) comrhe nou,s allons le

voir (4). .
4 Enfin les enfants mineurs en 1587.
Un seul de ces
enfants nous est connu: C'(3st une fille du nom de Fran-
çoise. Elle épousa en premières noces Christophe de
eut une fille mariée, en 1610, à Jacques)
Trèal, dont elle

(f) Chanoine MOl'e'lu, chap. XXXIX. Passim. .

(2) J'ai en SOliS les yeux uu acte 011 une note relatant uu hail de
la métairie et de partie du manoir de Pratanras fait en 1098, pour neuf
ans, et en renouvelle illent ù'un bail de même durée, pal' le seigne1lr dc
PrataOl'as. Je ne puis l'etrOI.VCI' ce document qui permet d'affirmer
la location de Pratanras de 1089 à f607. T:acte que j'ai Vil ne don­
nait pas le nom ÙU s0igneur de Pratanras.
(3) Arrêt cité plus haut, p. 293.
(4) Cela !:ésulte. de l'al'fêt ci-dessus.

baroll de Nevet (1). - - Ft'ünçoise était l'emal'iee Ù, cette
époque, comme nous allons le voiL', L'autre ou les autres
mineurs de 1587 étaient mods avant 1605, ainsi quJil' ré-
sulte implicitement de l'arrêt.
Jean du Quéleriec était, comme nous l'avons vu, seigneur
de Bienassis et Saint-Quél'ec, et Jeanne de LezonO'ar dame
de CJatf~o ' et Pratanras, du Rible, du Hilguy, de Tregu-
nan (2), etc, ComInent ces immeubles furent-ils partagés
entre leurs enfants "?
. Le chanoine Moreau nous apprend que Jean, le gouver­
neur de Quimper, fut seigneur de Saint-Quérec, qui venait
de son père, et du Hilguy, provenant de la succession de

sa mere,

C'était la l'ègle du partage noble que ( l'aînè, outre les
« deux tiers des biens, avait encore, pal' préciput, en suc­
(( cession de père et mère et en . chacune d'iéelIes, le châ­
« teau ou principal manoir, avec le pourpris faisant ]e

« jardin, colombier, bois de décorations. » (3) .
La succession de Jean du Quélenec s'était ouverte avant

1573, et Chal'les en avait recueilli Bienassis, principal
manoir. Sa mère était douairière de Bienassis et on peut
supposer q n'elle y rèsida, avec son fils, jusqu'à ce qu'elle

eùt hérité de Pratanras, entre 1573 et 1575, époque olà elle
revint habiter ce manoir.
Lorsqu'elle même décéda, en 1587, Charles dut recueillir

dans sa succession Pratanras, principal manoir, qu'il n'ha­
bita pas. Peut-être est-ce pOUl' cette raison que la tutelle
des enfants fut confiée par la famille, à Jean, qui habitait
au Bilguy ~ . /

A la mort de Charles, ses immeubles passèrent à son fils

(t) A l'ch. ù'llIe-et-Vilaine, fouds Rosnyvinen ùe Piré. (Communiea-
tion de M. Saulnier). -

(2) Je trouve en d'ault'es pièces l'réga·van.

(3) Article 545 de la Coutumé. .

unique, qui décéda en bas àge peu après son père; et nous
voyons par l'arrêt de 1605 que cet enfant ne laissa pour
héritiers que sa mère et sa tante ... du QUélenec, qui rècueil-
lit tous les immeubles (1). L'arrêt n'indique pas le prénom
de la tan.te paternelle, mais il ne saurai t'y avoir de doute
à cet égard, quand nous voyons Françoise du Quélenec
posséder et transmettre à ses enfants toutes les seigneuries
sans exeeption, dont Jean du Quélenec et Jeanne de Lezon­
gal' avaient pris les titres (2) .

III. - La Maison de Visdelou .

1 (l GILLES V ISDELOU .
Dans le voisinage de Bienassis et dans la paroisse de
Saint-Alban étaient deux seigneuries nommées La Gou­
blaye et l'Hostellerie Abraham (3). Elles appartenaient il la
fin du' XVIe siècle à GILLES VISDELOU, qui possédait en outre ...
non loin de la, la seigneurie du Colombier (par. de Hénon)
et qui est encore qualifié de seigneur d'El1ien (4). Albert
Le Grand donne à Gilles Visdelou le titre de lieutenant de
la compagnie des gens d'armes du marquis de Coetquen, et
de lieutenant du roi ~n la haute Bretagne (5).
La maison de Visdelou était d'ancienne extraction. Elle
(1) Pierre, le gouverneur de Quimper et les mineurs étaient donc.
• morts avant 1605, puisqu'ils n'héritaient pas avcc. leur sœur .
(2) Pour être complet sur .ce qui concerne les Quélcnec de Bicnussis
el leur descendance, Il faudrait fouiller les archIves de la paroisse
semblent assez complètes. Quand j'ai cherché à Plo­
d'Erquy, qui
gastel-Samt-Germain l'acte de det:ès du gouverneur de Quimper, j'ai
ancien regist re conservé. en cette commune est
appris que le plus
de17SS!
(3) Du [jllm de Marguerite Abraham, femme d'un ·Visdelou, capitairle
de Moncontou r. en t 5t 3 .
(4) D'RUien, du Dellien, ou même des Liens; jc' n'ai pli l'etrouver la
Il semble qu'elle était en haule Bretagne.
situation ùe ('ette seigneurie,
(5) Catalogue des évêques de Cornouailles. Vo Françoia Visdelou:

pmtait poue arme~ parlantes: cl' argent li t,'ois têtes (le
loup de sable w'l'achées et lampassées de gueu~es (1). Le
, premier connu du nom est Guillaume, seigneur du Pont à
i'Asne (par. de Plœuc), cwisé en 1248. Gilles était son
huitième descendant
Françoise du Quèlenec,dame de Bienassis et Saint-Quérec,
Coatfao et Pratanras lui donna sa main. A quelle époque
se fit le mariage ~ C'est ce que nous ne pouvons dire avec
certitude: ceperidan t il semble que l'aîné de leurs enfants a

dù naître vers 1600.
Pendant les guerres de la Ligue, Gilles était resté fidèle
au parti du roi: l'arrèt de maintenue du 31 décembre 1668
constate qu'à la tète de cinquante hommes d'armes il fut
pris et mis à rançon par les Ligueurs. Peut-être même fut­
il assiégé dans le château de Bienassis (2).
Quoiqu'il en soit, le roi l'écompensa son dévouement en
lui accordant en 1596 (3), la croix de chevalier de Saint­
Michel. Gilles Visdelou mourut avant 1627. Françoise du

Quélenec lui survécut jusqu'au 24 juin 1634 (4).
Elle avait réuni tous les biens de son père et de sa mère;
et mème elle y' avait ajouté, en novembre 1630, la grande
, . ter're de Kerlaouénan (paroisses de Mahalon et de Guilers)
cOIn prenant les trois manoirs de Kerlaouénan, Kerangoc'h
et Kerdrein et treize villages (5).

(i) Nobiliail'e de Bretagne de M. ùe Courcy.
(2) C'est ce que rapporte le Président Habasque, au livre déjâ cité.
(3) D'autre<; disent 1626; mais il n'est pas probable que le roi eût
a ttendn si longtemps à récompenser s::)s fidèles services. 11 n'est pas
cèrtain qUI:! Gilles Visdcloll vécût encore il cette date. Il vivait en 1612
(naissance de son fils François) ; mais François~ du Ql:élenec signe
douairière de La GoubJaye, à l'acte de baptême d'un de ses
comme
petits-enfants (2i mars 1627, Saint-Julien de Quimper). La signature
Gilles Visf/elou apposée au pied de l'acte ne peut être celle de son
m~lri, et doit être celle de son petit-fils.
t4) Aveu de 1638 in fine.
(5) Renseignement fourni par M. Le Bl'is-Dul'est, Le manoir de Ker-

::2,0 CLAUDE VrSDELOU. '

Gilles Visdelou eut pour fils aîné CLAUDE, né vers 1600.
Celui-ci reçut de la succession de son père La Goublaye et

le Colombier (1 ), de la succession de sa mère, Bienassis)
(2), et. Saint-Quérec (3). En outre Coatfao,
Kerlaouénan
Pratanras et Le Rible lui avaient été donnés par contrat de
mariage du 25 janvier 1625 (4) . C'était une belle dot.
Jeanne de Guel', fille aînée de Charles,
Claude épousa
marquis de G.uer, seigneur de Riec, -et de la Porteneuve, et
de Marie Papin, dame de Pont-Callec (5). Il en eut sept en-
fants et devint veuf en 1636.
Jeanne de Guer était sœur d'Ollivier de Guer, seigneur'

de la Porte-Neuve et de Pont-Callec, qui, en 1590, accom-
pagnait Lezonnet, gouverneur de Concarneau, pOUl' la
Ligue, lorsqu'il s'empara du château de Pont (l'Abbé), et
comme trophée, en enleva l'horloge qu'il transporta à Con­
carneau, et qui est (dit le chanoine Moreau) la meilleure
de Bretagne (6). .
Jaouénan (Mahalon). dont il nA reste allcu n vestige, était le chef-lieu
d'une seigneurie ancienne, qui av.îit ell oes seigneu:s particuliers.
Elle tmtra, en 115'28, dans le Marquisat de Pont··Croix par le mariage -
do Jeanne du Chastel. ilvec Allain, siro do Hosmadec, d~ Tyvarlen, de
P(lnt-Croix. b,Hon do . Molac. '
.leanne du Chastel étêtit fille de Tanguy du Chastel ct de Marie du Juch.
(f'; 11 pl'l'nd dans tOIlS les ar,tes 10' titre de seiglleur de La Goublaye :
, et son troisième fils Gilles est qualifié de seigneur du Colombicl', où il
habitait. Arch. dép. Reconnaissance authentique d'un fermage du Co­
lombier, 26 novembre 1650 .
(2) Aveu de 1638, in fine.
(3) Son second fils René-César, gOllvemcU\' de Quimpel' (1656) était
~eignelll' de 'Sait/t-Quérec,
(4) Aveu _de 1638, in fine.
(15) Les mêmes dont il. a été question li la Eéance de la Société ·arch .
du 25 février 1882. el qui, pour payer 6.000 livres, prix d'acquisition
de la seigneurie de Riec, employèrent quatorze espèce., de monnaie.
page 109 du Bulletin.
Voir
(6) Chanoine Moreau p. !S7. Ollivier de Guer .signe à l'acte de bap­
même d'une des filles de Claude (iO avril 1634, Saint-Ronan de Quimper)'.

Claude était aÎusi genùl'o d'un fidèle t::iujet du roi et
beau-frère d'un zélé ligueur.... Mais les souvenir's de
guerre étaient oubliés et l'amnistie accordée par le roi
avait réconcilié les anciens adveesaires! (l)
Claude fut sénéchal de Cornouailles au moins de 1627 à
J634 (2). Ses fonctions le retenaient à Quimper et i1
habita . peut-être Pratanras, et peut-être Quimper, aux
paroisses de Saint-Julien (3), 'de la Chandeleur (4), de Saint­
Ronan (5). Du moins les baptêmes de qua~re de ses enfants
furent-ils célébrés dans ces trois paroisses. Il avait eu en
outre une fille et deux fils, qui ne sont pas nés à Quimpee :
run, René-César, seigneur de Saint-Quérec, second de
la famille, fut gouverneur de Quimper en 1656 (6). .
entra, le 1 el' décembre 1634, comme con­
Claude Visdelou
seiller au Parlement; et, le 20 juillet 1637, il Y fut reçu
président aux enquêtes.

C'est lui qui rendit aveu au roi en 1638, et produisit à la
Cour des Comptes de Nantes les documents dont l'Inventaire
est si souvent cité dans cette notice.
Claude Visdelou avait eu deux sœurs et deux frères: .
Jacques, le cadet, et François, qui fut coadjuteur de Quim­
per et évêque de Léon (7).

(f) (( Considérant doncques que nous sommes tous concitoyens,
(( alliez et amis, (Oli!'; vivant sous une même loy, sous même Roy, et
(( jotlis~ant des mêmel:i droits, nou~ de"ons de même affeetion embrasser
« celte loy de réconcilia tion. " .
Bélordeau en sa Polyarchie. V. l'étude que vient d'en faire M. O. de
Gourcuff, secrétaire de la Société des Bibliophiles b.'etons .
(2) Il signe ùe ce titre à des actes de baptême de ses enfants en f627
et f634. .
(3) Baptême de Françoise (21 mars 1627), Saint-Julien).
(4) Baptême de Marie (J i juillel f629) et de Charles, fils ainé (3 avril
La Chandeleur .
(5) Baptême de Bonaventllre (fille), (fO avril t634). Saint-Ronan.
POli r la distribution des rues de Quimper entre ses sept paroisse~,
Voir iJ'Ionog1'. de la cathédrale de Quimpet·, page 50 et 5i.
(6) La notice sur Quimper tDict. d'Ogée). donne la qualité de comte
de Bienassis i' u gor. vernellf nommt:' en f 656. Il y a ici une confusion :
un autre Visdelou, comte de. Bienassis, neveu du premier, a èté gou-
\'cmeur quelques années après, comme QOus le verrou!!. . .
(7) Voir l'Appendice, A.

i) ,HARLES.

Le fils ainé de Claude, CHARLES, est qualifié aussi sei-
gneur de Bienassis du vivant de son père qui devait lrii
Sa vie fut eourte. Il épousa, le 12 février 1648,
sJ-u'vivre.
quand il n'avait pas dix-sept ans, Renèe du Breil du Ples­
sis de Raiz., et il mourut en mai 1653.
Claude de Visdelou devint de droit (1) tuteur des trois
enfants de son fils, au nombre desquels un fils posthume.
Cinq ans après, il mourut, le 4 mars 1658, laissant
Bienassis, Coatfao et Pratanras à son petit-fils. FRANÇ'OIS-
HYACINTHE., né en 1652. .
~1° FRANÇOIS-HYACINTHE.
L'aïeul paternel était seul Luteur de droit, et la mère elle­
même ne pouvait gérer la tutelle qu'en vertu du choix des
parents; encore si elle ·se remariait, devait-elle les faire
pourvoir d'Ull tuteur (2). Or, la veuve de Charles Vïsdelou,
après une année de veuvage, s'était remariée à Renaud de
Sévigné, seigneur de Montmoron, conseiller au Padement.
La famille avait donc de justes motifs d; déférer la tutelle
à un autre; toutefois les parents firent la faute de nommer

Renée du Breil tutrice de ses enfants (3).

Son administration fut déplorable. De gl'aves et longs
débats s'ensuivirent. Enfin le duc de Chaulnes, gouverneur •
de Bretagne, s'entremit entre la mère et les enfants; et, le
août 1682, -« en présence du .duc et de son avis, » une

transaction intervint, aux termes de laquelle la douairiére

(f)Al't. 507 de l~ CoutUUlt>.
(2) Art. 507, 506 ct 487.
il Lamballe, du
jlll:idîction de Penthièvre
(3) Procès-verbal de la
'Jo juin 1658.

de Bienassis et de Montmoroll se reconnut débitrice de
livres! (1) Plus tard ses enfants renoncèrent a sa

succession, devenue insolvable.
François-Hyacinthe est qualifié de chevalier; tantôt
tantôt marquis de Bienassis, seigneur châtelain des
comte,
titres et seigneuries de la Goublaye, l'Hostellerie Abraham,
Pratar:ras et Coatfao, Le Rible Trégavan et
d'Ellien, de
autres lieux (2).
Parmi ces autres lieux nous pouvons indiquer le manoir
de Toulgoat (paroisse de ,Saint-Ivy) (3}, celui du Moustoir
(paroisse de Saint-Evarzec), celui de Lescoulouarn (paroisse
à sa femme (4), et enfin
de Plonéour), qui appartenaient
ceux de Kerlaouénan (paroisses de Mahalon et Guilers) et
de Chef-du-bois, prés de Coatfao' (5).
Fr_ ançois-Hyacinthe fut commandant des gardes-côtes de
l'évêché de Cornouailles, puis gouverneur de Quimper (6) ;

(1) Au moins 1500,000 francs de noIre monnaie. Aveu du 21 avril
1681. Sentence Cette transaction est au rapport de Me Bretin,

notaire à Renlies.
(2) Aveu du 15 mai 1679. Arch. dép.
Le Rible était échu à son fl'ère René, capitaine des gal'des-c6tes de
Quimpel'; mais celui-ci étant mort sans enfants, Le Rible fit l'etour à
Francois-H yacinthe.
Je ne saisis pas qu'il fut seigneur d'Ellien; puisque Ellien,avait àppar­
tenu a son grand-oncle Jacques, il aurait dû passel' aux desçeodants de
celui-eL '
(3) Il ne faut pas confondre ce mauoir avec celui du même nom dont
les terres sont contigües à celles de Pratanras et dont ' les seigneurs
étaient les "Le Goaezre de Kervélégan.
(4) Ces deux seigneuries sont mentionnées dans l'Etat des Recettes
de Pratanras. Arch. dép. '
FrancOIs-Hyacinthe est quelquefois qualifié de baron de LescouJouarn.
(Aveu du 9 août 16H) Arch. dép La leHe de Lescoulouarn était
conSidérable. Le château ne parait pas avoir été fortifié i il n'en 'reste
aucun ves'ige, les pierres ayant servi à bâtir les villages voisins. Un
r li l' de cloture, en partie encore dehout, enferme une cncellItc de
36 hectares. Renseignements transmis pal' notre confrère M. Gaverant, "
juge de paIx de Pont-l'Abbé. ,
(5) SUl' Kerlaouénan. voy~z page 299.
Chef-du·hois est mel!tionné dans un aveu du 2f avr-il 1683. Arch. dép .
• 6) Lii: liste des gouverl1eurs (Og~e. , notice sur Quimper) mentionne, il

enfin lieutenant des Maeéchaux ee Il rance dans l'évéché
de Cornouailles
. Il paraît avoir gardé son titre de gouverneut jusqu'à sa .
mort (2), bien qu'il habitât Bienassis ou Rennes (3).
François-HyaciQthe avait été marié trés jeune à Marie­
Anne Salou, dame de Toulgoat (4), qui, outre cette terre,

la date de 1656. M. de Visdelou, comte de Bienassis. Cette mention ne
peut se rapporter à François-Hyacinthe. qui, à cette dale, n'avait que
trois ou quatre ans; elle a trait il son ollcle Reué-César, qui n'était pas
comte de Biena:isis. D'après la notice, le gouverneur nommé en 1656
n'aurait été remplacé qn'en 1712, et serait, ainsi, reslé en charge cin­
quante-six ans! La confus~on est évidente; et celle période . embrasse
le gouvel'l1ement de René-César de Visdelou et celui de son neveu
François-Hyacinthe, comte de Bienassis.
0) Voir dictionnaire de droit de Ferrière, VO : point. d'/tonneu1'.
« Le point d'honneur consist0 en certaines règles et matimes d'où les
« . hommes s'imaginent que c'est donner atteinte à leur honneur que d'y
« manquer à leur égard. .
« MM. h·s Maréchallx de France sont jugcs du point d'honneur entre
« les gentilshommes et entre ceux qui font profession dcs al mes ... En
tl chaque. sénéchaussée, ils ont un 1 ieutellant ... _
« Quaud il y a des paroles piqua' tes ou d'autres causes qui touchent
Il l'honneur et semblent porter les, parties à quelquc ressel timent, il
« (le lieutenant) leur envOIe aussit.ôt dCEl défenses de se rien demander
« par les voies Je fait ct les fait assigncr devant lui. ))
Le tribunal (les Maréchaux se nommait aussi Connétablie.
Molit're thrope, acte Il, scène VII) inlroduit un gal'de de la
connétablie venant dire à Alce~te:

Messieurs les Maréchaux dont j'ai commanùement,
Vous mandent de venir les trouver promptement.
(2) C'est ce qu'on pe-ut induirc notamment d~ l'aveu de 1730, où sa
tille déclare ses biens acquis ùe la mort (le son père, gouverneur de
Quimper.
(3) Le 18 novembre 1706, il comparait devant un notai l'e ùe l: ennes,
pour faire faire, au nom ùe sa petite fille, l'invLIllaire de la vaisselle de
campaglle de son gendre, le -marquis des Clos, mailre de camp d'un ré­
giment de cavaleric. tué devant Turin; et il se déclare « demeurant 01'­
« dillaircment en sail château de Bienassis, ct, de )1rfscllt, il H.ellnes,
« en SOli ho!'tel, rue ct paroisse Saint-SauvcUl'..» .
Milo des Clos épousa, en 1712, Charles FroUllay, comte de Montflaux,
fut mère de la marquise de .Créquy, dont la vie s'est pl'olongée jus­
qu'aux premières années de ce siècle, et sous le nom de laquelle out été
Mémoires en 1.834,
publiés des
(4) François-H yaci nthe et Marie-Anne Salou devaient êtrc cousins
issus de germains. .
Francois-Hyacinthe était petit-fils de Claude ct de Jeanne de Guer;
sa femme éta'ït petite-fille de François Salou et de Marie de Guer.

possédait. des biens considerables aux en virons de Qlliri1per.
et dans la paroisse de Plozevet (1). .
En 1710, il avait cinquante-huit ans, il allait marier sa
petite-fille, Mire des Clos, quand lui-même se remaria. Il.
. . épousa à Saint-Etienne de Rennes Marie du Bouexie dont
il n'eut pas d'enfants; et il mourut le 15 novembre 17.14.
5° RENÉ-FRANÇOIS. •

FRANÇOISE- RADEGONDE.

François-Hyacinthe laissait quatre enfants de son pre­
mier mariage. L'aîné, RENÉ-FRANÇOIS, était né le 10 sep­
. tembre 1675, au château de Bienassis.
Coatfao et Pratanras' ne lui appartinrent pas; ils entrè-
rent ·dans le lot de sa sœur FRANÇOISE-RADEGONDE, avec
l'Hôtellerie Abraham, et Le Rible, venant de la succession .
. paternelle, le Moustoir et de~ biens en la paroiss~ de PIo-

zevet, venan t de ]a succession de sa mèI:.e Anne Salou (2).
Françoise-Radegonde était en 1722, veuve de Maurille

Celle-ci semble avoir été sœUl' de Jeanne. C'est ce que parait indiquer
un acte de baptême du 2 avril 1628 (Saint-Ronan, Quimper), où Claude
comparaît comme parrain d'un fils de Fran çois Salou, st'igneur de Toul­
de Marie de Guer. (Par une étrange inadvei'lance, 1',lCle ne COllS­
goat, et
tate pas les prénoms donnés il. l'enfann. Uu an après François Salou
est parrain de Marie Visdelou, fille de Clande (la Chandeleur, 11 juil-
let 1629) et l'acte est signé de Marie de GU,er. . '
Chules, marquis de Guer.

Jeanne, mariée à Claude Visdeloll. Made, mariée il François Salou.
. . . . N. Salou, baptisé le 2 avril 1628.
Charles.
François-Byacinthe, né en 1652.
Marie-Anne Salou.

(1) Notamment les manoirs de Lesmenguy, l{erfiltrès, Kerouzien,
Keron~lIain, Le MesU1e~J'. Aveu du t9 mai 173L Arch. dép.

(2) A vcu du 17 mai i 730. A l'ch. dép.

Bre'bans, chevalier, seigneUl' de la Lande de Brebans 0).
En 1730, elle est qualifiée d'épouse non commune en
,Derval, chevalier, comte dudit
biens de Messire Joseph de
(Plomeur), Keranrun, Keranlan,
lieu, seignèur de Kergoz
Saint-Tremeur, le Guilfinec (aujourd'hui Guil­
Kerflant,
vinee) et Keraoul (2).
Elle paraît avoir habité Pratanras en 1722, et après s~:m
second mariage elle l'abandonna, pour habiter le Kergoz (3)
et Pont-l'Abbè; en la paroisse de Pont-l'Abbé-Ploban­
nalec (4). C'eRt en cette dernière résidence qu'elle mourut,
le 9 janvier 1734 (5).
Nous verrons ses biens considèrables faire retour à la

descendance de son frère René-François.
René-François, seigneur de Bienassis, La Goublaye, le
Plessix-Plorec (paroisse d)Erquy), la Ville-Bellanger (6), est
, qualifié tantôt comte, tantôt marquis. Comme son bisaïeul
Claude, il fut reçu conseiller au Parlement et président aux
enquêtes (24 novembre 1698 et 21 mars 1707).
Le 15 avril 1704, il épousa Marguerite Iris de Poix,
au château de la ~assaye (paroisse de Guichen). Ilreçut
au Parlement payé 81,000 li­
en dot l'office de conseiller
vres, sauf à tenir compte de la moitié de la somme

' (1) Bail du 7 mai 1722, du moulin de Pratanras et de Coat-Ligavau

Arch. dép.
(2) Aveux du 17 mai et 4 juillet 1730. Arch. dép.
, (3) Renseignement fourni par M, du Châtellier.
(4) Pont-l'Abbé se partageait alors en quatre paroisses : Pon t-l'Abbé,
'A bbé-Plobannalec, Pont-l'Abbé· Plo­
ville, Pont-l' Abbé-Lambour, Pon t-l
nivel. .
(15) Aveu du 27 novembre 1701, in fine. Arch. dép,
16) Les noms de ces deux dernières seigneuries se trouvent pOUl' la
pr~mière fois dans un aveu rendu à la juridiction de Plobannalec, .eu
1717, pal' Jacque~ Théry, seigneur de b, Martinièrt\, luteul' ~onora~re
des filles de ReIlé·Fran~ois. Arch. dep. Ces deux seIgneuries
appa"emment des acquisitions nouvelles, Le Plcssi~-Plol·ec.a
étaient
été vendu en 176!S avec B:enassis par IIlle dose cnùanle de Relle-Françols
VisdelolJ. -

an survivant de :ses parents (1), le château, la ~el're et sei­
gneurie de Lescoulouarn (en Plonéour) (2), et soiœante-diœ­
sept tenues à domaine congéable (3). Sa femme, Margue­
rite Iris de Poix, apportait en dot 25,000 livres pour
meu bles et la terre et le château de la Toul'neraye (paroisse
de Goven).
René-Françoi~ Visdelou faisait un opulent mariage (4:).
La famille de Poix, établie en Bretagne depuis lé XVe
siécle, avait été, par deux arrêts de 1671, maintenue dans
la double qùalité d'écuyer et de chevalier. Plusieurs de ses
. membres avaient rempli des charges: les autres comme

Gilles, le père de Marguerite Iris, avaient vécu obscurs, à
Rennes et dans leurs terres, occupés du soin de leur for­
tune qui augmentait à chaque génération. C'est ainsi que
Gilles de Poix, quand il maria sa fille, venait d'acquérir le
manoir et la seigneurie de la Massaye (paroisse de Gui-

chen).
six frères et sœurs qu'avait eus Gilles, il ne restait
plus qu'une sœur qui devait mourir sans enfants, de même

que la fille unique d'une autre sœur, et Gilles n'avait que
deux filles. Marguerite Iris, dall1e de Visdelou, devait être
la dernière à porter le nom de Poix; ellé hérita de sa

sœuf' et de sa tante en 1719; et, el! 1724, elle recueillit
l'héritage de sa cousine. Toute la fortune de la famille de

Poix allait ainsi se trouver réunie aux mains de Margue­
rite Iris pour se partager plus tard entre ses descendant:;;.
René-François mourut au château de la Tourneraye.J le
6 août 1715, moins d'un an après son père.

(1) L'office fut adjugé pour 93,000 livres en 1724.
(2) Sur cette ~eignellrie, voir page 303.
(3) ... Notammen t à Plobannalec. Aveu ùe 1711 ci-de::sus .
(4) L'hiRtoÏl"e de la famille ùe Poix vieut d'êlre écrite pat' M. Saul­
nier, cOl~selller il la Cour. C'est à cet ouvrage qne j'emprunte beaucoup
préeèdent et de cellx qui vont snivi'é. V. Appendice R
des détails qui

Il laissait deux filles. L'ainée MAHIE-ANNE-HYACINTHE,
née le 4 juin 1712 à Rennes, épousa, le 17 juin 1727, Louis
Engelbert, comte de la Marck; la cadette, Louise-Émilie,
épousa en 1732, son cousin de Rosnyvinell, marquis de

Piré (1).

La Comtesse de la Marck.
Louis Engelbert, comte de la Marck, descendait, au si­
xième degré... de ce fameux Guillaume de la Mal'ck qui,
nom de sanglier clf!s A rclennes, a gardé dans l'his­
sous le
toire une terrible renommée .
Le comte de la Marck était né le 21 décembre 1701. Il
était fils de Louis-Pierre de la Marck, comte de Schleiden,
lieutenant général des armées du roi, chevalier de ses 01'­
dres, grand d'Espagne, et de Marie-Marguerite-Françoise
de Rohan-Chabot. ,
la Marck était en outre marquis de Vardes
Le comte de
(par sa mère,fille d'Elisabeth du Bec de Vardes) et duc
par brevet. Il était au temps de son mariage et depuis 1719,
régiment de la Marck allemand, au service de
colonel du
France; il ' devint brigadiér d'infanterie, le 1 aoùt 1734,
l1'laréchal des camps et armées du roi, le 1 SI' aoùt 1740,
grand d'Espagne, en 1744, par IÇt démission de son ,père,
et définitivement par le décès de celui-çi, le 7 novembre
1750 (2). Enfin il portait le titre d'avoué- héréditaire clll
rnarquisaf de Franchimont, au pays de Liège (3).

(1) Marcrueri te 1 ris do Poi x se remaria cn 'f 719, à son cousin Je
mal'quis d~ Monte,ssoll, alol's cornette dl~ chevau-Iég \!~s et! deP:-tis. licll­
tenant général. Elle mourut cn i 756, e~ ~Otl mar.l, qUI aV~lt 69 ans,
épousa une jeulle fiI,le ~yallt 51 ans de mO!!1S que ,I\IL ; celle-Cl. de.v~ulle
veuve, l.hx ans apres, epousa, ell 1773, le duc d Orleans, petlt-hb du
l'ni Louis-Philippe. ,
, Régent et aïeul du
(2 ) Le bail du 21 janvieL' 1741 (Al'ch. dép.) ne lui donne pas encore
le titre de grand d'Espagne. . ,
(3) ({ Le nom d'avoué sc donnait autrefois il des seigneurs puiss ~H1ls

La comtesse de la IvIarck mourut le 17 octobre 1731, à
la naissance d'un second enfant qui ne vécut pas, et elle
ne laissa qu'une fille LOurSE- MARGUERITE Ims, née le
10'juillet 1730 (1) .

4° La duchesse d'Aremberg .
La comtesse de la Marck n'avait pas possédé Coatfao et
PrataJ1ras ;\mais, à la mort de sa grande tante, la dame de
Derval, en 1734, Mlle de la Ivlarck, sous la tutelle de son
père, recueilli t ces fiefs dans sa succession. En 1756, à, la
mort de sa grand'mère maternelle, Marguel'ite Iris de
Poix, elle allait recueillir, selon la règle du partage noble,
deux tiers des biens de la famille de Poix, réunis sur
les
la tète de sa grand' mère, l'au tee tiers restant à .sa if! nte
maternelle, marquise de Piré.
Chaque génération ajoutait ainsi au lustre de la descen­
danpe de. Gilles Visdelou. Le mariage de Mll~ de la Marck
mit le comble à celte prospérité; mais il la rendit étl'an-
gère à la Bretagne et à la France. Le 10 juin 1748, clans
la chapelle de Rohan, à Paris, elle épousa Charles-Léopold­
Marie-Raymond, prince eL bientôt duc d'Aremberg, de
l'illush'e maison de Ligne.
Le père du prince d'Aremberg, LéOpold-Marie de Ligne,
". " 7 • , __ _ • • z. ; _, t t , .. . , :
Li ,Go , ,
(( qui prenaient sous lcur protection dcs rg1i8c~ ou dcs monastères, li
(Dcni!'art, ,,0 avoué), ct sc chargeaient de les défenùl'c en justice. Ces
dépositaires et défcn~cll\'sdu gonfalon ÙC l'Eglisc.
avoués éta!cnt
C'est ainsi que Pépin et Charlemagne porlèrent lc titre d'avoués de
l'Eglise de Rome. '
(( On nommait ll.u!rcfois fief.~ d'avouerie ccux dont ks possessenrs
« étaien avoués du seiglleur dominant, c'est-à-dire charg~s de le dé
« Cendl'C eu JI/gemcnt. n Mais pIns tard .« ils furent déchargés de cct~e
« défense, comme les autres 1Lfs sont affranchis du service militaire.»
Denisart, \' 0 Fief.
(1) Le comtc de la Marck se remaria, Cil aVI'il 114 1, à i'tIaric ·Annc­
Françoise de N oaill,!s, dcrnièrc fille du maréchal duc deN oai Il ~ s, néo

I3ULLF.TI~ 'DF: L\ Soc. ARC!lBOL. DU F':'ilSrk ~E • . _- 1'0.11'; IX . 20

duc d'Aremberg, s'était illustré, jeune encore, dans la
guerre de Hongrie ét au siége de Belgrade (1717). Devenu
en 1737, il contribua a la victoü'e de
feId maréchal
(1743) ... v..ictoire qui détermina la retraite 'de
Dettingen
l'Électeur de Bavière, Empereur élu, et ouvrit l'accès du
a l'époux dè Marie-Thérèse. Ce signalé service
trône
valut au duc d'Aremberg le gouvernement du Hainaut,
avec le titre de premier pair de cette province . .
Son fils, né le 31 juillet 1721, suivit comme son père la

carrière des armes, 'et, comme lui, s'y illustra .
L'annee qui suivit ·son mariage en 1749 (1), quand il
avait à peine vingt-huit ans, il était général major; et, à son
tour, il devint « feId maréchal au service de S. M. Impériale '
« la Reine de Hongrie et de Bohème (2), »
Dès le début de la guerre de Sept-Ans, il avait eu
un commandement important. Il était, le 18 juillet 1757,
a la journée de Kolliri, après laquelle Frédéric II se cro..:
yant perdu songea à déserter le champ ~ de bataille et la
vie, L'année suivante le duc d'Aremberg commandait l'aile
à Horchkirchen et partageait l'honneur de faire
droite
reculer le roi de Prusse.
A la mort de son père i?n 1754, le prince Charles était
devenu duc d'Aremberg, prince du Saint-Empire Romain,
duc d'Aerschoot et de Croï. Il était en outre, comme son
grand d'Espagne de première classe, et chevalier de
père,
la Toison d'or (3) .
Le titre de duc que portait l'époux de Mlle de la

(0 Aveu de :1.749, Arch~ dép,

(2) Aveu de 1774, Arch. dép .
(3) Dans une déclal'alion à domaine du Pors rendue le 30 juin 178l
après la mort du Duc, celui-ci est qualifié en outre ùc « premier pair
(( et grand bailly, capitaine général et ofiicier sOl1vcl'llin du pays et
(C comté de Hainaut. 1) La duchesse est qualifiée de « comtesse de !a
(( Marck ct de Schleiden, libre baronne de Lumay et de Seram
« (Seraing près de Lièg;e), dame de l'ordre Royal de la Croix étoilée, ))
Communication de M. le conseiller d'AmphJrnet.

Marck n'était pas (est-il besoin de le dire? ... ) un titre

honorifique comme de nos jours. Le duché d'Aremherg
comptait, avec ses 90,000 . habitants, au nombre des Etats
Germaniques et relevait directement de l'Empire. On
voit quelle illustre et opulente alliance avait contractés
l'héritière des Visdelou.
Le duc d'Aremberg mourut le 17 aoùt 1779 (1). Sa
veuva devait lui survivre longtemps : elle moueut; à
Bruxelles, le 18 aoùt 18:-20, âgée de plus de quatre-vingl­
dix ans.
La dllchessequi habitait « S011 palais de Schleiden, 1)rès
de Cologne )) .ou son hôtel princice de Bl'uxelles (2) ne
devait que médioceement se s"oueier de ses 10intaines pro­
priétés de Bretagne et de l'humble manoir cle Pratanras,
auquel ses souvenirs d'enfance ne la -rattachaientpas.
En 1765, elle avait vendu Bienassis, l'Hôtellerie Abi'a-
ham, Saint-Quéree et le Plessis-Plorec (3) . Dès 1771,
Pratanl'as et Coatfao étaient mis e"n vente (L l ) ; et, le 2G sep- ·

(1) J'ai trouré -le décès du duc porlé au fi est peut-être erronée: il existe (1liX Archives un bail du 1 (lr mal 17ifj
date
(déja cité) où figurellt le dllc ct la duchesse sa femme, et un alltrû
bail d!l i6 décembre 1779 où figllrent la Ùuchc3se douairière a\-cc
Lo\JÏs-Pierrc Engelbert, SOli fils, duc d'Aremberg. La mort du Duc sc
place donc entre ces deux dates. .
La hiograpi1ie puh\liée par Firmin~Didot, à laquelle j'cmprutltc
quelques-uns ùes détails qlli pl'écèJeot, doune it tort li la duchesso
d'Aremberg le nom de de la lJ1arche.

(2) Assigl11tion donnée a'l nom du ùuc d'Arernb:r3. -- 9 avril f774 .
Arch . Mp.
(3) Il fut à raison de cette vente payé pOlir les lods et vcnle 20,000 Ii­
\'l'es; mais il est expliqué dans lit quittance (lonuée. le 24 noycmbre 1765,
pal' le Receveur général du dllché Penthièvre « qll'il a irai-ô il forfail,. ct
(( que composition est bite du surpltls en faveur de l'acqlléreur mes~irc
« dc Visdelou, comte de la Villcthéart. » Archives départementalcs ùes
Côtes·du-Nord.
dro:!s Je lods et "cnte étaient cn Bretagnc du 8~ au 6 (art. 02 et
Les
FU!V. de la Coutumcj.
(4) La descriptio:) de 177f (voir page 2i6) C&t faite- en vue de la
vente projetée.

tembre 1781, ces deux fiefs cessèrent d'appartenir a la
maison d'Aremberg (1).
L'acqlléreur de Pratanras et de Coatfao, M. de Madec,
ne prend dans les actes qui ont passé sous mes yeux
que les titres relativement modestes de colonel d'infan­
terie et de chevalier de Saint-Louis ; mais il a pu être
.écrit sur sa tombe, au cimetière de Penhars, Nabab dans
l'Inde.
Personne il Quimper qui n'ait entendu le nom de M. de

Madec ; mais chose étrange! personne après moins d'un
siècle qui sache son .héroïque histoire. Elle ne peut trouver

place ici ~ mais il est du moins permis de l'appeler un des
teaits dominants de son caractère, son ardent dévoûment à __
la France (2).
« Né en 1736, à Quimper (3), de parents honnêtes mais
« peu favorisés de la fortune, René Madec, passa dans
« l'Inde, à douze ans, comme élève de la Compagnie (4). »
La France et l'Angleterre venaient de conclure la paix
à Aix-la-Chapelle (1748)-, « Ihais les compagnies Anglaise
« et Feançaise dans l'Inde n'avaient pas mis bas les armes,
« et la guerre continuait sous le nom et apparemment au
(\ profit des princes Indoux. » La lutte était d'autant plus

(t) Voie Appendice. C. '
(2) Tout ce qui . suit est extrait ou du préambule de l 'ordo~,llance
d'anoblissement de décembre 1780, ou d'une lettre écrite de Quimper
M. Royou, avocat et adressée à l'Année l'itléraire de f 784, année de
par
la mort de M. de l\Iadec. Voir tome V, de 1784 p. 145. Ce récit est
fait SUI" les ?némoires de M. de Madec. .
(3) Le 7 février, à Sai ni-Mathieu de Quimper. L'acte de baptême ne
se retrouve ni au registre de la mairie de Quimper ni il la copie déposée
aux archives dn Tribunal; mais il a été fidélement collationné à t'ori­
ginal, le 13 mai f780, par le Curé dc Saillt-Mathieu : Le registre SUl'
lequel la collalion a été faite n'existe plus.
SUI' la famille Madec,v. Appendice D.
(
vive que « la puissance des deux compagnies se contre­
« balançait encore, comme l'importance de leurs établi~se­
« ments (1). »
Madec, impatient de se signaler ét désespérant d'en
tL'Ouver l'occasion sur mer, quitte le service maritime de la
compagnie, et voici comment: Une nuit, a deux lieues de
Pondichéry, il se jette a la mer (2) 1
Le commandant du bataillon de la marine, charmé de ce
trait d'audace: lui donne le commandement de quatre cents
(3) . Peu après, le bataillon est détruit presqu'entier
Cipayes
clans une rencontre.
La guerre de SApt ans commence; en 1757, Lally-To-
lendal arrive dans l'Inde, et Madec qui lui a été signalé
en obtient du service. Il est fait prisonnier par les An-
glais : quelques mois après il s'échappe avec deux cent
vin.gt hommes. Ceux-ci le prennent pour leur chef; et il
va, avec eux, offrir ses services a un Nabab en guene avec
les Anglais.
L'année sui vante, Madec a il, sa solde une Ü'oupe d'en­
viron quinze cents hommes, et il fait flotter devant elle le
dt'apeau fran~ais . Il voit de nouvelles recrues accourir à
son appel. Il s'arme et s'organise à l'européenne; il a
même treize pièces d'artiller-ie (1). Enfin, après avoir servi
plusieurs pr-inces, vers 1765, il joint sa petite armée a celle
puissant Radjah des Jattes (5).

(i) M. Guizot, Histoire de France 1'acon'lée à mes petits enfants.
V. p. i2G.
(2)" Ce fait se p!ace après i702, puisque Madec était encore au service
de la Compagnie, quaud il t'lIt, celte année même, bleshé au siège cie
Trir,hinipali. Ce qui suit autoriserait mûme il reporter le fa il il quelq~lcs
anné~s plus tard, après le com:neIE~ell1ent ùe la guerre de S3pt ans
(23 janvier 1756).
(3) Ann. titt. p. 1:50, On nommait Cipayes les Indoux il la solùe ùes
Européens.
(4) Ann. lilt. p. 103.
OS) On élppelait Radjahs les pl'illr,cs lnùoux gouvernant les
grandes provinces sous la souverailleté du Gran:/' MOJol; au ùerni(~r
siècle, celle souveraineté était presque nominale. '

En 1771, :Madec a trente-cinq ans, il est marié (1) et
. père; il possède des richesses immenses (2). Il songe il. ren­
trer en France pour y prendre du service militaire. Un
mot du gouverneur de Chandernagor l'arrête:
cc Vous pouvez éh'e utile à votre patrie en lui procurant
cc l'alliance 6t l'amitié de tous les princes dont vous gou­
(c vernez la c0:1fianc3... . Passez chez l'Empereur: Vos
« seules forces doi \'ent faire pencher la balance de son
« coté ..... Engagez le il faire une entl'eprise sue le Ben-
« gale ..... Vous poun'ez obtenir son consentement et ses
« orclre.3 pour vous mettre il la tète d'une troupe formidable
« ct venir ici nous tirer du joug ..... ))
Quelles étaient donc ln. notol'ièté et l'impodance de Macke
pour (lllO le Commandant français püt lui adresser une
prière en pareils termes ! ... (3) .
Madre ne délibère pas; il répond qu'il va passer chez .

l'EmpercUl' et qu'au premier signal il se j eLtera sur ]e Ben- .
gale, avec 10,000 hommes il S considérer comme libre d'engagement avec le Radjah des
Jattes qui lui doit 200,000 roupies de solde arriérée (~l).
Mais, par malheur, a ce moment mèmc, l'Empereur entre
en armes chez' les Jattes. Combattre l'Empereur avec les

Jattes, c'est traverser les intérêts de la France; et l\fudec ne
• s'y résoudra pas. Mais, si son camp est a la frontiére) ses
richesses, sa femme et ses petits enfants (5) sont au loin

(1) Acte de mariage. cél~b\'é il PaponJh (province d'Agr:l), en 1766,
par un père de la ~ociété de Jésus.
(2) Préamb . ol'd .
(3) Ann. litt., p. i54-1!58 Ordo A l'imitation de l'ordonnance j'cm­
r10ic l'expression Empereur au lieu de grand ~It)gol.
(4) Si on compte des roupies d'argent il '2 fI'. 40, e'est une somm0 de
480,000 francs. Si on compte des roupies d or, à 38 fr. n, c'est une
wml1lC ùe 7,7H,OOO francs. Il fau', je pense, cO'Tlptel' pal' roupies d'ar­
gent . .

(5) L'un àgê de trois ans, l'autre tic qllel'{1lCS mois . Ar.lcs dt~ bap­
têmes rarport~s à Agra (provirJcc de Delhi) Cil t 768 et 177~ •

dans l'intérieur du pays. Passer la frontière, c'est perdee
le fruit de seize années de guerre; bien plus, c'est exposer
sa famille aux plus cruelles vengeances. ,
Y avait de quoi troubler le cœur le plus intrépide ...
Madec n'hésitera pas! Il prend avec lui cent hommes dé­
voués, il enlève sa femme, ses enfants et ce qu'il peut de
ses richesses. Mais les Jattes ont percé son dessein' la
route du retour est fermée; Madec, s'il est coupé de son
camp, est perdu 1 Il combat toute une nuit et il passe;
mais illaisselderrière luila pl us grande partie de Son bagage(l).
Le camp est levé et marche vers Delhi; mais cent mille
Jattes s'élancent il. sa pour,suite ; il faut de nouveau com-
battre ... IVladec et son lieutenant, M. de Kerscao, gentil-
homme Léollnais, sont blessés au début de l'action; ils

continuent à combattre sans suspendre leur marche; un

marais se présente, la petite troupe s'y jette résolùment
et les Jattes n'osent l'y suivre (2).
Vingt jours apres, Madec campe à trois lieues de Delhi.
Le général des armées de l'Empereur vient à sa rencontre
avec cinquante seigneurs montés sur leurs éléphant~ et une
nombpeuse cavalerie; au nom de son Souverain, il le salue
du titre de Nabab (:3). La cavalerie de Madec ouvre la mar-

(t) Ann. litt., p. Hg .
(2) Ann. litt. p. i60.
(3) « Par commandement de l'Empereur, ordre auqllel Je monde
)l cnti~r doit sc soumettre, il a été accordé 'à l'Européen M. Madec, les
II qualifications de Chem-ul-Doula (Soleil de la Cour). Bahadir (héro~),
) lieutenant de S. M. I. dans les camps et armées, etc ... » ,
Diplô:ne daté du 3 jour de la lune de Chaaban, an de l'hégir,; fi 87.
Celte date répond au mois demaii 772. .
Ce diplome a été traduit à Brest, en H80, par le secrétaire-inter­

prète Osman-Khan, amhassadeur de Typoo-Saëb auprès du roi Louis XVI.
D'après l'explication donnée pàl' l'ambassadeur, le titre honorifique
de Bahadir ou Bahadour est le premier de la Cour après celni de Kllan.
Le SOlI vcrain qui parle si superbemcnt de lui-même et qui sc donne le

titre tle toujours victorieux était Schah Alem, dernier souverain no­
minal de l'lnde, depuis i759, ct qui devait mourir en 1806, après avoir
été dix-h 1Îl ans prisonnier de la Compagnie Anglaise.

cho; ses compagnies de grepacliers suiyent; puis mal'chent

cinq élèphan ts ; deux portent ses principauxofficier's, les trois
autres sont chargés des étendards, des timbales, du palan­
quin, insignes de sa. dignité nouvelle. Madec parait ensu'ite
assis à la place d'honneur sur l'éléphant du général. Les
seigneurs de la cour, la maison militaire du général et sa
cavalerie ferment la marche. .
L'immense yille est en fète ; un peuple innombrable se
pecsse dans les rues et couvre les toits., et le somptueux.
cOrtégê s'avance lentement au milieu d'acclamations qui
couvrent le son des instruments de musique.
Pendant cette pompe triomphale., Madec songe à
. Q~lin:lper, à son humble famille, a son vieux père, fjui, sc
{l'i t-il, IJCld-être ne vit plus, et des larmes -viennent a ses
yeux (1) .
Quel joue dans la vie de :Madec ! ... Il se crol t le jouet
d'un songe .... « Hélas, disait-il plus tard, c'en était un
en effet. »
La renommée mème de !vladec allait lui êt.re fatale.
Les Marhattes, le peuple le plus belliqueux de l'IIfde, prè­
taient appui a l'Empereur contre les Jattes, non pal' fidé­
lité au Souverain, mais p:1r calcul., espémnt user l'un
et l'autre ennemi dans des luttes sans fin. Mais i'ls ont
compris que le secours de Madec ya décider la victoire si
les Jaites combattent seuls. Pour parer a ce danger, les
M"u'hattes quittent brusquement l'Empereur, et d'ennemis
des Jattes, ils deviennent leurs plus utiles auxiliaires.
Deu .~ mois après, les deux armées réunies et fortes de
deux cent mille hommes assiègent Delhi. Contee l'avis de
Madec, l'Empereul' fait sortir son armée, qui se débande;

(1) ;\laLlc0 ne se trompalt p.1S : sl)n père l\lait mort i~ Saint-Mathieu
de Quimper, le 8 juillet 1763 ;Sépultures dl~ Saint-Mathieu.)

Ile récit ajoute: « l\Iadcc ful admis il l'audiellce du monarquC', qui le
. « félicita .... ct ôta son :3abrc qu'il passa lui-ll1êm ~ au côté de Madec. II

eL notre compatriote soutient seul pendant neuf heures, et
sàns ètre entamé, le choc des assiégeants. Ceux-ci se vengent

de l'affront qu'il vient de leur infliger, ils pillent son camp
et consomment .sa ruine. L'Empereur embrasse Madec et

(suprême mais stéeile honneur 1) enlève de ses épaules deux
châles qu'il pose sur celles du glorieux vaincu (1).
En 1773, Madec se décide a partir pour la France. Il
vend son artillerie et ses chevaux a un français; mais
à cette condition expresse qu'il ne servira que sous des
princes amis de la France. Puis, ne pouvant se fraye~ un
passage jusqu'a Pondichéry, il revient et reprend du
service chez l'Empereur (2).
Celui--ci, qui ne peut payer sa solde en argent, donne • •
à Madec la propriété de deux provinces; et notre com­
patriote est ainsi « assimilé aux princes de l'Asie (3). )
Enfin, après des alternatives de succès et de revers,
Madec et l'Empereur viennent mettre le siège devant la
capitale des Jattes. Ceux-ci unis aux Marhattes vont, par
~ne habile diversion, ravager les provinces de IvIadec. Il
vole a leur secours; mais, atteint de trois blessures au
début de l'action, il ne peut donner ses ordres; son armée
est battue et perd plus de 4,000 h0111111es. L'Empereur le
croit et se croit perdu sans ressources. Mais telle est la.
renommée du vaincu que, deux mois après, il a une armée
plll~ nombreuse que la première; il bat les Marhattes,
revient devant la capitale assiégée et y fait entrer
l'Empereur, après un siège d'un an.

(t) An. liL , p. 16:5.
L'auteur prend soin ùe définit' le mot Châles: (( Cc sont des mantes
très·fin fabJ'iquees à Cachemire. II L'explication superflue
d'un ùuvet
aujourd'hlli était utile cn i 784 ; les chàles ùe cach.emire ne se sont
réj)a ndus en Eu ropc que d'Jpu is lIotre ex réd i t ion depuis 18H.
(2) Ann. litt. r. 1136 •

~3) Orù.

Toutefois Madec a compris que ce succès doit être le
dernier; et il persuade à l'Empereur de se mettre sous la '
protection de la France, et de payer cette protection de la
cession d'une province. Mais la négociation vivement
encouragée pal' le gouverneur de Pondichéry traîne en
longueur; la face des évènements change; et notre géné­
reux compatriote qui s'est consolé de la perte de sa fortune
aux intérêts de la France (1) « conçoit un mortel
sacrifiée
« déplaisir de n'avoir pu, en quittant Delhi (2) acquérir
« une province à sa patrie (3). » •
Enfin, Madec revient à Pondichéry après un voyage de .
neuf mois et mille traverses. Mais, à ce moment mème,
la malheureuse ville va être assiégée pour la troisième
ans; Madec se rnet à la disposition du
fois depuis vingt
gouverneur qui l'emploie à de fréquentes sorties (4) ; et 'il
se signale « par des actions dignes d'envie (5). li
« Pondichéry capitule, le 17 octobre 1778, aprèH une
« héroïque résistance de quarant jours de tranchée ou-

« verte » (6), et Mac1ec a l'insigne honneur d'être nommé
dans la capitulation (7). .
Il s'emb9rque enfin et . fait voile vers Lorient; mais la
mauvaise fortune le poursuit: les deux bâtiments qui le
portent avec sa famille et les débris de ses richesses sont
pris par un corsaire anglais presque en vue du port, et
emmenés en Irlande. Là, l'erreur est reconnue, et Madec

débarque enfin à Lorient." en septembre 1779 .
Tel fut Madec"" Le pr~mier récit, de ses exploits qui se

(1) Ann. litt., p. f!S4.
(2) Au mois de mai 1777. •
(3) Ann. Hy., p. 178,
(4) Notamment les 22, 24, 22 septembre t:lt 4 octobre. . Ordo
(5} Rapport de r-tL de ndlecomb~, gouverneur de Pondichéry. ·Ord.
(6) M. Guizot, Histoire r:acontée à mes petits-enfants. V. 362.
(7) Ann. litt. p. 172. .

répandit en France fut pr'is pour un roman d'aventures (1) ;
et il fallut,pour convaincre les incrédules, la nomination
de colonel d'infanterie (2), la croix 'de Saint-Louis -(3), enfin,
l'ordonnance d'anoblissement (L 1).

D'Hozier, en donnant ft M. de Madec la devise qui 'se lit
sur la porte de Pratanras peignit au vif son âme héroïque:
l'lultis perterrita monst7'is(5).
Que d'hommes ont leurs noms inscrits et très jus-
temen t au livre d'or de la patrie pour ·un acte d'hé­
roïsme 1 et comment la mémoire de M. de Madec ne vit­
elle plus guère que dans les pieux souvenirs de ses desceî-
dants~ ...
A son retour en France, M. de Madec ne rapportait que
les débris du revenu de ses provinces de l'Inde. Ce n'était
rien auprès de ses ùnmenSt9s richesses; mais c'était encore
une fortune.
Dès le 19 décembre 1778, en prévision de son retour,
il avait .fait acheter une maison avec cour et jardin
entre la rue du Sel (aujourd'hui rue du Quai) et la rivière
du Stéir. En rentrant ft Quimper, il s'empressa d'abattre la
maison pOll!.: bâtir à sa place l'hôtel qui fait face ft la rue ·
Laënnec (6).
Le 26 septembro 1781 (7), il acheta de la duchesse d'A-

(i) Ann. litt, p. 146 •
(:2) {cr janvier f7ï7. M. Maùec n'apprit sa nomination qu'à son
arrivée cn France.
(3) 8 novembre 1779 .
(4) Ordonnance de décembre 1780. Y. Appendice E.
(5) LI\s armoiries de M. de Madec « insculptées )) sur la porle de
Prll.tal1ras sont cc d'azur à l'épée flamboYd!Jte d'argent en fasce, la garde
cc ct la poignée d'or, accompagnée en chef à'une étoile d'argent, ct cu
« poinle J'un Cl'o)ssûnt d'or. )) .
(G ) negbtrcs du Bureau de l'Enregislrement. Vol. 202, fo B, \,0 •

~Iadce rend aveu au roi, le 2J juin 1783, ponr eelle maison nouvd­
lement bâtie.
(7) IJ., \ 0l 208,'[011, ''0.

remberg les seigneuries de Pratanras et de Coatfao, et se
mit à reconstruire le château de Pratanras qu'il devait â
peine avoii' le temps de finir (1).

. Il nous reste il, étudie!' les droits seigneuriaux de Coatfao
et Pratanras et à dire les singuliers débats auxquels ils ont
donné lieu.

APPENDICE

A (Page 301).

Les frères de Claude de Visdelou.
Le cadet, JACQUES, habita Quimper. En 1626, il épousa
Manricette, fille de François du Chastel, seigneur de Mezle,
cette plaintive Marie de Keroulas qui, selon la ballade,
et de
mourut de douleur pour être devenue, contre son gl'é, mar­
quise de Mezle ; mais qui pourtant, remarque M. de la
Villemarqué, eut le temps d'avoir trois enfants (2).
Mauricette mourut sans enfants" en 1627, et, d'un second
mariage avec Marie de Loheac, Jacques eut Ü'ois fils.
En 1634, Jacques est qualifié de seigneur du Hilguy, dans
l'acte de baptèrne de son fils Sébastien, qui eut pour parrain
Sébastien, marquis de Rosmadec (3), et, en 1642, de sei­
gneur de Pratanros (4); il comparaît il, laréformation de
1668, comme seigneur du Délien. Enfin, dans un acte de

(1) On lit dans la première édition de l'Histoire de la ligue, en note,
pa~e 310: « Il (le château dû PmtanI'as a longtemps ap'parl~rJl.1 il 1 a.
« maison de Lczongar. Le comte de la arck, descendant llllll1edlat du
« sanglier dcs Ardennes, dont la mère était bretollne. le YÛl1dit à M. de
« ~adec. li
Et toutes ces cfI'eurs sont répétées ùans la sc·condc édition, p. 349.
(2) Voir dans le Bal'zaz-Bl'ciz, l'Héritière de Ke/'oulas.
(3) Baptême il Saint-Ronan (21 février 1634).
(4) Acte du ter aoùt 1642. Arch. dép .

1667, ou il c~mparait comme seigneur d'Ellien~ d,e Pl'a­
tanros, du Hilguy et Plogastel il est dit capItame des
l:é,:èché de CO!,douailles (1), _
gardes-côtes de
GUY, s?n .fils allle, .~ut conseI.l1~r du roi, alloué (2), lIeu­
tenant crIm~nel au .slege préSIdlal de Quimper (3), avant
1658 (4), pUlS cOllseIl~er au Parlement, en 1661.
Aux actes d.e bapteme de ses enfants (5) il est qualifié de
de selo.neur 0 Ker:rastal., C?atfor~, Kerguischer et Saint­
Germam" seIgneurIes qUI lUI venaIent de sa mére ou dont
il prenait le titre du chef de sa femme.
Le troisième des fils d.e Gill~s,. FRANÇOIS, né à Bienassis,
]e 24 novembre 1612, fut predIcateur de la reine Anne
d'Autriche, et, sous le titre d'évêque de MadaUl'e devint
coadjuteur ,de l'évêque. de Quimpe,r" en 1~51 ; quelques
années apres, en 1665, Il fut transfere au SIège de Léon:
il mourut .à Saint-Pol, le 18 mai 1671.
Un autre Visdeloll qUi vivait à cette époque a laissé un
Je veux parler du P. Claude Visdelou, jésuite, orien­
nom.
taliste et sinologue célèbre, auteur d'une Histoù'e de- la
Tartarie, vicail'e apostolique en Chine, en 1708" et évêque
in partibus de Claudiopolis, moet à Pondichél'Y, le 11 no­
vembre 1737.

Les biographes qui se copient r'eligieusement le font
naître à Bienassis, le 12 août 1656, et le disent neveu de
Saint-Pol. En ce cas (Claude étant veuf depuis
l'évêque de
1636), il eût été fils de~Jacques etfrèl'e de Guy (6). ,

(1) Quittan0e du 7 juin f657. Arch. dép. L'acte dit et Plogastel; il
faut lire sans doute en Plogastel. .
(~) « Alloué s'entend dcs m:1gistrats lieutenan ts ci vils et criminels des
« qifférents tribunaux de la Bretagne. ))
Denisart, v{) Alloué.
(3) « Lieutenants criminels sont des magish'ats institués pour con~
u nattrè dcs crimes commis ... en instruire les procès et juger les cou- ----
« pables. li '

Denisart, V lieutenant crlminel.
C'étaient à peu près les jllges d'instruction de nos jOllfS .
(4) Actes de haptême ci-dessous.
(5) fi a vri 1 1658. Sai nt-Ronan. Baptême de Vrançois, né Je f3 octo~
bre f6lJ5 de Fi'ancoise de Kerbloysoll (pi'cmière femme de Guy).
9 mai' 1670. Saint-Bonan. Baptême de Marguerite, née le 20 avril
précédent, de ÎI' argucrite Je Langourla (seconde femme). .
(Ii) J'ai vainement cherché son acte de baptême à Quimp~r, et !1
n'.existel:as tn la paroisse d'El'q,uy, de 1631. à 1653: Je serais porte,
S'Il est nei comme Il semble cel'tall1, en 1656, u le erOlrt~ petit-neveu de

B (Page .307) .
N ote sur la famille cIe Poix
La famille de Poix était alliée des Sévigné. C'est à ce
titre que la Marquise fut, en 1656, marraine de Charles,
frère de Gilles de Poix. Le père de Gilles, Renaud de Poix,
était seigneur de Fouesnel (par. de Louvigné de Bais), a
quatre lieues des Rocher.::;. Ce voisinage attirait à Mme de
Sévigné la visite des hôtes de Fouesnel. Ceux-ci n'avaient
pas le don de la di ve1't.ir, et elle ne les ménage pas dans ses
lettres à sa fille. Un jour même elle manqua de cour­
toisie envers' eux, et elle s'en vante : « . Je laissai
« l'autre jour retqurner chez · soi un carrosse plein de
(c FouesneLlerie, par une pluie horrible, fatfte de les Pl'ier
c( de bonne grâce de demeurer. » Lettre du 28 juin 1671.
Un écrivain vient de publier dans le Correspondant une
sér'ie d'articles intitulés JI1 me de Sévigné en Bretagne.
Il recueille quelques-uns des traits dirigés par la Marquise
centre les Fouesnel, et il ajoute que cc ~'1me de Sévigné ne
« formule aucun grief con tre eux.»
Elle en eût été bien embarrassée!..... La vél'ité est
qu'elle avait été, en plusieurs cil'constances, fort heu­
.reùse de trouver ses parents Fouesnel et surtout Renaud
Fouesnel.
« Un compte de tailleur resté impayé depuis 1645 et
« montant à la somme de 1,240 livres, sans préjudice d'in­
« téréts et de frais de procédure devant plusieurs juridic­
« tians, donna lieu" en 1652. a une transaction où Ren~ud
« de Poix représenta Mme de Sévigné. Il avança, dt"). ses
« deniers, pour solde, la $omme de 1,600 livres, dont il fut
« remboursé par fr·actions. .
, « Onze ans plus tard, en 1633, la. Marquise poursuivie,
(c comme . tutrice de ses enfants, par les cl'éanciers de son
« beau père pour une dette de 1,200 livres, remontant
« au 26 août 1629, le ur ècei vi t de s'aclres..ser à M. c1 e
.( Fouesnel. Cette somme, empruntée pour un mois"
« depuis trenle-qllatl'e ans, était plus que doublèe par les
« intérêts et les fmis judiciaires. La créance fut aerêtée à
« 2,420 livres, et remboul's6e par Renaud de Poix, qui en
« fit l'avance »

_. E. E " , ' , . L , ., •• ...
l'évêque de Saint-Pol, et fils d'tll1 des fils de .LIcques Visdelou, peut- . .
être de Guy. .
La notice sut' Erquy (dictionnaire t'l'Ogée) fourmille d'erreurs: dIe
dit par exemple, que Claude, le jésuite, a été seigneur de Bicnassi~.

.Le lecteur, après ces révélations puisèes par M. le con­
sell 1 et' Saulnier dans des actes authentiques, pourra s'é- '
tO,n~er ~t ne rira plus des plaisanteries lancées par Mme de
SevIgne contre la Fouesnellerie .

C (Page 312).
Les descendants de la duchesse
d' Aremberg.

A partir de ce rrioment l'histoire de la maison d'Arem­
berg devient étrangère à l'h,isoiret de Pratanras - Tou­
tefois il m'a paru '-permis de consigner, à la RI; de cotte
renseignements sur les enfants do la der­
étude, quelques
nière héritière de Pratanras et de Coatfao, dont les an­
cêtre?, bretons possédèrent Pl'atani'as pet~dant prè~ de qua­
tre slecles et dont les descendants porLent S l clIgnement
leur nom en Belgique et en France.

r. La duchesse cl' Aremberg avait eu huit enfants, au nom­
bre desquels:
1· L'aîné, Louis-Pierre-Engelbert, né le 3 août 1750, à'
Bruxelles. Il est mort eh 1820, dans la même ville, quel­
que" s mois avant sa mèl'e. En 1801, à la paix de Lunéville,
duché d'Aremberg avait été n_écliatisé~ C>est-a-dire an­
nexé aux grands é'tats voisins. Toutes les possessions du
sur la rive gauche du Rhin furent réunies a la France,
duc
celles de la rive droite étant attribuées à la Prusse. Le duc

obtint en dédommagement le comté do Meppen.

. 2° Le second, Auguste-Marie-Raymond. Il reprit, après
la 9mort de son aïeul maternel, le titre de comte de la
Marck, sous lequel il est connù. Né à Bruxelles, en 1753,
il fit, comme colonel, la guerre de l'Indépendance en Amé­
rique (1780-1782). Député de la Flandre française aux Etats
généraux, il se lia étroitement avec Mirabeau. Sa nais­
sance et le souvenir des services rendus pat son aïeul et
son père à l'Impératrice, mère de la reine Marie-Antoinette,
l'introduisirent dans l'intimité de la famille royale. Sa
qualité d'étl'anger lui assurait à la cour une indépen~ance
assez rare; et il ne se mèla aux affaires que par suite du
c1évoüment le plus désintéressé au Roi et à la Reine , Apl'ès
leur mort, il se retira en Autriche) où il devint général. Il
- est mor"t à Bruxelles en 1834. .

Le comte de la
Marck avait sel'vi d'intermédiaire au-
rapprochement de
MÎl'abeau avec la Cour. Ce fllt lui qui

reçut le dernier soupir du grand orateur, et qui obtint cIe
lui le dépôt de sa correspondance avec la Cour, et reçut la
mission de la publier. Cette publication ne s'est faite
qu'en 1854:. ' , --
II. De son mariage avec Pautine-Louise de Brancas­
Lauragais le duc LOUis-PIerre Engelbert a eu cinq enfants,'
P Prosper-Louis, duc d'Aremberg, qualifié d'Altesse
a Bruxelles en 1785, mort en 1861, séna- ,
sérénissime, né
teur français en 1806. En 1810, son duché a passé p1'es­
qu'entier sous la sou veraineté du Hanovre.
2° Pauline-Charlotte-Iris, princesse de Sch wartzem­
berg, fut, le 2 juillet 1810, une des victimes de l'incendie
l'ambassade d'Autriche, a une fète que l'ambassadeur
prince de Schwartzemberg, son beau-frère, donnait il l'oc­
mariage de Napoléon avec Marie-Louise.
casion du
3° Philémon-Paul-Marie, l~atu1'alisé français en 1828, est
le chef de la branche française d'Arembel'g.
4° Paul, chanoine de Namur en 1838.

5° Pierre.
III. Le duc p'rosper-Lollis n~a pas eu d'enftll1ts d'un pl'e­
marIage avec St,éphanie de Beauharnais" 111èce de
miel'
l'impératrice Joséphine; de son second mariage avec Mal'ie
Ludomille, princssse de Lobkowitz, sont nés plusieurs en­
fanta, dont l'aîné:
IV. Engelbed-Auguste-Antoine, cluc cl' Aremberg, d'Al's­
' choot et de Croy, duc de Meppen, nè en 1824, mOl't en ,
1875. De son mariage avec sa cousine, princesse d'Arem­
berg, plusieurs enfants, dont l'aînè : '
V. Engelbert-Prosper-El'l18s t, duc d'Aremberg, etc. né
le 10 août 1872.

Après la vente cle Pratanras, la rnaison d'Aremberg
restait encore propriétaiee 'do vastes domaines dans le
sans doute à ce titre que son nom se lit
Finistère. C'est
SUl' la liste générale des èmigrés du Finistère, publiée
15 frimaire an II (G décem bre 1793) par la Commission
administrative du département (1). On y relève ces trois
inscriptions Daralnbert, ci-devant prince, Daramber[j et ,
La Mal'lc. Cette troisième mention se rappol'te sans aucun

(0 Je dois la communication ùc ce Clll'ÎCUX documcnt il notl'e ronfrèl'c,
M. de HoùeIIcc du POJ'zic. - •

, do~te a\l comte de La, r../~arclc " Les princes d'Aremberg
éta.lent e.teangees, et, a." 1 exceptIOn du comte deLa Marck,
. qUt aoad ~xer~é en F J'ance les cl"oits de citoyen, on a
quelque p~ne t~ comprendre qye les termes du décr-et du
28 maes 1/93 aIent pu les atteIndre ..
, Du l'estel.es biens de la fal1'1Ïlle cl' Arern bero· n'ont pas été'
"end us natIOnalomen t. t:l .
, J'ai sous les yeu~ un C,0l~1pte l'end.u en 1807 à la duchesse
cl Arem?erg et un .etat g8~eral des b18ns dressé en 1838 (1).

- Pluslelll's domall1es qm figurent au compte ne se 'retrou­
vent pas a l'état : ils :?~valent été aliénés entre ces deux
actes. .
En 1838,' les biens de la maison d'Aremberg en Bretagne
al?partena18nt. par qual't. au ,duc Prosper, aux princes
PIerre et Paul, et aux hmt enfant.s de leur sœur, princesse
de Schwartzemberg. '
LJétat cont.ient 88 artie1es, fermes, moulins, bojs et
domaines congéaLles, répartis en onze communes: Saint­
Yvi (28 adicles'l,. Melgven, Elliant, Kernèvel) Fouesnant,
Beuzec-Conq, Saint-Eval'zec, Plenven, Clohars,-Fouesnant.,
Gouesnach, Scaëe. Les congèments à .faire sont évalués
384,510 ~'rancs; les mises à pl'ix, en sUppos.lnt tous les
corigément.s opérés, s'élèvent à 8Œ,0:LO feancs. Il semble
que le prix total des ventes faites de 1839 à 1850 ait dépassé
ce chiffl'o. Une rente domaniale de G li Vl'es et CJ nelq u'es
ponlets a été vendue plus de 20,000 fl'anes , au grand éton­
nement des hommes d'affaires de Bruxelles, natul'ellomoll t
peu au co.urant tle notre domaine eongëable. '.

D (Page 312).

La famille Madec.
Ma.dee avait au 'moins cinq frères et sœul'S ; il était: le
cinquième enfant. Cette humble famille avait d'honol'a­
bles sym.pathies) puisqu'une des fiiles avait été tenue SUl'
les fonts par « noble homme Jean de Cheffelen Le Jadé et
« demoiselle Jeanne-Fmncoise Le Grée. )) On trouve en 1770

un conseiller au Présidial du n0111 c1e Le Jadé ; et Le Gl'ôe
(1) Le compte porte 'l'approbatio',l de la ùae1w3sc et S:\ signaturJ

la m.arck ,L'arenberf/. En1838, ses dcsccnchuls signJnt ,H!'l"i lLlre uu[J,
au Lien de d'Arembel'g, sclol1 l'ortho;;l'aphe franpise.
Je dois la communication de ces uocuments il l'tJblig8JI1CC üe i\1. dJ
Chamaillanl, pere. .
Bl1LLETIN DE LA Soc .. ~l\CIJ.~:OL. DU FCilSTi·!RE. -- To~[!·: IX. , U

esLle nom d'ulle famille bOlll'gcoise de cette .époque. . Une
autre fille a:vait eu pour panain et rnarr.aine c( noble homme
« Julien-François Amette, avocat à la cour, reeeveur géné­
« l'al des devoirs· en cette ville de Quimper, et dame Fran­
« çoise ,Danaloze, épouse de noble homme Pierre Moulin,
re~eveur 'des fou?-ges ordinaires de l'Evêché. ) Bapt. de
Samt-Mathieu.1 5 janvier 1733 et 4 juin 1738 .
. Dans la seconde partie de cette étude, nous verrons le
Sleur Amette devenir le héros imprudent et un peu ridicule
c1'uné a venture qui mit aux prises l'évêque de Cornouailles
et 10 cornle de La Marck, et qui fut portée au Parlement et
presq ue jusqu ~aux Etats de la province.

. E (Page 319).

Extraits de l'Ordonnance d'anoblissement.
« Les actions éclatantes de cet officiel' lui ont mérité. ...
c( le rang le plus éminent dans cet em pire (du Mogol.)
c( Les avantages ,dont le sieur rvIaclec a joui à III cour du
cc Mogol ... n'ont pu éteindre en lui l'amour de la patrie;
« pendant son long séjour dans cette cour ... il informait
« exactement noscomrnandants dans l'Inde des projets qui
« pouvaient nuire à leur accroissement; s'opposait â leur
« réussite et même iJ inspirait de l'attachement pour lanation
cc française au corps qu'il commandait, clans la vue de l'en1-
« ployer au besoin en cas de révolution , , ..
« D0tel'minè il l'epasser à notre service, avec une fortune
« i m rnense, .. il demanda des passeports au commanclan t
« da Bengale; mais cet administrateur. ayant fait entendre
« au sieur de M-aclec que son crédit et sa réputation à la
. « cour du Mogol pouvaient ètre 'üè~-avantageux à n98
« desseins ... il renonça à son pl'ojet de retour ... ; en C011-
« séquence, le s.ie'ur de MacIec resta dans l'Inde pendant
(c huit années au-delà de ses vues 'uniquement pour sec6ndel~
« le's projets de nos commandants'- .. ; màis .pendant ce long
« séjoul' il essuya des revel's ... ; ~n6.n d:.ms cet intervalle, il
« IJel'dît les tl'ois quarts de sa fortune. ))
Suit l'énurnération dèS services rendus au siège de Pon­
cliché l'Y « qui ont été constamment couronnés des plus
« brillants succès; ses actions, d'apl'ès les pl>opres expres­
c( sions du gouverneur, consignées dans la relation du siège,
« ont été dignes d'envie ... ))
« Le gouvemeur observe que l'emper8ur de Delhi ayant
« confèr'é au sieur de Madec les plus geands honnem's et

« des dignités qui l'assimilent aux peinees de l'Asie, on ne
« peut s'empêcher de convenir que cet officier revenu dans
« sa patrie ... ne peut plus être confondu dans la classe
« des hommes ordinaires.
« A ces causes, etc.

i i 2 L 22' , ., 4 •

CORRECTIONS ET ADDITIONS

Pages 272 et 273. . .l'ai donné aux barons de P(lul-l'Ahhê le nom
de famille du Quélenec, dès la première moitié du XV siècle. C'est
une erreur que M. Pol de Courcy a bien VOUlt1 relever. La baronnie
POIl t n'a passé à la maison du Quélenecq.u' en 1517.
L.es pages 272, 273 et 274 sont à refaire. .
Pdge 283, ava~t-dernière ligne, Il celte épisode" lil'c (( cet épisode }J.
Pages 29t et 297. Trégunan, Trégav!lu ou Tl'egaullun (on trouvo les
trois formes) étail dans la paroisse de Scaër. Le lI1anoir de Trrgavan
subsistait encore cn f 807. Compte ci-dessus) .
Page"292. Comme conséquence des corrections à faire pages 271, 272,
273 et 274, une <:orrc(·tion dcvient nécessaire. ligne 8 : Substituer il Id 1 re
phrase du 3° alinéa, la phrase suivanle :
La branche aînée posséda la vicomté du Faou en Basse­
Bretagne, et, comme nous l'avons vu, acquit par mariage,
en 1517, la baronnit~ de Pont et la seigneurie de Ros­
trenen.
Page 301; lig'le {rB, au lieu de (\ Claude était ainsi gendre, Il Hs'cz
.11 Claude élalt ainsi {ils, Il

Page 308, ligne t 4. Lü père du comte de la Marck était ambassa­
deur en Espagne en f 7 43.

Page 305, note 1. Lesmenguy (paroisse de Locamand, aujourd'hui
comprise dans celle de Fouesnant).
Au lieu de Kerouallain, lire Kerotllill, paroisse de llCUzllc-Conq. Ce.te
métairie fait aujourd'hui partie de la terre dû Lesnevar.

Page 314, note 2. La maison d'Aremberg possédait encore le châteüu '
de Louvain),
d'Heverlé (prés

J. TREVEDY •
(l'oir E .... atum, p(lfle 34:) cl-aprè~.