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Bulletin SAF 1876


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La manufacture de faïence de Quimper

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d'hiver, mais qui n'ont été jusqu'ici Bi imprimés ni manuscrits, vous
fixerez soigneusement sur le papier, dans votre dialecte, et vous en
les
. donnerez. en regard, une traduction exacte. .
au'rez des doutes, ce qui ne peut manquer de se p~odûire
Lorsque vous
.souvent, vous, consulterez les anciens et les notables du pays. Je suis
cOllvaincu que MM. les Maires, Curés, Recteurs,Conseillers généraux.
bien
et Conseillers d'arrondissement, etc., vous aideront toujours volontiers.
Le temps que vous consacrerez à ces recherches récréatives, à ces -
études intéressantes, sera bien employé. Vous contracterez, si vous ne
l'avez déjà, et vous communiquerez à vos élèves le goût de l'histoire,
dont l'archéologie est, .sans contredit, le guide le plus fidèle et l'oracle

le plus vrai.
Recevez, Messieurs, l'assurance de mes meilleurs sentiments.

L'Inspecteur d'Acad~mie, C. SURRAULT.
Cette circulaire reçoit l'approbation unanime de
M. le Président remercie vivement M .
l'Assemblée et

l'Inspecteur de l'utile concours qu'il veut bien appor-
ter aux travaux de la Société .
jour appelle la lecture d'un travail de ,
L'ordre du
M. le Men sur la manufacture de faïence de Quimper : .

ACT E DE FAIE CE DE

On a beaucoup écrit sur la Bretagne depuis le .commence-

ment du siècle; de consciencieux érudits ont fait l 'histoire de

ses origine3 et de ses luttes héroïques; tout ce qui se ràLtache

à ses mœurs, à sa littérature et à ses poëtiques traditions a été
recueilli avec un ~oin religieu~; mais on chercherait vainement
dans les nombreux ouvrages qui lui ont été consacrés, quel-
ques notions sérieuses sur l'histoire industrielle de cette pro-
vincp.. C'est aux monographies lOCales à fournir le plus promp-
possible les éléments qui permettront de combler celte
tement
la publication vivement désirée d'une Histoire du
lacune, par
Commerce et de l'Industrie de la B1'etaÙne. .

Mais un fait depuis longtemps acquis, est le peu d'aptitude
industrielle du caractère bre'ton. Si ce fait pouvait être mis en
. doute, il suffirait pour l'établir de rechercher dans chacune de.
nos villes bretonnes l'origine part.icu lière de son commerce.
On le lrouveraitsans peine dans l'Auvergne, dans la Normandie

ou dans la' Gascogne. C'est à la Provence que la Bretagne est
du plus important de ses établissements céramiques .
l'edevable

Jean-Baptiste BOUSQUET .

Vers ' la fin' du t7 siècle un ouvrier pDtier nommé Jean­
Baptiste Bousquet, âgé d'un peu plus de quarante ans, (1)
quittait:le village de Saint-Zacharie (2), au diocèse de Marseille,
pour venir établir à Quimper une manufacture de faïen~e. Il
était accompagné de son fils ainé Pierre', qui venqit d'atteindre
sa âix-neu\'iènH~ année à l'époque de son émigration.
Une semblable tentative de la part d'un simple ouvrier, peut
paraître aujourd'hui bien aventureuse ; mais Jean -Bapti5te
Bousquet n'élait pas un ouvrier ordinaire, et avant d'entre­
prendre ce long voyage, et de livrer aux hasards de la ~pécu­
lation des écollomies péniblement amassées, il avait eu soin de

s'assurer que toutes les chances étaient ùe son côté.
en effet, il n'existait, à proprement parler
A cette épùque,

en Bretagne aucune manufacture de faïence. Les italiens Ferro
Bibé avaient. il est vrai, créé à N:lIltes en 1588 · et en 1625
des fabriques de faïence blanche ; mais après Charles Guér-
me ur, (un nom franchement breton), (3) et Jacque-s Rolland,

(t) Il était né en 1749.
(2) Aujourd'hui, commune' de l'arrondissement de Brignoles départe-
• menl'du Val'. .
(3) Une famille de ce nom, habitait au 18e siècle la paroisse de Loc­
maria, près Quimpel', où furent établis succ.essivement les trois ma­
nufactures de faïence qui existent encort:: aujrJUrd'hui. Je trouve en effet
dans les registœs de cette paroisse, sous la date du 26 Janvier 1737
l'-arte de décèsd'Ul'baue Guermeur, dame du Rhun. .

qui sont mentionnés comme travaillant dans cette ,\'illo ell
16;)4 t il s'écoule près d'un siècle, avant qu'il y soit question de
celle industrie.
D'ul1 autre côté la faïencerie établie au Croisic au 16 siècle
par le Flamand Gérard Demigennes, qui e~t pour sueces,seur
en 1627, l'italien Horacio Borniola, ne paraît pas avoir pros-
péré longtemps. Le champ était donc l)Overt sans concurrence

, à l'industrie de l'intelligent ouvrier provençal.

non moins sérieuses lui désignaient
D'autres considératioris '
t.outes les villes de Brelagne~
Quimper- comme offrant, entre
les conditions les plus favorables pour devenir un ceutre irnpor-

tant de fabrication. L'argile se trouvait en abondanr.e dans les
environs ; sa situation presque à l'embouchure ù'une rivière
des produits,
navigable, facilitait singulièrement l'exportation
en même temps qu'elle permettait de faire venir par mer sans

grands frais, les terres indispensables à la fabricatiOll de la
faïence, et dont il n'existait pas dans le pays de gisement

connu. Le bois de chauffage y était à vil prix, et la main d'om-
vre moins chère que dans aucune autre partie de la BrélRgne.
Le potier provençal avait sans aucun doute compri,s tous les
avantages de cetLe situation, lorsqU'lI vint se fixer à Quimpèr.
Ce fut en 1690 (1) qu'il y élablit ses premiers fourneaux dans
le faubourg de Locmaria, et très-probablement dans les dé­
pendances d'une propriété où les Romains ont laissé de nom-

(t) C'est la date assignée à l'établissement de Jean-Baptiste Bousquet
par Pierre Canssy, dans uu n émoire relatif à la fondation d'une fa­
brique de ,porcelame à Quimper ,document que l'on trouvera à la suite
de cette notice. Ce renseignement eOlleorde assez bien avec la déclara­
tion faite en '743 de\'ant les juges de la juridiction du prieuré de Loc­
maria, par Pierre Bousquet, fils de Jean-Baptiste, « qu'il est estranger
« de cette province, et qu'il a sorti en bas âge de son païs. » (Voir
plus loin). , "
Je dois cependant faire observer que malgré des recherches très-atten­
tives dans les auciens registres de la paroisse de Locmclria, il m'a été
impossible d'y retrollver la. moi~~dre t[ace de la famille Bousquet
avant le 10 mars 1706, tandIS qu'a partIr de cette date ce nom s'y
rencontre très~fréquemment. Je ne :voudrais pas tirer de ce fait une .
induction contraire à l'assertion si précise de Caussy.

breuses traces de leur séjoUl', et qui . doit à cetf.e circonst.ance.

d'avoit' conservé jusqu'à présent Je lJom de Rome. Ses débuts
être fort modestes, car il ne possédait pour toute forl une
. durent

qu'un fonds de deux mille livres. Mais il sut si bien faire fruc-

tifler ce petit capital .par son habileté d'ouvrier et par son .in-
des affaires, que soixante ans après l'établissement
telligence
de sa fabrique, . son fils laissait à ses héritiers pour 4eux ce!)t

. mille livres de constructions (1 ) .

En quittant te village de Saint-Zacharie, Jean-Baptiste Bous-

quet y avait laissé sa femme Elisabeth Brun et un fils nommé
Charles, qui venait à peine de naître, ainsi que nous le voyons

par l'extrait de baptême suivant:
« L'an mil six (cent) nonante et le deuxième juin a été
fils de Jean-Baptiste et Elisabeth '
baptisé Charles B,ousquet,
de cette paroisse, le parein Charles Paul, et la
Brun,. mariez
mareine Anne Forge de la ville de Marseille. .Signé : Vert,
vicaire. " Extrait du livre des registres de la paroisse de ce
lieu~ de Saint·Zacharie (2). » , .
Sa femme était morte depuis longtemps et son jeune fi Is
Charles était venu le reJoÏItdre en Bretagne, lorsque malgré
son âge avancé, il avait alors cinquànte-neuf ans, « Jean-Baptiste
(sic) de la paroisse de Locmaria,
Bousquet, maître-fayiencier
de défunte Elisabeth Brun suivant l'extrait mortuaire de .
veuf
ladite deffuncte _ Lehrup, inhumée dans l'église pJlroissiale de
Saint-Zacharie, diocèse de Marseille, épousa le 19 avril 1708,
de la paroisse de Saint-Mathieu de Quimper,
Corentine Benoist
veuve de deffunt Michel Gogola de Saint-Michel, soldat de la
compagnie de Descoulon, à present de Lescoet du Boschet, dé-

(1) Ibid.
(2) Cet acte est transe.rit à ]a fin du registre des baptêmes, . mariages
et .s'~pu~t?re~ ~e la paroisse de Locmaria, pour l'année .J 707 La copie
J. B. Bousquet,]e 19 septembre 1701, . --- Archives du
a ete dehvree a
bureau de l'état civil de Quimper .

cédé au siége devant Gibraltar le deuxième février de l'année

On peut supposer que ce m~riage ne reçut pas l'approbation
de Pierre Bousquet car sa signature ne se trouve pas au pied
de l'acte. Quoi qu'il ell soit, le vieux fi .ï~ncier ne devait pas

demeurer longtemps dans la nouvelle situation qu'il s'était
créée. On lit en effeL dans les registres de la paroisse de Loc •

marIa:
« Le neufième jour de décembre 1708, a été inhumé dans
de Locmaria, Jean · Baptiste Bousquet, pro­
l'église paroIssiale
tlécédé hier dans la mai-son de Rome de cette paroisse,
vençal,

âgé d'environ cinquante-neuf ans, ayant pendant sa maladie
confessé, c.ommunié et reçu le Saint-Sacremeut d'extrême-
Ont assisté à l'ensépultureHervé Morel, Guillaume Vi·
onction. • •
varc'h, Guillaume Le Cœul'. Corentin Le Pennee et plusieurs
autres lesquels ne savent signer. ' Christophe Fresnet, recteUl'
de Locmaria. )
Jean-Baptiste Bousquet eut la consolation de laisser en mou­
sa. fabrique florissante entre les mains de son fils aîné, Dien
rant
digne sous tous les rapp'orts de continuer l'œuvre que son pèrè
si bien commencée.
avait

Nous ne possédons aucun renseignement particulier sllr le
genre de fabrication de ~ean-Baptiste 'Bousquet, et je ne pense
pas qu'on ait jusqu'ici signalé aucune pièce qui, puisse lui être
Ce qui est certain c'est qu'avant de venir s'établir
attribuée.
à' Quimper il avait travaillé dans les environs de Marseille et de
à Moustiers, où il aurait pu être l'ëlève
Draguignan; peut-être
ou l'émule des Viry ' et de~ Clérissy ces excellents artistes

faïenciers de la fin du t 7 siècle. Il n'y' a dans cette hypothèse -
rien qui doive surprendre, car on est forcé d'admettre que pour
venir' ainsi tenter la fJrtune à l'autre e~trémité de la France, il

fallait que Bousquet fut un ouvrier d'un talent réel. Quoi qu'il

(1) Registres de la paroisse de Locmaria. ' , Archives du bureau de
l'Etat-civil de Quimper .

rI) soit, s'il existe encore quelques œuvres de ce faïencier, e'e~t
datls les f,lÏence,s, conservées clans les anciennes maisons des
environs de Quimper et ,' qui présentent le caraetère dll Mons­

tiers primitif, qu'on peut espérer de les rencontrer. Dans les
signatures de J.-B. Bousqup.t, qùi sont très-nombr'p.uses dans-
les anciens registres de la paroisse de Locmaria, les lettres J 8,
initia les de ses prénoms, sont liées, et la première leUre de son
nom est un b minuscule.

Pierre BOUSQUET.

Né en 1671, il était âgé de trente-sept ans lorsqu'il succéda
à son père dans la direction de sa manufacture. Il avait épousé

avant cet.te époque Elisabeth Hellelle. plus jeun~ que lui de

, trois ans. Comme ce nom n'appartient pas au pays de Quimper

et qu'il m'a été impossible de découvrir dans les registres de la
p'aroisse de Lo~mélfia aucune mention de ce manage, tout porte
à croire qu'il aura été contracté en Provence, et il est probable
qu'il aura profité de cette occasion pour ramener en Bretagne
son jeune fr~re Charles, qui comme on l'a vu plus haut était

avec sa mère à Saint-Zacharie, après le I.lépart dt3 J.-B.
resté
Bousquet pOUl' Quimper. Charles Bousquet ,n'avait que seize
ans à la mort de son père, lI! ais' il est certain qu'il travailla à la
fabrique de faï.ençe avec son frère Cé'.r ils son t qualifiés l'un et
l'aut.re de • potiers)} dans les pièces d'un procès qu'ils eurent à
soutenir en 1718 contre dame Jeanne-Thérèse Freslon de Saint-
, Aubin, prieure de, Locmaria, au sujet d'une somm,e de 61 livres

dont ils étaient redevables à ce prieuré~ pour certains droits de
lods et ventes. ' ,

pl,us hliut que les premiers fourneaux de J.-B. Bous­
J'ai dit
avaient probablement été cqnstruits dans le lieu appelé
quet
Rome, où il était mort après avoir dirigé sa fabrique pendant
dix-huit ans. Avec les minces ressources dont il disposait, il

· avait dû s'établir' non eomme il l'aurait voulu, mais comme il
l'avait. pu. 01' la propriété de Rome éloignée de la rivière et par
coméfJllellL du port d'embarquement. n'était pas un lieu com­
mode pour !'expluil.alin[I d'llIle usine.· Aussi le premier soin de
Pierre Bousquet lorsqu'il succéda à son père, fut-il de chercher
· un nouvel emplacement pour y installer sa manufacture.
11 Y avait à cette époque en face du pont tournf-int de Loc-
maria, qui n'existe plus ,1epuis un siède, un ilôt assez vaste
formé de jardins, de verget's et de vieilles mf-iisons, quelques-
· unes en ruines, et délimité à l'esl par la rue de Penanguer (1),
au sud par la rue Hante, à l'ouest par la rue du 8tivel, et au
nord par le quai ou rivage de l'Odet. La grande préoccuIJation
de Pierre Bousquet, après la mort de son père, parait avoir été
. de -'devenir propriétaire de tout ce terrain afin de pouvoir y

. construire des bâtlml>nts rn rapport avec l'importancA toujours
croissante de son usin e. On l~ voiL en effet poursuivre ce but
une succession d'acquets, de 1708 à 1746. II achète de plus
par

en dehors de cet îlot, en 1740, pour y faire ses dp.pôt.s de corn·

bustibles, une maison et un vaste enclos appelés la maison et .
le jardin de la Folie (2), qui a CtH1Servé cette destination jus· •
qu'à ce jour. Voulant en outre avoir sous la main des ressources

d'un autre ordre et non moins .utiles, il devient en 1738 adjudi.

cataire de la propriété de Rosmaria, séparée de son usine seu-
lement par la largeur d'une rue, el qu'il transforme en laiterie,

y avoir établi des vergers et de grands jardins (3).
après

(1) C'était le nom de la rue qui conduisait du faubourg de Locmaria
la ville de Quimper. et qui formait le prolongement de là rue Haute;
cette dernière portait aussi les noms de rue du Four et rue du Poulraz.
. (2) Il parait que LocIDqria était autrefois, à l'époque du Carnaval
un but de réunion pour les masques, qui avaient coutume de s'y ren­
usage explique peut-être le nom .bizarre donné à
dre pour danser. Cet
cet enclos et à cette maison.
(3) Une autre maison qu'il acheta en t 722 et qui disparut vers
portait Je nom de
1760, lors de la construction du quai de Locmaria,
la Maison Rouye. Cette dénomination se rencontre presque toujours
dans les localités où les Romains ont laissé des traces importantes de
leur occupation. .

Son frère Charles mourut en 1722 (1); il avait -éponsé au
mois d'avril 1710 Marie Saux de la paroisse de Saint-Julien
(rue Keréon) de Quimper, dont il eut cinq enfants. (2) Pierre
.Bousquet, perdait en son frère un auxiliaire utile~ mais une
plus grande douleur lui était rpservée. il avait un fils unique,
né le 4 avril 1713, sur lequel il fondait
Jean-Baptiste François,
pour l'avenir «Je sa fabrique, de légitime~ espérances. La mort .
l'enleva à l'âge de quatorze ans, le 24 avril 1727. Son acte de
décès se termine par ces mots: « Ont assisté à son enterre­
ment ses père et mère et sœurs, les écoliers de la congréga-
au tres. »., .
lion et plusieurs

Son père faisait aussi partie d'une congrégation paroissiale
dès l'année 1718 (3) et le 24 janvier 17 30, il transporta au

profit de la dotation d'une fondation, faite par lui dans l'église
de Locmaria, un constitut qui lui avait · été consenU par Ca­
therine Bougarin, veure ùe Clet Le Miel. (4) Pierre Bousquet
n'avait conservé aucune relation avec ses parents ou ses amis

des environs -de Marseille. Privé du concours de son frère et ne
pouvant suffire seul à la direction et aux travaux de sa manu-
facture, il fit venir pour le seconder un ouvrier faïencier de
Nevers, nommé Pierre Bellevaux. Cet, ouvrier né en 1704 à
Druy, chef-lieu de canton de l'arrondissement de Nevers, ap-

(f) Aveu fourni en t156,pal' Piel'fe Caussy, à la prieure de Loc-
maria. A"chives du Finistère .
(2) Ces enfants sont: 10 Jean-Marie, né le 27 juin 1111 ; 20 Jean­
Francois, né le 28. octobre 17 t 2 ; 3 Marie-Louise, née le t 1 octobre
f113'; 40 Jacques-Françl)is, né le 2 mars 1715 et 50 Françùis, né le6
juillet t716. A partir de cette derniere date, le nom de Charles Bous- .
quet, et ceux de sa femme ~t de ses wfants cessent de fi~uœr dans
les registres de Locmana. J Ignore absolu~ent ~e que ùevmrent ~e~
derniers. Il est bon de -raprocher cette observatIOn de celle que Jal
- placée à la fin de la note t page 37.
(3) Le 14 juin il assiste en qualité de congréganiste à l'enterrement
de Nicolas Brunou, poissonnier.· R,egistres de la paroisse de Lor:-

marta.
(4) Inventaire de meubles fait en 1749 à la mort de Pierre Bousquet.
T.itre du greffe de la juridiction de Locmaria. Archives du ,Finis-

part.enait certainement à une ancienne famille de faï~nciers. Il
.. était fils. de Philippe Bellevaux et de Claude Serrurier. (1) Son
oncle Edme Serrurier. figure dans un acte de t 760 I~) comme

allcien eratrl'preneur de la Manufaclure des terres d'Allgleterre
à Paris. Le même . titre mentionne un autre de ses ,
élublie
oneles Jeéll1-Samuel Serrurier négociant à Never~ et ancien
prévôt de~ juges consuls de celte ville. A la même époque son
neveu Jean-Henri Bellevaux etait établi maître faïencier, à
par·is. et demeurait dans la rue Saint-Martin, paroisse de Saint­
Nicolas-des- Champs. (3)
Pour attacher d'une manière plus étroite son nouveau colla-
borate ur aux intérêts de son établissement, Pierre Bousquet,
le 28 janvier t 731 sa fille aînée Marie-Jeanne en
lui donna,

mariage (4). Cette preuve de confiance désignait suffisamment

(1~ Extrait du registre des baptêmes de l'Eglise de Druy :
« Le t 0 octobre de l'année 1704 a esté bapLifsé Pierre, fils de mais­
tre Philippe Bellevaux, marchand, et de Claude Serrurier, ses père et
1 mère. Son parrain a esté Pierre Godin, sa marraine honneste femme,
Catherine Pière. Desbons, curé de Druy. » Registre des baptêmes,
mariages et sépultures de la paroisse de Locmaria, pour l'anuée
- Archi~es du bureau de l'état civil de Quimper. -
(2) Requête présentée en 1760 au Parlement de Bretagne par Caussy
pour parvenir à la vente de la manufacture de Locmaria. Archives
du Finistère. D'après ce document Edme Serrurier avait à cette date
abandonné son commerce de faïence, et habitait le bourg de Saint-Jean
de ·la Motte pres la Flèche.
Ce faïencier est évidemment le même que celui que M. Jacquemart
désigne seulement par son p.om de baptême, dans les Merveilles de la
3 partie, page 56 ~ « Un mot maintenant, dit-il, sur un
Céramique
la Manufacture royale de terre d'Angleterre.
établissement important
Edme qui la dirigeait en 1749, épousait le 31 aoùt de cette m~me an­
née Marie-Claude Serrurier, fille d'un marchand de drap de Nevers. J)
Marie-Claude Serrurier était probablement la fille de Jean Samuel

Serrurier mentionné plus bas.
(3) Ibid. . Un autre de ses neveux, Grégoire-Jean-Baptiste D upuy
imprîmeur à Paris, rue Saint-Jaequès, paroisse Saint-Benoit.
était

(4) Elle était née le 6 avril 1708. Sa seconde fille sabeth
né~ je 25 octobre 1709, épousa en 1734 Pierre Bérardier j de ce ma­
riage naqui t en 1735, Denis Bérardier, docteur et syndic de la -Faculté

de théolog~e. de Paris, m.or~ ~n 17 9~, ~l'a?d. maître du c?llége Lou~s Le
Grand. VOICI une lettre InedIte qu'Il ecrtvalt en 1760 a son COUSIn P •
Caussy. . .

« Monsieur et cher cousin je vous demande bien pardon si je n'ay

Pierre Bellevaux comme son successeur, et peut nous donner
la mesure de la capacité du faïencier de Nevers. ' Mais cette
union ne fut pas heurpuse. Marie-Jeanne Bousquet mourut le

27 septembre t 740 ; son mal'Î ne lui survécut que quelques an-
nées. Il mourut le 17 juin 1743.
Le 4 juillet sui'vant, le sieur Pierre Bousquet, maitr'e et

propriétaire de I~ manufacture établie à Locmaria, ayeul ma-
de Pierre Belvaux âgé ue six ans f 1), et de ~arie Jeanne
ternel
âgée de neuf ans (2), comparaissait en la juridiction du prieuré

de Locmaria pour demalJder que leur tutelle et l'administration
de leurs biens lui fussent , confiées; et à cette fin il requérait
que tous « les sutTragse des voisins et biens-veillans soit pris,

parce qu'il ne connoît aucuns parents paternels ou maternels

auxdits mineurs, d'autant qu'jl .e:,l estrallger de cette provi.Ilce,

et qu'il a sorti en bas âge de son païs, de même que ledit

feu Belleva1lx, son gendre était aussi extrapl'ovinciaire. 1)

point fait encore de l'épons(l à votre dernière leUre, Depuis huit jours
j.e n'ai point eu un seul instélnt à moi. Les messieurs que j'ai à ma
conférence ont soutenu leurs thèses ; j'ai été obligé d'y présider ,en qualité
de 'm itre d~ conféreuce, Cet exercice finira demain, et je profite mi du
premier moment qlle j'aurai de .libre pour répondre à tous les articles
de vos deux dernières lettres. Cepeudanl comme vous me témoignez
,'al' lequel je déclare consentir à la . ven te de la manu­
désirer un acte
facture, je VOlIS L'em'oie de f,rainte qu'un peu plus long délai n'e fût
prf-judiciable à vos affaires. li
( J'ai enfin reçu une JeUre de mon cousin Bellevaux par laquelle il
me pne de lui 'envoyel' quelques livres, et même des livres de dévo ·
tion. Je souhaite qu'il en profite; je lui ferai au plus tôt réponse. En.
attendant je vous prie de l'assurer de mon amitié, ainsi que mon Crere
et ma sœur. Adieu mon cher cousin, ' la poste me presse croyez moy
toujours, avec l'amitié la pLus tendre votre très-humble serviteur. Il
, « BERARDIER. »

c( De Paris, ce vingt six mars 1760.» Ibid.
Pierre Bousquet eut une troisième fille, Magdeleine-Louise, née le 28
avril 17 t 6 qui ne vécut qu'un mois et demi.
(1) Né le 22 février '737, mort célibataire le 16 Octobre 1787,
(2) Née le 1 mars 173.(. Elle épousa Pierre·Clément' Caussy, en

1149. Outre ces deux enfants, Pierre Bellevaux eut de son mariage
avec Marie-Jeanne Bousquet: 1 Jean-Baptiste, né le 2!'l janvier 1133 ;

2 Marie-Elisabeth, née ,le 25 ,février 1735, et 30 un enfant qui fut seu­
ondoyé le 29 septembre 1740, huit jours avant la mort de sa
let.nent

mere.

Voici les noms des biensveillans qui furent convoqués et qui
se présen tèren t dans cette circonst81ice :
Noble homme Jan·Baptiste Barbé, négociant. .
Noble homme Charles Cossoul, ancien maire de Quimper.
Noble homme Charles Cossoul, son neveu. .
Noble homme Jean Chaumette, marchand. .
Noble homme Simon-Marie Périer, seul imprimeur de la ville.
Noble homme Jan Périer dq Camoing, son frère, marchand
libraire. .
e Guy Ricou, procureur au siège présidial de Quimper.

e Mathieu du Boishardy, aussi procureur.

Me CleUe Férec, notaire royal et procureur audit siège.
Le sieur Jean-Baptiste Bottuel, marchand chapelier (1).
. On p'eutjuger par cette liste de l'excellente position que Pierre
Bousquet avait su se créer dans la bourgeoisie Quimperoise.
Tous ces biensveillans « déclarèrent unallimen:ien t donner
voix et suffrages audit sieur Bousquet, J) qui fut institué
leur 1
tuteur de ses petits enfailts.
A la mort ùe son gendre, Pierre Bousquet était âgé de 72 ans.
Sa fabrique était alors 6 1a seule fabrique de faïence existant eil
Bretagne. Nous en avons la:p:euve dans les documents suivants: '

. «..4 MonsieU1' de Vim'mes intendant de Bretagne.
(( A la Chapelle, le g septembre t 743 .
« Monsieur,
« On demande un privilège pour établir une manufacture de

fayence dans la terre de Dizier, située sur la rivière de la

Loire à 3 heures de la vllle de Blois. Je vous prie d'examiner
si cet établissement ne serait pas préjudiciable aux manufac­
fayence de votre département et de fill3 marquer ce
tures de

que vous pensez à ce sujet.
« ORRY,

, (( Conseiller d'Etat, contrôleur' général des fInan­

directeur général des bâtiments, jardins
ces.
et manufactures du roi. »

(1) Registre du gl'effe, de
du prieu ré de Locmaria. --=""
la juridiction
. J.rchivel au Finistère.

« A Monsieur Orry,
( Rennes 16 septembre 17U .

« onSleur,

Cl Le pl'ivilège que l'on demande ne, peul pas préjudicier aux
manufactures de cette province. Nous n'en avons qu'une établie
à Quimper en basse-Bretagne et par conbéquellt très-éloignée
de ce1le qui fait l'objet de votre lettre du 9 de ce mois.

. u- DE VIARMES (1). » "
La fabrique de faïence de' Quimper devait donc, sans parler
de l'exportation, approvisionner la plus grande partie de la Bre·
tagne. Malgré toute son activit.é il était impossible au vieux
faïencier de suffire seul à cehe lourde tâche.-'Aussi ne tarda-t-
il , pas à s'adjoindre un auxiliaire. Rouen était alors pour la
faïence le centre de fabrication le plus important de toute la
France; une grande vogue s'attachait à ses produits. C'est de
R9uen qu'il fit venir un habile ouvrier nommé Pierre-Clément

Caussy, qui fut pour lui un collaborateur des plus utiles; cela ne

l'empêcha pas de continuer à s'occuper personnellement des

intérêts de sa manufacture, dont il travailla jusqu'à la fin de
sa vie, à augmenter l'importance. '

En 1749, l'année même de sa mort, voyant que l'on faisait à
Rennes et à Brest des essaIs pour l'établissement de nouvelles
, faïenceries, Pierre Bousquet, s'autorisant d'un arrêt du Conseil
d'Etat qui, pour arrêter ., le déboi3ement de la France, interdi­
le royaume la construction de nouveaux fourneaux,
sait dans
adressa à l'Intendant général des finances~ un mémoire aux
fins d'obtenir pour sa manufacture -de faïence un privilège ex-
clusit' dans III Bretagne, pour lui et pour ses héritiers. Vuici la
,cQrr~spondance à laquelle celle requête donna lieu:

(1) Archives départementales d'Ille-et· Vilaine. Ces documents
m'ont été communiqués pdr 1\'1. Fougeray, qui les tient d~ M. le con~
seiller André, de Reuues.

« A Monsieur de Viarmes, intendant de Br.etagne :
Il Paris, le 26 Juillet .74~,

« Monsieur,

ct J'ai l'honneur de vous envoyer un mémoire du sieur Pierre
Bo~squet, entrepreneur d'une manufacture de fayances et pi­
pes -à fumer, à Quimper-Coff~ntin. Il fa~t des représenta­
tions sur la quantité de nouvelles fayanceries qui s'établissent
sans permissioll coritre les dispositions de l'arrêt
journellement

du 9 août t 723 dont il a joint un imprimé. Il se plaint que les
entrepreneurs des manufactures de Rennes et de Bresl déball-
chent ses ouvriers et il en justifiep~r une lettre ci-jointe qu'il a
écrite à l'un d'eux. 11 demande en même temps pour lui et ses
héritiers un privilège exclusif dans la Bretagne. Je vous prie de
vérifier si les représentations du sieur Bousquet sont fohdées,
dan~ quel étal est sa manufacture, et s'il n'y aurait pas d'incon­
vénienl à lui accorder le privilège qu'il demande. Ayez la bonté
de me faire remettre par cet entrepreneur une copie 4e son
privilège et de me l'envoyer avec vos observations et votre avis.
. « TRUDAINE.
(1 Conseiller d"Etat, intendant des finances. »

A Momdeur de Viarmes,

« Quimper. le 6 août n 4~,

ct Monsieur,

" J'ai l'honneur de vous renvoyer le mémoire présenté à

M. le contrôleur général par l,~ sieur Pierre Bousquet, entre­
de la manufacture de fayance et pipes. à fumer établie
preneur
près de cette ville, il y a plus de 40 ans. Il était alors libre, et
il l'a été jusqu'à l'arrêt du conseil d'état du 9 août t 733, à

toutes personues de faire de pareils établissements. Le motif

qui détermina le Roi à les défendre à l'avenir, fut la trop
grande consommation de bois que ces établissements fréquents

et nombreùx ocpasionnaient. Le sieur Bousquet n'a d'autres
privilèges que l'avantage d'avoir commencé son établ1ssement
longtemps avant 1723.
(e Les représentations qu'il fait sur la quantité des nouvelles
faïenceries qui se forment journellement et contre les disposi-

tions dudit arrêté du 9 août 1723 paraissent fondées. Les plaintes

que les entrepreneurs~es manufactures de Rennes et de Brest
débauchent ses ouvriers en leur offrant de plus grands salaires,

sont justifiées par les lettres jointe5 à son mémoire et celles
qu'il m'a encore remises et que j'ai aussi l'honneur de vous
renvoyer.
« Sa manufacture devient considérabla et est en état de
fournir abondamment la province. Elle se" trouve bien située
lle bois sans le renchérir dans le canton. Le
pour être pourvue
port de fller au bO,ut duquel elle est placée, donne toute la com·
modité que l'on peut désirer pour le transporl des fayances et
pipes. Le sieur Bousquet s'attache ayec beaucoup d'application
Ù perfectionner ses travaux, et surtout à trouver les moyens de
donner sa marchandise à bon compte. Il soutient d'abord bien
des familles qu'il occupe et emploie.
cr Je ne vois donc aucun inconvénient à lui accorder le pri-
vil Age exclusif qu'il demande pour lui et ses héritiers; je pense
même qu'il le mérite et qu'en conformité des arrêts du conseil
des 9 août 1723 et 2 février 1734, il doit être ordonné aux
nouveaux entrepreneurs de faienceries de démolir les fours
qu'ils ont fait construire sans permission. .
« FROLLQ DE KERLIVIO,

• et Subdélégué. ))

« A M(,nsieur de Viarmes,

tt A Montigny, le 12 octobre 1749 .
Lpltre de rappel pal' l'intendant dp.s finances, sa lettre du
26 juillet étant restée sans réponse. Il ajoute:

ci: J'ai t'honneur de .joindre ici un nouveau mémoire du
sr Pierre-Clément Caussy, présenté à M. le contrôleur général.

Il fait les mêmés représentations et demande le même privilége
en son nom attendu que le sr Bousquet est décédé •. Ayez la
bonté de pren ceux qui peuvent être relatifs à la demande du sr Caussy et

votl'e avis sur le tout. .
de m'envoyer
. , « TRUDAINE, ,

« Intendant des finances. »

« A Monsieur de Trudaine .

« Rennes, le t 6 octobre 1749 .
u Monsieur,

u Les représentations que fait le sr Bousquet sur la quantité
de nouvelles fayauceries qui se · forment journellement contre
de l'arrêL du 9 août 1723, ne me pàraissent pas
les dispositions
mériter une grande attention. Ses plaintes que les entrepre~
neurs des manufactures de Brest et d~ Rennes débauchent ses
en leur offrant de plus grands salaires paraissent justi­
ouvriers
fiées en partie. Cependant vous verrez par le mémoire ci-joint

du sr Charmoy, de Rennes, auquel/ai donné communication
des plaintes du SI' Bousquet à cet égard, qu'il n'a jamais cher-
ché à débaucher aucun de ses ouvriers qui leur seraient peu
utiles attendu que les ouvrages dont il a entrepris l'essai sont

d'une espèce toute différente de ceux que fabrique le srBousquet.
{( A l'égard du privilége exclusif qu'il demande dans touLe la
province pour' lui et ses héritiers, j'y verrais trop d'inconvé-

' nients à le lui accorder. Tout ce que je crois qu'on pourrait
faire e1Ï sa faveur, ce serrlit de lui d'onner le privilége exclusif

l'éLendue du diocèse de Quimper seulement, sous le nom
dans
de Pierre-Clément Caussy.
« DE VIARMES,

« Intendant de Bretagne (1) .»

Piene Bousquet mom:ut au mois de septemhre 1749, à l'âge
. (1) Ârchives départementales d' Ille-et-Vilaine.
Documents eom-
muniqués par M. le conseiller André.

de 78 ans (1). Sa femme le . suivit dans la tOlnbe quatre ans

tard, le 2 février t 753. Elle était âgée de 79 ans. Si Bousquet
eut en mourant le regret de n'avoir.pas obtenu le privilège qu'il
sa manufacture, il eut au moins la satisfaction
sollicitait pour
de laisser un établissement des plus prospères et admirable-
ment' organisé. Ne voulant pas quitte'!' ce monde sans avoir la

certitude que sa fabrique passerait dalls des mains capables de
continuer la bonne direction qu'il lui avait donnée, il maria,

rannée rnême de sa mort, sa petite fille Marie·Jeanne Belle­
vaux, âgée seulement de quinze ans, avec Pierre Caussy, le
jeune ouvrier Rouennais dont il avait pu apprécier les solides
qualités (2-). ' . . .
Les produits de Pierre Bousquet pendant sa longue adminis­
tration de quarante et un ans, ont dû être fort nombreux. Je ne
pense .pas cependant qu'aucune pièce lui ait encore été attri­

bilée (3), mais il résulte clairement des faits que je viens d'ex­
et peut-être concurrem­
. poser, qu'il travailla successivement,
ment, dans les genres de Moustiers, de Nevers et de Rouen.

Pierre-Clément -CA USSY .

Il était fils de Pierre-Paul Caussy et de demoiselle Françoise
Lamaury, propriétaires et faisant valoir une ~manufacture royale

(1) « L'an 1749, le 19 de septembre, a este entefl'ez le sieur Pierre
Bousquet, manufacturier de ce bourg, âgé de soixante et dix huit ans
ou environs. Présents ont esté Jacques Craon, Joseph Kerloc'h, Berlé­
Lr. Roux et Hervé Le Rescont, qui ne signent.· LE GALL, rec-
lémie
teur. » (Extrait des registres de la paroisse de Locmaria). .

(2) Les fiancailles eurent lieu le 1.4 septembre. cinq jours avant la
mort. de P. Bousquet. Le mariage fut célébré le 30 octobre suivant ..
. Registres de la paroisse de Locmaria.
(3) Notre Musée archéologique possède cependant upe assiette déco­
fée d'une bordure bleue, qui est probahlement sortie des fourneaux de
Pie.rre Bousquet. A sa partie centrale est un écusson portant d'argent
au h'emble de sinople accosté de deux mouchetures d'hermines, avec
Tremens 'I.Ul1.J.m Deum timeo. Ce sont les armes parlantes
la devise :
Bougeant, famille bourgeoise importante de Quimper, 400t un mem­
des
bre le R. P. Guillaume-Hyacinthe Bougeant, de la Compagnie de
Jés~s, ·né dans cette ville en 16lJO, mort ~n 1743, s'est rendu célèbre
par de nombreux. écrits. .

de afïence à Rouell, faubourg et paroisse de. Saint-Sever (t).
Certes, en choisissant Pierre Ca ussy pour lui succéder dans la
dn son usine, on peut dire que Piene Bousquet avait
direction
cula main heureuse. Eu effet, pendant les trente-trois ans qu'il

fut à la tête de cet établissement, il se montra constamment
industriel aussi actif qu'administrateur intelligent.
Son premier soin fut de faire aux bâtiments de sa manufac­
ture d'importantes rép.arations, Il fit aussi construire, outre des
fours à calciner, des fours à faïence, dont nous trouvons la
description suivante dans un procès-verbal d'expert rédigé
au mois d'avril 1760 : .-

•. Et avenu ce jour quinzième avril mille sept cents soixante,
nous susdits experts, nous sommes rendus à la susdite manu-

facture où avons continué nost.re ~comniission en p~ésence de
Monsieur le procureur fiseRI et sur la démonstration dudit sieur

Caussy; et commençants par les fouruaux construits et voutés
en briques dans la susdite maison, disons que le dessous des
fournaux a de longueur vingt pieds et demi, de largeur neuf
pieds trois pouces, et de haut.eur sous clef de voute, six pieds
~rois pouces; que le corps du fourneau a de profondeur dix
pieds, de larg~ur neuf pieds six pouces, et sous clef de voute
dix pieds; que la voute de reverher ou de couronnement a de
longueur on profondeur dix pieds, de largeur neuf pieds six '
de hauteur sous clef .de. vonte quatre piflds et demi;
ponces, et

le tout prisé, compris fosses au-dessus' de la voute de rever-

ber, maçonnages en pierrlils et brique, ouvertures voutées et

(1) Requête adressée au Parlement de Bretagne en 1760, par P. Clé­
.. ,ment Caussy, pour parvenir à hl. vente' de sa manufacture de Locmaria,
Archives du Finistère. Voir aussi le registre de bllptême, etc., de la
paroisse de Locmaria pour l'année 1149.

Jean Caussy, gmnd-pèr'e de Pierre-Paul, né en 16 .. , épousa Anne
Rabièt'e, à Clermont, en Languedoc. Paul Caussy, . père de ce dernier,
à Rouen. Pierre-Paul Caussy, né
né en t659, épousa Françoise Pralon,
à Paris en 1695, s'était marié à Rouen en t719. Son fils Piene-Clément
avait doue moins de trente ans lorsqu'il prit la direction de la manu­
facture des Bousquet, Généalogie de ta famille de la H-ubaudiêre,
communiquée par Mlle Stéphanie de la Huhaudièl'e, '

soupiraux en fac,e desdits fournaux, la somme de treize cents

quatre vingts seize livres. »
« Nous avons ensuite passés dans la vieille maison à four, et
y avons, vu des . fours et fournaux faits à neuf, et construits en

brique; le four de dessous a, quatorze pieds de profondeur, sur
sept pieds de large, et six pieds de hauteur sous clef de vou te;

le corps du fourneau a sept pieds et demi en quarré, sur huit
pieds et demi sous clef de vou te, et le fourneau de reverber a,
sous def de voute, trois pieds et demi de hauteur, et sept pieds

demi an quarré; le tout pr,isé valoir pOur fourniture et façon,

la somme de six cents cinquante et six livres. »
« La platte-forme de pierres de taille, faitte à neuf, avis du

corps du fourneau prisés trente et quatre livres. »
« IJes foumaux à calciner situés joignants et au nord des pré,'
cédenls fours, prisés valoir au total avec leurs soupiraux et au-

tres éligements, mesmes ~ai8ses de brique au-dessus, la somme '
de trois cents livres. ,»

« Les cinq caisses en bois placées au-dessus desdits four- .
à calciner prisés valoir cent huit livres (1). ) .
neaux

Il Y avait à peine dix ans que Caussy gérait son usine avec
un succès toujours croissant lorsqu'il perdit sa femme le 13 juil-
1759. Cet te perte le mit dans un grand embafl'as. De ce
let
mariage étaient issues deux filles, Marie-Perrine-Elbabeth­
Françoise, âgée de huit ,ans, et Marie-Antoinette, âgée de treize
mois (2), qui hél'ltaielH naturellement des droits de leur mère
dans la fabrique de faïence. D'un autre côlé sa mère, qui aidait
son père alors âgé ,de soixante dix ans et infirme (3), dans la

(1) Procès verbal dressé en !'160, des réparations faites par P. Caussy
à sa manufactme. ' Titre du Greffe de la juridiction du prieuré de Loc-
maria ' Arch-ives du Finistère.

(2) Il avait eu aussi un fils, Pierre·Jean, né le 23 décembre 1754, mort
le 26 décembre 1756.
(3) Il mourut en 1761. Deux ans avant sa mort il avait fait abandon
ses infirmités ne lui permet­
à son fils de sa manufacture de Rouen que
taient plus de gérer. Dans sa requête adresée en {760 aux juge3 du
prieuré de Locmal'ja pour parvenir à la vente de la manufacture de I;ette ,

direction de sa manufacture de Rouen, mourut presque en '
même temps que sa femme. Il se trouvait donc ainsi dans' .
la nécessité d'opter entre la manufacture de S011 père, qui lui
la fabrique de faïence d~ Quimper, dont il
appartenait déjà, et
était propriétaire pour un quart. Son hésitation ne flit pas de

longue durée. Il opta pour la manufacture de Quimper. Après
de longues démarches, il fut autorü:é à la mettre en vente en la
juridiction du prieuré de Locmaria, et le t8 juillet 1760, elle
-lui fut adjugée pour la, somme de 30,000 1ivres, et à la charge
de payer au sieur Jean-Marie Bellevaux son beau.frère, une rente

foncière de sept cent uue livre cinq sols (1).

L'avis qui fut affiché à l'occasion de cette vente dans un cer-

Iain nombre de villes du royaume nous fait connaître la situa-
tion dans laquelle se trouvait alq.rs cette usine, et les divers
genres de travaux que l'on y exécutait. En voici le texte:
Cl La manufacture de Locmaria par la nature 'de ses bàtimens
immenses, la grandeur de ses fournaux, au nombre de deux, et
un troisième commencé, construits dans le goût des fournaux

du Languedoc et de Provence, est une des plus considérables
manufactures du Royaume. Elle occupe plus de soixante ou­
vriers habituellement; l'on y travaille dans les genres de Rouen,
Nevers et autres fabriques. L'on y fait aussi .de la poterie tine,
et des pipes à fumer de diverses espèces; enfin l'on trouve, dans
celte manufacture réunis presque tous les genres qui peuvent
en assortir le commerce. La manufacture de Locmpria est uni­
que dans le païs. Le commerce intérieur de la province y est
considérable, les marchands viennent journellement à Loc·Maria

dernière localité, Pierre-Clément Gaussy nous donne les motifs qui l'a­
à venir se fixer à Quimper;
vaient déterminé

(1 Le suppliant, dit-il, avait une sœur à, laquele il était assez attaché
pour vouloir lui procurer un mariage avantageux eu lui sacrifiant cet
C'est ce qui a fait qu'il en a
établissement (celui de Rouen tout formé . .
recherché un en Bretagne, en épousant une des petites filles des sieur
la sœur du suppliant est décédée dans le
. et demoiselle Bousquet. Mais
célibat, etc. l) .
(1) Titre du prieuré de Locmaria.' Archiv6S du Finistère •

de trente à quarante lieues à la ronde; le port de mer de
Quimper facilite aussi un grand commerce avec l'étranger. Ceux
qui voudront avoir un . détail plus a-mple, 'pourront s'adresser
au sieur Pierre-Clémetit Caussy, directeur de la dite manufac-
ture de Locmaria 1) (1).
ReE-lé veuf avec deux enfants en bas-âge, Caussy qui était à
cette époque à peine âgé de 40 ans, ép'Ousa au mois de janvier
1761, Josèphe Boucher, fille de noble homme Pierre Boucher,
négociant à Quimper et de demoiselle Françoise Le Hir, de la

paroisse de Saint ·Mathieu de cette ville. Il eut de ce mariage

(2) qui moururent jeunes .
deux enfants
Il s'appliqua ensuite à apporter à sa manufacture de sérieuses

améliorations. Une des plus importantes fut l'acquisition qu'il
fit, le 7 novembre J 762, du moulit~à eau de Locmaria, pour
broyer les couleurs. Cette opération s'était faite jusqu\'l-là dans
l'intérieur de la manufacture, au moyen de deux chevaux aveu-

. gles, et nécessitait une dépense considérable. En 1764, il ohtint

du duc de Penthièvre, engagiste du domaine de Quimper, l'af­
féagement de terrains maréç,ageux qui s'étendaient sur les deux

rives de l'Odet, d'un côté depuis le moulin de Locmaria jus­
qu'au ruisseau de Melgven, et de l'autre depuis le -pré nommé
Pratanros, ou pré de saint Colomban, à Locmaria, jusqu'au
bois de pins appelé bois de Neptune, dépendant de la terre de
Lanniron. Son intention était de défricher ces terrains et d'y
faire des plantations, qui devaient fournir une partie du bois
nécessaire à l'alimentation de ses fours .
Vers cette époq'ue eurent lieu en Bretagne plusieurs tentatives
d'établissement de nouvelles fabriques de faïence. Sans parler

de l'essai infructueux fait à Brest (3), un sieur Tutrel avait obtenu

(1) Ibid. ' Cette affiche avait été rédigée par Edme Serrurier, dont
il a été question plus haut page 43.
(2) Pierre .. Thomas, né le 29 octobre 1762; et François-Marie, né le •
6 août 1765. " ,
. (3) Voir plus haut page 46. - .

des Etats dp. Bretagne en 1750, un prêt de douze mille livres
pour dix ans pour l'établissement d'une ma,nufactùre de faïence
dans la ville de Rennes. Le sieur Tutrel étant mort, ce prêt fut
continué pour la même période de dix ans au sieur du Lattay,
maître chirurgien,par délibération des Etats du 3 octobre 1762( 1).
Par une autre délibération du 20 février '1769, les Etats acçor-
dèrent aussi à titre de prêt et pour six ans seulement, sans in­
une somme de douze mille livres, au sieur Le Clerc, ac­
térêts,

quéreur de la manufacture privilégiée du Roi, établie à Rennes,
sur le chemin de Saint· Laurent. Mais cette entroprise du sieur
Le Clerc JlI~ paraît pas avoir réussi, malgré sa subvention, car
il essayait l'année suivante de vendre son usine dans les affiches

de Nantes, et les Etals par délibération du 16 octobre 1770
chargeaient leur Procureur général syndic de veiller à la con-

servation de l'hypothèque du prêt de 12,000 livres qu'ils avaient
fait à ce manufacturier. Le sieur Le Clerc était mort en t 714 (2).
Un autre essai qui n'eut pas plus de succès, iut celui de la
création d'une fabrique de faïence à Quimperlé. Elle fut le

résultat d'un acte de société passé le ter ocLobre 1763 entre

Yves Le Béchennec, potier, (3) et le sieur Jean-René Lalau,
,sieur Dézautté, procureur du roi à Quimperlé, maître René-

Cathe\inais-Duchesnay, notaire et procureur audit siége royal,
le sieur Gabriel Audren, demeurant au Bourgneuf, en la

même ville. Cette usine produisit quelques jolies pièces (4).
Mais sa fabrication ne fut pas de longue durée, car l'acte de
société que je viens de citer, fut résilié le Il octobre 1765 (5).

(1) Sa veuve dirigeait encore cette usine en 1788 •

(2) Procès-verbaux de la tenue des Étals de Bretagne de 1750 à 1774
(3) Ce potier était sans aucun doute origin~lire de Locmaria, et avait
dù. y apprendre l'art de la faïence du temps de Pierre Bousquet. Je
trouve, en effet, dès le con' mencement du XVllle siècle, une famille
Le Béchennec, établie dalls cette paroisse, et en rapports fréquents avec
l~ directeur de la manufaeture. ' Registres de la paroisse de Locmaria.

(4) Entre autres une charmante suspension â reliefs, rehaussée de
à l'exposition bretonne et que M. Jacquemart cite
couleurs, qui figurait
Merveilles de la céramique, se partie, page . t38.
dans les
(5) Voir le texte de cet acte de résiliement à la fin de cette notice .

Il étaÏl difficile en effet de luHer contre la fabrique ùe Quim­
une existence de plus de soixante ans, avait
per qui, pendant
su se créer une clientèle nombreuse et solide. Mais d'autres
motifs suffisent amplement à expliquer l'insuccès de ces nou-
veaux établissements. Qui voyons-nous en effet à l~. tête d'une
des manufactures de Rennes? Un maître chirurgien! A Quim­
perlé, c'est un procureur du roi et un notaire! Quelles chan­
ces de réussite pouvaient avoir des manufactures dirigées par
de si singuliers patrons? Voici ce qui arrivait très-probable­
ces bizarres associations. Alléchés par l'appât du
ment, dans
gain considérable qu'une fabrique conduite avec intelligence •
pouvait rapport0r, les sociétaires jetaient dans l'entreprise
de livres qui suffisaient à peine à couvrir les
quelques milliers
premiers frais d'installation. Ils faisaient venir ensuite un hon
ouvrier faïencir,r qui produisait quelques belles pièces, desti-
nées à ·servir d'enseigne ou de réclame à la nouvelle fabrique,
Mais comme les clients 'n'arrivaient pas, et q~e l'on ne se sou­
pas de faire de nouvelles mises de fonds, l'entreprise
ciait
et les sociétaires s'empressaient d'en sauver les . ,
sombrait.

epaves.

Tout autres étaient les conditions dans lesquelle's fonctionnait

la maÎlufactuf{~ de Quimper. Sans parler des Bousquet et des
Bellevaux, qui étaient tous gens du métier, Pierre Caussy était

ce que l'on appelle vulgairement un enfant de la balle. Fils de
faïencier, son père l'avait élevé pour la faïence; et à ce point
de vue il lui avait donné une excellente éducation pratique,
qui servait admirablement bien un jugement droit et une vive
intellîgence des affaires.

En t 768, Caussy obtint du parlemenL de Brètagne un ,arrêt
qui l'autorisait à vendre ses faïences et ses pipes, tou~ les

jours indistinctement, dans toutes les villes et bourgs de la
Province. (1). Il ne pouvait, avant cette époque, exercer son

(t) Voir cet arrêt à la fin de cette notitc .

commerce dans . ces localités que les jours de foire et de
marché.
Sa fabrique de faïence ne fournissant pas un alim'ent suffisant

à son activité, il sollicita dans un mçmoire fort curieux et très

instructif, conservé dans les archives de la manufacture de
Sèvres J (1) l'autorisation d'établir à Quimper une fabrique de

porcelaine. Cette autorisation ne lui fut pas accordée. Il était
à Chaurey (2) et à Sauvageot d'établir à Lorient, vingt
réservé
ans plus tard, une manufacture de porcelaine, hélas! bien
éphémère. . .
Outre les ouvrages de faïence, la manufacture de Quimper
comme on l'a vu plus haut, une
fabriquait depuis longtemps,

immense quantité de pipes. Caussy avait perfectionné ce genre

1 de fabrication, et dans son mémoire de 1770, il se flattait de
pouvoir imiter bientôt les Hollandais et les Anglais. (3)
La manufacture de faïence dirigée par M. Fl)ugeray, à LOI~-
maria près Quimper, . possède un ;ouvrage ' qui a pour titre:

T'raité de l'art de la faïenee, par Caussy. Ce travail; .rédigé

. (t) Voir à la fin de cette Notice, ce mémoire qui a étél communiqué

par M. le conseiller André.

(2) Comme Le Béchennec, ' dont J'ai parlé plus haut, Chaurey a dû
apprendre à la mçlllufacture de Locmaria l'état de faïertcier, sous la
direction de Pierre-Clément Caussy, qui a pu l'initier à l'art de 'la
porcelaine. O n voit, en effet, figurer dans les Iegistres de la paroisse
de Locmaria, pendant tout le t S8 siècle, une famiHe, dont un des mem­
bres, le sieur Jacques Chauray, maître-pilote sur les vaisseaux de Sa
Majesté, comparait comme témoin ou comme parrain, en 1713. et en
17.5, a.ans les actes de baptême de deux des enfants de Charles '

Bousquet. Une branche de la famille Chauray habitai.t l'Ile·Dieu~ au
diocèse de I..ucon. . .

, (3) Voici, d'après un inventaire de 1759, les noms des diverses es­

pèees de pipes qu'on fabriquait alors à Lo.cmaria :
1 Pipes, ancienne fabrique. dites à la capucine ou sans talon, à . t 2
sols la grosse. .

2° Pipes â cachet, très ancienne fabrique, à 10 sols la grosse.
3° Pi pes dites à tête longue, à 12 sols la grosse.

40 Grandes pipes dites au B, à 12 sols la grosse:

50 Grandes pipes à talon pointu, à t 2 sols la grosse.

6° Pipes courtes dites Ganif.
70 P~pes dites de Dunkerque, à 1 livre tO sols la grosse. .
8° PIpes communes, moyennes et petites, nouvelle fabrique, à 20 sols
la grosse. .

en 1747 t forme ut:l ma!}uscrit in-folio de 39R pages, entière­
de la main de l'auteur. Dans son avant-propos, il
ment écrit
expose ainsi la distribution de son livre:
cc J'ai travaillé en différents pays et de diverses manières, ,
~e qui m'a donné de l'expérience dans mon art; c'est aussi
ce qui m'engage à écrire sur, ce sujet, afin que ceux à qui de
droit mes papiers seront remis trouvent des éclaircis~ements
,dans bien des occasions.
« .Je ne me pique pas de bien écrire; un homme sans études

. s'explique comme il peut; ceux qui ne le trouveront pas bien
le corrigeront. »
« Je partagerai ce livre en quatre parties. »

u: La première traitera de tous les ustensiles nécessaires à
-une manufacture de faïencerie, leurs plans, la construction des

fours tant à l'usage de Rouen) nommés fours à gril, que de
ceux à l'usage du Languedoc, nommés fours à gorge. »
. « La seconde traitera de toutes les matières entrant dans la '

faïence de toutes espèces; comme on peut connaître les défauts
d'aucunes et la manière de les corriger. J)

(l La troisième traitera de la préparation des terres ct autres ,
matières, leurs compositions, ainsi que de toutes les couleurs
émaux quels qu'ils soient; et pour quels pays et usage de

cuire que Ce puisse être.

« Je traiterai aussi dans cette partie de la poterie, parce
qu'un fabricant peut se trouver dans des pays où les matériaux
ne sont pas encore découverts; entre temps qu'il fait des'
essais; par là il évite des pertes considérables et inévitables
. dans les nouveaux établissements.
« Je traiterai aussi de la porcelaine et pierres fausses, non
pour qu'on en puisse tirer de gros avantages, cela ne fesanl

qu'amuser et perdre un Lemps plus utile à autre chose, mais
seulement pour contenter la curiosité. » .
« La 'quatrième traitera des soins que doit prendre un fabri-

caot dans la' fabrication des pièces, la conduite nu feu aux
fourneaux et de' celle des ouvriers, et généralement de to~ute la
manufacture; comme on pp-ut remédier aux événements fâcheux
qui arrivent,. souvent tant par la faute des ouvriers, que par le
défaut des matières.
« La cinquième partie traite de la conduite des ouvriers, des

ouvrages ùes tourneurs et peintres, des moules, comme il faut

mouler, de la fabrication des couleurs, de la peinture, de la
manière dont il faut c_ oucher les ,couleurs, conduite des feux,
etc., elc. ' .
On avait pensé que ce travail pouvait être l'œuvre de
Pierre-Clément Caussy; mais outre qu.'à l'époque où il fut ,
ce dernier n'avait guères plus de vingt-cinq ans, et que
écrit,
!'oùvrage révèle un homme d'une expérience consommée dans
son art, il résulte d'un pêlssage ' du manuscrit, que l'autem'
habitait Rouen et qu'il dirigeait uné manufacture dans le fau-
, .bourg Saint.:..Sever de cette ville (1). L'auteur du Traité de_
, l'art de ' la faïence est donc Pierre-Paul Caussy, le père de
Pierre-Clément, à qui il légua son remarquable ouvrage. Il est
hors de doute ,que ce livre fut pour le faïencier de Quimper, un
guide des plus utiles, et qu'il y puisa les renseignements qui lui
permiren t d'imiter, avec une rare , perfection, les produits de ,

Rouen. .

La public;ltion du manuscrit de 'Pierre-Paul Caussy serait un
véritable service rendu à l'art de là céramique. Il serait ~
souhaiter que dp,s considérations peut-être exagérées d'intérêt

privé, ne fussent pas un obstacle à cette publication. En atten-

dant que ce vœu se réalise, on lira sans doute avec intérêt, les
lignes s,uivantes qui, sous la rubrique ': De la conduite des
ouvriers, fournissent de curieux renseignements sur la condi­
, tion des ouvriers faïenciers d'une des manufactures de Rouen,
au milieu du dernier siècLe; condition qui dût être la même

(1) « Le faubourg Saint-Sever où je suis étahly, est fort sujet au débor-
je suis yest fort sujet. » ,Traité
dement de la rivièl'e; le quartier où
de l'art de la faïence, par Caussy, Ive partie, chap. 19, page 316.

pour les ouvriers de la manufacture. de Quimper,
sj, comme -
tout porte à le croire, Pierre-Clément Caussy mît
en pratique

les excellents conseils de son père.

De la conduite des ouvriers .

« C~ n'est pas un ouvrage aisé d'entreprendre à gouverner
les ouvriers d'une manufacture de sorte qu'ils fassent ce qu'il
convient en temps, qu'ils ne se débauchent et soient assidus';
ces sortes de personnes n'ont pour la plupart que leur intérêt
en vue; peu sont portés pour le profit du maître, et beaucoup
sont grossiers, surtout les journaliers. »
u Mais pour peindre leur caractère faut les mettre en trois
classes, la première sont les ouvriers tourneurs et peintres. »
« La seconde sont les mouleurs qU'on traite d'ouvriers, mais
qui sont sortis la plus grande partie du çorps des journaliers. J)
fi La troisième eslles journaliers. J)
ft Les ouvriers qui forment la première classe sont à leurs
pièces et travaillent à t.els genres qu'ils ve~lent. Ils font quatre '
années d'apprentissage sans rien gagner, nourris 'et entretenus
à leurs dépens; autrefois Ct3S corps étoient remplis, ou des fils
d'ouvriers ou des fils de niarchands déLailleurs, des gens qui
, vivoient du peu de biells qu'ils avoient, enfin d'un certain
nombre de personnes hors de la populace, aussi étolent-ils très·
polis, mais fiers et aisés à prendre la mouche, et se soulever
tous ensemble contre le maître; faire des cab3les, enfin faire
les ouvrages, surtout les peintres de la façon qu'ils vouloient ;
ne pas souffl'ir faire d'élèves; les chasser de la manufacture,

de prendre des ouvriers étrangers, et autres choses
empêcher

de cette nature; cela leur éloit ordinaire, un mHÎtre étoit
obligé d'en passer par là; àujourd'hui ils ont bien les mêmes
inclinations, mais ils ne peuvent plus se cabaler, se mutiner,

depuis que j'ai fait rendre diverses ordonnances de Mgr l'In-
tendant, et enfin un règlement qui, à la vérité, n'ont pas sorti

mais qui est· prêt d'en sortir à la premwre reqUIsl-
du ' Conseil,
tion. })
. « Le nombre d'élèves qu'on a été obligé de faire pour
former des ouvriers dont l'espèce manquoit, a fait qu'on a pris
des fils de toutes sortes de gens ;la politesse a diminué dans ce

corps, mais l'autorité du maître a pris le dessus. J)
«( Les temp5 fâcheux au commerce y.a beaucoup contribué.

Je ne doute pas que si on ,avoit de bons règlements, ils ne re-
mueroit dans un temps avantageux. On parle poliment à ces

Messieurs, et c'est la bonne manière. »
« J'ai parlé de la ' misère du commerce; nous y sommes -dans

ce . temps que j'écris, année 1747. Je ne doute pas que dans un
hiver facheux on pourroit leur faire faire plus de fasçons aux
piesces tournées et plus chargées de peintures, et plus recher­
les peintes. Mais cela seroit injuste; il faut avoir des
chées sur
égards pour eux, et ne pas sortir de l'équité, sy vous voulez qu'a
leur tour ils en fassent autant. »

CI Il est aussy très injuste de diminuer le prix des ouvrages
ordinaires; si quelque nouveau gout se présente il est juste de
voir s'ils approchent du commun, de la broderie. du très fin~
affi.n de· reigler un prix juste comme j'ay fait pour un dessein
que j'ay inventé, que j'ay appelé demi fin. Après en avoir fait
plusieurs piesces, j'y. ay mis un prix juste et même avantageux
à l'ouvrier. Ordillairement lorsque vous diminuez les prix ou
chargez les ouvrages, ce sont les marchands et le public qui en
profitent el non le fabriquant. C'est ce qui s'est vu lorsque

l'on n'a donné aux peintres que 50 sols de la douzaine de bro-
derie, au liéu de trois livres qu'ils avaient. Cela a donné lieu à
plusieurs maîtres à diminuel' le prix de leurs marchandises, et

ils ont profité de cette diminution. C'est prendre du mercenaire
pour donner au public. Cependant sy les prix diminuoient dans
une manufacture, il faudrait nécessairement suivre l'exemple,
parceque vous ne vendriez pas vos marchandises, mais ne soyez

jamais le premier. »

te On ne peut faire à Rouen trop d'élèves depuis le règlement

qui est au Conseil. Il n'est permis à chaque maître de n'en •
que tro~s, de quatre en quatre ans; encore seulement
prendre
des fils d'ouvrier, à moins qu'il en manque. Cette règle a été
faite à l'.occasiondes manufacturiers de Marseille, qui surchar-

geoient la pl'Ofession tt'élèves, dont les ouvriers portfll'ent leurs
au Conseil de cette surcharge. ~l en est arrivé du mal
plaintes
à la manufacture. Plusieurs ouvriers sans ouvrage se sont répan­
dûs en plusieurs vÜles d'Espagne et à Malte, y ont établi des
manufactures et le commerce en a souffert. Il est donc aussi
dangeL'eux de faire trop d'élèves com5Ue d'en faire trop peu. )
« Il ne faut être avec ces Messieurs ni trop doux ni trop dur,
pas trop r~servé el caché, mais pas trop ouvert, Il ne faut pas
aussi badiner avec eux, afin qu'ils ne soient trop familiers. Allez
souvent dan~ leurs appartements tant pour voir ce qu'ils font
que pour qu-elquefois entrer en conversation avec eux; de temps
en temps se trouver aux_ repas qu'ils font- . Cette conduite leur
donne un grand respect pour vous, et quelque peu d'amitié. Ne
vous exhalez jamais en injures contre celui qui manque à son
devoir. Comptez avec lui et le congédiez; et s'il a manqué à
quelque chose essentiel ne le reprenez pas, quels ami::; qu'il em­
plo.ye pO\lr rentrer da.ns la manufacture. Cette fm:meté vous fera

se gardera de manquer. »
craindre et chacun

« Il est dangereux de devoir beaucoup aux ouvriers. Il est
vrai que dans un temps fach-eux on ne tarde pas à s'endetter
avec eux, surtout les peintres. Comme ils gagnent depuis vingt
livres jusqu'à dix par semaine. l'argent étant rare, on ne peut

somme. On est obligé plU faute d/argent de ne
leur payer cette
leur donner qu'une somme modique par semaine, ce qui fuit
qu'on ne larde pas à àccumuler. Il faut en ce cas cesser de fairé
des ouvrages finis et s'arrêter aux ordinaires, parce que ce sont
ces finis qui occupent beaucoup d'ouvriers, et qui forment une
grosse somme en peu de marchandises. Comme il manque de

ces ouvrages au four, que le moindre petit défaut les fait rebu-

. tù, vous avez un fond de magasin qui est un argent mort dans
le mauvais temps, et avec quoy vous ne pouvez payer les ou-

vriers. Il est. donc bon de se retrancher tant du nombre d'ou-

vriers qUè de l'ouvrage qu'il faut faire en ordinaire, jusqu'à ce

que le . commerce prenne vigueur. Par là vous ne' vous endet-­
terez que peu, car quand vous devèz aux ouvriers, ils sont bien
plus fiers, et se croyent en droit de faire ce qui leur plaît; du
moins donnent-ils bien du chagrin aux maitres. C',est ce que
nous voyons tous les jour~ aniver à quelques maîtres que les
ouvriers ont fâit assigner, ou venir devant Mgr. l'Intendant;
outl'e qu'ils publient partout qu'il leur est dû de grossessommes,
'Ce qui fait un très-mauvais effet. Il est cependant bon de leur
devoir quelques petites sommes, comme de soixante livres cha-

cun; et me me en tout Lemps, parce que eest uu fond de se-
cours pour eux, soit pOUl' les soulager dans leurs maladies, celles

de leurs femmes; et autres besoins qu'un maitre aurait peine à
refuser ce secours nécessaire, dont il se trouverait en avance et
même en risque de perdrè ce qu'il auroit donné, si l'ouvrier

mourait, ce qüi est arrivé souvent. » ,

. (e' Les 'moule~rs (sont à leurs pièces' comme Jes ouvriers,
on ne leur accorde pas ce titre, et dans les tirages,
cependant

de la milice, les garçons ne sont pas exempts de tirer au sort,

lQrsque les tourneurs et peintrAs ont ce privilége par les repré-
sentations que je fis à Mgr l'Intendant. lors de la première mi~
lice; et comme il me demanda la différence qu'il y av oit dans

nos ouvriers en général, je fus contraint de lui 'dire la védté et
d'en faire trois classes; Il exempta la première, et fil tirer au

sort les deux autres. )
« Pour les journaliers, ou ne sait quelle conduite telür avec
eux; ce sont des âmes.basses, très-grossiers, d'un yil intérêt,
_ prêts à tout sacrifier 'pour un sol ~ St vous êtes généreux aveé

eux .et que vous leur fassiez quelque gratification dans leurs
nécessités, ils s'imaginent que, cela_leur est dû, et par la suite

-. ils murmurent si vous ne continuez; soyez trop doux et trop

humains ils VOlIS mépriseront; faites leur amitié ils se croiront
utilesret.; que vous ne pouvez vous passer d'eux; et il arrivera
que lorsque vo.us serez pressé d'emJ:llir le four, ils se plairont
d'aller boire. Ils y sont tous enclins; ainsi il y a beaucoup à
souffrir, car 'après tout, on ne peut se passel' de ces gens; un
bon enfourneur, un habile retoucheur, etc., sont très-u liles. »
« Je ne sçay et n·e saurai jamais de quelle façon il faut s'y
prendre pour se faire aime~ de ces gens; ils n'ont que la crainte
de perdre leur poste qui les conduit, c'est-à-dire quand ils l~e , .

trouvent pas mieux; car si une mal1lifactul'e a besoin de ma-
aussit6t tout se remue pOUl' avoir une augmentation
nœuvres,

et pour un sol ou deux, tous ces gens vous quitteront avec
grande joie, sans se ressouvenir des bienfaits que ' vous leur
ils auront encore plus de plaisir s'ils vous
aurez prodigués;

,voient embarrassés à former d'autres sujets aux ouvrages qu'ils
Ils envient et sont jaloux de votre position. Rien n'est
fesoient.
donc plus ingrat que ces hommes. Ainsi, c'est être, leur dupe

que de leur donner plus qu'Il ne leur est dû , » ,
u Soyez juste et les recompensez s'ils font quelque3 ouvrages

outre les heures ordinaires; recompensez-les des corvées dans
les grandes chaleurs; donnez .. leur quelques coups a boire à
ceux qui gardent les fours ou quand ils font quelques ouvrages
fortes et pressées, cela 'est bien. mais n'en faites pas habitude
Gar ils croiraient que cela) eur est dû. Soyez ferme avec eux;
de la patience, il en faut au-delà de tout ce que l'on peut
pour
dire; j'exhorte d'en avoir. Ils font des choses si maladroitement
et si bêtement que je ne puis tOlljours y tenir. Il est vrai qu'il
est impossible de ne pas s'impatienter, et je crois même que
personne pourroit ~'en exempter. »

« Ne soyez donc pas trop bon; ne faites point de compa-
raison, et ne parlez à ces gens que sur ce qui est nécessaire et,

qui regarde leur ouvrage. Comme vous serez exact à leur ,
, payer le temps qu'ils emploieront outre les heures ordinaires,

soyez-le aussi à dimin uer cel ui qu'ils manqueron t. D

« Il faut aussy avoir l'attention de former de longue main
quelques mal1œuvres à d01.mer la couleur, à retoucher el
même à enfourner, parce que ceux qui occupent ces postes ne .
sont pa3 si fiers; à joindre que s'ils tombent mal~des ou qu'ils
vous les remplacerez aussitôt. L'enfourneur qu,i
meurent,
ordinairement est le coq, est plus sage. Ayez aussy d'usage, que
quand il vous manque un sujet dans un des premiers postes,
de le remplacer par celuy de vos gens que vous croirez plus
habile èt plus entendu, et faire ensùite monter les autres par

grade. C'est le moyen de n'être pas obligé d'en débaucher

ailleurs, eL cela donne de l'émulation. Il seroit li souhaiter que
tous les fabriquants suivent cet ordre; ~ais tous ne sont pas
au fait de former des sujets, la plupart ne se conduisant que
par les conseils ou d'un commis ou de manœuvres. 10 •

u Soyez rigide envers les ivrognes de telle classe qu'ils
soient, failés-leur des remontrances devant les autre~ ouvriers,
des reprimandes et des mortifications. Si après toutes ces
choses ils ne se corrigent pas, congediez-les. Mais aussy il faut
prêcher d'exemple. Soyez donc assidu dans votre maison,

surtout les lundy et lendemain de feste; ce sont jours où les
ouvriers ne sont pas en goût de travailler. Faites des rondes
d'appartements 'en appartements; cela les ~bUge du moins à
commencer et à se mettre en train pour le lendemain. C'est du

bien que vous leur faites, et à vous, p.arce que cela vous donne
des ouvrages d'avance. .

« Soyez aussy attentif à ne point souffrir des disputes entre
les ouvriers. Rendez-vous le maître de juger les discussions.
Je me suis imaginé un expédient qui s'est trouvé bon. Il a -
contenu dans une grande tl'anquillité tous les employés de la
manufacture. J'ai formé une juridiction en établissant en badi-

nant des juges, conseillers, etc. de ces mêmes ouvriers, lesquels
condamnent à une amende ceux qui contreviennent aux règle­
luents que j'ai donnés, qu'ils ont dans leur greffe, lesquels

défendent d'insulter ou injurier personne, el tendent à mainten .

le bon ordre. S'il arrive donc quelque difficulté entre eux,
soit pour outils gâtés ou pris, ouvrage mal partagés, paroles
. piquantes et toutes choses qui occasionnent infailliblement de

la dispute, et qu'une des parties ne se plaigne, le procureur
général est chargé de requérir. et on condamne ' l'agresseur à
une amende. Un autre avantage est que les peintres n'osent

badiner dans leurs chambres; je leur impose une amende. »

« Toutes ces amendes s'inscrivéut sur un registre et lorsqu'il
eux~ tout se paie, tout se juge en
arriveIquelque régal entre

dernier ressort par moi sur l'avis que je prends, et tel qui ne

voudroit pas en passer par là, seroit congédié à l'instant. Ainsi

chacun élant pris par la bourse, cela contient eu bon ordre. En

, badinant il s'est 'formé un usage qui tient force de loi; il en
résulte un grand bien, c'est qu'il n'y a plus de querelles, de
Jurements et même des batteries telles qu'on a vu autrefois

sans respect pour la manufacture et le maître. Lés ouvriers

plus unis et · s'entl'e aiment mieux; . voilà comme souvent
sont
on règle les hommes et on ' leu~ donne un joug en jouant avec
• eux (1). »

En 1771, Caussy maria sa fille aînée Marie-Elisabeth avec
Antoine de La Hubaudière (2). C'est à ce dernier qu'il laissa la
direct.ion de sa manufacture lorsqu'il mourut après une carrière
bien remplie, en 1782 (3) •

(t) A ces extraits, je crois devoir ajouter le suivant, qui est relatif
au choix des marchandises :.' .
« Il y a beaucoup de choix à faire dans cette marchandise; car des
de la même espèce sorties du même four, de la même cazette,
sera parfaite, l'autre point, et l'autre de rebut, ce qui met une
rande différence dans les prix. Ce qu'il faut faire, faut à la sortie du
our faire plusieurs lots, le premier de Plarchandise parfaite et loyale,
que l'on vend au plus haut pl'ix cQurant; le seeond qu'on vend vingt
par douzaine moins cher, sera le second choix; un traisième choix,
sols
à aussy vingt sols moins; un quatrième qui sera le beàu rebut, et enfin

le rebut.)1 Traité de l:art de la faïence, chap. XX.
(2) Ce mariage fut célébré à Locmaria, le 14 octobre 1771.

(3) C'est la date qu'assigne à' la mort de Caussy la « généalogie»
ciée plus haut page 51. Je dois déclarer que ce document renferme beau~

L'œuvre de Caussy a dû être cQnsidérable. Sans abandonne
le genre de Nevers et du midi de la France ·(I), il
entièrement
est probable qu'il s'appliqua d'una manière plus particulière à

la fabrieatio;l du genre'Rouen. C'est dans ce but qu'il.avait fait
venir àLocmaria des ouvriers R.ouennais. (2). Il dit lui-même dans
son memoire relatif à la porcelaine, rédigé en 1770, qu'on imi­
tait à Quimper la faïence de Rouen. On l'imitait si bien, qu'il
est fort difficile, de distinguer les produits des deux localités.
Aussi n'est·il pas surprenant que la presque totalité des ou­
vrages sortis de la manufacture de Quimper soit attribuée à
Rou en. Il est cependant qllelqu.f'3 pièces que l'on peut con·

sidérer avec certitude, dès à présen t, comme l'œuvre de
Caussy. ~e citerai, entre autres~ un charmant pot à surprise
de paysages en eamaïeu bleu, qui appartient à . Ile
décoré
Stéphanie de La Hubaudière, ' arrière-p.etite fille de Caussy; il
faut lui attribuer aussi un plat long à la corne, marqué des

initiales P. C. (3) qui fait partie de la collection de notre con-
frère M. Bahezre de Lanlay. Notre Musée archéologique.possède
. encore un plat polychrome authentique de la fabrique de

coup d'erreurs. Mes recherches me permettent d'ajouter que Caussy n'est ..
pas mort à Locmaria, quoiqu'au mois de décembre 1780il dirigeât encore
arrêt u ' Parlement de Bretagne 'que l'on trouvera à la tin de ce
d'un
travail. .
(1) Les noms de Louis Pasco et de Xavier Pilastry, quo je trouve
de Locmaria en 11 ~6 et en 1776, et qui sont tout à
dans les registres
fait étrangers au pays, peuvent faire supposer qu'il occupait quelquefois
M. Fougeray m'informe, en effet, que les vieux
des ouvriers italiens.

ouvriers de sa manufacture sc souviennent que l'on y employait autre­
fois des italiens, principalement comme mouleurs.
(2) Je relève la note suivante dans un des registres de la paroisse de
Locmaria: .
Il DuS novembre 1773, mariage de Jacques Bocheron, veuf de Marie
Josse, originaire de la 'paroisse de Saint-Sever, diocèse de Rouen, en
de Normandie, et domicilié depuis plusieurs années de cette
]a pro vinee
paroisse. avec Jeanne-Marie Sinic. » .
. (3) M. Jacquemart mentionne « un petit plat de forme italienne, à

décor sino-fl'ancais en bleu chatironné de manganèse Il qu'il attribue à
. Nevers et qui" pdl'te les - mêmes initiales P. C. ~-~ Merveilles de la
Cérumiqtte, Se pal'tiè; p. 145. - .

Quimper, orné de grotesques et qui porte avec le nom du
recteur de Locmaria, la date de 1773. Enfin, je n 'hésite pas
à regarder comme sortis de ses fourneaux, des plats ayant pour
décor principal un dragon, qu)l n'e~t .pas très-rare de rencon" ,
trer dans les environs de Quimper. Dans un inventaire des
marchandÎ3p.s existant à sa manufacture, en 1759, à la mort de
sa première femme, des assiettes ornées· de ce décor sont dési­
gnées sous le nom d'Assiettes au Basilic. On sait que Basilic

est un synonyme de Dragon. Il est hors de doute qu'une étude
attentive des faïences recueillies en Basse-Bretagne, ferait
un grand nombre ·de pièces qui pas~ent pour du
retrouver

Rouen, et qu'il faudrait restituer à Quimper. Les anciens
poncis que M. Fougeray conserve dans la manufacture qu'il
et à l'aide desquels il est {larvenu depuis quelques
dirige
à rétablir dans son usine l'ancienne fabrication, en
années
faisant usage des procédés contenus dans le manuscrit de
Pierre·Paul Caussy, seraient des guides précieux pour arriver à

cette restitution (1). .

(1) Comme plusîeurs de ces poneis portent des armoiries qui pour­
la manufacture
raient aidel' à retrouver certaines pièces fabriquées à
j'en donne ici la nomenclature. .
de Quimper,

t ° Un chevron accompagné de 3 trêfles, sur croix de St-Louis, avec
couronne de marquis. .
20 Une tête d'ange ailée accompagnée de 3 étoiles. Ecusson timbré
d'un casque de face, '
. 30 Deux écussons ovales accolés; le premier porte un sautoir; le se­
un casque de face; deux lions
cond est fascé de six pièces. Timbre,
contournés pour supports,
40 Ecusson ovale portant trois houx 2 et 1, soutenu par un lion.
50 Ecusson ovale portant un cœur surmonté d'une fasce chargée de
3 étoiles. Couronne de comte; deux lions pour supports. .
. 60 Ecusson ovaltl timbré d'un casque posé de face, soutenu par deux
sauvages, et portant 3 palmes de sinople en pal (Le Brbton.)
10 Ecusson ovale portant un lion rempant, timbré d'une couronne
comte; deux sauvages pour supports.
80 De gueules à-3 bandes d'or, au chef d'azur chargé d'un agneau
d'argent; écusson timbré d'une couronne de comte .
pascal

90 Ecusson ovale portéIDt un chevron aceompagné de 3 cœurs; tim­
bré d'une COUl'Onne de comte; deux cerfs pour supports. Devise: Tria
corda mi. si. sint. habeant musœ tria.
i {)o Ecusson ovale semé de quintefeuilles au franc canton de Bre -
timbré d'une couronne de comte et entouré du cordon de Sai

Antoine de LA HUBAUDIÈRE .

Né en 1144 dans la paroisse de Pacé, diocèse de Rennes, il
était à l'époque de son mariage avec la fille de Caussy, ingé­
nieur en second des ponts et chaussées de Bretagne, au dépar­
tem,ent de Quimper, et habitait dans cette ville la paroisse de
. Saint-Sauveur. Il était donc complètement étranger aux tra-

1 t Ecusson ovale au mouton passant, au chef chargé de 3 éperviers
posés en fasce; timbré d'un casque posé dè facd.

12" Même écusson avec une étoile eo chef à senestre.
13° Ecusson ovale; un chevron accompagné en chef de deux roses et
d'un cœur en pointe, au chef chargé. . ,
14 Ecartelé au 1 et 4 d'azUl' au sautoir d'or cantonné de of trèfles
d'argent; au 2 et 3 d'argent à 3 lézards de sinople, 2, 1, au lion léo-
pardé de gueules en chef; sur le tout d'argent au lion léopardé de
gueules; timbre d'une couronne de comt!! ; deux griffons pour supports.
- Ex libris Nic. Car. Delaunay. ,
15 Armoiries d'évêque. Ecusson ovale portant un sautoir, et
timbré d'une couronne ducale entre une mitre et une crosse tournée
à senestre. ' .

16 Ecusson ovale timbré d'une couronne de comte; un chevron ac­
compagné de trois lys.
1 t'7 Ecusson ovale timbré d'un casque taré de protn; un chevron
. accompagné de 3 couronnes ~ 4 fleurons.

t 8 Parti au t : 3 ' tours accompagnées de 8 ou 9 croix pommettées
en orle; au 2 : une fasce chargée d'un levrier passant accompagnée
de 3 mouchetures d'hermines; timbré d'un (~asque posé de trois quarts
et sommé d'une croix pommettée pour cimier.
19 Ecusson d'abbesse en losange, portant de gueules à 3 molettes
d'or; timbré d'une couronne ducale sommée d'une crossê tournée à

dextre. '
20 Deux écussons ovales accolés: 1 Trois têtes de Maures 2 et 1;

20 Un chevron accompagné de 3 roses. COUl'onne ducale. ' •
2 (0 Armoirie3 d'évêque; écusson au sautoÏt' engreslé, timbré d'une
couronne ducale entre une mitre et une crosse tournée à senestre~
22 Ecusson ovale timbré d'un casque taré de profil, portant 2 co­
quilles en ch0f ct un croissant montant en pointe, au chef chargé d'!lue
croix potencée accostée de deux roses .
. 230 Ecusson ovale timbré d'une couronne de comte et portant de
gueules à une fasce d'argent accompagnée de 3 losanges de même 2 en
chef et 1 en pointe, .
240 Ecusson portant gironné d'or et de vairé d'argent et de gueules
de huit pièces; timbré d'un casque taré de profil.
25. Ecartelé au 1 et 4: une bande; au 2 et 3, un chevron accom- ·
pagné de 2 griffons affrontés en chef et . d'une rose en pointe; timbré
d'une couronne ducale; deux aigles couronnés et contournés pour
supports .

vaux dont il devait? quelques années
pl us tard 1 prendre la .

direction.

Un peu avanl son administration, une nouvelle fabrique de
faïence avait été fondée à quelque distance de Quimpe." proba •
blement dans la paroisse d'Ergué-Armel, par Frl-\nç'ois Eloury,
son frère André en 1759, chez Caussy,
qui travaillait avec
COlnme tourneur en faïence (1). Cette manufacture qui existait

déjà en 1780, ainsi qu'on le verra par tIn titre qui figure comm"e

annexe à la suite de ce travail, né fut pas établie au bourg de

une vive opposition de la part de Caussy et de
Locmaria, sans
son 'associé Antoil~e de La Hubaudière. La corre~pondance

suivante n,ous donne sur cette affaire des détails circonstanciés.
« A M. "de .Bertrand, intendant de Bretagne.

« Paris, le 8 Juillet 1787.
(J ' Monsieur .

. • J'ai l'honneur âe vous envoyer une requête du sr De la
manufacture] de fayance et po­
• Hubaudière entrepreneur d'une
terie à Quimper par laquelle il demande qu'il soit fait défense
au sr Eloury d'établil' aucun nouveau fourneau pour faire de la
fayancerie autre que celui qu'il a construit pour de la poterie
à une dE\mi lieue de la dite ville de Quimper. Je crois devoir
vous faire observer que le sr De la . Hubaudi.ère 11 'a pas qualité

pour s'ùpposer à une augmentation de fourneau, mais que le
intéressé par rapport à la disette de bois en général
public est
dans le royaume à ce que le projet d'établissement du sr Eloury
, n'ail' pas.lieu,surtout si les bois sont aussi rares à Quimper que

le pretend le sr De la Hubaudière. Je vous prie de vous faire
informer de la vérité des faits et de m'envoyer vos observations

sur la demande de cet entrepreneur avec votre avis. » .
, « TOLOZAN »)

« Intendant du Commerce. )l
- (1) La famille Eloury habitait Locmaria au moins depuis les pre­
mières années du XVIIIe siècle. Le chef de cette famille exercait à
cette époque l'état de menuisier. La fabrique de faïence fondée par
François Elomy est _auJourd'hui dirigée par M. Porquier.

« Rennes, le 18 juillet, 1787'

Lettre par laquelle l'intendant Bertrand de Motteville. écrit à
M. Le Jubé, son subdélégué à Quimper, pour avoir son avis •

'.. fi BERTRAND"
« Intendant de Bretagne. l )

« AM. De Tolozan.

« Rennes, le .8 août .787.
«( Monsieur. .

« Il résulte des informations que j'ai prises :
« 1 0 Que . la manufacture du sr De la Hubaudière est très-
intéressante; qu'elle a acquis et acquiert chaque jour beau-
coup de perfection ; que sessgrès sont aussi beau~ que ceux de
Hollande, qu'on s'y occupe à exécuter en grand quelques es­

sais déjà faits avec succès, pour imiter les porcelaines d'Angle-
terre, et qu'enfin cette manufacture mérite faveur etprotec-
tion ;» -
« 2° Que jusqu'à ce jour le sr Eloury n'a formé d'autre en­
que celles de simples poteries, entreprise qui a eu assez
treprise
de succès pour lui procurer beaucoup d'aisance ; »
« Que les ·bois commencent à devenir très-rares à Quimper. -
soit parce que tous les gralld3 propriétaires comme ceux de
toute la province de Brelagne ont ahattu leurs futaies, soit parce
s: y fait une exportation considérable de bois pour Brest,
qu'il
Lorient, Nantes et Bordeaux, soit enfin parce que le lux-e a aug­
menté la consommation du bois, de sorte que permettre d'éta·
blir un second fourneau, c'est ouvrir un. nouveau gouffre pour

la consommation de celte d.enrée. » .

« On n'observe d'ailleurs que l'introduction des faïances an.-

glaises va faire tomber toules nos manufactures de ce genre,
attendu que ces fayances, dont toute la Bretagne est déjà inon· .
dée sont et plus belles et moins ' chères que les notres, de sorte
que le sr De la Hubaudière, qui aura désormais beaucoup de
peine à soutenir son établissement, le verrait. probablement

échouer au premier jour, si le sr Eloury entrait en concurrence .
avec lui,oJl plutot il parait certain que l'un et l'autre verraient
en peu de temps leurs manufactures et seraient forcés
tomber
dè les abandonner. » .
« Après ces considérations, je crois qu'il y a lieu de défen-

dre au sr Eloury d'établir aucun nouveau fourneau. JI

« BERTRAND. »

« A M. de' Bertrand.

" Paris, le 3 t août, t 188 .

« Monsieur.

. « Vous m'avez fait l'honneur de m'envoyer le 18 août de

l'année dernière votre avis sur la demande du sr De la Rubau-

dière entrepreneur de la, manufacture de fayance établie à

Quimper, tendant à obtenir l'exécution de l'arrêt du conseil de
de 1123 qui interdit la construction arbitraire des fournaux

- dans lesquels on consume du bois; qu'en conséquence défenses
soient faites au sr Eloury d'établir aucun nouveau fourneau,
autre que c"elui qu'il a construit ~n 1713.
« J'ai consulté également M. Deforges pour savoir s'il n'y
aurait pas d'inconvénient à permettre au sr Eloury d'établir Uli
nouveau fourneau par rapport à la consommation du bois. Il
me mande que rusine que le sr Eloury fait construire, n'est
qu~ le rétablissement d'un ancien fourneau qu'il avait démoli

et qu'il existe aux environs de Quimper une très grande quan­
tité de 'bois de la nature de ceux qui conviennent à ces sortes
d'usines. Il m'observe que le sr De la Rubaudière est d'aulant
plus mal fondé à s'opposer à l'établissement du. sr Eloury, qu'il
en contravention à l'arrêt du 9 août 1723, puis-
est lui-même
qu'il a ajoutA tout récemment sans permission quatre fourneaux

considérables à celui de fondation. En conséquence, bien loin
de rien voir qui puisse favoriser l'opposition du sr De la Hu-

baudière il croit avantageux de confi-rmer l'établissement du

sr Eloul'y. »
« Sur le compte que j'ai rendu de toute cette affaire à Messieurs
les Commissaires du bureau de commerce, ils ont décidé que
la demande du sr De la Huba udière n'était pas fondée, et que le
sr Eloury en faisant rét.ablir un fourneau qui éLait ancienne-

ment en activité, avait eu pour le moins autant de droit que le
sr De la Hubaudière de faire construire quatre nouveaux four-
neaux. Au surplus MM. les Commissaires ainsi que • le Con­
troleur général sont d'avis de favoriser le plus qu'il sera possi­
ble l'établissement des fourneaux pour la fabrication de la

fayance, pourvu que les ellotrepreneurs emploient du charbon de
terre. Ils croient qu'il serait à désirer que cette manière de

penser fut copnue dans la province, et ils m'ont ~en conséquence
chargé de vous prier de la rendre pub ique dans votre généra-
lité, et d'instruire en particulier le sr Eloury de la décision qui

le concerne. »
« TOLOZAN. »

« Rennes, le 5 septembrtl, 1188 .
« Donné avis par l'intendant de la décision ci-dessus
à· son

sub·d.élégué à Quimper. »

• fJ BERTRAND. »

Antoine de .La Hubaudière mourut en 1794. Ses héritiers
ont continué jusqu'à "nos jours à diriger sa fabrique. Mais avec
Pierre Caussy finit l'ère vrajment artistique de la manufacture
de faïence de Quimper. Après lui l'art fit place au métier et,
la concurrence aidant (1), on voulut faire vile /et à bon marché.
Il en résulta un oubli complet des traditions. Depuis quelques

(1) Outre la fabrique 'de François Eloury, une troisième manufacture
à la famille Tanqueray, aV3.it été établie à
qui appartient aujourd'hui
I..ocm!lria, vers la fin du dernier siècle, par le sieur Dumaine qui
explOItait auparavant une usine semblable à la Josserie, commune de
Ger, département de la Manche. .

années. une renaissanee de l'art de la terre cuite émaillée

semble promettre un nouveau lustre aux fabriques de Quimper.
Mais, tout en saluant celte ère nouvelle. et en souhaitant de
longues années de prospérité aux artistes et aux ouvriers qui
tentent courageusement de renouer la chaîne brisée de la

tradition, je n'essaierai pas, au moins pour le moment, de
porter un jugement sur leurs œuv/'es,
Dans les pages qui précèdent, j'ai voulu retracer l'histoire
à peine soupçonnée a Quim­
d'une industrie dont l'importance
per, est complètement ignorée au dehors. Si j'ai été long, c'est
qu'étant le premier historien de cette industrie, j'ai eu tout à
raconter. ' , ' .

Je crois avoir ,établi par mes recherches que Quimper fut
pour la faïence, pendant le XVIII siècle, le centre de fabrica- '
le plus considérable de toute la Bretagne, et que ce résul­
tion
tat doit être attribué aux intelligents directeurs de sa manufac­

ture. Il reste, ponr achevel' la tâche que je me suis imposée,
à restituer à cette ville les nombreux produits sortis de ses
fabriques, aujourd 'hui épars un , peu partout, et que l'on a
attribués jusqu 'id 3 EÙl W d à Nevers, à Moustiers ou à Ren­
nes (l). Une excellentl3 occasion se présente pour accomplir cet
acte de justice. C'est à Quimper que doit avoir lieu le concours

régional de 1876. Plusieurs mois nous séparent encore de cette
solennité. Que l'on fasse, Messieurs, en votre nom, un appel

aux possesseurs de faïences anciennes qui habitent le Einistère
et les départements voisins, et- il ' sera possible de réunir pour

(a) Voici un exemple, entre mille, de c;s attributions erronnées, Dans
les Merveilles de la Céramique, 3 partie, p. 134, M. Jacquemart consi •

dère comme sortie des fabriques de RenDes « une viergè avec l'ins­
cription : N. D. de Guelvain. » Or, la chapelle de N. D. de Guelvain
qui est parfaitement inconnue dans la haute Bret~gne, e~t située dans
la commune , d'Edern, à quatre lieues de Quimper, c·est-à-dire aux
portes d'une manufacture bién plus importante que r.elles de Rennes.
Est-il admissible que, dans ces ci l'constances, les faïenciers de cette
dernière ville aient eu quelque in~érêt il fabriquer des figurines qui
devaient être débitées dans un lieu de pélerinage très-éloigné, et qui n'a
jamais eu une gl'ande notoriété ? .

l'époque du concours un nombre suffisant de pièces sorties des ,
. fourneaux des faïenciers Quimpérois pour former, dans la

salle du Musée archéologique 0Ù se tiennent nos réunions, une
exposition qui offrirait, à coup sûr, un grand intér~t aux ama-
de céramique, de jour en jour plus · nombreux, et qui
teurs

permettrait peut-être de découvrir' les caractères distinctifs de
la faïence de Quimper à ses diverses époques (1). Je vous prie
donc, Messieurs, de prendre en considération le vœu que je
vous soumets, et de nommer dans votre sein une Commission
chargée de preparer les voies et moyens pour parvenir à sa
réalisation (2) .

(1) Depuis que ceci est écrit, j'ai l'eçu de M. Ed. Gal'l1i~r de la ma-
Sèvres, une lettre dont je me permets d'extraire les lignes
nufacture de
suivantes.
« Quant aux caractères distinctifs, il en existe certainement. Outre
tournure particulière du décor, m(me
ceux que demontrent l'émail et une
dans les pièces très-simples, il y a une certaine qualité de manganè8e
et de rouge (mais surtout de manganèse) . qui est propre à Quimper, et
qui seul suffirait A faire reconnaître les pièces de cette fabrique. C'est _
chez moi une conviction que je vous ferai partager, si, co,nme je l'es­
père, je puis aller à Quimper, lors de votre exposition. »
(2) Voir à la fin de ce bulletin les documents annexes .
Depuis que ces lignes ont été livrées à );impression, j'ai remarqué
parmi les signatures indéterminées dont M. Jacquemart a donné une

liste à la page 15n de la troisieme partie des Merveilles de la Céra­
mique, un chiffre qui se trouve au bas de la page t61 de cet excellent
et qui est certainement le chiffre de Jean-Baptiste Bousquet.
ouvrage,

Il se compose de trois lettres liées: un J. un B, et une sorte d'anneau
ilutre chose que la boucle inférieure d'un st:\cond B dont la
qui n'est
bOUGIe supél'Îeure se confond av~c celle du premier. La ressemblance
chiffre et les deux premières lettres de la
frappante qui existe entre ce
sigpature de ce faîencier dans les registres de la aroisse de Locmaria.
peut laisser aucun dotlte à l'égard de l'ex(lctitu e de cette attribution.

M. Jacquemart a relevé cette signature sur des « assiettes en pâte
rouge et Jourde à décor de fleurs dans le style de Rennes, mais avec
du rouge de fer vif. » _
Il résulte de ce fait que Jean-Baptiste 'Bousquet pratiquait le
On peut se rendre compte de cette circonstance
décor polychrôme.
rapports commerciaux qui existaient entre la Bretagne et l'Es­
par les
pagne. J'ajouterai que quand on réfléchit au· peu de relations directes
à cette époque entre la Bretagne et la Provence, on se
• qu'il y avait
lll;isse aisément aller à l'hypothèse que, Bousquet, au lieu de venir
~larseiJJe il Quimper, s'etait d'abord établi 1
dIrectement des environs de
en Espagne, d'où il ·lui Rvait été fadle de gagner la Bretagne. Plus d·une .

A la suite de cette lecture à. laquelle l'assemblée

prend le plus vif intérêt, et conformément au vœu ex-
primé par l'auteur, la réunion décide qu'une exposi­
tion de céramique aura lieu à Quimper, dans une des
. salles du ·musée archéologique, pendant la durée du

concours régional de 1876. Elle nomme à cet effet une
commission composée de MM. Le Men, Ayrault et de

Montifault,. chargée de prendre les mesures nécessai­
à la réalisation de ce projet. Elle
res pour parvenir
décide en outre que cette çommission pourra s'adjoin-
dre un certain nombre de membres pris en dehors de
la société. M. Ayrault, en acceptant la mission qui lui
est confiée, informe l'assemblée qu'il a recueilli dans
la Loire-Inférieure cinq assièttes en faïence ancienne, '

au musée départemental d'ar­
dont il fait hommage
chéologie.
M. "Audran faisant ,allusion à un passage du. travail
de M. Le Men, dit qu'il ne pense pas que MM. Lalan
et du Chesnay en fondant la faïencerie de Quimperlé,

bonne raison, qui ne sauraient trouver plaee dans les étroites limites
d'une note, militent en faveur de cette supposition.
Outre la signature de Jean-Baptiste Bousquet, je remarque dans la
même liste de signes, Jes' chiffres C B et P B L, qui pourraient être les
de Charles Bousquet et de Pierre Bellevaux. '
signatures
Ces observations me portent à me demander si le chiffre LO, que

·l'on rencontre si fréquemment sur des faïences à décor méridional, et
qui me paraît indiquer une localité, ne serait pas les deux premières
lettres du mot LOCMARIA; car il est bon de faire observer que la Manu­
facture de Quimper a toujours été et est encore aujourd'hui désignée
- dans le pays sous le nom de Manufacture de LOCMAlUA ou de LOl\URIA.
Quant aux époq'Jes d'introduction et à la durée des différents styles
qui ont été en usage dans cette manufacture~ on peut les établir de la
manièl'e suivante : .
1 Style méridional (Jean-Baptiste, Pierre, et Charles Bousquet), de

2 Style méridional et Nevers (Pierre ' Bousquet et Pierre Bellevaux,

1730 à t75O .

3 Style méridional, Nevers et Rouen (Piel're-Clément Caussy ct
Antoine de La Hubaudit'l'e), de 1750 à 1794. ' .

aient eu en vue un intérêt précuniaire personnel, mais
que ces MM. qui appartenaient l'un et l'autre à des
à doter
familles très-honorables, ont surtout cherché
Quimperlé d'une industr~e qui pouvait procurer à cette
ville quelques avantages.
M. le président invite ensuite M. de Montifaù!t à
lire le rapport qu'il a rédigé sur la fouille. faite dans
la commune de Melgven par quelques membres de la
société.

M. de Montifault s'exprime ainsi :

FOUILLES ' D'UNE . ALLEE COUVERTE

A MÉNEZ-GUEN EN MELGVEN.

M. F. Dufeigna m:'avait signalé? il y a quelque temps, des tu­
mulus et d'autres monuments celtiques existant. sur ses pro- .
prié tés de Coat-Canton, sur les terres de Mlle de Kerbiquet, sa

tante, et ùans un bois, nommé Coat Ménez-Guen, situé dans la
commune de Melgven? appartenant à Mme Dufeigna.
Je me suis rendu avec lui sur les points indiqués, et j'ai pu
reconnaître q\le les différents tumulus étaient des mottes féo­
dales dont la fouille ne semblait offrir aucun intérêt.
Dans le bois de Coat Ménez-Guen? j'ai relevé, un monument
une fort belle allée cou~
d'une importance incontestable; c'est
verte qui paraissait au premier aspect devoir donner? à la suite

de fouilles? deR résultats assez importants .
Ce monument est appelé dans le pays Ty-Corriganet,. il est
à la limite sud-est de la commune de Melgven? sur la rive
situé
droite de l'Aven, dans la partie basse, au pied d'.un coteau es­
carpé sur la lisière d'un épais bois taillis dont les souches sont

forl anciennes (1). . . .

(1) ' • de Frétninville a signalé d'une manière très-inexacte ce monu-
ment dans son 2e volume des Antiquités du Finistère, page 154. '