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Bulletin SAF 1880


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Le château de Quimperlé

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travail; ils ne veulent pourtant pas le décliner, vu les
instances de leurs collègues.

La parole est ensuite donnée à M. Audran, pour
une communication sur:

, LE CHATEAU DE Gu
, On lit dans l' Histoire de, Bretagne: u En 1241, Guyhomar de

Léon prit les armes contre le duc Jean 1 pour soutenir des
droiLs de brefs (c'est-à-dire de naviguer) dont il jouissait dans
sa" terre; il brûla le château de Quimperlé. Cette affaire fut
apaisée et le vicomte de Léon conserva sa possession (1). »
Et dans la chronique de Ruys: « Eodem anno (MCCXLI)

cast1'um de Kemperlé fuit combustum a Leonensibus (2).
Da,ns quelle partie de la ville était situé' ce château, ce qu'il
est devenu depuis? C'est ce que je me propose d'établir dans
ce mémoire.

On désigne à Quimperlé, sous le nom de rue du Château,

une 'large voie pavée dans laquelle on remarque les ruines
de l'église paroissiale de Saint-Colomban, la prison, l'auditoire
où se réunissait avant 1791 le corps municipal, et plusieurs
maisons des XVIIe et XVIIIe siècles. Elle mène de l'église de
Sainte-Croix au pont du Gorréquer sur lequel se trouvait,
avant 1590, une des portes de la ville. Il est de tradition

constante à Quimperlé que la dernière maison de la rue, celle '
qui touche à droite le pont, est construite sur l'emplacement
de ,l'ancien château. Cette tradition a pour base une phrase du
bénédictin Dom Le Duc: « Il (le comle Alain Cagnard) changea
donc son chateau en monastère comme c'est la tradition com­
mune, et la grande rue qui est proche de nostre église s'appelle
, " ri Of f' .

(1) Bertrand d'Argentré, chapitre CLXIII, page 330. Dom Lobi-
neau, page 243.
(2 Dom Lobilleau, Preuves; page 371.

encore la 1'lle du . Château. D'Argent'ré est du même sentiment
le'monastère dans sa propre maison (1). »
qu'il·bastit

Mais je préfére le texte de Fr. Jean-Bonnaventure Du Ples-

siez, autre bénédictin de Sainte-Croix, et dont je prépare en ce
moment une édition: « Il y avait. auprt's de son château~ un lieu
nommé Anaul'ot qui avait été donné à saint Guthie1'n pm' le
comte Grallon, où il j'estait encore quelques vestiges de cet
ancien monastère, qu'il jugea très-propres à ce dessein. Ce fut

dans ce lieu qu'il jetta les fondements de l'dgli$e et de ce monas·
tè,'e que, dans son cœur, 'Ïl dédia à la. sain te Croix. »

D'ailleurs, l'inspection des lieux ne permet pas un seul ins-

tant d'accepter la version de Dom Le Duc. La ville de Quimperlé
est très-resserrée entre deux montagnes; l'endroit serait le plus
mal choisi pour l'établissement d'un château; et, en admettant
que le duc de Bretagne ait donné son château pour y établir un i
monastère; les Léonards n'auraient pu détruire une habitation

qui n'existait plus depuis environ 130 ans, et la chronique de
Rhuys dirait: rnonasterium et non casttum luit combutum.

Je crois cependant que ce nom de rue du Château vient de
ce que là se trouvait, jusqu'en 1590; l'hôtel du gouverneur et
peut-être aussi le logement de la faible garnison.
que Quimperlé était très-resserré entre deux mon­
, J'ai dit
tagnes; j'ai toujours pensé que sur l'une ' de ces hnuLeurs
·devait se trouver le château brùlé en 124 J.
Au nord? sur la montagne du Gorréquer et à environ trois
pas de la ville? dans un champ dit Parc-er-Chastel,
cents
on trouve d'anciennes fortifications; examinées de près? elles
ne présentent aucun caractère ' ancien ou du moins pouvant
au XIe siècle, mais on y trouve lous les signes d'une .
remonter
construction passagère d'un camp qui aurait été fait soit lors
de la prise de Quimperlé en 1590, soit même lors du siége de
1378 par le3 Français conduits par Du Guesclin.
Au couchant, au ~delà dl~ la rivière ElIé qui forme la limite
les pays de Vannes et de Cornouailles, se trouve ]a mon-
entre

(f) Histoire de Sainte-Croix publiée par M. Le Men; ' page 1)2.

tagne de Saint-Davy ou, a ma connaIssance, on n a JamaIS
constaté d'anciennes ruines, ~i ce n'est à Trévoazec, à environ
1000 mètres de la ville. .
Au sud il y a bien l'ançJen château ducal de Carnoët, donné
aux Dominicains en 1254 par Blanche de Navarre, mais ce
château ne peut être celui de Quimperlé, pujsqu'il était situé au

pays de Vannes et n'avait aucune communication avec les
biens donnés par Alain Caignal'd et qui sont siLués dans le pays
de Coro'ouailles. '
Au couchailt il y a la montagne de Saint·Michel, bornée
d'un côté par la rivière et de deux autres par le ruisseau de
Saint-Nicolas ou du F1'emeur. Elle est d'un accès très-difficile du
côté de la ville el impossible du côté de la rivière; eUe est

traversé~ par la voie romainR de Vannes à Quimper, signalée

par notre regretté Président, M. Aymar de.Blois. Elle convient
pal'faitement à l'établissement d'un château fort, et c'est même
sur la partie nord-ouest que Guy de Thouars, duc de Bretagne,

const.ruire un château en 12 i 4 ; il en fnt empêché par les
vonlut

abbés. La partie sud· est fortifiée naturellement est aujourd'hui
occupée pat la co'mmunauté des Ursulines. Une position aussi

heureuse popr la défens'e d'une ville n'avait pu être négligée,
et j'ai toujours pensé que là était le château; mais lorsque les ,

filles de Sainte-Ursule vinrent s'établir en cet endroit, elles
firent l'acquisition d'une métairie dite Bel-A ir, et, si, à celle

époque, il exist.ait encore quelques vestiges des anciennes forti­
fications elles durent nécessairement disparaître lors de la
construction de l'édifice et des murs de clôture.
Il Y a environ vingt ans l'administration des chemins v.icinaux
faisait élargir la route de Quimperlé à Moëlan ; à environ trois
de rencios des Ursulines on découvrit un aqueduc
cents mètres
composé de tuyaux de terre d'une longueur moyenne de cin­
quante centimètres, à peu près sèmblables à ceux qui servent aux
travaux de drainage, à l'exception toutefois qu'ils s'emboîtaient
l'un' dans l'autre. Je reconnus tout de suite un travail très- ,
ancien pouvant, je crois, appartenir soit-au lXe soit au Xè siècle

et destiné à conduire les eaux d'une fontaine située au village

de Kerjouano, à environ mille mètres de Quimperlé, à l'endroit
le couvent dês Ursulines. Celle communauté était
occupé par
privée d'eau, des recherches étaient faites depuis plusieurs
pour s'en procurer, et on pouvait admeUre que les
années
religieuses propriétaires de Kerjouauo n'avaient fait cette acqui­
sition que pour se procurer l'eau qui leur manquait. ais il
était difficile sinon impossible à un archéologue de donner à la
construction de l'aqueduc une époque postérieure à l'acquisi-
tion de Bel-Air (26 mars 1665), et cependant on ne pouvait
aux propriétaires d'un ancien château dont personne
l'attribuer
n'avait alors, je crois, connaissance ..
Depuis cette époque j'ai eu en mains tous les titres dé la ,
communauté; j'ai trouvé des marchés relatifs au! diverses
constructions du monastère et des murs. de clôture, je n'ai
trouvé nulle part trace de cet aqueduc et j'ai appris de plus
que la . métairie de Kerjouano n'était devenue propriété des
Ursulines que dans les premières années du XVIIIe siècle:
la dot d'une demoiselle Garnier qui se fit alors religieuse.
c'était
L'aqueduc dont je viens de parler fut de nouveau mis à
découvert lors de la construction du chemin d'accès à la gare,
et cette fois, à une distance tellement rapprochée de Quimperlé,
qu'il n'était pas possible de né pas reconnaître et le point de
départ et le point d'arrivée.
Il restait encore à découvrir la destination et les proprié­
taires du plateau de Bel-Air, à l'époque présumée de la cons­
truction de l'aqueduc, c'est-à-dire vers les IXe et Xe siècles •

J'ai dit que la voie romaine de Vannes à Quimper traversait
le plateau de Saint-Michel. Elle a été si souvent reconnue par
les archéologues sur divers points de son parcours qu'H me
paraît inutile d'insister sur cettedir€ction, et je termine par la
communication d'une découverte récente qui, je crois, doit fixer
aux Ursulines l'emplacement du château ducal brûlé en 1241.
Il Y a environ un mois les religieuses Ursulines, voulant rec­
tifier la pente de l'avetlue qui mène de la place Saint-Michel

à leur communauté, mirent à découvert un chemin dont La
chaussée était composée de très-grosses pierres; je regonnus

de suite une très-ancienne voie. Ce chemin ne pouvait à cette
la rivière pour communiquer avec le pays de
hauteur traverser

Vannes, il devait nécessairement aboutir à ce point pour lequel
il était fait, et à environ trois cents lmètres au' couchant il

. . rejoignait la grande voie. .
Je me résume : Le château ducal de Quiinperlé n'était pas

situé dans la la basse-ville parce que cel endroit n'est pas ce

que l'on recherchait au moyen-:-âge pour l'établissemeùt d'un
et que Fr. Bonaventure du Plessiez dit positivement
castrum,

que. le duc donna pour l'établissement du monastère un terrain

proc.he de son château.

. Ce castrum était placé sur le plateau Saint-Michel à l'endroit
où est aujourd'hui le couvent des Ursulines, parce que cette
position est la plus forte · de Qùimperlé, qu'elle est en commu­
nication fa~ile avec une grande voie romaine, et qu'une' très-
ancienne conduite d'eau indique à cet endroit uu ~tab1issement

important.

Cette communjcation provoque quelques observa­

M. le Président et de quelques-uns des niem-- '
tions de

bres présents. .'

. M. Faty dit qu'il ' sera très· intéressant de repérer

la carte de l'état-major les traces bien nettement
sur

. reconnues de cette. voie romaine; q'ailleurs signalée
par M. Bizeul, il y a longtemps.

M. le Président croit devoir rappeler, malgré l'opi­
nion de M. Audran, qu'il est de tradition à Quimperlé

rue . du Château un édifice que
qu'il existait dans la
le Château, d'·où serait exchisivement
l'on appelait
venu le nom de rue du Château.

cc Le château, dit M. Audran, était sans doute l'ha-

BULLETIN DE LA Soc . ARCHÉOL,' DU FINlfDTÈRE.· T. VII. •

bitation d'un gouverneur ou commandant d'armes
jusqu'en 1590. »
.' Mais alors, réplique M. de . la Villemarqué, ce
serait pas un château, ce serait une maison­
château ne

un, hôtel.
forte ' ou

. - M. Audran: ( Il ne pouvait y avoir qu'un seul châ-
teau, dans le sens de forteresse, qu.i se trouvait sur la

hauteur où ' 'est construit le couvent des Ursulines. »
Se rendant aux ' arguments de' M. Audran, en se

rappèlant qu'effectivement le nom breton est Castel

bihan ( châtelet », M. le Président insiste dans tous les
cas sur la découverte faite dans cette portion de voie
formée de blocs de pierres de figures irrégulières et
de larges dimensions et dont l'agencement a certainè-

ment résisté à une longue suit~de siècles. ,
Il est acquis à l'histoire, dit-il, que Louis Le D'ébon-

naire a assis son camp à Quimperlé. Si vous avez là

les ruines d'un camp, ce sont probablement les traces
de Louis le Débonnaire. Vous fixeriez ainsi un point
parfaitement . inconnu. Le . pourriez-vous? Ce serait

peut-être à cet endroit que les moines de Landévennec,
après la . mort de Morvan, sont 'venus faire leur soumis-
au fils de Charlemagne. .
sion

Si vous pouviez préciser que ce sont des ruines du .
neuvième siècle, vous' auriez fait une découverte im-
portante.
Or, que pouvait être, comme organisation durable et
" susceptible de laisser des traces, un camp retranché, à
l'époque de Louis Le Débonnaire?

, A c~tte question, à laquelle on ne peut répliqllel

. avec certitude, M., Pavot répond cependant que, comme
les armées romaines, les Francs, remarquablement

organisés depuis Charlemagne, marchaient beaucoup
et ne s'arrêtaient pas sans se couvrir par des forti:fi-

cations temporaires, pour la création desquelles un
certain nombre ' de matériaux devaient être partout les
mêmes, .comme on a pu le relnarquer de tout temps, à
savoir: des pieux, du fasCinage, des terres auxquelles
il était possible d'ajouter des blocs de calcaire ou de

granit, de manière à former des espèces de murailles
cyclopéennes' sans le secours d'aucune espèce de mOr­
tier ou ciment. Assiégeant Quimperlé et s'emparant des
hauteurs par des travaux d'approche plus ou moins
facilement construits, Louis le Débonnaire a pu donner
par la suite et en vue d'une occupation qui dev'ait se
plus solide aux positions
prolonger, une organisation
qu'il importait- de conserver sur des points culminants.
Mais, s'il en est ainsi, ces positions destinées à cou-
vrir un rassemblement de troupes assez considérable,

ne devaient pas être limitées au périmètre relative-
et l'occu-
ment restreint d'une forteresse moyen-âge,

pant avait dû se préoccuper tout particulièrement,

pour raison d'alimentation et d'hygiène~ d'englober
une' source d'un débit suffisant
. dans l'enceinte choisie
et régulier. Comme preuve d'une occupation prolongée
et quî mettrait alors hors de doute la question de la
découverte d'uri castrum important, il serait donc bien
essentiel de savoir si la source la plus voisine, existant
encore aujourd'hui, était reliée au point qui pouvait
être le réduit de la position par un canal ou aqueduc
dont le mode de , construction permit d'assigner

date d'une façon à peu près certaine. Or, c'est à ce

point de vue que les débris d'une conduite d'eau très-

ancienne existant· dans les mêmes parages et luise à

- jour lors de la construction du chemin de fer paraissent
avoir été très-opportunément rappelés par M. Audran

et rapprochés par lui .de sa rér.ente découverte d'une
voie empierrée en blocs de. gros appareil. M. Pavot
sur cette importante question de l'eau comme
insiste
condition . première de l'existence de tout oppjdum
gaulois et de tout castrum romain, mérovingien ou
carlovingien; et, entres autres autorités qu'il cite
, d'ailleurs à cet égard, il invoquerait au besoin, au cas
particulier de la Cornouaille, celle de M. Le Men, dans -

ses Etudes historiques sur le Finistère. Notre savant

collègue, en effet, à . propos des oppida gaulois rive-

rains de "la baie de Douarnenez, n"a pas manqué de
men,tionner les vestiges de retranchements accessoires
enveloppant une source et la rattachant à l'importante
position retranchée de Castel-ar-Roc'h, . non loin du

village de Troguer (1). Ce ne serait q~e pour le cas
, d'une forteresse de construction moins· ancienne

(Xe ou XIe 'siècle) que la question d'une conduite d'eau,

suffisamment rapprochée et gardée, pourrait être lais-
sée de côté. Car, à l'inverse d'un oppidum ou cast,rum

plus ancien, il est acquis qu'une forteresSe féodale

destinée à servir de protection à une garnison res-

. treinte pouvait s'alimenter , d'eau à l'aide de puits ou
de citernes sans être obligée d'aller capter ou englober
au loin une source importante.
M. le Président remercie M. Pavot de ces remarques
à propos et constate qu'elles viendraient à
faites si
l'appui de la' thèse d'un établissement carlovingien. Le
castrum qui aurait pu être établi sur l'emplacement

,(1) Le : Etudes historiques sur le ·Finistère, page 82, t ·volume
in-18. Quimper, i87l>. ,

actuel des Ursulines de Quimperlé pourrait donc sans
trop de déraison avoir été élevé par le fils de Charle- .

magne lorsqu'il se croyait maître à tout jamais de

cette partie de la Bretagne, et l'assiette de ce camp
retranché a pu être perfectionnée après le départ de
par un de ses lieutenants.
Louis le Débonnaire

La position de Quimperlé, frontière du pays des

Vénètes et qui ouvrait un débouché sur la Cornouaille

et réciproquement, valait en effet la peine d'être con- ,
servée.

La discussion ne peut , d'ailleurs se terminer ~vant

, que M. Audran, qui en est instamment prié, ait com-
pIété ' sa communication par un plan ou croquis qu'il
promet de donner pour la prochaine réunion.
Il ' ajoute que dans une-communication faite par lui
à la, séance du 3 mars 1877 il a fixé peut-être légè-
rement, en tout cas d'accord avec la tradition locale,
le camp de Louis le Débonna~re dans la commune de

Bulletin de la Société, année 1877.)
Rédéné. (Voir
En l'absence de M. Le Men, lecture est faite de sa
note relative à

, UNE FIBULE GAULOISE.
L',objet que j'ai l'honneur de mettre sous les yeux de l'As­
une fibule gauloise en bronze qui a été donné'e au
semblée; est
Musée déparlemer;:ttal d'archéologie par M. Le Goliès, élève du

, , collége de Quimper.
Les fibules gauloises ne sont pas précisément très-rares dans
notre pays, mais ce qui rend surtout ceHe·ci intéressante, c'est '
sa forme qu~ est celle d'un coq; le réssort de l'épingle , était
placé derrière la tête et elle venait s'agraffer à un crochet

formé par la queue. Elle mesure près de six centimètres de )on-'

gueur, non compris la tête qui manque ainsi que les pattes .